L'organisation du travail de quartier, la fonctionnalité de ... - Besafe

Université Libre de Bruxelles
Faculté de Droit et de Criminologie
Centre de Recherches Criminologiques
L’organisation du travail de quartier, la fonctionnalité de quartier et les inspecteurs de
quartier 10 ans après la réforme des polices : amélioration de l’organisation interne et
évolution dans le futur
Projet de rapport final 2011
Chercheur:
Veerle Pashley (ULB)
Sous la direction de :
Pour l’ULB : Sybille Smeets
Pour la VUB : Els Enhus
Vrije Universiteit Brussel
Faculteit Recht & Criminologie
Vakgroep Criminologie
Recherche effectuée à la demande du Ministre de l’Intérieur
(Service Public Fédéral Intérieur, Direction Générale Politique de Sécurité et de Prévention)

Remerciements
Cette recherche a été faite sur demande du SPF Intérieur. Nous tenons à remercier les
commanditaires de la confiance qu’ils ont placée dans l’équipe de recherche.
Nous remercions aussi toutes les zones de police qui ont coopéré au projet. Ce projet n’aurait
jamais pu aboutir sans la collaboration bienveillante des chefs de corps, des responsables des
(services de) quartiers, des inspecteurs de quartier et des responsables de la gestion de sécurité
et de prévention locale. Leur participation lors des observations, entretiens, focus groupes et
séminaires étaient d’une importance capitale. A toutes et tous, nous adressons notre
reconnaissance sincère pour l’investissement de leur temps.
Pour finir, nous tenons à remercier les membres du comité d’accompagnement qui ont relu le
rapport et qui ont donné leur feedback.
2

Table des matières
Remerciements ......................................................................................................................... 2
Table des matières.................................................................................................................... 3
Introduction et remarques liminaires .................................................................................... 5
1. Description du projet : objectifs et axes initiaux............................................................ 7
2. L’organisation du travail de quartier, la fonctionnalité de quartier et les inspecteurs
de quartier........................................................................................................................... 10
2.1 Historique .................................................................................................................. 10
2.2 Cadre législatif........................................................................................................... 11
2.3 State of the art ........................................................................................................... 14
2.3.1 Le Moniteur de sécurité fédéral............................................................................ 14
2.3.2 Evaluation du travail de quartier : qu’en savons nous en ce moment ?................ 18
2.4 Conclusion.................................................................................................................. 22
3. Méthodologie ................................................................................................................... 24
3.1 Feuille de route méthodologique............................................................................. 24
4. Plein feu sur le travail du quartier : un bilan empirique sur son organisation, ses
missions, ses tâches et sa professionnalité ........................................................................ 33
4.1 Introduction : remarque préalable.......................................................................... 34
4.2 La place du travail de quartier dans la police locale du point vue de
l’organisation .............................................................................................................. 35
4.2.1 La place du travail de quartier dans l’organigramme ........................................... 36
4.2.2 Les quatre « D » : décentralisation, déconcentration décisionnelle,
déspécialisation et décloisonnement avec les autres services............................... 39
4.2.3 L’organisation du travail de quartier .................................................................... 43
4.2.3.1 Qui décide en matière d’organisation du travail de quartier ?........................ 44
4.2.3.2 L’organisation du travail de quartier : restructuration(s) favorisant
l’accessibilité et la visibilité ............................................................................. 45
4.2.4 Modalités d’évaluation individuelles et collectives.............................................. 48
4.3 La fonction du travail de quartier........................................................................... 49
4.3.1 Le travail de quartier, un « métier » qui ne se laisse pas facilement définir... ..... 49
4.3.2 Les missions du travail de quartier vues de plus près........................................... 50
4.3.3 Les tâches prioritaires et le rôle spécifique du travail de quartier ........................ 54
4.3.4 Intégration opérationnelle au sein de l’ensemble des fonctionnalités de base ..... 55
4.3.5 Intégration dans la politique policière locale (PZS) et les politiques locales de
prévention et de sécurité ....................................................................................... 57
4.3.6 L’intégration des travailleurs de quartier dans les réunions de concertation interne
59
4.3.7 L’absence de formations (pertinentes) adaptées à la spécificité du travail de
quartier.................................................................................................................. 60
4.4 La professionnalisation des inspecteurs de quartier.............................................. 60
4.4.1 Le profil de compétence : les attentes d’une candidature flexible et variée......... 61
4.4.2 Les demandes et attentes des zones de police vis-à-vis des inspecteurs de quartier
62
4.4.3 Les inspecteurs de quartier au travail : une étude approfondie du catalogue de
missions et de tâches orientées quartier et des contacts avec la population ......... 64
3

4.4.3.1 L’ensemble des tâches à réaliser par les inspecteurs de quartier.................... 64
4.4.3.2 Le temps que les inspecteurs de quartier consacrent à leurs diverses tâches . 66
4.4.3.3 Les contacts avec la population ...................................................................... 69
4.4.4 L’importance des partenaires et des réseaux ........................................................ 70
4.4.5 Le problème de recrutement des candidats au travail de quartier ........................ 71
4.4.6 Les conditions de travail....................................................................................... 73
4.5 Conclusion.................................................................................................................. 75
5. Réfléchir sur l’avenir du travail de quartier : vers un modèle de quartier............... 78
5.1 Le point de départ : la transversalité entre les trois dimensions.......................... 79
5.2 L’organisation du travail de quartier dans la police locale .................................. 83
5.3 La finalité du travail de quartier............................................................................. 85
5.3.1 Le travail de quartier orienté vers le développement de la qualité de vie au sein
d’un quartier ......................................................................................................... 86
5.4 Le rôle de l’inspecteur du quartier.......................................................................... 88
5.4.1 Le contact avec la population : quality of Life & éthique orientée « quartier »... 89
5.4.2 Le concept de « motivation »................................................................................ 89
5.5 Les prospectives orientées vers le modèle de quartier........................................... 90
6. Conclusions : les recommandations au travers d’un modèle de quartier.................. 92
6.1 Une adaptation de la circulaire PLP 10 et l’introduction opérationnelle du
concept de “fonctionnalité de quartier” ................................................................... 92
6.2 Renforcer le “middle management”, notamment les responsables du travail de
quartier et les responsables de la fonctionnalité de quartier.................................. 97
6.3 L’intégration de la philosophie “quality of life” dans la formation de police ..... 98
6.4 Un système dévaluation adapté sur mesure au modèle ......................................... 99
6.5 Une adaptation de quelques modalités techniques qui agissent sur la motivation
extrinsèque (primes – horaires – moyens techniques)........................................... 100
6.6 L’importance de la confiance dans les possibilités de réussite d’un modèle de
quartier optimal........................................................................................................ 101
7. Bibliographie ................................................................................................................. 102
Annexes ................................................................................................................................. 110
Annexe 1 : questionnaire tâches inspecteurs de quartier (focus groupes inspecteurs de
quartier) ............................................................................................................................ 111
Annexe 2: les casus (focus groupes inspecteurs de quartier) ....................................... 113
Annexe 3 : les casus (focus groupes responsables des fonctionnalités de base).......... 114
Annexe 4 : les résultats concernant les améliorations prioritaires .............................. 115
4

