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HoRS LeS MuRS - Le 19 CRAC

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<strong>Le</strong>s Cahiers 2012 - n°3<br />

Au-delà du<br />

tab<strong>Le</strong>au<br />

John M. aRM<strong>Le</strong>DeR<br />

Cécile baRt<br />

Juan Jose CaMbRe<br />

Philippe DeCRauZat<br />

Dominique DeHaIS<br />

Beto De VOLDeR<br />

Lucio DORR<br />

Susanna FRItSCHeR<br />

Didier MeNCObONI<br />

Antoine PeRROt<br />

Pascal PINauD<br />

Andrés SObRINO<br />

tILMaN<br />

Véronique VeRStRaete<br />

<strong>Le</strong> <strong>19</strong>, Crac<br />

15 sept. > 30 déc. 2012


Parti PRIS<br />

14,8 x 10,5 Cm - 20 pAgEs - 5 Euros<br />

tExtE : otto tEiChErt<br />

Rémi uCHéDa<br />

17 x 24 Cm - 64 pAgEs - 15 Euros<br />

tExtEs : rAphAël BrunEl, CélinE piEttrE,<br />

guillAumE mAnsArt<br />

CoéDition : lE vog, lE <strong>19</strong>, CrAC<br />

Gasiorowski - peinture - fiction<br />

éric SuCHèRe<br />

14,5 x 21 Cm - 216 pAgEs - 22 Euros<br />

tExtE : Eric suChèrE<br />

CoéDition : FrAC AuvErgnE, lE <strong>19</strong>, CrAC<br />

a PaRaîtRe<br />

Diana QuinBy<br />

PubLICatIONS<br />

Autour des expositions<br />

• <strong>Le</strong>vée de rideau, rencontre d’artistes<br />

<strong>Le</strong>s artistes présents à l’exposition évoquent leurs<br />

démarches artistiques avec la participation de Philippe<br />

CyrouLnik, commissaire de l’exposition. rDV au <strong>19</strong>.<br />

> Vendredi 14 septembre à 14h, entrée libre.<br />

• <strong><strong>Le</strong>S</strong> JournéeS européenneS du patrimoine,<br />

“La face cachée d’une exposition”<br />

Visite commentée et retour en image sur le montage<br />

de “Au-delà du tableau”. Entrée libre.<br />

> Samedi 15 et dimanche 16 septembre à 15h30, RDV<br />

au <strong>19</strong>, entrée libre.<br />

• CLub SandwiCh vidéoS<br />

une programmation de vidéos d’artistes à l’heure du<br />

déjeuner, le dernier mardi du mois. Pensez à réserver<br />

vos sandwichs par mail (agoetz@wnadoo.fr) ou par<br />

tel : 03 81 94 43 58.<br />

> <strong>Le</strong>s mardis 25 septembre, 27 novembre - 12h30-<br />

13h30, entrée libre - Sandwich : 2 euros.<br />

• <strong>Le</strong> rdv deS profS et deS animateurS<br />

Spécial enseignants, animateurs et responsables asso-<br />

ciatifs. Découverte de l’exposition avec l’équipe du<br />

service des publics. Ce rDV est suivi d’une lecture<br />

à 18h.<br />

> Mardi 2 octobre à 17h30, entrée libre.<br />

• éCLairaGe#1<br />

“Objet non identifiable” - <strong>Le</strong>cture<br />

À travers une sélection de textes sera évoqué le<br />

mélange des genres qui amène les artistes actuels<br />

à aller au-delà des découpages traditionnels. Cette<br />

lecture prendra la forme d’une “conversation” entre<br />

Philippe CyrouLnik et Sylvie DAVAL.<br />

> Mardi 2 octobre à 18h, entrée libre.<br />

• éCLairaGe#2 : Conférence de Pierre Wat<br />

“Extension du domaine de la peinture”<br />

Pierre WAt est historien de l’art, critique, commissaire<br />

d’exposition et professeur d’histoire de l’art contemporain<br />

à Paris i.<br />

> Jeudi 18 octobre à 18h30, entrée libre.<br />

• La noCturne du <strong>19</strong><br />

Performance de Claire SerreS<br />

A l’occasion de la nocturne étudiante du Pays de<br />

VISIteS au <strong>19</strong><br />

<strong><strong>Le</strong>S</strong> aCtIVItéS Du SeRVICe DeS PubLICS<br />

• Visites des expositions<br />

au <strong>19</strong> à 15h30, entrée libre<br />

> Sam. 15, dim. 16 et mercredi <strong>19</strong> SePt.<br />

Dimanche 21, mercredi 17 et 31 oCt.<br />

Dimanche 11 et mercredi 7 noV.<br />

Dimanche 16 et mercredi <strong>19</strong> DéC.<br />

• <strong>Le</strong>s matinées jeunes pubLics<br />

Visites/ateliers pour les enfants 4-12 ans<br />

Au <strong>19</strong>, les mercredis de 10h à 12h<br />

> <strong>19</strong> SePt, 17 et 31 oCt, 7 noV, <strong>19</strong> DéC.<br />

Ces visites et ateliers sont proposés à tous les<br />

enfants qui souhaitent exercer leur regard et<br />

s’initier à une pratique – Entrée libre.<br />

• <strong>Le</strong>s Visites de groupes (enfants et aduLtes)<br />

Visites àNeZ et ateliers MaIN-a-La-Pate<br />

Des rencontres découvertes au plus proche des<br />

œuvres d’arts. Adaptées à tous publics sur<br />

réservation – Entrée libre.<br />

NeZ<br />

Pour toutes demandes de renseignements, réservations<br />

ou pour préparer une visite, n’hésitez pas à<br />

contacter Jean-Marie Boizeau au 03 81 94 43 58 ou<br />

jmboizeau@orange.fr<br />

Montbéliard, le Centre d’art ouvre ses portes toute la<br />

soirée. Performance de Claire SErrES vers 21h45. Elle<br />

proposera un de ses Dispositifs de résonnance.<br />

Mise en scène de mise en abîmes, constructions<br />

d’espace virtuels, ses performances sont des machines<br />

boiteuses, des histoires sans chute, des fruits déguisés.<br />

> Jeudi 25 octobre jusqu’à 23h.<br />

• LivreS en StoCk !<br />

Grande braderie d’art à l’approche des fêtes de Noël<br />

<strong>Le</strong> <strong>19</strong> vous propose dans son hall, à des prix très intéressants,<br />

une sélection de livres d’art.<br />

> Du vendredi 23 novembre au 23 décembre.<br />

• éCLairaGe#3 : Conférence de Cédric Loire<br />

Cédric LoirE est docteur en histoire de l’art, critique,<br />

commissaire d’exposition et enseignant à l’école supérieur<br />

d’art de Clermont Métropole.<br />

> Mardi 11 décembre à 18h30, entrée libre.


