Tun Orthop 2008, Vol 1, N° 2Zrig M et al.i. introduCtion<strong>Le</strong> <strong>genou</strong> <strong>flottant</strong> est une entité lésionnelle décritepour la première fois en 1975 par Blakeet McBri<strong>de</strong> [1]. Il s’agit <strong>de</strong> l’association d’unefracture du fémur à une fracture homolatéraledu tibia. Elle survient pour <strong>de</strong>s traumatismes àhaute énergie et est généralement accompagnéed’autres lésions potentiellement vitales. C’est unelésion grave ; caractérisée par la difficulté <strong>de</strong> sontraitement et son mauvais pronostic.Peu <strong>de</strong> publications ont été consacrées à ce sujet. Nousen présentons <strong>39</strong> nouveaux <strong>cas</strong>. A partir <strong>de</strong> l’analyse<strong>de</strong> cette série et <strong>de</strong> la littérature, nous essayons <strong>de</strong> dégagerles caractéristiques et le pronostic <strong>de</strong> cette entité.La gravité <strong>de</strong> ces lésions a été évaluée en utilisantl’ISS (Injury Severity Score) défini par Baker [2].<strong>Le</strong> score moyen était <strong>de</strong> 24 [16, 52]. Vingt troispatients (59%) avaient un score supérieur à 18constituant par définition <strong>de</strong>s polytraumatisés.La fracture du fémur était diaphysaire dans 76,9%<strong>de</strong>s <strong>cas</strong> et articulaire dans 10,2% <strong>de</strong>s <strong>cas</strong>. La fracturedu tibia était diaphysaire dans 74,3% <strong>de</strong>s <strong>cas</strong>et articulaire dans 15,3% <strong>de</strong>s <strong>cas</strong>. Nous avonsadopté la classification <strong>de</strong> Fraser [3] qui différencieles fractures selon leurs composantes articulaires(Type I) ou non (Type II) (Fig 1). <strong>Le</strong>s fracturesType I étaient <strong>de</strong> loin les plus fréquentes : 79,5%.<strong>Le</strong>s Type IIA (fracture articulaire du tibia), Type IIB(fracture articulaire du fémur) et Type IIC (fracturearticulaire du fémur et du tibia) représentaientrespectivement 10,2%, 5,1% et 5,1%.166ii. matériel et métho<strong>de</strong>sIl s’agit d’une étu<strong>de</strong> rétrospective <strong>de</strong> <strong>39</strong> <strong>genou</strong>x<strong>flottant</strong>s pris en charge entre 1990 et 2006 dans leservice d’Orthopédie à l’Hôpital Universitaire <strong>de</strong>Monastir. Cette série a intéressé <strong>de</strong>s adultes présentantune fracture du fémur et du tibia homolatéralsituée entre la ligne intertrochantérienne etle tiers distal du tibia, non amputé et non décédélors <strong>de</strong> la prise en charge initiale.La moyenne d’âge était <strong>de</strong> 35 ans (extrêmes : 17 et75 ans). La répartition par sexe était à majorité masculineavec 36 hommes pour 3 femmes. La fracturea intéressé le côté droit dans 15 <strong>cas</strong> et le côté gauchedans 24 <strong>cas</strong>. Ces fractures faisaient suite à un acci<strong>de</strong>nt<strong>de</strong> la voie publique dans 36 <strong>cas</strong> (acci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s 2roues dans 24 <strong>cas</strong>), à un acci<strong>de</strong>nt domestique dans2 <strong>cas</strong> et à un acci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> travail dans 1 <strong>cas</strong>.L’association à d’autres lésions a été fréquente(Tableau 1).tableau 1 : <strong>Le</strong>s différentes lésions associéeslésions associéesTraumatisme crânien sévère 13Traumatisme crânien bénin 12Traumatisme thoracique 5Traumatisme abdominal 4Traumatisme du bassin 2Traumatisme du rachis 1Traumatisme osseux du côté homolatéral 10Traumatisme osseux du côté controlatéral 8Traumatisme facial 6nombre <strong>de</strong> <strong>cas</strong>Figure 1 : Classification <strong>de</strong> Fraser.