Introduction et remarques liminaires
Cette recherche a été réalisée suite à un appel d’offre de recherche de 2010 à l’initiative du
SPF Intérieur. Une des thèmes de cet appel était la position du travail de quartier, la
fonctionnalité de quartier et les inspecteurs de quartier dix ans après la réforme de la police
(amélioration de l’organisation interne et évolution future). La fonctionnalité de quartier est
considérée comme un axe fondamental de la police de proximité et est annoncée comme un
des aspects les plus importants de la réforme des polices. Néanmoins, la manière dont celle-ci
doit être organisée n’est pas toujours claire. Plusieurs questions se posent concernant tant la
place de la fonctionnalité de quartier au sein ou au regard des autres fonctionnalités du corps
de police, que l’organisation et l’évolution du travail de quartier et du rôle des inspecteurs de
quartiers. L’objectif général de la recherche était donc d’examiner l’organisation du travail de
quartier, la fonctionnalité de quartier et les inspecteurs de quartier dix ans après la réforme des
polices et de réfléchir sur l’avenir du travail de quartier, dans le contexte particulier de
l’évolution des attentes de la société.
Au cours de la recherche, il est rapidement apparu qu’un tel objectif n’était pas évident,
notamment en raison de la confusion entre différentes notions. En effet, dans la pratique
comme dans la doctrine, on utilise les termes « fonction de quartier », « service de quartier »,
« fonctionnalité de quartier » et « travail de quartier » comme des synonymes. Cette
confusion, constante, a des conséquences sur la manière dont est organisé le corps de police et
dont est conçue la fonction de police locale. Il a donc fallu clarifier toutes ces notions.
Cette clarification n’a pas été simple. Pour obtenir une vision un peu plus claire de ce qui était
la réalité des zones de police investiguées, il est, en effet important, de comprendre de « quoi
on nous parlait » et, d’une certaine manière, de « décrypter » le langage (policier) utilisé. Bon
nombre de théories philosophiques ont déjà souligné que le langage est une dimension
importante dans la matérialisation d’une culture (Dethier 1997), en l’occurrence d’une culture
organisationnelle comme la police. En effet, le langage influence la façon dont des
raisonnements se construisent, des concepts sont définis et dont on communique,, mais
également la manière dont se concrétisent les pratiques de terrain. Le langage peut donc à la
fois être un système et une parole (Lévi Strauss: 208). En d’autres mots, il est important pour
cette recherche de faire une distinction entre la façon dont les concepts se formalisent
structurellement et les notions utilisées dans la pratique.
Les résultats empiriques démontrent assez largement que les zones de police locales se
réfèrent principalement, dans leur discours, au service de quartier et/ou au service dans
lequel sont intégrés les inspecteurs de quartier. En pratique, lorsqu’il est fait mention des
notions de « fonctionnalité de quartier » ou de « fonction de quartier », les acteurs observés
et rencontrés font en réalité référence aux missions et tâches de ce service de quartier et/ou
des inspecteurs de quartier. En d’autres termes, dans les discours récoltés et les
pratiques observées, la fonctionnalité de quartier = le travail du service de quartier ou/et
5

le travail des inspecteurs de quartier. La fonctionnalité de quartier n’est que très rarement
envisagée comme une fonctionnalité qui peut, indépendamment de ces services ou de ces
policiers, être prise en charge par d’autres services ou d’autres policiers. Cette notion de
« fonctionnalité de quartier » est donc d’abord, dans les corps observés, envisagée dans ses
dimensions organisationnelle et non fonctionnelle. Ce constat est fondamental et explique
que les résultats de notre recherche, présentés dans ce rapport, se concentrent presque
exclusivement sur l’analyse du travail et de l’organisation de ce service de quartier et/ou de
l’inspecteur de quartier.
Ainsi, lorsque nous parlons de travail de quartier, il s’agit donc bien du travail (missions et
tâches) du service de quartier et/ou des inspecteurs de quartier. Lorsque nous parlons de
« fonctionnalité de quartier », nous parlons des missions et tâches policières dont la finalité
est d’assurer une fonction de police locale orientée vers le quartier (qui peut donc être
spécifiquement prise en charge par les services de quartiers ou les inspecteurs de quartier,
mais également – et idéalement - pas d’autres services ou d’autres policiers). Comme nous
l’avons dit, le chapitre de présentation des résultats abordera, en raison de la nature des
données récoltées, presque exclusivement le travail de quartier. La fonctionnalité de
quartier, dans sa dimension fonctionnelle, sera cependant abordée, dans les conclusions et les
recommandations qui clôturent ce rapport.
Ce rapport est divisé en six chapitres. Nous aborderons successivement, dans les trois
premiers chapitres, le projet de recherche, le contexte de la question de recherche, notamment
via une brève présentation de la littérature existante concernant le travail de quartier, le cadre
législatif, les résultats du moniteur de sécurité fédéral et la méthodologie de la recherche
menée. Le chapitre quatre, qui constitue le cœur de cette recherche, présentera les résultats
empiriques récoltés. En constituant la prolongation, nous proposerons ensuite, dans le
cinquième chapitre, une réflexion sur l’évolution future du travail de quartier. Le rapport se
termine par les recommandations.
6

1. Description du projet : objectifs et axes initiaux
Comme nous le verrons, il y a un réel manque de précision concernant le travail de quartier
qui renvoie à la fois à des aspects organisationnels, fonctionnels et professionnels. La
question de recherche de cette étude était double : quelle est la position du travail de quartier,
de la fonctionnalité de quartier et des inspecteurs de quartier dans la police locale et quelles
sont les améliorations qui peuvent être proposées en interne dans l’organisation ?
On peut formuler les objectifs qui y sont reliés comme ce qui suit :
• Analyse de la place du travail de quartier et la position de l’inspecteur de quartier en
relation aux autres fonctionnalités de base, dans le cadre d’une approche de sécurité
intégrale.
• Focalisation sur les structures organisationnelles du travail de quartier dans une
gestion de police différentiée.
• Analyse de la relation entre les inspecteurs de quartier et la population.
• Etude des « triggers » permettant d’attirer des candidats inspecteurs de quartier . Il
s’agissait, pour ce faire, d’examiner l’image du travail de quartier, la perception des
inspecteurs de quartier vis-à-vis de leur profession et la raison pour laquelle ils ont
opté pour le travail de quartier.
• Une réflexion sur les perspectives du travail de quartier et de la fonctionnalité de
quartier, en tenant compte des évolutions actuelles de la société.
Pour réaliser tout ceci, la recherche a été divisée en deux phases cohérentes.
La première phase visait à faire un bilan, d’une part, de la place occupée par le service de
quartier et l’inspecteur de quartier au sein de la police locale et des politiques locales de
sécurité, d’autre part, de la position de la fonctionnalité de quartier au sein de la fonction de
police locale. Cette phase, indispensable à la seconde phase, s’est appuyée notamment sur les
résultats des recherches empiriques menées avant la réforme des services de polices. Ceux-ci
ont ainsi servi de mesure zéro (nul meting) permettant d’évaluer les modifications et les
évolutions qu’ont permis (ou contrecarré) les douze années qui ont suivi le vote de la LPI de
1998.
Il était ainsi prévu d’aborder cette phase au travers de trois dimensions essentielles de la
police de quartier, et basées sur le cadre théorique de Monjardet (1996), auxquelles sont
associées des variables à investiguer.
1. La dimension professionnelle s’axant sur l’inspecteur de quartier.
Il s’agissait d’examiner la pratique opérationnelle du travail de quartier sur le terrain. Cette
dimension était liée aux intérêts professionnels des inspecteurs de quartier, comme la
7

