L'antique au cœur du fantastique - Hachette
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3<br />
Dossier<br />
Histoire des arts<br />
Mystères pompéiens<br />
et égyptomanie<br />
<strong>au</strong> xix e siècle p. 78<br />
• Arts décoratifs<br />
• G. Verdi, Aïda<br />
Résurrection de Pompéi p. 80<br />
• Arria Marcella, Souvenir<br />
de Pompéi, T. G<strong>au</strong>tier<br />
• P.-A. de Curzon<br />
Vénus, la maléfi que ? p. 82<br />
• La Vénus d’Ille, P. Mérimée<br />
• Sculptures antiques<br />
Histoires de momies p. 84<br />
• Le Pied de momie, T. G<strong>au</strong>tier<br />
• Petite Discussion<br />
avec une momie, E. A. Poe<br />
Vers l’épreuve d’évaluation<br />
d’Histoire des arts p. 87<br />
• H. Robert<br />
Fiche-méthode : Présenter un<br />
compte ren<strong>du</strong> d’Histoire des arts<br />
2<br />
Arts, ruptures, continuités<br />
L’antique <strong>au</strong> <strong>cœur</strong><br />
<strong>du</strong> <strong>fantastique</strong><br />
➺ Découvrir le goût de l’antique <strong>au</strong> XIX e siècle<br />
➺ Explorer des thèmes <strong>fantastique</strong>s<br />
➺ Faire un compte ren<strong>du</strong> d’Histoire des arts<br />
Mystères pompéiens<br />
et égyptomanie <strong>au</strong> XIX e siècle<br />
L’intérêt pour l’Antiquité, admirée pour ses valeurs citoyennes, est apparu<br />
dès la seconde moitié <strong>du</strong> XVIII e siècle. Au XIX e siècle, ce goût pour les ruines,<br />
pour les civilisations disparues, romaine et égyptienne, se développe :<br />
il se manifeste dans toutes les formes d’art, nourrit l’imaginaire, en<br />
particulier celui des <strong>au</strong>teurs de récits <strong>fantastique</strong>s.<br />
Pompéi, la ville des morts<br />
L’écrivain américain Mark Twain participe en 1867 avec des<br />
touristes américains <strong>au</strong> premier voyage organisé en Europe ; il<br />
livre ses impressions sur Pompéi.<br />
C’est une distraction étrange et bizarre de se promener à travers<br />
cette vieille cité silencieuse des morts ; de fl âner dans des rues<br />
totalement désertes où <strong>au</strong>trefois des milliers et des milliers d’êtres<br />
humains achetaient et vendaient, marchaient et roulaient en char,<br />
faisaient retentir la ville <strong>du</strong> bruit et des désordres <strong>du</strong> commerce<br />
et des plaisirs.<br />
MARK TWAIN, Le Voyage des innocents,<br />
un pique-nique dans l’ancien monde, 1867.<br />
L’archéologie met l’antique à la mode<br />
1763<br />
Identifi cation<br />
par les archéologues<br />
de la ville romaine<br />
disparue de Pompéi<br />
et début des<br />
fouilles.<br />
1772<br />
Découverte à Pompéi<br />
de dix-huit corps ensevelis,<br />
dont celui d’une jeune fi lle.<br />
1798<br />
Prosper Mérimée,<br />
La Vénus d’Ille, nouvelle <strong>fantastique</strong>.<br />
Campagne d’Égypte<br />
de Bonaparte.<br />
1834<br />
1837<br />
Les Derniers Jours<br />
de Pompéi, roman<br />
de Bulwer-Lytton.<br />
1822<br />
Déchiff rement des hiéroglyphes<br />
par le Français Champollion.<br />
Installation de l’obélisque<br />
de Louxor à Paris.<br />
1836<br />
1<br />
1840<br />
Th éophile G<strong>au</strong>tier,<br />
Le Pied de momie,<br />
nouvelle <strong>fantastique</strong>.<br />
3<br />
L’égyptomanie<br />
Au XIX e siècle, […] l’aventure archéologique<br />
est en marche, con<strong>du</strong>isant sur le<br />
terrain des explorateurs archéologues<br />
qui décrivent à leur retour les antiquités<br />
qu’ils ont découvertes, relevées,<br />
copiées, photographiées. Les publications<br />
illustrées de ces expéditions<br />
scientifi ques sont la source même de<br />
l’égyptomanie. C’est en effet en feuilletant<br />
ces be<strong>au</strong>x volumes […] que les<br />
artistes occident<strong>au</strong>x vont inventer leur<br />
propre imagerie égyptienne.<br />
GUILLEMETTE ANDRIEU, in « Egyptomania,<br />
les modèles égyptiens dans l’art<br />
occidental », Dossiers de l’art, n°17, 1994.<br />
Aïda, de Giuseppe Verdi<br />
En 1871, l’opéra Aïda dont le livret (le<br />
texte), les décors et les costumes ont été<br />
créés par l’égyptologue français Auguste<br />
Mariette, met en scène, dans l’Égypte<br />
des pharaons, un général égyptien, Radamès,<br />
qui préfère à l’amour de la fi lle<br />
<strong>du</strong> roi d’Égypte celui d’Aïda, une jeune<br />
esclave, fi lle <strong>du</strong> roi d’Éthiopie, ennemi<br />
mortel de l’Égypte. Par amour, il trahit<br />
son pays et est condamné à être enterré<br />
vif ; Aïda le suit dans la mort.<br />
1852<br />
Th éophile G<strong>au</strong>tier,<br />
Arria Marcella, Souvenir de Pompéi,<br />
nouvelle <strong>fantastique</strong>.<br />
1845<br />
Edgar Allan Poe,<br />
Petite Discussion<br />
avec une momie,<br />
nouvelle <strong>fantastique</strong>.<br />
SOCLE C5<br />
A. a. Quelles sont les deux civilisations antiques à la mode à<br />
