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Le consensus de Monterrey - Social Watch

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<strong>Le</strong> <strong>consensus</strong> <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong>:Consolidation <strong>de</strong> la mondialisation au détriment <strong>de</strong>s femmesMARINA FE B. DURANO<strong>Le</strong> <strong>consensus</strong> tacite dit Consensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> continue <strong>de</strong> se servir <strong>de</strong>s rôles reproductifs sociaux, institutionnellementancrés, <strong>de</strong>s femmes, pour appuyer la production économique mondiale.Pendant plus <strong>de</strong> 50 ans, le développement s’est concentré sur la croissanceéconomique. La Conférence internationale sur le financement pour ledéveloppement ne propose aucun abandon radical <strong>de</strong> cette perspective. 1 <strong>Le</strong>Consensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> consoli<strong>de</strong> les forces <strong>de</strong> la mondialisation. Il chercheà élargir le capital global en favorisant l’investissement étranger direct, à intégrerles pauvres au marché global à travers l’accès aux marchés pour leurs exportations,et à légitimer la suprématie du Fonds monétaire international-Banquemondiale-Organisation mondiale du commerce dans la gouvernanceéconomique. <strong>Le</strong> <strong>consensus</strong> tacite continue <strong>de</strong> se servir <strong>de</strong>s rôles reproductifssociaux, institutionnellement ancrés, <strong>de</strong>s femmes, pour appuyer la productionéconomique mondiale.Il ne <strong>de</strong>vrait pas être surprenant que le Financement pour le développementne se soit pas prêté à un débat sur les perspectives <strong>de</strong> genre dans la prise <strong>de</strong>décision macroéconomique globale. Une analyse <strong>de</strong> genre <strong>de</strong> la macroéconomieest elle-même un domaine d’étu<strong>de</strong> relativement nouveau, avec certains aspectsmieux étudiés que d’autres, par exemple, l’analyse <strong>de</strong> genre <strong>de</strong>s budgetset le genre et le commerce. Ainsi, l’inclusion du langage du genre dans leConsensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> se limite à <strong>de</strong>s qualificatifs <strong>de</strong>scriptifs sensibles augenre, à l’énumération <strong>de</strong> préoccupations spéciales concernant l’inclusion <strong>de</strong>l’intégration <strong>de</strong>s femmes et du genre. Il y a un besoin fort <strong>de</strong> disséminer leséléments d’une analyse <strong>de</strong> genre <strong>de</strong> la macroéconomie aux nombreux niveaux<strong>de</strong> la prise <strong>de</strong> décision afin d’élargir le discours sur l’examen <strong>de</strong> lamondialisation.Une faiblesse, corollaire du Consensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong>, est l’absence <strong>de</strong>langage <strong>de</strong>s droits humains en tant que cadre <strong>de</strong>s actions proposées, en dépit<strong>de</strong> la référence au respect <strong>de</strong> la Charte <strong>de</strong>s Nations-Unies. Cette absence est encontradiction avec l’attachement aux principes <strong>de</strong> justice et d’équité figurantdans le document. Du fait que le Consensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> fera partie d’uncorps <strong>de</strong> lois modérées – «<strong>de</strong>s obligations formulées <strong>de</strong> manière stricte maisfigurant dans <strong>de</strong>s instruments non contraignants sous forme <strong>de</strong>recommandations» – l’absence <strong>de</strong> langage <strong>de</strong>s droits humains empêche leConsensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> <strong>de</strong> fournir un cadre normatif soli<strong>de</strong> pour l’élaborationd’un droit et d’une législation contraignants. 