motivation et les collaborations formées pour exercer leur profession. Nous avions sélectionné
les indicateurs suivants:
• Profil de compétences : les compétences dont disposent les inspecteurs de quartier pour
exercer leur profession.
• Formation : la formation que les inspecteurs de quartier doivent suivre.
• Motivation : les « triggers » qui sont à la base du choix pour la profession d’inspecteur
de quartier.
• Sélection : les critères utilisés pour engager des inspecteurs de quartier.
• Conditions de travail (en ce compris les horaires et les rémunérations).
• Demandes et attentes des responsables des quartiers et des autres services (internes ou
externes à la police) vis-à-vis des inspecteurs de quartier.
• Missions et tâches idéales, idéelles et réelles des inspecteurs de quartier et contacts
qu’ils entretiennent avec la population.
2. La dimension fonctionnelle s’axant sur la fonctionnalité de quartier 1 .
Cette dimension était liée aux missions, tâches et priorités inhérentes à la fonctionnalité de
quartier assumées spécifiquement par le service de quartier et plus généralement par le corps
de police locale. .
• Missions prioritaires et rôle spécifique du services de quartier ou des inspecteurs de
quartier dans le cadre de la fonctionnalité de quartier.
• Intégration opérationnelle du service de quartier, des inspecteurs de quartier et de la
fonctionnalité de quartier au sein de l’ensemble des fonctionnalités de base.
• Intégration dans la politique policière locale (PZS) et les politiques locales de sécurité et
de prévention : la position ou la place du travail de quartier, des inspecteurs de quartier et
de la fonctionnalité de quartier dans la politique policière locale ainsi que dans la
politique locale de prévention et de sécurité.
• Concertation : les réunions présupposées auxquelles le travail de quartier participe.
• Partenariat : les partenaires internes ou externes à la police avec lesquels le travail de
quartier, des inspecteurs de quartier et de la fonctionnalité de quartier entre en contact.
3. La dimension organisationnelle s’axant sur l’organisation concrète du travail de
quartier et de la fonctionnalité de quartier 2 .
Cette dimension focalise sur la façon dont le travail de quartier et la fonctionnalité de quartier
sont organisés au sein de la police locale (comme partie du système). .
• 4 D : décentralisation, déconcentration décisionnelle, déspécialisation, décloisonnement
avec les autres services et les autres fonctionnalités.
1 Pour rappel (voir introduction), il s’est rapidement avéré que cette « fonctionnalité » était, dans le discours et dans la
pratique, confondue avec le travail de quartier (i.e., le travail du service de quartier et des inspecteurs de quartier). Dès lors,
les résultats concernant cette dimension fonctionnelle portent, dans le rapport, presque exclusivement sur le travail de
quartier.
2 Pour rappel (voir introduction), il s’est rapidement avéré que cette « fonctionnalité » était, dans le discours et dans la
pratique, confondue avec le travail de quartier (i.e., le travail du service de quartier et des inspecteurs de quartier). Dès lors,
les résultats concernant cette organisation portent, dans le rapport, presque exclusivement sur le travail de quartier.
8

• Restructuration favorisant l’accessibilité et la visibilité (tâches administratives, horaires,
etc.) : il s’agit, notamment, de la façon dont le travail de quartier est structuré après la
réforme de la police en faveur d’une visibilité augmentée et d’une accessibilité sur le
terrain.
• Modalités d’évaluation individuelles et collectives : la manière dont le travail de quartier
et la fonctionnalité de quartier sont évalués (individuellement et collectivement).
• Prise en charge des nouvelles recrues par les anciens (mentorat) : la façon dont on prend
en charge des nouveaux inspecteurs de quartier dans le travail de quartier.
Dans ces trois dimensions, une attention particulière a été accordée à la question de la
transversalité tant en ce qui concerne la gestion des problèmes du quartier et des habitants du
quartier (transversalité des missions, des fonctionnalités, des services et des modalités
d’intervention) qu’en ce qui concerne la transversalité dans et entre les territoires concernés
(quartier, ville/commune, zone de police ; Smeets, 2009). Cette transversalité est importante
pour examiner le travail de quartier et la fonctionnalité de quartier en leur totalité. Dans le
modèle proposé par Monjardet (1996) ces dimensions sont idéalement liées entre elles. En
incorporant cette transversalité dans la recherche, nous pouvons vérifier dans quelle mesure le
travail de quartier et la fonctionnalité de quartier sont intégrés dans la fonction de police
locale et au sein de l’organisation des corps de police locales.
La deuxième phase, plus prospective, consistait en une réflexion, suivant les trois dimensions
susmentionnées, sur l’avenir de la place du travail de quartier et de la position de la
fonctionnalité de quartier. Cette phase s’est appuyée sur les données récoltées et les analyses
menées durant la première phase et constitue la partie conclusive de la recherche. Cette
dernière comprend également les recommandations de l’équipe de recherche, notamment au
regard des questions spécifiques posées par le commanditaire de la recherche et concernant
les possibilités d’amélioration de l’organisation du travail de quartier et de fonctionnalité de
quartier au regard des évolutions sociétales, leur intégration dans les politiques locales
policière, de sécurité et de prévention, l’amélioration de la valorisation de la profession
d’inspecteur de quartier, les critères d’évaluation pertinents et les triggers propres à motiver
les (futurs) inspecteurs de quartier.
9

2. L’organisation du travail de quartier, la fonctionnalité de quartier et
les inspecteurs de quartier
2.1 Historique
L’inspecteur de quartier est une figure déjà ancienne des polices locales et existe depuis la
création des premières polices communales en 1830, sous cette appellation ou sous celle
d’agents de quartier, d’agents de proximité ou de gardes-champêtres (anciennes polices
rurales). Les inspecteurs de quartier ont longtemps constitué les policiers-type de la police
locale, chargés de l’ordre public au sein de la commune, de l’application des règlements
communaux, de la mobilité sur les chemins ou routes de passage et, peu à peu, du traitement
des petites apostilles du parquet et des contrôles administratifs au bénéfice des autorités
locales (Van Outrive, Cartuyvels & Ponsaers, 1991; Keunings, 2009).
A la faveur de la professionnalisation progressive de la police, ces figures ont peu à peu perdu
leur position centrale. Le développement des polices motorisées et des dispatchings centraux,
auxquels il faut ajouter en Belgique le mouvement de fusion de communes en 1977
(agrandissement des territoires des communes), vont avoir pour conséquence l’abandon
progressif des dispositifs de quartier au profit d’une recentralisation territoriale et d’une
spécialisation de la fonction policière en métiers de l’intervention, de la recherche, du grand
maintien de l’ordre et de la gestion de la sécurité routière (De Meyer, Depré, Fijnaut, Van
Outrive, 1960; Depré, Fijnaut, Van Outrive, 1979; Smeets & Strebelle, 2000). Le référent
territorial sera de moins en moins le quartier au profit du territoire de la ville ou de la
commune, puis de la zone de police avec la réforme de 1998. A la proximité comme référent
de la fonction policière locale vont se substituer l’ordre public, l’urgence et la lutte contre la
criminalité (Smeets & Strebelle, 2000).
Depuis le début des années 90 cependant, dans le cadre du développement des politiques de
prévention locales subsidiées principalement par le ministère de l’Intérieur, on tente de mettre
en place un modèle de police de proximité ou de community policing qui doit permettre une
plus grande souplesse des services policiers dans leurs prestations au sein d’une société de
plus en plus diversifiée ; l’idée étant de rapprocher la police du citoyen, non seulement
physiquement mais également en termes de qualité des relations. Dans ce cadre, le policier
doit idéalement ajouter à ses missions de maintien de l’ordre et de répression du crime, une
mission d’agent de la paix publique visible et accessible (Bettens, 1994 : 39-44) et la mesure
de l’efficacité du travail policier ne doit plus reposer uniquement sur la rapidité
d’intervention, le nombre d’arrestations ou de PV, mais sur l’absence de désordre et le bienêtre
du quartier. Le modèle de police de proximité envisage, dans ce cadre, de faire du
policier un généraliste, plutôt qu’un spécialiste, capable de résoudre les problèmes quotidiens
de sécurité de la population au niveau conflictuel le plus bas possible. Si le programme est
ambitieux et doit s’appliquer en principe à l’ensemble de la fonction de police, rapidement,
celui-ci fondera ses principaux espoirs dans la revalorisation de la police locale, et au sein de
10

