Parution 3 - L'Intérêt
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www.interet-hec.com<br />
9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 vOLUME 53, NUMERO 03<br />
Une stripteaseuse et le gérant<br />
d’un bar se dévoilent P.4<br />
Il saupoudre sa vie de cocaïne P.5<br />
Du sexe version<br />
Carlos Fuentes P.5<br />
Production de drogue :<br />
maudits soient les pauvres P.6<br />
Sondage rue Ste-Catherine<br />
sur les bars érotiques P.6<br />
Le rapatriement de la culture<br />
au Québec P.7<br />
Partis politiques<br />
et enjeux économiques P.8<br />
Charest va de l’avant P.8<br />
Retour sur la Chine et ses JO P.9<br />
États-Unis et Russie P.11
VIE ÉTUDIANTE//<br />
Discours<br />
de couloir<br />
Un étudiant fait éclater une vitre avec<br />
une poubelle<br />
HEC Montréal, 25 septembre – HEC a eu chaud lorsque, jeudi<br />
dernier, un étudiant quelque peu aviné a violemment frappé une<br />
poubelle du pied. « Le 4 à 7 déjà bien animé s’est transformé en<br />
véritable cataclysme », déclare une étudiante innocente encore<br />
choquée par la scène. D’après les dires de la sécurité, la poubelle<br />
aurait fini sa trajectoire dans une des vitrines du couloir menant<br />
au salon L’Oréal, faisant voler le verre en éclats. Heureusement, la<br />
sécurité serait intervenue pour remettre de l’ordre dans la soirée<br />
et éloigner ledit chenapan. Mais elle reste très discrète quant à<br />
la suite des évènements. Subterfuge ou non ? Il faut préciser que<br />
la vitrine renfermait les précieux ordinateurs Virtuose des années<br />
90. Par mesure de sécurité, HEC a préféré mettre ses précieuses<br />
reliques en lieu sûr (nous n’avons pu connaître l’endroit).<br />
La lutte des classes !<br />
L’Intérêt a su éveiller le sentiment d’appartenance parmi les trilingues.<br />
Après s’être vu attribuer le surnom de « no-life » dans l’article de<br />
L’œil de lynx de Justine Tremblay, les voilà qui se sont rebellés en<br />
masse pour crier au scandale. « Nous sommes des étudiants en<br />
tout point comparables aux cohortes normales, déclare Alexandra,<br />
une des étudiantes de la cohorte. Je ne comprends vraiment pas<br />
d’où nous vient cette réputation. Peut-être de la jalousie ? C’est<br />
évident que lorsqu’on a des cours dans des langues différentes, cela<br />
nécessite peut-être plus de travail. Mais nous savons aussi bien<br />
nous amuser, alors arrêtez un peu de nous prendre pour des rats de<br />
bibliothèque ! » C’est clair, là, vous avez compris ?<br />
Facebook pour la direction<br />
La direction se met à Facebook : vous n’avez plus qu’à ajouter<br />
Fédérico Pasin et Danielle Lauzon ! On peut apprendre que notre<br />
directeur du BAA rêverait de voir Montréal sur le Monopoly. La<br />
présence de Pasin sur Facebook traduit son désir d’être proche de<br />
ses élèves. N’attendez plus, faites-vous un ami dans les hautes<br />
sphères de HEC !<br />
0 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03<br />
Les nouvelles destinations d’échanges !<br />
L’Intérêt a eu vent de nouvelles destinations d’échanges du BAEI<br />
pour l’année qui vient. Les partenariats ne sont pas tout à fait<br />
officialisés. L’information sera rendue publique aux environs de<br />
novembre, mais voici quelques scoops pour les impatients :<br />
- Queensland University of Science and technology, Australie<br />
- Bangkok, Thaïlande<br />
- Amsterdam, Pays-Bas<br />
- Shanghaï, nouveau partenariat, Chine<br />
- Barcelone, Université de Toulouse, Espagne<br />
« HEChange, on s’mélange », et c’est vrai !<br />
Les étudiants actuellement en échange entre nos murs sont<br />
très actifs dès qu’ils en sortent. De toutes les soirées, il est très<br />
difficile, voire impossible, de ne pas se retrouver nez à nez sur<br />
deux d’entre eux bouche contre bouche. Mais loins d’être avares,<br />
ils « s’HEChange » les uns les autres. Peut-être la faute revient-elle<br />
seule à l’affluence au Campus, les mardis soir, ou au Seven, les<br />
jeudis, qui les obligerait à une telle proximité. On espère juste pour<br />
eux qu’aucun virus de mononucléose ne court, ou sinon ce n’est<br />
pas notre froid hivernal mais bien la maladie du bisou qui clouera<br />
tous nos invités au lit.<br />
La culture québécoise en sons,<br />
en saveurs et en couleurs<br />
Tarte au sucre, tarte aux pommes, poutine et pâté chinois<br />
garnissaient les tables du Salon L’Oréal le vendredi 3 octobre.<br />
Au son d’une musique traditionnelle québécoise, des étudiants<br />
étrangers pouvaient revêtir des costumes traditionnels québécois<br />
le temps d’une photo. Des sportifs jouaient au hockey sur la<br />
terrasse. Bravo aux ambassadeurs de la culture québécoise ! Reste<br />
plus qu’à leur apprendre à sacrer…<br />
SOMMAIRE<br />
LE SEXE ET LA DROGUE<br />
-Une stripteaseuse et le gérant d’un bar<br />
se dévoilent p.04<br />
-Il saupoudre sa vie de cocaïne p.05<br />
-Du sexe version Carlos Fuentes p.05<br />
-Production de drogue : maudits soient les pauvres p.06<br />
-Sondage rue Ste-Catherine sur les bars érotiques p.06<br />
POLITIQUE<br />
-Le rapatriement de la culture au Québec p.07<br />
-Partis politiques et enjeux économiques p.08<br />
-Charest va de l’avant p.08<br />
-Retour sur la Chine et ses JO p.09<br />
-États-Unis et Russie p.11<br />
AFFAIRES<br />
-La valse des banques américaines p.12<br />
-Portrait du fondateur des Têtes à claques p.13<br />
-Entrevue : de pigiste à rédactrice en chef p.14<br />
CHRONIQUES<br />
-Les 100 ans du CH | Discours du fan p.15<br />
-Espaces communs et huis clos p.16<br />
-Le père de famille p.17<br />
-Automobile | Mode p.18<br />
-Séduction 101 : version féminine p.19<br />
CRÉDITS<br />
Journal L’Intérêt<br />
HEC Montréal<br />
3000, chemin de la Côte-Sainte-Catherine, Local RJ-718<br />
Montréal, (Québec), H3T 2A7<br />
tél. : 514 340-6105<br />
téléc. : 514 340-6721<br />
Directeur : Mark Lafrance-Fugère<br />
Rédacteur en chef : Caroline Pailliez<br />
Rédactrice en chef – Site web : Caroline Pailliez<br />
Chef de pupitre-International : Julien Dubout<br />
Chef de pupitre-Politique : Marc Daoust<br />
Président : Francis Dumais<br />
VP interne : Cléophée Demoustier<br />
VP promotion : Grégoire Massy<br />
Trésorière : Dominique Carrié<br />
Correcteurs : Mark Lafrance-Fugère, Cyprien Grau<br />
Caricaturiste : Étienne Jensen-Fontaine<br />
Journalistes : Laëtitia Baraer, Gaspard Missoffe, Diane Durand,<br />
Julien Dubout, Marc Daoust, Emmanuel Darmon, Jean-Philippe Gagnon,<br />
Antoine Nivard, Margaux Delattre, Hugo Braën, Adrien Delanoë,<br />
Étienne Pomerleau-Landry, Léna Le Gall-Diop, Marine Parré<br />
Chroniqueurs : Karl Villeneuve, Jean Trudel, Alain Badolato,<br />
Jean-Raphaël Gosselin, Vicki Marcoux, Edda Pizzati, Camille Nantois,<br />
Mylène Girard<br />
Graphiste : Marie-Ève Bissonnette C.<br />
Imprimeur : Hebdo Litho<br />
Agent publicitaire : Accès Média<br />
Distributeur : RC Graphic<br />
Rédaction : redaction.interet@hec.ca<br />
L’Intérêt est le journal des étudiants de HEC Montréal et il est publié<br />
par l’AEHEC. Il est membre des Presses canadiennes universitaires et du<br />
University-Wire.<br />
Le contenu de ce journal est indépendant de la direction de HEC Montréal<br />
et des associations étudiantes. Les textes n’engagent que l’auteur et ne<br />
reflètent en aucun cas l’opinion de l’École, de l’AEHEC ou des autres<br />
collaborateurs du Journal. Le matériel contenu dans L’Intérêt peut être<br />
reproduit avec mention de la source.
VIE ÉTUDIANTE//<br />
COCKTAIL 101<br />
Un pour tous<br />
et tous pour un !<br />
Diane Durand<br />
dianouchka.durand@gmail.com<br />
Le mercredi 1 er octobre à 19 h, nous étions 350<br />
étudiants de HEC dans la salle Belvédère du Centre des Sciences<br />
de Montréal. Ensemble, nous participions à l’activité Cocktail 101<br />
organisée par l’AEHEC et le CSL. Ce soir-là, les jeunes loups et les<br />
sages anciens étaient au rendez-vous pour parler de réseautage. La<br />
conférencière Roxane Duhamel (associée principale et formatrice<br />
chez Lise Cardinal & associés) répondait aux questions suivantes :<br />
Qu’est-ce que le réseautage ?<br />
C’est un outil de réussite dans la vie. Il faut en prendre conscience et savoir comment l’utiliser.<br />
Réseauter, c’est avant tout apprendre à se connaître soi-même, savoir qui l’on est et ce que l’on<br />
veut pour rencontrer des gens différents de nous et complémentaires. C’est nouer et entretenir<br />
stratégiquement des liens d’entraide permettant à chacun de mettre en valeur ses talents et ainsi<br />
atteindre nos objectifs professionnels. Ce n’est pas tout d’être compétent, il faut que les autres<br />
le sachent !<br />
Quelles sont les règles non écrites du réseautage ?<br />
Il y a surtout des choses à éviter. La pire d’entre elles est d’être toujours en mode « demande », mais<br />
jamais disponible quand les autres ont besoin. Il ne faut pas non plus briser la confiance que vos<br />
contacts vous accordent. Ne jamais se servir de quelqu’un comme référence sans l’avoir prévenu<br />
auparavant. Et pour finir n’oubliez pas d’informer la personne qui vous est venue en aide à la suite<br />
des évènements, que le résultat en soit bon ou mauvais.<br />
Et pour ce qui est des conseils à nous donner ?<br />
Respectez vos engagements. Sachez vous présenter pour que les gens se souviennent de vous et<br />
présenter les autres de façon à les mettre en valeur. Gardez le contact et utilisez efficacement les<br />
technologies de l’information. Devenez un bon communicateur. Assurez-vous d’être vu, connu et<br />
reconnu. Apprenez à gérer votre image numérique.<br />
Quel est l’avenir du réseautage virtuel ?<br />
Le réseautage par Internet est certainement un outil supplémentaire pour l’étudiant qu’il doit utiliser.<br />
Mais rien ne vaut une bonne poignée de main ! C’est un plus à exploiter dont il ne faut pas se<br />
contenter. De plus, il faut se méfier du revers de la médaille : les sites comme Facebook peuvent nuire<br />
à la réputation des membres qui sont trop généreux d’informations personnelles.<br />
Que pensez-vous en voyant tous ces jeunes ?<br />
Que leur conseillez-vous ? Être parmi vous est très stimulant. Puis, vous me rappelez que nous aussi,<br />
nous avons été jeunes comme vous. Il vous faut prendre conscience des opportunités que vous donne<br />
HEC. C’est une école qui nous permet de vous regrouper, de rencontrer le milieu des affaires et d’y<br />
faire votre place au fil des années.<br />
Une dernière phrase ?<br />
Faites ce que vous avez envie de faire et regardez autour de vous pour trouver les outils et les<br />
ressources nécessaires à votre réussite.<br />
Margaux Delattre<br />
margaux.delattre@hec.ca<br />
Qui êtes-vous<br />
chère inconnue ?<br />
Marie Guimbert, étudiante<br />
française en deuxième année, est arrivée il<br />
y a deux ans au Canada, et cela bien malgré<br />
elle. « J’avais pas du tout envie d’aller à<br />
HEC, c’est ma mère qui a rempli le dossier<br />
d’inscription. » En effet, le père de Marie est<br />
muté à Ottawa et souhaite que celle-ci profite de cette expérience<br />
internationale. Sauf que Marie avait déjà tout prévu : « Je voulais faire<br />
une prépa en France et intégrer une école de commerce française. »<br />
Dépitée, celle-ci traverse l’Atlantique bien malgré elle.<br />
Deux ans plus tard, c’est une autre Marie qui fait sa rentrée à HEC. Intégratrice fantôme des<br />
trilingues, la jeune fille rentre plus tôt de France pour ne pas manquer les intégrations ! Le Québec est<br />
devenu sa deuxième maison : « Si les hivers n’étaient pas aussi rudes, je réfléchirais sérieusement<br />
à m’installer à Montréal plus tard ! » Intégration réussie pour cette « franchouillarde » qui remercie<br />
aujourd’hui ses parents de l’avoir forcée à partir. Marie se plait en cohorte trilingue, où l’ambiance<br />
est très internationale : « Si j’apprécie vraiment HEC, c’est grâce au programme trilingue, cela apporte<br />
beaucoup d’intérêt à mes cours, et je pense que c’est un réel plus pour moi. »<br />
Mais Marie ne renie pas pour autant ses origines et conserve ses reflexes de vraie française : « J’aime<br />
beaucoup me plaindre, je suis très impatiente et j’ai un très mauvais caractère », avoue-t-elle avec<br />
une certaine fierté. Des traits typiquement français dont le mélange explosif donnent à Marie un<br />
caractère bien trempé. Dans sa classe de trilingue, elle est connue pour son franc-parler. « J’aime que<br />
les choses soient bien faites et dans les temps ! » Avis aux entendeurs si un jour vous faites un travail<br />
de groupe avec notre jeune française.<br />
Au trimestre d’hiver, Marie retraversera l’Atlantique pour se rendre en Écosse, à Glasgow. Une<br />
nouvelle expérience pour notre apprenti-voyageuse qui envisage ce déménagement avec beaucoup<br />
plus d’enthousiasme que le précédent. « Au début, quand j’ai su que je partais en Écosse, j’étais<br />
déçue, ça ne faisait pas partie de mes choix. Mais maintenant, je me suite faite à l’idée et je suis<br />
impatiente de partir ! » Surtout depuis qu’elle s’est aperçue que cet hiver, la pluie remplacera la neige.<br />
« Au moins il fera moins froid ! »<br />
Et après ? « Une double spécialisation en économie et affaires internationales, pour très probablement<br />
rentrer faire mon master en Europe. » Où ça ? Marie n’en a aucune idée. Peut être en France ou en<br />
Angleterre… « Advienne que pourra. »<br />
Combien d’amis sur Facebook ? 386, je réseaute.<br />
Un restaurant à Montréal ? Les Trois Brasseurs sur Sainte-Catherine.<br />
Sucré ou salé ? Salé.<br />
Un accessoire fétiche ? Mon cheich.<br />
Une destination ? Sicile, à la recherche des mes origines italiennes.<br />
Un plat ? Du foie gras.<br />
