Séquence 4 : dire, lire et écrire autour d’Arthur et <strong>de</strong>s chevaliers<strong>de</strong> <strong>la</strong> Table Ron<strong>de</strong><strong>de</strong> leur visage, ils pensent désormais au moyen le meilleur <strong>de</strong> sefaire du mal avec l’acier tranchant. Lancelot n’avait pas <strong>la</strong>moindre crainte : il s‘entendait <strong>de</strong>ux fois plus que Méléagant àjouer <strong>de</strong> l’épée, car il avait appris cet art dans son enfance. Ilsfrappent tous les <strong>de</strong>ux si bien sur leurs écus et sur leurs heaumes<strong>la</strong>més d’or que les voilà fendus et bosselés. Mais Lancelot <strong>de</strong> plus enplus presse Méléagant : d’un coup puissant il tranche le bras droitpourtant bardé <strong>de</strong> fer que l’impru<strong>de</strong>nt aventurait à découvertpar-<strong>de</strong>vant son écu. En se sentant si malmené, Méléagant […]estpresque insensé <strong>de</strong> rage et <strong>de</strong> douleur. Il s’estime bien peu, s’il n’arecours à quelque fourberie. Il fond sur l’adversaire en comptantle surprendre. Mais Lancelot se donne gar<strong>de</strong> : avec sa bonne épée,[…]il le frappe en effet au nasal 2 qu’il lui enfonce dans <strong>la</strong> boucheen lui brisant trois <strong>de</strong>nts.Dans sa souffrance et sa fureur, Méléagant ne peut dire unseul mot. Il ne daigne non plus implorer <strong>la</strong> pitié, attendu que soncœur, en mauvais conseiller, l’enferme dans les rets 3 <strong>de</strong> sonaveugle orgueil. Son vainqueur vient sur lui : il dé<strong>la</strong>ce sonheaume et lui tranche <strong>la</strong> tête. Méléagant ne jouera plus <strong>de</strong>mauvais tour à Lancelot : le voilà tombé mort.Le chevalier <strong>de</strong> <strong>la</strong> charrette, Chrétien <strong>de</strong> TroyesSéance 3 : l'univers <strong>de</strong> <strong>la</strong> chevalerieTexte complémentaire2partie du heaume qui protège le nez3filet pour capturer <strong>de</strong>s animaux ; ici au sens figuré (Méléagant est pris aupiège <strong>de</strong> son orgueil)
Séquence 4 : dire, lire et écrire autour d’Arthur et <strong>de</strong>s chevaliers<strong>de</strong> <strong>la</strong> Table Ron<strong>de</strong>(Thibaut <strong>de</strong> Sauvigny est un jeune écuyer qui va se faireadouber par son seigneur, qui est aussi son oncle, le comte <strong>de</strong>Montcornet)Deux coups <strong>de</strong> trompette font vibrer l’air frais du matin. Lesjongleurs, accompagnés <strong>de</strong> leurs luths, vielles et rotes, répon<strong>de</strong>nten chantant en chœur. La cour du château est remplie <strong>de</strong> mon<strong>de</strong> :belles dames aux longues tresses et aux vêtements <strong>de</strong> soie,chevaliers <strong>de</strong>s environs dans leur plus beau manteau, enfants quicourent et crient gaiement. Des serviteurs déroulent au milieu <strong>de</strong><strong>la</strong> cour un tapis.Quand Thibaut, le premier adoubé, car le plus jeune,s’avance sur le tapis, un silence recueilli se fait dans l’assistance.Thibaut sent <strong>la</strong> fierté inon<strong>de</strong>r son cœur. Un peu ma<strong>la</strong>droitement,son père, qui lui sert <strong>de</strong> parrain, se baisse, lui <strong>la</strong>ce les chausses <strong>de</strong>fer qui enveloppent ses jambes et attache à ses pieds <strong>de</strong>ux éperonsd’argent. Ensuite, il lui enfile le haubert, longue robe <strong>de</strong> mailles<strong>de</strong> fer qui enveloppe <strong>la</strong> tête, les bras et le corps jusqu’aux chevilles.Puis il pose sur <strong>la</strong> tête <strong>de</strong> son fils le heaume, casque <strong>de</strong> fer quiprotège le crâne et le nez. Enfin, lentement, malgré ses doigtsépais et malhabiles, il noue les petits <strong>la</strong>cets <strong>de</strong> cuir qui attachentle heaume à <strong>la</strong> cotte <strong>de</strong> mailles.Maintenant que le garçon est préparé pour l’adoubement, leseigneur <strong>de</strong> Montcornet s’approche. Il tient une épée au pommeauvermeil.« Thibaut, mon neveu, je te donne l’épée que mon oncle m’aconfiée, avant <strong>de</strong> mourir en Terre Sainte. Je compte sur tavail<strong>la</strong>nce pour maintenir l’honneur <strong>de</strong> notre lignage. Sache quecette épée a combattu fièrement les infidèles et qu’elle contientdans son pommeau un morceau <strong>de</strong> <strong>la</strong> vraie Croix du Christ. Pourcette raison, elle se nomme Santacrux. Fais-en un digne usage auservice <strong>de</strong> Dieu ».Thibaut ferme les yeux. Il sent le baudrier passer autour <strong>de</strong>son cou, et puis l’épée, <strong>la</strong> longue épée, qui vient battre son f<strong>la</strong>ncgauche. Sa main s’empare du pommeau et l’étreint violemment.Dorénavant s’ouvre <strong>de</strong>vant lui le chemin <strong>de</strong>s prouesses et <strong>la</strong> joieemplit son cœur. Il voudrait crier d’allégresse, lorsque le seigneurlui dit :« Maintenant, courbe <strong>la</strong> tête, je vais te donner <strong>la</strong> colée ».