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3 - institut de chimie et des materiaux paris-est

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CoupeFance Franck2


Avant – ProposDepuis le départ <strong>de</strong> Madame Monique Crick pour la Fondation Baur à Genève, Madame MartheBernus-Taylor assume la prési<strong>de</strong>nce <strong>de</strong> notre Association. Madame Crick, spécialiste <strong>de</strong> lacéramique chinoise, nous a fait partager ses connaissances sur les productions asiatiques <strong>et</strong> enparticulier découvrir l’importance <strong>de</strong>s pièces <strong>de</strong> fouilles sous-marines. Avec Madame Bernus-Taylor, Conservateur Général Honoraire du Patrimoine, ancienne responsable <strong>de</strong>s Arts <strong>de</strong> l’Islam aumusée du Louvre, nous pourrons continuer <strong>de</strong> cheminer entre l’Asie <strong>et</strong> l’Europe au travers <strong>de</strong>sriches <strong>et</strong> diverses productions du mon<strong>de</strong> islamique.Nous poursuivrons l’effort <strong>de</strong> faire <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te L<strong>et</strong>tre un véritable bull<strong>et</strong>in donnant les informationssusceptibles d’intéresser nos membres mais aussi contenant <strong>de</strong>s Notes faisant le point sur <strong>de</strong>srésultats - ou <strong>de</strong>s découvertes - récents concernant l’histoire <strong>de</strong>s techniques céramiques, <strong>de</strong>scomptes-rendus <strong>de</strong> voyages ou <strong>de</strong> fouilles, … Les <strong>de</strong>ux notes <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te livraison portent sur le « bleulapis-lazuli » iranien <strong>et</strong> le lustre métallique. Nous espérons pouvoir dans le futur y publier <strong>de</strong>stextes portant sur la comparaisons <strong>de</strong>s techniques, <strong>de</strong>s styles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s productions d’horizonsdifférents.Monsieur Philippe Magloire, antiquaire en arts islamique, continue dans c<strong>et</strong>te livraison lanouvelle rubrique sur l’évolution du marché <strong>de</strong> l’art au travers <strong>de</strong> trois cas, <strong>de</strong>ux coupes <strong>et</strong> un vase<strong>de</strong>s époques samani<strong>de</strong> (une coupe calligraphiée), abbassi<strong>de</strong> (une faïence à refl<strong>et</strong>s métallique) <strong>et</strong>iraniennes <strong>de</strong>s XII-XII è s (un vase <strong>de</strong> Kashan) à décor <strong>et</strong> inscription.Deux profils <strong>de</strong> potiers sont offerts à notre réflexion. Ces présentations, par les artistes euxmêmes<strong>de</strong> leurs sources d’inspiration <strong>et</strong> <strong>de</strong> leur parcours ont été initiées dans la précé<strong>de</strong>nte L<strong>et</strong>treavec les textes <strong>de</strong> Jean-François Fouilhoux <strong>et</strong> <strong>de</strong> Jean Girel.Madame Fance Franck-Spencer, Vice-Prési<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> notre Association, dont les créations pures<strong>et</strong> sobres associent à la fois l’esprit <strong>de</strong> la porcelaine chinoise <strong>et</strong> l’inspiration naturaliste <strong>et</strong> abstraite<strong>de</strong> Francine Del Pierre,<strong>et</strong> Monsieur Andoche Prau<strong>de</strong>l, potier-philosophe, dont la puissance brute <strong>de</strong> la matière rappelleles liens intimes entre la terre, la main <strong>et</strong> le feu,Tous <strong>de</strong>ux nous font pénétrer au cœur <strong>de</strong> leur expérience.Le voyage au Vi<strong>et</strong>nam n’ayant eu qu’un nombre r<strong>est</strong>reint <strong>de</strong> participants, nous vous en donnonsun bref reportage illustré grace aux bons soins <strong>de</strong> Monsieur Magloire. Nous regr<strong>et</strong>tons que levoyage en Hollan<strong>de</strong>, sur les