la fi n <strong>du</strong> XVIII e siècle et <strong>au</strong> XIX e siècle ? b. Quels événements<br />
historiques expliquent le goût pour ces deux civilisations ?<br />
B. Repérez et décrivez des éléments égyptiens dans les objets<br />
<strong>du</strong> XIX e siècle représentés sur cette double page.<br />
C. a. En quoi l’opéra Aïda correspond-il à l’égyptomanie ?<br />
b. Sur Internet, dans un moteur de recherche, tapez<br />
« Verdi marche triomphale » pour écouter plusieurs<br />
enregistrements : quel est l’instrument de musique<br />
dominant <strong>au</strong> début <strong>du</strong> morce<strong>au</strong> ? Qu’entend-on<br />
ensuite ? Cet air est-il triste ou majestueux ?<br />
D. Pourquoi les découvertes archéologiques peuventelles,<br />
selon vous, correspondre <strong>au</strong> goût de l’étrange<br />
propre <strong>au</strong> genre <strong>fantastique</strong> ?<br />
1857 Th éophile G<strong>au</strong>tier,<br />
Le Roman de la momie.<br />
78 79<br />
Dossier 3 • L’antique <strong>au</strong> <strong>cœur</strong> <strong>du</strong> <strong>fantastique</strong><br />
1<br />
2<br />
3<br />
4<br />
5<br />
6<br />
Pichet avec col en forme de sphinge,<br />
1787-1797. Musée Adrien Dubouché, Limoges.<br />
Candélabres (paire), vers 1805. Mobilier national.<br />
Pot à lait à l’égyptienne, porcelaine, début <strong>du</strong><br />
XIX e siècle. Musée de la Porcelaine, Florence.<br />
Assiette <strong>du</strong> service de L’Empereur, 1808. Châte<strong>au</strong><br />
de Fontaineble<strong>au</strong>.<br />
Pen<strong>du</strong>le. Premier Empire. Châte<strong>au</strong> de Compiègne.<br />
Chenet de cheminée, fi n XVIII e . Fontaineble<strong>au</strong>.<br />
5<br />
4<br />
6<br />
1871<br />
Création <strong>au</strong> Caire, en Égypte,<br />
de l’opéra de Giuseppe Verdi,<br />
Aïda, pour l’in<strong>au</strong>guration<br />
<strong>du</strong> canal de Suez.<br />
1867 Temple égyptien<br />
de l’Exposition<br />
1860<br />
universelle de Paris.<br />
Fouilles systématiques de Pompéi.<br />
Invention des moulages de plâtre<br />
permettant de conserver<br />
la silhouette des victimes.
3<br />
Dossier<br />
Histoire des arts<br />
�<br />
Théophile G<strong>au</strong>tier<br />
(1811-1872)<br />
Ce poète et romancier français visite<br />
en 1850 les ruines de Pompéi, la ville<br />
romaine ensevelie sous les cendres<br />
<strong>du</strong> volcan Vésuve après son éruption<br />
en 79 ap. J.-C. Son récit s’inspire de<br />
la découverte, en 1792, <strong>du</strong> cadavre<br />
d’une jeune fi lle par les archéologues.<br />
�<br />
Lexique<br />
Vocabulaire de<br />
l’architecture antique<br />
1. Quel est le point commun des<br />
mots suivis d’un astérisque dans<br />
le texte ?<br />
2. Découvrez le sens de ces mots<br />
à l’aide des schémas ou d’un dictionnaire.<br />
cimaise<br />
Résurrection de Pompéi<br />
péristyle<br />
ornements<br />
polychromes<br />
5<br />
15<br />
20<br />
25<br />
Arria Marcella,<br />
Souvenir de Pompéi<br />
Octavien et ses amis visitent Pompéi<br />
en touristes. Un soir, Octavien retourne<br />
seul dans la ville antique.<br />
Ses pieds, sans qu’il [Octavien] en eût conscience, le portèrent<br />
à l’entrée par laquelle on pénètre dans la ville morte ; il déplaça<br />
la barre de bois qui la ferme et s’engagea <strong>au</strong> hasard dans les<br />
décombres.<br />
La lune illuminait de sa lueur blanche les maisons pâles,<br />
divisant les rues en deux tranches de lumière argentée et<br />
d’ombre bleuâtre. Ce jour nocturne, avec ses teintes ménagées,<br />
dissimulait la dégradation des édifi ces. L’on ne remarquait pas,<br />
comme à la clarté crue <strong>du</strong> soleil, les colonnes tronquées, les<br />
façades sillonnées de lézardes, les toits effondrés par l’éruption ;<br />
les parties absentes se complétaient par la demi-teinte, et un<br />
rayon brusque, comme une touche de sentiment dans l’esquisse<br />
d’un table<strong>au</strong>, indiquait tout un ensemble écroulé. Les génies<br />
taciturnes de la nuit semblaient avoir réparé la cité fossile pour<br />
quelque représentation d’une vie <strong>fantastique</strong>. […]<br />
En passant devant une maison qu’il avait remarquée pendant<br />
le jour et sur laquelle la lune donnait en plein, il vit, dans un état<br />
d’intégrité parfaite1 , un portique* dont il avait cherché à rétablir<br />
l’ordonnance2 : quatre colonnes d’ordre dorique cannelées* jusqu’à<br />
mi-h<strong>au</strong>teur, et le fût* enveloppé comme d’une draperie pourpre d’une<br />
teinte de minium*, soutenaient une cimaise* coloriée d’ornements<br />
polychromes*, que le décorateur semblait avoir achevée hier ; sur<br />
la paroi latérale de la porte un molosse de Laconie3 , exécuté à<br />
l’enc<strong>au</strong>stique et accompagné de l’inscription sacramentelle4 : Cave<br />
canem5 , aboyait à la lune et <strong>au</strong>x visiteurs avec une fureur peinte.<br />
