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LA VILLE DE CHOLON, DEPUIS L'ORIGINE À NOS ... - Réseau Asie

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http://www.reseau-asie.comEnseignants, Chercheurs, Experts sur l’<strong>Asie</strong> et le PacifiqueScholars, Professors and Experts on Asia and the Pacific<strong>LA</strong> <strong>VILLE</strong> <strong>DE</strong> <strong>CHOLON</strong>, <strong>DE</strong>PUIS L’ORIGINE <strong>À</strong> <strong>NOS</strong> JOURSUNE APPROCHE CARTOGRAPHIQUE <strong>DE</strong> L’HISTOIRE <strong>DE</strong> <strong>LA</strong> <strong>VILLE</strong>BIRTH AND <strong>DE</strong>VELOPMENT OF <strong>CHOLON</strong> BY MAPSPRESENTING THE HISTORY OF THE CITY THROUGH MAPSLaurent GédéonUniversité Catholique de LyonThématique F : La ville asiatique contemporaineTheme F: New urban figuresAtelier F04 : Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsWorkshop F04: Virtual Saigon - Writing a new history of the cityfrom visual documents4 ème Congrès du <strong>Réseau</strong> <strong>Asie</strong> & Pacifique4 th Congress of the Asia & Pacific Network14-16 sept. 2011, Paris, FranceÉcole nationale supérieure d'architecture de Paris-BellevilleCentre de conférences du Ministère des Affaires étrangères et européennes© 2011 – Laurent GédéonProtection des documents / Document use rightsLes utilisateurs du site http://www.reseau-asie.com s'engagent à respecter les règles de propriétéintellectuelle des divers contenus proposés sur le site (loi n°92.597 du 1er juillet 1992, JO du 3 juillet). Enparticulier, tous les textes, sons, cartes ou images du 4 ème Congrès, sont soumis aux lois du droit d’auteur. Leurutilisation, autorisée pour un usage non commercial, requiert cependant la mention des sources complètes etcelle des nom et prénom de l'auteur.The users of the website http://www.reseau-asie.com are allowed to download and copy the materials oftextual and multimedia information (sound, image, text, etc.) in the Web site, in particular documents of the 4 thCongress, for their own personal, non-commercial use, or for classroom use, subject to the condition that any useshould be accompanied by an acknowledgement of the source, citing the uniform resource locator (URL) of thepage, name & first name of the authors (Title of the material, © author, URL).Responsabilité des auteurs / Responsability of the authorsLes idées et opinions exprimées dans les documents engagent la seule responsabilité de leurs auteurs.Any opinions expressed are those of the authors and do.not involve the responsibility of the Congress'Organization Committee.


des biens immeubles » 4 . Soumis à toute une série de règles contraignantes et sujets à des taxesélevées, il leur était en outre interdit d’exporter en dehors de l’empire d’autres denrées que le riz.Cette situation connut une évolution avec la chute en 1643 de la dynastie des Ming sous la pressiondes Mandchous. Ce tournant politique fit entrer la Chine dans une période troublée, marquée par demultiples révoltes visant les nouveaux maîtres de Pékin. En 1679, un groupe de rebelles chinoiscomposé d’environ 3 000 soldats, mandarins et autres fidèles à la dynastie déchue débarqua àTourane et demanda asile à la cour d’Annam. Désireux d’éviter des tensions avec Pékin, l’empereurd’Annam les envoya défricher le nouveau territoire du Tchen-La maritime, récemment enlevé auxKhmers. La troupe se scinda en deux, un premier groupe s’installant à Trân Biên (future Biên Hoa) etun deuxième à Phan Trân (future Gia Dinh, puis Saigon).Dès 1698, le Tchen-La comptait déjà 40 000 familles dont une proportion notable de Chinois. Enraison du grand nombre de Chinois éparpillés, les autorités vietnamiennes décidèrent de lesregrouper en leur affectant des zones spéciales de résidence. C’est ainsi que fut créé à Trân Biên levillage de Thanh Ha (ou village des Qing) à l’intention des immigrants de fraîche date réputés sujetsde l’empire mandchou des Qing. A Phan Trân fut créé le village des Minh Huong (ou village des Ming)réputés aux immigrants plus anciens et à leurs descendants, réputés fidèles à l’ancienne dynastie desMing. 5Les Chinois ayant participé de manière active aux opérations menées contre les armées Tây Sonsuite à la révolte de 1773, ils durent se replier devant l’avance des rebelles. Ordre fut alors donné auxhabitants de Than Ha d’abandonner leur village et de se replier sur Phan Trân. A ce premier groupes’ajoutèrent d’autres Chinois issus du territoire de My Tho. C’est de cette fusion entre les réfugiés deThanh Ha et de My Tho d’une part et les habitants de Minh Huong d’autre part que devait naître, en1778, la ville de Cholon. La bourgade se retrouva vite directement menacée par les armées rebelleset tomba aux mains des Tây Son en 1782. 10 000 habitants furent tués en mesure de représaillespour l’aide apportée par les Chinois à leurs adversaires. Il s’agit là du seul massacre de massequ’aient connu les Chinois en Cochinchine.4 H. L. Jammes, Au pays vietnamien, notes ethnographiques, Paris, Edition A. Challamel, 1900, p. 46.5 Tsai Maw Kuey, op. cit., p. 28.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 3


