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difficultés respiratoires

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VieAutonome<br />

5<br />

La prise en charge des<br />

difficultés <strong>respiratoires</strong><br />

chez le tétraplégique<br />

Les déficits musculaires<br />

liés à l’atteinte médullaire<br />

empêchent une bonne<br />

ventilation. Chez une personne<br />

tétraplégique, cette gêne<br />

respiratoire nécessite une<br />

attention permanente sous<br />

peine, parfois, d’être mortelle.<br />

Le point central de la prise en<br />

charge est la kinésithérapie,<br />

les traitements médicamenteux<br />

ayant une efficacité limitée.<br />

xxxxxxxxx<br />

L<br />

es difficultés <strong>respiratoires</strong><br />

peuvent représenter<br />

un problème<br />

majeur pour les personnes<br />

tétraplégiques. « Les dysfonctionnements<br />

neurologiques causés<br />

par une lésion médullaire entraînent<br />

des déficits musculaires,<br />

explique Joanna Rome, spécialiste<br />

en médecine physique et de<br />

réadaptation au CHU de Nantes<br />

(Loire-Atlantique). Lorsque<br />

les muscles impliqués dans la<br />

respiration sont touchés, comme<br />

le diaphragme ou les muscles<br />

expirateurs, cela a pour conséquence<br />

d’empêcher la bonne<br />

ventilation du patient. En cas<br />

d’atteinte sévère, cela constitue<br />

une insuffisance respiratoire. »<br />

Bien sûr, il existe divers degrés<br />

à cette insuffisance, qui sont<br />

fonction du niveau de la lésion<br />

médullaire. « Les lésions cervicales<br />

hautes (C3-C4-C5) provoqueront<br />

une atteinte diaphragmatique<br />

et donc une atteinte de l’inspiration,<br />

détaille Joanna Rome. Si<br />

elle est totale, elle implique une<br />

dépendance complète envers un<br />

respirateur. Les lésions cervicales<br />

basses et thoraciques touchent<br />

plutôt l’expiration active et donc<br />

...<br />

les possibilités de toux par<br />

n°7 • SupplÉment AU N°673 • mars 2009


6<br />

VieAutonome<br />

...<br />

atteinte des muscles intercostaux<br />

et abdominaux. »<br />

Néanmoins et parallèlement,<br />

tous les patients connaissent<br />

une diminution de la compliance<br />

thoracique, c’est-à-dire une perte<br />

de souplesse. La capacité de la<br />

cage thoracique à se distendre<br />

pour permettre des mouvements<br />

<strong>respiratoires</strong> amples s’amoindrit<br />

et, par conséquent, les volumes<br />

inspirés et expirés diminuent.<br />

Quel que soit le symptôme,<br />

que l’insuffisance atteigne la<br />

fonction inspiratoire ou expiratoire,<br />

il est donc important<br />

de la traiter. « L’insuffisance<br />

respiratoire aiguë représente<br />

une des causes principales de<br />

décès chez les tétraplégiques,<br />

prévient Joanna Rome. Ce sont<br />

les épisodes d’encombrement<br />

trachéo-bronchique qui sont à<br />

l’origine de ces décompensations<br />

parfois létales. Et chez le tétraplégique,<br />

leur survenue est fréquente<br />

car les difficultés d’expectoration,<br />

conjuguées à la diminution de la<br />

mobilité du patient, peuvent à tout<br />

moment entraîner l’obstruction<br />

des bronches. » Dès lors, pas<br />

d’hésitation : « Il faut hospitaliser<br />

dans les meilleurs délais<br />

un blessé médullaire présentant<br />

une gêne respiratoire importante.<br />

Il bénéficiera ainsi d’une<br />

prise en charge adaptée et d’une<br />

surveillance clinique rapprochée.<br />

Et dans les cas gravissimes, il n’y<br />

a qu’en milieu hospitalier que<br />

des gestes médicaux comme la<br />

fibroaspiration (évacuation des<br />

secrétions) ou, plus exceptionnellement,<br />

l’intubation endotrachéale<br />

pourront être pratiqués. »<br />

Heureusement, toutes les<br />

insuffisances <strong>respiratoires</strong> ne<br />

débouchent pas sur de telles<br />

La stimulation phrénique<br />

La stimulation phrénique vise à restaurer une ventilation “naturelle” en provoquant des<br />

contractions diaphragmatiques par excitation des nerfs qui les commandent, les nerfs phréniques.<br />