Une citation ? « If you’re not hungry, then don’t eat »,<br />
ce qui ne marche pas vraiment dans mon cas.<br />
Un mot ? Impatiente.<br />
Une confidence ? J’aimerais épouser un Italien.<br />
Un prof à HEC ? Jesús Pedraz.<br />
Une chanson ? « Sans Repère » de Sniper, un groupe de rap français.<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 0
LE SEXE ET LA DROGUE//<br />
CAROLINE PAILLIEZ<br />
caroline.pailliez@hec.ca<br />
Une stripteaseuse et le gérant<br />
d’un bar de danseuses se dévoilent<br />
La danse<br />
des heures<br />
perdues<br />
« Le Québec est la région qui connaît le plus grand nombre de bars de strip par<br />
habitant », nous déclare tranquillement Mike, le gérant du bar Gentlemen’s Choice, au coin de la rue<br />
Saint-Denis dans le Quartier latin. Mike est dans le business depuis 16 ans, il a fait tous les postes, de<br />
chauffeur à videur, il a fini son ascension comme directeur d’un des bars les plus lucratifs de la ville.<br />
Ils sont plus de 50 à Montréal, ces clubs à<br />
accueillir les soirs de weekend des jeunes<br />
femmes venues s’offrir à la vue des hommes.<br />
« Et il n’y en aura pas plus », tranche Mike,<br />
car en effet, dans les années 50 à 60, le<br />
marché érotique a connu un grand succès<br />
auprès des entrepreneurs, étant l’un des<br />
plus lucratifs. Plusieurs centaines de clubs<br />
se sont ouverts dans la région et l’opinion<br />
publique a pris peur. Le gouvernement du<br />
Québec n’accorde ainsi plus de permis de<br />
spectacle érotique : « pour se procurer un bar,<br />
il faut en racheter un », avoue Mike. Et c’est<br />
ce qu’il a fait. Mais il est un des rares à faire<br />
partie d’une chaîne; dans tout le Québec, il<br />
n’y a que 3 à 4 personnes propriétaires de<br />
plusieurs bars à la fois. Le reste des bars<br />
sont des indépendants, chacun pour son<br />
compte. Et la lutte fait rage.<br />
Danser pour vivre<br />
Nous l’avons trouvée là, à attendre patiemment<br />
le client suivant, un verre à la main, son sac<br />
dans l’autre. Marie-Ève 1 danse depuis 7 ans<br />
maintenant, autant dire que c’est dans ce milieu<br />
qu’elle s’est construite. « Je n’ai jamais connu<br />
mes parents, nous dit-elle, j’ai toujours vécu<br />
en centre et en famille d’accueil. À 16 ans, j’ai<br />
fugué, je me suis installée avec une fille et<br />
comme il me fallait de l’argent tout de suite, je me suis lancée dans<br />
la danse. Cela a duré presqu’un an. » Puis elle se fait prendre par<br />
les services sociaux, qui la renvoient en centre d’accueil jusqu’à ses<br />
18 ans. « Comme j’avais arrêté l’école à 16 ans, je n’avais aucune<br />
formation, donc lorsque je suis sortie du centre, je me suis remise<br />
à danser. Je n’étais pas très stable à l’époque : l’argent que je<br />
touchais, je le gaspillais en drogue et en alcool. Je ne me sentais<br />
pas bien dans ma peau. »<br />
Une danseuse peut gagner entre 300 et 600 dollars par soir<br />
dans un bar. Mais tout dépend des soirées, il y a toujours plus de<br />
clients lors des grands évènements comme un match au Centre Bell.<br />
« Il faut payer le bar pour avoir le droit d’y travailler, témoigne une<br />
autre danseuse. Cela peut couter entre 15 et 25 dollars, tout dépend<br />
de la popularité du bar », mais après, chacune impose ses tarifs.<br />
Les bars peuvent faire appel à des agences de spectacles érotiques<br />
pour trouver les danseuses, mais cela leur coute 12 à 15 dollars<br />
par fille. C’est pourquoi ils préfèrent quand les filles se présentent<br />
d’elles-mêmes pour la soirée. C’est la façon dont travaillait<br />
Marie-Ève lorsqu’elle a commencé à bien connaître le milieu.<br />
« Mais un jour, j’ai pris conscience qu’il fallait que je passe à<br />
autre chose, poursuit-elle, j’avais envie de mener une vie plus saine.<br />
J’ai donc tout arrêté, la danse, la drogue, l’alcool. Je ne pouvais<br />
plus supporter de me coucher à 5 heures du matin et de me lever<br />
à 3 heures de l’après-midi. J’ai pu trouver un travail de serveuse<br />
dans un restaurant et, même si mon salaire est beaucoup moins<br />
important, je m’en sors beaucoup mieux. J’ai appris à prendre soin<br />
de mon argent, à économiser. Mais je retourne de temps en temps<br />
dans les bars, cette vie me manque un peu. »<br />
Marie-Ève n’a pas renié son passé et c’est avec plaisir qu’elle<br />
retourne de temps en temps sous les projecteurs. Car dans<br />
ce milieu, elle trouve des gens comme elle, qui partagent les<br />
mêmes affinités.<br />
« Ici personne ne te juge. L’estime de soi, je l’ai apprise là. Il faut<br />
comprendre : lorsque tu es sur la scène, tout le monde te regarde,<br />
ça te rend belle. Les filles qui dansent ne sont pas des mauvaises<br />
filles, on se comprend entre nous, on vit la même chose. Mais si<br />
jamais tu commences à faire plus que danser à l’extérieur des clubs,<br />
là tu te dévaloriseras de toi-même. »<br />
Marie-Ève a changé son entourage, mais elle ne leur cache<br />
pas son passé. « Les gens sont bien plus ouverts qu’avant. Lorsque<br />
je leur parle de mon expérience dans les bars, ils ne me jugent<br />
pas. » Aujourd’hui, elle envisage même des études : le 3 novembre,<br />
elle intègrera le centre professionnel de Montréal en esthétique<br />
automobile. Comme quoi les heures perdues peuvent se rattraper.<br />
1 Nom d’emprunt<br />
0 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03
LE SEXE ET LA DROGUE//<br />
Anne-Sophie Pratte<br />
anne-sophie.pratte@hec.ca<br />
Il saupoudre sa vie<br />
de cocaïne<br />
« Le trouble n’est pas dans la bouteille, tout part d’ici. » Richard<br />
pointe de l’index le milieu de son sternum, la voix raffermie par la conviction. La vie de ce<br />
denturologiste professionnel était ponctuée de rituels quotidiens : bonne bouffe, bière, vin, et<br />
on allonge la fête de quelques lignes, poudre d’euphorie. « J’ai fait trente ans de consommation,<br />
dont 20 ans de cocaïne », affirme celui dont les yeux gris trahissent sensibilité et intelligence.<br />
Il y a douze mois, Richard a touché le fond. Il a alors choisi de<br />
changer. Le premier octobre, ça fera un an. Un an d’abstinence<br />
totale. « Ma vie n’avait plus d’allure. Je me levais le matin,<br />
j’étais anxieux, tout croche, alors je me « médicinais ». » Des<br />
drogues à la rescousse de « désordres émotifs et mentaux ».<br />
« La consommation, c’est la pointe de l’iceberg, le symptôme»,<br />
décrit l’ex-toxicomane. La cause ? « La vie me rend anxieux.<br />
J’ai de la misère à vivre, confie Richard. Je n’entrevoyais<br />
pas ma vie sans la consommation. »<br />
Richard se remémore ses années vécues au rythme des verres et des<br />
lignes. Un sourire franc se dessine pour la première fois sur ses lèvres.<br />
« J’ai eu ben du fun. J’aimais ça, consommer. C’était l’euphorie, le<br />
party. La cocaïne, ca permet de boire plus, tu es moins fatigué. »<br />
Les substances poudreuses et visqueuses le mettaient à l’abri de<br />
la dépression. « Avec l’alcool, les drogues et les médicaments, on<br />
se fait notre automédication, on joue au docteur. Beaucoup vont se<br />
soigner comme ça. » Si la poudre faisait flotter Richard hors des eaux<br />
sombres des maladies mentales, son corps n’a pas tenu le coup. La<br />
crise cardiaque l’a frappé à 38 ans. Ce qui guette le toxicomane à<br />
long terme : la folie, la mort ou la prison. « On peut se suicider, finir<br />
en psychiatrie, crever… », analyse douloureusement Richard.<br />
Richard a fondé sa clinique de denturologie à Laval. Professionnel<br />
de la santé, il créait des dentiers et des prothèses dentaires. Même<br />
s’il décrit la drogue comme un « Time sucker », il arrivait à conjuguer<br />
réussite professionnelle avec sa poussière nasale indispensable.<br />
Génie ? Probablement. Unique ? Sûrement pas. « La drogue ne fait<br />
pas de distinction entre les classes sociales ! », assène Richard. Les<br />
Marylin Monroe, les Elvis Presley, les dirigeants d’entreprises qui<br />
saupoudrent leur stress de farine toxique… Non, il n’est pas seul.<br />
Richard s’appuie sur les alcooliques anonymes. Un mal de dos<br />
récurrent lui procure un temps d’arrêt de travail. Il reçoit en ce<br />
moment des prestations de la CSST. Si sa vie est insipide sans<br />
drogue, le denturologiste n’a plus le goût de consommer. Jusqu’à<br />
quand ? « Si je consomme demain matin, impossible de prédire<br />
quand j’arrêterai de nouveau. Quelques jours, 4 ans, je ne sais<br />
pas quand ça va finir. Alors je ne prends pas de chance. » Aussi<br />
immesurable qu’une crise financière, la rechute plane. Imprévisible.<br />
Sans pitié. Plus jalouse et possessive que le pire despote, la drogue<br />
lâche difficilement son emprise sur ses aficionados.<br />
Richard vit seul. Homme charmant, il inspire la sympathie, il attire<br />
le contact humain. On ne peut s’empêcher de miser sur de belles<br />
années à venir pour le Richard clean. S’il s’en donne à cœur joie sur<br />
Aussi immesurable qu’une crise<br />
financière, la rechute plane.<br />
Imprévisible. Sans pitié. Plus<br />
jalouse et possessive que le<br />
pire despote, la drogue lâche<br />
difficilement son emprise sur<br />
ses aficionados.<br />
les actions du TSX, Richard s’interdit toute spéculation sur sa propre<br />
vie. « Je ne suis pas très fort psychologiquement, avoue-t-il sans<br />
l’ombre d’une honte. Me projeter dans l’avenir me rend anxieux. »<br />
Le gène de l’addiction, Richard le ressent dans chacune de ses<br />
cellules. « La dépendance, c’est une allergie physique en plus d’une<br />
dépendance psychologique. Je suis allergique à la bière : quand j’en<br />
bois un peu, ça déclenche ma soif. Quelqu’un qui est allergique aux<br />
arachides ne mangera pas juste un peu de beurre de peanuts. Un<br />
alcoolique, c’est différent. Tu es allergique à l’alcool, mais tu vas<br />
en prendre pareil ! »<br />
Richard s’anime lorsqu’il parle de bourse. Michel Carignan, analyste<br />
technique du canal Argent, est érigé en mentor financier pour<br />
Richard. Le denturologiste a troqué la poudre pour une nouvelle<br />
dépendance : celle des hommes en cravates de Wall Street, celle<br />
qu’on étudie dans les cours de finance, celle qui charcute les chiffres<br />
rouges et verts des écrans numériques : la spéculation.<br />
Du sexe<br />
version<br />
Carlos Fuentes<br />
« Le sexe sans péché, c’est comme un œuf sans sel »<br />
Léna Le Gall-Diop<br />
lena.le-gall-diop@hec.ca<br />
Cette citation de Carlos<br />
Fuentes est déjà bien connue,<br />
et Apollon et les putains (2003)<br />
n’est pas une nouveauté. Il<br />
n’en demeure pas moins que<br />
cette œuvre (vendue à part ou que l’on peut trouver dans<br />
le recueil L’oranger), qui de surcroît s’inscrit parfaitement<br />
dans le thème du dossier sur le sexe et la drogue, peut être<br />
une manière intéressante pour ceux qui ne connaissent<br />
pas encore l’œuvre de Carlos Fuentes d’établir un premier<br />
contact avec le monde de l’auteur.<br />
En effet, contrairement à beaucoup de romans de Fuentes,<br />
cette œuvre laisse moins de place à l’analyse de l’environnement<br />
politico-économique mexicain, qui alourdit parfois la lecture,<br />
pour laisser plus de place au récit. Une transition qui pourrait<br />
permettre par la suite au lecteur de mieux apprécier ses œuvres<br />
les plus connues, par exemple La mort d’Artemio Cruz (1962) ou<br />
Le vieux Gringo (1985).<br />
Apollon et les putains est le récit d’un acteur dont la carrière<br />
décline, Vince Valera, qui décide de partir à Acapulco pour<br />
oublier ses échecs et prendre du bon temps. De là, il amène sept<br />
il amène sept prostituées<br />
sur un bateau où il trouvera<br />
la mort dans un contexte<br />
assez surprenant…<br />
prostituées sur un bateau où il trouvera la mort dans un contexte<br />
assez surprenant… Le style surréaliste de l’auteur est toujours là,<br />
mais il est nettement moins lourd et l’humour que manie habilement<br />
Fuentes compense le langage cru (parfois même très cru !) qui est<br />
employé dans cette nouvelle qui est érotique tout en demeurant<br />
originale. Recommandé à ceux qui osent !<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 0
LE SEXE ET LA DROGUE//<br />
Julien Dubout<br />
julien.dubout@hec.ca<br />
PRODUCTION DE DROGUE :<br />
MAUDITS SOIENT<br />
LES PAUVRES !<br />
Fait du hasard… ou du destin, les principales ressources<br />
qui permettent la production de ces drogues se situent dans des pays<br />
pauvres tels que l’Afghanistan, le Maroc ou encore l’Inde. Cette situation<br />
est d’autant plus paradoxale que la majeure partie de cette production<br />
est destinée aux pays les plus riches, notamment en Europe et en<br />
Amérique du Nord. Que l’on se situe en Amérique du Sud, en Afrique ou<br />
en Asie, les pays producteurs sont des pays où ces plantes appartiennent<br />
au patrimoine culturel de populations locales minoritaires.<br />
L’explosion de la demande pour ces produits dans les pays riches depuis les années 60 et la période<br />
hippie a constitué un apport financier sans précédent pour des populations jusque-là déshéritées, et<br />
ce malgré que le principal des revenus revienne aux élites du crime organisé. En effet, malgré cela,<br />
il reste bien plus profitable pour ces populations de pratiquer l’élevage de cultures illicites que de se<br />
consacrer à l’agriculture traditionnelle.<br />
Cette situation a fait l’œuvre de certaines tensions justement entre ces pays pauvres et producteurs<br />
(bien que ce type de production soit interdit au sein de ces pays) et les pays demandeurs, soit les<br />
pays dont les revenus des populations sont des plus élevés au monde. En effet, ces derniers leur<br />
