Une démarche exemplaire
Supplément Haut-Rhin Magazine n° 17 "Mémoire et Citoyenneté"
Supplément Haut-Rhin Magazine n° 17 "Mémoire et Citoyenneté"
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Sommaire<br />
3 Les Archives<br />
luxe ou nécessité<br />
Interview de Jean-Luc Eichenlaub,<br />
Directeur des Archives Départementales<br />
du Haut-Rhin<br />
4 Trésors d’archives<br />
Les pièces maîtresses de l’exposition<br />
6 Le procès de Nuremberg<br />
Un enseignement pour<br />
les générations futures<br />
8 En mémoire de l’esclavage<br />
Les quatre figures<br />
de l’abolition de l’esclavage<br />
10 L’esclavage aujourd’hui<br />
Le combat pour les Droits de<br />
l’Homme continue<br />
11 Concours Mémoire<br />
et citoyenneté<br />
Pour tous les collégiens<br />
du Haut-Rhin<br />
<strong>Une</strong> <strong>démarche</strong><br />
<strong>exemplaire</strong><br />
Le Département du Haut-Rhin s’engage dans une <strong>démarche</strong><br />
<strong>exemplaire</strong> en terme de « Mémoire et citoyenneté »,<br />
titre éponyme du cycle d’expositions qui démarre à la<br />
rentrée 2007. En trois mois il propose d’aborder à travers<br />
l’Histoire des notions fondamentales telles que la justice,<br />
la solidarité ou les Droits de l’Homme. En ouverture,<br />
l’exposition « Trésors des Archives Départementales »<br />
permet d’admirer pour la première fois des pièces exceptionnelles,<br />
de la plus ancienne datant du VI ème siècle aux<br />
documents les plus contemporains. L’exposition suivante<br />
décrit l’élaboration et le déroulement du procès des chefs<br />
nazis au Tribunal Militaire International de Nuremberg qui<br />
s’est ouvert en novembre 1945. Cette exposition se veut un<br />
outil pédagogique exceptionnel en faveur de la paix et du<br />
respect de tous les peuples. Plus largement, la dernière<br />
exposition de ce cycle présente les grandes figures historiques<br />
dont les engagements ont permis d’abolir<br />
l’esclavage et de faire avancer les Droits de l’Homme.<br />
Mémoire et citoyenneté s’adresse à tous les Haut-Rhinois.<br />
Mais une attention toute particulière est accordée au<br />
public scolaire, largement invité à participer aux animations<br />
et conférences. Les leçons du passé constituent en<br />
effet pour la jeunesse haut-rhinoise, citoyens de demain, un<br />
outil de discernement et une base de réflexion<br />
pour préparer l’avenir.<br />
Retrouvez le programme des rencontres,<br />
conférences, débats sur www.cg68.fr<br />
2<br />
haut-rhin
Les Archives<br />
luxe ou nécessité<br />
Questions à Jean-Luc Eichenlaub,<br />
directeur des Archives Départementales<br />
du Haut-Rhin<br />
Jean-Luc Eichenlaub, rappeleznous<br />
les missions des Archives<br />
Départementales<br />
On peut les résumer en 5 points :<br />
contrôler, collecter, conserver, classer<br />
et communiquer l’ensemble des<br />
documents dignes d’intérêt.<br />
Comment procédez-vous pour<br />
faire le tri entre l’utile et le futile,<br />
entre ce qui mérite d’être conservé<br />
et le reste ?<br />
Notre époque a connu un accroissement<br />
sans précédent de la production<br />
d’archives publiques et privées.<br />
Chaque habitant en génère un mètre<br />
linéaire par an. Face à cette inflation,<br />
je signe chaque année des visas<br />
d’élimination pour 5 km de documents.<br />
Malgré cela, il nous arrive 600<br />
mètres supplémentaires d’archives<br />
par an. Les Archives Départementales<br />
du Haut-Rhin abritent aujourd’hui<br />
24 km de documents dont près des<br />
deux tiers sont postérieurs à 1945.<br />
Mais ce qui paraît essentiel aujourd’hui,<br />
ne le sera peut-être plus<br />
demain et vice versa ?<br />
C’est exact. Mais il faut savoir qu’à<br />
