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Le FORUM - University of Maine

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(La langue et l’indentité suite de page 20)<br />

<strong>Le</strong> forum Farog, une publication franco-américaine bilingue, a récemment publié une phrase<br />

indiquant « I tink dat I should always have da rite to spoke my mudder tonge wen I wan to ».<br />

En ce qui concerne la littérature produite par les Franco-Américains, de nombreuses publications<br />

sont en anglais, beaucoup d’autres sont bilingues et de plus en plus de publications sont<br />

écrites uniquement en français. Ce qui est intéressant ​des publications en anglais, c’est que, bien<br />

qu’elles soient rédigées en anglais, leur sujet traite explicitement de questions francophones.<br />

Par exemple, les sujets se concentrent autour de l’Église, autour des familles avec<br />

de nombreux enfants dont les mères restent au foyer pour élever les enfants. <strong>Le</strong>s pères, qui<br />

travaillent dur, reçoivent une paye minuscule et pourtant restent silencieux et continuent<br />

à maintenir leur place comme «petits pains». Fait intéressant, ces questions évoquent les<br />

thèmes canadiens français du 19 e siècle. <strong>Le</strong>s Québécois d’aujourd’hui n’en sont plus aux<br />

questions de la puissance de l’Église et de l’idéologie des sphères séparées, mais les Franco-<br />

Américains ancrent encore l’essentiel de leur travail en fonction de ces thèmes. Lors de la<br />

conférence du Rassemblement, Louder Dean, pr<strong>of</strong>esseur à l’Université Laval, a fait remarquer<br />

que « la communauté francophone de la Nouvelle-Angleterre est étonnamment similaire<br />

à celle du Québec». Il a commenté qu’« en fait, elle ressemble peut-être plus au Québec que<br />

le Québec se ressemble à lui même. La religion est beaucoup plus forte ici. Et quel autre<br />

groupe ethnique aux États-Unis peut dire qu’ils vivent juste à côté de leur mère patrie ».<br />

Cependant, il y a des inconvénients visibles à avoir une communauté de francophones<br />

qui ne peuvent pas tous parler, lire ou écrire le français. Yvon Labbé, qui défend fortement<br />

l’idée que le langage n’est pas synonyme d’identité, a également déclaré que « sans le français,<br />

[sa] langue affective est coupée ». Cela a été et continue d’être un problème pour les<br />

Franco-Américains. Certains sont encore vivants de la migration de masse de début du 20 e<br />

siècle. Ces Franco-Américains ont été contraints à cesser de parler leur langue maternelle<br />

et à apprendre à fonctionner uniquement en anglais. Par conséquent, ils ont été contraints<br />

à perdre une partie centrale de la façon dont ils interagissent avec le monde. Comme leurs<br />

enfants, ils ont peut-être parlé français à la maison, mais dans des conditions où il s’agissait<br />

d’une langue interdite en public. Par conséquent, cette génération a appris que sa façon<br />

d’interagir avec le monde était incorrecte. Cela crée de toute évidence un problème fondamental<br />

en matière de légitimité émotionnelle. Sabrina Plante, dans un article sur la défense<br />

de la langue française, écrit que « Chaque langue de cette planète constitue un apport incommensurable<br />

à l’humanité. Chacune d’entre elles, par ses mots, ses expressions, évoque<br />

et témoigne d’une façon distincte de concevoir et de vivre cette humanité 10 ». Labbé et de<br />

nombreux Franco-Américains sont d’accord avec ce sentiment et naviguent encore à travers<br />

la barrière de l’impossibilité d’interagir avec leur monde en utilisant un langage instinctif.<br />

La position du Franco-Américain en tant que francophone légitime est précaire.<br />

Psychologiquement et géographiquement, d’un côté de la frontière, ils se voient refuser un<br />

héritage ethnique parce qu’ils sont blancs. Aux États-Unis, où le concept de race est encore<br />

considéré comme une distinction biologique, le fait d’être blanc indique une puissance et un<br />

statut privilégié qui les excluent du droit au patrimoine qu’ont les autres groupes ethniques<br />

distincts. De l’autre côté de la frontière, les Québécois francophones refusent aux Franco Américains<br />

la reconnaissance d’un héritage ethnique puisque beaucoup ne parlent pas français.<br />

Au Canada, l’attitude est différente envers la race et l’ethnicité. Généralement, beaucoup<br />

d’importance est placée sur le langage et sur l’héritage ethnique. Il y a plusieurs Autochtones,<br />

Irlandais et Français qui s’identifient par leur nationalité ancestrale plutôt que par la<br />

couleur de leur peau. Donc psychologiquement, les perceptions américaine et québécoise de<br />

l’ethnicité empêchent les Franco-Américains de vivre pleinement leur identité francophone.<br />

<strong>Le</strong>s deux côtés de la question peuvent être illuminés par Maria Chapdelaine, un<br />

roman québécois fondateur. Il a été écrit pendant la première partie du 20 e siècle, quand<br />

les romans s’inspiraient des enjeux du nationalisme, de la langue et des valeurs typiquement<br />

canadiennes françaises 11 . <strong>Le</strong>s questions de l’authenticité et de l’identité étaient<br />

centrales et celles-ci persistent encore aujourd’hui. Prenons le roman Maria Chapdelaine,<br />

lequel insiste sur l’importance de conserver la pureté du mode de vie canadien fran-<br />

7 Ibid, p. 42.<br />

8 Ibid, p. 42. (Ma traduction)<br />

9 Ibid, p. 42. (Ma traduction)<br />

10 S. Plante, <strong>Le</strong> franais français au Québec - La langue fait-elle encore réagir? ».<br />

11 Voir M. Biron, Histoire de la littérature québécoise », , p. 16-17.<br />

(Suite page 22)<br />

PRINTEMPS/SPRING<br />

21

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