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MEME PAS PEUR 16 leg

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2 / Même pas peur N o <strong>16</strong> / FÉVRIER 2017<br />

Manifestation le 21 mars à Bruxelles<br />

À Bruxelles comme ailleurs en Belgique,<br />

les problématiques liées au logement sont<br />

de plus en plus importantes. Les loyers ne<br />

cessent d’augmenter poussant les locataires<br />

à consacrer une part toujours plus importante<br />

de leurs revenus. Le loyer moyen est<br />

passé de 346 € en 1992 à 695 € en 2013 et<br />

rien qu’ entre 2004 et 2013 le loyer moyen a<br />

augmenté de 20 %… Rappelons également<br />

que le revenu mensuel d’un(e) isolé(e) au<br />

C<strong>PAS</strong> est de 860 € tandis que celui d’un(e)<br />

isolé(e) touchant des allocations d’insertion<br />

du chômage est de 760 €, la recherche d’un<br />

logement devient dès lors un véritable parcours<br />

du combattant. Sans compter nombre<br />

de propriétaires véreux(ses) qui refusent<br />

de louer à des allocataires du C<strong>PAS</strong> ou du<br />

chômage et ceux-celles qui n’hésitent pas<br />

à louer des logements complètement insalubre<br />

à des prix exorbitants sachant très<br />

bien que leurs locataires n’oseront pas se<br />

plaindre de peur de ne plus retrouver de<br />

logement.<br />

Le nombre de SDF a lui aussi fortement<br />

augmenté (on estime cette augmentation à<br />

plus de 33 % entre 2010 et 2015 allant jusqu’à<br />

atteindre 5.000 personnes). Pendant ce<br />

temps le nombre de logements vides serait<br />

compris entre 15.000 et 30.000 ce qui représente<br />

de 3 à 6 logements laissés à l’abandon<br />

par SDF dans la capitale. S’il y a des SDF ce<br />

n’est donc pas dû à une fatalité mais bien<br />

à une volonté politique de mettre la propriété<br />

privée au-dessus du droit au logement.<br />

La spéculation immobilière joue un<br />

rôle prépondérant dans ce nombre élevé de<br />

bâtiments abandonnés. En effet, en laissant<br />

volontairement des logements inoccupés<br />

les gros(ses) propriétaires rendent l’offre<br />

virtuellement plus faible que la demande<br />

ce qui engendre… une hausse des loyers !<br />

La situation dans les sociétés de logements<br />

sociaux n’est guère meilleure. La<br />

mauvaise gestion et le manque de volonté<br />

politique font que bien des logements<br />

publics restent eux aussi à l’abandon pendant<br />

que près de 50.000 ménages restent<br />

sur des listes d’attente, parfois pendant<br />

de nombreuses années. Dans certains<br />

quartiers cette situation désastreuse saute<br />

aux yeux comme par exemple à la Roue à<br />

Anderlecht où plus de 80 logements sont<br />

murés et laissés à pourrir. La cité-jardin du<br />

Floréal à Watermael-Boitsfort où le nombre<br />

de logements abandonnés atteint le chiffre<br />

faramineux de <strong>16</strong>4. Ces sociétés de logements<br />

publics n’hésitent pas à expulser<br />

les locataires qui ne peuvent ou ne veulent<br />

plus payer et sont bien souvent plus expéditifs<br />

que les propriétaires privés à virer<br />

les squats.<br />

Face à cette situation nous n’attendons<br />

rien de l’état. Ses réponses restent toujours<br />

les mêmes: répressions, contrôle et<br />

mesures médiatiques ridicules. Les proréappropriation<br />

des logements vides<br />

PIRATONS BXL,<br />

collectif de squatteur(euse)s<br />

Nouvelle<br />

LE COLERIQUE<br />

cédures d’expulsions de squats et de locataires<br />

sont de plus en plus expéditives. Des<br />

projets de loi visant à criminaliser les plus<br />

pauvres en punissant le squat sont régulièrement<br />

remis sur le tapis ces dernières<br />

années. Autre exemple : la loi Onkelinx<br />

de 1993 permettant aux bourgmestres<br />

de réquisitionner les logements vides n’a<br />

presque jamais été appliquée et ce n’est pas<br />

la réquisition avec un but purement médiatique<br />

d ’un étage d’immeuble pour en faire<br />

des logements qui va y changer grandchose<br />

surtout quand on sait que la ville de<br />

Bruxelles elle-même possède de nombreux<br />

bâtiments vacants.<br />

Notre réponse aux problématiques de<br />

logements se veut directe, autonome de<br />

tout parti politique ou syndicat et mise<br />

en œuvre par les premier(e)s concerné(e)s.<br />

Nous prônons l’occupation des bâtiments<br />

vides tant pour y habiter que pour y mener<br />

des activités, y créer des espaces de rencontres,<br />

de discutions, de créations. Ces<br />

espaces se veulent autogestionnaires, horizontaux<br />

et libérés autant que possible des<br />

rapports marchands ainsi que des oppressions<br />

racistes, sexistes, homophobes, transphobes<br />

et autres dominations qui régissent<br />

actuellement la société. Nous ne nous laisserons<br />

pas intimider par la répression !<br />

Organisons-nous collectivement pour lutter<br />

contre les expulsions de squatteur(euse)s et<br />

de locataires ! Un toit pour toutes et tous !<br />

C’est pour défendre ces revendications<br />

que nous appelons comme nous l’avions<br />

déjà fait l’année dernière à venir manifester<br />

en cette date symbolique du début de printemps<br />

et du début des expulsions de locataires<br />

de logements sociaux ce 21 mars 2017.<br />

Jean-Luc Dalcq<br />

C’était un coléreux.<br />

Un sanguin de belle envergure. Un Jupiter qui démarrait au quart de tour, comme ça,<br />