toutes les époques, des documents<br />
d’intérêt majeur ont échappé aux archives,<br />
et que parallèlement ceux que<br />
nous conservons ne sont pas nécessairement<br />
les plus intéressants. Il faut<br />
savoir également que la plupart des<br />
documents dont l’exploitation nous<br />
livre les plus riches informations n’ont<br />
pas été créés pour l’usage et l’analyse<br />
qui en sont faits aujourd’hui. Un<br />
exemple : les registres paroissiaux, documents<br />
exceptionnels pour tout<br />
chercheur en généalogie, avaient pour<br />
fonction d’éviter les mariages consanguins.<br />
En fait, comme le nombre de<br />
sujets de recherches est inépuisable.<br />
il nous faudrait, en toute logique, tout<br />
conserver. Mais tout conserver revient<br />
à être submergé. Nous sommes là au<br />
cœur d’un terrible paradoxe, parfaitement<br />
insurmontable !<br />
Les nouveaux supports et les techniques<br />
informatiques vont-ils<br />
venir au secours des archivistes ?<br />
Je n’en suis pas si certain. Des supports<br />
que l’on nous garantissait stables sur<br />
une longue période le sont en réalité<br />
bien moins que prévu. Les CD gravés<br />
en particulier perdent jusqu’à 20 %<br />
d’informations au bout de 7 ans !<br />
Nous nous heurtons par ailleurs à un<br />
autre problème du fait de<br />
l’obsolescence programmée des techniques<br />
informatiques. Il nous est d’ores<br />
et déjà impossible d’exploiter certains<br />
documents, les outils de lecture adéquats<br />
n’étant plus commercialisés !<br />
Très globalement, on peut dire que la<br />
logique informatique n’est guère compatible<br />
avec le besoin d’archiver.<br />
D’ailleurs, il est significatif que pour<br />
certains informaticiens, archiver veut<br />
dire détruire.<br />
Est-ce inquiétant ?<br />
Oui. D’autant que de plus en plus<br />
d’administrations optent pour le tout<br />
informatique. Depuis le 1 er juin de cette<br />
année, le cadastre n’est plus tenu à<br />
jour sous forme papier. Et il en sera<br />
de même pour le livre foncier en 2009.<br />
Et ce n’est pas là notre seul motif<br />
d’inquiétude. Tous les papiers fabriqués<br />
depuis le milieu du 19 e siècle nous<br />
posent d’énormes problèmes de<br />
conservation. Nous avons aujourd’hui<br />
à gérer une situation bien étonnante:<br />
tenter de sauver de la destruction les<br />
livres et les documents les plus récents<br />
alors que les plus anciens traversent<br />
les siècles sans grands signes<br />
d’altération.<br />
Pascal Herrscher<br />
“ Les documents<br />
anciens sont les plus<br />
faciles à conserver ! ”<br />
haut-rhin 3
Trésors d’archives<br />
Des documents et<br />
témoignages fondateurs<br />
de l’identité de notre<br />
département à découvrir<br />
du 10 au 28 septembre<br />
au Conseil Général,<br />
à Colmar.<br />
Pascal Herrscher<br />
Ouverture exceptionnelle<br />
les 15 et 16 septembre<br />
dans le cadre des Journées<br />
Européennes du Patrimoine<br />
1<br />
Privilèges de l’Abbaye<br />
de Murbach (772)<br />
Séduit par le charisme d’un moine<br />
irlandais, un noble de la région lui offre<br />
des terres. Le Saint Homme y<br />
fonde l’Abbaye de Murbach en 730.<br />
La réussite de l’implantation d’un<br />
établissement religieux est fortement<br />
tributaire des privilèges qu’il<br />
peut obtenir. En 772, par ces diplômes<br />
solennels, Charlemagne, qui n’est<br />
alors que Roi et pas encore Empereur,<br />
confirme les privilèges accordés<br />
à l’Abbaye de Murbach par ses<br />
prédécesseurs.<br />
Bulle pontificale<br />
d’Alexandre III pour<br />
l’Abbaye de Pairis (1160)<br />
C’est à Léon IX, Pape originaire<br />
d’Eguisheim, que l’on doit l’invention<br />