Carte de Saigon et de Cholon établie en 1795 par M. Brun(Carte n°1)Cette carte est intéressante car elle met en évidence d’une part le fait que les deux cités, chinoise etvietnamienne étaient nettement séparées et différenciées (y compris sur le plan de l’ordonnancementdes rues) et d’autre part, le fait que la bourgade chinoise était déjà identifiée comme un centred’activité économique comme en témoigne l’emploi du terme « bazar ». Cette vocation commercialede Cholon ne fera que se renforcer au cours des décennies suivantes.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 4


Cholon au XIX e siècleUne fois la paix revenue, les habitants s’organisèrent collectivement pour rendre habitable et apte àl’activité commerciale leur nouveau point d’implantation où existaient à cette époque de nombreuxmarécages notamment dans la zone devenue plus tard la rue de Canton ainsi que celle située entre lavieille route de Cholon et l'Arroyo chinois (zone que les Français appelèrent nommèrent le maraisBoresse aux premiers temps de la colonie). 6 Ils agrandirent notamment les cours d’eau existants,creusèrent des canaux et construisirent des bassins de radoub. En outre, des quais en pierre destinésà accueillir les embarcations et les marchandises furent construits le long du canal sur une longueurde trois kilomètres environ. Les habitants érigèrent également des cales sèches ainsi que des docksdestinés à entreposer les marchandises sur les bords du Lo Gom. Ces grands magasins appelés taukhâu étaient loués aux Chinois qui venaient de Chine une fois par an sur des jonques de mer et quiapportaient leurs marchandises dans ces magasins et les vendaient en gros ou en détail. 7 Parailleurs, plusieurs ponts en bois furent bâtis, destinés à relier les deux rives de l’arroyo. En 1820, laroute commerciale du Cambodge par Cholon et My Tho était complètement terminée et les donnéeséconomiques de l’époque indiquent que, dès 1830, les Chinois de Cholon exportaient annuellement12 000 tonneaux de riz, 2 200 tonneaux de coton, 400 tonneaux de sucre, 120 d'épices, 20 tonneauxde cire, des holothuries, de l'ivoire, de l'écaillé et des plantes médicinales. 8Rapidement, la ville commença à s’étendre débordant l’espace initial où se concentrait la majorité deshabitants et dont Petrus Ky indique qu’il se trouvait à l’emplacement du Cho Rây. 9 Cette période,marque également le début de l’urbanisation progressive des rives de l’arroyo de Cholon déjà bordéde grands entrepôts aux abords de la cité mais où commençaient à émerger des maisons, d’espaceen espace, depuis le pont du marché (Câu Duong) jusqu’à celui de Câu Khâm et au Lo Gom. Notonsque l’accroissement de la population fut particulièrement remarquable à la charnière entre le XVIII e etle XIX e puisque, en cinq ans, la population de Cholon vit tripler ses effectifs.Le développement économique de la ville se fit de pair avec celui des infrastructures nécessaires à lavie de la collectivité et c’est ainsi qu’elle bénéficia rapidement d’un éclairage public ainsi que d’écolesdirigées par des enseignants venus de Chine. Ces décisions étaient prises par un conseil urbaincomposé de notables de la cité.Cette prospérité se poursuivit jusqu’à l’arrivée des Français en 1858 qui marqua un tournant majeurdans l’histoire de la Cochinchine. Bien que les habitants de Cholon aient été directement concernéspar les affrontements qui opposèrent troupes franco-espagnoles et vietnamiennes, les événementsqui aboutirent à la création de la colonie affectèrent toutefois peu les Chinois sur le long terme car ilssurent s’adapter rapidement aux nouveaux arrivants.6 Notice historique, administrative et politique sur la ville de Saigon, Imprimerie de l’Union, Saigon, 1917, p. 4.7 Petrus Ky, op. cit., p. 25.8 P. Vial, Les premières années de la Cochinchine, colonie française, Paris, Edition Challamel, 1874, p. 352.9 Concernant la population, Petrus Ky précise que les Minh Huong, population d’origine du bourg, habitaient principalement lapartie comprise entre la rue des Marins et l’arroyo chinois (Petrus Ky, op. cit., p. 25).Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 5


