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Baume et Marpent - Patrimoine Industriel Wallonie-Bruxelles

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de se séparer de son implantationfrançaise 6 . La raison invoquée estla conjoncture économique ainsique le peu de commandes enregistrées.Le véritable motif, queles dirigeants cherchent à dissimuler,réside dans des irrégularitéscomptables. Un membre dupersonnel, responsable des établissementsd’Haine-Saint-Pierre<strong>et</strong> de <strong>Marpent</strong>, profite de l’éloignementgéographique par rapportau directeur gérant pour détournerde l’argent. En 1886,<strong>Marpent</strong> enregistre une perted’environ 40.000 francs 7 . LeConseil d’administration, sousl’influence de certains membresdont Lucien Guinotte 8 , est sur lepoint d’accepter la vente de <strong>Marpent</strong>.Moyaux refuse c<strong>et</strong>te option<strong>et</strong> prépare un plan qui mèneral’implantation française vers lavoie de la rentabilité.2.1. Le fonctionnement de lamultinationaleMoyaux introduit une certainedécentralisation de l’activité enétablissant trois régies : <strong>Baume</strong>,Ornavasso (Italie) <strong>et</strong> <strong>Marpent</strong>. Lechantier italien est une installationrécente, implantée en 1884pour assurer la réalisation dutunnel du Simplon <strong>et</strong> laconstruction de ponts de cheminde fer. La régie de <strong>Baume</strong> a uneimportance prépondérante surles deux autres car c’est à c<strong>et</strong> endroitque le directeur gérant <strong>et</strong> leservice de comptabilité généralerésident. Les régisseurs disposentd’une certaine autonomiemais sont toujours sons lecontrôle direct de Moyaux, devenuadministrateur-délégué, luimêmeresponsable devant leConseil d’administration. Ils veillentà l’exécution des commandes.Dans ce cadre, ils achètenttoutes les pièces nécessaires à laréalisation des proj<strong>et</strong>s sans l’autorisationdu directeur-gérant 9 .Par contre, ils ne sont pas compétentspour la recherche denouveaux marchés qui demeurel’apanage du service d’études. Lastructure mise en place est opérationnelle<strong>et</strong> engendre des résultatsd’exploitation positifs. L’implantationfrançaise perm<strong>et</strong> à<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> de rentrer enlice pour l’ouverture des marchéspublics des chemins de fer français.L’entreprise échappe aussiaux eff<strong>et</strong>s de la loi Méline quivise à limiter les importationsvers la France 10 . A <strong>Marpent</strong>, seulementtrois ans après avoir envisagéla ferm<strong>et</strong>ure de l’entreprise,le succès est tel que les installationssont agrandies.La structure décisionnelle <strong>et</strong> administrativedélègue encore plusd’autonomie aux régies. Leur dénominationest d’ailleurs modifiéecar, en 1913, elles deviennentdes divisions. A la suite d’uncontentieux rencontré avec l’administrationfiscale, la régied’Ornavasso disparaît rapidement.L’expérience italienne estquand même importante car elleconstitue la première réalisationprobante à l’étranger en matièrede gestion de proj<strong>et</strong>s importants.De plus, elle affirme la diversificationgrandissante de la productionainsi que la reconnaissanced’un certain savoir-faire accordéà <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>. Aprèss’être étendue vers la France,l’entreprise poursuit son expansionen rach<strong>et</strong>ant, près d’Haine-Saint-Pierre, la société Brison àMorlanwelz. C<strong>et</strong>te dernière estdirectement transformée en unenouvelle division 11 . L’objectif dece rachat est l’expansion des forgesqui sont largement insuffisantesà Haine-Saint-Pierre.C<strong>et</strong>te faiblesse oblige la commandeexterne de nombreusespièces qui pourraient être usinéesen interne 12 . Outre c<strong>et</strong>te extension,les travaux portent sur laconstruction d’un magasin central<strong>et</strong> d’un séchoir à bois 13 .