reprochent d’adopter une position laxiste quant à la production de plantes à base desquelles sont<br />
fabriquées toutes sortes de substances illicites. On peut facilement alors associer cette réaction<br />
de la part des grands, que sont les pays occidentaux, à un comportement hypocrite. Alors que dans<br />
les grandes conférences internationales chacun promet d’aider les plus démunis à lutter contre la<br />
pauvreté et de les aider dans leur développement économique, ce que l’on souhaite tout d’abord,<br />
c’est ne pas accueillir chez soi les dégâts de la pauvreté chez le voisin.<br />
Ainsi, certains grands états n’hésitent pas à se rebeller contre des pays pauvres dont la seule faute<br />
est de ne pouvoir lutter efficacement contre l’élevage de certaines plantes interdites, et ce non pas<br />
par volonté mais tout simplement par faute de moyens. Ainsi comment peut-on faire ce type de<br />
reproche à des pays qui bien souvent n’ont même pas les moyens d’assurer à l’ensemble de leur<br />
population des conditions décentes pour vivre ? N’ont-ils pas d’autres préoccupations d’ordre social<br />
ou économique à privilégier ? Ainsi, comment un pays qui n’a pas les moyens de nourrir son peuple<br />
ou de lutter contre des rebelles serait-il en mesure d’éradiquer des milliers de champs d’opium ou de<br />
pavot ? Et puis est-ce réellement une priorité dans un pays confronté à une telle pauvreté ? Ce fléau<br />
doit même leur paraître anecdotique.<br />
Mais tout cela, les riches s’en moquent éperdument. Leur message pourrait presque se résumer à<br />
ceci : les pauvres, ne nous envoyez ni vos drogues, ni vos clandestins et encore moins vos terroristes !<br />
Car malgré les sommes promises aux pays en difficulté, la majorité des pays développés n’en<br />
versent en réalité qu’une infime partie. Or c’est justement en soutenant ces pays, en les aidant<br />
à se développer et à lutter contre la pauvreté qu’on peut espérer mettre un jour fin aux fléaux qui<br />
découlent de cette situation de misère. Par exemple, au lieu de dépenser des milliards dans la guerre<br />
d’Irak, il aurait certainement été plus judicieux d’utiliser ne serait-ce qu’une partie de cet argent afin<br />
de soutenir l’établissement de la démocratie afghane notamment en lui permettant de se développer<br />
économiquement et ainsi de réduire une misère qui alimente production de drogues et terrorisme. En<br />
effet, le développement économique apporterait l’éducation et de meilleurs conditions de vie… et<br />
donc moins de raisons de se révolter contre les puissants et leurs règles (i.e. les Occidentaux). Il en<br />
va de même pour les problèmes d’immigration clandestine vis-à-vis d’autres pays (notamment des<br />
pays d’Amérique latine envers les É.-U.).<br />
L’aide financière semble donc la meilleure façon de régler tous ces problèmes, bien plus que la force,<br />
qui ne fait qu’aggraver les choses en alimentant le sentiment d’injustice et de vengeance et en<br />
renforçant bien souvent la misère sociale.<br />
Et si ce soir on allait<br />
faire un tour rue<br />
Sainte-Catherine ?<br />
Marine Parré<br />
marine.parre@hec.ca<br />
Dans le cadre de ce dossier sur les vices tels que la<br />
drogue et le sexe, nous nous sommes demandé ce que les jeunes<br />
Montréalais pensaient de ces bars de danseuses florissants. L’équipe<br />
de L’Intérêt s’est rendue directement rue Sainte-Catherine et dans ses<br />
alentours pour poser la question à des gens croisés tard le soir. Bien sûr,<br />
nous n’avons pas oublié l’avis des filles sur les bars à Chippendales.<br />
José, 18 ans<br />
« En vacances, j’ai déjà eu une expérience dans un bar<br />
de danseuses. C’était drôle, mais je pense que c’est à<br />
essayer pour une occasion spéciale, pas tous les soirs. »<br />
Marie, 19 ans<br />
« Je n’ai jamais tenté. J’essaierai peut-être un jour, car il<br />
ne faut pas mourir idiot, mais ce serait juste pour le trip.<br />
JB, 19 ans<br />
« Ah non ! Moi, ça m’énerve ce genre de choses !<br />
C’est frustrant, on ne peut même pas toucher ! Il n’y a<br />
aucun intérêt… »<br />
Charly, 20 ans<br />
« J’irais bien entre amis, pour rire. Mais si ma copine y<br />
allait, je ne comprendrais pas. Pourquoi payer pour ça<br />
quand on est en couple ? Si un jour je la surprends làdedans,<br />
je la tue ou je la quitte ! »<br />
Pierre, 20 ans<br />
« Je n’aime pas l’ambiance de ces bars. Je trouve que<br />
c’est comme la porno. Vaut mieux du vrai sexe. Et puis<br />
c’est bien meilleur en privé ! »<br />
Marjolaine, 18 ans<br />
« Croyez-le ou non, je suis allée à plusieurs reprises dans<br />
un bar de danseuses pour y pêcher quelques trucs de<br />
séduction et des mouvements de danse. »<br />
je suis allée à<br />
plusieurs reprises<br />
dans un bar de<br />
danseuses pour<br />
y pêcher quelques<br />
trucs de séduction<br />
et des mouvements<br />
de danse.<br />
Marjolaine,<br />
18 ans<br />
C’est assez rassurant de voir que les jeunes ne sont pas très branchés sur ce genre de choses. On<br />
peut en déduire que la clientèle de ces bars est plus âgée et même supposer qu’elle est composée<br />
de femmes d’affaires qui veulent se lâcher ou d’hommes qui s’ennuient à la maison… Nous avons<br />
la chance de faire partie d’une jeunesse libérée pour qui le sexe n’est pas tabou. Alors sincèrement,<br />
pourquoi aller payer une prestation qui a pour but de combler nos besoins si on a chez soi quelqu’un<br />
qui nous satisfait amplement ? On peut réserver ce genre d’expérience aux célibataires en manque<br />
de sexe.<br />
0 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03
Etienne Pomerleau-Landry<br />
etienne.pomerleau-landry@hec.ca<br />
Le budget du gouvernement fédéral : environ 200 milliards de<br />
dollars. Les coupures récentes dans la culture : 45 millions<br />
de dollars. Inutile de souligner que 45 millions, ce sont des<br />
peanuts dans le budget du Canada. Conclusion : c’est un<br />
geste à la fois idéologique et politique.<br />
L’idéologie de M. Harper peut se résumer comme suit : c’est<br />
au marché, à la main invisible d’Adam Smith de trancher sur la<br />
pertinence ou non des aides et subventions allouées aux programmes<br />
culturels au Canada. Stephen Harper doit être déconnecté de la vie<br />
courante pour ne pas constater que la culture n’est pas une affaire<br />
de marché.<br />
Il est faux de penser que les artistes sont assez riches pour<br />
trouver leur propre financement. Les gens de l’industrie artistique<br />
sont les travailleurs gagnant le moins au Québec : pas plus de<br />
17 000 $ par année en moyenne en 2006. La culture par ailleurs a<br />
toujours été subventionnée par l’État. Toujours ! S’il n’y avait pas de<br />
subventions, il n’y aurait pas de cinéma québécois, notre littérature<br />
vivoterait, et il y aurait moins de créations indépendantes. Comment<br />
pensez-vous que le Cirque du Soleil et autres succès mondiaux<br />
Made in Québec se sont développés, hormis leur propre génie ?<br />
L’aide financière de l’État a été déterminante. Et tout le monde doit<br />
avoir la chance d’en profiter.<br />
Philippe Falardeau, réalisateur de « La Moitié Gauche du Frigo »<br />
dénonce l’idée selon laquelle la performance auprès du public<br />
oriente seule une politique de rayonnement culturel pluraliste. Vu<br />
le contexte nord-américain dans lequel nous vivons, en matière de<br />
culture, il nous faut une politique proactive, et non réactive.<br />
Pierre Curzi, ancien président de l’Union des artistes et<br />
aujourd’hui porte-parole du Parti Québécois en matière de culture,<br />
a parfaitement raison quand il est intervenu à l’émission Bazzo.tv à<br />
Télé-Québec il y a trois semaines : « la culture est créatrice d’avenir,<br />
elle crée une économie, des rêves. […] C’est pour cela qu’il faut<br />
ardemment défendre notre souveraineté culturelle ! Même en<br />
morceaux ! C’est une bataille ! »<br />
En parlant de souveraineté culturelle, il est paradoxal de voir<br />
que le mot est peu prononcé par les artistes professionnels comme<br />
il aurait été naturel de l’entendre. Cela peut s’expliquer : l’avenir des<br />
artistes dépend en grande partie des subventions accordées par le<br />
fédéral. À long terme, le fédéral fait en sorte que les revendications<br />
identitaires des artistes québécois se taisent, et que la seule<br />
relation qui maintienne le lien fédéral-artistes soit l’argent. Nos<br />
artistes doivent quémander et ne pas broncher pour obtenir l’argent<br />
PLAIDOYER POUR<br />
LE RAPATRIEMENT<br />
DES COMPÉTENCES<br />
CULTURELLES AU QUÉBEC<br />
Le gouvernement Harper a réduit les<br />
programmes culturels de 45 millions de dollars juste avant le<br />
début des élections fédérales. Quelles sont les circonstances<br />
entourant cette décision et ses conséquences ?<br />
nécessaire à leur survie. Mais alors, que fait Québec dans tout<br />
cela ? Pourquoi le gouvernement provincial ne reprend-il pas à sa<br />
charge les programmes pour s’occuper seul du financement des<br />
industries artistiques du Québec ? Tout simplement parce qu’il est<br />
incapable de reprendre à son compte les programmes délaissés par<br />
le gouvernement fédéral.<br />
Québec n’a pas les moyens financiers d’affronter Ottawa sur ce<br />
plan. Or on le sait : c’est en reprenant ce qui revient de droit, c’està-dire<br />
l’argent des programmes, que le Québec pourra assurer la<br />
sauvegarde de sa culture française et sa protection. La question se<br />
pose donc de savoir jusqu’où le gouvernement Charest est-il prêt à<br />
défendre notre culture française si les sommes allouées à la culture<br />
sous la maîtrise du gouvernement fédéral ne sont pas transférées,<br />
voire remise de plein droit au Québec. Repensera-t-il son budget<br />
pour sauver nos artistes ? Donnera-t-il moins à l’environnement ou<br />
à la construction de nos routes pour sauver nos artistes ? Quelle<br />
place occupe la culture dans ce gouvernement à un point tournant<br />
de son développement ? La question est légitime. M. Harper se<br />
défend bien de menacer l’avenir de la culture au Québec. Je cite<br />
les arguments répétés par ses ministres tout au long de cette<br />
campagne électorale: siège accordé au Québec à l’UNESCO, rapide<br />
proposition d’augmenter à 25 % la part des francophones au CRTC,<br />
reconnaissance de la nation québécoise, augmentation en 2008 du<br />
budget de la culture de 8 %.<br />
Examinons ces arguments. Concernant l’UNESCO, il faut savoir<br />
que lorsque le Québec n’est pas d’accord avec le Canada sur des<br />
points sensibles, il n’a pas le droit de parole. De plus, il est révoltant<br />
de constater que le Canada a été l’un des premiers pays après le<br />
Québec à ratifier en 2005 la Convention sur la Protection et Promotion<br />
de la Diversité des Expressions Culturelles. Cette convention<br />
internationale souligne l’importance de « valoriser et de promouvoir<br />
les pratiques d’ouverture et d’équilibre […] aux différentes cultures<br />
du monde ». Ce n’est pas en réduisant les moyens de promouvoir la<br />
culture québécoise que le Canada respectera son engagement.<br />
Concernant le CRTC : 1/3 des membres du CRTC est francophone.<br />
Pour le dossier de la « nation québécoise », il n’y a eu, à ce jour,<br />
que des refus du gouvernement fédéral d’aller plus loin dans cette<br />
reconnaissance aux demandes des députés du Bloc d’étendre cette<br />
définition à la langue, à tous les domaines culturels, aux aéroports,<br />
aux télécommunications, etc. Si les coupures récentes dans la<br />
culture ne sont pas une preuve que la reconnaissance du Québec<br />
comme nation n’est qu’une farce et une tentative d’obtenir des votes<br />
supplémentaires des Québécois, les gens sont vraiment aveugles.<br />
POLITIQUE//<br />
Pourquoi le gouvernement<br />
provincial ne reprend-il pas<br />
à sa charge les programmes<br />
pour s’occuper seul du<br />
financement des industries<br />
artistiques du Québec ?<br />
Tout simplement parce<br />
qu’il est incapable de<br />
reprendre à son compte les<br />
programmes délaissés par<br />
le gouvernement fédéral.<br />
Enfin, Radio-Canada a analysé le budget du Ministère du<br />
Patrimoine canadien. Il est vrai qu’il a bel et bien augmenté de 8 %<br />
par rapport au précédent budget, mais l’aide versée directement<br />
aux artistes a baissé de 8 %, l’augmentation du Ministère ayant été<br />
dédiée en fait aux sports et au multiculturalisme.<br />
La culture doit revenir en totalité au Québec, le seul endroit<br />
légitime où elle peut se développer en toute quiétude sans dessein<br />
politique autre que de s’exprimer et de s’épanouir. Je ne comprends<br />
pas d’ailleurs pourquoi cette question de la culture et de sa<br />
protection revienne uniquement aux artistes. C’est aussi l’affaire de<br />
tout un peuple, d’une nation, car elle touche à son identité, à son<br />
histoire qui différencie le Québec des autres nations. Je n’entends<br />
plus personne se lever pour revendiquer le droit des Québécois de<br />
décider du futur de leur société. Qu’est-ce que cette soumission dont<br />
font preuve les Québécois devant la violence faite à leur identité ?<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 0
POLITIQUE//<br />
Marc Daoust<br />
marc.daoust@hec.ca<br />
Charest<br />
va de l’avant<br />
Le premier ministre du Québec a annoncé de nouveaux projets pour le Québec tout récemment. En<br />
effet, M. Charest a fait part de ses intentions de développer le Nord du Québec, un territoire qui, à<br />
ses propos, est deux fois plus grand que la France et qui contient platine, or, argent, titane et même<br />
diamant. Il a affirmé qu’avec les changements climatiques, le Nord du Québec devait être pris en<br />