<strong>Le</strong> <strong>genou</strong> <strong>flottant</strong> était fermé dans 28,2% <strong>de</strong>s <strong>cas</strong>.La fracture fémorale était ouverte dans 25,6% <strong>de</strong>s<strong>cas</strong>. La fracture tibiale était ouverte dans 64,1%<strong>de</strong>s <strong>cas</strong>. Une seule atteinte du sciatique poplitéexterne a été notée. Aucune atteinte vasculairen’a été pas retrouvée, cependant un syndrome <strong>de</strong>loge a été noté dans <strong>de</strong>ux <strong>cas</strong>.Une réanimation première a été nécessaire dans35,8% <strong>de</strong>s <strong>cas</strong>. <strong>Le</strong> traitement chirurgical a été réalisédans un délai <strong>de</strong> 12 heurs dans 38,4% <strong>de</strong>s<strong>cas</strong>. L’ostéosynthèse <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux foyers a été réaliséeau cours du même temps opératoire dans 80,5%<strong>de</strong>s <strong>cas</strong>. <strong>Le</strong> temps opératoire moyen a été <strong>de</strong> 205minutes (155 à 410 minutes).<strong>Le</strong>s fractures du fémur ont été traitées par enclouagecentromédullaire dans 17 <strong>cas</strong>, par lameplaque condylienne dans 7 <strong>cas</strong>, par clou plaquedans 6 <strong>cas</strong> et par plaque vissée dans 5 <strong>cas</strong>. Quatrefractures ouvertes <strong>de</strong> type III ont été traitées parfixateur externe (Fig 2).Figures 2 a, b : Genou <strong>flottant</strong> type I (classification <strong>de</strong> Fraser).
<strong>Le</strong> <strong>genou</strong> <strong>flottant</strong> : étu<strong>de</strong> rétrospective <strong>de</strong> <strong>39</strong> <strong>cas</strong>Tun Orthop 2008, Vol 1, N° 2Figures 2 c, d : Stabilisation <strong>de</strong>s fractures par enclouage centromédullairedu fémur et du tibia.Pour le tibia, 17 fractures ont été traitées par unenclouage centromédullaire, 4 par plaque en T et15 par fixateur externe (Fig 3) associé dans 3 <strong>cas</strong>à un vissage épiphysaire percutané. <strong>Le</strong> traitementorthopédique n’a été utilisé que dans 3 <strong>cas</strong>.Figures 3 d : Radiographies au recul : Consolidationiii. résultatsTrente quatre patients ont été revus : 4 patientsdécédés précocement et un perdu <strong>de</strong> vu. <strong>Le</strong>recul moyen était <strong>de</strong> 37 mois (extrêmes : 14 et102 mois).La durée d’hospitalisation a été en moyenne <strong>de</strong>38 jours (6 à 98 jours).A- Complications généralesQuatre patients sont décédés : <strong>de</strong>ux à la suited’une embolie graisseuse quelques jours aprèsl’ostéosynthèse (6 et 8 jours), un à la suite d’uneembolie pulmonaire <strong>de</strong>ux mois plus tard et un àla suite d’un choc septique.Figures 3 a,b :Radiographies initiales : Genou <strong>flottant</strong> IIcB- Complications infectieusesSix patients ont présenté une infection profon<strong>de</strong>(4 <strong>de</strong> siège tibial et 2 <strong>de</strong> siège fémoral). Dans2 <strong>cas</strong> l’assèchement <strong>de</strong> l’infection a été obtenuaprès ablation du matériel d’ostéosynthèse etune antibiothérapie adaptée. Dans les autres <strong>cas</strong>l’évolution s’est faite vers un assèchement et uneconsolidation après curetage du foyer d’ostéiteet greffe osseuse à ciel ouvert <strong>de</strong> type Papineau.Figures 3 c : Ostéosynthèse <strong>de</strong> la fracture sus et inter condylienne parlame plaque et <strong>de</strong> la fracture tibiale par fixation externe et ostéosynthèseà minimaC- Cals vicieuxDix-huit cals vicieux ont été notés : 7 au niveaudu fémur et 11 au niveau du tibia (Tableaux 2-3).<strong>Le</strong>s déviations ont été appréciées radiologiquement,les troubles rotatoires ont été appréciéscliniquement. Trois patients ont présenté <strong>de</strong>s répercutionscliniques nécessitant une ostéotomie<strong>de</strong> correction.167