PAPILLONS <strong>de</strong> nuit LA GAZETTE DE BALI 42
FRANCE-AUSTRALIE, LE CHOC DES CULTURES 43 <strong>Bali</strong> est un sacré melting pot. Le mon<strong>de</strong> entier s’y croise, s’y renifle et s’y côtoie. Si <strong>la</strong> nuit tous les chats sont gris, <strong>la</strong> journée tous les « bule » sont b<strong>la</strong>ncs, voire parfois rosâtres. Il est vrai que <strong>de</strong> jour, quelle que soit leur origine, les Occi<strong>de</strong>nt<strong>au</strong>x mangent, travaillent ou se reposent <strong>au</strong>x mêmes heures. Mais dès que le soleil se couche… A ma droite, <strong>la</strong> lignée anglo-saxonne, <strong>de</strong> tout ce qui « speaks english » jusqu’<strong>au</strong>x blonds Nordiques <strong>de</strong>scendants <strong>de</strong>s Vikings, n’hésitons pas ! Pour simplifier et pour se conformer <strong>au</strong>x clichés particuliers à <strong>Bali</strong>, je les appellerai les Australiens. A ma g<strong>au</strong>che, <strong>la</strong> connexion Europe du Sud - Amérique du Sud, j’ai nommé les <strong>La</strong>tins bien sûr. Et pour schématiser davantage encore et puisque nous sommes dans un canard francophone, je dirais les Français. Ayant <strong>de</strong>s amis dans les <strong>de</strong>ux camps, voici un petit comparatif. Pour nos kangourous, c’est <strong>la</strong> culture barbecue. Agglutinés <strong>au</strong>tour du cuistot, on commente <strong>la</strong> taille <strong>de</strong>s s<strong>au</strong>cisses, on discute le bout <strong>de</strong> gras. Puis, dans <strong>la</strong> même assiette, on mé<strong>la</strong>nge les vian<strong>de</strong>s, poulet, poisson, crevettes... C’est le fameux surf and turf. Et même si une arête <strong>de</strong> dora<strong>de</strong> s’est p<strong>la</strong>ntée dans <strong>la</strong> couenne du filet <strong>de</strong> porc, on trouve tout délicieux, comme si on n’avait jamais rien mangé d’<strong>au</strong>ssi bon. Du côté <strong>de</strong> nos coqs, on est assis à table <strong>au</strong> resto. Amuse-bouche, entrée, p<strong>la</strong>t <strong>de</strong> résistance, fromage et <strong>de</strong>ssert. Tout est raffiné, bien présenté. Pourtant, « ça manque un peu <strong>de</strong> sel. » Ou encore : « Mon chate<strong>au</strong>briand est un poil trop cuit. » Enfin, ma préférée : « Rouge sur b<strong>la</strong>nc, tout fout le camp. » L’Australien est chaleureux et <strong>de</strong> bonne composition. <strong>La</strong> plupart <strong>de</strong> ceux présents à <strong>Bali</strong> viennent <strong>de</strong> Perth, mais chaque fois qu’ils rencontrent un mate, ils s’enthousiasment : « Non, tu es <strong>de</strong> Perth <strong>au</strong>ssi, c’est fou ca ! » Chez les Frenchies, c’est plutôt, « Chéri, regar<strong>de</strong>, c’est notre voisine <strong>de</strong> <strong>la</strong> B<strong>au</strong>le, j’espère qu’elle nous a pas vus. » En club, les Français boivent du vin, du champagne, <strong>de</strong>s cocktails, alors que les Australiens tournent à <strong>la</strong> bière. Certes c’est moins fort, mais comme ils ont attaqué l’apéro juste après le petit-déjeuner, passé minuit, <strong>la</strong> différence est minime. Les G<strong>au</strong>lois sont <strong>de</strong>s dramaturges. Une fois éméchés, ils affectionnent le drame passionnel : « Je ne pourrai pas le voir avec une <strong>au</strong>tre, je suis malheureuuuuuse. » L’Aussie n’aime pas les chichis. Pas d’yeux <strong>la</strong>rmoyants, plutôt <strong>au</strong> beurre noir. Mais qu’importe, rien ne v<strong>au</strong>t une bonne tranche <strong>de</strong> rigo<strong>la</strong><strong>de</strong>... C’est finalement en regardant sur un écran géant dans un bar à Kuta un match <strong>de</strong> rugby Australie- France que j’ai eu l’idée. Les Australiens hur<strong>la</strong>nts avec drape<strong>au</strong>x et maillots d’un côté, les Français discrets, faisant semb<strong>la</strong>nt <strong>de</strong> ne pas vraiment s’y intéresser <strong>de</strong> l’<strong>au</strong>tre. Il f<strong>au</strong>drait les fusionner pour réinventer l’Occi<strong>de</strong>ntal idéal à <strong>Bali</strong>. Didier Chekroun