de la bulle qui, comme les privilèges,<br />
garantit la protection d’un établissement<br />
religieux par le Saint-Siège.<br />
La bulle pontificale désigne autant<br />
le document que le sceau en plomb,<br />
garant d’authenticité, et qui représente<br />
les visages de Saint-Pierre et<br />
de Saint-Paul ainsi que le nom du<br />
Pape.<br />
3<br />
Plan du ban de Saint-Gilles<br />
Lorsque la Ville de Colmar devient<br />
propriétaire en 1575 du prieuré<br />
de Saint-Gilles près de Wintzenheim,<br />
elle fait borner et dresser une carte<br />
de ses nouveaux biens. Ce plan est<br />
l’un des plus anciens à être conservé<br />
aux Archives Départementales du<br />
Haut-Rhin et la première représentation<br />
connue du château du<br />
Hohlandsbourg.<br />
2<br />
4<br />
Carte du département<br />
du Haut-Rhin entre<br />
1800 et 1814<br />
C’est la Révolution qui crée les<br />
départements. <strong>Une</strong> dizaine d’années<br />
plus tard, ceux-ci sont structurés en<br />
arrondissements avec la création des<br />
préfectures et sous-préfectures. La<br />
physionomie du Haut-Rhin est alors<br />
loin de celle que nous lui connaissons<br />
aujourd’hui. Entre 1800 et 1814<br />
le Haut-Rhin comprend une partie<br />
de l’actuel canton suisse du Jura, du<br />
département du Doubs et surtout<br />
de l’actuel Territoire de Belfort qui<br />
fait partie de notre département<br />
jusqu’en 1871.<br />
4<br />
haut-rhin
“ Les archives,<br />
entre mémoire<br />
et histoire”<br />
5 6<br />
Dessin aux Chinois<br />
Création des établissements<br />
Haussmann (Logelbach)<br />
vers 1780<br />
Que ce soit à Mulhouse, dans les<br />
vallées vosgiennes ou à Colmar c’est<br />
au textile que notre Département<br />
doit son développement industriel.<br />
Cet élégant motif chinois en est la<br />
preuve : les artistes dessinateurs<br />
étaient les incontestables aristocrates<br />
des ouvriers du textile. Leurs<br />
appointements annuels pouvaient<br />
s’élever à 6 000 livres alors que ceux<br />
d’un manœuvre qualifié ne dépassaient<br />
pas les 500 livres.<br />
Modèle en bois<br />
d’une pièce de mine<br />
Aucune activité humaine n’a marqué<br />
aussi fortement de son empreinte<br />
le paysage haut-rhinois que<br />
l’extraction de la potasse, allant<br />
jusqu’à donner naissance à une nouvelle<br />
entité géographique, sociale et<br />
économique. Un bassin minier de<br />
200 km 2 . Des cités dotées d’écoles,<br />
d’équipements culturels, sociaux et<br />
sportifs indépendants. Jusqu’à 13 000<br />
mineurs au début des années 60,<br />
dont de très nombreux ouvriers polonais<br />
réputés pour leur savoir-faire.<br />
Tout en confiant aux Archives la responsabilité<br />
des sources de notre histoire, la loi du<br />
3 janvier 1979, les érige également en<br />
gardien de la mémoire. Des missions a priori<br />
complémentaires mais qui s’avèrent en réalité<br />
être contradictoires, voire difficilement<br />
compatibles. Car, autant la fonction de<br />
conservation et de communication de tous<br />
les documents qui peuvent servir à écrire<br />
l’histoire semble claire et sans ambiguïté,<br />
autant le pôle mémoriel pose problème. Car<br />
la mémoire ne peut être que celle d’un individu<br />
ou d’un groupe, elle ne peut donc être<br />
que partielle. L’histoire, au contraire, a une<br />
vocation plus universelle. Or, ce qui a une<br />
valeur pour l’individu n’a pas nécessairement<br />
la même pour la collectivité. Inversement,<br />
ce qui aujourd’hui n’a d’intérêt que<br />
pour une minorité peut demain être essentiel<br />
pour la société. La mémoire de surcroît<br />
peut être trompeuse, sélective, influençable.<br />
Elle peut même être négation de l’histoire.<br />