Au-delà du<br />

tab<strong>Le</strong>au<br />

15 sept. > 30 déc. 2012<br />

une partie importante des artistes<br />

actuels aborde la peinture sans en passer<br />

uniquement par les matériaux et<br />

techniques liés à celle-ci. Ainsi certains<br />

rejouent les questions propres à la peinture<br />

(couleur, grille, rythme, lumière,<br />

composition) à partir de l’objet ou de<br />

matériaux industriels. ils font dévier la<br />

peinture vers le volume, emploient le<br />

son, l’image multimédia ou encore la<br />

dématérialisent voire l’intègrent à l’environnement<br />

urbain. ils la travaillent au sol<br />

comme dans l’espace. En quelque sorte,<br />

ces artistes ont largué les toiles ou les<br />

pinceaux en abandonnant la convention<br />

du tableau pour conquérir une liberté<br />

plus grande, tant en ce qui concerne les<br />

supports, les matériaux que les outils de<br />

l’oeuvre. ils renouvellent cette extension<br />

du domaine de la peinture hors<br />

de son champ à tel point que c’est en<br />

l’abandonnant au profit de l’espace et de<br />

l’architecture qui la perpétuent comme<br />

l’avaient fait les constructivistes, les néoplasticiens<br />

en leur temps ; mais avec le<br />

moyen propre à l’ère du numérique, des<br />

matériaux composites et de l’imbrication<br />

entre le fonctionnel et l’ornemental<br />

dans la société du décor et de l’objet qui<br />

est la nôtre.<br />

l’œuvre de John m. aRMe<strong>Le</strong>DeR dialogue<br />

avec l’histoire de genres et des<br />

avant-gardes. Elle mobilise les potentialités<br />

linéaires et chromatiques du néon.<br />

Cécile baRt, avec en particulier ses peintures/écrans,<br />

ses fils et ses projections,<br />

conçoit des propositions plastiques qui<br />

abolissent la division entre le recto et le<br />

verso et inscrivent couleur et forme dans<br />

l’espace en jouant de la lumière et de la<br />

transparence.<br />

Juan Jose CaMbRe est passé de l’image<br />

peinte à sa trame, de la trame à sa décomposition<br />

en points puis du point au<br />

monochrome. il réalise aussi des films<br />

utilisant les incidences de la lumière sur<br />

le réel pour produire des effets à caractère<br />

abstrait en jouant du mouvement<br />

pour perturber la structure et la composition<br />

de l’image.<br />

philippe DeCRauZat évide le tableau<br />

n’en gardant que le cadre travaillé<br />

comme un motif décoratif qui n’est pas<br />

sans évoquer un ornemental industriel.<br />

Dominique DeHaIS construit des<br />

œuvres qui campent entre sculpture,<br />

design et peinture. il interroge les liens<br />

entre l’art et son contexte socio-politique.<br />

Beto De VOLDeR compose sur le mur<br />

des arabesques géométriques avec des<br />

pastilles auto-collantes qui ont un fort<br />

impact cinétique.<br />

lucio DORR utilise des impressions textiles<br />

industrielles qu’il suspend en jouant<br />

de leur graphisme et de leur motif illustrant<br />

une suite de réseaux urbains.<br />

susanna FRItSCHeR évoque la couleur à<br />

travers le son et l’espace.<br />

Didier MeNCObONI, avec ses mobiles,<br />

s’appuie sur la lumière et la couleur pour<br />

déployer les mouvements de ce qui est à<br />

la fois objet et surface, découpe et plan<br />

dans l’espace.<br />

Antoine PeRROt a fait le choix d’un<br />

usage exclusif de matériaux industriels<br />

pour interroger les relations entre forme<br />

et couleur.<br />

pascal PINauD fait partie de ces artistes<br />

qui font appel à l’artisanat, au design et à<br />

la production industrielle pour éprouver<br />

leurs potentialités picturales.<br />

Andrés SObRINO utilise de façon quasi-systématique<br />

de l’adhésif de couleur<br />

pour créer objets ou dispositifs picturaux.<br />

tILMaN pratique la peinture à travers<br />

le volume et la couleur, il lui donne<br />

une architecture et l’espace de son bâti.<br />

véronique VeRStRaete interroge valeur<br />

esthétique et valeur d’usage dans des<br />

réalisations qui campent entre peinture,<br />

sculpture et mobilier.


Sans titre, <strong>19</strong>93, installation au sol, tubes fluorescents, dimensions variables, CnAp, photographie : Jean Brasille<br />

John M. aRM<strong>Le</strong>DeR<br />

né en <strong>19</strong>48, vit et travaille à genève, suisse<br />

le cœur du travail de John M. aRM<strong>Le</strong>DeR se trouve dans l’interrogation<br />

constante qu’il met en forme sur ce qui spécifie ou au contraire<br />

entache l’identité de l’œuvre d’art. les références à l’histoire de la modernité<br />

picturale sont évidentes et particulièrement aux avant-gardes<br />

historiques européennes (Constructivisme style rodtchenko ou suprématisme<br />

comme malevitch) mais aussi les américains de l’open Field<br />

painting comme Jules olitski ou de l’Art minimal comme Dan Flavin. il<br />

y a une dimension citationnelle très forte chez l’artiste, mais à l’égard<br />

des traditions d’avant-garde de l’avant-garde il opère un travail qui relève<br />

à la fois de la réplique et du détournement. il vient interroger les<br />

statuts de l’œuvre et de son créateur. il déstabilise fortement l’idéal<br />

« héroïque » de la tradition moderniste. on voit les citations mais cela<br />

devient « autre chose ». il procède en deux temps : dans un premier,<br />

tel le personnage du film Puce Moment réalisé dans les années 60 par<br />

Kenneth Anger qui devenait le personnage<br />

de chacune des robes qu’il revêtait,<br />

Armleder s’approprie une forme ou une<br />

problématique artistique très connue et<br />

accepte de jouer le rôle du copiste ou plutôt<br />

de l’épigone. mais il ne s’arrête pas là.<br />

il commence par une variation puis opère<br />

un double de déplacement : en exacerbant<br />

la copie, en l’altérant et en la confrontant,<br />

sur le mode ironique propre à certains<br />

artistes de Fluxus, à un univers qui lui est<br />

totalement antinomique. il le fait basculer<br />

vers le grotesque ou le kitsch. mélangeant<br />

délibérément art élitiste et arts populaires,<br />

il procède à un collage visuel. une toile de<br />

Kazimir malevitch est réinterprétée et associée<br />

à des mobiliers bas de gamme pour<br />

devenir un élément de décor qui relève à<br />

la fois de l’Art-déco, d’une vitrine de grand<br />

magasin et de l’art, parce que du coup,<br />

même l’objet usuel est tendanciellement<br />

arraché à sa valeur d’usage et réapproprié<br />

comme forme. un certain nombre de ses<br />

installations s’intitulent d’ailleurs Furniture–sculpture<br />

(meuble/sculpture). il avait<br />

procédé de même dans une exposition à<br />

la galerie perrotin où le mur devenait une<br />

sorte de wall-painting monochrome matiériste du plus kitsch mais qui<br />

campait dans une ambiguïté visuelle entre mur peint et cimaise, et sur<br />

lequel étaient fixés des papiers peints au style expressionniste abstrait<br />

mais aux formes et aux giclées d’un lyrisme aux tons pastels.<br />

l’installation sans titre (<strong>19</strong>93) est constituée de néons blancs et d’un<br />

néon jaune. la référence aux structures en néons de Dan Flavin qui<br />

revendiquait une rationalité, une rigueur extrême et une métaphysique<br />

de l’œuvre est évidente. mais chez Armleder, les néons sont disposés<br />

au sol dans un désordre qui suggère du matériel d’éclairage en<br />

cours d’installation et renvoient plus à l’aménagement d’intérieur qu’à<br />

l’icone. le dispositif évoque une situation de chaos organisé au regard<br />

de l’épure de pièces de Flavin. mais le fait qu’Armleder y ait introduit<br />

ce néon jaune vient introduire une dimension artistique suggérant une<br />

composition minimum. Cela devient un chaos de néons corrodant<br />

avec ironie l’image évoquant la mélancolie des peintures de chaos de<br />

glaces de Caspar Friedrich. une sculpture du désenchantement à l’ère<br />

des grands magasins.


Cécile baRt<br />

née en <strong>19</strong>58, vit et travaille à marsannay-la-côte<br />

l’œuvre de Cécile baRt prend totalement en charge sa valeur décorative.<br />

Elle compose harmonieusement avec l’architecture, fait corps avec elle, respectant<br />

son rythme naturel tout en lui apportant un nouveau souffle. ses<br />

peintures contaminent l’espace, le mettent en vibration, lui attribuant une<br />

nouvelle profondeur visuelle et émotive. ses dispositifs transforment les<br />

lieux en espaces de couleur dans lesquels nous déambulons. il y a chez elle<br />

un usage de la couleur qui mobilise l’efficacité visuelle du monochrome avec<br />

l’impact que peut avoir sur la vision sa transparence, sa translucidité ou son<br />

opacité relative en fonction du déplacement du spectateur et de la lumière.<br />

Car les tableaux de Cécile n’en sont pas vraiment ; il s’agit en effet de toiles<br />

se rapprochant des toiles sérigraphiques tendues sur des écrans métalliques.<br />

Ces écrans, en fonction de leur position, font obstacle ou sont traversés par<br />

la lumière ; la polychromie se joue d’un écran à l’autre. les positionnements<br />

des écrans dans le lieu leur donnent une position spatiale qui implique pour<br />

certains que l’on puisse tourner autour et voir d’autres écrans à travers. Du<br />

coup se produisent des interférences de couleurs et de valeurs. par leur disposition<br />

dans l’espace et dans leur relation au mur, ils ont à la fois une fonction<br />

chromatique, une dimension spatiale modifiant l’espace et la perception<br />

de l’architecture des lieux investis, et une dimension visuelle qui joue de la<br />

lumière entre transparence et opacité.<br />

Cécile Bart présente au <strong>19</strong> trois maquettes (Models) et leurs jeux d’échantillons.<br />

par l’augmentation de l’échelle de la maquette et sa mise en rapport<br />

avec des échantillons conçus à l’échelle réelle, une mutation s’opère. tout<br />

en ayant été conçue à l’origine pour des lieux spécifiques dont elle « reconstitue<br />

» l’espace, la maquette acquièrt une part d’autonomie qui la fait fonctionner<br />

à la fois comme un espace spécifique, comme un objet spéculaire<br />

et le théâtre d’une scénographie abstraite. l’exposition de plusieurs de ces<br />

mises en scène, institue de nouvelles perceptions tant dans les relations entre<br />

chacune que celles qu’elles entretiennent avec le lieu. Models/Gammes est<br />

ici constitué de trois maquettes à échelle 1/10, présentant trois expositions<br />

qui se sont déroulées entre <strong>19</strong>98 et 2012 (<strong>19</strong>98 Tanzen, 2003 La Ronde, 2012<br />