Sur le seuil de mosaïque le mot Ave6 , en lettres osques7 et latines,<br />
saluait les hôtes de ses syllabes amicales. Les murs extérieurs,<br />
teints d’ocre et de brique, n’avaient pas une crevasse. La maison<br />
s’était exh<strong>au</strong>ssée8 d’un étage, et le toit de tuiles dentelé d’un<br />
acrotère* de bronze projetait son profi l intact sur le bleu léger<br />
<strong>du</strong> ciel où pâlissaient quelques étoiles.<br />
Cette rest<strong>au</strong>ration étrange, faite de l’après-midi <strong>au</strong> soir par<br />
un architecte inconnu, tourmentait be<strong>au</strong>coup Octavien, sûr<br />
d’avoir vu cette maison le jour même dans un fâcheux état de<br />
ruine. Le mystérieux reconstructeur avait travaillé bien vite,<br />
car les habitations voisines avaient le même aspect récent et<br />
neuf ; tous les piliers étaient coiffés de leurs chapite<strong>au</strong>x* ;<br />
pas une pierre, pas une brique, pas une pellicule de stuc*,<br />
pas une écaille de peinture ne manquaient <strong>au</strong>x parois luisantes<br />
des façades, et par l’interstice des péristyles* on entrevoyait,<br />
<strong>au</strong>tour <strong>du</strong> bassin de marbre <strong>du</strong> cavaedium9 , des l<strong>au</strong>riers<br />
roses et blancs, des myrtes10 10<br />
30<br />
35<br />
40<br />
et des grenadiers. Tous les<br />
PAUL-ALFRED DE CURZON, Un rêve dans les ruines de Pompéi, 1866. Musée Saliès,<br />
Bagnères-de-Bigorre.<br />
historiens s’étaient trompés ; l’éruption n’avait pas eu lieu, ou<br />
bien l’aiguille <strong>du</strong> temps avait reculé de vingt heures séculaires11 sur le cadran de l’éternité.<br />
Octavien, surpris <strong>au</strong> dernier point, se demanda s’il dormait tout<br />
debout et marchait dans un rêve. Il s’interrogea sérieusement pour<br />
savoir si la folie ne faisait pas danser devant lui ses hallucinations ;<br />
mais il fut obligé de reconnaître qu’il n’était ni endormi ni fou.<br />
Un changement singulier avait eu lieu dans l’atmosphère ; de<br />
vagues teintes roses se mêlaient, par dégradations violettes, <strong>au</strong>x<br />
lueurs azurées de la lune ; le ciel s’éclaircissait sur les bords ;<br />
on eût dit12 que le jour allait paraître. Octavien tira sa montre ;<br />
elle marquait minuit. Craignant qu’elle ne fût arrêtée, il poussa le<br />
ressort de la répétition ; la sonnerie tinta douze fois : il était bien<br />
minuit, et cependant la clarté allait toujours <strong>au</strong>gmentant, la lune<br />
se fondait dans l’azur de plus en plus lumineux ; le soleil se levait.<br />
Alors Octavien, en qui toutes les idées de temps se brouillaient,<br />
put se convaincre qu’il se promenait non dans une Pompéi morte,<br />
froid cadavre de ville qu’on a tiré à demi de son linceul13 , mais<br />
dans une Pompéi vivante, jeune, intacte, sur laquelle n’avaient<br />
pas coulé les torrents de boue brûlante <strong>du</strong> Vésuve.<br />
Un prodige inconcevable le reportait, lui, Français <strong>du</strong> dixneuvième<br />
siècle, <strong>au</strong> temps de Titus14 , non en esprit, mais en réalité,<br />
ou faisait revenir à lui, <strong>du</strong> fond <strong>du</strong> passé, une ville détruite avec<br />
ses habitants disparus ; car un homme vêtu à l’antique venait de<br />
sortir d’une maison voisine.<br />
THÉOPHILE GAUTIER, Arria Marcella,<br />
Souvenir de Pompéi, 1852.<br />
1. dans un état tout à fait intact. 2. la belle présentation. 3. un très gros chien de Grèce.<br />
4. traditionnelle. 5. « Attention <strong>au</strong> chien », en latin. 6. « salut », en latin. 7. langue de<br />
l’Italie antique. 8. surélevée. 9. ancien nom de l’atrium, pièce centrale de la maison<br />
romaine, à ciel ouvert. 10. arbustes aromatiques. 11. qui <strong>du</strong>rent un siècle. 12. on<br />
<strong>au</strong>rait dit. 13. drap dont on enveloppe les morts. 14. empereur romain (79-81).<br />
SOCLE C5<br />
A. Décrivez le table<strong>au</strong> en employant<br />
un vocabulaire architectural précis.<br />
B. Comparez la vision d’Octavien <strong>au</strong><br />
« rêve » représenté dans le table<strong>au</strong>.<br />
80 81<br />
Dossier 3 • L’antique <strong>au</strong> <strong>cœur</strong> <strong>du</strong> <strong>fantastique</strong><br />
45<br />
50<br />
55<br />
60<br />
65<br />
... ionique<br />
chapite<strong>au</strong>x<br />
colonnes<br />
cannelées...<br />
... dorique<br />
1. Qu’est-ce qui caractérise<br />
l’état des lieux dans le deuxième<br />
paragraphe ?<br />
2. À quel domaine technique<br />
appartient le vocabulaire dominant<br />
dans les lignes 16 à 45 ?<br />
3. Comment l’état des lieux évoluet-il<br />
dans les lignes 15 à 45 ?<br />
4. a. Quels sentiments Octavien<br />
éprouve-t-il à partir de la ligne 32 ?<br />
b. Pour quelle raison ? c. Quelles<br />
explications cherche-t-il à donner<br />
à ce qu’il voit ?<br />
5. En quoi consiste le « prodige »<br />
évoqué à la ligne 63 ?