Mémoire et histoire. Ce couple a priori irréductible,<br />
il nous faut pourtant le faire cohabiter<br />
et dialoguer, au risque du pire écueil :<br />
l’oubli. Car une société qui veut durer doit se<br />
défendre contre l’oubli et l’éphémère, doit<br />
protéger et consolider ce qui mérite de l’être,<br />
doit célébrer, apprivoiser le passé pour<br />
mieux vivre le présent. L’histoire et la mémoire<br />
de tous ceux qui nous ont précédés<br />
constituent un formidable vivier et stock<br />
d’expériences à consulter, critiquer, mettre<br />
en perspective, et ainsi nous trouver moins<br />
démunis devant l’avenir. « Les archives »<br />
écrit l’historien Krzystof Pomian « ne sont<br />
nullement une institution passéiste. Le lien<br />
qu’elles entretiennent avec le passé est<br />
subordonné à leur orientation vers l’avenir.<br />
Contrairement aux apparences, les archives<br />
modernes sont, comme les musées, une<br />
institution futurocentrique ».<br />
haut-rhin 5
Nuremberg<br />
La naissance du droit<br />
international<br />
Le tribunal militaire international<br />
de Nuremberg<br />
restera dans l’Histoire<br />
comme l’acte fondateur<br />
du droit pénal international.<br />
Pour la première fois,<br />
les quatre grands – Etats-<br />
Unis, Grande Bretagne,<br />
URSS et France –<br />
s’entendent pour juger de<br />
crimes perpétrés en temps<br />
de guerre. Le monde entier<br />
entend alors parler de<br />
Crimes contre l’Humanité.<br />
Catherine Robet<br />
Exposition<br />
“Procès de Nuremberg”<br />
Réalisée par le Mémorial de la Shoah à Paris<br />
du 8 au 26 octobre<br />
à Colmar au Conseil Général<br />
Le Procureur<br />
américain en chef,<br />
Robert H. Jackson,<br />
présente le chef<br />
d’accusation de<br />
Conspiracy.<br />
En novembre 2005, l’Organisation<br />
des Nations Unies (ONU) a adopté<br />
une résolution dans laquelle elle<br />
« prie instamment les États Membres<br />
d’élaborer des programmes éducatifs<br />
qui graveront dans l’esprit des<br />
générations futures les enseignements<br />
de l’Holocauste afin d’aider à<br />
prévenir les actes de génocide ». Réalisée<br />
par le Mémorial de la Shoah à<br />
Paris, l’exposition « Le procès des<br />
grands criminels de guerre devant<br />
le Tribunal Militaire International –<br />
Nuremberg », présentée au Conseil<br />
Général du Haut-Rhin en novembre<br />
2007, s’inscrit dans cette <strong>démarche</strong>.<br />
En quatre parties, elle décrit comment<br />
s’est déroulé le premier Tribunal<br />
Militaire International de<br />
l’Histoire. Le procès durera un an et<br />
sera suivi par douze tribunaux<br />
d’occupation dont celui des médecins<br />
nazis.<br />
Nommer l’innommable<br />
Dès 1941, le Premier Ministre britannique<br />
Winston Churchill réclame que<br />
les criminels nazis soient exécutés dès<br />
Le Palais de Justice de Nuremberg.<br />
leur arrestation. Les Alliés ne sont pas<br />
de cet avis et choisissent de créer un<br />
tribunal international qui servira<br />
d’exemple pour les générations futures.<br />
Au fur et à mesure que les<br />
preuves sont réunies pour la préparation<br />
du procès, le chef d’accusation de<br />
« Conspiracy » (complot, association<br />
de malfaiteurs…) est trop faible pour<br />
qualifier les actes des criminels nazis.<br />
Quatre chefs d’accusation sont<br />
Nuremberg S.A / SIPA.<br />
Le banc des accusés<br />
6<br />
haut-rhin
USHMM, courtesy of National Archives. © Domaine Public.<br />
Vue du couloir de la prison où sont<br />
détenus les grands criminels de<br />
guerre. Devant chaque cellule, une<br />
sentinelle surveille en permanence.<br />
alors définis, dont le crime<br />
contre l’humanité. La médiatisation<br />