Suspens at Geneva). Chacune met en scène des peintures/écrans. Chaque<br />

maquette (model) se double du jeu d’échantillons de la gamme de couleur<br />

correspondante (gamme). Depuis <strong>19</strong>97, un échantillon est un carré de tissu<br />

de 90 x 90 cm peint en même temps que chaque nouvelle peinture, servant<br />

de test et de mémoire des couleurs utilisées. les relations entre surfaces,<br />

couleurs et motifs jouent au sein de chaque lieu représenté à échelle réduite,<br />

et tout autant en grandeur nature, et dans les échanges entre les trois sculptures<br />

assemblages. les trois maquettes font partie d’un ensemble de cinq<br />

maquettes exposées à la maréchalerie de versailles au printemps dernier.<br />

Cécile Bart est représentée par la galerie Chez valentin, paris et par Catherine issert, saint-paul.<br />

Models/Gammes, 2012, maquettes au dixième, jeux d’échantillons, supports métalliques (de haut en bas : Tanzen, Aargauer Kunsthaus, Aarau, <strong>19</strong>98 ; Suspens at Geneva, mamco, genève, 2012)


Juan Jose CaMbRe<br />

né en <strong>19</strong>48, vit et travaille à Buenos Aires, Argentine<br />

Au cours de son parcours, Juan Jose<br />

CaMbRe s’est progressivement affirmé<br />

comme un coloriste à travers la pratique<br />

d’une peinture de paysage travaillée par la<br />

couleur. le « sujet » paysage est traité avec<br />

une gamme chromatique limitée aux couleurs<br />

primaires et secondaires, donc, totalement<br />

anti naturalistes et sans aucun effet<br />

de couleur locale. la couleur, progressivement,<br />

envahit l’espace de ses peintures en<br />

dissolvant tendanciellement le motif paysager<br />

dans le point de trame.<br />

Ce grossissement du point plaçait le spectateur<br />

dans une situation de basculement<br />

où le motif était constamment à la lisière<br />

de son apparition et à la limite de sa disparation.<br />

Cela produisait une peinture<br />

pointilliste néo-pop, un peu comme dans<br />

le mec’art où l’image recherchée s’illustre<br />

comme un constant va-et-vient entre le<br />

flou et le net. Cette utilisation du point<br />

trame sera d’ailleurs à l’origine d’œuvres<br />

majeures de l’artiste français Alain Jacquet<br />

qui en fut une des figures historiques.<br />

Ce point de trame n’est pas sans évoquer la<br />

reproduction industrielle de l’image imprimée,<br />

induisant un effet de déréalisation<br />

du sujet. Cambre va aller plus loin dans la<br />

corrosion du réel par le point : il était dans<br />

la logique de sa peinture que le point désagrège<br />

l’image pour l’entraîner vers une pure<br />

picturalité. Cela a débouché sur une problématique<br />

du monochrome qui va s’affirmer<br />

jusqu’à nos jours dans des modalités<br />

variées. Cette pratique touche au tableau et<br />

en particulier au tondo, qui chez lui configure<br />

le passage du point au tableau, mais<br />

aussi au tirage lithographique.<br />

Dans l’usage de cette technique, il sollicite<br />

une gamme chromatique limitée aux couleurs<br />

primaires et aux secondaires avec des<br />

variations sur des séries travaillées d’une<br />

seule couleur. la lithographie étant la matrice<br />

du multiple mais permettant aussi de travailler<br />

ensuite sur le principe de l’association de<br />

couleurs disjointes. les épreuves permettent<br />

après coup de penser, couleur par couleur,<br />

la relation du tout à la partie. nous sommes<br />

là dans un registre de la variation et de la<br />

combinaison qui recoupe les recherches des<br />

artistes du monochrome et de l’abstraction<br />

minimale comme Kees visser pour les paysbas<br />

ou François perrodin pour la France ou<br />

encore l’américain Alan Charlton.<br />

Séquence 3, 2011, vidéo, 20’32<br />

l’approche non compositionnelle qui caractérise<br />

tout un pan de son travail l’a amené<br />

à s’intéresser à la lumière et aux mouvements<br />

dans leur incidence sur les processus<br />

de dématérialisation du réel (sur la surface<br />

d’un plan d’eau par exemple). De même<br />

qu’Ellsworth Kelly s’est servi de photos des<br />

reflets du soleil sur l’eau de la seine, Cambre<br />

a filmé des étendues d‘eau où la lumière par<br />

ses variations et dans sa relation aux mouvements<br />

de l’eau peut lui donner l’homogénéité<br />

d’un plan quasi monochrome, ou à<br />

l’épreuve de ses ondulations, l’animer d’une<br />

vibration voire la diffracter en une myriade<br />

d’éclats de lumière. le mouvement et la réflexion<br />

de la lumière vont déporter le plan<br />

vers le point et réciproquement. ses deux<br />

petits films (dont l’atmosphère fait penser à<br />

Claude Debussy) saisissent dans une calme<br />

lenteur ce double mouvement d’homogénéisation<br />

et de fragmentation de la couleur<br />

du monde ; comme en écho à celles de la<br />

peinture.<br />

Juan Jose Cambre est représenté par la galerie vasari,<br />

Buenos Aires.


Philippe DeCRauZat s’emploie à revisiter le champ de l’abstraction et<br />

en particulier l’Art optique (Bridget riley) et le cinétisme (Jesús-rafael<br />

soto), des expériences filmiques des avant-gardes (hans richter, Fernand<br />

léger, etc) mais aussi du pop’art (ou encore roy lichtenstein si on prend<br />

l’œuvre exposée dans Au-delà du tableau). il en élargit le périmètre et<br />

les différentes perspectives. mais on ne peut ignorer à son propos la<br />

référence incontournable à marcel Duchamp, à ses rotoreliefs et de<br />

l’Anémic Cinéma. Et ce, à double titre : d’une part pour l’aspect cinétique<br />

de ses deux œuvres et d’autre part, pour des raisons qui anticipent certaines<br />

des préoccupations de Decrauzat : marcel Duchamp considérait<br />

ses rotoreliefs comme des jouets et le premier lieu où il les exposa fut<br />

le Concours lépine, conçu à l’origine pour les fabricants de jouets puis<br />

élargi à toutes sortes d’inventions. les altérations de la perception qu’ils<br />

produisent, l’animation dynamique de lignes par le mouvement, leur expansion<br />

virtuelle que le mouvement produit sont aussi des phénomènes<br />

optiques qui intéressent Decrauzat. la déstabilisation du spectateur par<br />

une perte de repères de sa vision aussi.<br />

il faut y ajouter un autre aspect qui tient au statut de l’œuvre et aux<br />

relations entre art de masse et art d’avant-garde. il y a bien évidemment<br />

dans cette démarche une préoccupation que reprend à son compte<br />

Decrauzat, à savoir, l’ambiguïté des objets produits entre dimension cognitive<br />

et/ou dimension ludique de l’objet, entre œuvre d’art ou objet<br />

décoratif (Duchamp voulait donner à ses créations le statut de jouet<br />

et ainsi les vendre en tant quel tel « échec sur toute la ligne » avait-il<br />

déclaré après cette tentative, mais l’intention indiquait le caractère fluctuant<br />

des objets produits). on est un peu à l’inverse du ready-made :<br />

infléchir l’œuvre vers l’objet de consommation, partir du spéculatif pour<br />

aller vers le décoratif. mais Decrauzat reste sur le fil du rasoir dans un<br />

constant basculement entre ces deux versants.<br />

Dans Sans titre (cadre#1) que nous avons choisi, plusieurs de ces ques-<br />

Sans titre (cadre#1), 2009, acrylique sur toile<br />

tionnements sont abordés. un cadre vide qui n’encadre que le blanc du<br />

mur et donc cerne ce qui est l’envers de l’art. mais ce cadre, en symétrie au processus précédent, la découpe qu’il opère sur le réel produit une<br />

œuvre. Et pourtant, d’emblée, l’ombre d’un doute saisit le spectateur du fait du vide que ce cadre découpe ; le repli du pictural sur le cadre<br />

évoque l’objet décoratif. la structure en faisceau de lignes colorées accentue un effet perspectif et le côté « ouverture » de l’objet qui rappelle<br />

bien évidemment le tableau comme « fenêtre », mais qui n’ouvre sur rien d’autre que le mur qui le porte. un cadre peint qui n’encadre que le blanc<br />

d’un mur vide. les moirages produits délibérément par la bichromie accentuent l’effet décoratif aux allures géo-pop que l’on retrouve dans le<br />

motif décoratif de certains mobiliers type miroir (qui ne sont pas sans évoquer les Mirrors de l’ami lichtenstein). Et voilà aussi un miroir qui ne<br />

réfléchit rien… reléguée sur ses bords, la peinture tend vers l’objet et le cadre peint qui enserre le blanc du mur le rabat vers l’œuvre. une façon<br />