3<br />
Dossier<br />
Histoire des arts<br />
�<br />
Prosper Mérimée<br />
(1803-1870)<br />
Auteur de romans et de nouvelles,<br />
nommé en 1834 inspecteur général<br />
des monuments historiques, il<br />
parcourt la France pour faire<br />
l’inventaire <strong>du</strong> patrimoine et crée<br />
des musées. Il s’efforce de trouver<br />
dans les vestiges <strong>du</strong> passé des traces<br />
des hommes et de leur vie privée.<br />
�<br />
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10<br />
15<br />
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35<br />
40<br />
Vénus, la maléfi que ?<br />
La Vénus d’Ille<br />
Le narrateur, un archéologue, se rend chez M. de Peyrehorade,<br />
un amateur d’antiquités, pour que celui-ci lui fasse découvrir<br />
les ruines de sa région.<br />
« Gageons, monsieur, me dit mon guide, comme nous étions<br />
déjà dans la plaine, gageons un cigare que je devine ce que vous<br />
allez faire chez M. de Peyrehorade ?<br />
– Mais, répondis-je en lui tendant un cigare, cela n’est pas bien<br />
diffi cile à deviner. À l’heure qu’il est, quand on a fait six lieues 1<br />
dans le Canigou 2 , la grande affaire, c’est de souper.<br />
– Oui, mais demain ?... Tenez, je parierais que vous venez à<br />
Ille pour voir l’idole ? J’ai deviné cela à vous voir tirer en portrait<br />
les saints de Serrabona.<br />
– L’idole ! Quelle idole ? » Ce mot avait excité ma curiosité.<br />
« Comment ! On ne vous a pas conté, à Perpignan, comment<br />
M. de Peyrehorade avait trouvé une idole en terre ?<br />
– Vous voulez dire une statue en terre cuite, en argile ?<br />
– Non pas. Oui, bien en cuivre, et il y en a de quoi faire des<br />
gros sous. Elle vous pèse <strong>au</strong>tant qu’une cloche d’église. C’est bien<br />
avant dans la terre, <strong>au</strong> pied d’un olivier, que nous l’avons eue.<br />
– Vous étiez donc présent à la découverte ?<br />
– Oui, monsieur. M. de Peyrehorade nous dit, il y a quinze<br />
jours, à Jean Coll et à moi, de déraciner un vieil olivier qui était<br />
gelé de l’année dernière, car elle a été bien m<strong>au</strong>vaise, comme vous<br />
savez. Voilà donc qu’en travaillant Jean Coll qui y allait de tout<br />
<strong>cœur</strong>, il donne un coup de pioche, et j’entends bimm… comme<br />
s’il avait tapé sur une cloche. Qu’est-ce que c’est ? que je dis. Nous<br />
piochons toujours, nous piochons, et voilà qu’il paraît une main<br />
noire, qui semblait la main d’un mort qui sortait de terre. Moi, la<br />
peur me prend. Je m’en vais à monsieur, et je lui dis : “ Des morts,<br />
notre maître, qui sont sous l’olivier ! F<strong>au</strong>t appeler le curé. – Quels<br />
morts ? ” qu’il me dit. Il vient, et il n’a pas plus tôt vu la main qu’il<br />
s’écrie : “ Un antique ! un antique ! ” Vous <strong>au</strong>riez cru qu’il avait<br />
trouvé un trésor. Et le voilà, avec la pioche, avec les mains, qui se<br />
démène et qui faisait quasiment <strong>au</strong>tant d’ouvrage que nous deux.<br />
– Et enfi n que trouvâtes-vous ?<br />
– Une grande femme noire plus qu’à moitié nue, révérence<br />
parler 3 , monsieur, toute en cuivre, et M. de Peyrehorade nous<br />
a dit que c’était une idole <strong>du</strong> temps des païens... <strong>du</strong> temps de<br />
Charlemagne, quoi !<br />
– Je vois ce que c’est... Quelque bonne Vierge en bronze d’un<br />
couvent détruit.<br />
– Une bonne Vierge ! Ah bien oui !... Je l’<strong>au</strong>rais bien reconnue,<br />