considération lorsque l’on songeait à l’avenir de la province. Il a aussi promis à ses partisans que<br />
chaque investissement dans ce projet respectera les principes du développement durable et sera<br />
profitable pour les Inuits et les Premières Nations qui habitent ce territoire. Aussi, dans un contexte<br />
où la crise économique s’amplifie aux États-Unis, M. Charest a affirmé qu’il était très important<br />
de conclure des accords commerciaux avec l’Europe autant dans les domaines de l’éducation, de<br />
la recherche scientifique et technologique, de l’environnement, de la culture, etc. En faisant ces<br />
déclarations, M. Charest a fait des gains en popularité en obtenant 41 % des intentions de votes. Si<br />
des élections provinciales avaient lieu ce mois-ci, M. Charest récolterait donc 10 points de plus que<br />
Mme Marois, qui n’obtient que 31 %.<br />
PARTIS POLITIQUES<br />
ET ENJEUX ÉCONOMIQUES<br />
Hugo Braën<br />
hugo.braen@hec.ca<br />
En attendant l’onde de choc<br />
venant des États-Unis… Quels sont les<br />
enjeux économiques ?<br />
L’équilibre économique de notre principal partenaire commercial (lire les États-Unis) est<br />
sur le qui-vive. Quels sont les véritables enjeux et comment les principaux partis fédéraux<br />
compteraient-ils y répondre ? Voici un bref tour d’horizon…<br />
Le Parti Conservateur du Canada (PCC).<br />
L’énoncé économique du chef Stephen Harper en matière économique part du constat suivant : il est<br />
essentiel pour le Canada de continuer à développer son économie et d’abaisser le niveau d’imposition<br />
des contribuables, qui sont surtaxés. Le développement durable : pas de plan à l’ordre du jour…<br />
À suivre… Pour ce qui est de l’influence néfaste prévisible de la crise secouant les États-Unis, le<br />
système bancaire canadien est plus stable et « l’économie canadienne est plus solide que celle des<br />
Etats-Unis ».<br />
Le Parti Libéral du Canada (PLC).<br />
Les libéraux souhaiteraient prendre un virage économique vert et abaisser le niveau d’imposition de<br />
la population, tout en investissant massivement dans l’éducation postsecondaire et la culture. Un<br />
important point du programme économique du PLC consiste en la création d’une bourse du carbone :<br />
les émetteurs de gaz à effet de serre pourraient donc acheter des crédits leur permettant de relâcher<br />
un certain quota d’émissions établi par le gouvernement, mais toujours dans une optique de réduire<br />
celles-ci et de parvenir à atteindre ses objectifs en matière de changements climatiques. Nous<br />
entendons déjà la grogne des grands pollueurs du pays…<br />
Le Bloc Québécois (BQ).<br />
Le Bloc prône un développement durable soucieux de l’environnement. Il souhaite également le transfert<br />
de fonds et de compétences permettant d’accorder les besoins économiques spécifiques du Québec<br />
à son statut particulier de seule province ayant le français comme langue officielle, donc de culture<br />
majoritaire différente. Par contre, le Bloc ne peut que travailler en coalition par sa nature même.<br />
Le Nouveau Parti Démocratique (NPD).<br />
Les néodémocrates ont jusqu’à présent promis plusieurs enveloppes budgétaires permettant un<br />
financement accru de différents pans de l’économie nationale. Le chef Jack Layton s’est empressé de<br />
répondre que le budget allait être équilibré s’il était élu. Le NPD souhaite également mieux règlementer<br />
le secteur financier et hausser le niveau d’imposition des pétrolières. La seule question qui subsiste<br />
est la suivante : peut-on mettre en œuvre tous ces projets avec la réelle marge de manœuvre qui<br />
incombera au futur gouvernement ?<br />
Le Parti Vert du Canada (PVC).<br />
Par leur existence, les verts représentent un plan économique « écologique » qui souhaite un<br />
changement radical dans les moyens de production et dans la conduite des activités industrielles. Le<br />
PVC souhaite également taxer les émissions de gaz, réduire les impôts et charges sociales. Le seul<br />
problème réside dans la marginalité même du Parti Vert, qui n’a eu qu’un député au Parlement du<br />
Canada : Blair Wilson, ancien député indépendant de West Vancouver—Sunshine Coast—Sea to Sky<br />
Country en Colombie-Britannique…<br />
En somme, la meilleure chose souhaitée pour notre démocratie serait la formation d’un nouveau<br />
gouvernement minoritaire. Cela donnerait l’occasion de réellement faire valoir les différentes opinions<br />
de l’ensemble du Canada puisque aucun parti national ne semble faire l’unanimité d’un océan à<br />
l’autre. En fait, on voit plutôt des fractures régionales surgir. Reste à voir comment cette pléthore<br />
d’intérêts divergents fera face aux défis économiques des prochaines années !<br />
0 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03
RETOUR SUR LA CHINE ET SES JO<br />
Opération réussie<br />
pour le CIO !<br />
POLITIQUE//<br />
Emmanuel Darmon<br />
emmanuel.darmon@hec.ca<br />
Un célèbre proverbe chinois dit que quand le sage montre la lune, l’idiot regarde le doigt. Quand la Chine a été désignée<br />
pour accueillir les JO de cet été, tout le monde s’en est pris au CIO (Comité International Olympique). Mais n’était-ce pas, au final, une<br />
excellente initiative que de focaliser l’opinion mondiale sur le régime totalitaire chinois ? Cette dictature chinoise aurait-elle suscité l’intérêt des<br />
médias sans cette courageuse décision du CIO que d’accorder les Jeux à la Chine ?<br />
Attardons-nous tout d’abord sur cette République Populaire<br />
de Chine pour comprendre les enjeux autour de l’organisation<br />
des récentes olympiades de Pékin. La Chine est un pays<br />
officiellement communiste se réclamant du marxismeléninisme<br />
mais qui, paradoxalement, a su réinventer un<br />
capitalisme sans limite, sans règle ni morale. Tout est bon<br />
pour faire du fric en Chine ! Une main-d’œuvre surexploitée<br />
qui produit des marchandises ne respectant pas les normes<br />
les plus élémentaires de sécurité ou d’environnement (cf.<br />
l’affaire Mattel) pour obtenir des produits aux prix défiants<br />
toute concurrence qui viennent envahir nos marchés<br />
occidentaux. Une population tibétaine que l’on prive des<br />
droits les plus élémentaires. Des journalistes et intellectuels<br />
chinois bâillonnés lorsqu’ils ne sont pas emprisonnés ou<br />
fusillés. Des trafics d’armes Made in China qui nourrissent<br />
les conflits les plus meurtriers comme celui du Darfour. Mais<br />
tout ça, vous le savez, tout le monde le sait… Depuis que nos<br />
yeux se sont braqués sur ce pays le temps d’une olympiade,<br />
L’Intérêt en a même fait sa une de septembre. Sur ce premier<br />
point, bravo au CIO !<br />
La question était alors de savoir si, oui ou non, nos chefs de<br />
gouvernement et nos télévisions devaient se rendre à Pékin. Aurionsnous<br />
dû boycotter les JO ? Aurions-nous dû saisir cette opportunité<br />
incroyable de frapper un grand coup dans la puissance chinoise qui<br />
semblait jusqu’alors intouchable ?<br />
La réponse, comme on l’a vu, n’était pas évidente. « Peut-on<br />
boycotter un quart de l’humanité ? », s’interrogeait Nicolas Sarkozy<br />
face à un député européen, Daniel Cohn-Bendit, très sincèrement<br />
ému aux larmes, qui lui reprochait de se rendre à Pékin pour partager<br />
les mêmes baguettes que le président chinois Hu Jintao. Il était en<br />
effet difficile de dire au peuple chinois : « Votre gouvernement vous<br />
prive de tous vos droits mais ne vous inquiétez surtout pas, on va<br />
vous priver des JO pour rétablir un peu tout ça ! »<br />
Ensuite, boycotter la Chine, c’était aussi boycotter l’évènement<br />
en soi des Jeux Olympiques. Évènement qui se doit d’être purement<br />
sportif, symbole de paix et d’entente entre les nations. Et que<br />
pouvions-nous offrir de plus beau à cette nation fermée, à l’écart de<br />
tous ces nouveaux ventres<br />
pleins sont de très prochains<br />
consommateurs de nos Boeing,<br />
Airbus et Bombardier...<br />
tous, que des images de métissage, de fraternité, d’émotion ? On peut<br />
même considérer les JO comme une gentille propagande positive<br />
de nos démocraties occidentales qui véhiculent à leur manière un<br />
message de paix universel, qui s’adresse tout particulièrement à la<br />
Chine et autres dictatures.<br />
Je crois enfin que si la Chine est encore une fois<br />
infiniment condamnable sur beaucoup d’aspects, un<br />
racisme latent envers ceux que l’on décrit toujours<br />
comme les envahisseurs nous guette, et nous aussi<br />
avons appris beaucoup de la Chine grâce à ces JO. Les<br />
Chinois ne sont pas seulement capables de fabriquer<br />
des contrefaçons, mais ils peuvent aussi faire preuve<br />
d’une incroyable création artistique à l’image de ces<br />
magnifiques cérémonies d’ouverture et de clôture des<br />
olympiades. Les Chinois ne sont pas que des paysans<br />
à chapeaux pointus, mais ce sont aussi de superbes<br />
nanas, modernes, sexy, que l’on a pu voir à la batterie<br />
et aux guitares électriques pendant ces mêmes<br />
cérémonies. Si la Chine nous « envahit » avec ses<br />
produits bon marché, c’est aussi un moyen d’augmenter<br />
notre pouvoir d’achat. Nous aimons nous préoccuper<br />
de la misère en Afrique, mais on oublie de se réjouir<br />
de cette croissance chinoise qui nourrit tous les jours<br />
plus de bouches en Chine. Et tous ces nouveaux ventres<br />
pleins sont de très prochains consommateurs de nos<br />
Boeing, Airbus et Bombardier...<br />
Je considère ces JO comme une belle réussite. La<br />
réussite d’un peuple chinois et la défaite de son<br />
gouvernement, qui a dû pour la première fois se<br />
justifier de ses crimes. Qui pour la première fois a compris que les<br />
armes et l’argent ne suffisaient pas pour entrer dans le cercle très<br />
restreint des nations respectées et respectables. Alain Ménard, de<br />
Reporters sans frontières, a su lancer un message fort aux Chinois<br />
sans pour autant gâcher la fête. Je me réjouis encore une fois de<br />
l’altercation entre Sarkozy et Daniel Cohn-Bendit, qui ont su, tous<br />
les deux, dans un même dialogue, exprimer leur compassion au<br />
peuple chinois et leur écœurement de la politique chinoise. Les<br />
JO sont terminés, mais on ne peut se permettre de refermer les<br />
rideaux sur les répressions au Tibet et les massacres du Darfour.<br />
Nos gouvernements ont aussi compris que leur popularité passe par<br />
leur combat en faveur des droits de l’Homme dans le monde, et ce<br />
combat commence à peine ! Rendez-vous dans quatre ans pour les<br />
JO d’hiver de Sotchi en Russie…<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 0
POLITIQUE//<br />
Adrien Delanoë<br />
adrien.delanoe@hec.ca<br />
et :<br />
le retour de la Guerre Froide ?<br />
Il semble bien loin, le temps où les États-Unis et la Russie entretenaient de bonnes<br />
relations comme le témoigne le fou rire des présidents Clinton et Eltsine en 1995, lors d’un sommet<br />
sur la crise bosniaque du moment.<br />
Les É.-U. semblent donc<br />
actuellement sur la pente<br />
descendante avec de grosses<br />
dépenses en cours et à venir,<br />
tandis que la Russie est, elle,<br />
en plein essor économique.<br />
Treize années plus tard, les choses ont évolué : les États-<br />
Unis sont dirigés (pour encore quelques semaines !) par un<br />
président conservateur, Georges W. Bush, décrié dans le<br />
monde entier notamment pour sa politique étrangère, tandis<br />
que la Fédération de Russie est aux mains de son nouveau<br />
président Dmitri Medvedev et de son premier ministre<br />
Vladimir Poutine, ancien lieutenant-colonel au KGB et<br />
président russe de décembre 1999 à mai 2008.<br />
Le pouvoir actuel russe tente de remettre le pays au premier<br />
plan de la scène internationale en utilisant des méthodes dignes de<br />
son « passé totalitaire ». Pour cela, la Russie dispose de ressources<br />
naturelles abondantes tel le pétrole et le gaz, ce qui en fait l’un des<br />
principaux producteurs et exportateurs mondiaux. Elle dispose donc<br />
de moyens de pression et d’une manne financière importante afin<br />
de servir ses intérêts.<br />
Le conflit entre la Géorgie et la Russie a mis au jour le fossé qui<br />
sépare les Occidentaux, et plus particulièrement les Américains, aux<br />
Russes. Les É.-U. soutiennent l’intégrité territoriale de la Géorgie<br />
tandis que les Russes viennent de reconnaitre l’indépendance de<br />
l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie, deux territoires séparatistes<br />
géorgiens. La Russie a donc profité de cette crise pour développer<br />
un « partenariat » avec ces deux régions en leur apportant une aide<br />
financière et en créant une base militaire en Abkhazie.<br />
Pendant ce temps, les États-Unis exhortent les Russes à<br />
respecter le droit international en demandant le retrait de leurs<br />
troupes du territoire géorgien et à respecter les frontières d’avantconflit.<br />
Le président Bush a même fait un appel en ce sens à<br />
l’ONU et veut que la Russie respecte ses engagements pris lors<br />
de la signature d’un cessez-le-feu en Géorgie – ce même président<br />
américain qui, en 2003, avait complètement ignoré les mêmes<br />
règles internationales en engageant une guerre unilatérale en Irak,<br />
qui soi-disant possédait des armes de destruction massive, alors<br />
même que l’ONU condamnait ce choix hasardeux.<br />
Lors de la crise au Kosovo, la Russie soutenait l’intégrité<br />
territoriale de la Serbie en ne reconnaissant pas le nouvel État<br />
kosovar tandis que les É.-U. avaient pris position pour l’indépendance<br />
de Pristina. Quelques mois plus tard, les rôles se sont donc inversés<br />