d’associer le ludique du jeu visuel à la mélancolie de la vanité.<br />

philippe Decrauzat est représenté par la galerie praz Delavallade, paris<br />

Philippe DeCRauZat<br />

né en <strong>19</strong>74, vit et travaille à lausanne, suisse


Dominique DeHaIS<br />

né en <strong>19</strong>56, vit et travaille à paris<br />

Dominique DeHaIS dans son œuvre est à la<br />

croisée des traditions de l’abstraction géométrique,<br />

de l’Art minimal et de l’Art conceptuel.<br />

sa pratique, tout en ayant été fortement marquée<br />

par la peinture, en passe depuis autant<br />

par la sculpture, l’installation, la photographie<br />

que le design d’objet ou la vidéo. les deux<br />

œuvres qu’il réalise ici associent à la fois des<br />

références à la sémiotique, au formalisme<br />

et aux liens possibles entre forme et objet,<br />

structure symbolique et structure formelle,<br />

production industrielle et production artistique.<br />

Planches est constituée de quatre planches de<br />

Dibond d’une taille identique. peintes d’une<br />

laque automobile noire et vernie, elles se disposent<br />

indépendamment l’une de l’autre avec<br />

des configurations d’accrochage multiples<br />

mais dans des rapports d’orthogonalité. Elles<br />

peuvent évoquer des signes ou des codes appartenant<br />

à une écriture ou un langage possible<br />

(d’ailleurs il avait utilisé la signalétique<br />

Planches, 2012, quatre planches Dibbon, laque et vernis<br />

aéronavale antérieurement). les dimensions<br />

anthropomorphiques des planches (174 x 46<br />

cm) rappellent que l’engagement du corps<br />

est une des conditions de la relation entre<br />

la forme, l’espace et ceux qui lui font face.<br />

leur surface laquée fait miroir et réfléchit son<br />

environnement immédiat tout en incluant le<br />

regardeur qui s’arrête ou passe devant.<br />

Partir a la forme d’une mandorle. Dans l’iconographie<br />

chrétienne, la mandorle a symbolisé<br />

la gloire du Christ et le passage du monde<br />

terrestre au monde céleste. Elle est aussi la<br />

forme du sexe féminin et donc le lieu symbolique<br />

d’une origine. C’est une amande gonflable<br />

de grande taille accrochée dans les airs<br />

au-dessus des têtes, comme un nuage. Elle est<br />

suspendue au plafond comme une bulle de<br />

pensée. le souffle des ventilateurs produit le<br />

léger bourdonnement d’une chose en activité<br />

(en anglais cela se dit «drone»…). son statut<br />

est ambivalent entre figure de l’apocalypse<br />

ou du salut. Elle est autant promesse que<br />

menace. Entre apocalypse et rédemption. Au<br />

plan symbolique, elle convoque à la fois le<br />

messianisme religieux et le messianisme laïc.<br />

sa surface métallisée reflète de façon floue et<br />

déformée le lieu qu’elle occupe. Comme une<br />

litanie y est imprimé « ils partirent à l’assaut<br />

du ciel », le propos de Karl marx évoquant<br />

le combat des insurgés de la commune de<br />

paris. Partir est l’habitacle de ce qui est à la<br />

fois commencement, passage et départ. le<br />

souffle et le vide atmosphériques retenus<br />

et contenus par la membrane donnent l’idée<br />

d’un espace inaccessible tout en offrant en<br />

creux l’image de l’espace réel de par l’effet<br />

miroir de sa surface brillante. il est donc cet<br />

espace où le possible porte son au-delà. Ce<br />

qui, à l’aune de notre histoire commune, peut<br />

en faire la forme d’un pari mélancolique sur le<br />

principe d’espérance cher à Ernst Bloch.<br />

Dominique Dehais est représenté par la galerie la ferronnerie,<br />

paris.


Beto De VOLDeR<br />

né en <strong>19</strong>62, vit et travaille à Buenos Aires, Argentine<br />

Beto De VOLDeR est maitre de la ligne et de<br />

la couleur. Chez lui la couleur est au service<br />

de la ligne mais en même temps elle lui donne<br />

une vibration. souvent, elle est uniforme. pas<br />

de polychromie mais la bichromie en mettant<br />

le support blanc à profit. Au maximum trois<br />

couleurs. Car ce qui prime, c’est l’intensité du<br />

trait, la force du contraste. on comprend dès<br />

lors l’importance centrale du dessin dans son<br />

œuvre.<br />

la ligne, chez Beto, est rebelle et joue autant<br />

la courbe que l’angle. mais ce qu’elle ne<br />

connaît pas c’est l’angle droit, car ce que sa<br />

ligne porte c’est plus qu’une organisation de<br />

l’espace, c’est aussi la dynamique d’un mouvement<br />

serpentin, les tensions de la rupture,<br />

ou enfin le dynamisme spatial de l’angle aigu<br />

qui viennent dynamiser l’espace. Cette primauté<br />

du linéaire inscrit son œuvre dans une<br />

tradition qui va de Antoine pevsner à Jean Arp<br />

et sol leWitt, particulièrement à celui des<br />

wall-drawings, celui qui ouvre à l’arabesque le<br />

champ de son dessin. mais De volder croise<br />

dans son aire les lignes aériennes et versatiles<br />

de gego, la dynamique spatiale de raul lozza,<br />

deux grandes figures de l’abstraction géométrique<br />

latino-américaine. Ce qui le différencie<br />

et le singularise, c’est l’intégration du relief à<br />

la ligne. il travaille ce qui fait passer de la ligne<br />

au contour et du contour au plan. il permet<br />

de joindre les parties en formant un tout. il va<br />

interroger les potentialités formelles des relations<br />

entre le tout et la partie dans certaines<br />

de ses œuvres. la ligne vient ouvrir le plan<br />

et dans certaines séries le compartimenter,<br />

puis le fragmenter ; à l’image des structures<br />

cellulaires. il y a une part de son activité plastique<br />

qui relève du principe d’association et<br />

de scissiparité.<br />

si l’œuvre pour lui est cosa mentale, c’est sur<br />

le mode d’une pensée vagabonde qui associe<br />

le projet à l’intuition du faire. Ce n’est pas<br />

étonnant qu’il ait été amené à s’attaquer au<br />

point. on sait que la ligne est une multiplication<br />

de points ou ce qui joint sur un plan<br />

un point à l’autre. on sait aussi que le point,<br />

ou plutôt la succession de points, quand elle<br />

dessine en creux les circonvolutions du trait,<br />

a un effet cinétique qui fait que la persistance<br />

rétinienne de l’œil comble les blancs<br />

qui parfait le dessin potentiel, que le pointillé<br />

suggère la ligne tout en produisant un<br />

effet kinesthésique qui produit une impression<br />

de mouvement accusant le dynamisme<br />

Sans titre (wall drawing), 2012, pastilles autocollantes, vue l’exposition PLC, Centre Borges, Buenos Aires<br />

de la forme. mais le point est aussi le point<br />

de trame, qui décomposant la ligne, vient en<br />

troubler et brouiller la perception. une pratique<br />

qui fait que le dessin simultanément se<br />

constitue et se défait. Cette envie d’associer<br />

le dessin à l’intuition l’a poussé à se délester<br />

de l’objet pour s’attaquer directement au dessin<br />

mural sans en passer par les outils traditionnels<br />

que pourraient être le crayon ou le<br />

pinceau ; cela pour éviter le carcan qu’impose<br />

au dessin la soumission au croquis préparatoire.<br />

C’est donc avec un matériau industriel,<br />

aussi simple qu’efficace qu’il travaille : des<br />

pastilles noires utilisées dans l’habillage intérieur<br />

des automobiles ; ainsi, « à point levé »,<br />

il monte des variations entre l’angulaire et le<br />

serpentin qui nous emportent et nous immergent<br />

dans le mouvement même de leur<br />

conception. A suivre le fil et à interroger la<br />

trame surgit la vision d’un dessin qui s’offre<br />

et se dérobe constamment et qui nous place<br />

entre devenir et souvenir dans des visions instables<br />

que notre œil perçoit et perd.<br />

Beto De volder est représenté par la galerie palatina, Buenos<br />

Aires.


Lucio DORR<br />

né en <strong>19</strong>69, vit et travaille à Buenos Aires, Argentine<br />

si le terme de production peut avoir une<br />

pertinence, c’est bien dans le cas de l’œuvre<br />

de Lucio DORR qui est parmi les plus<br />

prometteurs de la nouvelle génération de<br />

l’abstraction argentine. tout en ayant été<br />

marqué par l’abstraction, en particulier<br />

par l’Art concret et géométrique, il a<br />

parfaitement assimilé la tradition utopique<br />

et prospective issue du Constructivisme<br />

et du productivisme ou encore la tradition<br />

néo-géo avec des artistes comme peter<br />

halley. mais lucio Dorr intègre des<br />

éléments propres à la culture urbaine. En<br />

abandonnant le support tableau, la toile et<br />

les pinceaux, il donne une place centrale aux<br />

techniques liées à la production en série.<br />

son registre formel est lié aux schémas<br />

de communication, à la signalétique et<br />

aux objets. il utilise de façon centrale le<br />

procédé sérigraphie mais sur des supports<br />

verres ou plexis. il sollicite des matériaux<br />

qui sont liés à la production d’objet et en<br />

règle générale à l’imprimerie. ses formes<br />

Sans titre, 2009 (version 2012), tissus imprimés et câbles, vue de l’exposition All boys, musée de santa Fe, Argentine<br />