celle-ci, de l’agent de quartier, devenu le symbole et le fer de lance d’une « nouvelle »
manière de faire la police (Smeets & Strebelle, 2000; Tange, 2000: 255-274; Steelandt, 1995:
5-9). La réforme de service de police s’est également inscrite dans cette philosophie, au
travers des notions de « service minimum équivalent », comme fondement organisationnel, et
de community policing, dont la fonctionnalité de quartier doit être « la pierre angulaire » 3 . Il
est ainsi prévu une norme minimale d’un inspecteur de quartier pour 4.000 habitants 4 et
l’articulation de cette fonctionnalité aux 6 autres fonctionnalités de la fonction de police de
base.
2.2 Cadre législatif
Depuis la réforme de la police, la fonctionnalité de quartier est devenue une fonctionnalité à
part entière (Bruggeman, Devroe & Easton, 2010: 62), qui, en théorie du moins, doit dépasser
le cadre d’un service spécifique (le service de quartier ou des inspecteurs de quartier) pour
être pris en charge de manière plus large par l’ensemble du corps de police locale. Cependant,
les textes législatifs gouvernant cette matière ne sont pas toujours clairs et ne donnent que peu
d’indications, voire pas du tout, sur le comment organiser cet « élargissement ». Au contraire,
il semble que dans les quatre cadres législatifs qui abordent la question, il est davantage
question de décrire les missions, les tâches et la répartition géographique du service de
quartier, ce qui favorise déjà la confusion entre un service spécifique et une fonctionnalité
plus large qui devrait concerner l’ensemble du corps de police.
D’abord, il y a la « Loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré
à deux niveaux ». Cette loi prévoit que les normes d’organisation et de fonctionnement des
services policiers sont établies dans le but d’assurer un service de qualité minimum à la
population. L’organisation du travail de quartier est un des éléments de ce service. Cette loi
concrétise l’accord fédéral Octopus de 1997 (cfr. supra) à l’égard de la réorganisation des
services policiers (Van Den Wijngaert, 2006: 550).
Ensuite, il y a l’« Arrêté royal du 17 septembre 2001 déterminant les normes d'organisation et
de fonctionnement de la police locale » visant à assurer un service minimum équivalent à la
population. Cet arrêté, qui concerne dans son intitulé la fonctionnalité de quartier, définit
ses caractéristiques générales que sont la visibilité, l’accessibilité et la disponibilité,
auxquelles s’ajoute l’orientation prioritaire vers les besoins et les demandes de
l’environnement de la police locale. L’arrêté royal mentionne aussi que le service quartier
doit être organisé selon la division géographique de la zone, ceci en tenant compte des
situations locales et de la densité de la population. Cette organisation se traduit par un
minimum d’un agent de quartier pour quatre mille habitants. Comme on le voit, on passe
rapidement de la question de la fonctionnalité de quartier à celle du travail de quartier.
3 Circulaire ministérielle PLP 10 du 9 octobre 2001 concernant les normes d’organisation et de fonctionnement
de la police locale visant à assurer un service minimum équivalent à la population (M.B., 2001.X.16), basée sur
l’Arrêté royal du 17 septembre 2001 portant les normes d’organisation et de fonctionnement de la police locale
visant un service minimum équivalent à la population.
4 Moyenne pour l’ensemble du territoire de la zone de police.
11

La « Circulaire ministérielle PLP 10 du 9 octobre 2001 concernant les normes d'organisation
et de fonctionnement de la police locale visant à assurer un service minimum équivalent à la
population » souligne, quant à elle, que la fonctionnalité de quartier est considérée comme la
pierre angulaire d’une police orientée vers la communauté. De ce fait, elle doit avoir une
place importante dans la fonction de police de base. La circulaire dit aussi que les services
policiers doivent promouvoir une transmission d’information performante, entre autres, entre
les fonctionnalités de quartier et de recherche locale. Enfin, la fonctionnalité de quartier doit
être organisée « en tenant compte de la mise en oeuvre, au sein de chaque commune, de
divisions de police », ce qui nécessite, en tout état de cause, une coordination entre les
fonctionnalités de quartier et d’accueil. Ici cependant, le confusion entre fonctionnalité de
quartier et travail de quartier est entretenue par le fait que cette circulaire mentionne
explicitement que le travail d’un inspecteur de quartier doit contenir davantage que des
tâches plutôt administratives. Concernant les missions auxquelles l’organisation de quartier
doit contribuer attribuer, nous pouvons le catégoriser.
Les inspecteurs de quartier doivent remplir les missions suivantes :
1 Mission d’information : collecter et diffuser l’information. Il s’agit ici de s’informer sur
les spécificités et les problèmes propres à un quartier ; de diffuser l’information générale à
la population et aux collectivités locales ; de transmettre les demandes et les attentes de la
population aux pouvoirs publics ou à d’autres services ; et de détecter les sources
d’insécurité et les phénomènes de criminalité et en aviser les services compétents.
2 Mission de sécurisation : augmenter le sentiment de sécurité des citoyens. Il s’agit ici
surtout d’exécuter des contrôles préventifs et des surveillances en augmentant la visibilité
de la police dans le quartier. La PLP 10 mentionne que ceci doit être atteint en diminuant
les causes et les situations de nature à augmenter les risques de conflits au sein de la
population.
3 Mission d’ombudsman : écouter les plaintes et problèmes de la population et, si possible,
proposer des solutions concrètes afin de désamorcer et de résoudre de petits conflits
naissants.
4 Mission de régulation : exécuter de petites tâches policières qui demandent une
connaissance spécifique ou un contact personnel avec la population (reprise de contact
avec une victime, apostille, enquêtes de moralité, recherche de domicile, etc.).
5 Mission d’intervention : donner suite à certains appels qui demandent une intervention
policière non urgente et limitée.
6 Mission de contrôle : consacrer une attention particulière aux comportements et aux actes
de certaines personnes sous contrôle. (
12

Pour terminer, « l’Arrêté royal du 20 décembre 2007 portant modification de l'arrêté royal du
30 mars 2001 portant la position juridique du personnel des services de police » stipule que
les inspecteurs de quartier doivent exécuter une partie de leurs heures de travail le week-end
ou durant des jours fériés. Cet arrêté a été établi afin de permettre aux inspecteurs de quartier
de bénéficier d’un meilleur salaire, incluant des prestations mieux payées.
Malgré le cadre législatif, une définition précise de l’organisation de la fonctionnalité de
quartier reste inexistante. Les textes normatifs ne donnent qu’une présentation très
superficielle de quelques objectifs très généraux et une représentation généralisée des
missions auxquelles la fonctionnalité de quartier doit contribuer. Même dans une vision plus
réductrice de la fonctionnalité de quartier, il n’y a pas non plus de relevé des tâches
spécifiques auxquelles le travail de quartier est confronté.. Le rapport La revalorisation de
l’organisation de quartier et l’inspecteur de quartier 5 , rédigé en 2010 par la Commission
permanente de la police locale, d’une part, souligne la nécessité d’une meilleure connaissance
des missions des inspecteurs de quartier et, d’autre part, pose la question de savoir si, afin de
favoriser l’harmonisation, les différentes zones de police ne doivent se voir attribuer un même
nombre minimal de tâches dans la fonctionnalité de quartier.
En effet, depuis la réforme de la police locale, plusieurs typologies d’organisation de quartier
ont été crées, avec pour effet que la perception de cette fonctionnalité de quartier et
l’organisation du travail de quartier peuvent très largement varier selon la taille du corps, le
nombre des communes composant la zone de police, le contexte socio-économique et
démographique de la zone (en ce compris les caractéristiques spécifiques des quartiers), la
philosophie du fonctionnement, etc. La façon dont les zones de police locale définissent le
fonctionnement du travail de quartier ainsi que la réalisation concrète d’une politique à cet
égard dépend également largement de la vision du chef de corps et des autorités locales. Dans
les grandes zones par exemple, le travail de quartier peut être accompli par des « équipes de
quartier » au sein desquelles les inspecteurs de quartier travaillent avec d’autres acteurs
(policier et non-policier) sous la direction d’un « gestionnaire de quartier ». Dans ce cadre, on
se rapproche plus sensiblement, mais jamais complètement, d’une approche par
« fonctionnalité de quartier ». Dans des corps plus réduits, l’inspecteur de quartier est souvent
seul responsable pour une région géographique bien définie. Il n’est pas absolument
nécessaire que le travail de quartier soit uniquement lié à un territoire. L’inspecteur de
quartier peut être, par exemple, le point de contact d’une communauté ou d’une collectivité
spécifique (par exemple les hôpitaux, les écoles, etc).
5 Vaste Commissie van de Lokale Politie van België, De herwaardering van de wijkwerking en wijkinspecteur,
en concertation avec les organisations représentatives syndicales, 25 mars 2010, p. 11.
13