traces <strong>de</strong> la VOC, ait du être annulé. Cependant d’autres escapa<strong>de</strong>s àLorient, Genève, en Allemagne sont en proj<strong>et</strong>.Si <strong>de</strong>s lecteurs veulent avoir l’avis d’autres adhérents sur <strong>de</strong>s pièces curieuses ou à l’attributiondifficile, qu<strong>est</strong>ions – <strong>et</strong> réponses - pourront être soumises dans la l<strong>et</strong>tre.Merci <strong>de</strong> nous envoyer vos idées, vos commentaires, vos récits <strong>de</strong> voyage, vos comptes-rendus <strong>de</strong>visites <strong>de</strong> musées, vos adresses <strong>de</strong> sites web, …Encore merci pour votre fidélité <strong>et</strong> votre soutien, avec tous mes vœux pour 2003Philippe Colomban3


SommairePage. L<strong>et</strong>tre aux adhérents Marthe Bernus-Taylor 1. Avant-Propos Philippe Colomban 2‣ I. Notes. Céramiques émaillées au Lapis-Lazuli Philippe Colomban 4. Le lustre métallique Philippe Colomban 8. Voyage au Vi<strong>et</strong>nam 14. Colloque « Raku <strong>et</strong> Grès du Japon » 14. Datation TL – Une fausse assurance‣ II. Les céramiques <strong>et</strong> le marché <strong>de</strong> l’art. Céramiques islamiques Philippe Magloire 19‣ III. Profils. Andoche Prau<strong>de</strong>l 22. Fance Franck-Spencer 26‣ IV. Conférences SFECO 2002‣ V. Calendrier <strong>de</strong>s Expositions <strong>et</strong> Ventes 43‣ VI. Publications 46‣ VII. Sites 49‣ VIII. Librairies spécialisées 50‣ IX. Sociétés <strong>de</strong> céramiques orientales 514


I. NOTESCéramiques Emaillées au Lapis-LazuliLes Vieux Grimoires <strong>de</strong>s Alchimistes Persansavaient Raison !L’analyse par spectrométrie Raman du tesson d’une céramique iranienneattribuée du XIII ème siècle démontre que l’utilisation <strong>de</strong> lapis-lazuli comme«pigment » d’émail céramique, rapportée par les anciens textes persanscorrespondait bien à une réalité.Dans toutes les civilisations, la couleur bleu joue un rôle particulier. Ce n’<strong>est</strong> pas parhasard que le drapeau <strong>de</strong> l’Europe, <strong>de</strong>s Nations-Unies sont bleus. C<strong>et</strong>te couleur se rencontrepeu à l’état naturel où elle tire souvent sur le vert ou le viol<strong>et</strong> ; seul le lapis-lazuli, minéralrare principalement extrait d’Afghanistan possè<strong>de</strong> c<strong>et</strong>te couleur bleu profond <strong>de</strong> certains cielsd’hiver. Les premiers émaux céramiques, <strong>de</strong>s glaçures alcalines au cuivre, datent <strong>de</strong> près <strong>de</strong>5000 ans, en Egypte <strong>et</strong> en Mésopotamie. L’émail au cobalt, utilisé sous les XVIII <strong>et</strong> XIX èmesdynasties égyptiennes (~1400 av. JC, en particulier sous le règne d’Akhenaton) disparaîtensuite pour n’apparaître qu’épisodiquement à l’époque romaine [1] avant <strong>de</strong> se développeren Chine sous les Tang (VIII ème siècle) <strong>et</strong> progressivement regagner la Méditerranée au traversdu mon<strong>de</strong> islamique.Le lapis-lazuli a en persan « lajvard » a été la base <strong>de</strong>s pigments picturaux bleus <strong>de</strong>splus belles enluminures du Moyen-Age occi<strong>de</strong>ntal <strong>et</strong> du mon<strong>de</strong> islamique ainsi que <strong>de</strong>speintures. La rar<strong>et</strong>é <strong>et</strong> le prix <strong>de</strong> ce pigment faisaient que son utilisation était réservée auxparties les plus nobles, comme les manteaux <strong>de</strong>s vierges <strong>de</strong> la Renaissance italienne, d’autresminéraux comme l’azurite (un carbonate hydroxylé <strong>de</strong> cuivre) étant utilisés pour d’autresparties. Dans les textes anciens, Pline ou Théophraste mentionnent un kyanos artificiel, unverre coloré ayant l’aspect du lapis-lazuli. C<strong>et</strong>te observation se r<strong>et</strong>rouve dans plusieursouvrages d’alchimistes du mon<strong>de</strong> islamique : ainsi dans son traité <strong>de</strong> minéralogie, al-Birunimentionne le lâzvard ; il en <strong>est</strong> <strong>de</strong> même dans le traité d’Abû’l-Qâsim Kâshânî [2]. Nombre <strong>de</strong>spécialistes ont interprété ces textes comme « à la manière du lapis-lazuli », l’incorporation<strong>de</strong> lapis-lazuli comme pigment d’un émail céramique leur semblant irréalisable (cf p 42 in[3]). L’œuvre <strong>de</strong> référence <strong>de</strong> Jean Soustiel [4] ne prend pas parti.Le développement <strong>de</strong> l’analyse Raman au LADIR (UMR CNRS-Université Pierre <strong>et</strong>Marie Curie), métho<strong>de</strong> d’analyse sans contact, non <strong>de</strong>structive, donc remarquablementefficace pour l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s obj<strong>et</strong>s <strong>et</strong> matériaux du patrimoine, a permis d’étudier <strong>de</strong> nombreusescéramiques dans le cadre du GDR CNRS CHIMART, en liaison avec différents muséesfrançais ou en partenariat avec <strong>de</strong>s <strong>institut</strong>ions étrangères [5-8], <strong>de</strong>s collectionneurs ouprofessionnels <strong>de</strong> l’art.________________a Le lapis-lazuli (ou lazurite) <strong>est</strong> une roche contenant principalement <strong>de</strong> la lazurite, unaluminosilicate (Na,Ca) 8 [(SO 4 ,S,Cl)(AlSiO 4 ) 6 ] faisant partie du groupe <strong>de</strong>s zéolithes(sodalite), un type <strong>de</strong> structure ouverte connue pour ses propriétés d’échange ionique(catalyseurs, lessives). C’<strong>est</strong> un minéral rare. Sites : Sar-e-Sang (à 3000 m, déjà cité parMarco Polo, au Badakhshan, Afghanistan), Chili, Baïkal, traces en Italie, Californie <strong>et</strong>Birmanie.5


Le spectre Raman résonnant du chromophore bleu du lapis-lazuli (la liaison soufre<strong>de</strong>s ions S 3-) excité par la radiation verte d’un laser a été observé dans un tesson provenantd’une verseuse iranienne du XIII ème siècle appartenant à Monsieur Magloire. C<strong>et</strong>tei<strong>de</strong>ntification a été facilitée par l’expérience du LADIR dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s pigments picturauxmédiévaux au lapis-lazuli [9] <strong>et</strong> <strong>de</strong>s dérivés du soufre [10]. La zone contenant un dépôt <strong>de</strong>lapis-lazuli <strong>est</strong> située à l’interface tesson-émail, où sans doute il a été mélangé à un engobe.L’émail supérieur, très semblable aux verres romains calciques a été déposé en plusieurscouches, peut-être avec un dépôt intermédiaire <strong>de</strong> lapis-lazuli.Figure 1 : Vue extérieure (gauche) <strong>et</strong> intérieure (droite) du tesson (échelle = 5 cm) ; aucentre images optiques <strong>de</strong> la tranche (x100) <strong>et</strong> <strong>de</strong> la région interfaciale (x1000) entre l<strong>et</strong>esson (blanc-jaune) <strong>et</strong> les couches d’émail : noter les grains bleu ; en bas, vue en détail <strong>de</strong>la zone interfaciale parallèlement au tesson <strong>et</strong> <strong>de</strong> l’émail en coupe (x1000).Photos © Ph. Colomban. Collection privée.6


MicrostructureLa figure 1 montre le tesson sur ses <strong>de</strong>ux faces : la couleur « bleu lapis » <strong>est</strong> soutenuesur la face extérieure tandis que l’intérieur du tesson présente une coloration inhomogène, enmouch<strong>et</strong>é. Le corps du tesson <strong>est</strong> assez blanc <strong>et</strong> contient principalement du quartz α (SiΟ 2 ),<strong>de</strong>s silicates <strong>de</strong> calcium (CaSiO 4 : α <strong>et</strong> β wollastonite) <strong>et</strong> une phase vitreuse. L’observation <strong>de</strong>ces phases <strong>est</strong> en accord avec ce que l’on attend pour une « pâte siliceuse » faite <strong>de</strong> gal<strong>et</strong>s <strong>de</strong>quartz ou <strong>de</strong> silex broyés <strong>et</strong>/ou étonnés