sur la question géorgienne. La Russie, voulant rester maître dans le<br />
Caucase, n’a pas apprécié les velléités géorgiennes d’adhésion à<br />
l’OTAN en ce quelle considère un pays de « sa chasse gardée ».<br />
Les Russes ont répondu à « l’offensive américaine » en<br />
renforçant leur position en Amérique latine. Le vice-président russe<br />
Igor Setchine s’est rendu à Cuba (où la Russie aimerait ouvrir une<br />
base militaire) et au Vénézuela, pays dont le président Hugo Chavez<br />
clame haut et fort son désamour pour les É.-U. D’ailleurs, deux<br />
bombardiers stratégiques russes effectuent des vols dans ce pays<br />
et des manœuvres navales sont également planifiées avant la fin de<br />
l’année. Un contrat d’armement portant sur 4 ans pour un montant<br />
de 4,5 milliards de dollars a été signé entre Chavez et le patron de<br />
l’armement russe Serguei Chemezemov, et des pourparlers à propos<br />
d’une coopération dans le domaine de l’énergie atomique entre les<br />
deux pays sont en cours.<br />
Les États-Unis pourront-ils être à la hauteur des nouvelles<br />
ambitions russes ? Rien n’est moins sûr, car le pays est enlisé dans<br />
une guerre sans fin en Irak et, en même temps, l’administration Bush<br />
est prête à injecter plus de 700 milliards de dollars dans un plan<br />
de sauvegarde de l’économie américaine, crise financière dont est<br />
en partie responsable cette même administration pour son laxisme<br />
quant aux politiques de prêts bancaires aux États-Unis.<br />
De son côté, l’Europe tente de calmer le jeu mais il est très<br />
difficile pour l’Union Européenne de proposer une diplomatie unie<br />
car trop de pays en son sein sont revanchards à l’égard de la Russie<br />
– certains se sont libérés du joug de Moscou il n’y a pas si longtemps<br />
encore. De plus, l’Europe est dépendante des exportations russes en<br />
gaz, donc une politique de fermeté vis-à-vis du Kremlin n’est pas<br />
envisageable dans l’immédiat.<br />
On le voit, les mois à venir seront déterminants quant à<br />
l’orientation politique prochaine du monde. Les élections américaines<br />
peuvent être un facteur contribuant à ce changement. L’élection de<br />
John McCain pourrait renforcer le fossé entre les deux pays même si<br />
le choix de Barack Obama ne signifierait pas une détente dans leurs<br />
relations, puisque historiquement les peuples de ces deux pays sont<br />
méfiants à l’égard du « rival ».<br />
Les É.-U. semblent donc actuellement sur la pente descendante<br />
avec de grosses dépenses en cours et à venir, tandis que la Russie<br />
est, elle, en plein essor économique.<br />
Et ce n’est pas une Union Européenne, divisée par exemple sur la<br />
question du Kosovo (certains membres ont reconnu l’indépendance<br />
de ce territoire) et réduisant son budget militaire, qui va pouvoir<br />
jouer le rôle d’arbitre en cas de conflit éventuel. D’autant plus que la<br />
situation au Moyen-Orient est plus que tendue…<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 011
AFFAIRES//<br />
Anne-Sophie Pratte<br />
anne-sophie.pratte@hec.ca<br />
La valse<br />
des banques<br />
américaines<br />
Banques d’investissement et banques commerciales<br />
forment un curieux ménage. Leurs mariages forcés et leurs divorces agitent Wall Street, Bay<br />
Street, Main Street et même Côte-Sainte-Catherine depuis un siècle. À la suite de la crise<br />
financière actuelle, les banques d’affaires et les banques commerciales reviennent aux valeurs<br />
traditionnelles du mariage d’avant 1929. Jean Roy, professeur titulaire de finance à HEC<br />
Montréal, explique comment la structure des banques a favorisé la crise financière.<br />
Mariage<br />
Avant 1929, les activités risquées des banques d’investissement<br />
étaient intégrées aux banques commerciales. Le risque se mariait<br />
avec la stabilité. Lors de la crise de 1929, la division d’investissements<br />
des banques s’est effondrée, déclenchant des faillites bancaires. Les<br />
dépôts des épargnants ont alors subi directement les contrecoups<br />
de la débandade des investissements. Les banques, aux prises avec<br />
de lourdes pertes, étaient incapables d’honorer les dépôts, au grand<br />
dam des détenteurs de comptes bancaires.<br />
Divorce<br />
Pour sécuriser le système et protéger la population, on a séparé les<br />
activités risquées d’investissements des activités bancaires touchant<br />
les épargnants. On a également instauré une assurance des dépôts<br />
bancaires. Le divorce a été scellé en 1933 par la loi Glass-Steagall,<br />
dans le but d’assurer une meilleure surveillance du marché des<br />
banques, désormais fragmenté. L’isolement du risque a créé un effet<br />
de levier gigantesque chez les banques d’investissement. Cellesci,<br />
moins règlementées, pouvaient s’endetter démesurément par<br />
rapport à leur capital. « De deux à trois pourcent de ratio de capital,<br />
ça s’efface très vite », vulgarise Jean Roy. En effet, plus le ratio de<br />
capital est faible, plus l’effet de levier est grand : on s’endette pour<br />
financer les actifs. Selon le principe du levier, quand tout va bien,<br />
des profits faramineux sont au rendez-vous. Mais lorsqu’un nuage<br />
plane, c’est la saignée.<br />
Les autorités américaines ont laissé les banques d’investissement<br />
évoluer frivolement sans règlementation, tels de joyeux célibataires<br />
aux instincts spéculateurs éveillés. On surveillait et règlementait<br />
davantage les banques commerciales. Résultat : elles sont<br />
aujourd’hui en position solide grâce à leur discipline, et peuvent<br />
absorber les chocs en prenant sous leur aile les banques<br />
d’investissement déchues. La source du mal : l’immobilier. « Les<br />
institutions ayant le plus souffert sont celles qui ont investi dans<br />
les Mortgage back securities », précise le professeur.<br />
Réconciliation<br />
En 1999, la loi Gramm-Leach-Bliley a permis aux banques<br />
d’investissement et commerciales de se fréquenter de nouveau.<br />
Depuis, on assiste à une consolidation d’abord progressive du<br />
système bancaire. L’intégration est brusquée par l’effondrement<br />
des banques d’investissement cette année.<br />
Remariage<br />
Récemment en 2008, les banques centrales forcent des fusions :<br />
JPMorganChase, Bank of America et Barclays sont tenues d’intégrer<br />
Bear Stearns, Merrill Lynch et Lehman Brothers. « Vous noterez<br />
l’ironie, sourit Jean Roy. On retourne à la structure d’avant 1929,<br />
où les banques d’affaires et commerciales étaient intégrées. »<br />
Sélection naturelle<br />
Selon Jean Roy, les plus faibles institutions financières périront. Il<br />
évoque une théorie darwinienne appliquée à la finance. « Je crois<br />
aux longs cycles. Le monde de la finance reçoit une douche froide<br />
qui rendra tout le monde conservateur pour les 15 prochaines<br />
années. Comme l’histoire nous l’a montré, les évènements vont<br />
marquer la mémoire collective, puis vont s’effacer. » Le professeur<br />
va même jusqu’à prévoir la prochaine prise dans 50 à 70 ans. À<br />
cette époque, la majorité des bacheliers de HEC auront environ…<br />
l’âge de John McCain !<br />
Le plan<br />
de sauvetage<br />
Plusieurs éléments principaux composent le plan de sauvetage,<br />
long de 451 pages au moment de mettre sous presse.<br />
- Les fameux 850 milliards soulageront le système des<br />
mauvaises créances. Ainsi, les bilans des institutions<br />
financières respireront.<br />
- Puis, on s’assurera, par des règlements, que les fonds seront<br />
gérés de manière responsable.<br />
- Le plan prévoit des mesures pour que les contribuables<br />
goûtent aux bénéfices provenant des rachats de titres<br />
par le gouvernement.<br />
- Le plan de sauvetage accepté par le Sénat américain le<br />
1 er octobre comporte des crédits d’impôts de 100 milliards<br />
visant la classe moyenne et les entreprises.<br />
- On plafonnera à 500 000 $ la rémunération<br />
des dirigeants d’entreprises.<br />
- La garantie des dépôts bancaires par la Federal Deposit<br />
Insurance Corporation (FDIC) sera haussée de 100 000 $<br />
à 250 000 $.<br />
Fait ahurissant noté par Jean Roy : la première version du plan<br />
donnait tous les droits au Trésor américain, dirigé par Henry Paulson,<br />
tel que stipulé dans cet extrait du plan publié le 19 septembre.<br />
« Decisions by the Secretary pursuant to the authority of this Act<br />
are non-reviewable and committed to agency discretion, and may<br />
not be reviewed by any court of law or any administrative agency. »<br />
(New York Times)<br />
« Il faut être culotté et avoir de la testostérone pour proposer une<br />
telle mesure ! », commente Jean Roy.<br />
Une banque de mots<br />
à comprendre :<br />
Qu’est-ce qu’une banque<br />
d’investissement ?<br />
Aussi appelée banque d’affaires, elle joue un rôle d’intermédiaire<br />
entre les opérations financières : émission de tires, gestion de<br />
portefeuille, courtage, fusion-acquisition. Certaines s’en sont<br />
donné à cœur joie dans les placements spéculatifs. Moins<br />
règlementées, elles ne font pas affaire avec les consommateurs.<br />
Parmi les anciennes plus importantes aux États-Unis figurent<br />
Bear Stearns, Merrill Lynch et Lehman Brothers.<br />
Qu’est-ce qu’une banque commerciale ?<br />
Aussi appelée banque de détail, elle est une banque telle que<br />
celles que l’on connaît, qui prêtent et recueillent les dépôts<br />
grâce à des comptes bancaires accordés aux particuliers et aux<br />
entreprises. Les plus importantes aux États-Unis sont Bank of<br />
America, JP Morgan Chase, Barclays.<br />
012 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03
AFFAIRES//<br />
Antoine Nivard<br />
antoine.nivard@hec.ca<br />
Portrait de<br />
Michel Beaudet,<br />
fondateur des « Têtes à Claques »<br />
et de Salambo Productions<br />
Alors que Michel Beaudet s’apprête à devenir papa, il lui vient l’idée de créer des petites figurines animées<br />
sur ordinateur pour amuser ses futurs enfants. Il commence à monter des clips vidéo avec des figurines de grenouilles parlantes et cherche<br />
rapidement à améliorer ses techniques de montage en simplifiant le processus d’animation de la bouche et des yeux. « L’animation de la bouche<br />
et des yeux est l’opération la plus complexe du montage : j’ai donc décidé d’apposer les miens sur mes personnages à des fins de simplification »,<br />
nous déclare Michel Beaudet. L’idée fait sensation auprès de son entourage, les réputées « Têtes à Claques » étaient nées...<br />
Il continue alors à créer des clips tranquillement puis, au bout<br />
de sept capsules, il enregistre un DVD pour le soumettre à<br />
des maisons de production en utilisant son ancien réseau de<br />
contacts. Connaissant très bien le secteur de la publicité et<br />
de la télévision, Michel Beaudet savait alors que les délais<br />
étaient extrêmement longs avant de se voir accepté sur un<br />
programme télévisé. Finalement, sans attendre de voir ses<br />
clips diffusés sur l’une des grandes chaines canadiennes et<br />
avec l’idée que « la vidéo se tourne de plus en plus vers le<br />
web », Michel se lance seul et entreprend de diffuser ses clips<br />
sur un site web créé pour l’occasion avec l’aide d’un ami.<br />
« À 39 ans, j’avais travaillé 15 ans dans le domaine de la<br />
publicité, j’avais envie de changement et pourquoi pas de créer mon<br />
propre studio d’animation », nous confie-t-il. Le 16 août 2006, c’est<br />
chose faite : il envoie un courriel à 50 amis et connaissances de<br />
son ancien milieu professionnel et publie 18 capsules des « Têtes<br />
à claques » en créant Salambo Productions Inc. avec la ferme idée<br />
que ses petites figurines vont connaître un franc succès. Il décide<br />
alors de publier un clip par semaine. Dès les premiers jours, le<br />
phénomène des « Têtes à claques » se diffuse rapidement sur le web<br />
et le site réalise 500 000 visiteurs en un mois. Pas plus tard que<br />
deux semaines après la création du site, il engage deux assistants<br />
pour l’aider au montage et à la production en réponse à l’énorme<br />
popularité des personnages animés.<br />
Bien que Michel Beaudet ait imaginé que des compagnies<br />
de publicité 1 ou de médias s’intéresseraient à ses figurines<br />
innovatrices, sa ténacité et son audace l’ont finalement poussé à<br />
refuser dans un premier temps les offres de grandes compagnies<br />
de médias canadiennes pour garder un contrôle sur le lancement<br />
de son produit. La croissance du phénomène est très rapide et en<br />
trois mois, les « Têtes à Claques » sont devenues l’un des sites<br />
francophones les plus importants. A ce moment là, les qualités<br />
de gestionnaires de Michel furent mises à l’épreuve face à des<br />
obstacles financiers qu’il a fallut régler. Au départ l’hébergement<br />
du site web sur un serveur coûtait à Salambo Productions 750 $ par<br />
an. Après l’explosion du phénomène, le contrat avec le serveur a dû<br />
être révisé pour soutenir le besoin en bande passante du site; il lui<br />
en coûtait désormais 4 000 $ non plus par an mais pas mois ! Puis<br />
trois mois après la mise en ligne des « Têtes à Claques », les frais<br />
d’hébergement s’élevaient à 25 000 $ par mois. « Les 3 premiers<br />
mois, tout le monde se marrait sauf moi », nous confie Michel.<br />
Pour faire face à ces premiers obstacles, Michel a su<br />
habilement utiliser son expérience professionnelle pour mobiliser<br />
ses connaissances et développer un modèle d’affaires pour<br />
rentabiliser son produit. Sa connaissance de la valeur du « dollar<br />
publicitaire » et son million de visiteurs uniques 2 par mois lui ont<br />
