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Littérature et Mythologie dans La Pelle de Malaparte - Chroniques ...

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Littérature <strong>et</strong> <strong>Mythologie</strong> <strong>dans</strong> <strong>La</strong> <strong>Pelle</strong> <strong>de</strong> <strong>Malaparte</strong> 9suite à un accès <strong>de</strong> fièvre, un fœtus flasque s'avance pour jugerl'accusé <strong>Malaparte</strong>. Après une longue confrontation silencieuse, levieil ange engage une philippique contre tout prométhéisme qui ferait<strong>de</strong> l'homme une valeur positive alors qu'il n'est qu'une « choseignoble ». Le sens <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te diatribe part <strong>de</strong> la question « Tu es donc sifier d'être un homme », <strong>et</strong> aboutit à « Même le pardon est sale ».Autrement dit, en amont, l'homme n'est plus, comme la traditionantique <strong>et</strong> renaissante pouvait le laisser entendre, le terme éminent <strong>de</strong>la chaîne <strong>de</strong>s êtres, <strong>et</strong> en aval, il apparaît que même la moralechrétienne ne peut sauver l'humanité <strong>de</strong> sa fange. Il faut donc crevertous ces voiles <strong>de</strong> la Maya pour découvrir que le sens authentique <strong>de</strong>l'humain n'est pas <strong>dans</strong> une conception <strong>de</strong> la « dignité <strong>de</strong> l'homme ».En somme, l'homme n'est plus le seul à poser la question <strong>de</strong> l'homme,mais il appartient à un animal ou à un fœtus <strong>de</strong> le faire.Ce que <strong>Malaparte</strong> trouble, c'est la proportion entre le fait <strong>et</strong> sonenjeu physiologique. On le voit très bien avec l'exemple <strong>de</strong> la main dusoldat que <strong>Malaparte</strong> feint, à la faveur d'un habile montage d'os <strong>de</strong>moutons, qui fait ressembler c<strong>et</strong>te armature au squel<strong>et</strong>te d'une mainhumaine, <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rouver <strong>dans</strong> son assi<strong>et</strong>te <strong>de</strong> couscous. <strong>La</strong> main n'estplus organe d'intelligence. Elle est <strong>de</strong>stituée <strong>de</strong> son pié<strong>de</strong>stalprestigieux pour <strong>de</strong>venir l'instrument d'un humour très noir <strong>et</strong> surtoutla trace d'une chair humaine que l'on aurait pu manger. L'homme estabsorbé <strong>dans</strong> les diverses étapes d'une matière dont les formeschangent à l'infini. Tantôt poisson, tantôt fœtus ou squel<strong>et</strong>te, ce sont<strong>de</strong>s passages que personne n'a envie <strong>de</strong> caresser, <strong>de</strong>s instabilités ducorps qui répugnent.<strong>Malaparte</strong> étend l'action <strong>de</strong> son étrange travail <strong>de</strong> métamorphosesur un autre plan : celui <strong>de</strong>s bruits qui s'échangent énigmatiquementleurs sources. Souvent une voix plane sur la ville qui, par contiguïtéphantasmatique, évoque tant une bombe que les exhalaisons duVésuve. Dans la ville <strong>de</strong> Naples, quelqu'un ou quelque chose parle,mais on ne sait jamais qui. <strong>La</strong> parole <strong>de</strong> la mythologie rest<strong>et</strong>echniquement indécise <strong>et</strong> c'est pourquoi, <strong>dans</strong> le roman <strong>de</strong> <strong>Malaparte</strong>,l'homme italien est à peine un personnage. Se constituantessentiellement <strong>dans</strong> son opposition à l'étranger, il ne disposed'aucune certitu<strong>de</strong> réflexive. Il ne cesse ainsi <strong>de</strong> se défaire en seréduisant à une voix anonyme, ensemble <strong>de</strong> forces occultes, jamaisnommées. <strong>La</strong> voix transforme la géographie. Elle lui fait perdre sespoints <strong>de</strong> repères <strong>et</strong> fon<strong>de</strong> une ville enchantée. Naples <strong>de</strong>vient unpalais d'Atlant <strong>dans</strong> lequel, comme <strong>dans</strong> l'Orlando Furioso <strong>de</strong>l'Arioste, chaque Napolitain cherche, tel Roger, sa Bradamante qui

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