2.3 State of the art
2.3.1 Le Moniteur de sécurité fédéral
Même si il doit être utilisé avec prudence, le traitement statistique de données peut être une
bonne façon de souligner certaines tendances. Il faut cependant garder à l’esprit que les
chiffres sont souvent construits et peu concrets en tant que tels et nécessitent d’être
contextualisés à l’aune des instruments de mesure utilisés, de la méthodologie spécifique les
encadrant et de l’environnement dans lesquels ils s’inscrivent (complémentarité avec une
approche davantage qualitative). Leur utilisation ne visera ici qu’à mettre en évidence des
impressions d’ordre général et à guider les questionnements qui seront les nôtres. De nos
jours, il existe de nombreux instruments quantitatifs qui donnent un aperçu (sur la
satisfaction) du fonctionnement policier, parmi lesquels le Moniteur de sécurité.
Le Moniteur de sécurité est une enquête téléphonique standardisée qui « examine la
perception des citoyens concernant la sécurité et le fonctionnement des services policier »
(Manuel du moniteur de sécurité, 2008-2009 : 3) et doit permettre de compléter les
statistiques policières « classiques » de la Police fédérale et les statistiques judiciaires du
ministère de la Justice. Il se présente sous la forme d’un questionnaire préparé par la police
fédérale et administré téléphoniquement par une firme privée auprès d’un échantillon de la
population (+- 40.000 personnes), sélectionné de manière aléatoire dans l’annuaire
téléphonique, avec une représentativité par Région et type de communes. Il été administré six
fois depuis sa création en 1997 6 . Plusieurs variables sont examinées : les problèmes dans le
quartier, la victimisation (ainsi que la communication et la déclaration), le sentiment
d’insécurité, les contacts avec les services de police et le fonctionnement de la police (Manuel
du moniteur de sécurité, 2008-2009: 3-4). L’objectif de cet instrument est de produire des
données chiffrées dans une perspective comparative (entre moniteur fédéral et moniteurs
locaux) et longitudinale via des enquêtes régulières afin d’observer certaines tendances. Ainsi,
malgré certaines limitations méthodologiques 7 (Smeets, 2010), Le moniteur de sécurité est
donc considéré comme un instrument important pour le développement et l’évaluation d’une
politique de sécurité et d’une politique policière, basées sur les besoins des citoyens
(Vervaeke, Neven, Pleysier & Vanderhallen in Devroe, Beyens & Enhus (red.), 2006: 88-91).
Depuis le premier moniteur de sécurité en 1997, on retrouve des questions concernant la
fréquence des contacts entre les citoyens et leur agent de quartier. Ces questions font partie du
module « fonctionnement de la police ». Le but est de vérifier si la population connaît ses
6 Il semble que, pour des raisons de moyens, le moniteur soit appelé à disparaître sous sa forme actuelle, pour
être remplacé par une enquête « Crime Concern » (sondage auprès de la population), initiée par la police
fédérale, comme contribution à l’Image Policière Nationale de Sécurité.
7 On peut citer, sans prétendre à l’exhaustivité, la subjectivité des questions, le choix de réponses limité (aucune
des catégories proposées ne fait, par exemple, référence à autre chose que la délinquance ou les incivilités), les
biais inhérents au questionnaire par téléphone, la représentativité restreinte de l’échantillon (il y a, par exemple,
une surreprésentation des personnes plus âgées – de plus de 50 ans – par rapport aux 15-35 ans, ce qui renvoie en
réalité aux biais de l’enquête téléphonique), le choix, pour les moniteurs locaux, de se concentrer sur les villes et
communes sous contrat de sécurité, l’absence de contextualisation, le peu d’implication des utilisateurs locaux
dans la construction du moniteur, les difficultés de mise en relations avec les statistiques policières (Smeets,
2010).
14

agents de quartier et si oui ou non il est, selon elle, nécessaire d’intensifier ces contacts. Vu
l’importance de ce moniteur de sécurité, il est intéressant ici de donner un aperçu graphique
des résultats des neuf dernières années concernant les inspecteur de quartier (2000-2009).
Le premier graphique donne les pourcentages des répondants qui connaissent déjà leur
inspecteur de quartier et le second graphique indique si les répondants considèrent qu’il faut
augmenter ces contacts 8 . Les données sont issues des résultats des Moniteurs de sécurité
fédéraux administrés entre 2000 et 2009 9 . Pour permettre des comparaisons, les résultats ont
été notés moniteur par moniteur. Puis les données ont été introduites à l’aide du logiciel
Excel. Les rapports d’analyse du moniteur de sécurité ont été consultés pour donner plus
d’information sur les profils des répondants (âge, diplômes et activités professionnelles) et
pour examiner si des différences existent entre les trois régions belges.
Connaissez-vous votre inspecteur de quartier ?
Image 1: Résultats Moniteur de Sécurité 2000-2009: pourcentages des répondants qui connaissent déjà leur inspecteur de
quartier
La graphique montre que durant la période 2000-2009, plus de la moitié des répondants ne
connaît pas son inspecteur de quartier. Même si, à partir de 2004, il y a une diminution
constante celle-ci reste légère. En 2008-2009, 50,25 % de la population indique toujours ne
pas connaître son inspecteur de quartier. Il n’y a pas de données disponibles pour expliquer
cette tendance négative. On peut également souligner que ce sont surtout les jeunes qui ne
connaissent pas leur inspecteur de quartier. Les personnes plus âgées (> 50 ans) ont davantage
de contact avec leur inspecteur de quartier. Cette constatation est valable pour chaque période
8 Les rapports du moniteur de sécurité, en ce compris la méthodologie utilisée, peuvent être consultés séparément
au site portail http://www.polfed-fedpol.be/pub/veiligheidsMonitor/monitor_nl.php.
9 Il n’y avaient pas déjà des données de la période 2010 disponibles du temps de cette recherche.
15

durant laquelle le moniteur de sécurité a été administré 10 . En général, on ne constate pas de
différences significatives dans les variables « activité professionnelle » et « formation »
(diplôme). En Région de Bruxelles Capitale, les rapports d’analyse du Moniteur fédéral 11
indiquent une tendance importante : durant la période 2008-2009, 64,8 % des bruxellois
déclaraient ne pas connaître leur inspecteur de quartier 12 . En 2006, c’était le cas pour 67 % 13 et
en 2004 pour 66,34 % 14 . Les pourcentages sont donc nettement plus élevés dans cette Région,
sans qu’il y ait des éléments disponibles qui pourraient expliquer cette différence notable.
Concernant les contacts, nous remarquons qu’en l’an 2000, 14,62 % de la population a de
temps en temps du contact avec l’inspecteur de quartier. Ces pourcentages restent
relativement stables dans les années qui suivent, surtout si l’on tient compte de la marge
d’erreur de ce type de questionnaire 15 .
En 2000, 13,02 % déclare de déjà avoir eu au minimum une fois contact avec l’inspecteur de
quartier. Ces pourcentages augmenteront légèrement en 2004 (16,24 %), en 2006 (17,25 %) et
en 2008-2009 (18,48 %). Pour cette catégorie non plus il n’y a pas de données disponibles qui
pourraient expliquer cette tendance.
En ce qui concerne la dernière catégorie, 20,43 % des répondants déclare en 2000 ne
connaître leur inspecteur de quartier que par son nom ou de vue. Pour la période 2002-2006
les pourcentages diminuent, mais augmentent ensuite en 2008-2009 (19,4 %) par rapport à la
dernière année de référence).
Sans doute plus intéressant en ce qui nous concerne, qu’en est-il du besoin des citoyens
d’avoir plus de contact avec leur inspecteur de quartier ? Le graphique suivant en donne un
aperçu pour la période 2000-2009.
10 Les rapports du moniteur de sécurité peuvent être consultés séparément au site portail http://www.polfedfedpol.be/pub/veiligheidsMonitor/monitor_nl.php.
11 Ces rapports vont sur les “grandes tendances” par période de recueillement du Moniteur de Sécurité. Les
rapports peuvent être consultés séparément au site portail http://www.polfedfedpol.be/pub/veiligheidsMonitor/monitor_nl.php.
12 ‘Moniteur de sécurité 2008-2009: analyse de l’enquête’ fédérale’. Dans: http://www.polfedfedpol.be/pub/veiligheidsMonitor/2008_2009/reports/grandes_tendances_2008.pdf,
12/11/2010, 14h52.
13 ‘Moniteur de sécurité 2006: analyse de l’enquête’ fédérale’. Dans: http://www.polfedfedpol.be/pub/veiligheidsMonitor/2006/reports/grandes_tendances_ms2006.pdf,
12/11/2010, 14h30.
14 ‘Moniteur de sécurité 2004: analyse de l’enquête’ fédérale’. Dans: http://www.polfedfedpol.be/pub/veiligheidsMonitor/2004/reports/grandes_tendances_2004.pdf,
12/11/2010, 14h19.
15 Marge d’erreur de 5%. http://www.polfedfedpol.be/pub/veiligheidsMonitor/2008_2009/notes/manuel_instructions_2008.pdf
16