(suite dans le PIWB n° 67)Guénaël Vande VijverNotes1“<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> : Itinéraire d’ungéant” dans <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> : De la Haineau Nil : Itinéraire d’un géant, La Louvière,Ecomusée régional du Centre, 2006, p. 17-33. L’ouvrage peut être commandé au prixde 10 euros par téléphone (064/28.20.00)ou en ligne (http://www.bois-du-luc.com).2Les autres auteurs sont : Jean Puissant(“Place du bassin du Centre par rapport àla Belgique <strong>et</strong> l’Europe”), Yves Quairiaux(“Un document d’histoire sociale : le registred’inscription des carn<strong>et</strong>s des femmes,enfants <strong>et</strong> adolescents”), Alain Dewier(“Assainissement <strong>et</strong> reconversion des sitesindustriels en Région wallonne”), OlivierCnockaert (“Olympisch Zwembad Athene2004”), Karima Haoudy (“L’architecturepréfabriquée de <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> : ossaturedu modernisme”), Michel Thiry(“Raccourcir le temps <strong>et</strong> l’espace : la conquêtedu rail par <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>”), <strong>et</strong>c.3Ecomusée régional du Centre, fonds<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, catalogue de vente, circa1955, p. 2.4Ibidem, p.8.5Gin<strong>et</strong>te Kurgan-van Hentenryk, SergeJaumain, Valérie Montens, Dictionnaire desPatrons en Belgique, avec la collaboration deJean Puissant <strong>et</strong> de Jean-Jacques Heirwegh,<strong>Bruxelles</strong>, De Boeck & Larcier, 1996, p.476 ; Roger Darquenne, notice sur LéonMoyaux dans la Biographie Nationale, <strong>Bruxelles</strong>,Académie royale, t. 44 fasc. 2, 1981,col. 577.6Ecomusée régional du Centre, fonds<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, registre des Procèsverbauxdu Conseil d’administration de1882 à 1896, séance du 2.12.1884.7Ecomusée régional du Centre, fonds<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, registre des Procèsverbauxdu Conseil d’administration de1882 à 1896, séance du 16.02.1886.8Lucien Guinotte (1839-1911) est unlibéral de tendance progressiste. Il occupele poste de directeur général des charbonnagesde Mariemont-Basscoup <strong>et</strong> y instaureles conseils de conciliation.9Ecomusée régional du Centre, fonds<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, registre des Procèsverbauxdu Conseil d’administration de1882 à 1896, séance du 29.03.1887.10Roger Darquenne, op cit., col. 578.11Ecomusée régional du Centre, fonds<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, registre des Procèsverbauxdu Conseil d’administration de1882 à 1896, séance du 15.12.1887.12Ecomusée régional du Centre, fonds<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, registre des Procèsverbauxdu Conseil d’administration de1882 à 1896, séance du 23.11.1909.13Ecomusée régional du Centre, fonds<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, registre des Procèsverbauxdu Conseil d’administration de1882 à 1896, séance du 1.12.1910.9


ETHNO-TÉMOIGNAGEInterview d’Henry Pil<strong>et</strong>te, ingénieur à <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>(Suite <strong>et</strong> fin)Ci-contre : Ecomusée régional du Centre,fonds <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>,division de Morlanwelz, constructionde wagons à la chaîne, circa 1940.Quels étaient les métiers impliqués?Des relations entre les spécialités existaientcomme, par exemple, entre lechaudronnier <strong>et</strong> la section soudage. Siun problème survenait, il était du ressortdu chef d’atelier de savoir à qui lafaute incombait.A c<strong>et</strong>te époque, le contrôle qualitén’existait pas. Il était très peu réalisé.Le chef d’atelier jouait ce rôle de tempsen temps. Pour le chemin de fer, c’étaitleur personnel qui l’exerçait directement.Trois techniciens employés àtemps plein avaient un droit de regardpartout. Le contrôle qualité était exercépar le client tandis que maintenant,c’est le fournisseur qui le réalise, c’estune nouvelle notion.Plusieurs raisons expliquent