permis de rassurer rapidement le monde de la publicité. Début 2007,<br />
Salambo Production signe une entente avec la régie publicitaire<br />
Olive Canada qui lui assure des revenus fixes et lui permet de se<br />
consacrer au développement de son projet. Michel engage plusieurs<br />
spécialistes en compression vidéo, en montage, en développement<br />
web et toujours dans l’objectif de garder le contrôle, il demande<br />
le retrait de ses vidéos sur des diffuseurs publics comme Youtube<br />
ou DailyMotion.<br />
Au fil du développement du projet, Michel Beaudet a<br />
développé sa vision d’affaires avec l’expertise de son domaine et<br />
la connaissance de son environnement. Le succès de ses figurines<br />
s’apparente à plusieurs facteurs. Les « Têtes à Claques » sont le<br />
premier site québécois humoristique qui lui donne les avantages<br />
d’une concurrence inexistante, mais le projet est également<br />
précurseur d’une technique d’animation atypique mais très simple<br />
qui révèle une « identité visuelle » particulière. Enfin, « les gens se<br />
sont retrouvés dans les thèmes de mes clips qui, en fin de compte,<br />
pouvaient traiter de tout et n’importe quoi », nous dit Michel. Les<br />
« Têtes à Claques » sont désormais largement connues du public<br />
québécois et les clips ont même été diffusés régulièrement à la<br />
télévision française. Un an après la création des « Têtes à Claques »,<br />
Salambo Productions a fait affaire avec 47 entreprises différentes.<br />
L’équipe de Michel Beaudet compte désormais 13 employés<br />
et deux pigistes, et son entreprise (qui jouit d’une bonne santé<br />
financière et de l’aide d’aucun créancier) se développe aujourd’hui<br />
à l’international en diffusant des clips en anglais avec pour modeste<br />
ambition de « faire partie du paysage anglophone ». Michel cherche<br />
à éviter de trop regarder dans le futur, parce qu’il considère la réalité<br />
comme différente de celle que l’on attend et voit le développement<br />
de son entreprise comme « l’œuvre de chaque jour ». Il entreprend<br />
aujourd’hui « une pause dans la création de clips pour se consacrer<br />
à un projet plus considérable qui vise à pousser [ses] personnages<br />
au maximum de leur potentiel auprès de son public. »<br />
1 Michel avait pensé que les compagnies de téléphonie seraient intéressées à ses figurines<br />
« puisqu’elles ont pour habitude de faire de la publicité avec des personnages auxquels les<br />
gens s’identifient ».<br />
2 L’expression « visiteurs uniques » dans la gestion de site web se distingue de celle de « visiteur »<br />
grâce à des systèmes d’analyse qui permet d’identifier les personnes qui se connectent sur un<br />
site plusieurs fois pour les comptabiliser qu’une seule fois.<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 013
AFFAIRES//<br />
Entrevue avec Diane Bérard,<br />
rédactrice en chef du magazine Commerce<br />
De pigiste<br />
à rédactrice en chef<br />
CAROLINE PAILLIEZ<br />
caroline.pailliez@hec.ca<br />
Diane Bérard voulait devenir auteure dramatique. À 16 ans, elle s’est présentée<br />
aux auditions de l’École nationale de théâtre. Retenue finaliste, elle n’a toutefois pas été acceptée. Au plus grand profit<br />
de la presse québécoise. La rédactrice en chef du magazine Commerce se tourne alors vers une formation en sciences<br />
politiques puis vers une maîtrise en économie industrielle à l’Université de Montréal.<br />
Comment avez-vous bifurqué<br />
vers le journalisme ?<br />
« Je travaillais à l’époque comme analyste en productivité. Nous<br />
cherchions comment tirer le maximum des ressources en travaillant<br />
plus intelligemment. J’aimais beaucoup ce travail mais, à moyen<br />
terme, le parcours d’économiste me destinait à travailler dans une<br />
banque, ce qui ne me tentait pas vraiment. Je ne me voyais pas<br />
assise derrière un bureau toute la journée. J’ai donc commencé à<br />
écrire des articles à la pige. »<br />
Pourquoi Transcontinental ?<br />
« Parce que j’aime l’écriture magazine et que Transcontinental<br />
possède le plus grand portefeuille de magazines d’affaires au<br />
Québec. Au moment où j’ai commencé ma carrière, les journalistes<br />
qui s’intéressaient à l’économie étaient une denrée rare; les<br />
magazines nous recherchaient. J’ai donc commencé à me faire<br />
connaître en envoyant régulièrement des suggestions d’articles<br />
aux rédacteurs des magazines de Transcontinental. Au fil des ans,<br />
Transcontinental m’a souvent offert des postes de journaliste, mais<br />
j’ai toujours refusé. Je tenais trop à la liberté dont je jouissais en<br />
tant que pigiste. Après avoir fondé une famille, il a bien fallu que<br />
je m’établisse plus sérieusement. J’ai donc accepté le poste de<br />
journaliste au magazine Commerce. Deux ans après, en 2002, le<br />
rédacteur en chef, René Vézina, s’est vu proposer le poste équivalent<br />
au journal Les Affaires : j’ai alors repris sa place. »<br />
En quoi votre formation en économie<br />
vous sert-elle en journalisme ?<br />
« La formation que j’ai reçue en économie et en sciences politiques<br />
m’aide de plus en plus. Elle m’aide d’une part à mieux comprendre la<br />
scène économique, mais aussi à établir des liens. Et c’est la clé d’un<br />
bon magazine : il faut être capable de faire des liens pour pouvoir<br />
déterminer par la suite les conséquences de telle ou telle situation.<br />
Le lecteur recherche une analyse; on lui mâche en quelque sorte<br />
le travail. »<br />
Quels sont les débouchés<br />
du journalisme au Québec ?<br />
« Ce n’est pas une profession qui absorbe des dizaines de nouveaux<br />
gradués chaque année. Dans le journalisme économique, par contre,<br />
on connaît une pénurie. Mais cela ne signifie pas pour autant que<br />
nous allons réduire nos standards. Il nous faut des gens qui soient<br />
capables de rédiger des articles portant sur des sujets complexes<br />
et ce rapidement. Ceux qui y arrivent trouvent des contrats de<br />
pige facilement. »<br />
Quelle est la meilleure formation<br />
selon vous ?<br />
« Il n’y a pas de formation idéale. Tout dépend du type d’article que<br />
l’on a envie d’écrire. Si l’on s’intéresse à l’économie, il est préférable<br />
d’avoir une base économique, mais il faut savoir écrire en parallèle.<br />
À l’inverse, on peut très bien avoir une formation en journalisme et<br />
accumuler des connaissances en économie. Lorsque je reçois un CV<br />
assorti d’un synopsis, je regarde davantage le synopsis que le CV. Je<br />
vérifie l’effort de recherche, les sources citées, l’originalité du sujet<br />
et de l’angle et, bien sûr, l’orthographe et le style. »<br />
Pourriez-vous citer les trois qualités<br />
d’un bon journaliste ?<br />
« Le journaliste doit avant tout être curieux. Il doit également avoir<br />
de l’entre-gens, c’est-à-dire savoir se conduire en société, être<br />
habile à entrer en relation avec toutes sortes de personnes, être<br />
capable de s’adapter. Et enfin, il doit avoir une belle plume. On ne<br />
demande pas un Balzac mais une plume efficace. »<br />
Comment avez-vous réagi face au déclin<br />
de la presse écrite en Amérique du Nord ?<br />
« Nous avons restructuré le magazine en le divisant en trois<br />
sections clairement identifiées : les enjeux, les stratégies et le<br />
monde. Ceci afin que nos lecteurs comprennent davantage notre<br />
mission et notre pertinence comme lecture d’affaires. Nous avons<br />
aussi revu le graphisme pour rendre le magazine plus attrayant.<br />
Nous voulions attirer un lectorat plus jeune sans pour autant<br />
éloigner notre public plus âgé. Les deux groupes ont bien réagi;<br />
nous avons gagné des lecteurs sans en perdre. Par exemple, nos<br />
abonnés ont adoré la chronique du PDG masqué, un président qui,<br />
sous le couvert de l’anonymat, a partagé ses expériences et ses<br />
réflexions. L’expérience a duré trois ans. Le mois dernier, nous avons<br />
remplacé cette chronique par une autre sur le leadership, un sujet<br />
qui préoccupe de nombreux gens d’affaires. »<br />
Pendant la conférence de lundi dernier<br />
à HEC Montréal qui portait sur le thème<br />
Affaires et Média, vous avez parlé<br />
du phénomène d’éditorialisme. Que<br />
conseillez-vous aux journalistes ?<br />
« Il faut faire attention à ce phénomène qui prend beaucoup<br />
d’ampleur. Avec la montée du web, tout le monde peut s’improviser<br />
journaliste. On voit déferler une grande vague de blogueurs qui<br />
commentent des sujets d’actualité. Cela met de la pression sur<br />
les journalistes, qui ont la tentation de verser dans l’éditorialisme.<br />
On a l’impression qu’il faut avoir son propre blogue pour être plus<br />
en vogue. Mais avant de se dire éditorialiste, il faut déjà avoir des<br />
réalisations derrière soi. Il faut avoir accumulé des connaissances<br />
et de l’expérience, avoir rédigé de nombreux articles qui se sont<br />
fait remarquer par leur profondeur et leur intelligence. Le métier<br />
d’éditorialiste, tout comme celui de journaliste, ne s’improvise pas<br />
et il faut se méfier du mélange des genres. »<br />
014 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03
CHRONIQUE//<br />
Jean Raphaël Gosselin<br />
jean-raphael.gosselin@hec.ca<br />
L’ensemble des célébrations marquant le centenaire risque<br />
d’être une grande réussite mais, afin de couronner le tout, le<br />
CH se doit de faire tous les efforts nécessaires pour ramener<br />
la Coupe à Montréal. Il s’agirait alors d’une 25 e Coupe Stanley,<br />
mais voyons s’il est possible pour les amateurs de rêver.<br />
Le gros du travail de Bob Gainey est déjà accompli avec les<br />
différentes acquisitions et les quelques signatures de contrat que<br />
nous avons connues au cours de la période estivale. S’ajoutent à<br />
l’équipe : George Laraque, Alex Tanguay et Robert Lang; et quittent<br />
le club : Michael Ryder et Mark Streit. Suite à ce changement de<br />
personnel, la tâche revient à Guy Carbonneau de mettre sur pied<br />
une formation de hockey solide capable de défendre son titre de<br />
champion d’association acquis à l’exercice précédent. La pression<br />
est forte puisqu’il s’agit d’une saison importante pour le CH. En<br />
juillet 2009, de nombreux joueurs tels qu’Alex Kovalev, Saku Koivu,<br />
Mike Komisarek et Alex Tanguay deviendront libres comme l’air.<br />
Malgré toute cette pression, les joueurs n’ont pas cessé de<br />
s’entraîner au cours de l’été. Ils devront tout donner sur la glace<br />
afin de mettre la main sur la Coupe Stanley. Outre les aspirations<br />
collectives, il y a celles individuelles : de nombreux joueurs ont des<br />
contrats qui arrivent à terme, donc pour appuyer leur prochaine<br />
signature de contrat, ils devront redoubler d’ardeur.<br />
POUR UNE CENTIÈME FOIS,<br />
L’ANNÉE SERA<br />
HOCKEY<br />
Le 4 décembre 1919, le club de hockey Canadiens<br />
prenait naissance. Pas moins de cent ans plus tard, il est<br />
plus vivant que jamais et s’apprête à disputer une saison des<br />
plus intéressantes.<br />
UNE ANNÉE EN TOUTE LÉGÈRETÉ<br />
Plusieurs joueurs se sont présentés à l’ouverture du camp<br />
d’entraînement de la saison 2008-2009 beaucoup plus légers qu’à<br />
la saison précédente. C’est le cas notamment de Carey Price, le<br />
jeune gardien de but prodige du Canadien. Cependant, Price a connu<br />
quelques difficultés en séries d’après saison. Suite à l’élimination de<br />
sa formation, le jeune homme expliquait ses contre-performances par<br />
le fait qu’il était épuisé mentalement. Pour les amateurs, le dossier<br />
était clos. Carey avait connu une grosse saison et à cet âge, cela<br />
représentait énormément de pression. Près de quatre mois se sont<br />
écoulés et pendant qu’on ne parle que de Mats Sundin à Montréal,<br />
Price s’efforce à perdre le plus de poids possible. C’est au milieu<br />
du mois de septembre qu’il se présente au camp d’entraînement<br />
du tricolore « plus en forme que jamais ». En fait, lors de la pesée<br />
officielle du 19 septembre dernier, il a fait osciller l’aiguille de la<br />
balance à 226 livres, ce qui représente une perte de poids de près de<br />
trente livres en quatre mois. Guy Carbonneau n’est pas inquiet de la<br />
situation, au contraire. Il affirme qu’il s’agit d’un changement pour le<br />
mieux et qu’il verra beaucoup de bénéfices au cours de la prochaine<br />
saison. Price avait « de très mauvaises habitudes alimentaires » et il<br />
n’était pas à son poids idéal au printemps. Voilà qui remet en doute<br />
les raisons qu’il a fournies aux Montréalais de sa baisse de régime<br />
en séries.<br />
Sur patins, Guillaume Latendresse se devait d’améliorer sa vitesse<br />
d’accélération. Son effort a été notable : on le compte aujourd’hui<br />
parmi les 6 plus rapides patineurs chez le Canadien. Une perte de<br />
poids de près de 15 livres a contribué à cette amélioration de sa<br />
vitesse d’accélération.<br />
La plus grande vedette du CH, Alex Kovalev, a également fondu au<br />
cours de l’été, affichant une perte de 10 livres par rapport à l’an<br />
dernier. Dans son cas, c’est pour « garder le rythme des jeunes » qu’il<br />
a perdu du poids. Il dit qu’à un certain âge, le fait de perdre du poids<br />
aide à maintenir une bonne vitesse sur la glace.<br />
Bref, si la perte de poids semble avoir été très populaire chez les<br />
joueurs du Canadien cet été, espérons seulement que George<br />
Laraque, le nouveau pugiliste du club, ne suivra pas la tendance.<br />
UNE ANNÉE DIFFICILEMENT PRÉVISIBLE<br />
Suite à une longue analyse en profondeur de la situation actuelle du<br />
Canadien, j’en viens aux prédictions suivantes : lorsque l’on observe<br />
