LA MAISON
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Magazine Beaubien n° 2 · mars et avril · 2013<br />
arts de la scène<br />
par David Cantin<br />
CHRISTIAN <strong>LA</strong>POINTE, ARTISTE D’EXCEPTION<br />
2013 s’annonce comme une année charnière pour Christian Lapointe.<br />
Il vient tout juste de recevoir le mandat de codirecteur artistique du<br />
Théâtre Blanc, aux côtés du scénographe Jean Hazel. De plus, entre<br />
une participation au Mois Multi (l’audacieuse Outrage au public) et<br />
un spectacle à partir de textes de Marguerite Duras (avec Marie-Thérèse<br />
Fortin et Monia Chokri), au Carrefour international ce printemps,<br />
le directeur du Théâtre Péril monte aussi sur scène, sous la direction<br />
de Brigitte Haentjens, afin de reprendre son rôle de jeune tireur fou<br />
dans 20 novembre. Cette pièce n’a laissé personne indifférent, lors de sa<br />
création au Théâtre La Chapelle, à Montréal, en 2011. Inutile de dire<br />
qu’elle traite d’un sujet délicat et d’actualité. Le monologue s’inspire<br />
de la fusillade qui a frappé Emsdetten, en Allemagne, le 20 novembre<br />
2006. Ainsi, le dramaturge suédois Lars Norén puise dans le journal<br />
intime d’un jeune homme de dix-huit ans, Sebastian Bosse, qui s’est<br />
donné la mort après avoir ouvert le feu sur les élèves et les professeurs<br />
de son ancienne école.<br />
Loin de vouloir faire dans le théâtre à message, ce spectacle ose plutôt<br />
l’affrontement direct avec le spectateur. Dans l’esprit de Lapointe et de<br />
Haentjens, ce texte soulève des questions sur le geste théâtral, le mur<br />
entre la scène et la salle, tout en véhiculant « une sorte de désespoir<br />
toxique », pour reprendre les mots du créateur de Québec. Bien sûr, les<br />
deux complices se connaissent depuis un bon moment déjà. Celle qui<br />
anime la compagnie de création montréalaise Sibyllines a été un des<br />
mentors de Lapointe lors de sa formation en mise en scène à l’École<br />
nationale de théâtre du Canada. Ils partagent également le choix d’une<br />
approche qui dérange, provoque et se place, au final, sous le signe<br />
d’une grande intégrité artistique.<br />
Pour Lapointe, c’est un défi de taille très difficile à soutenir en tant que<br />
comédien. Ici, Lars Norén se permet d’interroger notre responsabilité<br />
collective dans un drame aussi horrible et qui se répète beaucoup trop<br />
souvent. Dur monologue donc que ce 20 novembre, mais assurément<br />
une des pièces à ne pas rater cette saison à Québec.<br />
20 novembre. Texte de Lars Norén. Mise en scène par Brigitte<br />
Haentjens. Avec Christian Lapointe. Sibyllines en codiffusion avec<br />
Recto-Verso, à Méduse du 5 au 9 mars.<br />
L’ÉNERGIE DE KARINE LEDOYEN<br />
Avec Harold Rhéaume, Karine Ledoyen est sans contredit l’une des<br />
figures les plus connues de la danse contemporaine à Québec. Elle a<br />
d’ailleurs été interprète pour Le Fils d’Adrien danse (l’organisme de<br />
création que dirige Rhéaume) jusqu’en 2006. Depuis la création de sa<br />
propre compagnie, Danse K par K (en 2005), elle multiplie les initiatives<br />
afin de rendre sa discipline accessible à un plus grand nombre.<br />
Le projet Osez! en est d’ailleurs un exemple concret, puisqu’il circulera<br />
dans plusieurs régions du Québec pendant une dizaine d’années<br />
consécutives.<br />
Alors que la pièce Air, en 2011, marque un certain tournant dans sa pratique,<br />
son tout nouveau spectacle, Trois paysages, joue sur les contrastes<br />
entre légèreté et pesanteur. Après avoir été présenté en primeur à Montréal,<br />
à L’Agora de la danse, en février dernier, ces trois tableaux distincts<br />
projettent une véritable réflexion, à la fois visuelle et sonore, sur le passage<br />
du temps. Toujours porté par ce besoin de se remettre en question,<br />
son univers gravite davantage vers l’irréel, le poétique, tout comme une<br />
forme de conscience collective. Dans Trois paysages, elle s’associe aux<br />
interprètes Sara Harton, Fabien Piché, Ève Rousseau-Cyr, de même qu’à<br />
Ariane Voineau, qui se placent « en interaction avec une merveilleuse<br />
machine à vent imaginée par le compositeur Patrick Saint-Denis ».<br />
Pas facile de vivre de la danse à Québec, pourtant Karine Ledoyen<br />
ne lâche aucunement prise depuis le début des années 2000. Pour<br />
reprendre ses mots, « Danse K par K diversifie ses recherches<br />
chorégraphiques en travaillant autour de la rencontre, elle unit dans<br />
des projets rassembleurs et singuliers ses aspirations artistiques à son<br />
désir de participer au développement de son milieu ». Elle se frotte<br />
ainsi à l’interdisciplinarité, intégrant parfois le théâtre, la musique,<br />
tout comme les arts visuels à ses projets. Il y a aussi ce désir de mettre<br />
à contribution des artistes « d’horizons et de territoires variés ». Ce<br />
n’est pas du tout inusité de la voir derrière des initiatives un peu atypiques<br />
comme Pour rock avec moi! (notamment avec Jérôme Minière)<br />
ou Gonfler l’histoire (un spectacle de rue pour le 400 e anniversaire de<br />
Québec au bassin Louise). Toujours dans l’optique de populariser la<br />
danse contemporaine, elle devient porte-parole des saisons Danse du<br />
Grand Théâtre de Québec (de 2006 à 2010). Disons même que son<br />
dynamisme est désormais contagieux.<br />
Trois paysages. Danse K par K / Karine Ledoyen. La Rotonde,<br />
à la salle Multi de Méduse du 10 au 12 avril.<br />
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