Souhaiteriez-vous avoir davantage de contacts avec votre inspecteur de quartier?
Image 2: Résultats Moniteur de Sécurité 2000-2009: pourcentage des répondants qui ont oui ou non besoin de plus de
contacts
Ce graphique nous indique que la majorité des répondants considère ne pas avoir besoin de
plus de contact avec leur inspecteur de quartier. Ce pourcentage est le plus important pour la
période 2008-2009 (64,54 %). En 2000, 58,85 % des répondants dits ne pas avoir besoin de
plus de contact.
A nouveau, il est important de mentionner que les résultats de la Région de Bruxelles Capitale
révèlent des pourcentages sensiblement différents. Le moniteur de sécurité 2008-2009 indique
ainsi que 45 % des Bruxellois (avec une surreprésentation des personnes âgées de plus de 50
ans) veulent plus de contact avec leur inspecteur de quartier ce qui constitue un pourcentage
plus important que dans les deux autres Régions (ces pourcentages n’étant cependant pas
indiqués pour la Wallonie et la Flandre). Il n’y a pas de données disponibles qui pourraient
expliquer la raison de ces différences.
Bien entendu, il faut prendre ces chiffres avec précaution. Si ces chiffres permettent de révéler
des tendances concernant les impressions de la population, beaucoup de questions restent sans
réponse, notamment celles-ci relative à leur explication. Généralement, le travail de quartier
est considérée comme d’une importance essentielle pour entrer en contact avec la population
locale mais le Moniteur de Sécurité ne donne qu’un aperçu de la mesure dans laquelle les
citoyens connaissent leur inspecteur de quartier et si oui ou non ils veulent plus de contact
avec lui, sans que nous n’ayons d’indication sur les raisons pour lesquelles les citoyens
veulent (ou ne veulent pas) plus de contact avec leur inspecteur de quartier. Mentionnons,
pour terminer, que les résultats présentés ici sont issus des Moniteurs fédéraux et ne
permettent pas de distinguer les territoires locaux. Les Moniteurs locaux, quand ils existent,
ont été systématiquement demandés aux zones de polices qui ont fait l’objet d’une récolte de
données plus poussée.
17

2.3.2 Evaluation du travail de quartier : qu’en savons nous en ce moment ?
Le travail de quartier est généralement perçu comme ayant sa propre culture et ses
spécificités. Les différences de fonctionnement et d’organisation au regard des autres services
du corps de police sont claires et se situent à plusieurs niveaux, notamment quant à la nature
des événements pour lesquels les inspecteurs de quartier interviennent, au degré (quantité et
qualité) des contacts avec les citoyens et à la façon dont ces policiers favorisent une approche
de résolution de problèmes dans leur fonctionnement (Van Altert, Enhus & Stol in Verwee,
Hendrickx & Vlek (eds.), 2009: 16-17). La philosophie organisationnelle du travail de
quartier est large et s’intègre dans le « liberal model » anglo-saxon, qui se caractérise
généralement par une action orientée sur le « community safety and social peace keeping »,
une meilleur intégration des droits de l’homme, un certain empowerment, la prise en compte
des attentes de tous les citoyens dans la société et l’utilisation minimum de la violence et de la
contrainte (Maguire, Morgan & Reiner, 2002: 983-984). Concrètement, ce type de service est
appelée à développer une « fonction policière par consentement » (policing by consent), plutôt
que par coercition (policing by coercion), favorisant une distance minimale entre le citoyen et
la police (Maguire, Morgan & Reiner, 2002: 983-984). Si depuis la réforme de la police de
1998, le but était d’appliquer cette philosophie à la totalité de l’appareil (cfr. Community
Oriented Policing), le travail de quartier est néanmoins considéré comme comprenant les
missions et les tâches qui doivent, par excellence, appliquer ces principes.
La mission actuelle de la police de quartier est ainsi double, ce qui n’est pas sans créer une
certaine ambivalence. D’un côté, elle est orientée vers la prévention ou l’anticipation de
problèmes et ceci, entre autres, en favorisant la visibilité et l’accessibilité des policiers de
quartier. D’un autre côté, elle reste une mission policière et les inspecteurs de quartier doivent
pouvoir intervenir en cas de besoin, si nécessaire par la contrainte et la répression. Cela
implique que l’inspecteur de quartier est confronté à une quantité et une diversité de tâches
parmi lesquelles il faut continuellement faire des choix, marquer des priorités. On attend ainsi
des inspecteurs de quartier, à la fois, qu’ils se rapprochent de la population locale tout en
gardant une certaine distance, indispensable à la neutralité inhérente à leur statut de policier.
Il y a eu déjà un certain nombre de recherches concernant le fonctionnement du travail de
quartier et le rôle des inspecteurs de quartier. Etant donné que le travail de quartier est
considéré comme central pour l’accomplissement de la fonction policière de base, on a voulu
vérifier à plusieurs reprises comment il est réalisé sur le terrain et de quelle façon il est intégré
dans la police locale. En vue de la réforme de la police en 1998, plusieurs études ont été faites
sur le fonctionnement de la police communale. Nombre de recherches scientifiques ont mis en
évidence un certain nombre d’obstacles et de freins à la valorisation de l’inspecteur de
quartier. Nous allons les présenter brièvement ici.
18

