Rapport Planète Vivante Océans
2015_marine_final
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Le ch angement climatique dans l’ A rctique<br />
Peuplé de seulement 4 millions d’habitants répartis sur plus<br />
de 32 millions de km2, l’Arctique demeure largement à l’écart des<br />
impacts humains directs. Et pourtant, les effets des changements<br />
climatiques planétaires se traduisent par un état inédit de<br />
transformations permanentes. Tout indique qu’aujourd’hui, les<br />
températures estivales en Arctique n’ont jamais été aussi élevées<br />
depuis 2 000 ans (Kaufman et coll., 2009).<br />
Le résultat le plus évident de ce réchauffement continu est la<br />
contraction des glaces de mer estivales : en étendue, en épaisseur<br />
et en volume. Selon les projections, l’océan Arctique devrait ainsi<br />
devenir pratiquement libre de glaces en été avant la fin du siècle,<br />
probablement d’ici 30 à 40 ans (Overland et Wand, 2013).<br />
Or dans l’océan Arctique, la vie est avant tout adaptée à la<br />
présence de glace. C’est sur la glace ou à ses alentours, que les ours<br />
polaires chassent, que les phoques mettent bas, que les morses se<br />
reposent et se nourrissent, que les baleines trouvent leur nourriture<br />
et les abris contre les prédateurs. Encore ne s’agit-il ici que des<br />
manifestations les plus visibles d’un vaste écosystème rythmé par le<br />
cycle des nutriments, ponctué par le ux et le reux des glaces de<br />
mer (Eamer et coll., 201). Toute modification du déroulement de<br />
ce cycle pourrait causer du tort aux espèces endémiques mais aussi<br />
aux espèces migratoires. Plusieurs millions d’oiseaux migrateurs<br />
dépendent en effet du pouls de la vie au printemps arctique.<br />
L’océan Arctique risque parallèlement de faire les frais<br />
d’une acidification qui met à mal les organismes marins à coquille,<br />
maillon important du réseau trophique arctique. S’appuyant sur la<br />
modélisation de l’avenir des eaux arctiques américaines, une récente<br />
étude de l’Administration océanique et atmosphérique nationale des<br />
Etats-Unis a conclu que, d’ici quelques décennies, « les écosystèmes<br />
variés sous-tendant certaines des plus grandes pêches commerciales<br />
et de subsistance du globe pourraient se retrouver soumis à une<br />
pression colossale » (Mathis et coll., 2015).<br />
Les transformations affectant l’Arctique ne sont pas non plus<br />
sans effet sur les populations humaines, tant à l’échelle locale que<br />
mondiale : l’océan Arctique et les mers environnantes pèsent pour<br />
plus de 10 % des prises marines du globe en poids (plus de 7 millions<br />
de tonnes par an). L’Enquête sur les conditions de vie dans l’Arctique<br />
(Poppel et coll., 2007), portant sur les foyers indigènes de l’Alaska,<br />
du Groenland, du Canada et de la Tchoukotka, a estimé que deux<br />
tiers d’entre eux tiraient au moins la moitié de leur nourriture des<br />
ressources traditionnelles. La raréfaction de ces dernières, en leur<br />
posant des dicultés économiques et culturelles, pourrait pousser<br />
les peuples arctiques à se tourner de plus en plus vers de nouvelles<br />
industries pour vivre, accroissant par là-même la pression exercée<br />
sur un écosystème crucial.<br />
L’océan Arctique<br />
pourrait devenir<br />
pratiquement libre<br />
de glaces en été<br />
d’ici 30 à 40 ans<br />
<strong>Rapport</strong> <strong>Planète</strong> <strong>Vivante</strong> <strong>Océans</strong> page 34