c<strong>et</strong>te évolution.La conscience professionnelleétait plus présente car les gens aimaientle travail bien fait alors qu’actuellementon s’aide d’intérimaires. Quandon engageait un ouvrier, il y avait toujoursun adjoint qui s’en occupait. Pourcertains travaux, la formation durait 5ou 10 ans. Pour la carcasse des camions,il fallait former la coquille enfrappant la tôle, c’était quelqu’un de50 ou 60 ans, pas un jeune.Qui était le responsable desproj<strong>et</strong>s ?Il n’y avait pas de proj<strong>et</strong> à <strong>Baume</strong> &<strong>Marpent</strong>, il faut changer ce mot ! Leproj<strong>et</strong> c’était le client qui le réalisait.<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> n’était pas uncréateur mais un exécutant. Il existaitune p<strong>et</strong>ite exception au niveau de laconception des camions car on a complètementconçu la carrosserie. C’est unecréation propre à <strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>.Cela a été de mon ressort avec deuxdessinateurs. Le plus difficile a été laréalisation des portières. J’avais carteblanche pour ces portes.Pour ces camions, une entreprise a étéresponsable de la conception sur le planmécanique (longeron...). Ces camionsont équipé la protection civile à ses débuts.Les camions ont amené la soudurepar point.Pouvez-vous me citer quelquesmachines utilisées par<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> ?<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> avait acquis unemachine allemande : Ravestad(1) .On pouvait m<strong>et</strong>tre l’ensemble d’unchâssis à locomotive. On réalisait tousles trous dans ce châssis avec unegrande précision. Elle se situait à l’entréeprincipale dans le hall d’entrée.On produisait une grosse série de wagons,de voitures de chemin de fer <strong>et</strong> onassemblait des locomotives de manœuvre.Pendant que je travaillais à<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong>, on en a produitentre 20 <strong>et</strong> 25. Il n’y avait pas d’outilde conception. Pas de TAO, DAO,CAO 1 . On ne réalisait pas de modèleréduit.Selon vous quels sont les facteursqui ont provoqué la ferm<strong>et</strong>urede l’entreprise ? Etaitelleinévitable ?<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> était rentablemais la création d’une DG supplémentairea certainement coûté de l’argent.La direction générale a commandé lesmoteurs avant d’avoir pris toutes lesprécautions. La ferm<strong>et</strong>ure de <strong>Baume</strong>& <strong>Marpent</strong> a été décidée par les banques.Elles savaient qu’ une commandeimportante des chemins de fer avait étéconclue. Les chemins de fer ont répartic<strong>et</strong>te commande entre deux usines quidevaient de l’argent aux banques.<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> n’en devait pas.<strong>Baume</strong> & <strong>Marpent</strong> aurait pu survivrecar c’était une des usines les plus performantes.La ferm<strong>et</strong>ure aurait pu êtredifférée.Pourquoi avez-vous quittél’entreprise <strong>et</strong> quels ont étévous autres employeurs ?J’ai quitté l’entreprise car la ferm<strong>et</strong>ureavait été décidée. J’ai été engagé parune société française basée à Lille quiavait une filiale à Tournai. J’ai dirigéle bureau d’études. En 1972, il a étédéplacé à <strong>Bruxelles</strong>. J’ai eu le choix departir à <strong>Bruxelles</strong> ou de devenir directeurde l’usine à Tournai. C<strong>et</strong>te usine aaussi fermé. Je suis devenu directeurd’une usine en France.Vers quelles entreprises sesont dirigées les personnesqui travaillaient à <strong>Baume</strong> &<strong>Marpent</strong> ?Le chef d’atelier principal a été dansune entreprise située près de Halle. Undes ingénieurs a été directeur aux Ateliersde Braine-le-Comte.Propos recueillis parGuénaël Vande Vijver1TAO : traçage assisté par ordinateur.DAO : dessin assisté par ordinateur.CAO : conception assistée par ordinateur.10

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