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POJAR 2 magazine

Le numéro 2 de la revue Pojar publié par les éditions Minces.

Le numéro 2 de la revue Pojar publié par les éditions Minces.

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POJAR 2

ПОЖАР


Janvier 2021 Paris, ISSN 2742-2658

les artistes et poètes conservent l’intégralité des droits de leurs

œuvres

revuepojar@gmail.com

site: https://sites.google.com/view/revuepojar/accueil


Rédaction

Jean Lacave

Sophie Aron

Irina Kaplin

Jos Volpe

Sébastien de Monbrison

Atefeh Jadidi

Julien Columeau

Direction Ivan de Monbrison

Sacha Jarachewski photographe


Éditions Minces

déjà parus :

C’est une question d’étranglement

Sébastien de Monbrison

Les épaves de sel

Caresse de l’ombre

Sandrine Davin

Pojar 1

The Paratically Obscure As Beauty Crescendo

Colin James

Léda

Ioan Konker


Sommaire

Vice

Maïakovski (1893-1930) L’homme-chose (traduction inédite) 1917

Yvan Goll (1891-1950) Les amants de le solitude

Le Cultivateur

Crucifixion

[Sans titre]

Arseni Tarkovski (1907-1989) Premier amour (du film Le Miroir d’Andreï)

Antonin Artaud (1896-1948) La nuit opérée

Arseni Tarkovski (1907-1989) Jour blanc

Dylan Thomas (1914-1953)

Versa

Irina Kaplin

Jacques Cauda

Dossier Sacha Jarachewski

Sébastien de Monbrison

Sophie Aron


Eisenstein Ivan 1948

Иван Грозный 1948 Эйзенштейн


VICE


Поэма « Человек. Вещь»

Отрывок

Маяковский в небе

Стоп!

Скидываю на тучу вещей

И тела усталого кладь.

Благоприятны места,

в которых доселе не был

Оглядываюсь.

Эта вот

зализанная гладь - это и есть хваленое небо?

Посмотрим,

посмотрим

Искрило,

Сверкало,

Блестело,

и

шорох шёл -

облако

или

бестелые

тихо скользнули.

« Если красавица в любви клянётся... .!».

Здесь

на небесной тверди

Слушать музыку Верди?

В облаке скважина.

Заглядываю -

ангелы поют.

Важно живут ангелы.

Важно.


Poème « L’Homme-Chose » extrait

Maïakovsky et le Ciel

Stop !

Je jette un tas de choses

comme des corps fatigués.

Des endroits merveilleux, où je n’ai jamais été.

Tout autour je les vois

ainsi.

Cette surface lisse, est-ce le ciel?

On verra, on verra.

Étincelles,

brillantes,

luisantes,

et

un bruit léger,

un nuage

ou

évanescents

glissent doucement.

« Souvent femme varie….»

Ici,

sur le ciel devenu terre-plein

Entendre la musique de Verdi

par le judas terrestre d’un nuage

je vois en bas

les anges chanter

Fiers sont-ils les anges

Fiers.


Один отделился

и так любезно

дремотную немого расторг:

« Ну как вам,

Владимир Владимирович,

нравиться бездна!»

И я отвечаю так же любезно:

« Прелестная бездна.

Бездна - восторг !»


L’un se détache du lot

Et rompt lentement le

silence en disant

« Vladimir Vladimirovich

aimes-tu le’Infini?»

Et je luii réponds poliment

« Charmant l’Infini

l’Infini est délicieux !»

Traduction POJAR tous droits réservés


Les amants de la solitude

Combien dans les chambres nocturnes

Écartent de leurs mains fragiles

Les draps de plomb

L’œil de la pendule est aveugle

La solitude

S’est pendue à l’espagnolette

Et le volet

Bat comme l’aile d’un ange blessé

Ceux qui ne dorment pas attendent

Ils attendent le vent

Ils attendent la fin du monde

Ah voici l’aube aux couleurs de framboise:

La vie reprend le goût âcre du sang

Yvan Goll


Le cultivateur

J’ai planté des comètes

Et semé la graine d’étoiles

Dans les champs vierges

.