Carte de Saigon et de Cholon établie en 1815 par Trân Van Hoc(Carte n°2)Comparée à la carte précédente de M. Brun, cette carte laisse apparaître une densification desconstructions sur la bordure nord-est de Gia Dinh-Saigon avec un phénomène similaire en ce quiconcerne Cholon qui s’étend dans la même direction.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 6


Cholon vers 1850Au milieu du XIX e siècle, Cholon comptait environ 500 maisons aux toits recouverts par des tuiles,elles-mêmes entourées de très nombreuses paillottes. On notait la présence dans le centre de la villede deux canaux et de cinq ponts en construction, dont un en fer. L’activité économique caractéristiquede la ville était particulièrement apparente sur les quais de l’arroyo chinois, avec la présence de docksainsi que de nombreuses embarcations destinées au transport des marchandises. 10Si les villes de Cholon et Saigon étaient nettement séparées, leur proximité géographique (ellesn’étaient séparées que de six kilomètres) et leur complémentarité économique nécessitait ledéveloppement de voies de communication. Celles-ci étaient de deux sortes : fluviale et routière.La voie fluviale était représentée par le canal autrefois nommé « rach Bên Nghe » qui fut rebaptisé« arroyo chinois » par les Français, ces derniers ayant remarqué qu’il conduisait à la ville de Cholondont les habitants les plus nombreux étaient les Chinois. Notons que ce nom de Bên Nghe provenaitdes buffles – et surtout des bufflons (nghe) – qui se baignaient autrefois dans ces lieux. 11L’arroyo servait à transporter les marchandises au départ de Cholon. Les jonques mouillaient à ceteffet à Xom Chiêu (point de mouillage situé entre le fort du Sud et les Messageries maritimes). Lesbords du canal représentaient une zone de forte urbanisation et l’on remarquait la présence, à cetteépoque, de nombreuses maisons sur pilotis bâties en rang serré le long des rives.Deux voies routières permettaient de joindre Cholon à Saigon : la route basse longeant l’arroyo, d’unelongueur de 6 kilomètres, et la route haute, située plus au nord, en bordure de la plaine destombeaux, d’une longueur de 5 kilomètres.Cholon lors de la conquête françaiseDès le début de leur pénétration en Cochinchine, les Français prirent conscience de la différence quiexistait, tant sur le plan ethnique que de l’activité économique, entre les cités de Saigon (Gia Dinh) etde Cholon, perception dont font état divers écrits parus au cours de la deuxième moitié du XIX e siècle.H. L. Jammes évoque ce « grand emporium des basses provinces cochinchinoises, du Laos et duCambodge, aussi bien que des régions siamoises que commande le Mékong. Dans ses magasins,sous ses vastes hangars, viennent sans cesse s'entasser tous les produits de la colonie, qu'unénorme mouvement de jonques et de vapeurs emporte vers tous les points du globe. » 12 P. Cultru,quant à lui, décrit comme suit la ville chinoise : « A cinq kilomètres de Saigon, à Cholon, existait uneville peuplée de 12 à 15 000 Chinois, presque tous célibataires, s'occupant d'affaires et vivant à peuprès libres de toute surveillance, dans des rues étroites et très animées où se suivaient leursmagasins et où la police annamite ne pénétrait pas souvent. » 13 On peut également citer ici P.Doumer qui, tout en notant les différences entre les deux cités, prédisait dans son ouvrage paru en1905 leur future fusion : « Il y a deux villes dignes de ce nom en Cochinchine : Saigon, villeadministrative, maritime et militaire, de création française ; Cholon, la ville du commerce et del'industrie, asiatique peut-on dire, plutôt qu'annamite, qui existait avant notre arrivée. C'est dans cesdeux centres voisins, presque soudés, se complétant l'un l'autre, que toute la vie de la Cochinchinevient aboutir. Malgré leur séparation légale, leur séparation matérielle, que chaque jour d'ailleursréduit, Saigon et Cholon font une seule et même cité. » 14Il est utile de noter ici que Cholon ne fut pas épargnée par les combats qui précédèrent, de 1859 à1862, la prise de contrôle par les troupes franco-espagnoles de trois des six provinces de laCochinchine. C’est ainsi que de mars 1860 à février 1861, dans le cadre de la guerre de position quiopposa les troupes du commandant d’Ariès à celles du maréchal Nguyên Tri Phuong, les troupesfrançaises occupèrent la ligne Saigon-Cholon (la fameuse ligne de Khi Hoa) et notamment quatre10 Tsai Mau Kuey, op. cit., p. 29.11 Petrus Ky,op. cit., p. 19.12 H. L. Jammes, op. cit., pp. 45-46.13 P. Cultru, Histoire de la Cochinchine française, Paris, Editions Challamel, 1910, p. 183.14 P. Doumer, Indochine française, souvenirs, Paris, Edition Vuibert et Nony, 1905, p. 64.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 7