peuvent s’inspirer d’expériences abstraites<br />

comme celle de Jean Arp, mais aussi à ce<br />

design aux couleurs et aux dessins très<br />

« pop » que l’on trouve dans la décoration et<br />

le mobilier des grandes surfaces de vente.<br />

son usage du matériau industriel (plastique<br />

et verre) et des couleurs singulières qu’il<br />

produit, peuvent évoquer les œuvres post<br />

minimal d’un artiste de la côte ouest des<br />

usA comme John macCracken. il n’y a pas<br />

chez Dorr de dogme, tout type de ligne<br />

est bon à prendre. il y a dans son travail<br />

une contiguïté entre le dessin technique<br />

et la forme, entre la grille abstraite et le<br />

réseau urbain. ses formes campent entre le<br />

plan, le prototype et l’objet sans vraiment<br />

suggérer un usage mais plus en affirmant<br />

leur plasticité, leur impact décoratif. Ainsi,<br />

il garde une ambiguïté, flirtant avec le<br />

mobilier.<br />

Dans l’œuvre présentée il réutilise des tissus<br />

imprimés à motif géométrique pour<br />

les suspendre sur des étendoirs. la couleur<br />

réduite au noir et blanc en augmente l’impact<br />

visuel. Ces pièces de tissus aux motifs<br />

en grille et aux trames de densités différentes<br />

produisent un résultat très étrange<br />

où les choses se tiennent sur le fil. pour le<br />

dire en jouant sur le littéral et le figuré, on<br />

est face à ce qui serait à la fois tissu, toile,<br />

patchwork et peinture ; la toile ici joue de<br />

ses deux dimensions, textile et picturale. Du<br />

coup le dispositif part de l’objet (un accrochage<br />

de tissus) pour faire tableau. une<br />

composition linéaire qui reprend le motif<br />

de la grille avec des resserrements ou des<br />

élargissements, des zones denses et d’autres<br />

plus aérées qui ne sont pas sans faire penser<br />

au paysage urbain. sans jamais être dans le<br />

descriptif et toujours suspendu à un fil…


Susanna FRItSCHeR<br />

née en <strong>19</strong>60, vit et travaille à montreuil<br />

ses œuvres se construisent toujours à partir d’un lieu,<br />

en son sein, et interrogent notre perception visuelle<br />

et sensorielle. intrinsèquement liées au réel, elles produisent<br />

un jeu d’alternance dans notre appréhension<br />

entre l’œuvre elle-même et son environnement. les<br />

éléments intérieurs ou extérieurs à l’œuvre, (matière,<br />

surface, lumière, architecture), entretiennent une relation<br />

réciproque. ses dispositifs se développent à partir<br />

d’un travail de peinture, projetée au pistolet sur différents<br />

supports (toile, verre, plexiglas, film plastique) ou<br />

directement sur le mur. le blanc, dans toutes ses variations,<br />

constitue au départ une alternative radicale. ses<br />

recherches se déclinent alors, de l’introduction de la<br />

couleur, à l’expérimentation d’autres matériaux, enduits,<br />

revêtements ou vidéo projection luminescente. Ces<br />

procédés sont autant d’outils permettant d’agir sur l’espace<br />

- parois, sols, plafonds - afin de souligner les caractéristiques<br />

architecturales de l’endroit, de les déplacer,<br />

de les inverser, de les contredire.<br />

laurence Dalloz, extrait<br />

Depuis deux ans, Susanna FRItSCHeR fait usage du son<br />

avec lequel elle réalise des dispositifs présentés dans<br />

différents lieux qui peuvent leur faire écho sans les redoubler<br />

en jouant sur l’écart et les liens entre ce qui se<br />

voit et ce qui se décrit. Entre ce qui se perçoit et ce qui<br />

se dit. s’il est question de dire le lieu ou la couleur, il<br />

est aussi question ici d’une voix qui rend présente l’absence<br />

de ce qu’elle nomme, décrit ou commente. mais<br />

se jouent aussi la présence spatiale de la voix, sa rythmique<br />

et sa tessiture qui donnent au texte l’amplitude<br />

qu’autorise le phrasé de ce qui est proche d’un récitatif.<br />

Ce qu’elle nous offre dans une forme épurée et sensuelle<br />

c’est une poétique de la couleur à l’épreuve et à<br />

l’écho de la voix. la « partition » proposée au <strong>19</strong> est une<br />

suite de textes sur le blanc écrits par Charles pennequin<br />

et mis en voix par helia samadzadeh, une soprano ; le<br />

choix d’une cantatrice de préférence à une comédienne<br />

traduit la volonté d’une rythmique à l’exclusion de l’interprétation<br />

théâtrale plus chargée d’affect et d’effets.<br />

Une autre pièce : blanc, 2012, installation sonore en quadriphonie, 13’


Didier MeNCObONI<br />

né en <strong>19</strong>59, vit et travaille à ivry sur seine<br />

menant une activité de dessin et de peinture où la couleur,<br />

la ligne et le point sont au centre de ses préoccupations,<br />

Didier MeNCObINI a réalisé de très nombreux dessins<br />

fonctionnant comme des constellations de couleurs en<br />

expansions. la polychromie se faisait par association tendancielle<br />

de multiples sphères (ou plutôt ovales) de couleurs<br />

différentes dont la caractéristique était d’être non<br />

saturées. Cela produisait un aspect aérien comme si la couleur<br />

lévitait dans ses peintures sur papier ; une impression<br />

accentuée par le fait que la couleur était dissociée (c’était<br />

aussi le cas dans d’autres œuvres avec leurs ensembles de<br />

traits fonctionnant comme des nuées de couleurs). Dans<br />

cette dynamique spatiale de la couleur, le miroitement et<br />

le scintillement produit par l’association des traits ou des<br />

structures ovales et leur conjonction dans l’espace produisent<br />

des volées polychromes. ils sont probablement<br />

à l’origine de l’envie qu’a eue mencoboni de travailler<br />

directement dans l’espace. De là, vient son intérêt pour<br />

les mobiles et l’usage privilégié du plexiglas, ce matériau<br />

léger facile à la découpe, d’une vive présence colorée, qui<br />

se prête aux jeux de superpositions et de réflexions et<br />

peut, en fonction de la lumière, aller de la transparence à<br />

l’opacité. A son propos, olivier Kaeppelin écrivait : « Aussi<br />

longtemps que je le connaisse je n’ai pas le souvenir que<br />

Didier mencoboni ait envisagé la peinture à partir de la<br />

seule question du tableau, si ce n’est pour affirmer, dès les<br />

premiers gestes, les premiers accrochages que sa peinture<br />

naissait du cadre pour s’en échapper… ». Depuis 2011, les<br />

mobiles qu’il réalise dont le titre générique est Révolutions,<br />

« enrichissent le propos central de l’œuvre, en donnant,<br />

cette fois, une place majeure à la lumière, aux vibrations<br />

d’une peinture vaporisée, au translucide du matériau,<br />

à la dynamique du cercle, à la traversée des installations<br />

par cette lumière permettant au spectateur d’aller au-delà<br />

de l’objet, projetant sur le mur les existences innombrables<br />

de cette peinture. Elle envahit physiquement l’espace où<br />

nos déplacements la changeant multiplient les possibles<br />

de ses états. nous sommes alors au cœur de l’expérience<br />

picturale de Didier mencoboni, Mobilis in mobile ».<br />

Didier mencoboni est représenté par la galerie Eric Dupont, paris.<br />

Révolutions 21, 2012, acrylique, plexiglas, nylon, métal, vue de l’exposition<br />

à la galerie Eric Dupont


Antoine PeRROt<br />

né en <strong>19</strong>53, vit et travaille à paris et Aubervilliers<br />

- Flâner, regarder : prendre chaque jour un peu de temps pour regarder<br />

les matériaux qui nous entourent, remuer les bacs dans les bazars,<br />

comparer les couleurs des objets, des tissus, des matériaux — peut-être<br />

leur parler de temps en temps pour les rafraîchir. ou encore faire l’expérience<br />

suivante : sortir dans la rue et circuler en ne focalisant que sur<br />

une couleur choisie au préalable : par exemple « rouge », ne regarder que<br />

ce qui est rouge. surprendre le rouge, les rouges, en prendre possession,<br />

faire remonter du fond de la mémoire tous les rouges déjà rencontrés….<br />

- se demander comment un matériau coloré peut avoir ces qualités et<br />

ces codes qu’on attribue généralement à la peinture, à la sculpture, à un<br />

objet appelé « œuvre » ?<br />

- provoquer des rendez-vous hasardeux avec des matériaux de la vie<br />

quotidienne, les interroger sur leur forme, leur couleur, leur tactilité,<br />

leur plasticité – et leur envie de devenir un de ces objets qu’on appelle<br />

une œuvre.<br />

C’est effectivement dans la logique de la relation avec les œuvres qu’il y<br />

a inversion d’un autre principe du ready-made de Duchamp : interroger<br />

le quotidien, s’approprier les formes et les couleurs qui le construisent<br />

ne peut avoir pour but de les isoler dans le champ clos du monde de<br />

l’art. Comment parler et faire parler ces matériaux communs pour qu’ils<br />

parlent de ce qui est, de ce dont nous nous entourons pour être, nousmêmes<br />

enfin ? il faudrait ici, pour compléter l’idée du désinvestissement<br />

de la figure de l’artiste, examiner comment l’usage et les dispositifs choisis autour de<br />

ces biens ordinaires déshabillent la revendication du « je » de l’artiste au profit d’un<br />