J’ai bâti ma maison d’aérolithes

Et regardé par la lucarne

Tourner le monde autour de moi

.

J’ai bu le vin tonique de midi

Et rôti sur les branches du bouleau

Les fines alouettes

Assaisonnées aux cœurs d’œillets

Les prairies rendaient l’âme

Les pivoines pâmées éparpillaient leur sang

La rose des vents s’effeuillait

Les truites roses captivées se suicidaient

.

J’ai longtemps attendu le plus grand jour

Où la moisson des astres

M’élèverait au rang des dieux

.

Mais déjà durcissent mes mains

Mes yeux se vident

Mes dents pourrissent

La terre tourne en moulant sa poussière

Yvan Goll


Crucifixion

L’automne a des mains jaunies

L’automne a des souliers rouges pour monter vers la croix

Et n’a pas un ami dans sa forêt d’ossements

On entend le tam-tam des pommes qui tombent

On entend le tambour des noix qui tombent

Pour la danse des morts

Seule une ultime poire de la méditation

Pend encore dans l’espace, amante,

Et brûle le phosphore de nos anges doubles.

Yvan Goll


Mon corps ma Tombe

Où sèchent des oiseaux avant leur chute

Où tout le sang répandu par un coq

Ne fait point une aurore

Mon Corps mon Mur

Qui me sépare des eaux savantes

Il se passe d’étranges métamorphoses

En moi sans moi

Yvan Goll


Первые свиданья

Свиданий наших каждое мгновенье

Мы праздновали, как богоявленье,

Одни на целом свете.

Ты была

Смелей и легче птичьего крыла,

По лестнице, как головокруженье,

Через ступень сбегала и вела

Сквозь влажную сирень в свои владенья

С той стороны зеркального стекла.

Когда настала ночь,

была мне милость

Дарована,

алтарные врата

Отворены,

и в темноте светилась

И медленно клонилась нагота,

И, просыпаясь: " Будь благословенна!" —

Я говорил и знал,

что дерзновенно

Мое благословенье: ты спала,

И тронуть веки синевой вселенной

К тебе сирень тянулась со стола,

И синевою тронутые веки

Спокойны были, и рука тепла.

А в хрустале пульсировали реки,

Дымились горы, брезжили моря,

И ты держала сферу на ладони

Хрустальную, и ты спала на троне,

И — Боже правый! — ты была моя.

Ты пробудилась и преобразила

Вседневный человеческий словарь,

И речь по горло полнозвучной силой

Наполнилась,

и слово ты раскрыло

Свой новый смысл и означало: царь.


Premiers amours

Nos rendez-vous de tous les instants

Nous avons célébré comme l'Epiphanie,

Seuls au monde. Vous étiez

Plus audacieuse et plus légère que l'aile d'un oiseau,

Dans les escaliers, comme un vertige,

Elle a descendu une marche et a ouvert la voie

A travers le lilas humide vers votre domaine

De l'autre côté du miroir.

Quand la nuit est venue, la pitié

me vint, la porte de l'autel

était ouverte, et la lumière brillait dans l'obscurité.

Et votre corps nu s'allongeait lentement,

Et, en se réveillant : "Soyez bénis !" —

J'ai parlé et j'ai su que ma bénédiction était audacieuse : vous dormiez,

Et toucher les paupières de l'univers bleu

Le lilas allaient vers vous sur la table,

Et les paupières bleues

étaient calmes et la main était chaude.

Et les rivières pulsaient dans le cristal,

Des montagnes fumantes, la lueur de la mer,

Tu tenais la sphère de cristal dans la paume de ta main,

et tu t'es couché sur le trône,

Et Oh, mon Dieu ! "Tu étais à moi.

Tu t'es réveillée et tu as transformée

Dictionnaire humain quotidien,

Et la parole monte à la gorge et la remplie

entièrement, et la parole que vous avez révélée

a voulu dire également : roi.


На свете все преобразилось,

даже

Простые вещи — таз кувшин, - когда

Стояла между нами, как на страже,

Слоистая и твердая вода.

Нас повело неведомо куда.