quasi pour rien. Un Raoul en colère. Capable d’en produire de bien sombres et d’autres<br />

véritablement homériques. Les murs en tremblaient encore bien après même si, depuis<br />

le temps, sa femme s’en était fait raison. Et à propos de raison, un jour, après qu’il eut<br />

frôlé un arrêt cardiaque une fois encore pour des broutilles, celle-ci vint le visiter plus<br />

en profondeur que d’ordinaire. Comme son tempérament, voire son idiosyncrasie, ne<br />

semblait pas en mesure de freiner le processus naturel, il n’eut plus le choix. Après avoir<br />

lu l’essai du psychologue et psychanalyste Jacques Arènes Accueillir la faiblesse, il se posa<br />

cette question essentielle. « Et si nos faiblesses servaient de socle à la construction de notre bonheur<br />

intérieur ? » Plutôt que recevoir ce pensum en souffrance ou de réfuter nos limites,<br />

pourquoi ne pas en faire une force ? Qui plus est, à une époque de bataille rangée économique.<br />

Matérialiser cette carence dans un combat susceptible de servir une pensée tant<br />

progressive qu’indépendante. Tiens, en voilà une idée!<br />

Il prit alors un registre de commerce, devint free lance et se mit à son compte. Et très vite<br />

devint incontournable en revendant ses colères qu’il produisait sans faillir. Livrées clé<br />

en main et prêtes à l’emploi. Nombre de leaders syndicalistes et de partis dits d’opposition<br />

se bousculèrent au portillon de sa clientèle, histoire d’utiliser ce produit colérique haut<br />

de gamme dans la sphère de leurs activités. L’époque était à nouveau à la contestation.<br />

Face au gouvernement inflexible, en effet, la grogne populaire montait un peu partout.<br />

Comme la matière première mais surtout les prétextes étaient intarissables, il se mit à<br />

produire des monceaux de colères. Et bien sûr devint richissime. Mais un jour, étrangement,<br />

tout s’arrêta. Incapable de produire la moindre colère, il fut contraint de mettre la<br />

clé sous le paillasson. Les comportementalistes de tous bords furent dans l’impossibilité<br />

de fournir la moindre explication.<br />

Depuis, contraints de passer des décrets dans une indifférence quasi générale, les gouvernements<br />

successifs, privés d’opposition susceptible de virer au rouge, s’ennuient.<br />

Quant à notre ancien colérique, il ne se souvient de rien. Bienveillant, subitement à<br />

l’écoute du monde et totalement tourné vers autrui, il pense même à se lancer dans une<br />

