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CORPORATE / Entretien<br />
« Nous avons,<br />
nous les<br />
communicants,<br />
un rôle majeur à<br />
jouer pour aider<br />
les entreprises<br />
à définir leur<br />
raison d’être et<br />
à la faire vivre<br />
quotidiennement,<br />
dans tous<br />
leurs actes de<br />
communication<br />
et leurs moments<br />
d’interaction avec<br />
leurs publics. »<br />
matière de communication, et leur nécessaire imbrication<br />
avec les enjeux business. Le corporate est<br />
au cœur de tout puisqu’il finit par se confondre avec<br />
ce sujet de la raison d’être des entreprises. Et nous<br />
avons, nous les communicants, un rôle majeur à<br />
jouer pour aider les entreprises et les marques à définir<br />
leur raison d’être et à la faire vivre quotidiennement,<br />
dans tous leurs actes de communication et<br />
leurs moments d’interaction avec leurs publics et<br />
leurs consommateurs.<br />
La France connaît actuellement une période de protestation<br />
qui n’épargne ni les dirigeants politiques et économiques, ni<br />
les corps intermédiaires. Ce phénomène impacte-t-il les organisations<br />
? Doit-il être pris en compte dans leur communication<br />
corporate ?<br />
Par essence, la communication corporate se doit<br />
d’être en prise directe avec la société et ses mouvements.<br />
Or on est face à une crise de confiance majeure,<br />
et parfois à des crises ponctuelles qui ne ressemblent<br />
en rien à ce que certaines entreprises ou<br />
marques ont pu connaître par le passé. Face aux<br />
fake news, au primat de l’émotion et de l’immédiateté,<br />
porté en partie par les réseaux sociaux, la vérité<br />
et la rationalité n’ont plus nécessairement de prise<br />
sur le cours des choses. Alors oui, il faut transformer<br />
ses organisations et sa communication. Il faut savoir<br />
combiner horizontalité et verticalité : plus d’écoute et<br />
d’attention aux parties prenantes, dans une approche<br />
très horizontale et collaborative, mais aussi plus de<br />
vision et de projection vers l’avenir, pour redonner<br />
de la verticalité, du sens, et l’envie de croire en un<br />
futur meilleur.<br />
Pour une organisation qui est contestée, n’y a-t-il pas une tendance<br />
à vouloir se faire discret, à éviter une communication<br />
trop visible, trop événementielle ?<br />
À mon sens, face à la contestation, la question n’est<br />
pas tant de savoir s’il faut être discret ou visible : le<br />
vrai sujet aujourd’hui, c’est la capacité à rester en<br />
mouvement. Réagir argument contre argument est<br />
de plus en plus souvent insuffisant, regardez par<br />
exemple les mesures du gouvernement face au mouvement<br />
des Gilets jaunes et celles prises par Danone<br />
dans sa grave crise laitière au Maroc. Par ailleurs,<br />
taire une critique ou se cacher face à celle-ci finit toujours<br />
par vous être reproché.<br />
En revanche, le salut vient souvent de la capacité à se<br />
mettre en mouvement, à déplacer le débat, à embarquer<br />
les parties prenantes, en incluant ceux qui protestent,<br />
dans un dialogue, pour peu que celui-ci soit<br />
constructif. C’est là le vrai sujet. Et rendre ce mouvement<br />
visible, le communiquer fortement, y compris<br />
de façon événementielle, peut parfois vous aider<br />
à renverser la situation en votre faveur.<br />
Globalement, cette période impacte-t-elle le marché<br />
de la communication corporate ?<br />
J’aimerais croire qu’elle l’impacte de façon<br />
positive, oui ! Et je pense que c’est quand<br />
même le cas. Ce n’est pas évident de le mesurer<br />
en termes économiques, car le marché<br />
reste tendu et difficile. Mais il y a, tout de<br />
même, un vrai impact de considération quant<br />
au rôle des agences corporate face aux défis<br />
qui pèsent aujourd’hui sur les marques et les<br />
entreprises. La question de la raison d’être,<br />
la multiplication des parties prenantes et leur<br />
impact sur le business, tout cela concourt à<br />
remettre au cœur du jeu les éléments d’expression<br />
corporate des marques.<br />
Vous déplorez régulièrement la difficulté à faire reconnaître<br />
la création de valeur de la communication<br />
corporate. Constatez-vous une amélioration ?<br />
Non… Pas sur le plan de la reconnaissance<br />
économique en tout cas. Je veux dire par là<br />
que ce que les agences ont souvent dénoncé,<br />
à savoir la faible reconnaissance de la valeur<br />
créée, est en train de se vérifier sous nos<br />
yeux. Alors même que l’on va inscrire dans la<br />
loi, et donc rendre central et stratégique, un<br />
élément pour lequel les agences, et en particulier<br />
corporate, travaillent et militent depuis<br />
des années, on a toujours la même difficulté<br />
à se faire rémunérer à la hauteur des enjeux.<br />
C’est quand même dingue de trouver normal<br />
de payer très cher un avocat ou un banquier<br />
d’affaires sur un deal stratégique pour sa société,<br />
et de refuser d’appliquer le même raisonnement<br />
à ce qui permet de bâtir un positionnement<br />
et une réputation qui seront décisifs pour<br />
la réussite à long terme de l’entreprise. Les<br />
agences doivent en permanence justifier leurs<br />
taux journaliers, se battre pour maintenir des<br />
honoraires de conseil, éviter d’être cantonnées<br />
à des livrables opérationnels. On crée de la valeur<br />
symbolique, stratégique, relationnelle et<br />
business. Il faut qu’elle puisse être rémunérée<br />
à sa juste valeur. À cet égard, la création<br />
par l’AACC d’une grande journée économique<br />
sous l’égide de Bercy et de la filière communication,<br />
dont la deuxième édition se déroulera<br />
début juillet en présence de Bruno Le Maire,<br />
me semble être un signal très positif en faveur<br />
d’une réelle considération de la valeur créée<br />
par les agences avec leurs clients. ◊<br />
STRATEGIES - GUIDE CORPORATE<br />
8 2020