2Genre et macroéconomieSéparation <strong>de</strong> la politique sociale et <strong>de</strong> la politique macroéconomiqueLa politique macroéconomique et la politique sociale sont souvent débattuescomme <strong>de</strong>s préoccupations distinctes <strong>de</strong> la politique publique. La politiquemacroéconomique est mise en œuvre dans la quête <strong>de</strong> stabilité et <strong>de</strong> croissanceéconomiques. La politique sociale est mise en œuvre dans la poursuited’objectifs sociaux tels que l’éducation universelle et la prévention <strong>de</strong>s maladies.La politique macroéconomique traite <strong>de</strong> questions hard, alors que lapolitique sociale traite <strong>de</strong> questions soft. <strong>Le</strong> plus souvent, les questions <strong>de</strong> lacondition féminine sont i<strong>de</strong>ntifiées à la politique sociale et restent invisiblesdans la formulation <strong>de</strong> la politique macroéconomique.1 United Nations «<strong>Monterrey</strong> Consensus», projet <strong>de</strong> texte convenu, version finale non éditée,27 janvier 2002, New York City.2 Asif H. Qureshi, International Economic Law, London: Sweet and Maxwell, 1999.Une première étape importante serait <strong>de</strong> combler cet écart à traversl’intégration adéquate <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux sphères <strong>de</strong> politique. Malheureusement, leConsensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> omet <strong>de</strong> prendre cette mesure audacieuse. Il a plutôtchoisi <strong>de</strong> promouvoir la protection sociale et <strong>de</strong>s filets <strong>de</strong> sécurité sociale, quisont perçus comme <strong>de</strong>s réponses appropriées aux risques sociaux. Esping-An<strong>de</strong>rsen 3 a reproché à cette approche <strong>de</strong> n’être guère appropriée aux réalitésactuelles. En outre, les approches dominantes <strong>de</strong> la protection sociale qui, aulen<strong>de</strong>main <strong>de</strong> la crise <strong>de</strong> 1997, ont remplacé la politique sociale dans leséconomies asiatiques, sont inadéquates. Elles ont été rajoutées après coup àla politique macroéconomique et sont considérées par Elson et Gagatay 4 comme<strong>de</strong> «approches <strong>de</strong> politique sociale rajoutées.» une critique sévère <strong>de</strong>s filets <strong>de</strong>sécurité tels qu’envisagés par les agences <strong>de</strong> financement multilatérales etrégionales est que ces filets ne sont conçus que pour traiter <strong>de</strong>s «chocs» commesi ces chocs venaient <strong>de</strong> l’extérieur du système <strong>de</strong> production plutôt que d’êtreproduits par lui.La politique sociale est rarement formulée à partir <strong>de</strong>s principes <strong>de</strong> justicesociale. <strong>Le</strong>s formuler ainsi créerait un ensemble d’instruments quipourraient ai<strong>de</strong>r à éliminer les relations d’exploitation dans les sphères tantproductives que reproductives <strong>de</strong> l’activité économique et sociale qui créent etexacerbent la pauvreté et l’inégalité.Contenu social <strong>de</strong> la politique macroéconomiqueL’approche habituelle <strong>de</strong> l’analyse <strong>de</strong> genre <strong>de</strong> la politique macroéconomiqueest <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>s investigations sur l’impact social d’un ensemble <strong>de</strong> politiques.Elson et Gagatay 5 examinent plus en profon<strong>de</strong>ur le contenu social <strong>de</strong> la politiquemacroéconomique en i<strong>de</strong>ntifiant les structures <strong>de</strong> pouvoir qui impulsentl’orientation <strong>de</strong> la politique macroéconomique. Trois biais qui opèrent audétriment <strong>de</strong>s femmes sont mis en évi<strong>de</strong>nce.Un biais déflationniste dû à la hausse <strong>de</strong>s taux d’intérêt fait qu’il est difficilepour les entreprises <strong>de</strong> rester viables. Dans les pério<strong>de</strong>s <strong>de</strong> crise économique,ce sont les femmes qui pâtissent <strong>de</strong> manière disproportionnée, à travers laperte d’emploi dans le secteur formel, un encombrement accru du secteurinformel, et <strong>de</strong>s responsabilités ménagères plus lour<strong>de</strong>s car les femmes ai<strong>de</strong>ntleurs familles à faire face à la crise. <strong>Le</strong>s sauvetages financiers sont plus courantsque les sauvetages sociaux.