mélangés à <strong>de</strong> la chaux <strong>et</strong>/ou <strong>de</strong> la sou<strong>de</strong> (cendres) <strong>et</strong>un peu d’argile. Des traces d’hématite (α Fe 2 O 3 ), <strong>de</strong> rutile (TiO 2 ) <strong>et</strong> <strong>de</strong> diopsi<strong>de</strong> (CaMgSi 2 O 6 )sont aussi observées. Le diopsi<strong>de</strong> <strong>est</strong> généralement présent dans la roche lapis-lazuli avecd’autres minéraux comme <strong>de</strong>s feldspaths, du mica, parfois <strong>de</strong> la calcite, du quartz <strong>et</strong> <strong>de</strong> lapyrite dont les cristaux forment <strong>de</strong>s étoiles d’or dans le ciel bleu du lapis. Le diopsi<strong>de</strong> <strong>est</strong>aussi un marqueur <strong>de</strong> la température <strong>de</strong> cuisson (> 900/1000°C) [10]. Le corps du tesson <strong>est</strong>coloré en jaune par <strong>de</strong>s traces d’hématite.L’émail <strong>est</strong> d’épaisseur variable. Il apparaît constitué <strong>de</strong> différentes couches sans qu’ilsoit possible pour le moment <strong>de</strong> préciser si cela résulte du procédé (émaillages <strong>et</strong> cuissonssuccessives) ou d’une fissuration provoquée par le différentiel <strong>de</strong> r<strong>et</strong>rait émail/tesson. Lespectre Raman <strong>de</strong> l’émail <strong>est</strong> quasiment i<strong>de</strong>ntique (Figure 2) à celui <strong>de</strong>s verres carthaginois/romains silico-calciques [11] contenant 35 à 40 % en poids <strong>de</strong> silicium, 15 à 20 % <strong>de</strong> calcium.Ce spectre consiste en <strong>de</strong>ux « massifs » correspondant aux vibrations <strong>de</strong> déformation <strong>et</strong>d’élongation <strong>de</strong> la liaison chimique Si-O entre les atomes <strong>de</strong> silicium <strong>et</strong> d’oxygène à la base<strong>de</strong> la structure du verre. Certaines <strong>de</strong>s couches d’émail contiennent <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> carbone. Ledoubl<strong>et</strong> à 950-990 cm -1 <strong>est</strong> caractéristique <strong>de</strong>s verres saturés en calcium.A l’interface entre le tesson <strong>et</strong> l’émail une couche <strong>est</strong> constituée <strong>de</strong> grains bleu,dispersés dans une couche incolore contenant aussi du quartz α <strong>et</strong> du diopsi<strong>de</strong> (Fig. 1). Lespectre Raman <strong>de</strong>s grains bleus (Fig. 2) <strong>est</strong> caractéristique du spectre Raman <strong>de</strong> résonance dulapis-lazuli : <strong>de</strong> multiples ban<strong>de</strong>s situées aux valeurs ~ multiples ( 548 x 2 = 1096, 548 x 3 =1644 cm -1 , x4, x5, x6…) ou ~ combinées (260 + 548 = 808 cm -1 ; 260 + (2 x 548) = 1358 cm -1 ; 260 + (3 x 548) 1904 cm -1 ; …) <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s principales (260 <strong>et</strong> 285, 548 (S 3-) <strong>et</strong> 583 cm -1 (S - 2 )), ban<strong>de</strong>s correspondant aux mouvements symétriques <strong>de</strong> déformation (δ s ) <strong>et</strong>-d’élongation (ν s ) <strong>de</strong>s liaisons chimiques <strong>de</strong>s ions S n excitées par la radiation verte du laser[10], c’<strong>est</strong> à dire pour la couleur qu’absorbe le lapis lazuli en nous r<strong>est</strong>ituant la sensation <strong>de</strong>couleur bleue. Les épaules vers 285 <strong>et</strong> 585 cm -1 sont sans doutes les composantesasymétriques. L’observation, rare, d’un aussi grand nombre d’harmoniques <strong>et</strong> combinaisons<strong>est</strong> sans doute dûe à la bonne dilution <strong>de</strong>s chromophores dans les grains <strong>de</strong> lapis lazuli <strong>et</strong> <strong>de</strong>s-grains eux-mêmes dans la couche sous l’émail. Les espèces S 3 (majoritaires dans le lapislazuli)<strong>et</strong> S - 2 absorbent respectivement le rouge <strong>et</strong> le bleu <strong>et</strong> donnent