edoutes situées au niveau de plusieurs pagodes érigées entre ces deux villes (ligne des pagodes) :pagode de Cai Mai, pagode des Clochetons, pagode des Mares et pagode Barbet. Le dispositiffrançais était alors complété par le fort du Sud situé en bordure de la rivière de Saigon, au sud de laville. 15 La ligne de défense des forces françaises correspondait grosso modo à la route stratégiquesituée au nord des deux agglomérations, route qui servira plus tard de voie de communication entreSaigon et Cholon. Précisons que la partie basse de Cholon, située au sud du canal, fut incendiée parles rebelles le 15 avril 1862, dans le cadre des hostilités persistantes entre Français et troupesvietnamiennes. 16Cholon aux alentours de 1900Au tout début du XX e siècle, les voies de communication principales entre Saigon et Cholon étaienttoujours l’arroyo chinois, très densément fréquenté entre les quais de la ville chinoise et le port deSaigon, la route haute et la route basse longeant l’arroyo. Cette dernière était entièrement bordée deconstructions et on peut considérer que, sur ce point, la jonction matérielle entre les deux villes étaiteffective dès cette époque. Ce n’était pas le cas, en revanche, pour la plaine des Tombeaux situéesur le trajet de la route haute qui ne comprenait que des habitations éparses ou des hameaux.A cette époque, Cholon était le grand marché à riz de la Cochinchine. C’est vers cette ville queconvergeait le riz non décortiqué sous forme de paddy. Il y était ensuite traité dans les décortiqueriesà vapeur (ou rizeries) situées sur les deux rives de l’arroyo chinois et disposant d’un outillageperfectionné. On en dénombrait sept à Cholon vers 1900, la quasi-totalité de ces usines appartenant àdes Chinois de même que la plupart des commerces de détail de la ville.Il est à noter que plusieurs observateurs de l’époque (P. Doumer, F. Farjenel) font état de la propretédes rues de Cholon ainsi que de l’organisation générale de la ville qui tranchaient avec l’état des citésvietnamiennes.Signe de l’importance que revêtait la ville aux yeux des autorités coloniales, son administrateurpossédait le grade le plus élevé dans le cadre des administrateurs de Cochinchine. Cet administrateurétait secondé par un conseil municipal composé de Français, de Vietnamiens et de Chinois, tousdésignés par le Lieutenant-Gouverneur, le rôle de la municipalité étant de pourvoir à tous les besoinsde la ville en matière d’équipements divers. Enfin, aux côtés de la municipalité, officiait un hautfonctionnaire vietnamien, un phu, ayant en charge les affaires indigènes.En quarante années de présence française, la physionomie de Cholon avait en partie changé sousl’impulsion des différents responsables qui s’étaient succédés à la tête de la ville. La ville avait acquisgrosso modo la forme d’un grand quadrilatère. Les marécages environnants avaient été nivelés, denouvelles rues et boulevards percés et des ponts métalliques jetés au-dessus des canaux. Desbâtiments nouveaux avaient été érigées comme les grands magasins de la rue de Canton ou encoreles entrepôts du quai de Gia-Long. Huit grandes rizeries se trouvaient sur la rive sud du Lo Gom.Toutefois, si cette mutation urbaine apparaissait visible notamment par l’alignement des rues, ellen’avait pas pour autant abouti à la disparition de l’enchevêtrement parfois inextricable de ruelles et depassages bordés de compartiments, enchevêtrement qui rendait difficile la mise sous contrôle effectifde la cité par les autorités. 1715 P. Cultru, op. cit., p. 71.16 Dans le cadre de l’implication de Cholon dans le conflit, on peut noter ici que l’amiral Bonard fut à l’origine d’un projet decanal reliant l’arroyo de l’Avalanche, au nord-est de Saigon à celui de Cholon au-delà de Cai Mai. L’objectif de cet ouvrage étaitde créer une enceinte destinée à faciliter la défense de l’ensemble Saigon-Cholon par les troupes françaises en cas derenversement des rapports de force lié à une évolution politique majeure en Cochinchine ou en Europe. Ce projet s’inspirait del’organisation militaire mise en place par les Anglais à Hong Kong, Singapour, Aden ou encore Gibraltar. L’exécution de cetravail gigantesque commença en novembre 1862 et aboutit au creusement d’un canal long de 6 kilomètres, large de 20 mètreset profond de 6 à travers la plaine des Tombeaux, canal qui suivait approximativement le tracé de l’ancienne ligne de front entreforces françaises et vietnamiens. (P. Vial, op. cit., p. IX).17 H. L. Jammes, op. cit., p. 71.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 8