<strong>Le</strong> biais <strong>de</strong> l’homme soutien <strong>de</strong> famille vient <strong>de</strong> ce que l’on s’appuie sur leplein emploi et la croissance économique pour réaliser les objectifs sociaux,associé à l’hypothèse que ce sont les hommes – principales sources <strong>de</strong> maind’œuvredans le secteur formel – qui ont à charge un ensemble <strong>de</strong> personnes,généralement les femmes, les enfants et les personnes âgées. Comme le montrel’exemple <strong>de</strong>s Etats provi<strong>de</strong>nce européens, les femmes dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s hommespour les avantages sociaux fournis par l’Etat. <strong>Le</strong>s femmes, qui forment l’essentieldu secteur informel et <strong>de</strong>s travailleurs à temps partiel, n’ont pas accès à cesavantages.3 Gosta Esping-An<strong>de</strong>rsen, «<strong>Social</strong> indicators and welfare monitoring», <strong>Social</strong> Policy andDevelopment Paper N° 2, Genève, United Nations Research Institute for <strong>Social</strong> Development2000.4 Diane Elson et Nilufer Gagatay, «The social content of macroeconomic policy», WorldDevelopment 28(7)2000: 1347-64.5 Ibid.Contrôle Citoyen / 68SW frances (61-80) 681/11/02, 16:17


Un biais <strong>de</strong> marchandisation se manifeste quand la politique <strong>de</strong> dépensesgouvernementales est définie en termes <strong>de</strong> minimisation du déficit budgétaire.<strong>Le</strong>s services sociaux sont <strong>de</strong> plus en plus privatisés, ce qui en rend l’accèsencore plus difficile pour les pauvres. <strong>Le</strong> manque <strong>de</strong> services fournis par lesecteur public est compensé par les femmes qui sont tenues d’assumer laresponsabilité <strong>de</strong> l’entretien <strong>de</strong>s personnes au sein du ménage.Du fait que les femmes sont rarement vues et entendues dans lessanctuaires où la politique macroéconomique est formulée, les questions etles préoccupations qui les concernent sont rarement reflétées dans les processus<strong>de</strong> prise <strong>de</strong> décision. Ce déséquilibre au niveau national se répercute auniveau global quand les ministres <strong>de</strong>s finances et les gouverneurs <strong>de</strong>s banquescentrales se réunissent pour déterminer l’orientation <strong>de</strong>s processusmacroéconomiques globaux.Ancrage <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> genre dans les institutions<strong>Le</strong>s normes <strong>de</strong> genre sont ancrées dans les institutions, définies en tantqu’ensemble <strong>de</strong> structures qui régissent le comportement économique et social.<strong>Le</strong>s relations <strong>de</strong> genre en vigueur imposent un arrangement dans lequell’appui solidaire trouvé dans les ménages et dans les organisations socialesren<strong>de</strong>nt possibles les activités du marché. La mise en œuvre <strong>de</strong> la politiquemacroéconomique dans ce cadre solidaire sans reconnaissance <strong>de</strong> son rôle et<strong>de</strong> son influence entraîne les biais décrits ci-<strong>de</strong>ssus.<strong>Le</strong>s normes <strong>de</strong> genre existantes imposent un far<strong>de</strong>au supplémentaire auxfemmes qui veulent participer au marché mais qui sont empêchées <strong>de</strong> le faireen raison <strong>de</strong>s restrictions socialement déterminées sur leur mobilité physiqueet sur leurs avoirs. Dans certains cas, les normes sont formalisées dans lescoutumes matrimoniales et dans les structures juridiques. Comme DAWN l’aspécifié dans son intervention durant la Troisième Réunion du ComitéPréparatoire du Financement pour le développement, «l’objectif <strong>de</strong> la créationd’un environnement financier réellement favorable dans l’appui audéveloppement qui profitera <strong>de</strong> manière égale aux femmes et aux