si ç’avait été une bonne Vierge. C’est une idole, vous dis-je ; on<br />
le voit bien à son air. Elle vous fi xe avec ses grands yeux blancs...<br />
Sculpture en bronze d’une Danaïde, découverte<br />
en 1754 dans la Villa des Papyrus d’Herculanum,<br />
50 av. J.-C. Museo Archeologico Nazionale, Naples.<br />
On dirait qu’elle vous dévisage. On baisse les yeux, oui, en la<br />
regardant.<br />
– Des yeux blancs ? Sans doute ils sont incrustés dans le bronze.<br />
Ce sera peut-être quelque statue romaine.<br />
– Romaine ! C’est cela. M. de Peyrehorade dit que c’est une<br />
Romaine. Ah ! Je vois bien que vous êtes un savant comme lui. »<br />
PROSPER MÉRIMÉE, La Vénus d’Ille, 1837.<br />
1. mesure linéaire : une lieue équiv<strong>au</strong>t à environ 4 km et demi. 2. massif des Pyrénées.<br />
3. s<strong>au</strong>f votre respect.<br />
◗ Lire la nouvelle en <strong>au</strong>tonomie et y repérer<br />
des informations SOCLE C1, C7<br />
Procurez-vous la nouvelle de Mérimée, lisez-la et répondez <strong>au</strong>x<br />
questions suivantes.<br />
1. À quelles occasions et envers qui la Vénus se montre-t-elle à nouve<strong>au</strong><br />
maléfi que ?<br />
2. « Vendredi » signifi e « jour de Vénus » ; pour les chrétiens, il s’agit <strong>du</strong><br />
jour sacré de la mort <strong>du</strong> Christ. a. Pourquoi M. de Peyrehorade choisit-il<br />
un vendredi pour marier son fi ls ? b. Pourquoi ce choix choque-t-il son<br />
épouse ?<br />
3. Expliquez pq ppourquoi q le ppost-scriptum p fi nal ( (P.S.) ) rend la nouvelle<br />
<strong>fantastique</strong>.<br />
82 83<br />
Dossier 3 • L’antique <strong>au</strong> <strong>cœur</strong> <strong>du</strong> <strong>fantastique</strong><br />
45<br />
SOCLE C5<br />
Vocabulaire de la sculpture<br />
A. Lexique Cherchez le sens des mots suivants :<br />
a. taille, moulage, modelage, fonte (de métal) ;<br />
b. bas-relief / h<strong>au</strong>t-relief / ronde-bosse.<br />
B. Parmi ces matéri<strong>au</strong>x de sculpteurs, l’argile, le<br />
bois, la cire, le bronze, le marbre, la pierre, quels<br />
sont ceux que l’on peut : a. fondre ; b. modeler ;<br />
c. tailler ; d. travailler ?<br />
Aphrodite,<br />
dite Vénus de Milo.<br />
Sculpture grecque<br />
en marbre, découverte<br />
en 1820 dans l’île grecque<br />
de Milos. Vers 100 av. J.-C.<br />
Musée <strong>du</strong> Louvre, Paris.<br />
1. a. Décrivez précisément la statue<br />
en reprenant les mots <strong>du</strong> texte<br />
(matéri<strong>au</strong>x, forme, époque…). b. Où<br />
et comment a-t-elle été découverte ?<br />
c. En quoi cette découverte évoquet-elle<br />
l’archéologie ?<br />
2. a. Que savez-vous sur Vénus ?<br />
b. Lexique Cherchez dans un dictionnaire<br />
le sens d’« idole ». c. Ce<br />
sens est-il approprié ici ?<br />
3. Expliquez pourquoi cette statue<br />
semble appartenir à l’univers <strong>du</strong><br />
<strong>fantastique</strong>.<br />
Étudier des sculptures<br />
C. Observez les légendes des statues et précisez pour chacune<br />
d’elles : a. le matéri<strong>au</strong> utilisé ; b. l’époque où elle a<br />
été sculptée ; c. le lieu et la date de sa découverte.<br />
D. Ces sculptures sont-elles réalisées en bas-relief, en h<strong>au</strong>trelief<br />
ou en ronde-bosse ?<br />
E. Quels liens pouvez-vous faire entre chacune de ces sculptures<br />
et le texte de P. Mérimée ? Expliquez.<br />
F. Laquelle de ces statues, pour vous, correspond le mieux à<br />
l’image que vous vous faites de la Vénus d’Ille ? Pourquoi ?