Carte de Cholon établie en 1878(Carte n°3)Sur cette carte datant de 1878, Cholon apparaît déjà bien structurée avec un maillage de ruesrégulier. La ville est orientée vers l’arroyo chinois qui en est le cœur économique. D’autres canauxtraversent la cité, qui seront comblés plus tard tel le rach Lo Gom. Plusieurs rues ainsi que descanaux sont désignés comme « projetés » et ne sont pas encore réalisées au moment où est émis cedocument. Ils témoignent cependant du développement à venir de la ville en direction du nord, del’ouest et du sud.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 9


Cholon aux alentours de 1930Au cours des deux premières décennies du XX e siècle et jusqu’aux années trente, les travauxd’embellissement et de voirie ont continué à Cholon. Des sentines ont été transformées en rues, desarroyos ont été comblés. En 1929, le boulevard Gallieni, large de 40 mètres a été percé et un autreboulevard, destiné à joindre la gare de My Tho au centre de Saigon était déjà en projet. 18En 1927, on dénombrait 45 décortiqueries de riz et plus de 60 en 1931, la plupart appartenant à desChinois. 19 Cholon apparaît à ce moment comme la « métropole du riz ». Outre ces décortiqueries, ontrouvait de très nombreuses rizeries, souvent de petites tailles, servant à trier et blanchir le rizpréalablement traité dans les décortiqueries.Le port de Saigon-Cholon apparaît à cette époque comme l’aboutissement d’un « énorme appareilcirculatoire cochinchinois » comprenant près de 1 800 kilomètres de canaux et une centained’appontements pour 14 kilomètres de quais. Ce port s’étend sur 6 kilomètres de long et est complétépar un port fluvial s’étendant sur une douzaine de kilomètres sur Saigon et Cholon. Si, pendantlongtemps, ce port fut seulement représenté par l’arroyo chinois, en 1919, on construisit un canal dedoublement relié par trois embranchements à l’arroyo (deux canaux parallèles reliés par trois canauxtransversaux). 20 L’ensemble centralisait le mouvement du port fluvial qui alimentait lui-même l’activitédu port maritime particulièrement en ce qui concerne le riz. Cet espace représentait un véritablecentre industriel car outre les décortiqueries installées sur les bords des canaux, d’autresmanufactures s’étaient également installées à ce niveau.Cholon, qui comptait à l’époque 190 000 habitants, apparaissait comme un véritable « faubourg » deSaigon, relais économique incontournable pour sa voisine. Véritable plaque tournante du commercedu riz en Cochinchine, elle recevait à cette époque 1 700 000 tonnes de paddy et exportait 1 300 000tonnes de riz via le port maritime de Saigon. 21Il est à noter que le marché de Cholon, témoin emblématique de cette vitalité économique, futinauguré en 1928 à l’issue d’une construction qui nécessita à peine 30 mois de travail. Le bâtiment,monumental, possédait une façade mesurant 130 mètres de largeur pour 95 mètres de profondeur etavait nécessité près de 3 500 m 3 de béton et 700 tonnes de fer. 22Le rapprochement entre Saigon et CholonLe rapprochement entre les deux centres urbains, qui s’est poursuivi tout au long de la première partiedu XX e siècle puis leur fusion, devenue effective à partir des années soixante, représentent desévénements majeurs dans l’histoire des deux villes. On peut rappeler que ce processus avait étéanticipé par les autorités françaises dès le XIX e siècle et, en particulier, P. Doumer qui indiquait dansson livre publié en 1905 avoir réfléchi à une unification administrative des deux cités dès 1897 mais yavoir renoncé estimant que le temps n’en était pas encore venu. 23Ce rapprochement est très perceptible à travers l’analyse des cartes qui montre une densificationcroissante des voies de communication entre les deux villes au cours de cette période.Ainsi, en ce qui concerne le réseau routier, aux deux routes carrossables déjà anciennes (route hautepassant en bordure de la plaine des Tombeaux et route basse longeant l’arroyo chinois) étaientvenues s’ajouter l’ancienne route stratégique situé plus au nord, au milieu de la plaine des Tombeaux(route qui correspondait plus ou moins à l’ancienne ligne de Khi Hoa) ainsi qu’une quatrième routeappelée route du Polygone qui passait, quant à elle, à proximité du champ de course de Saigon.Enfin, le Boulevard Gallieni (aujourd’hui Avenue Trân Hung Dao) achevé en 1929 et large 30 mètres,18 H. Danguy, Le nouveau visage de la Cochinchine, Saigon, Edition La Rampe indochinoise, 1929, p. 87.19 A. Maybon, L’Indochine, Paris, Edition Larose, 1931, p. 67.20 Géographie de l’Indochine physique, économique et politique, Paris, Edition Carus, 1931,p. 157.21 Géographie de l’Indochine physique, économique et politique, op. cit., p. 155.22 A. Maybon, op. cit., p. 174.23 P. Doumer, op. cit , p. 65.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 11