hommes,nécessite la prise en compte <strong>de</strong>s insuffisances et <strong>de</strong>s obstacles institutionnelspersistants à l’égalité <strong>de</strong> genre.»Du national au global<strong>Le</strong> débat a jusqu’ici porté sur la sphère <strong>de</strong> l’élaboration <strong>de</strong>s politiques au niveaunational. Si <strong>de</strong> nombreuses faiblesses nationales sont reproduites au niveauglobal, cette reproduction n’est pas directe. La tension déjà bien connue entrela mobilité <strong>de</strong>s capitaux et la mobilité <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> travail, et les tendances à lasegmentation du capital et à la segmentation <strong>de</strong> la force <strong>de</strong> travail, ren<strong>de</strong>ntplus complexe la nature <strong>de</strong>s biais <strong>de</strong> genre.En outre, la mondialisation remet sérieusement en cause l’élaboration <strong>de</strong>politiques au niveau national, en raison <strong>de</strong>s pressions accrues en vue <strong>de</strong>l’intégration économique et du recours à un seul modèle économique <strong>de</strong>croissance. La souveraineté économique nationale, avec l’Etat-nation commedéci<strong>de</strong>ur ultime <strong>de</strong> l’utilisation <strong>de</strong> ses ressources et d’autres ressources sisesdans ses territoires, ne peut plus être exercée <strong>de</strong> manière conventionnelle, enraison <strong>de</strong> l’érosion <strong>de</strong>s frontières économiques. <strong>Le</strong>s multiples accordsbilatéraux, régionaux et multilatéraux sur l’argent et la finance, l’investissementet le commerce ont rendu les frontières économiques moins précises et moinsbien définies. La gamme d’instruments <strong>de</strong> politiques disponibles aujourd’huipour les pays en développement est plus restreinte que celle dont disposaientles pays développés, au même sta<strong>de</strong> <strong>de</strong> développement. La marge <strong>de</strong> manœuvreest fortement réduite.Il faudrait juger <strong>de</strong> la réussite du Financement pour le développement parsa capacité à apaiser les tensions découlant <strong>de</strong> la remise en cause <strong>de</strong> lasouveraineté économique nationale. Toutefois, à mesure que les discussionssur le Financement du développement progressaient et entraient dans la phase<strong>de</strong>s négociations, le point <strong>de</strong> vue pragmatique prévalait. <strong>Le</strong>s parties prenantesgouvernementales souhaitaient que tout le mon<strong>de</strong> «reste à bord» et ceci asignifié que le Financement pour le développement ne pouvait être perçu commeun site pour résoudre les divergences sur la mondialisation.Suprématie <strong>de</strong> la mobilité <strong>de</strong>s capitaux<strong>Le</strong> Consensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> a confirmé la suprématie <strong>de</strong> la mobilité <strong>de</strong>s capitauxdans cette ère <strong>de</strong> mondialisation. Ceci s’exprime essentiellement par une prise<strong>de</strong> position «anti-taxes», <strong>de</strong>puis que la proposition d’une Organisation fiscaleinternationale et la très contestée Taxe sur les transactions monétaires ont étésupprimées du débat après la Quatrième Réunion du Comité préparatoire, <strong>de</strong>janvier 2002. C’est un sujet <strong>de</strong> préoccupation, spécialement au vu <strong>de</strong>s conclusions<strong>de</strong> Rodrik 6 <strong>de</strong> 1997, selon lesquelles la part <strong>de</strong> revenu du capital dans latotalité <strong>de</strong>s impôts est en baisse et la part <strong>de</strong> revenu du travail s’est accrue. Enrègle générale, toute référence à <strong>de</strong>s mesures réglementaires sur une formequelconque <strong>de</strong> capital s’est heurtée à une forte opposition, essentiellement<strong>de</strong>s pays d’origine.Par contre, il n’y a aucune mention <strong>de</strong> la migration, sauf pour le«mouvement <strong>de</strong>s personnes physiques» dans le cadre du commerce international,faisant référence à la terminologie