1. Manque d’une définition concrète et/ou claire du rôle spécifique des inspecteurs de
quartier.
Comme mentionné il n’existe pas dans les textes normatifs de définitions concrètes ou claires
du rôle des inspecteurs de quartier, hormis, ci et là, des listes de tâches pouvant être prises en
charge par le travail de quartier. Le rapport d’évaluation de 10 ans réforme de la police, rédigé
sous l’égide du Conseil fédéral de police, concluait d’ailleurs à la nécessité de réaliser une
uniformisation et une professionnalisation de l’inspecteur de quartier. Jusqu’ici, il y a un flou
concernant ce qu’on attend exactement des inspecteurs de quartier, et ceci aussi bien au sein
de l’organisation policière qu’en dehors de la police (Straver, Ulrich, van Duijneveldt & Moor
in Bruggeman, Devroe & Easton, 2010: 237). La description des tâches est souvent générale
et il y a un manque de structures formelles permettant une définition plus concrète même au
sein d’un corps de police particulier (Smeets & Strebelle, 2000: 222). Lorsqu’il y a des
différences dans la façon dont les inspecteurs de quartier exécutent leurs tâches, il est parfois
difficile de savoir si c’est lié des différences de gestion entre les corps de police ou aux types
de quartier ou de territoires assignés aux inspecteurs de quartier. Cette question a pourtant son
importance. Par exemple, une étude néerlandaise montre que l’absence d’une définition
uniforme du travail de quartier, d’un côté, et la grande diversité des missions (et dès lors des
tâches) attribuées aux inspecteurs de quartier, d’un autre côté, peuvent être expliquées
principalement par les différences existant entre les territoires affectés aux inspecteurs de
quartier et les problèmes qui y existent (Terpstra, 2008).
Il faut aussi mentionner que les missions attribuées au travail de quartier reçoivent en général
une liberté d’interprétation plus large. Les besoins spécifiques d’un quartier et le nombre et la
diversité des tâches ont pour effet d’octroyer aux inspecteurs de quartier une plus large
autonomie dans l’exécution de leurs activités. Au contraire d’autres services policiers, les
inspecteurs de quartier sont aussi moins dépendants des appels de citoyens (saisine externe),
ce qui leur donne la possibilité de développer une gestion propre et de travailler de manière
plus proactive (Van Alter, Enhus & Stol in Verwee, Hendrickx & Vlek (eds.), 2009: 23-24).
Ceci implique qu’un inspecteur de quartier doit pouvoir se reposer sur ses propres expériences
et connaissances, alors que d’autres services collaborent plus fréquemment avec des collègues
auxquels ils peuvent faire appel en cas de besoin. En général, on attend d’un inspecteur de
quartier qu’il puisse résoudre ses affaires « seul ». Dès lors, une définition trop restrictive et
rigide de son rôle est impossible.
2. L’absence de formations adaptées à la spécificité du travail de quartier.
Le rapport de la Commission permanente de la police locale souligne également que la
formation de base (pour le cadre de base, mais également le cadre moyen) devrait en général
porter plus d’attention au travail de quartier 16 . Puisque le travail de quartier est considéré
comme une mission « spécifique », la question se pose également de savoir si la formation
(fonctionnelle) actuelle répond à ce besoin. Fonctionner comme inspecteur de quartier
16 Vaste Commissie van de Lokale Politie van België, “De herwaardering van de wijkwerking en
wijkinspecteur”, en concertation avec les organisations représentatives syndicales, 25 mars 2010, p. 20.
19

demande souvent d’autres qualifications ou compétences que les autres « métiers policiers ».
Cette demande de spécificité de la formation est encore accentuée par le fait que les aspirants
agents et inspecteurs sont rarement confrontés au travail de quartier durant leur formation et
que leurs stages opérationnels sont généralement exécutés dans d’autres services.
3. Une évaluation du travail en fonction de critères quantitatifs peu adaptés à la réalité du
travail quotidien.
Les inspecteurs de police sont en grande partie évalués sur base de critères quantitatifs
(nombre de PV, fiche d’info, dossiers, apostilles, arrestations, …) peu adaptés, en tant que
tels, au travail de quartier. La mission plus « sociale » ou de régulation (prévention,
médiation, résolution des conflits, etc) assignée aux inspecteurs de quartier doit les conduire
idéalement, et les conduit d’ailleurs, à moins vite dresser un procès-verbal afin de ne pas
réduire la confiance du citoyen (Smeets, Strebelle, 2000 ; Tange, 2000 ; Van Altert, Enhus &
Stol in Verwee, Hendrickx & Vlek (eds.), 2009: 25-26). On peut donc poser la question de la
nécessité de mettre en place un système d’évaluation qui tienne compte des activités
quotidiennes des inspecteurs de quartier (les activités réelles, mais aussi celles que l’on veut
encourager). Pour développer un tel système, il faut bien évidemment avoir une vue plus
claire et plus globale des tâches réellement assignées et prestées prioritairement par les
inspecteurs de quartier, d’autant que le fait que les inspecteurs de quartier rédigent moins de
procès-verbaux signifie aussi que ces tâches ne font pas forcément l’objet d’un enregistrement
dans l’organisation policière. Il est, dès lors, plus difficile d’examiner la nature des incidents
ou événements auxquels ils sont confrontés.
Par ailleurs, ce manque de connaissance du travail réel des inspecteurs de quartier conduit à
ne pas conclure d’office que les inspecteurs de quartier ne sont pas ou ne veulent pas être en
faveur d’une approche répressive. Les inspecteurs de quartier sont souvent considérés comme
des « braves papa de quartiers » mais peu de résultats disponibles confirment cette hypothèse.
Comme déjà mentionné, la mission actuelle de l’inspecteur de quartier est double. Aux Pays-
Bas les inspecteurs de quartier trouvent assez naturel que le maintien de l’ordre fasse partie
part de leur travail. Ils rédigent régulièrement des procès-verbaux, là où dans le passé ils
étaient très réservés à cet égard (Terpstra, 2008).
4. La lourdeur des tâches administratives empêche les inspecteurs de quartier d’être
présents dans la rue et d’entretenir des contacts avec les habitants du quartier
En général, les inspecteurs de quartier doivent investir beaucoup de temps dans des tâches de
bureau de nature administrative (comme la perception d’amendes, des exploits d’huissier, des
vérifications de domiciliation, des recherches de renseignement divers, etc.) ou judiciaire
(réponse aux petites apostilles). Même si des initiatives ont été prises, tant au niveau fédéral
qu’au niveau local, afin de diminuer ce types de tâches (circulaires, engagements de civils,
etc.), la masse de travail administratif dévolu aux inspecteurs de quartier reste très importante
et est considérée, par ces derniers, comme le premier obstacle à un véritable travail de
20

proximité, soit que ces tâches les empêchent d’aller dans le quartier, soit qu’elles demandent
trop de temps pour les bénéfices qui peuvent en être retirés en termes d’informations ou de
contacts avec le public (Smeets & Strebelle, 2000: 222-223; Tange, 2000 ; Van Alter, Enhus
& Stol in Verwee, Hendrickx & Vlek (eds.), 2009: 23-24). Ce constat a également été posé
aux Pays-Bas, où l’on plaide en faveur d’une amélioration du travail de quartier en prévoyant
un appui administratif (Bron, R., Van Duijneveldt, I. et al, 2010: 5).
5. Le service de quartier est souvent considéré comme un « service de réserve » pour
d’autres fonctionnalités.
Les inspecteurs de quartier sont encore trop souvent considérés comme des exécutants ou des
« réservistes » pour nombre de services du corps de police et de l’administration communale
(Tange, 2000) : on fait ainsi appel à des policiers de quartiers pour des tâches assignées à
d’autres services lorsque ceux-ci ne sont pas disponibles ou renvoyant à d’autres
fonctionnalités ; Van Den Broeck & Eliaerts, 1994: 160 ; Smeets & Strebelle, 2000: 222).
C’est notamment le cas pour des maintiens de l’ordre lors d’évènements locaux ou pour des
opérations de sécurisation routière. On peut poser la question de la pertinence, aussi bien
organisationnelle qu’en matière de revalorisation de leurs tâches, d’une intégration plus solide
des inspecteurs de quartier dans des équipes « multifonctionnelles » (comprenant différentes
fonctionnalités, travaillant directement ensemble) (Straver, Ulrich, van Duijneveldt & Moor
in Bruggeman, Devroe & Easton, 2010: 237). Cela aurait pour effets, d’un côté, un échange
d’information plus efficace entre les différents policiers de cette équipe et, de l’autre côté, une
meilleure formalisation des tâches qui les inspecteurs de quartier exécutent.
6. Méconnaissance des réseaux (associatifs) locaux ou méfiance de ceux-ci à l’égard des
inspecteurs de quartier
Les inspecteurs de quartier devraient pouvoir passer plus de temps à mettre en place des
réseaux de connaissance ou de partenariats avec des services sociaux (locaux ou supralocaux),
les travailleurs de quartier, les associations, les services de prévention, etc. afin de
pouvoir relayer les citoyens vers ceux-ci, rassembler et relayer de l’information, situer des
incidents dans un contexte plus large et établir des relations de confiance. Il semble cependant
que cette connaissance reste encore largement embryonnaire et limitée, dans la plupart des
cas, à des contacts informels, souvent dus à une bonne entente interpersonnelle avec l’une ou
l’autre structure ou acteur de ces structures (Smeets &Strebelle, 2000).
A ce constat, s’ajoute encore la faiblesse constatée de l’intégration (systématique) des
inspecteurs de quartier dans des structures de concertation ou de consultation citoyenne tels
les comités de quartier ou les associations de commerçants ; intégration qui permettrait
d’améliorer les collaborations avec les habitants du quartier et l’échange d’information dans
les deux sens. Les inspecteurs de quartier seraient trop peu impliqués dans ce type de
concertation, principalement en raison du peu de temps dont ils disposent ou d’horaires peu
favorables à cette présence.
21

