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16 LIVRES<br />
20 MINUTES COMMUNICATION<br />
RÉCOMPENSE L’auteur de « En ville » remporte le prix roman des espaces culturels E. Leclerc<br />
CHRISTIAN OSTER, ROI DE LANDERNEAU<br />
HUBERT ARTUS<br />
Christian Oster, pour En ville, et<br />
Alexandre Postel, avec<br />
Un homme effacé, sont les<br />
sixièmes lauréats du prix Landerneau.<br />
Les deux écrivains succèdent à Maylis<br />
de Kerangal et Antoine Laurain, récompensés<br />
l’an dernier.<br />
Créé en 2008 par les espaces culturels<br />
E. Leclerc, les prix Landerneau distinguent<br />
chaque année des auteurs dont le<br />
talent mérite d’être reconnu par un<br />
« Oster réussit le<br />
tour de force de nous<br />
passionner grâce à sa<br />
qualité d’écriture. »<br />
Laure Adler<br />
large public. Plusieurs catégories<br />
coexistent, dont le Landerneau roman,<br />
remis cette année à Christian Oster, et<br />
son équivalent découverte, à Alexandre<br />
Postel, sont les plus anciennes. L’objectif,<br />
comme expliqué par le groupe E. Leclerc,<br />
est de récompenser « d’une part<br />
un récit dont le sujet et le style sont à<br />
même de rassembler le plus grand<br />
nombre autour du plaisir de la lecture »<br />
et, d’autre part, « l’ouvrage d’un auteur<br />
peu connu du grand public qui se distingue<br />
par son talent et la singularité de<br />
son écriture ». Chacun des deux lauréats<br />
reçoit 6 000 €, en sus d’une campagne<br />
de publicité offerte par les espaces<br />
culturels E. Leclerc.<br />
Viennent ensuite les petits <strong>fr</strong>ères, des<br />
prix thématiques déclinés sur le même<br />
« J’essaie d’écrire de façon visuelle, palpable »<br />
Votre roman précédent, Rouler,<br />
était un road-movie. Dans En ville,<br />
le mouvement est à l’inverse<br />
immobile. Est-ce voulu <br />
Effectivement, je projette toujours un<br />
roman par contraste au précédent. Pour<br />
la première fois de ma vie, j’ai décidé<br />
d’écrire un roman géographiquement<br />
immobile. L’autre contre-pied, c’est que<br />
Rouler avait une écriture en extérieur,<br />
qui ne disait rien des pensées du narrateur,<br />
alors qu’ici je me suis laissé<br />
toute liberté pour un soliloque. J’ai<br />
voulu compenser l’immobilité géographique<br />
par une mobilité scénaristique<br />
assez marquée.<br />
L’écriture en extérieur que vous<br />
évoquez, c’est une influence héritée<br />
PATRICE NORMAND<br />
Christian Oster a reçu le prix Médicis en 1999 pour Mon grand appartement, paru aux Editions de Minuit.<br />
principe tout au long de l’année : le Landerneau<br />
polar en mai suivi de celui de<br />
la bande dessinée un peu plus tard en<br />
novembre. Le prochain, le Landerneau<br />
jeunesse, sera quant à lui remis pour la<br />
première fois à l’automne 2013.<br />
Placé sous la présidence de Laure Adler,<br />
le jury était composé de huit libraires des<br />
espaces culturels de l’Hexagone ainsi<br />
que du directeur du groupe, Michel-<br />
Edouard Leclerc lui-même. Huit romans<br />
du polar, genre par lequel vous<br />
avez débuté en 1984 <br />
C’est vrai, j’ai commencé en pensant<br />
avant tout à l’histoire. Le scénario est<br />
toujours le travail essentiel pour moi.<br />
L’écriture vient ensuite. Quand je pense<br />
« Le scénario est<br />
toujours le travail<br />
essentiel. L’écriture<br />
vient ensuite. »<br />
qu’on dit que dans mes livres il ne se<br />
passe pas grand-chose… Pour moi, il<br />
se passe beaucoup de choses. Surtout<br />
dans celui-ci ! J’essaie d’écrire de façon<br />
visuelle, palpable, pour qu’on soit toujours<br />
dans le concret.<br />
de la rentrée de janvier étaient en compétition.<br />
Christian Oster l’a emporté, se<br />
rappelle la présidente, juste devant Yasmina<br />
Reza, avec Heureux les heureux (éd.<br />
Flammarion). Ce qui a convaincu les<br />
jurés « Passer du temps à lire une histoire<br />
de quinquagénaires qui parlent de<br />
leurs vacances, et qui vont finalement<br />
rester sur place, ce n’est pas forcément<br />
une perspective alléchante. Mais Oster,<br />
par une très grande qualité d’écriture,<br />
Une fois que vos personnages<br />
ont pris vie, comment s’articule<br />
la suite de votre travail <br />
Je crois beaucoup à la chronologie, qui<br />
est pour moi un repère très rassurant.<br />
Elle me permet d’écrire sans complètement<br />
perdre pied. Je suis les personnages<br />
dans le temps, puis l’évolution de<br />
leurs trajectoires produit des événements,<br />
des surprises. Par exemple, à un<br />
moment un des personnages apprend<br />
que la fille avec qui il couche est enceinte.<br />
En écrivant la ligne précédente du dialogue,<br />
jamais je n’aurais cru lui faire dire<br />
ça. Je n’avais pas envie de parler d’une<br />
femme enceinte d’un homme de 59 ans.<br />
Mais c’était quand même intéressant,<br />
car peu évident à traiter. Je me suis donc<br />
provoqué moi-même… W<br />
réussit le tour de force de nous passionner<br />
», témoigne Laure Adler.<br />
Auteur depuis près de trente ans, Christian<br />
Oster connaît un succès critique et<br />
public avec Mon grand appartement,<br />
salué en 1999 du prix Médicis, puis Une<br />
femme de ménage, adapté sur grand<br />
écran par Claude Berri. Avec le Landerneau,<br />
il ajoute un nouveau trophée d’envergure<br />
à un palmarès qui ne l’est pas<br />
moins. W<br />
W « EN VILLE », EN COURT<br />
En ville, c’est l’histoire de cinq<br />
amis parisiens, qui ont l’habitude<br />
de partir en vacances ensemble.<br />
Cinq quinquas, célibataires ou en<br />
couple, au bord de la rupture ou<br />
du renouveau. Au cours du dîner<br />
qui ouvre le roman, ils<br />
décideront de leur destination :<br />
Grèce ou Corse Sauf que,<br />
comme toujours chez Christian<br />
Oster, le grain de sable, en<br />
l’occurrence un drame, vient<br />
gripper la mécanique et priver<br />
tout le monde de mer. Un séjour<br />
forcé en ville, donc, et le roman<br />
de devenir un portrait laconique,<br />
hyperréaliste et nourri d’humour<br />
noir.<br />
Editions de l’Olivier,177p., 18 €.