qui partait de la rue des Marins prolongée pour rejoindre le boulevard Bonnard à Saigon, avaitcontribué à renforcer les liens entre les deux centres urbains. 24Les autorités françaises développèrent parallèlement, dès la fin du XIX e siècle, un réseau de voiesferrées permettant une liaison aisée et rapide entre les deux cités. Trois voies furent ainsi créées :Une ligne ferrée reliant Saigon à My Tho en passant par Cholon.Le tramway de la route haute exploité par la Société Générale des Tramways à Vapeur deCochinchine. Cette ligne, longue de six kilomètres, qui reliait Saigon à Cholon en passant par laPlaine des Tombeaux était appelée tramway de la route haute.Le tramway de la route basse, également à vapeur, reliait Saigon à Cholon en côtoyant l'arroyochinois. Celle ligne appelée ligne de la route basse, appartenait à la Compagnie française desTramways de l'Indo-Chine. Partant de Cholon (Quai de My Tho), elle aboutissait à Go Vap après avoirtraversé Saigon et Gia Dinh, desservi le quai de l’arroyo chinois, le marché central, l'arsenal et enfinDa Kao. 25Enfin, les voies fluviales (arroyo chinois, canal de doublement, etc.) étaient très fréquentées par lesbateaux transportant les divers produits issus de la région. De nombreuses embarcations (jonques,barques, chaloupes à vapeur, bateaux des Messageries fluviales) effectuaient ainsi une navetterégulière entre les deux Saigon et Cholon et entre Cholon et les autres bourgades de Cochinchine viales nombreux arroyos et canaux.Par ailleurs, il est à noter que le téléphone reliait, dès les années vingt, Saigon à Cholon et lesabonnés des deux villes mettant là aussi en évidence l’intensification du réseau de communicationentre les deux villes.Evolution de la situation administrative de CholonEn étudiant la manière dont la colonie avait été organisée sur le plan administratif par les autoritésfrançaises, nous constatons que Cholon a, de manière quasi continue, disposé d’une autonomieadministrative, signe de la reconnaissance de sa spécificité par les Français. Cette situation a perduréjusqu’au 27 avril 1931, date marquant son unification administrative avec Saigon et la création de laRégion de Saigon-Cholon. Ce faisant, les autorités coloniales prenaient acte du rapprochemententamé depuis plusieurs décennies et ses conséquences en termes de densification de l’habitat et deproximité effective entre les deux centres urbains. En décembre 1941, les deux municipalités deSaigon et de Cholon fusionnent en une seule agglomération urbaine. En 1956 efin, cette entitéurbaine prit le nom unique de SaigonAux premiers temps de l’expansion en Cochinchine, au fur et à mesure que s’étendait l’occupation dupays, les autorités coloniales s’étaient attachées à restaurer les bases de l’administrationvietnamienne tout en instaurant des cadres français. Ainsi, suite à l'arrêté du 12 août 1862, le GiaDinh avait-il été divisé en trois préfectures (Phu) et chaque préfecture en trois sous-préfectures(huyên). C’est ainsi que l’amiral Charner avait placé des officiers à la tête des Phu et des Huyên, leurdonnant le titre de « directeurs des affaires indigènes » (Quan phu en vietnamien ou Praefectus enlatin d’interprète). Les premières directions ainsi établies dans le Gia Dinh furent celles de Saigon,Can Goic, Cholon, Hoc Monh, Tay Ninn et Tan An. 26La ville de Cholon elle-même, jadis divisée en vingt villages, fut organisée par des arrêtés successifset spéciaux. En 1865, les agglomérations qui la composaient furent groupées en cinq quartiers dirigéspar des notables. Ces notables désignaient un conseil municipal composé de cinq Vietnamiens, cinq24 Les communications entre les deux villes étaient facilitées par de nombreuses voitures publiques dites « malabares » quieffectuent la liaison entre Cholon et la banlieue de Saigon.25 Annuaire administratif de la Cochinchine, Saigon, Imprimerie coloniale, 1907.26 Ph. Langlet, Quac Thanh Tâm, Atlas historique des six provinces du sud du Vietnam, Paris, Edition Les Indes savantes,2003, p. 26.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 12