3<br />
Dossier<br />
Histoire des arts<br />
Visage <strong>du</strong> sarcophage<br />
de la momie d’Ahmose-<br />
Meritamon, de la XVIII e<br />
dynastie. Musée Égyptien,<br />
Le Caire.<br />
�<br />
E. A. Poe (1809-1849)<br />
Voir biographie p. 58.<br />
�<br />
1. Relevez des expressions <strong>du</strong><br />
texte qui pourraient être celles d’un<br />
archéologue.<br />
2. a. Relevez le vocabulaire de<br />
l’étrange. b. À quels phénomènes<br />
<strong>fantastique</strong>s le narrateur a-t-il<br />
affaire ?<br />
3. Le narrateur éprouve-t-il de<br />
l’attirance ou de la répulsion pour<br />
la jeune femme ? Justifi ez.<br />
5<br />
10<br />
15<br />
20<br />
25<br />
30<br />
35<br />
Histoires de momies<br />
Le Pied de momie<br />
Le narrateur a acheté chez un « marchand de bric-à-brac » (sorte<br />
de brocanteur) un pied de momie pour servir de presse-papiers. Un<br />
soir, tandis qu’il est couché…<br />
Tout à coup je vis remuer le pli d’un de mes ride<strong>au</strong>x, et j’entendis<br />
un piétinement comme d’une personne qui s<strong>au</strong>terait à clochepied.<br />
Je dois avouer que j’eus ch<strong>au</strong>d et froid alternativement ;<br />
que je sentis un vent inconnu me souffl er dans le dos, et que<br />
mes cheveux fi rent s<strong>au</strong>ter, en se redressant, ma coiffure de nuit<br />
à deux ou trois pas.<br />
Les ride<strong>au</strong>x s’entrouvrirent, et je vis s’avancer la fi gure la plus<br />
étrange qu’on puisse imaginer.<br />
C’était une jeune fi lle, café <strong>au</strong> lait très foncé, comme la bayadère<br />
Amani 1 , d’une be<strong>au</strong>té parfaite et rappelant le type égyptien le<br />
plus pur ; elle avait des yeux taillés en amande avec des coins<br />
relevés et des sourcils tellement noirs qu’ils paraissaient bleus,<br />
son nez était d’une coupe délicate, presque grecque pour la<br />
fi nesse, et l’on <strong>au</strong>rait pu la prendre pour une statue de bronze de<br />
Corinthe 2 , si la proéminence des pommettes 3 et l’épanouissement<br />
un peu africain de la bouche n’eussent fait reconnaître, à n’en<br />
pas douter, la race hiéroglyphique des bords <strong>du</strong> Nil.<br />
Ses bras minces et tournés en fuse<strong>au</strong>, comme ceux des très<br />
jeunes fi lles, étaient cerclés d’espèces d’emprises de métal et de<br />
tours de verroterie 4 ; ses cheveux étaient nattés en cordelettes,<br />
et sur sa poitrine pendait une idole 5 en pâte verte que son fouet<br />
à sept branches faisait reconnaître pour l’Isis 6 , con<strong>du</strong>ctrice des<br />
âmes ; une plaque d’or scintillait à son front, et quelques traces<br />
de fard 7 perçaient sous les teintes de cuivre de ses joues.<br />
Quant à son costume il était très étrange.<br />
Figurez-vous un pagne de bandelettes chamarrées 8<br />
d’hiéroglyphes noirs et rouges, empesés de bitume 9 et qui<br />
semblaient appartenir à une momie fraîchement démaillottée.<br />
Par un de ces s<strong>au</strong>ts de pensée si fréquents dans les rêves,<br />
j’entendis la voix f<strong>au</strong>sse et enrouée <strong>du</strong> marchand de bric-à-brac,<br />
qui répétait, comme un refrain monotone, la phrase qu’il avait<br />
dite dans sa boutique avec une intonation si énigmatique : « Le<br />
vieux Pharaon ne sera pas content ; il aimait be<strong>au</strong>coup sa fi lle,<br />
ce cher homme. »<br />
Particularité étrange et qui ne me rassura guère, l’apparition<br />
n’avait qu’un seul pied, l’<strong>au</strong>tre jambe était rompue à la cheville.<br />
Elle se dirigea vers la table où le pied de momie s’agitait et<br />
frétillait avec un redoublement de vitesse. Arrivée là, elle s’appuya<br />
sur le rebord, et je vis une larme germer et perler dans ses yeux.<br />
Quoiqu’elle ne parlât pas, je discernais clairement sa pensée :<br />
elle regardait le pied, car c’était bien le sien, avec une expression<br />
de tristesse coquette d’une grâce infi nie ; mais le pied s<strong>au</strong>tait et<br />
courait çà et là comme s’il eût été poussé par des ressorts d’acier.<br />
Deux ou trois fois elle étendit sa main pour le saisir, mais<br />
elle n’y réussit pas.<br />
THÉOPHILE GAUTIER, Le Pied de momie, 1840.<br />
1. danseuse indoue venue à Paris en 1838. 2. ville de la Grèce antique connue<br />
pour la be<strong>au</strong>té de ses femmes. 3. pommettes saillantes. 4. bijoux en pâte de verre.<br />
5. représentation d’une divinité. 6. déesse de l’Égypte ancienne. 7. maquillage.<br />
8. ornementées. 9. goudron.<br />
SOCLE C5<br />
Dans l’Égypte antique,<br />
on utilisait le procédé de la<br />
momifi cation pour conserver les<br />
corps après la mort. La momie,<br />
entourée de bandelettes de tissu,<br />
était déposée dans un cercueil<br />
nommé « sarcophage », puis<br />
con<strong>du</strong>ite dans le tombe<strong>au</strong>. Des<br />
objets étaient placés <strong>au</strong>près de<br />
la momie pour l’accompagner<br />
dans sa nouvelle vie : quatre<br />
vases dits « canopes »,<br />
dans lesquels étaient<br />
conservés ervés les viscères<br />
