Comment s'articulent en Allemagne formation universitaire et ... - IUFM

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F. DELPY 2. Les lieux de formation Les récentes évolutions de l’architecture et des contenus de la formation des enseignants allemands dans le contexte européen font apparaître un renforcement effectif ou programmatique de l’universitarisation : projet d’un possible report de la professionnalisation en vue d’une meilleure employabilité, référentiel de compétences impliquant certes une professionnalisation dès le début de la phase universitaire de la formation mais une professionnalisation universitarisée, émergence d’un domaine de recherche incluant dans son objet complexe la formation des enseignants. Un examen des lieux de formation des enseignants en Allemagne, de leur évolution surtout, permet de voir comment l’université s’adapte aux évolutions décrites. 124 2.1. L’intégration des PH aux universités À partir des années 70, les « Pädagogische Hochschulen » (mot à mot : « hautes écoles pédagogiques ») où étaient formés les professeurs de l’enseignement primaire et secondaire, furent peu à peu intégrées aux universités ou transformées en universités. Ce processus d’intégration ou de transformation a duré une vingtaine d’années. Seul le Bade-Wurtemberg a conservé ses « Pädagogische Hochschulen ». Voici ce qu’écrit l’actuel ministre des sciences, de la recherche et des arts dans son introduction à la présentation en ligne des six « Pädagogische Hochschulen » du Land : « Contrairement aux autres Länder, le Bade-Wurtemberg dispose pour la formation des professeurs d’un type propre d’établissement supérieur : les hautes écoles pédagogiques. La formation des futurs professeurs (...) s’y déroule de façon concentrée et à un niveau scientifique élevé. Parce qu’elles dispensent une formation de qualité et proche de la pratique les hautes écoles pédagogiques du Land (...) jouissent d’une très bonne réputation. Leur force repose sur un profil de formation clair. Sciences de l’éducation, formations disciplinaires, didactique des disciplines et stages pratiques y sont plus étroitement liés que dans tout autre type d’établissement supérieur ». Cette défense du système bade-wurtembergeois constitue le négatif des critiques adressées à la formation des enseignants à l’université : – un problème structurel se pose : la dispersion de la formation des professeurs dans différentes facultés (correspondant aux différentes disciplines). Et bien que de nombreuses facultés doivent leur maintien à la présence des étudiants-professeurs, ces derniers se voient rarement proposer des enseignements prenant en compte leur spécificité : aucune différenciation au niveau des contenus disciplinaires, les stages pratiques restent isolés du reste de la formation. − Le problème se retrouve au niveau administratif : les différentes instances universitaires considèrent la formation des enseignants comme un pensum supplémentaire et les composantes relevant des sciences de l'éducation et de la didactique des disciplines sont soumises à l' arbitraire le plus total. − Cette situation a bien sûr des retombées au niveau des attitudes et représentations : les étudiants-professeurs, et particulièrement ceux qui se destinent à enseigner en lycée, ont tendance à considérer avec un certain mépris tout ce qui relève de la didactique et des sciences de l'éducation ; les étudiants-professeurs qui se destinent à l'enseignement primaire ou aux premières classes du secondaire et qui ont moins de temps à consacrer à IUFM Nord-Pas de Calais
leur formation disciplinaire ont souvent une image négative d'eux-mêmes, allant jusqu'à se considérer comme des étudiants-professeurs de seconde classe. − Nous avons mentionné que les stages pratiques restaient isolés du reste de la formation. Cette critique ne vaut pas seulement pour la phase universitaire, elle concerne aussi le rapport entre la première et la deuxième phase de la formation : les contenus de chaque phase sont très peu liés à ceux de l'autre d'où la trop fréquente absence de processus d'apprentissage cumulatif. La rupture qui sépare les deux phases de la formation génère couramment un choc au moment de la prise en main de classes (« Praxisschock ») et un abandon rapide des gestes pédagogiques acquis précédemment au profit d'une appropriation de la culture scolaire ambiante. 2.2. Les Centres de formation des professeurs La formation continue des formateurs de la deuxième phase à l’université est certainement une façon prometteuse de jeter un pont entre le monde de l’université et celui des établissements scolaires, entre la première et la deuxième phase de la formation des enseignants. La création, surtout depuis 2004-2005 6 , dans un nombre croissant d’universités, de « Zentren für Lehrerbildung » (« Centres pour la formation des professeurs ») va aussi dans le sens d’une plus grande cohérence de la formation des enseignants : destinés à surmonter la dispersion des étudiants-professeurs, avec tous les problèmes que cela entraîne, ces centres sont notamment chargés d’assurer la coordination entre les différentes UFR ainsi qu’entre les enseignements dispensés à l’université et les stages pratiques. En conclusion Comment s’articulent en Allemagne formation universitaire et formation professionnelle des enseignants La formation des professeurs ne semble pas être actuellement au centre des débats en Allemagne ; les apprentissages des élèves (après les résultats obtenus aux études PISA), la généralisation de l’école toute la journée et la scolarisation dès l’âge de 5 ans mobilisent bien davantage l’opinion publique et donc les responsables politiques. Et lorsque la formation des professeurs allemands est évoquée, ce sont avant tout les disparités d’un Land à l’autre qui sont fustigées. Néanmoins un discours officiel ou autorisé, prescriptif, critique ou programmatique existe en Allemagne sur la formation des enseignants et il fait clairement apparaître les deux pôles retenus pour structurer ce 6ème Colloque des IUFM : celui de la formation scientifique et de la recherche, et celui de la formation professionnelle. Les évolutions de la formation des enseignants allemands (même si elles ne sont pas toutes au départ motivées par la tension qui existe entre ces deux pôles) aboutissent finalement à un renforcement du premier axe, renforcement évident lorsque l’on s’attache à l’évolution des lieux de formation : intégration des hautes écoles pédagogiques dans les universités puis création, au sein des universités, de Centres de formation des professeurs. La récente élaboration par la KMK d’un référentiel de compétences et standards, la nécessité pour les établissements d’enseignement supérieur de l’intégrer dans leur plan de formation des enseignants et d’obtenir une accréditation, l’émergence d’un nouveau domaine de recherche, les sciences de la formation, illustrent de façon plus fine l’évolution : une imbrication plus étroite et plus en amont de l’universitarisation et de la professionnalisation, une universitarisation 6 Les premiers centres furent créés en 1996 en Rhénanie-Westphalie. IUFM Nord-Pas de Calais 125
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