Minh-Huong et quinze Chinois. En 1872, un arrêté institua une délégation municipale. Toutefois, cetteorganisation donna de mauvais résultats et on revint en 1875 au système du conseil des notables, quijouait un rôle consultatif auprès de l'inspecteur chargé de l'administration de Cholon. 27Cholon regagna son autonomie administrative suite à l’arrêté organique du 20 octobre 1879 quistipulait l’établissement d’un conseil municipal ayant à sa tête un administrateur-maire avec la moitiéde membres élus et l’autre moitié désignée. Cette municipalité était constituée sur la base de la loi du18 juillet 1837 qui régissait alors les communes de France. Cet arrêté marquait le retour del’autonomie administrative de la ville. On note toutefois que l’autonomie de Cholon n’atteignit jamaiscelle de Saigon. 28Notons enfin qu’en 1900, la ville de Cholon représentait l’une des 24 circonscriptions administrativesde la Cochinchine. Parmi ces 24 circonscriptions, on comptait 20 provinces (dont celle de Cholon), 3villes (Saigon, Cholon et Cap Saint Jacques) et une île, Poulo-Condore. 29Evolution des limites de Cholon au cours des périodesD’après l’arrêté du 3 octobre 1865, les limites de Saigon étaient définies comme suit :- Le pont : Ông Lanh et la rue Thuan Kieu (Cach Mang Thang Tam aujourd’hui)- Au nord : la rue Chasseloup Laubat (Nguyên Thi Minh Khai aujourd’hui)- A l’est L’arroyo Thi Nghè- Au sud : la rivière Saigon- Au sud-ouest : l’arroyo chinoisPlusieurs élargissements intervinrent à la suite de divers arrêtés en 1865 et 1872 au terme desquelsla ville atteignit une superficie d’environ 450 hectares tout en demeurant cependant nettementséparée de sa voisine Cholon dont elle était séparée par de vastes espaces de campagne.En 1894 et 1895, une série de villages furent incorporés à Saigon (Hoa My, Phu Hoa, Nam Chon, TânDinh, Khanh Hôi et Tam Hôi amenant sa superficie à 973 hectares. En 1906, une partie des villagesTân Hoa et Phu Thanh (partie entre Saigon et Cholon) furent incorporés à la ville, élevant sonterritoire à 1 300 hectares et le rendant contigu à celui de Cholon. Enfin, l’arrêté du 16 août 1907ajouta une partie des villages Khanh Hôi et Chanh Hung amenant la superficie totale de Saigon à1760 hectares, superficie qui devait rester inchangée pendant plusieurs années. 30A partir de la fusion de 1931, La Région de Saigon-Cholon, qui atteignait une superficie de 5 100hectares avec une population de 256 000 habitants, fut placée directement sous l’autorité duGouverneur de la Cochinchine et administrée par un préfet nommé par lui.Evolution de l’agglomérations Saigon-CholonTout au long du XX e siècle, le rapprochement entre Saigon et Cholon se poursuivit, rapprochementque les cartes successives des deux villes mettent clairement en évidence. On y observe unedensification urbaine progressive et