<strong>du</strong> défunt d éfunt (les ( les<br />
organes nes contenus<br />
dans son corps),<br />
un repose-tête<br />
epose-tête<br />
en bois, des<br />
meubles, bles, des<br />
aliments. nts.<br />
84 85<br />
Dossier 3 • L’antique <strong>au</strong> <strong>cœur</strong> <strong>du</strong> <strong>fantastique</strong><br />
40<br />
45<br />
5<br />
10<br />
15<br />
20<br />
25<br />
Petite Discussion avec une momie<br />
Nous nous souhaitions réciproquement une bonne nuit, quand<br />
mes yeux, tombant par hasard sur ceux de la momie, y restèrent<br />
immédiatement cloués d’étonnement. De fait le premier coup d’œil<br />
m’avait suffi pour m’assurer que les globes 1 , que nous avions tous<br />
supposés être de verre, et qui primitivement se distinguaient par<br />
une certaine fi xité singulière, étaient maintenant si bien recouverts<br />
par les p<strong>au</strong>pières, qu’une petite portion de la tunica albuginea 2<br />
restait seule visible.<br />
Je poussai un cri, et j’attirai l’attention sur ce fait qui devint<br />
immédiatement évident pour tout le monde. Je ne dirai pas que<br />
j’étais alarmé par le phénomène, parce que le mot alarme, dans<br />
mon cas, ne serait pas précisément le mot propre. Il <strong>au</strong>rait pu<br />
se faire toutefois que, sans ma provision de Brown Stout 3 , je me<br />
sentisse légèrement ému.<br />
Quant <strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres personnes de la société 4 , elles ne fi rent<br />
vraiment <strong>au</strong>cun effort pour cacher leur naïve terreur. Le docteur<br />
Ponnonner était un homme à faire pitié. M. Gliddon, par je ne<br />
sais quel procédé particulier, s’était ren<strong>du</strong> invisible. Je présume<br />
que M. Silk Buckingham n’<strong>au</strong>ra pas l’<strong>au</strong>dace de nier qu’il ne se<br />
soit fourré à quatre pattes sous la table.<br />
Après le premier choc de l’étonnement nous résolûmes, cela<br />
va sans dire, de tenter tout de suite une nouvelle expérience.<br />
Nos opérations furent alors dirigées contre le gros orteil <strong>du</strong> pied<br />
droit. Nous fîmes une incision <strong>au</strong>-dessus de la région de l’os<br />
sesamoideum pollicis pedis 5 et nous arrivâmes ainsi à la naissance<br />
<strong>du</strong> muscle ab<strong>du</strong>ctor 6 . Rajustant la batterie, nous appliquâmes de<br />
nouve<strong>au</strong> le fl uide 7 <strong>au</strong>x nerfs mis à nu, – quand, avec un mouvement<br />
plus vif que la vie elle-même, la momie retire son genou droit<br />
comme pour le rapprocher le plus possible de l’abdomen, puis,<br />
1. globes des yeux.<br />
2. membrane de l’œil,<br />
de couleur blanche.<br />
3. marque de whisky.<br />
4. <strong>du</strong> groupe.<br />
5. os <strong>du</strong> pied.<br />
6. muscle qui pro<strong>du</strong>it<br />
un écartement de l’orteil.<br />
7. le courant électrique.
3<br />
Dossier<br />
Histoire des arts<br />
Lexique<br />
1. Associez à chacun des mots<br />
suivants de la liste A le(s) mot(s)<br />
grec(s) ou latin(s) de la liste B<br />
dont il est issu.<br />
LISTE A :<br />
• archéologie • exhumation •<br />
maléfi ce • fatal • résurrection<br />
LISTE B :<br />
• archeos (grec : « ancien »)<br />
• ex- (grec et latin : « hors de »)<br />
• facio (latin, « faire »)<br />
• fatum (latin : « le sort »,<br />
« le hasard »)<br />
• logos (grec : « étude »)<br />
• humus (latin : « terre »)<br />
• malus (latin : « m<strong>au</strong>vais »)<br />
• re- (latin : « de nouve<strong>au</strong> »)<br />
• surgere (latin : « se lever »,<br />
« surgir »)<br />
2. À partir de leur étymologie et<br />
en vous aidant d’un dictionnaire,<br />
donnez la défi nition de ces mots.<br />
1. Les momies égyptiennes<br />
appartiennent-elles <strong>au</strong> monde des<br />
vivants ou à celui des morts ?<br />
2. Par quel moyen la momie<br />
<strong>du</strong> texte revient-elle à la vie ?<br />
À travers quelles étapes ?<br />
3. Relevez quelques mots<br />
scientifiques : à quels domaines<br />
scientifi ques appartiennent-ils ?<br />
4. Quel est le ton <strong>du</strong> récit dans<br />
les passages en bleu : sérieux ou<br />
humoristique ? Expliquez.<br />
8. rapidité.<br />
9. pleines de force et de rapidité.<br />
10. <strong>au</strong> sens fi guré et <strong>au</strong> sens propre.<br />
11. théâtre de geste et de mimes.<br />
12. son derrière.<br />
13. blessé, peiné (avec un jeu<br />
de mots sur « mortifi é »).<br />
30<br />
35<br />
40<br />
45<br />
50<br />
Discussion avec une momie, illustration d’ABOT d’après Wogel,<br />
tirée des Histoires extraordinaires d’E. A. Poe, édition de 1884.<br />
redressant le membre avec une force inconcevable allongea <strong>au</strong><br />
docteur Ponnonner une ruade qui eut pour effet de décocher ce<br />
gentleman, comme le projectile d’une catapulte, et de l’envoyer<br />
dans la rue à travers une fenêtre.<br />
Nous nous précipitâmes en masse pour rapporter les débris mutilés<br />
de l’infortuné ; mais nous eûmes le bonheur de le rencontrer sur<br />
l’escalier, remontant avec une inconcevable diligence8 , bouillant de<br />