« nous ». D’un nous au regard de ces couleurs et de ces formes que nous choisissons<br />

ou qu’on nous impose ; d’un nous à la lecture de ce que raconte notre quotidien –<br />

cette fabrique insensée de biens aux destinations sociales codées ; d’un nous à la<br />

mesure des enjeux occultés de ce qui va tellement de soi.<br />

Antoine pErrot, extrait<br />

Antoine perrot est représenté par la galerie lahumière, paris.<br />

En haut : Returning the reality of your life (to Gustave) / Révolutionnez votre vie (à Gustave), 2006, tampons abrasifs, tube métal<br />

À gauche : Returning the reality of your life / Révolutionnez votre vie, n°6, 2010, raquettes, balles


Pascal PINauD<br />

né en <strong>19</strong>64, vit et travaille à nice<br />

Je ne fais pas de différence entre les diverses pratiques<br />

que j’utilise dans mon travail. même lorsque je délègue<br />

la fabrication d’une pièce, cette fabrication fait partie<br />

de ces pratiques. l’élaboration purement conceptuelle<br />

d’un tableau entre dans une stratégie de diversification<br />

des modes de production de la peinture (étant donné<br />

que concevoir une peinture, c’est aussi la réaliser)… je<br />

conçois pour mes expositions des pièces dont je dirais<br />

qu’elles proviennent des banlieues du tableau et qui<br />

interrogent.<br />

la peinture et le tableau, Pascal PINauD en garde certains<br />

des paramètres de base : la frontalité, un rapport à<br />

la couleur, un sens de la composition. mais d’un certain<br />

point de vue il la prolonge avec des matériaux qui ne<br />

sont plus spécifiquement picturaux quant à la tradition<br />

classique. il la tire vers un objet qui se trouble quant<br />

à son statut de tableau. Certains comme la série des<br />

Patères ne sont pas sans évoquer délibérément certains<br />

moments des avant-gardes (comme le suprématisme)<br />

mais avec des moyens qui renvoient au rayon sanitaire<br />

et matériaux de décoration d’une grande surface. ils ont<br />

beau être accrochés, ils affirment leur identité industrielle<br />

et leur fonctionnalité potentielle. les patères<br />

découpent sur le mur une dynamique formelle et spatiale.<br />

le matériau réfléchit l’environnement (espace<br />

et autres œuvres) et le spectateur ; ce qui produit un<br />

effet de distanciation qui en altère l’autonomie ; mais<br />

en même temps elles les intègrent comme images dans<br />

l’œuvre. D’autres, comme Noir de Style Matt Citroën<br />

« fabriquent » un tableau avec de la laque industrielle<br />

et des stickers de logos de marques. il y dans ce rapport<br />

à la peinture quelque chose qui relève à la fois de<br />

l’échappé et du retour. il témoigne d’une intelligence à<br />

prendre en charge des savoir-faire industriels ou artisanaux<br />

dans le champ d’une problématique « picturale ».<br />

Ce qui attire, surprend et trouble le spectateur, c’est ce<br />

double lien de contiguïté et d’altérité à la peinture. Ces<br />

deux paramètres s’entremêlent sans jamais se fondre<br />

complètement l’un dans l’autre.<br />

pascal pinaud est représenté par la galerie nathalie obadia, paris.<br />

Noir de Style Matt Citroën (10A04), 2010, laque automobile sur tôle, monogrammes, photographie : François Fernandez


Andrés SObRINO<br />

né en <strong>19</strong>67, vit et travaille à Buenos Aires, Argentine<br />

En terme « d’héritage », Andrés SObRINO<br />

se revendique de l’avant-garde géométrique<br />

mais en mettant à profit l’expérience<br />

minimaliste et conceptuelle ; il y a dans son<br />

travail une dimension optique. on pourrait<br />

penser à un Joaquin torres garcia, un Carlos<br />

Cruz-Diez ou à un Jésus-rafael soto revu<br />

par Allan mcCollum ou Bridget riley. tout<br />

d’abord, s’il travaille la couleur et la ligne,<br />

sobrino a exclu les matériaux traditionnels<br />

au profit du scotch de couleur et n’utilise<br />

que des supports renvoyant à la production<br />

industrielle : mDF, métal, dibbon, carton<br />

plume, papier photographique. il ne fabrique<br />

pas ses couleurs mais conçoit leur disposition<br />

ou leur composition. il peut travailler des<br />

formats qui évoquent le tableau. mais il<br />

fonctionne par série et chaque pièce peut<br />

fonctionner seule mais aussi participer d’un<br />

ensemble. il va aussi dessiner avec la couleur<br />

dans l’espace réel. C’est le cas avec ses grands<br />

« x » qui fonctionnent à la fois comme une<br />

partition de l’espace et un motif répétitif<br />

dont la couleur change. il y a une dimension<br />

décorative et formelle dans sa « peinture »<br />

sans peinture. il faut souligner que, n’utilisant<br />

Sans titre (installation in situ), 2012, bandeaux scotch couleur sur mur, vue de l’exposition All boys, musée de santa Fe, Argentine<br />

que des rouleaux de scotch de couleur, il ne<br />

mélange pas mais jouxte les couleurs, jouant<br />

de leurs potentialités optiques. Ces couleurs<br />

industrielles vont soit découper les murs<br />

de leur dessin, soit dessiner dans l’espace,<br />

tant au mur qu’au sol. Elles prennent ainsi<br />

une dynamique spatiale et mettent à jour le<br />

dessin de son architecture par la puissance<br />

structurante de ses lignes polychromes.<br />

Andrés sobrino est représenté par la galerie Foster Catena,<br />

Buenos Aires.


tILMaN<br />

né en <strong>19</strong>59, vit et travaille entre la Belgique, l’italie et les usA<br />

l’œuvre de tILMaN s’inscrit clairement dans la<br />

tradition abstraite, du mouvement De stijl à l’Art<br />

minimal. mais il s’en détache par plusieurs aspects.<br />

tout d’abord, il prend en charge une part d’intuition<br />

dans laquelle rentre la mémoire de ses pérégrinations<br />

dans l’espace urbain. ses œuvres jouent<br />

beaucoup sur l’ambiguïté de leur identité : peintures<br />

? sculptures ? maquettes d’architecture ou<br />

mobilier ? un peu de chaque sans doute. si la référence<br />

à la peinture est immédiatement perceptible,<br />

la frontalité du tableau est contredite par la<br />

tendance de ses pièces à prendre la tangente vers<br />

le relief ou vers des structures qui travaillent l’horizontal<br />

et l’angulaire. Quand bien même elle est au<br />

mur, l’œuvre se donne comme des blocs en relief<br />

qui évoquent tant des réseaux de communication<br />

que des bâtiments urbains.<br />

les pièces au sol campent entre sculpture et peinture,<br />

ou se donnent à voir comme des feuilletages de<br />

plans colorés qui font à la fois élévation et surface. la<br />

couleur revendique l’artifice des matériaux composés,<br />

les couleurs vives et impures propres à l’univers de la<br />

production d’objets en simili. on est d’ailleurs parfois<br />

proche d’objets relevant du mobilier urbain ou d’intérieur<br />

mais dont l’usage serait incertain et ne prendrait<br />

forme qu’au gré de leur appropriation (ou pas) par<br />

ceux qui les croisent ou les voient. Du coup tout en<br />

étant abstraites, ses œuvres fonctionnent comme une<br />

nature morte ou un paysage urbain sans en être. il produit<br />

des objets hybrides aux identités incertaines qui<br />

récusent le purisme moderniste mais sans pour autant<br />

se soumettre au réel.<br />

De haut en bas : Sans titre (Split), 2012, laque sur bois et planche mDF<br />

Sans titre (lowrider), 2012, laque sur bois et planche mDF


Véronique VeRStRaete<br />

née en <strong>19</strong>61, vit et travaille à paris<br />

le travail de Véronique VeRStRaete a progressivement évolué<br />

d’une pratique se référant à la peinture (mais en étant<br />

déportée tendanciellement vers le volume et l’objet), à la<br />

production d’objets à la fois fonctionnels et autonomes. Elle<br />

travaille l’altération de la frontière entre valeur d’usage et<br />

valeur esthétique d’un « produit » artistique.<br />

À propos des œuvres exposées dont l’une est une production<br />

nouvelle, elle note : « une œuvre de ce type comporte des<br />

signes identitaires la rattachant à la sphère artistique, comme<br />

le tableau dont l’espace propre reste toujours signifié par le<br />

châssis - ici celui du dossier - , son rapport au mur. par contre,<br />

le tableau a un socle, une base sur laquelle le spectateur peut<br />

prendre place et s’adosser sur la partie identifiable comme<br />

tableau. Cette incitation à la fonctionnalité serait donc paradoxale.<br />

Elle réduirait à la fois l’autonomie de l’œuvre, si<br />

chère aux abstraits, et bousculerait l’identification de la pièce<br />

comme œuvre d’art. »<br />

Elle produit ainsi des œuvres dont l’identité est ambivalente<br />

et qui témoignent d’une grande transversalité à l’égard de la<br />

division entre les genres. Elle vient éroder la séparation entre<br />

art et arts décoratifs reprenant la tradition inaugurée par les<br />

avants-gardes historiques (gerrit rietveld pour le mouvement<br />

De stijl ou les incursions des russes comme liubov popova,<br />

Alexandra Exter dans le champ du design). Elle met à profit<br />

l’expérience abstraite dans l’espace de la production de<br />

formes qui sont à la fois objets et formes, tableaux-sculptures<br />

ou mobiliers et décors. Elle récuse l’opposition entre l’orthogonalité<br />

et l’arabesque, entre le pur et l’impur. il en est de<br />

même pour le matériau qui, suivant l’inflexion qu’elle privilégie<br />

va être choisi en fonction des possibilités qu’il offre, qu’il<br />

s’agisse des formes, de ses qualités formelles (texture, matité<br />

ou brillance) ou encore de son adéquation à un usage.<br />

véronique verstraete est représentée par la galerie verney Caron, lyon.<br />

De haut en bas : Tout pour l’image, 2008-2012, contre plaqué okoumé vernis palissandre,<br />