irréversible, marquée par la disparition des espaces agricoles ouen friche séparant les deux cités. Le maillage des rues et des avenues s’accroit régulièrement au fildes décennies jusqu’à ce qu’il ne soit plus possible, à la seule lecture de la carte, de différencier lesdeux centres urbains. Ainsi, dès le milieu des années soixante-dix, sur le plan cartographique, Cholonn’apparaît plus que comme le 5 ème arrondissement de Saigon et toutes les plans successifs émis parla suite et jusqu’à très récemment ne feront que confirmer ce constat.La série de cartes ci-dessous permet de visualiser la fusion progressive des deux agglomérations :27 P. Cultru, op. cit., p.281.28 Nguyên Dinh Dâu, pp. 118-119.29 Annuaire général de l’Indo-Chine française, Hanoi, Imprimerie Schneider, 1900, p. 211.30 Nguyên Dinh Dâu, op. cit., pp. 118-119.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 13


Carte de Saigon et de Cholon établie en 1956(Carte n°5)Sur cette carte datant de 1956, si le tissu urbain semble encore discontinu entre les deux villes, lenombre de rues et d’avenues s’est, quant à lui, accru de manière spectaculaire soulignant ladensification des liens interurbains qui témoigne d’un accroissement des flux et des échangesmutuels.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 14


Carte de Saigon et de Cholon établie en 1975(Carte n°6)Sur ce plan datant de 1975, l’intégration de Cholon au sein de l’agglomération de Saigon apparaîttotale, rien n’indiquant, à la seule lecture de la carte, que le 5 ème arrondissement correspond àl’ancienne ville chinoise.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 15


Carte de Cholon établie en 1975(Carte n°7)Cette intéressante carte issue de la précédente (carte n°6) et datant donc également de 1975 met enévidence le fait qu’aucune extension n’est désormais possible en direction du nord et de l’est enraison de la jonction des deux zones urbaines. C’est donc en direction de l’ouest que Cholon peutencore se développer, zones d’extension mises en évidences par l’emploi du rouge foncé.Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 16


Carte de Saigon et de Cholon établie en 2005(Carte n°8)Cette ultime carte montre l’agglomération de Hô Chi Minh-Ville telle qu’elle apparaît aujourd’hui.L’ancienne ville de Cholon (en jaune) semble totalement noyée au sein de la métropole dont lesprojets d’extension, liés à l’accroissement démographique et son importance de plus en plus grandesur le plan économique, se poursuivent toujours.‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐‐Atelier F04 / Virtual Saigon : Écriture d'une nouvelle histoire de la villeà partir des documents visuelsLa ville de Cholon, depuis l’origine à nos jours :Une approche cartographique de l’histoire de la villeLaurent Gédéon / 17

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