du procès est<br />
mondiale. Tous les grands<br />
journalistes sont à Nuremberg,<br />
comme Ernest Hemingway<br />
ou Joseph<br />
Kessel. C’est une première<br />
également sur le plan technologique.<br />
L’entreprise IBM<br />
installe un système qui permet<br />
une traduction simultanée<br />
en quatre langues. Les<br />
interprètes actionnent une<br />
lumière rouge ou jaune pour<br />
indiquer à l’orateur de parler<br />
plus lentement. Le monde<br />
entier suit Nuremberg dans<br />
les journaux.<br />
L’héritage<br />
de Nuremberg<br />
Après Nuremberg, une<br />
convention internationale<br />
pour la prévention et la<br />
répression du crime de<br />
génocide est adoptée par<br />
l’ONU. A part le Tribunal<br />
Militaire International à<br />
dominante américaine qui<br />
a jugé les criminels de guerre japonais,<br />
jamais plus un tribunal comme<br />
celui de Nuremberg ne sera constitué.<br />
L’ONU met alors en place des<br />
tribunaux temporaires, comme le<br />
Tribunal Pénal International (TPI)<br />
pour l’ex-Yougoslavie en 1993 ou le<br />
TPI pour le Rwanda en 1994. Mais<br />
ces tribunaux ont des compétences<br />
limitées et leur efficacité est contestée.<br />
En 1998, le Statut de Rome annonce<br />
la création de la Cour<br />
Pénale Internationale qui verra le<br />
jour en 2002 à La Haye. Ses compétences,<br />
plus importantes que les TPI,<br />
permettent de juger du crime de génocide,<br />
du crime contre l’humanité,<br />
du crime de guerre et du crime<br />
d’agression. Aujourd’hui, cent quatre<br />
Etats acceptent l’autorité de la<br />
Cour Pénale Internationale.<br />
Les 4 chefs<br />
d’accusation<br />
de Nuremberg<br />
Conspiracy : complot<br />
Crime contre la paix : guerre<br />
d’agression, en violation des traités<br />
et des accords internationaux<br />
Crime de guerre : violation des lois<br />
et coutumes de la guerre (assassinat,<br />
mauvais traitement, destruction de<br />
villages, travaux forcés…) à l’encontre<br />
des populations civiles ou des prisonniers<br />
de guerre<br />
Crime contre l’Humanité :<br />
assassinat, extermination, esclavage,<br />
déportation, acte inhumain commis<br />
à l’encontre de la population civile,<br />
persécution pour motifs religieux,<br />
politiques ou raciaux.<br />
© Nuremberg S.A / SIPA.<br />
“ Nuremberg a<br />
donné aux malades<br />
le droit de consentir<br />
ou non à un traitement<br />
médical<br />
”<br />
Dr. Claire Ambroselli,<br />
chercheur à l’Institut<br />
National de la Santé<br />
et de la Recherche<br />
Médicale (INSERM)<br />
Qu’est-ce que Nuremberg a changé<br />
dans la médecine ?<br />
Le code de Nuremberg impose aux<br />
médecins d’obtenir le consentement<br />
volontaire du malade au traitement<br />
qui lui est fait. Le malade a le droit<br />
d’arrêter toute expérience médicale dès<br />
qu’elle constitue pour lui une gêne<br />
physique ou morale. On est donc passé<br />
d’une médecine d’expérimentation à<br />
une médecine de recherche qui associe<br />
le malade. Nuremberg a permis de démontrer<br />
qu’un médecin qui pratique<br />
des expériences au risque de provoquer<br />
la mort ou l’infirmité n’est plus un<br />
médecin mais un vrai criminel.<br />
En quoi la médecine a permis de définir<br />
le crime contre l’humanité ?<br />
La pensée médicale engage la pensée<br />
philosophique de l’homme, la condition<br />
et la dignité humaine. Le crime contre<br />
l’humanité n’est pas seulement un<br />
meurtre, mais la volonté d’anéantir<br />
un peuple en lui déniant le droit à la<br />
dignité humaine. C’est dans cet état<br />
d’esprit que pratiquaient les médecins<br />
nazis. Cela va au-delà de la persécution<br />