Pour générer les stimuli, des électrodes sont implantées sur les nerfs ou directement dans le<br />

muscle (stimulation diaphragmatique). Cette technique concerne les personnes tétraplégiques<br />

sans autonomie respiratoire et répondant à des critères neurologiques précis évalués par l’équipe<br />

de neurochirurgie. Le succès de l’intervention transforme radicalement la vie de la personne et<br />

celle de son entourage, famille et soignants. C’est la fin de la dépendance, de la nécessité d’un<br />

lien permanent à une machine extérieure. Les déplacements sont grandement facilités. Outre<br />

l’aspect pratique, le bénéfice est aussi psychologique : terminée l’angoisse de la panne ou du<br />

débranchement accidentel du respirateur. La stimulation phrénique représente aussi un élément<br />

déterminant dans le retour au domicile et l’insertion sociale.<br />

conséquences. Au quotidien,<br />

leur prise en charge thérapeutique<br />

passe principalement par<br />

la kinésithérapie respiratoire<br />

(voir interview), d’autant que<br />

les traitements médicamenteux<br />

s’avèrent peu efficients.<br />

Son principe « Il s’agit de séries<br />

d’exercices ayant pour but de<br />

maintenir, voire d’améliorer, les<br />

capacités d’inspiration et d’expiration<br />

du patient, poursuit le<br />

Dr Rome. Le travail varie selon<br />

la nature des déficits, mais globalement,<br />

il consiste à renforcer les<br />

xxxxxxxxx<br />

muscles partiellement atteints et<br />

à entretenir la “souplesse” de la<br />

cage thoracique. Lorsque l’expectoration<br />

est défaillante, l’emploi<br />

d’une kinésithérapie de drainage<br />

bronchique permet aussi de lutter<br />

contre la survenue de complications<br />

aiguës liées à l’encombrement<br />

broncho pulmonaire. »<br />

Rien de tel, pour éviter ces<br />

complications, que d’être<br />

correctement et régulièrement<br />

suivi : « En tant que spécialiste,<br />

estime le Dr Rome, je conseille à<br />

toute personne souffrant de tétra-<br />

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7<br />

plégie d’avoir un suivi médical<br />

spécialisé régulier comprenant un<br />

bilan respiratoire annuel complet<br />

(par spirométrie ou bilan gazeux<br />

artériel). Les mesures des volumes<br />

et des pressions inspiratoires et<br />

expiratoires permettront ainsi de<br />

détecter toute altération de la<br />

ventilation. » Et de compléter par<br />

une bonne nouvelle : « J’observe<br />

une modification sensible des<br />

réflexes du corps médical dans<br />

ce sens. L’incidence vitale de<br />

ce trouble est mieux évaluée<br />

et l’indication d’une ventilation<br />

assistée est, par exemple, plus<br />

facilement envisagée. Ce qui<br />

permet de sauver des vies. »<br />

Hélas, dans ce domaine, les<br />

techniques, elles, évoluent peu :<br />

« Il n’y a pas d’avancée majeure à<br />

souligner, déplore Joanna Rome.<br />

Ce que j’observe à titre personnel,<br />

c’est la réintroduction des aides<br />

instrumentales, un temps délaissées.<br />

Les ventilateurs de pression<br />

jouent un rôle plus actif dans les<br />

soins car ils sont devenus très<br />

Texte Olivier<br />

Clot-Faybesse<br />

Photos xxxx<br />

efficaces dans le désencombrement<br />

trachéo-bronchique. Par<br />

exemple, l’insufflation d’air pulsé<br />

par l’appareil de type “percutionnaire”<br />

permet de décoller<br />

les sécrétions distales alors que<br />

le “cough-assist” supplée à une<br />

toux défaillante. L’utilisation de<br />

ces instruments, combinée aux<br />

techniques manuelles, lutte<br />