médium recouvert d’une toile blanche pvc pour projection<br />

(maquette réalisée pour l’exposition au <strong>19</strong>, photographie : Casimir lejeune) ;<br />

<strong>Le</strong>s arts décoratifs, 2007, tôle ajourée, contre plaqué lasuré, vue de l’exposition à l’Espace<br />

d’art contemporain les roches (en collaboration avec Arlette et marc simon)


<strong>HoRS</strong> <strong><strong>Le</strong>S</strong> <strong>MuRS</strong><br />

<strong>Le</strong> GeSte et La COu<strong>Le</strong>uR<br />

Christian bONNeFOI, Stéphane bORDaRIeR, bernard bOYeR, Franck CHa<strong>Le</strong>NDaRD,<br />

alain CLéMeNt, Didier DeMOZaY, Gérard DuCHÊNe, adrienne FaRb, Serge FauCHIeR,<br />

Fabienne GaStON-DReYFuS, Koyo HaRa, Zuzana HuLKa, Robert JaNItZ,<br />

Maëlle LabuSSIèRe, alix <strong>Le</strong> MéLéDeR, Françoise PaReSSaNt, Christian ROtH,<br />

Sylvie tuRPIN, Claude VIaLLat<br />

école d’art Gérard Jacot, belfort<br />

28 SePt. > 27 OCt. 2012<br />

<strong>Le</strong> geste et la couleur<br />

présente une<br />

sélection d’œuvres<br />

des collections<br />

du Frac Franche<br />

Comté, des musées<br />

de montbéliard et<br />

Belfort et de collections<br />

privées<br />

d’artistes et de collectionneurs.<br />

De haut à bas : sylvie turpin, Flac bleu-blanc, 2009, mortier frais et pigment, Koyo hara, Sans titre, 2011, acrylique sur toile<br />

Elle rassemble des artistes travaillant en France et qui participent<br />

d’une histoire de la peinture non figurative. une de leurs caractéristiques<br />

est d’associer au travail de la couleur le geste de son inscription<br />

sur le tableau. Ce geste peut inscrire l’énergie d’un corps ou la<br />

charpente d’une forme, concrétiser la matérialité de ce qui produit<br />

le tableau ou le rythme d’une écriture picturale. Cette présence<br />

du geste participe pour les uns d’une préférence pour l’incertain<br />

et de la prise en charge d’un corps à l’œuvre. pour d’autres, elle<br />

traduit la volonté d’intégrer dans le tableau le faire de la peinture<br />

et par la mise à nu de ses procédés, d’introduire ce qui peut être<br />

de l’ordre de la distance dans son exercice de la peinture. le geste<br />

peut affirmer le choix de dessiner directement dans la couleur ou<br />

déterminer l’acte qui marque le signe pictural dans une volonté<br />

d’épure. le geste, ici, produit à la fois une couleur, une forme et un<br />

espace. il se déploie dans un espace qui serait borné par la règle<br />

et l’excès, l’analytique et le poétique. Entre le sens et le sensible.


Alain Clément, Jaune, <strong>19</strong>83, acrylique sur toile, collection Frac Franche-Comté © Adagp paris<br />

nous avons choisi de concevoir une exposition qui rendrait compte d’une disparité délibérée, qui intégrerait la part de<br />

subjectivité et d’affinités électives propres à la collection particulière. Cela pourrait être celle d’un artiste, d’un amateur d’art<br />

ou d’un critique. mais surtout nous avons souhaité un accrochage évoquant davantage la maison que le musée. une façon<br />

d’inscrire l’intimité du rapport à l’œuvre dans l’espace publique. rappelons-nous qu’avant d’entrer au musée, les œuvres<br />

habitent l’atelier des artistes, leur demeure, celles des amis et celles des passionnés.<br />

philippe Cyroulnik


Christian roth, Sans titre, 2012, fibres de verre, résine, et peinture glycéro<br />

De gauche à droite : Christian Bonnefoi, PL II, <strong>19</strong>88-<strong>19</strong>90, acrylique sur toile, stéphane Bordarier, Sans titre, <strong>19</strong>90, acrylique, colle et pigments sur toile. Coll. musées montbéliard


<strong>HoRS</strong> <strong><strong>Le</strong>S</strong> <strong>MuRS</strong><br />

Sous toutes ses formes, L’HuMaIN<br />

Diana QuINbY<br />

Mathias MILHauD<br />

& Charles beL<strong>Le</strong>, anne DuReZ, beverly SeMMeS, Djamel tataH, erwin WuRM<br />

école d’art Gérard Jacot, belfort<br />

15 NOV. > 13 DéC. 2012<br />

Qu’en est-il de l’humain aujourd’hui, non<br />

seulement dans sa représentation dans l’art<br />

ou par l’art, mais aussi dans les modalités<br />

selon lesquelles les artistes s’en emparent,<br />

qu’ils soient peintres, dessinateurs, sculpteurs,<br />

photographes ou vidéastes ?<br />

Comment interroger ces figures, ces personnage<br />

chair ? Donner à voir et percevoir<br />

ces corps et visages marqués<br />

des signes de leurs identités<br />

complexes et contradictoires,<br />

comment configurer ou saisir<br />

les marques du genre et leurs<br />

indices ? mais aussi mettre à<br />

nu ce qui trouble les identités<br />

et les genres. inscrire à la<br />

fois le temps et l’immémorial<br />

de l’archétype dans le corps ?<br />

Donner un corps à ces dissociations<br />

et fragmentations que<br />

le désir et l’imaginaire traumatique<br />

du corps peuvent produire<br />

? Et enfin, comment penser<br />

ce en quoi le corps peut<br />

être objectivé ou au contraire<br />

peut s’infiltrer dans l’objet ?<br />

telles sont les multiples questions<br />

qu’aborde cette exposition<br />

en quelques propositions.<br />

Diana Quinby, Sans titre (deux adolescentes assises), 2010, dessin au crayon graphite sur papier<br />

nous avons choisi de présenter<br />

des œuvres de deux artistes :<br />

Diana QuINbY, dans ses<br />

portraits et autoportraits<br />

de nus, fouille dans les plis<br />

et les replis de sa peau sous<br />

le trait acéré de la mine de<br />

plomb les distorsions mêmes<br />

que la vie naissante inscrit dans la chair. se<br />

configure dans ses dessins cette proximité<br />

entre le sensuel, le flétri et le laid dont<br />

le corps peut être porteur. s’inscrit dans<br />

son grain la marque du temps comme<br />

une destinée. mais cette ambivalence<br />

de la représentation entre le beau et le<br />

pathétique, au cœur de ce qui fait l’identité<br />

d’une personne autant que dans cette<br />

zone où se croisent les générations : entre<br />

le « déjà plus de l’adolescence » et la « pas<br />

encore de la femme », on la retrouve aussi<br />

dans ses portraits de couple, et autres<br />

figures saisies par sa mine de plomb.<br />

l’adolescence est déjà grosse de sensualité<br />

féminine. il y a aussi dans certains de ces<br />

portraits quelque chose d’une ambivalence<br />

entre le EllE et le JE dans le vis-à-vis entre<br />

la fille/femme et la femme/mère. le<br />

vêtement ici redouble et accuse même les<br />

courbes et les arrondis riches des grossesses<br />

potentielles du corps. il y a chez Diana<br />

Quinby une façon de saisir le corps dans<br />

ses plis intimes, dans les ambiguïtés et les<br />

blessures dont il est porteur. Elle travaille<br />

cette texture de la flétrissure dans la chair<br />

même qui donne la vie et dans ces corps<br />

d’hommes et de femmes. C’est un face à<br />

face sans complaisance et sans concession<br />

et pour cela d’une terrible humanité. Cette<br />

contiguïté que la chair entretient avec sa<br />

déchéance la rapproche d’artistes comme<br />

John Coplans ou Donigan Cumming .