et de l’extermination. Les nazis mélangeaient<br />
les cendres des cadavres de<br />
façon à ce que les Juifs perdent leur<br />
dignité jusque dans la mort.<br />
haut-rhin 7
En mémoire<br />
de l’esclavage<br />
Toussaint Louverture,<br />
l’Abbé Grégoire, Victor<br />
Schoelcher et soixantedix-huit<br />
habitants de la<br />
commune de Champagney<br />
ont joué un rôle<br />
primordial dans<br />
l’abolition de l’esclavage.<br />
Leur histoire est étroitement<br />
liée à quatre communes<br />
ou sites du Grand<br />
Est de la France. Depuis<br />
2004, la « Route des abolitions<br />
de l’esclavage et<br />
des Droits de l’Homme »<br />
unit ces lieux de mémoire.<br />
Exposition<br />
“Routes de l’abolition<br />
de l’esclavage”<br />
du 5 au 23 novembre<br />
à Colmar au Conseil Général<br />
La Maison de la Négritude et<br />
des Droits de l’Homme à<br />
Champagney<br />
A la veille de la Révolution, les villageois<br />
rédigent leurs cahiers de<br />
doléances. Ceux de Champagney, en<br />
Haute-Saône, s’attèlent à cette<br />
tâche lorsqu’ils sont interpellés par<br />
un officier de la Garde Royale qui leur<br />
raconte le sort des esclaves noirs dans<br />
les Antilles. Profondément émus, ils<br />
ajoutent un article à leurs doléances<br />
pour demander l’abolition de<br />
l’esclavage. C’est la première étincelle<br />
d’un mouvement populaire<br />
contre l’esclavage. A Champagney, la<br />
Maison de la Négritude et des Droits<br />
de l’Homme rend hommage à ces<br />
paysans humanistes.<br />
Le mémorial Toussaint<br />
Louverture au Fort de Joux<br />
A la Révolution, la Déclaration des<br />
Droits de l’Homme et du Citoyen<br />
attise les révoltes d’esclaves dans les<br />
colonies. A Saint-Domingue, le<br />
Nègre Toussaint prend la tête d’une<br />
violente insurrection et se rallie à<br />
l’Espagne contre la France. Pour mater<br />
ce soulèvement, une seule solution<br />
: proclamer l’abolition de<br />
l’esclavage. Toussaint Louverture, dès<br />
lors acquis à la nouvelle République,<br />
est nommé général en chef des armées<br />
de Saint-Domingue. Mais<br />
l’esclavage est vite rétabli. Toussaint<br />
Louverture est arrêté, envoyé en<br />
France, au Fort de Joux, dans le Doubs.<br />
Ce château, où reposent ses restes,<br />
est aujourd’hui un des hauts lieux<br />
de la mémoire du monde Noir.<br />
« La route de l’esclave », initiée par<br />
l’<strong>Une</strong>sco en 1994, a mis en lumière la plus<br />
grande tragédie de l’histoire humaine. En<br />
2001, la République Française adoptait la<br />
loi « tendant à la reconnaissance de la<br />
traite négrière et de l’esclavage comme<br />
crime contre l’humanité ». En 2004, les<br />
Nations Unies proclamaient l’« année de<br />
la commémoration internationale de la<br />
lutte contre l’esclavage et de son abolition<br />
». « La route des abolitions de<br />
l’esclavage et des Droits de l’Homme » est<br />
la contribution de la France à cette commémoration.<br />
8<br />
haut-rhin
La Maison Abbé<br />
Grégoire à Emberménil<br />
Le petit curé<br />
d’Emberménil en<br />
Meurthe-et-Moselle<br />
est de tous<br />
les combats : celui<br />
de<br />
l’intégration des<br />
Juifs, celui de la liberté<br />
des cultes,<br />
celui de la séparation<br />
de l’Eglise et de l’Etat… Elu<br />
évêque, il mène un parcours politique<br />
exceptionnel et devient l’une<br />
des grandes figures de la Révolution<br />
Française. Il est l’auteur de l’article<br />
Premier de la Déclaration des Droits<br />
de l’Homme et du Citoyen « Les<br />
Hommes naissent et demeurent libres<br />
et égaux en droits ». Mais il voue<br />
son combat le plus acharné à<br />
l’intégration<br />
des Noirs dans la République. A<br />