efficacement contre l’obstruction<br />

bronchique. » Et rend donc la vie<br />

plus facile aux personnes insuffisantes<br />

<strong>respiratoires</strong>… l<br />

Interview : Céline Bernardini, Kinésithérapeute *<br />

Faire Face : Comment se pratique la kinésithérapie<br />

respiratoire <br />

Cécile Bernardini : Il s’agit d’un travail nécessitant une participation<br />

active de la part du kinésithérapeute : mobilisation, massage,<br />

maintien postural… Pour moi, il y a deux aspects complémentaires<br />

dans le traitement des difficultés <strong>respiratoires</strong> du tétraplégique :<br />

un volet thérapeutique, dont les exercices ont pour but d’aider à<br />

l’évacuation des sécrétions bronchiques et une kinésithérapie que<br />

je qualifierais d’entretien.<br />

FF : C’est-à-dire <br />

CB : S’entretenir signifie travailler en amont pour prévenir, ou au<br />

moins diminuer, le risque de complications. Il faut lutter contre l’insuffisance<br />

respiratoire par des exercices pratiqués régulièrement avec<br />

son kinésithérapeute et non pas seulement lorsque survient un épisode<br />

d’encombrement broncho-pulmonaire. Un point très important<br />

à cet égard est le maintien de la souplesse de la cage thoracique.<br />

FF : Pourquoi <br />

CB : La respiration est contrôlée en grande partie par l’action du<br />

diaphragme mais aussi par les muscles intercostaux, les abdominaux<br />

ainsi que d’autres muscles dits accessoires. Donc dès qu’un<br />

déficit moteur touche un faisceau musculaire, quel qu’il soit, cela va<br />

avoir une incidence négative sur la stabilité et la mobilité de la cage<br />

thoracique.<br />

FF : Comment dès lors maintenir la souplesse si précieuse de<br />

cette cage thoracique <br />

CB : Les programmes sont basés sur des massages, des assouplissements<br />

manuels et des exercices dynamiques sollicitant la cage<br />

thoracique. Entretenir la mobilité rachidienne ainsi que les articulations<br />

scapulo-humérales et thoraciques contribue, en conjonction<br />

avec un renforcement musculaire, à limiter la baisse d’ampliation<br />

thoracique ** et à faciliter la ventilation.<br />

FF : Et comment effectuer un drainage bronchique <br />

CB : Notre rôle consiste ici à aider la personne à évacuer les sécrétions<br />

de ses bronches. Par exemple, on peut pallier le déficit expiratoire<br />

en effectuant des pressions sur la cage thoracique ou la<br />

paroi abdominale. Il existe un ensemble complet de techniques qui,<br />

si elles sont bien indiquées et correctement réalisées, donnent de<br />

bons résultats : expiration active, accélération du flux expiratoire,<br />

posture de drainage, etc.<br />

FF : Existe-t-il des exercices qu’une personne insuffisante<br />

respiratoire peut pratiquer seule <br />

CB : Il y en a même qui dépendent entièrement d’elle. S’entraîner<br />

régulièrement à respirer avec les lèvres pincées ou à travers l’orifice<br />

d’une sarbacane permet de solliciter les muscles accessoires et de<br />

majorer le volume respiratoire total. Et puis, le mental est important<br />

dans la répétition des efforts. Mais le kinésithérapeute peut là aussi<br />

jouer un rôle en motivant la personne à entretenir ses capacités pulmonaires.<br />

C’est important car un travail d’entretien régulier contribue<br />

à prévenir les complications graves.<br />

Propos recueillis par O.CF<br />

* Elle pratique au Centre de rééducation Phocéa de Marseille (Bouches-du-Rhône).<br />

** Augmentation du volume thoracique pendant l’inspiration.<br />

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