donc les couleurs bleu ouviol<strong>et</strong>.Qu<strong>est</strong>ionsCes premières analyses laissent en suspend plusieurs qu<strong>est</strong>ions, d’ordre technique<strong>et</strong>/ou historique :• Le dépôt <strong>de</strong> lapis lazuli a t-il été fait uniquement à l’interface corps du tesson/émail (l’émail <strong>est</strong> alors bien une glaçure à couleur transparente) ou bien aussi entre chaquecouche d’émail si plusieurs couches ont été effectivement déposées avec un dépôtintermédiaire <strong>de</strong> lapis-lazuli ? En eff<strong>et</strong>, la présence <strong>de</strong> couches plus ou moins riches encarbone laisse penser à un dépôt <strong>de</strong> couches successives.7


• Le lapis lazuli a-t-il aussi été dispersé dans l’émail ou c<strong>et</strong> émail n’<strong>est</strong>–il coloré qu’aucobalt. Les analyses <strong>de</strong> dosage <strong>de</strong>s éléments (EDX) effectuées au microscopeélectronique à eff<strong>et</strong> <strong>de</strong> champ confirment que l’émail <strong>est</strong> une couche <strong>de</strong> verre coloréepar du cobalt mais la présence <strong>de</strong> magnesium, d’aluminium <strong>est</strong> compatible avec uneincorporation <strong>de</strong> lapis-lazuli.Quel type <strong>de</strong> cobalt l’émail bleu contient-il ? riche en manganèse – originaire <strong>de</strong> Chine/Asiedu Sud-Est – contenant <strong>de</strong> l’arsenic, du nickel – indigène – ou du plomb, provenanced’Europe,…cf B. Gratuze dans la ref [7]). L’analyse EDX indique une forteproportion <strong>de</strong> fer, du titane, du nickel, du chrome <strong>et</strong> <strong>de</strong>s traces <strong>de</strong> zinc. Ces résultatssont ceux attendus pour une production iranienne.Qu’elle <strong>est</strong> la réelle efficacité <strong>de</strong> la couche <strong>de</strong> lapis lazuli sur la coloration. Ce dépôt a t-il étéréalisé pour <strong>de</strong>s raisons fonctionnelles <strong>et</strong>/ou <strong>de</strong> pr<strong>est</strong>ige. A <strong>de</strong>s pério<strong>de</strong>s plusanciennes la poudre <strong>de</strong> lapis-lazuli a été utilisée en gran<strong>de</strong> quantité. Dès le VI è siècledans les Oasis <strong>de</strong> la Route <strong>de</strong> la Soie, au Tokharistan (Aphrasiab), en Serin<strong>de</strong> (Tufan,Kyzil) <strong>et</strong> Chine (grottes <strong>de</strong> Bingling sur le Fleuve Jaune) pour <strong>de</strong>s fresquesBouddhistes. En Géorgie (église <strong>de</strong> Tokali), en Arménie (églises d’Agtamar, <strong>de</strong>Tatev), au X è siècles <strong>de</strong>s centaines <strong>de</strong> m 2 ont été couvert <strong>de</strong> lapis-lazuli [12]. Desutilisations dans <strong>de</strong>s peintures sassani<strong>de</strong>s sont aussi raportées. L’emploi <strong>de</strong> c<strong>et</strong>tematière première céramique <strong>est</strong> donc envisageable, à gran<strong>de</strong> échelle.1100548νIntensité / Unités Arbitr.560475570470985950785RomainIranIntensité / Unités Arbitr.δ260285δ+ν58380810962ν1130δ+2ν135516443ν1904λ = 532nm21904ν245027405ν300032886ν400 800 1200 1600500 1000 1500 2000 2500 3000 3500Nombre d'on<strong>de</strong> / cm -1 Nombre d'on<strong>de</strong> / cm -1Figure 2 : Spectres Raman <strong>de</strong> verres silico-calciques (à gauche, un verre romain [11] <strong>et</strong>l’émail du tesson) <strong>et</strong> <strong>de</strong>s grains <strong>de</strong> lapis-lazuli (droite) à l’interface corps du tesson/émail.Les ban<strong>de</strong>s principales du lapis-lazuli à ~260 (δ) <strong>et</strong> 548 cm -1 (ν) correspon<strong>de</strong>nt auxvibrations <strong>de</strong>s chromophores S n - . Les autres ban<strong>de</strong>s sont les combinaisons <strong>et</strong> harmoniquesdont l’intensité <strong>est</strong> exaltée par le phénomène <strong>de</strong> résonance Raman.La stabilité thermique du lapis lazuli ne