Emberménil, dans sa maison, treize<br />
vitraux racontent son destin hors du<br />
commun.<br />
La Maison Schoelcher<br />
à Fessenheim<br />
L’abolition définitive<br />
de<br />
l’esclavage, c’est<br />
lui. Nous<br />
sommes en<br />
1848. Victor<br />
Schoelcher, originaire de Fessenheim<br />
dans le Haut-Rhin est un immense<br />
homme politique. Lui qui n’était parti<br />
aux Antilles que pour y vendre les<br />
porcelaines de la fabrique familiale<br />
est bouleversé par l’effroyable réalité<br />
du système esclavagiste. Il en fait<br />
le combat de sa vie. Député, sénateur,<br />
secrétaire d’Etat, il milite aussi<br />
pour l’amélioration du sort des<br />
femmes, pour l’abolition de la peine<br />
de mort, pour la liberté de la presse<br />
et pour la laïcité. A Fessenheim, la<br />
maison Victor Schoelcher présente<br />
son œuvre.<br />
“ Il n’est jamais<br />
trop tard pour<br />
l’histoire”<br />
Lemy-Lemane Coco<br />
Poète, écrivain<br />
Vous avez écrit sur l’esclavage, vous<br />
témoignez dans les écoles, vous serez<br />
présent pour en parler au Conseil Général<br />
du Haut-Rhin lors de<br />
l’opération « Mémoire et citoyenneté<br />
», pourquoi ?<br />
D’abord, parce que c’est l’histoire de<br />
ma famille. Il était important que je la<br />
connaisse, que j’en parle à mes<br />
frères et sœurs, à mes enfants. Ensuite,<br />
parce que c’est l’histoire de tout un<br />
peuple. <strong>Une</strong> histoire qui a longtemps<br />
été occultée. Volontairement ou involontairement.<br />
Aujourd’hui, il faut que<br />
tout le monde sache : c’est l’histoire de<br />
France, c’est l’histoire du monde. Or, il<br />
n’est jamais trop tard pour l’histoire.<br />
Elle nous permet de mieux nous<br />
comporter, d’anticiper des situations<br />
similaires qui pourraient survenir,<br />
d’endiguer les avatars de la vie...<br />
L’exposition présentée au Conseil Général<br />
du Haut-Rhin est une des actions de<br />
mémoire menée dans le cadre de « La<br />
route des abolitions de l’esclavage et des<br />
Droits de l’Homme », soutenue notamment<br />
par le Sénat, l’<strong>Une</strong>sco et le Ministère<br />
de l’Outre-mer. Elle a été présentée<br />
pour la première fois en 2006 au Palais<br />
du Luxembourg, à Paris. Ses vingt-sept<br />
panneaux offrent une lecture historique<br />
complète du processus de la traite négrière<br />
et de l’esclavage, du combat pour<br />
leur abolition et de la naissance du combat<br />
pour les Droits de l’Homme.<br />
haut-rhin 9
L’esclavage moderne<br />
Abolition, histoire ancienne,<br />
littérature sont<br />
les termes qui viennent<br />
à l’esprit lorsque l’on<br />
évoque l’esclavage.<br />
Pourtant, régulièrement<br />
l’actualité nous<br />
rappelle que cette<br />
pratique existe<br />
toujours et combien<br />
elle a su devenir<br />
« moderne ».<br />
Marie-Odile Kreidl-Haegy<br />
Travail forcé, servitude pour dettes,<br />
mariages forcés, ateliers clandestins,<br />
exploitation sexuelle sont autant de<br />
formes d’esclavage qui persistent<br />
dans notre monde contemporain.<br />
Tous les pays, toutes les régions du<br />
monde et tous les types d’économie<br />
y sont confrontés. Selon l’ONU, les<br />
esclaves modernes seraient plus de<br />
500 millions, soit 10 % de la population<br />
mondiale. La moitié d’entre eux<br />
serait des enfants exploités et/ou<br />
travaillant dans des conditions<br />
dangereuses.<br />
La traite, degré zéro<br />
de l’esclavage<br />
La traite désigne le déplacement ou<br />
le commerce d’êtres humains par la<br />
force ou la tromperie. En décembre<br />
2000 quatre-vingts Etats membres<br />
de l’ONU signaient un « Protocole<br />
sur la traite des personnes ». Son<br />
article 3 définissait cette pratique<br />