carrière politique.<br />

Noir, jaune, bouse<br />

Ainsi donc, une grrrrande enquête<br />

dépeint un citoyen belge en rupture de<br />

confiance envers ses institutions, tenté<br />

par le repli sur soi et enclin à rejeter<br />

l’étranger. Tu parles d’un scoop. Paraît<br />

même qu’on a payé un sociologue pour<br />

ça, alors qu’avec deux ou trois potes<br />

bourrés, on aurait déjà pu l’écrire il y a<br />

longtemps sur le zinc d’un café miteux<br />

en échange de quelques chopes et d’un<br />

cervelas.<br />

Derrière ce faramineux travail d’investigation,<br />

il y a la fondation « Ceci n’est pas<br />

une crise ». De prime abord, la fille a l’air<br />

aguichante mais les bas résille cachent<br />

en réalité de purulentes varices. Dans le<br />

bestiaire de ses membres figurent en effet<br />

quelques éminents thuriféraires du capitalisme<br />

bien-pensant : Philippe Busquin,<br />

Éric Domb, Louis Michel, Philippe Maystadt,<br />

Bruno Colmant (« oups-je-me-suistrompé-sur-les-intérêts-notionnels<br />

»)…<br />

La liste des partenaires démange également<br />

les zygomatiques. À côté des assureurs,<br />

on trouve notamment Proximus et<br />

Mithra, dont les dirigeants sont de foutus<br />

défenseurs de l’intérêt général ; l’une s’est<br />

récemment fendue d’une déchirante diatribe<br />

envers notre si cruelle fiscalité des<br />

entreprises, et l’autre se fait entendre à<br />

trois kilomètres tant il traîne des casseroles.<br />

Du lourd. La dream team.<br />

Mes amis, coupons court à tout espoir<br />

candide : ces tristes sires ne nous sauveront<br />

pas. John Emerich Edward Dalberg-<br />

Acton, qui n’était pourtant pas un révolutionnaire<br />

exalté, l’avait déjà compris il<br />

y a plus d’un siècle : « Le pouvoir tend à<br />

corrompre, le pouvoir absolu corrompt<br />

absolument ». La suite de la citation est<br />

moins connue, mais cinglante : « Les<br />

grands hommes sont presque toujours<br />

des hommes mauvais ». Et paf.<br />

Une précaution s’impose. Loin de moi<br />

l’idée de mettre tous les hommes politiques<br />

(et les femmes aussi d’ailleurs, la<br />

connerie transcende les genres) dans le<br />

même panier du « tous pourris ». Beaucoup<br />

font de chouettes trucs et certain(e)s<br />

sont même des potes. Il est bien ici question<br />

d’une mafia certes minoritaire mais<br />

dangereusement agissante. Tous les<br />

partis sont touchés par cette engeance,<br />

même si c’est à droite qu’on trouve les<br />

plus beaux spécimens. Le PS, au moins,<br />

avait fait son mea culpa par anticipation<br />

- et inadvertance, manifestement -<br />

par l’usage ad nauseam de l’antienne,<br />

navrante d’impuissance et d’arrogance,<br />

« Sans nous, ce serait pire ».<br />

Ils ne sauveront pas le monde car ce<br />

sont justement eux qui l’ont construit. De<br />

toute façon, ils l’ont déserté depuis longtemps.<br />

Ces gens vivent hors sol. Alain<br />

Deneault évoque conceptuellement un<br />

Mark Harris<br />

rapport disloqué au réel 1 tandis que Frédéric<br />

Lordon compare sarcastiquement<br />

Emmanuel Macron à une tomate hydroponique<br />

2 . Dans cet univers, il est tout<br />

juste possible de vivre avec 5100 € nets<br />

par mois (Henri Guaino), alors même que<br />

les pains au chocolat coûtent 15 centimes<br />

(Jean-François Copé). Chez nous, un avocat<br />

palpe 1000 € de l’heure (Armand de<br />

Decker), et la minute à poser son cul sur<br />

une chaise pèse quelques centaines d’euros<br />

(Publifin). Dans une société saine, on<br />

ne leur confierait même pas la comptabilité<br />

d’un club de belote. Alors pensez<br />

donc, des milliards d’argent public…<br />

Malheureusement, nos élus locaux ne<br />

sont souvent guère plus brillants. C’est<br />

à l’émergence d’une Jacqueline Galant,<br />

dont la bêtise suinte pourtant par tous les<br />

pores, qu’on mesure la gravité de la situation.<br />

Ce n’est pas Jurbise, mais la faune<br />

politique de ma commune recèle également<br />

des espèces dégénérées et nuisibles.<br />

Dans cette jungle impitoyable où règnent<br />

la triche, le mensonge et le fric facile, tous<br />

ne sont pas égaux devant la pratique du<br />

langage. On notera la faiblesse du vocabulaire,<br />

à l’exception du registre de l’insulte.<br />

Le peu de mots qu’ils connaissent alimentent<br />

les mantras néolibéraux ressassés<br />

machinalement en lieu et place d’une<br />

pensée propre, depuis longtemps éteinte.<br />

Il est étonnant (et dramatique) qu’ils<br />

parviennent à se reproduire tant leur<br />

sexisme exacerbé semble témoigner d’un<br />

rapport problématique à l’autre sexe. Le<br />

machisme n’y est cependant pas l’apanage<br />

de la gent masculine. Témoin cette<br />

mandataire s’enorgueillissant, devant<br />

ses collègues mâles, de la taille de ses<br />

seins ou de la qualité de ses fellations.<br />

Mais ce qui frappe par-dessus tout, c’est<br />

leur incapacité à réfréner leurs pulsions.<br />

Chaque prise de parole s’apparente à<br />

une éjaculation précoce de l’esprit. Les<br />

limites de la bienséance (mais pas seulement)<br />

leur sont totalement étrangères.<br />

C’est ainsi qu’une opposante politique<br />

peut être publiquement, dans une réjection<br />

incontrôlée de testostérone, agonie<br />

d’injures et de leçons de morale à deux<br />

balles. Moi, la morale, je m’en fous. Mais<br />

s’ils souhaitent en dispenser des cours,<br />

qu’ils s’occupent d’abord de la leur. Selon<br />

leurs critères, y a du boulot.<br />

Bref, mes amis, ne comptez plus sur<br />

eux. Ne les laissez pas instiller dans votre<br />

cerveau la haine de l’autre, la culpabilité<br />

de ne pas avoir de travail, la honte d’être<br />

différent. Ne comptez plus sur eux car<br />

ils sont déjà morts, ou en phase terminale<br />

d’un cancer de l’ego. La société est<br />

malade ? Peut-être. Mais pas de vous.<br />

1 « La médiocratie », Lux, 2015<br />

2 Frédéric Lordon à HEC Débats, Youtube

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