l’alignement des autres formations de sa division, on réalise que le<br />
CH a la meilleure équipe sur papier. On pourrait fort bien le retrouver<br />
dans les trois premières formations de l’association de l’Est, derrière<br />
les Capitals de Washington et les Penguins de Pittsburg. Ce 3e rang<br />
garantirait aux hommes de Guy Carbonneau une position favorable<br />
lors des séries d’après-saison. Les joueurs ont suffisamment<br />
d’expérience pour se rendre en finale d’association sans trop<br />
de difficulté. La finale risque d’être coriace, mais la profondeur<br />
l’emportera sur le talent des autres équipes fortes de l’Est. Je ne<br />
crois cependant pas que les joueurs du tricolore ont la force de<br />
caractère et l’expérience nécessaires pour vaincre le meilleur club<br />
dans l’Ouest. Sur ce, je vous souhaite une bonne saison !<br />
LE DISCOURS DU FAN<br />
Picking up girls with Carey<br />
C’est incroyable comment être<br />
le gardien vedette du Canadien<br />
de Montréal amène son lot<br />
d’avantages. Et là je ne parle pas<br />
des millions de dollars qui traînent<br />
dans son compte en banque.<br />
JT UTAH<br />
Au moment d’écrire ces lignes,<br />
Carey Price était dans un bar « bawller » de la région de Montréal<br />
avec son boy Chris Higgins. Évidemment, ils étaient dans une<br />
section V.I.P., car Carey est très discret lorsqu’il est dans un lieu<br />
public. Il est toujours habillé sobrement avec jeans et t-shirt foncés<br />
(pas de t-shirt Ed Hardy, ouf !), ainsi qu’une casquette bien enfoncée<br />
sur la tête.<br />
Donc, cette soirée-là, Carey n’était pas envahi par des millions<br />
de groupies. Une de ses amies, qui voulait s’assurer que Carey<br />
ait beaucoup de plaisir lors de cette soirée, lui a proposé d’aller<br />
lui chercher une chicks sur la piste de danse. Price a donc jeté<br />
un regard sur la foule et a sélectionné une demoiselle. L’amie<br />
de Price, que nous allons nommer Natasha, est donc allée sur la<br />
piste et a dit à la fille que Carey Price, du Canadien de Montréal,<br />
désirait la rencontrer. Évidemment, la fille a accepté et elle est allée<br />
rejoindre Price dans sa section V.I.P. Malheureusement pour la jeune<br />
demoiselle, elle ne parlait pas un mot anglais, donc il était difficile<br />
pour elle et Carey d’avoir une conversation. Quelques instants plus<br />
tard, elle retournait sur la piste de danse en regrettant de ne pas<br />
parler anglais. Le 254-6011 a sûrement une nouvelle chicks comme<br />
cliente à l’heure actuelle.<br />
Malgré cette tentative infructueuse, Price et son amie trouvaient<br />
ce jeu bien amusant. Ils ont donc répété le scénario. Carey a<br />
sélectionné une autre fille et Natasha est retournée sur la piste pour<br />
la faire monter dans la section V.I.P. Cette fois, la jeune pouliche<br />
était capable d’avoir une conversation en anglais. Ils ont donc passé<br />
le reste de la soirée ensemble.<br />
Price et la petite poulichette ont quitté l’établissement main dans<br />
la main. À vous de faire vos propres conclusions. Qui a dit que<br />
les hommes avaient besoin des conseils de Marc Boilard pour<br />
rencontrer des filles ?<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 015
CHRONIQUE//<br />
Espaces communs<br />
et huis clos<br />
Edda Pizzati<br />
edda.pizzati@gmail.com<br />
Par expérience, j’aurais dû savoir que les décisions qu’on prend autour d’un verre de vodka-canneberge ne<br />
sont pas celles qu’on va raconter à nos enfants avec fierté. C’est pourtant comme ça que C et moi avons pris la décision<br />
d’emménager ensemble; ce qui nous a mené, le lendemain, à sauter de taxi en taxi pour visiter des appartements en<br />
plein mois de mars avec un mal de crâne, parce qu’un verre s’était transformé en deux et que deux plus un font trois et<br />
qu’avant qu’on ne le sache, on signait un bail de quinze mois pour un appartement trop petit et trop cher.<br />
Moi, je n’avais que la moitié des choses qu’un amour qui a duré<br />
trois ans peut nous faire accumuler; et elle, elle m’avait dit qu’elle<br />
avait les électros et un sofa. Dans le camion de déménagement<br />
Alain Tremblay à trente dollars de l’heure plus autres frais cachés,<br />
mes choses se sont entassées dans le coin, comme si tout ce sur<br />
quoi j’avais travaillé pendant les dernières années était en punition.<br />
Ses boîtes à elle, à moitié fermées et trop pleines, prenaient toute la<br />
place et tout était fragile, même les gadgets Starfrit dont jamais on<br />
ne se servirait. J’attendais, sur le trottoir glacé avec Winston – mon<br />
bouledogue dont j’avais gagné la garde – que les déménageurs<br />
finissent de vider le semi-sous-sol de ma nouvelle coloc dans notre<br />
nouvel appartement.<br />
Je contemplais le moment en<br />
me demandant si je n’étais<br />
pas face à un de ces instants<br />
décisifs dans une vie où il fallait<br />
que je crie « Stop ! » et retourne<br />
me coucher sur le futon dans le<br />
sous-sol de chez ma mère, qui<br />
avait été mon chez-moi pendant<br />
les dernières semaines. Mais.<br />
Mais je ne l’ai pas fait; j’ai<br />
décidé d’aller de l’avant, car<br />
j’avais trop peur de reculer. Six<br />
cents dollars plus tard, nous<br />
prétendions être trop fatiguées<br />
pour ouvrir la bouteille de faux<br />
champagne qu’on avait achetée<br />
pour célébrer notre colocation.<br />
La vérité est que chacune de<br />
nous voulait fuir l’autre pour ne<br />
pas avoir à teinter nos doutes<br />
d’un semblant d’enthousiasme.<br />
dit que son tapis-qui-n’en-est-pas-vraiment-un-puisqu’il-s’accrochesur-le-mur<br />
irait bien à l’entrée. C, elle, elle avait oublié de me dire<br />
qu’elle avait eu des incidents durant ses anciennes colocations;<br />
incidents impliquant cigarette, s’endormir, feu, matelas, pompiers<br />
et déménagements subséquents. Maintenant que je sais qu’on est<br />
toutes les deux des menteuses, je dois dormir l’œil ouvert, vérifier<br />
compulsivement les piles dans notre détecteur de fumée et prier<br />
secrètement que les dessins des poumons noircis sur les paquets de<br />
cigarettes la convainquent d’acheter Nicoret.<br />
Après quelques mois à habiter ensemble, nous avons aussi découvert<br />
que nous étions toutes les deux des paresseuses, ce qui aurait été<br />
utile de savoir avant qu’on prenne un abonnement d’un an pour<br />
le gym. Motivées par la motivation de l’autre, nous nous sommes<br />
acheté des nouveaux habits pour notre résolution de faire du sport,<br />
ce qui a fonctionné pendant les deux premières semaines. Après<br />
quoi nous avons dû annuler nos séances à cause des vacances, de la<br />
pluie, de la chaleur, du froid, des horaires d’autobus, jusqu’à ce que<br />
nous manquions d’excuses et que nous mettions plutôt notre énergie<br />
à essayer de trouver un moyen d’annuler notre abonnement.<br />
Habiter avec C a aussi ses avantages. Par exemple, puisqu’elle est<br />
une acheteuse compulsive, elle ne se rend pas compte que pour<br />
chaque nouveau gadget de cuisine qu’elle achète, j’en mets un vieux<br />
aux poubelles. Et en plus, on ne sait jamais quand on va avoir à<br />
se servir d’un Rice Cooker ou d’une planche à découper repliable.<br />
J’ai aussi découvert qu’elle était ridiculement difficile concernant<br />
l’alimentation.<br />
- Pourquoi tu as dit que<br />
Winston était petit ? Ton<br />
chien, il est énorme !<br />
- « Molosse » n’aurait pas<br />
eu le même effet sur les<br />
propriétaires…<br />
J’ai aussi menti quand j’ai dit<br />
qu’il ne perdait pas ses poils.<br />
Et aussi quand j’ai dit à C que<br />
l’odeur de sa cigarette (et autre<br />
fumée) ne me dérangerait pas.<br />
J’ai menti aussi quand je lui ai<br />
- C, aujourd’hui c’est moi qui fais à souper parce que ça fait une<br />
semaine que tu le fais…<br />
- Tu vas préparer quoi ?<br />
- J’avais pensé faire du foie et des têtes de violon…<br />
Alors là, inévitablement, elle propose de faire des pâtes pour nous<br />
deux. J’ai encore congé de cuisine, moi qui n’ai aucune idée de<br />
comment préparer des têtes de violon. C’est ça, vivre en colocation,<br />
c’est apprendre à faire des compromis. J’accepte son tapis sur le<br />
mur que j’ai appris à bloquer de ma vue et elle, elle me promet de<br />
faire attention avec ses cigarettes et a même accepté de remplir le<br />
bol d’eau de Winston…<br />
016 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03
CHRONIQUE//<br />
Karl Villeneuve<br />
karl.villeneuve@hec.ca<br />
La chronique du père de famille<br />
Le métier de chef produit<br />
Les responsabilités d’un chef produit<br />
sont multiples, mais reviennent aux<br />
fameux 4P ou 5P du marketing soit :<br />
Pricing, Product, Placement, Promotion,<br />
People. Nous nous concentrerons ici<br />
sur le premier : l’établissement du<br />
prix, un élément clé dans la stratégie<br />
d’une entreprise.<br />
Le chef produit a donc une responsabilité critique, car il établit les prix<br />
des produits.<br />
- S’il établit les prix trop hauts, les ventes diminueront et les<br />
directeurs des ventes lui téléphoneront rapidement pour lui faire<br />
des commentaires pas toujours cordiaux (par exemple pour le<br />
traiter de malade et l’informer que LEURS compétiteurs dans<br />
LEUR marché vendent les mêmes produits 20 % moins cher !) PS :<br />
Notez bien l’emphase sur le pronom : pour les gens en ventes,<br />
« leur » marché est toujours très différent des autres marchés.<br />
Leur marché a des caractéristiques uniques.<br />
- S’il établit les prix trop bas, les ventes augmenteront, mais les<br />
profits ne seront pas au rendez-vous et le chef produit recevra un<br />
appel de son patron se plaignant qu’il « donne » le produit et qu’il<br />
nuit à la marge brute de la compagnie.<br />
- S’il trouve le juste prix, le téléphone ne sonnera pas et ce sera<br />
« business as usual ». Le directeur marketing se fera féliciter par<br />
le président pour avoir su conserver ou augmenter les marges.<br />
Les vendeurs se féliciteront de leurs habiletés et de leur talent<br />
de persuasion pour convaincre les clients d’acheter les produits<br />
de la compagnie.<br />
Nous caricaturons, mais pas tant que ça.<br />
Alors comment s’y prendre ?<br />
Il existe plusieurs façons pour établir le juste prix pour un produit :<br />
- Faire une étude des prix de la compétition en récoltant les<br />
catalogues, les promotions, en consultant Internet ou avec les<br />
soumissions des compétiteurs. Pour établir le juste prix, votre<br />
travail sera grandement facilité si vous avez d’excellentes relations<br />
avec la force de ventes. Ce sont eux qui sont sur le terrain et qui<br />
peuvent récolter les meilleures informations. Vous pouvez ainsi<br />
comparer ces prix avec vos coûts et déterminer si les marges de<br />
profits seraient acceptables pour votre société à un tel prix.<br />
- Vous pouvez aussi décider d’utiliser des marges de profits préétablies<br />
pour des catégories de produits. La plupart des entreprises ont<br />
maintenant des systèmes d’information permettant d’extraire les<br />
informations sur les marges par produit. Vous pouvez rouler un<br />
rapport sur quelques années et voir l’évolution des prix. Souvent,<br />
c’est l’occasion d’améliorer la profitabilité d’un profit en créant une<br />
nouvelle structure de prix avec des marges un peu plus hautes.<br />
En guise de conclusion, le métier de chef produit est très intéressant car<br />
très diversifié. J’ai tenté de vous donner un aperçu de l’établissement<br />
des prix. N’oubliez jamais que sans des prix suffisamment hauts pour<br />
générer de bons profits, une entreprise cessera d’exister.<br />
La conciliation travail-famille pour un poste de chef produit est un peu<br />
plus difficile que pour le travail de représentant-chargé de comptes.<br />
La majorité du travail se fait au bureau et il est difficile de s’absenter<br />
car il y a plusieurs réunions et interactions avec d’autres fonctions<br />
de l’organisation comme les achats et les opérations. Le chef produit<br />
doit aussi voyager pour rencontrer des fournisseurs. Des voyages sont<br />
aussi requis pour visiter les directeurs des ventes dans les régions où<br />
l’entreprise est présente afin de bâtir un bon réseau et obtenir des<br />
informations sur l’utilisation des produits, les prix, etc.<br />
Au prochain numéro, nous parlerons de la gestion des produits.<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 017
CHRONIQUE//<br />
Alain Badolato<br />
alainbadolato@hotmail.com<br />
Chronique automobile<br />
Mazda6 2009 :<br />
La voiture de l’année !<br />
En effet, selon « L’auto 2009 » écrit par Jacques Duval, Éric<br />
LeFrançois et Jean-François Guay, la nouvelle Mazda6 2009 représente<br />
la voiture de l’année entre autres grâce à son style très séduisant, mais<br />
également dû à la qualité globale de sa présentation tant intérieure<br />
qu’extérieure. J’ai eu la chance de faire l’essai routier de la version<br />
GT-V6 toute équipée et je peux certifier avec assurance qu’il s’agit d’une<br />
vraie « bombe » très agréable et silencieuse sur la route.<br />
Extérieur :<br />
À mon avis, l’avant du véhicule est le plus réussi puisqu’ il reprend<br />
les courbes de la sportive Mazda RX-8. Du premier coup d’œil, on<br />
remarque les ailes légèrement bombées et plus larges que l’ancien<br />
modèle ainsi qu’un museau qui est plus bas. De série sur la GT-V6 et<br />
en option sur la GT 4 cylindres, les phares au xénon légèrement bleuté<br />
viennent non seulement donner un air de Mercedes ou BMW à la<br />
Mazda6, ils contribuent également à projeter trois fois plus de lumière,<br />
utilisent 30 à 40 % moins d’énergie et durent cinq fois plus longtemps<br />