la plus grande ardeur philosophique, et plus que jamais frappé de la<br />
nécessité de poursuivre nos expériences avec rigueur et avec zèle.<br />
Ce fut donc d’après son conseil que nous fîmes sur-le-champ<br />
une incision profonde dans le bout <strong>du</strong> nez <strong>du</strong> sujet ; et le docteur y<br />
jetant des mains impétueuses9 , le fourra violemment en contact avec<br />
le fi l métallique. Moralement et physiquement, – métaphoriquement<br />
et littéralement10 , – l’effet fut électrique. D’abord le cadavre ouvrit<br />
les yeux et les cligna très rapidement pendant quelques minutes,<br />
comme M. Barnes dans la pantomime11 ; puis il éternua ; en troisième<br />
lieu, il se dressa sur son séant12 ; en quatrième lieu, il mit son poing<br />
sous le nez <strong>du</strong> docteur Ponnonner ; enfi n, se tournant vers MM.<br />
Gliddon et Buckingham, il leur adressa, dans l’égyptien le plus<br />
pur, le discours suivant :<br />
– Je dois vous dire, gentlemen, que je suis <strong>au</strong>ssi surpris que<br />
mortifi é13 de votre con<strong>du</strong>ite.<br />
EDGAR ALLAN POE, Petite Discussion avec une momie,<br />
trad. Charles B<strong>au</strong>delaire, 1845.<br />
Dégager l’essentiel des deux textes SOCLE C1, C5<br />
❯ Expliquez quels sont les points communs et les différences entre les<br />
momies des deux textes (p. 84 à 86).<br />
❯ Pourquoi les <strong>au</strong>teurs choisissent-ils d’employer un vocabulaire scientifi<br />
que très précis dans des récits <strong>fantastique</strong>s ?<br />
Vers l’épreuve d’évaluation<br />
d’<br />
➺ Présenter un bref compte ren<strong>du</strong><br />
d’Histoire des arts<br />
Ce travail s’effectue par petits groupes qui se<br />
chargent, chacun, d’un thème d’étude. Chaque<br />
groupe dégage <strong>du</strong> dossier les liens entre l’antique<br />
et le <strong>fantastique</strong> et présente son travail à<br />
la classe en trois ou quatre minutes.<br />
Thème 1<br />
Le <strong>fantastique</strong><br />
s’appuie sur<br />
l’archéologie<br />
Recherchez dans les<br />
textes et documents <strong>du</strong><br />
dossier des exemples<br />
de descriptions<br />
précises de sites<br />
archéologiques,<br />
de vocabulaire<br />
scientifi que<br />
et technique.<br />
HUBERT ROBERT, Ruines romaines, 1776.<br />
Musée <strong>du</strong> Petit Palais, Paris.<br />
Préparation<br />
• En vous aidant des conseils propres à chaque thème, retrouvez<br />
dans les extraits de nouvelles <strong>fantastique</strong>s <strong>du</strong> dossier<br />
un (ou des) passage(s) qui illustre(nt) votre thème d’étude.<br />
• Choisissez dans le dossier des œuvres d’art qui conviennent<br />
à votre thème d’étude.<br />
• Utilisez un vocabulaire précis pour parler des œuvres d’art.<br />
• Soulignez bien le lien entre l’antique et le <strong>fantastique</strong>.<br />
• Organisez la présentation de votre compte ren<strong>du</strong> et répartissez-vous<br />
la parole.<br />
Présentation<br />
• Présentez brièvement votre compte ren<strong>du</strong> à la classe.<br />
• Pensez à citer des passages, en en faisant une lecture claire<br />
et expressive, et à mentionner des œuvres d’art.<br />
Dégager l’essentiel SOCLE C1<br />
❯ Après le passage de tous les groupes, rédigez indivi<strong>du</strong>ellement<br />
un paragraphe de bilan sur les liens entre l’antique<br />
et le <strong>fantastique</strong>.<br />
Thème 2<br />
Le <strong>fantastique</strong><br />
brouille les<br />
repères <strong>du</strong> temps<br />
Recherchez dans les<br />
textes et documents<br />
<strong>du</strong> dossier des exemples<br />
de remontée<br />
dans le temps et de<br />
perte des repères<br />
temporels qui<br />
créent<br />
une atmosphère<br />
<strong>fantastique</strong>.<br />
Vases canope,<br />
XXI e dynastie.<br />
British Museum, Londres.<br />
Fiche-méthode<br />
Thème 3<br />
Le <strong>fantastique</strong><br />
ressuscite les morts<br />
Recherchez dans les<br />
textes et documents <strong>du</strong><br />
dossier des exemples<br />
d’éléments enfouis<br />
sous terre ou sous<br />
des bandelettes,<br />
d’apparitions et de<br />
morts-vivants<br />
qui créent une<br />
atmosphère<br />
<strong>fantastique</strong>.<br />
Présenter un compte ren<strong>du</strong><br />
d’Histoire des arts SOCLE C1, C5, C7<br />
Je dois être capable :<br />
– de situer des œuvres littéraires et artistiques,<br />
des découvertes scientifi ques ;<br />
– d’identifi er les éléments d’une œuvre d’art<br />
(matéri<strong>au</strong>x, formes…) ;<br />
– d’effectuer des rapprochements entre des<br />
œuvres ;<br />
– d’utiliser un vocabulaire artistique précis et<br />
adapté.<br />
Je dois savoir :<br />
– rendre compte de mon travail à la classe ;<br />
– adapter ma prise de parole (être <strong>au</strong>dible, utiliser<br />
un nive<strong>au</strong> de langue correct, varier le ton,<br />
retenir l’attention).<br />
86 87<br />
Dossier 3 • L’antique <strong>au</strong> <strong>cœur</strong> <strong>du</strong> <strong>fantastique</strong>