mathias milhaud, Sans titre (73, 75), 2012, éléments tissus et matériaux divers<br />

Mathias MILHauD nous présente ses hybrides, qui sont<br />

comme les parcelles d’un corps démembré et morcelé.<br />

Formes informes, bouts de tissus entremêlés, ses fragments<br />

de tissu évoquent les poupées martyrisées de hans Bellmer,<br />

mais aussi les monstres et les protubérances sexuelles de<br />

louise Bourgeois ou organiques d’Eleonora Carrington. C’est<br />

un alphabet de l’informe que manipule mathias milhaud. il<br />

s’inscrit dans un univers peuplé des figures déformées par les<br />

couleurs de l’Angst (comme dans le Cri de munch), jusqu’aux<br />

monstres de Cobra ou les œuvres « boules » de Jean-luc parant.<br />

Entre choses et organes, ils sont à la fois des objets transitionnels,<br />

des fétiches et des poupées sans queue ni tête.<br />

ils peuvent s’associer comme l’incarnation de processus cellulaires<br />

incontrôlés ou être seuls dans l’irréductible présence<br />

de leur « informité ». ils sont présences mais non figures... si<br />

figures ils sont, ce sont celles de nos hallucinations et angoisses,<br />

celles de ces nœuds qui nous collent à l’imaginaire et<br />

nous envahissent pour mieux nous nouer le cœur.<br />

nous pourrions penser aux Ninis de gasioroswki ou aux bouts<br />

de chiffon tuttle. ici il s’agit de ninis de la sculpture qui, parce<br />

qu’ils sont en deçà de la nomination, nous entrainent au-delà<br />

de la représentation ; dans ce qui relève de l’innommable.<br />

A leur côté les œuvres de quatre artistes de la collection du<br />

Frac Franche-Comté :<br />

si Charles beL<strong>Le</strong> peint la flore et le végétal dans ce qu’ils<br />

ont de présence physique et charnelle dans la peinture, il a<br />

aussi représenté il y a quelques années des êtres qu’il plaçait<br />

dans une proximité fragile à nous-mêmes par l’économie de<br />

son dessin. il nous offrait des anonymes de la vie qui se donnaient<br />

à notre regard comme les figures du temps qui passe.<br />

Ces êtres modestes, à l’opposé du Monsieur Bertin d’ingres,<br />

s’arrachaient au blanc du papier dans une timide et obstinée<br />

présence.<br />

Anne DuReZ dans « Figure-toi », met en scène le processus<br />

de vieillissement progressif de son visage par un maquilleur<br />

de cinéma jusqu’à un âge limite, voire une identité sans âge.<br />

“une multitude de regards m’informait sur l’état de mon visage,<br />

sur l’avancée du processus de vieillissement. les regards<br />

insistaient, jusqu’à l’ultime étape où ils ont commencé à fuir.<br />

le temps venait de basculer.” Elle nous montre une sorte de<br />

« précipité » du temps sur l’être ; ou plutôt son anticipation.<br />

l’œuvre de Beverly SeMMeS est habitée par la question du<br />

corps et du vêtement. En sur-dimensionnant les « vêtementspersonnages<br />

» qu’elle réalise, elle leur donne une fonction


statuaire et monumentale. Entre figure mythologique et<br />

paysage du féminin elles associent matériau, forme et<br />

espace. l’inversion des échelles réduit le spectateur au<br />

statut d’objet et par le procédé de la métonymie et de<br />

la métaphore interroge la question du genre et du statut<br />

du féminin. Elles sont ici des figures tutélaires qui se<br />

déploient entre apparition et hantise.<br />

les sculptures d’erwin WuRM sont comme portées par<br />

un corps en défaut ; faites en l’occurrence de vêtements<br />

(pulls) mis en relation avec des objets, ils produisent<br />

deux mouvements à la fois complémentaires et contradictoires<br />

: du corps, il ne reste qu’un vide mais par sa<br />

souplesse le tissu mis en forme par l’objet a tendance<br />

à démentir la construction initiée par l’objet (étagère)<br />

et la faire tendre vers un informe organique. situation<br />

incongrue entre organe et structure.<br />

nous y avons adjoint un tableau ancien de Djamel tataH<br />

qui associe dans ses portraits et scènes de genre à la fois<br />

de l’empathie et un désenchantement mélancolique à<br />

l’égard du réel. il y a dans sa peinture une densité de la<br />

matière picturale, une épure du trait et une économie<br />

de la couleur qui lui donnent une qualité de présence et<br />

une intensité exceptionnelle. Comme le notait Bernard<br />

millet, les personnages de ses peintures ne témoignent<br />

de rien, sinon de l’indéfinissable et de l’incertain ; plus<br />

cette incertitude envahit l’espace et le regard, plus<br />

les personnages apparaissent mystérieux et insistants.<br />

Djamel tatah ne cesse de représenter des personnages<br />

(qu’il a dans un premier temps photographiés et projetés<br />

sur fond monochrome), silhouettes vêtues de noir, à la<br />

peau très pâle, qu’il qualifie lui-même de beckettiennes,<br />

se tenant sur le fil du rasoir entre hyperréalisme et<br />

abstraction.<br />

philippe Cyroulnik<br />

Charles Belle, Tante Jeanne de profil, <strong>19</strong>83, collection Frac Franche-Comté © Adagp paris


pRocHaineMent<br />

<strong>HoRS</strong> <strong><strong>Le</strong>S</strong> <strong>MuRS</strong><br />

tROIS FOIS RIeN<br />

Des travaux d’aménagements du <strong>19</strong> devant avoir lieu en 2013,<br />

les dates de cette exposition seront précisées ultérieurement...<br />

bürkard bLüm<strong>Le</strong>in - françois bouiLLon - George breCht - marie-Claude buGeaud<br />

pierre buraGLio - damien CabaneS - Jean-Loup CorniL<strong>Le</strong>au - patrick dekeYSer<br />

daniel deZeuZe - noël doLLa - Stan douGLaS - robert fiLLiou - Jean-françois GuiLLon<br />

Jean Laube - anca munteanu rimniC - pol pierart - anu tuominen - richard tutt<strong>Le</strong><br />

Cette exposition rassemble des artistes dont les œuvres fonctionnent<br />

sur une économie du peu, comme si le moins permettait<br />

le plus, tant au niveau des perceptions et des images que des associations<br />

qu’ils peuvent provoquer chez le spectateur. ils nous proposent<br />

une poétique de la discrétion et de la modestie qui a pourtant<br />

les ambitions les plus<br />

grandes : celles de nous<br />

faire éprouver des expériences<br />

essentielles, dans<br />

un silence, une respiration<br />

Anu tuominEn<br />

ou l’espace d’un instant ; si<br />

on y prête attention. Beaucoup de ces artistes viennent d’horizons<br />

qui font se croiser Art minimal ou Art conceptuel, des mouvements<br />

comme Fluxus, support-surface, Bmpt avec des générations plus<br />

jeunes. Elles en sont les héritières, mais sans dogmatisme. Ce sont<br />

patrick DEKEysEr<br />

ces croisements de genres que traduira en œuvres l’exposition.<br />

Marc CeLLIeR, aRt à L’HôPItaL<br />

À partir d’octobre 2012<br />

marc CElliEr en résidence au Centre hospitalier de Belfort/montbéliard.<br />

le photographe pose son regard au sein des lieux et services.<br />

Dominique DeHaIS<br />

utbM, Site de Montbéliard<br />

nov. > déc. 2012<br />

Dominique DEhAis investit l’utBm de montbéliard en résonance à<br />

l’exposition Au-delà du tableau au <strong>19</strong>.<br />

À gauche : vue de l’exposition Peur, Crédac, ivry sur seine, 2001<br />

Sans titre, 2010-2011, photographie, issue de la série "Entre chien et loup"<br />

<strong>19</strong>, avenue des Alliés<br />

25200 Montbéliard<br />

tél. 03 81 94 43 58<br />

dix.neuf.crac@wanadoo.fr<br />

www.le<strong>19</strong>crac.com<br />

Direction<br />

Philippe Cyroulnik<br />

Administration<br />

Frédérique Daniel<br />

Action culturelle,<br />

service des publics<br />

Jean-Marie boizeau<br />

Administration, communication,<br />

graphisme<br />

aurélie Goëtz<br />

Accueil, médiation, régie<br />

Céline babey<br />

Régie, montage<br />

Joffrey Guillon<br />

Accueil, régie, montage<br />

brice Decouchant<br />

Assistant administratif<br />

Jusuf Nezic<br />

Montage de l’exposition<br />

thomas billon<br />

<strong>Le</strong> <strong>19</strong>, entrée libre<br />

ma-sa : 14h-18h, di : 15h-18h<br />

ecole d’art G. Jacot,<br />

entrée libre<br />

lu-sa : 9h-12h, 14h-18h<br />

Dépôt légal, 3ème trimestre 2012<br />

issn : <strong>19</strong>57-0856<br />

Crédits photographiques<br />

Dr<br />

Couverture<br />

Antoine perrot (détail), 2006

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