que les phares standards à halogène qui sont plutôt jaunâtres. Bonne<br />
nouvelle : la version de base GS arrive maintenant chaussée avec des<br />
jantes en alliage de 17 pouces qui privilégient le confort et la version<br />
GT, avec le 4 cylindres ou le V6, et est offerte avec des jantes de 18<br />
pouces qui sont plutôt axées sur la tenue de route sportive.<br />
Intérieur :<br />
Je n’avais pas l’impression d’être à bord d’une Mazda tellement<br />
l’intérieur était luxueux et les commandes étaient bien placées. Les<br />
touches de chrome, la forme moderne du tableau de bord ainsi que le<br />
bouton-poussoir pour démarrer le moteur sans la clé comme une voiture<br />
de course m’ont donné l’illusion de conduire une voiture de luxe tout<br />
en économisant beaucoup d’argent à l’achat ! Malheureusement, j’ai<br />
trouvé que le dégagement pour la tête en arrière n’était pas suffisant,<br />
du moins pour les personnes de grande taille. Néanmoins, les sièges<br />
étaient confortables et l’espace pour les jambes était adéquat.<br />
Moteur :<br />
Deux moteurs sont offerts pour la nouvelle cuvée Mazda6 : le premier<br />
est un 4 cylindres de 2,5 litres développant 170 chevaux, soit 14 de<br />
plus que l’ancien modèle; et le second est un V6 de 3,7 litres de 272<br />
chevaux, donc 60 de plus que l’ancienne Mazda6. Étonnement, grâce<br />
à la nouvelle technologie, la transmission automatique à 5 vitesses<br />
consomme moins que la manuelle à 6 vitesses pour ce qui est du 4<br />
cylindres : 6,7 litres aux 100 km sur la route et 9,7 L en ville. Le point<br />
un peu plus négatif est la version V6 beaucoup plus performante,<br />
mais également assoiffée à la station-service. Elle est seulement<br />
offerte avec la transmission automatique à 6 vitesses et consomme<br />
plus que la version précédente dû à son poids et sa puissance qui ont<br />
augmenté : 8 L/100 km sur toute et 12,1 L en ville.<br />
Conclusion :<br />
Grâce à son look extrêmement amélioré, tant à l’extérieur qu’à<br />
l’intérieur, cette nouvelle voiture de l’année risque de très bien se<br />
vendre, mais sa consommation d’essence un peu élevé par rapport<br />
aux exigences d’économie de carburant de la part des consommateurs<br />
va peut-être faire en sorte qu’elle ne trônera pas au premier rang<br />
indéfiniment. Par contre si vous ou vos proches avez entre 22 495 $<br />
et 33 095 $ à investir pour un véhicule de qualité, fiable et ayant<br />
prouvé sa crédibilité, n’hésitez pas à aller faire l’essai routier de cette<br />
nouveauté 2009 !<br />
Camille Nantois<br />
camille.nantois@hec.ca<br />
Ça y est ! Les étudiants désireux de partir en échange se sont<br />
vu attribuer leur destination. Depuis quelques jours, HEC les<br />
prépare à ce nouveau départ en organisant des réunions<br />
d’information et des rencontres entre étudiants. Mais ce ne<br />
sont pas tous ces renseignements administratifs qui vous<br />
aideront à vous intégrer une fois sur place. Et si vous croyez<br />
qu’en portant un sombrero au Mexique ou une chapka en<br />
Russie vous passerez inaperçus… Détrompez-vous !<br />
J’ai sondé pour vous les tendances des quatre coins du monde, alors<br />
suivez le guide.<br />
Pour ceux qui partent en Asie, ce n’est pas la peine de s’essayer au<br />
kimono ou au chapeau pointu; ces vêtements traditionnels ne sont<br />
plus vraiment d’usage courant. À Hong Kong, la mode est plutôt au<br />
féminin-masculin, notamment depuis qu’une pop star a porté ce<br />
fameux MC Hammer pants, ce pantalon bouffant qui vous donne des<br />
airs d’Aladin. Les Japonaises, quant à elles, ont redéfini la sensualité<br />
en optant pour de la lingerie en coton équitable : on épure pour<br />
ressembler à Mère Nature. Résultat : les hommes sont contents et la<br />
planète aussi ! En Chine, par contre, les filles ont un style beaucoup<br />
Chronique mode<br />
Passeport pour la mode<br />
plus sage et conservateur. Alors mesdemoiselles, laissez votre chum<br />
partir tranquille; il ne sera pas tenté.<br />
Si vous déménagez en Scandinavie ou en Russie, pas la peine<br />
d’emporter vos peaux de phoques. Là-bas, le style est plutôt<br />
rafraîchissant et avant-gardiste, d’inspiration grunge. Si vous voulez<br />
faire « locales », habillez-vous d’une jupe de patineuse, et chaussez<br />
des bottillons lacés, sans oublier la toque en fourrure : indémodable !<br />
Mais ne tombez pas dans le style nouveau riche mafioso en adoptant<br />
des manteaux en fausse fourrure et des bijoux clinquants.<br />
En Amérique latine, laissez-vous aller, la mode est riche en couleur !<br />
En Uruguay, les slims se portent violet, jaune ou rouge, tant qu’ils<br />
sont assortis d’un col roulé. Eh oui, dans ce pays, on montre ses<br />
fesses sur la plage en arborant des maillots échancrés à outrance,<br />
mais surtout pas sa poitrine ! Pour sortir en boîte, le must est le col<br />
roulé blanc (pour une fois vous n’attraperez pas un rhume en dansant)<br />
porté avec un médaillon de la Vierge autour du cou et des grosses<br />
perles aux oreilles. Chez les garçons, la mode est au style « gaucho » :<br />
jeans clairs et grosses ceintures en cuir. Avec le détail, discret mais<br />
authentique : la queue<br />
de rat dans la nuque.<br />
Petit indice pour les<br />
intéressées : cette<br />
coiffure signifie que le<br />
garçon est en couple,<br />
donc pas d’approche<br />
coquine ! En Argentine,<br />
l’accessoire que tout le monde arbore<br />
(bien que démodé depuis bientôt une<br />
décennie chez nous) est le modèle Ninja<br />
de Nike, ces baskets souples à scratch où<br />
le pouce de pied se retrouve tout seul dans<br />
son coin.<br />
Voilà, maintenant vous êtes prêts à<br />
voyager ! Et surtout ne paniquez pas : si<br />
vous avez peur de ne pas réussir à enfiler<br />
le costume local, il y aura toujours un bon<br />
vieux H&M pas loin…<br />
018 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | VOLUME 53, NUMERO 03
CHRONIQUE//<br />
Séduction 101 : version féminine<br />
Vendredi soir, dans une boîte bien achalandée du boulevard St-Laurent, Darianne, ma grande chum de longue<br />
Mylène Girard<br />
mylene.girard@hec.ca<br />
date, sirote distraitement son Apricot Brandy Sour. À l’ordre du jour : le résumé non évènementiel de sa semaine en tant<br />
que nouvelle comptable, son repas de la veille et la suite tant attendue (ou presque) de son récent fantasme amoureux.<br />
Il s’appelle Ben et s’entraine au même gym qu’elle. Merci M. Ben de venir enfin changer les idées de ma meilleure amie.<br />
Depuis François, sa dernière fréquentation, ça n’allait pas fort fort. Pourtant, à la voir aller ce soir, les yeux papillotant d’un sens et de l’autre,<br />
je sais très bien qu’elle n’espère que de tomber face à face avec lui… au cas où. Au cas où il aurait changé d’idée, au cas où il comprendrait en la<br />
voyant que « she’s the one ». Allô Daria! Arrête ton cinéma !<br />
Non mais, quand même. Qu’est-ce qu’on dit à sa meilleure<br />
amie quand on est en couple depuis 5 ans ? « C’est pas<br />
grave ! Qui a besoin d’un mec qui la suit partout ? » Tout ça<br />
m’a amené à réfléchir. Comment Darianne, belle, intelligente<br />
et fougueuse pouvait-elle encore être sur le marché ?<br />
J’ai tourné et retourné la question plusieurs fois dans ma tête. À la<br />
recherche d’indices, j’ai sondé tous mes amis et amies avec un petit<br />
questionnaire sur l’art de la séduction (merci à tous ceux qui se sont<br />
prêtés au jeu). Le récapitulatif est sous vos yeux, à l’intérieur de<br />
ces petites fiches révélatrices ! Pour ceux et celles qui croient avoir<br />
trouvé la solution à leurs problèmes avec ces résultats, allez-y fort,<br />
découpez la petite fiche et trainez-la dans vos portefeuilles et sacs<br />
à main. Vous m’offrirez là tout un velours !<br />
Pour les autres qui sont plutôt d’avis que ces réponses n’ont rien<br />
de bien plus éclairant que celles d’un sondage CROP, et que les Cat<br />
Power de ce monde peuvent toutes continuer à chanter Where is<br />
my love ? devant leur micro, parce qu’il y aura toujours quelqu’un<br />
en train de brailler une peine d’amour quelque part… eh bien je<br />
compatis. Mais, j’ai peut-être quelque chose d’autre à vous offrir.<br />
contexte actuel d’élections fédérales, mais le chat doit sortir du<br />
sac ! En matière de « cruise », les meilleurs seront ceux en mesure<br />
de manipuler les ressources qui sont à leur disposition, et cela,<br />
mesdames et messieurs, s’appelle le pouvoir politique !<br />
Bien que des livres entiers couvrent ce sujet, je m’en tiendrai à trois<br />
conseils généraux pour apprenti-séducteurs et séductrices :<br />
1- Construisez votre réseau de relation autour de la personne<br />
choisie : soyez « friendly » avec les personnes qu’elle côtoie et<br />
éliminez les pommes pourries de votre réseau qui pourraient<br />
nuire à votre relation. Des « Maxime Bernier » à vos côtés ?<br />
Allez, oust !<br />
2- Soignez votre image ! Et je ne parle pas là de trimer sa barbe<br />
et d’épiler ses sourcils ! On évite les commentaires négatifs<br />
sur autrui, on accepte ses torts, on sympathise avec les<br />
problèmes de l’autre. Il y a toujours moyen de contourner le<br />
négativisme et d’être constructif. Si les cinq chefs ont réussi<br />
à se complimenter lors du débat, on le peut tous.<br />
3- Contrôlez-vous ! Le petit sourire de Harper alors qu’il se<br />
fait dire qu’il est un bon père, mais qu’il a des principes<br />
dangereux pour le Canada vous rappelle quelque chose…<br />
Nul besoin de grimper dans les rideaux si la conversation<br />
s’enflamme. Toutefois, la personne raisonnée et insensible<br />
ne fait pas fureur non plus. Sachez vous ajuster.<br />
Les habiletés politiques s’éloignent-elles trop de votre conception du<br />
coup de foudre ? Ce que vous cherchez au fond, c’est d’être aimé pour<br />
ce que vous êtes, sans avoir à influencer l’autre à le faire. Tenez bon,<br />
chaque nouveau refus vous rapproche de l’ultime « oui ». Patience.<br />
Un Dr. Love à HEC ?<br />
« C’est un vrai gourou, cet homme-là », me disait la semaine dernière<br />
un coéquipier de classe. Professeur du cours de management (mais<br />
plutôt de psychologie) « Comportement dans l’organisation », le<br />
gourou en question a un tel impact sur ses étudiants qu’on entend<br />
les échos de ses dires dans tous les autres cours de la concentration.<br />
Lorsque vous entendez un étudiant sortir une belle phrase songée,<br />
dites-vous que ce n’est sûrement pas sorti tout droit de son cru,<br />
mais bien de celui du gourou ! Bon, assez d’éloges, ceux qui le<br />
connaissent le reconnaîtront.<br />
Quoi qu’il en soit, son enseignement sort véritablement du cadre<br />
de l’entreprise, se transformant en véritable leçon de vie. Les<br />
relations de pouvoir et d’influence étant inhérentes à la nature<br />
humaine, j’ai pensé en appliquer quelques principes théoriques<br />
aux relations amoureuses. Fini le blabla de Molière sur les charmes<br />
inexplicables des commencements. Nous, universitaires, voulons du<br />
concret, de la méthode. L’objet de votre désir se montre réticent<br />
à vos approches ? Voyez-le alors comme un employé-problèmes et<br />
vous comme son supérieur immédiat. D’accord, vous ne possédez<br />
aucun pouvoir managérial sur lui ou elle, mais toutes vos qualités<br />
de leader peuvent être mises à disposition.<br />
Ce que je vais vous dire là risque de vous faire mal aux yeux, surtout<br />
considérant l’association naturelle que vous ferez étant donné le<br />
Vos opinions,<br />
chers messieurs,<br />
à propos de<br />
la fameuse « first date »<br />
1- Au premier rendez-vous, les dames doivent éviter<br />
d’aborder les sujets des « ex » et de l’argent.<br />
2- Mauvaise estime de soi, négativisme et sujets de<br />
conversations ennuyants chez les femmes, ça tape<br />
royalement sur les nerfs.<br />
3- Chez une dame, le sourire demeure toujours et encore la<br />
meilleure arme de séduction.<br />
4- Amour physique : les hommes considèrent que la totale<br />
et le réveil chez l’autre sont inadmissibles au premier<br />
rendez-vous (mais on s’entend que les opinions sont<br />
partagées à cet égard).<br />
5- Sex appeal et authenticité sont les éléments<br />
d’attirance par excellence que les hommes recherchent<br />
chez une femme.<br />
6- Un bon rendez-vous pour un homme ? On reprend alors<br />
contact au cours de la même semaine.<br />
7- Un mauvais rendez-vous ? On ne retourne ni appels,<br />
ni courriels.<br />
8- Et enfin, une fille se montrant trop entreprenante à aller<br />
visiter votre lit dès le premier rendez-vous… BYE BYE<br />
SERIOUS RELATIONSHIP !!<br />
Vos opinions,<br />
chères mesdames,<br />
à propos de<br />
la fameuse « first date »<br />
1- Messieurs, si possible, on ne parle pas des dernières<br />
fréquentations.<br />
2- Forcez-vous un peu côté conversation. Parler du dernier<br />
film plat que vous avez vu… ce n’est pas ce qu’on appelle<br />
un « turn on ».<br />
3- Vous avez aussi intérêt à vous mettre sur votre 36…<br />
Un beau look et c’est presque gagné.<br />
4- Prudence côté rapprochement physique : l’inadmissible va<br />
de la séance de « grinding » sur le plancher de danse à la<br />
totale.<br />
5- Vous êtes ambitieux, ne vous prenez pas pour un autre et<br />
possédez un certain charme… charnel ? C’est bien parti !<br />
6- Vous avez intéressé mademoiselle ? Elle vous le fera<br />
savoir au courant de la semaine.<br />
7- Pas de nouvelles ni de courriel après le premier rendezvous...<br />
pas de chances.<br />
8- Vous la désirez trop et lui sautez dessus dès la première<br />
soirée… tout n’est pas nécessairement perdu pour une<br />
relation future.<br />
VOLUME 53, NUMERO 03 | 9 OCTOBRE AU 5 novembre 2008 | 019