Пред нами расступались, как миражи,

Построенные чудом города,

Сама ложилась мята нам под ноги,

И птицам с нами было по дороге,

И рыбы подымались по реке,

И небо развернулось пред глазами...

Когда судьба по следу шла за нами,

Как сумасшедший с бритвою в руке.

1962

Арсений Тарковский


Tout dans le monde changea et ce jusqu’aux objets

les plus simples – cruche, bassine quand

se leva comme un garde entre nous

une eau dure et solide.

Nous sommes allés Dieu sait où.

Des villes surgies comme par miracle,

se sont évanouies devant nous comme des mirages.

La menthe elle-même se trouvait sous nos pieds,

Et les oiseaux étaient en route avec nous,

Et les poissons ont remonté la rivière,

Et le ciel s'est déployé devant mes yeux...

Quand le destin à nos trousses,

tenait tel un dément un rasoir à la main.

1962

Arsène Tarkowski

traduction Pojar


Sacha Jarachewski photographe


La nuit opérée

Dans les outres de draps gonflés

où la nuit entière respire,

le poète sent ses cheveux

grandir et se multiplier.

Sur tous les comptoirs de la terre

montent des verres déracinés,

le poète sent sa pensée

et son sexe l’abandonner.

Car ici la vie est en cause

et le ventre de la pensée;

les bouteilles heurtent les crânes

de l’aérienne assemblée.

Le Verbe pousse du sommeil

comme une fleur ou comme un verre

plein de formes et de fumées.

Le verre et le ventre se heurtent,

la vie est claire

dans les crânes vitrifiés.


L’aréopage ardent des poètes

s’assemble autour du tapis vert

le vide tourne.

La vie traverse la pensée

du poète aux cheveux épais.

Dans la rue rien qu’une fenêtre,

les cartes battent;

dans la fenêtre la femme au sexe

met son ventre en délibéré.

Antonin Artaud


Sacha Jarachewski tous droits réservés


Белый день

Камень лежит у жасмина.

Под этим камнем клад.

Отец стоит на дорожке.

Белый- белый день.

В цвету серебристый тополь,

Центифолия, а за ней —

Вьющиеся розы,

Молочная трава.

Никогда я не был

Счастливей, чем тогда.

Никогда я не был

Счастливей, чем тогда.

Вернуться туда невозможно

И рассказать нельзя,

Как был переполнен блаженством

Этот райский сад.

1942

Арсений Тарковский


Jour blanc

La pierre repose près du jasmin.

Il y a un trésor sous cette pierre.

Mon père est dans le chemin.

Jour blanc-blanc.

En fleur, un peuplier argenté,

un cent-feuilles, suivi de

de roses frisées,

et de l’herbe laiteuse.

Je n'ai jamais été aussi

heureux qu'alors.

Je n'ai jamais été aussi

heureux qu'alors.

Il est impossible d'y revenir

Et il est impossible de dire,

à quel point

ce jardin célèste fut rempli de bonheur .

1942

Arseni Tarkovski


Being but men, we walked into the trees

Afraid, letting our syllables be soft

For fear of waking the rooks,

For fear of coming

Noiselessly into a world of wings and cries.

If we were children we might climb,

Catch the rooks sleeping, and break no twig,

And, after the soft ascent,

Thrust out our heads above the branches

To wonder at the unfailing stars.

Out of confusion, as the way is,

And the wonder, that man knows,

Out of the chaos would come bliss.

That, then, is loveliness, we said,

Children in wonder watching the stars,

Is the aim and the end.

Being but men, we walked into the trees.

Dylan Thomas


N’étant que des adultes nous nous sommes promenés les arbres

Apeurés, la voix étouffée

Par peur de réveiller les coqs,

Par crainte de s’introduire

Timidement dans un monde faits de cris et de plumes.

Si nous étions encore des enfants nous grimperions,

Pour attraper les coqs endormis, sans briser de branchage,

et après l’ascension légère,

pour faire jaillir nos têtes au dessus des branches

et nous émerveiller devant les étoiles infaillibles.