comme étant « le recrutement, le<br />
transport, le transfert, l’hébergement<br />
ou l’accueil de personnes, par la<br />
menace ou le recours à la force ou à<br />
d’autres formes de contrainte, par<br />
enlèvement, fraude, tromperie, abus<br />
d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité,<br />
ou par l’offre ou<br />
l’acceptation de paiements ou<br />
d’avantages pour obtenir le consentement<br />
d’une personne ayant autorité<br />
sur une<br />
autre aux fins d’exploitation ». Loin<br />
de disparaître, la traite d’êtres<br />
humains, et l’esclavage en général,<br />
sont en constante augmentation.<br />
L’esclavage domestique<br />
L’esclavage domestique est la forme<br />
d’esclavage la plus répandue dans le<br />
monde. La France n’y échappe pas. Le<br />
Comité contre l’Esclavage Moderne<br />
(CCEM) tient à jour un baromètre effrayant<br />
: celui des victimes qui lui sont<br />
signalées et qu’il prend en charge. Son<br />
site www.esclavagemoderne.org fait le<br />
récit de ces vies d’esclaves modernes et<br />
des suites juridiques données à ces affaires<br />
d’un autre temps… et pourtant si<br />
10<br />
haut-rhin
Collégiens<br />
Gagnez une journée de découverte<br />
historique ou un « Pass Musées » !<br />
Vous souhaitez que votre<br />
classe participe à<br />
l’opération « Mémoire et<br />
citoyenneté » ? Ou vous<br />
souhaitez participer en<br />
individuel à ce concours?<br />
Sortez feuilles blanches<br />
et stylos… C’est parti !<br />
Imaginez qu’une grande figure de<br />
l’Histoire envoie un message à la jeunesse<br />
d’aujourd’hui sur le thème de<br />
la Mémoire et de la citoyenneté.<br />
Rédigez une lettre fictive de deux<br />
pages (maximum). Elle sera impérativement<br />
accompagnée d’une courte<br />
biographie et d’un petit texte expliquant<br />
le choix du personnage.<br />
Le concours est réservé aux élèves<br />
des collèges haut-rhinois.<br />
Envoyez votre lettre « Mémoire et<br />
citoyenneté », avant le 21 décembre<br />
2007, en indiquant :<br />
● pour la classe :<br />
nom de la classe, du collège, de<br />
l’enseignant et adresse de<br />
l’établissement<br />
● pour le collégien en individuel :<br />
nom, prénom, classe, nom du collège<br />
et adresse personnelle<br />
A l’adresse suivante :<br />
Concours Mémoire et citoyenneté<br />
Conseil Général du Haut-Rhin<br />
Direction de la Communication<br />
100 avenue d’Alsace - BP 20351<br />
68006 Colmar Cedex<br />
Un jury, présidé par M. Francis Flury, Vice-<br />
Président du Conseil Général , se réunira<br />
au premier trimestre 2008 pour déterminer<br />
les gagnants du concours : une classe<br />
et trois collégiens en individuel.<br />
Prix pour la classe<br />
<strong>Une</strong> sortie scolaire. Pendant une journée,<br />
la classe sera plongée au cœur<br />
de l’Histoire du Haut-Rhin : découverte<br />
de véritables trésors aux Archives<br />
départementales, déjeuner à<br />
l’Hôtel du Département après une<br />
visite de la salle des séances et<br />
l’après-midi, balade médiévale au<br />
Château du Hohlandsbourg. Transport<br />
assuré.<br />
Prix individuels<br />
Trois collégiens seront récompensés.<br />
Chacun remportera un « Pass Musées<br />
» valable pour un an et pour<br />
toute sa famille. Avec ce passeport,<br />
ils pourront découvrir plus de 170<br />
musées situés en Alsace, Suisse et<br />
Allemagne.<br />
Victor Schoelcher, initiateur de<br />
l’abolition de l'esclavage en<br />
France et dans ses colonies.<br />
Nelson Mandela,<br />
dirigeant de<br />
la lutte contre<br />
l’apartheid,<br />
prix Nobel<br />
de la paix<br />
en 1993<br />
haut-rhin 11<br />
Mahatma Gandhi,<br />
défenseur de<br />
la non-violence