utilisée par l’Organisation mondialedu commerce (OMC), dans son Accord général sur le commerce <strong>de</strong>s services.Cette référence ne contient aucun engagement et se contente <strong>de</strong> soulever <strong>de</strong>spréoccupations sur ce sujet et sur d’autres questions commerciales importantespour les pays en développement et les pays les moins avancés (PMA). L’absenced’engagements sur la migration en dépit <strong>de</strong> la recommandation du Rapport <strong>de</strong>Zedillo est en contradiction avec l’intention «d’ouvrir <strong>de</strong>s opportunités pourtous», spécialement à ceux dont le seul avoir est leur force travail.Segmentation du capital: flux <strong>de</strong> portefeuilles contre investissementétranger directMême le capital et les capitalistes sont à présent segmentés et peut-être entrain <strong>de</strong> travailler les uns contre les autres. Plusieurs crises financières résultantd’entrées incontrôlées <strong>de</strong> capitaux à court terme ont détruit les économiesnationales et entraîné la fermeture <strong>de</strong> firmes étrangères installées dans ceséconomies. L’investissement étranger direct est toujours relativement mobile.De fortes pertes peuvent découler du transfert <strong>de</strong>s opérations d’un pays àl’autre et la rentabilité peut être menacée à tout moment par les assauts <strong>de</strong> lacrise.<strong>Le</strong>s financiers étrangers à court terme trouvent <strong>de</strong>s partenaires parmil’élite nationale qui possè<strong>de</strong> et contrôle les avoirs financiers locaux. Il se créeune atmosphère où l’arbitrage <strong>de</strong>vient profitable et où les institutions financièresnationales sont encouragées à prendre <strong>de</strong>s risques. Ce sont souvent les mêmesinstitutions qui adoptent une position conservatrice en ce qui concerne lesprêts aux personnes démunies et aux femmes. Non seulement les intermédiairesfinanciers sont peu disposés à prêter aux femmes, mais les femmes peuventégalement être peu disposées à emprunter (peur <strong>de</strong> prendre <strong>de</strong>s risques) parce6 Dani Rodrik (1997), «The paradoxes of the successful state», European Economic Review,41(3-5): 411-442.Contrôle Citoyen / 69SW frances (61-80) 691/11/02, 16:17


qu’elles hésitent à mettre en danger les personnes qui dépen<strong>de</strong>nt d’elles dansleur ménage. 7Par contre, les femmes sont plus visibles en ce qui concernel’investissement étranger direct parce qu’elles constituent une réserve <strong>de</strong> maind’œuvredans les zones franches industrielles et dans le travail <strong>de</strong> sous-traitance.Il faudrait mettre en balance les avantages <strong>de</strong> l’accroissement <strong>de</strong>s opportunitésd’emploi fournies aux femmes, d’une part et la nature <strong>de</strong>s relations <strong>de</strong> travaildans ces firmes, ainsi que l’impact sur le travail et le statut <strong>de</strong>s femmes dansleurs foyers, <strong>de</strong> l’autre.En outre, les investisseurs étrangers directs peuvent se servir <strong>de</strong> leurposition préférentielle pour soutirer <strong>de</strong>s concessions aux gouvernementsd’accueil sous forme <strong>de</strong> contrats gouvernementaux, d’infrastructures etd’allègements fiscaux. Il faudrait comparer étroitement ces pertes <strong>de</strong> recettesaux limites imposées aux dépenses en matière <strong>de</strong> services sociaux.Segmentation <strong>de</strong> la main-d’œuvre: main-d’œuvre qualifiéecontre main-d’œuvre non qualifiéeIl y a, dans <strong>de</strong> nombreux pays, énormément <strong>de</strong> défiance et un manque d’intérêtgénéral, vis-à-vis <strong>de</strong> l’ouverture <strong>de</strong>s frontières à la main-d’œuvre étrangère. Enconvenant <strong>de</strong> débattre du mouvement <strong>de</strong>s personnes physiques, le Financementpour le développement est peut-être en train <strong>de</strong> reconnaître que lamondialisation pourrait offrir <strong>de</strong>s opportunités accrues aux personnes ayant<strong>de</strong>s compétences spécialisées ou aux