Après le tumulte, tel le chemin,

de l’émerveillement, propre à l’homme,

Du chaos, serait descendu cette bénédiction.

C’est à dire le ravissement, ainsi dit,

D’enfants émerveillés découvrant les étoiles,

Est bel et bien le but ultime.

N’étant que des adultes, nous nous sommes promenés sous les arbres.

Dylant Thomas

Traduction Pojar


Sacha Jarachewski photographe


VERSA


соль из твоих глаз

застыла на

щеках и на щетине

везде

волос стал серым как сталъ

ты не тот

ты не тот

ирина каплин


sel de vos yeux

gelé

joues et poils

partout

les cheveux sont devenus gris comme de l’acier

tu n'es pas le seul

tu n'es pas le seul

Irina Kaplin

traduction Pojar


Jacques Cauda


Jacques Cauda


sapiences russes

сон

тишина

без тебя

я умру

sommeil

silence

sans toi

je meurs


вот так

за дверью

синий мир

с закрытыми глазами

я слышу только ветер

в мыслях твоих

voilà

dehors

le monde bleu

les yeux fermés

je n’entends que le vent

dans tes pensées


завтра я буду танцевать в тени леса

и я увижу птиц с человеческими головами

они будут петь нечеловеским голосом

я буду мёртв

но

я слышу

язык животных ещё

но это не я

demain j’irai danser à l’ombre de la forêt

et je verrai des oiseaux à têtes humaines

ils chanteront d’une voix inhumaine

je serai mort

mais j’entends

une voix animale pourtant

mais ce n’est pas moi

traductions Pojar


Chaim Soutine et Paulette Jourdain vers 1927


Dossier Sacha Jarachewski

досье Саша Ярачевский


SACHA JARACHEWSKI est un photographe ukrainien d’origine juive

né à Odessa en 1941 à l’époque URSS. Très pauvre, presque analphabète, il n’a

découvert la photographie qu’après sa retraite il y a une vingtaine d’année,

c’est au cours d’un extraordinaire périple que la journaliste IRINA KAPLIN fit

sa rencontre et décida de faire découvrir son travail d’abord à Moscou puis

en France.

Саша Ярачевский - украинский фотограф еврейского

происхождения.

Родился в Одессе в 1941 году в эпоху СССР , в очень бедной

семье , которая смогла дать ему хорошего образования .

Саша открыл для себя фотографию только после того,

как

вышел на пенсию , около 20 лет назад .

Это случилось было во время необычного путешествия,

которое он совершил вместе с журналисткой Ириной

Каплин.

,

Саша решил показать свои работы сначала в Москве а затем

в во Франции.


Sacha Jarachewski tous droits réservés


Sacha Jarachewski tous droits réservés


Sacha Jarachewski tous droits réservés


C’était un drôle de rêve vraiment

celui d’une autre époque

à ma table des carcasses vides

l’amour était inéluctablement amer

et la violence …

les feuilles: des failles accouchant des crinières

les vagins étaient dentés

rêvant plus loin

plus loin l’exaltation des corps

dégoûtés d’eux mêmes

oubliaient qu’ils allaient mourir bientôt

Buvant la trahison dans un rire

les douloureuses

cachaient leur visage

et les diables muets se masquaient de honte

croupissant sous les parfums,

pantins balafrés sans fond

préférant le réel terne et mouillé

à la totalité du monde

pas même le courage des regrets

J’avançais les mains creuses, les yeux tendres

j’ouvrais les bouches des soleils noirs

aux trompeuses lèvres

Sébastien de Monbrison

Extrait de « C’est une affaire d’étranglement »

publié aux éditions Minces


C’est une affaire d’étranglement

celle d’un souffle qui meurt

répétitive, étrange évidemment

et quelque chose se glisse derrière moi

c’est un mensonge ou un souvenir

qui est venu chanter

le regard du fauve s’est arrêté sur moi

ça y est je suis perdu

Sébastien de Monbrison

Extrait de « C’est une affaire d’étranglement »

publié aux éditions Minces


«Le masque est vivant» Sophie Aron tous droits réservés


copyright Éditions Minces 2020


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