doit pas dépasser, au mieux 800°C, comme la plupart<strong>de</strong>s structures <strong>de</strong> type zéolithe. La décoloration <strong>de</strong>s sodalites par chauffage <strong>est</strong> bienconnue. Une température <strong>de</strong> 800°C <strong>est</strong> certainement suffisante pour la mise en œuvred’une glaçure silico-calcique. L’émail a-t-il été déposé selon une technique verrière(enfournement/défournement en four chaud) limitant l’échauffement du tesson <strong>et</strong>protégerait le lapis-lazuli d’une décoloration ?Il serait particulièrement intéressant <strong>de</strong> savoir si c<strong>et</strong>te métho<strong>de</strong> a été largement utilisée ounon en analysant une population <strong>de</strong> tessons présentant la couleur « bleu lapis ». La couleur <strong>de</strong>8


notre tesson <strong>est</strong> très semblable au panneau <strong>de</strong> l’aïvan – shamseh (éclat <strong>de</strong> soleil) du plafond<strong>de</strong> « l’Anonyme II » (1385, Samarkand), Figure 3, [13]. Mais la localisation du lapis-lazuli àl’interface nécessite une analyse sur tesson.Figure 3 : Plafond <strong>de</strong> « l’Anonyme II » (1385, Samarkand). © DRRéférences1. I. Naef-Galuba, « Les bleu d’Egypte », Revue <strong>de</strong> la Céramique <strong>et</strong> du Verre, 69 (mars/avril), 1993, 41-44.2. Y. Porter, « Le cobalt dans le mon<strong>de</strong> iranien », Taoci 1, 2000, 5-14.3. J. Moulierac, « Céramiques du mon<strong>de</strong> musulman », Institut du Mon<strong>de</strong> Arabe – SDZ, Paris, 1999.3. J. Soustiel, « La céramique islamique – Le gui<strong>de</strong> du connaisseur », Office du Livre – Editions Vilo, Paris,1985.4. Dossier Couleurs, CNRS-Info n°391, mars 2001 (http://www.cnrs.fr).5. Ph. Colomban, « Analyse sans contact <strong>de</strong>s céramiques <strong>et</strong> verres anciens par Diffusion Raman », L’ActualitéChimique, Février 2003, 12-16.6. J. Rosen, « Le technicien <strong>et</strong> l’archéologue – La céramique d’un autre œil », Archaeologia, 395, Décembre2002, 12-22 .7. Ph. Colomban, G. Sagon, A. Louhichi, H. Binous, N. Ayed, « I<strong>de</strong>ntification par Microscopie Raman <strong>de</strong>sTessons <strong>et</strong> Pigments <strong>de</strong> Glaçures <strong>de</strong> l’Ifryqiya (Dougga : XI-XVIIIe siècles) », Revue d’Archéomètrie 25,2001, 101-112.8. C. Coupry, « Les pigments utilisés pour l’enluminure à Fécamp, XI-XII ème siècle », in « Manuscrits <strong>et</strong>enluminures dans le mon<strong>de</strong> normand (X-XV ème siècles) », P. Bou<strong>et</strong> <strong>et</strong> M. Dosdat Eds, , PressesUniversitaires <strong>de</strong> Caen, pp69-79,1999.9. O. El Jaroudi, E. Picquenard, A. Demortier, J.P. Lelieur, J. Cors<strong>et</strong>, “Polysulfi<strong>de</strong> Anions”, InorganicChemistry, 38 [10], 1999, 2394-401. R.J.H. Clark, T.J. Dines , M. Kurmoo, “On the nature of the sulfurchromophores .., Inog. Chem. 22 (1983) 2766-72.10. A. Jorn<strong>et</strong>, M.J. Blackman, J.S. Olin, « 13 th to 18 th Century Ceramics from the Paterna-Manises Area(Spain) », p 235-55 in “Ceramics and Civilization, vol I – Ancient Technology to Mo<strong>de</strong>rn Science”, W.D.Kingery <strong>et</strong> E. Lerne Eds, The American Ceramic Soci<strong>et</strong>y, Inc., Colombus, Ohio, 1984.11. Ph. Colomban, L. Mazerolles, T. Karmous, N. Ayed, H. Slim, “Raman I<strong>de</strong>ntification of Materials used forJewelry and Mosaic in Ifriqiya”, J. Raman Spectrosc., 2003, sous presse.12. N. Thierry, M. Thierry, “Peintures murales <strong>de</strong> caractère occi<strong>de</strong>ntale en Arménie : Eglise Saint-Pierre <strong>et</strong>Saint-Paul <strong>de</strong> Tatev », Byzantion 38 (1968) 180-242.12. F. Beaupertuis-Bressan, L’or bleu <strong>de</strong> Samarkand, Art International Publishers, 1997, Paris (ISBN 2-91019204-0).Philippe Colomban9

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