professionnels. <strong>Le</strong>s pays développéspeuvent <strong>de</strong>venir plus réceptifs à la perméabilité <strong>de</strong>s frontières à mesure queleur profil démographique vieillit et que leur population d’âge actif diminue.Toutefois, les opportunités offertes sont essentiellement en faveur <strong>de</strong>s ménages<strong>de</strong> la classe moyenne, qui peuvent payer <strong>de</strong>s frais d’étu<strong>de</strong>s et faire face auxcoûts <strong>de</strong> la migration. Il reste à déterminer si cette migration mène à une intensification<strong>de</strong> la «fuite <strong>de</strong>s cerveaux» dans les pays en développement.La structure <strong>de</strong> l’emploi est ségrégé par occupation selon le genre. <strong>Le</strong>sprofessionnels <strong>de</strong> l’enseignement et <strong>de</strong>s soins infirmiers sont principalement<strong>de</strong>s femmes, alors que les ingénieurs et les architectes sont essentiellement<strong>de</strong>s hommes.<strong>Le</strong>s travailleurs faiblement qualifiés et les travailleurs non spécialisésprennent souvent <strong>de</strong>s risques en ayant recours à <strong>de</strong>s circuits illicites pour lamigration. <strong>Le</strong>s travailleurs faiblement qualifiés et les travailleurs non spécialisésqui restent dans leur pays d’origine forment une réserve <strong>de</strong> main-d’œuvredisponible pour les capitalistes tant nationaux qu’étrangers. Ce processus asapé la solidarité internationale entre travailleurs en opposant le désespoir <strong>de</strong>stravailleurs <strong>de</strong>s pays pauvres à la menace <strong>de</strong> chômage pour les travailleurs<strong>de</strong>s pays riches.Gouvernance économique et sociale: A quoi sert l’ONU?<strong>Le</strong> potentiel qu’a le Financement pour le développement <strong>de</strong> s’attaquer auxproblèmes systémiques à long terme qui sous-ten<strong>de</strong>nt le développement restenon réalisé. <strong>Le</strong> Consensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> n’a pas été en mesure <strong>de</strong> définir unrôle <strong>de</strong> lea<strong>de</strong>rship pour les Nations-Unies dans la gouvernance économique etsociale mondiale. <strong>Le</strong> Consensus <strong>de</strong> <strong>Monterrey</strong> a assuré et légitimé les positions<strong>de</strong> la Banque mondiale, du Fonds monétaire international (FMI) et <strong>de</strong>7 Diane Elson, «International financial architecture: A view from the kitchen» communicationlors <strong>de</strong> Annual Conference of the International Studies Association in Chicago, février 2001.mimeo Maria S. Floro, «Gen<strong>de</strong>r dimensions of the financing for <strong>de</strong>velopment agenda»,document <strong>de</strong> travail préparé pour UNIFEM, 22 avril 2001, New York: UNIFEM.l’Organisation mondiale du commerce (OMC) dans leurs rôles respectifs dansla gouvernance macroéconomique globale. <strong>Le</strong>s Nations-Unies auraient pu servir<strong>de</strong> contre-poids à ces institutions, mais l’acceptation totale <strong>de</strong>s prescriptions<strong>de</strong> politique émanant <strong>de</strong>s institutions financières multilatérales n’a servi qu’àconsoli<strong>de</strong>r la nature et l’orientation actuelles <strong>de</strong> la mondialisation.Pour réussir à «rester engagé» dans cette sphère, il faut <strong>de</strong>s reformulationsrésolues et assurées <strong>de</strong> l’ordre économique mondial dans trois domainesinterdépendants: l’élaboration <strong>de</strong> politique économique internationale,l’économie politique internationale et le droit économique international. 8Sur l’élaboration <strong>de</strong> politique économique internationaleUn système économique ouvert signifie naturellement que les développementséconomiques dans un pays trouvent une traduction dans les pays partenaires.<strong>Le</strong>s gran<strong>de</strong>s économies industrialisées dont les monnaies servent d’instrumentscommerciaux majeurs peuvent entraîner la perturbation <strong>de</strong>s économies <strong>de</strong> leurspartenaires commerciaux. Cependant, leurs politiques favorisent leurs propresintérêts nationaux (ou les intérêts d’un petit groupe privilégié), sans tenir compte<strong>de</strong> l’impact que ces politiques peuvent avoir sur leurs partenaires commerciaux.<strong>Le</strong>s groupes et les réseaux ad hoc et informels qui initient la politique nesont pas légitimes, car ils manquent <strong>de</strong> transparence et ont un nombre limité<strong>de</strong> membres et ont donc, <strong>de</strong>s manières <strong>de</strong> procé<strong>de</strong>r anti-démocratiques. Danscertains cas, par exemple le Comité <strong>de</strong> Bâle, constitué <strong>de</strong>s responsables <strong>de</strong>sbanques centrales du G-10, la légitimé est contestée parce que les responsablessont <strong>de</strong>s technocrates dont le mandat <strong>de</strong> représentation est imprécis. Cesgroupes doivent clarifier et justifier leur autorité sur l’agenda qu’ils traitent. Si<strong>de</strong> tels groupes sont jugés nécessaires, il faudrait que <strong>de</strong>s institutions formellessoient établies avec <strong>de</strong>s mécanismes précis <strong>de</strong> responsabilité et d’obligationredditionnelle.Sur l’économie politique internationale<strong>Le</strong>s processus <strong>de</strong> prise <strong>de</strong> décision dans les différentes instancesintergouvernementales nécessitent une sérieuse restructuration. Là où les structures<strong>de</strong> vote dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> la souscription au capital, les pays riches obtiendrontplus <strong>de</strong> voix. Là où les structures <strong>de</strong> vote dépen<strong>de</strong>nt d’un droit d’adhésionexclusif, ceux qui sont à l’extérieur n’auront jamais <strong>de</strong> voix. Même là où lesstructures <strong>de</strong> vote paraissent uniformes – comme dans le processus un Etatunevoix – le droit <strong>de</strong> vote (voting power) et le pouvoir réel divergent encore.Bien que les pays en développement aient une majorité <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux-tiers àl’Assemblée générale <strong>de</strong>s Nations-Unies, ces pays ne sont pas en mesure <strong>de</strong>se servir <strong>de</strong> leur nombre pour faire pression en faveur <strong>de</strong> leurs revendications.La défiance vis-à-vis <strong>de</strong> la gouvernance <strong>de</strong>s groupements multilatérauxincite les pays à former <strong>de</strong>s blocs ou à conclure <strong>de</strong>s accords secondaires, quià proprement parler, sapent les accords multilatéraux. Etant donné l’asymétrie<strong>de</strong> l’équilibre du pouvoir décrite ci-<strong>de</strong>ssus, une réponse régionale peut s’avérerpositive pour les pays faibles, particulièrement quand les gran<strong>de</strong>s nationsinfluentes en sont écartées. Il est toutefois très important que les réponsesrégionales créent <strong>de</strong>s alternatives au lieu d’imiter le contenu et la structure <strong>de</strong>senceintes multilatérales.Au niveau national, il faut davantage <strong>de</strong> clarification sur les relations entreles branches exécutive et législative <strong>de</strong> gouvernement dans l’élaboration <strong>de</strong>saccords internationaux, avec <strong>de</strong>s implications législatives nationales. La8 Marina Fe B. Durano, «New Goals for Global Governance?», DAWN Informs, novembre2001. Extraits d’une présentation <strong>de</strong> la conférence ayant le même intitulé, accueillie parDanish UN Association à Copenhague.Contrôle Citoyen / 70SW frances (61-80) 701/11/02, 16:17


démocratie représentative semble être sapée quand les législateurs sontrarement ou jamais impliqués dans le processus <strong>de</strong> négociation <strong>de</strong>s accords.<strong>Le</strong>s représentants <strong>de</strong> la branche exécutive nationale auprès <strong>de</strong>s institutionsmultinationales doivent être tenus comptables <strong>de</strong>s décisions prises quand sontimpliqués dans les institutions multilatérales.Sur le droit économique internationalUne gran<strong>de</strong> partie du débat sur les thèmes du Financement pour ledéveloppement a <strong>de</strong>s implications juridiques. Du fait qu’ils sont internationaux,ces accords relèvent <strong>de</strong> la discipline juridique du droit économique international.Apparemment, le droit économique international est faible dans ledomaine du droit du développement international où, comme avec tant <strong>de</strong>résolutions <strong>de</strong>s Nations-Unies, la plupart <strong>de</strong>s formulations ne sont pascontraignantes. 9 Bien que les accords sur le commerce, l’argent et la financepuissent avoir un aspect relatif au développement, ils ne prennent pasdirectement en compte le développement.<strong>Le</strong> sous-ensemble ‘accords internationaux’ du corps <strong>de</strong> lois doit contenirles éléments d’équité et <strong>de</strong> justice, car la justice est un principe fondamentaldu droit. En outre, les relations entre les accords économiques internationauxet les instruments juridiques <strong>de</strong>s droits humains et le droit au développement<strong>de</strong>vraient être clairement établies, notamment au niveau national.Considérer les personnes comme une fin change notre vision <strong>de</strong> lamacroéconomie. <strong>Le</strong>s instruments <strong>de</strong> politique construisent un environnementexterne qui permet aux capacités <strong>de</strong> chaque individu <strong>de</strong> se développer le pluspleinement. Quand les capacités internes d’une personne sont associées à cetenvironnement externe favorable, «<strong>de</strong>s capacités combinées» sont développées.Ce sont ces capacités combinées que le processus <strong>de</strong> développement vise àréaliser. L’environnement propice assure l’existence du fon<strong>de</strong>ment social pources capacités. 10Ce point <strong>de</strong> vue est totalement opposé à la politique qui crée unenvironnement propice à l’investissement et à la croissance. La promotion <strong>de</strong>l’investissement et <strong>de</strong> la croissance économique ne peut fournir que <strong>de</strong>sressources; elle ne peut garantir que les ressources mises à disposition ai<strong>de</strong>ntréellement une personne à fonctionner «<strong>de</strong> manière véritablement humaine.»La justice sociale et la justice <strong>de</strong> genre sont mieux servies dans cetteredéfinition dès lors que la gouvernance économique globale concentre son attentionsur les individus qu’elle espère servir. C’est particulièrement crucial pourles femmes qui ont «souvent été traitées comme servant les fins <strong>de</strong>s autres,plutôt que comme étant <strong>de</strong>s fins <strong>de</strong> plein droit.» <strong>Le</strong> développement pour tous nesera réalisé que lorsque chaque personne est traitée comme une fin. ■Development Alternatives With Women for a New Era (DAWN)Environnement propice revisitéEn établissant les principes requis pour créer un environnement propice à lamobilisation <strong>de</strong> ressources financières pour le développement, il faudrait serappeler que cette action mène à l’obtention <strong>de</strong>s moyens pour le développementet non aux fins qui constituent le développement. <strong>Le</strong> Financement pour ledéveloppement <strong>de</strong>vrait considérer une redéfinition <strong>de</strong> ‘l’environnement propice’pour le travail futur qui implique que l’on considère les personnes comme lafin plutôt que comme le moyen du développement.La politique macroéconomique, particulièrement sa composante créationd’emplois, vise à fournir <strong>de</strong>s emplois aux pauvres afin qu’ils puissent gagnerun salaire pour être en mesure <strong>de</strong> consommer. Dans ce cadre, les personnessont un moyen pour générer un revenu et la croissance du revenu est assimiléeau développement.9 Qureshi, op. cit.10 Martha C. Nussbaum, Women and Human Development: The Capabilities Approach,Cambridge: Cambridge University Press, 2000.Contrôle Citoyen / 71SW frances (61-80) 711/11/02, 16:17

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