7. Faiblesse de critères de sélection positifs qui attirent des volontaires pour la fonction
Si, trouver du personnel pour le service de quartier n’est pas en soi problématique,
néanmoins, il arrive que plusieurs postes (vacances) d’inspecteur de quartier ne sont pas
remplis par manque d’intérêt pour la fonction 17 . Par ailleurs, le nombre d’inspecteurs de
quartier présents est souvent insuffisant (Bruggeman in Bruggeman, Devroe & Easton (eds),
2010: 104). Le travail de quartier est, en effet, souvent décrit comme souffrant d’« un
problème d’image ». Les jeunes policiers voient le travail de quartier souvent comme peu
valorisant, archaïque ou comme une « fonction de fin de carrière ». Le problème serait aussi
dû à la différence salariale avec les autres « métiers policiers ». Bien que le fédéral ait tenté
de réduire cette différence (cfr. supra) en permettant aux inspecteurs de quartier de bénéficier
de prestations de week-end ou des jours fériés, le fossé reste important.
8. La polyvalence est perçue comme un manque de qualification et l’autonomie des
inspecteurs de quartier est peu ou pas formalisée
Cette « mauvaise image » du travail de quartier est encore renforcée par le fait que la qualité
de celui-ci est souvent décrite comme insuffisante, alors même qu’on ne dispose souvent
d’aucun instrument d’évaluation adapté au travail quotidien de policiers intégrés dans ce
service (cfr . supra). La grande diversité en matière de tâches et le fait qu’on l’utilise comme
réserve générale pour l’exécution d’autres fonctionnalités de base hypothéquerait également
l’image du travail de quartier (Bruggeman, Devroe & Easton (eds), 2010: 104). Dans ce
cadre, la polyvalence, qui est censée donner une substance au pouvoir discrétionnaire de
l’inspecteur de quartier, n’est pas tant vue comme une compétence positive (adaptation à une
situation spécifique) mais comme un défaut (manque de spécialisation ou de
professionnalisme). Elle est également interprétée comme synonyme de « bon à tout faire »
justifiant, dès lors, de confier à l’inspecteur de quartier les tâches que d’autres ne veulent pas
prester ou de faire de ce dernier un réserviste pour d’autres services (Smeets & Strebelle,
2000 ; Tange, 2000).
2.4 Conclusion
Tous ces éléments expliquent pourquoi ces recherches soulignent également une démotivation
des inspecteurs de quartier, parfois doublée d’une résistance aux restructurations de leur
service en termes de missions, de tâches et d’horaires, en particulier lorsque celles-ci sont
interprétées, non comme une amélioration de leurs missions ou de leurs conditions de travail
(par exemple, par une prime spécifique), mais comme une surcharge de travail.
Plus fondamentalement, pour toutes ces raisons mais également parce qu’elle est considérée
encore trop souvent comme le travail des « papys » de la police, le travail de quartier a parfois
17 Vaste Commissie van de Lokale Politie van België, “De herwaardering van de wijkwerking en
wijkinspecteur”, en concertation avec les organisations représentatives syndicales, 25 mars 2010, p. 4.
22

continué son processus de disqualification et de dévalorisation au sein des corps de police
locale. Les tâches prestées par les inspecteurs de quartier sont encore trop souvent considérées
par leurs collègues comme n’étant pas des « vraies » tâches de police. Au fur et à mesure que
l’inspecteur de quartier se rapproche de la population et d’autres acteurs de la sécurité
publique, on constate ainsi un éloignement symbolique et fonctionnel entre leur service et
ceux des « spécialistes » (du judiciaire et de l’urgence) du reste du corps de police. Cet
éloignement, qui prend parfois la forme extrême du cloisonnement entre services (et, dès lors,
fonctionnalités), compromet la possibilité pour les inspecteurs de quartier d’être « les yeux et
les oreilles » du corps de police locale et de permettre ainsi à ce dernier de bénéficier des
précieuses informations récoltées par ceux-ci (Smeets & Strebelle, 2000; Tange, 2000). Cela
compromet aussi la possibilité que d’autres services prennent en charge la fonctionnalité de
quartier, assimilée au travail de quartier. Malgré certaines améliorations, notamment en
matière de surcharge des tâches administratives, et des projets prometteurs au sein de
certaines polices locales, la plupart de ces constats ont été réitérés, avec des nuances, dans le
rapport de 2009 sur la Revalorisation du travail de quartier et de la fonction d’inspecteur de
quartier de la Commission permanente de la police locale et dans le rapport d’évaluation de la
réforme des polices par le Conseil fédéral de police de 2009.
S’ils apparaissent alarmants, ces constats n’ont cependant pas fondamentalement remis en
cause l’importance du travail de quartier comme pierre angulaire du travail des polices
locales. Ils pointent en réalité surtout le décalage existant entre un discours valorisant ce
travail, mais qui reste parfois au niveau de l’intention, et des moyens qui ne suivent pas
toujours ou pas suffisamment pour permettre à celui-ci de s’intégrer harmonieusement dans la
politique et/ou la structure du corps de police : non plus seulement comme figure, plus
symbolique que réelle, mais également comme clé de voûte de la fonction de police locale.
Les moyens dont il est question ici ne sont pas que de l’ordre des effectifs ou financiers : des
recherches menées il y a dix ans, ou plus récemment, il ressort que les inspecteurs de quartier
demandaient surtout une reconnaissance de leur spécificité, une évaluation adaptée à leur
travail et plus d’autonomie.
23

3. Méthodologie
La recherche comporte deux phases s’inscrivant dans le cadre commun proposé plus haut en
ayant recours à l’approche méthodologique suivante.
A la base de cette étude, il y a une méthode inductive qualitative. L’induction repose
principalement sur un raisonnement fondé sur des constatations empiriques avec comme but
de formuler des propos généraux (Billiet & Waege, 2006: 39; Baarda, De Goede &
Teunissen, 2005: 2). Le but final de cette recherche est de présenter des recommandations qui
forment la base de stratégies qu’on peut utiliser dans la pratique. La force d’une telle
approche se trouve dans le fait que l’on ne part pas d’une « vision tunnel », qui limite la
recherche à des hypothèses préétablies, du fait que le chercheur se déplace et accumule de
l’information in situ. On fait de la recherche. En outre, les données sont moins liées à des
catégories bien définies, ce qui permet de faire de nouvelles constatations, de les analyser, de
les interpréter et d’évaluer l’ensemble.
Plutôt que d’examiner les pratiques locales à partir d’un cadre de référence préconçu, nous
avons élaboré notre recherche et fait émerger les données au départ des définitions, pratiques
et expériences locales qui, comme le souligne le Rapport du Conseil fédéral de police, se
caractérisent souvent pas leur grande diversité et/ou disparité et l’impact des spécificités
locales sur la définition de la place de la fonctionnalité de quartier, et surtout sur la définition
de la place du travail de quartier. Cette façon de procéder nous a semblé également mieux
correspondre à l’objectif du commanditaire de dégager des recommandations pratiques.
L’approche qualitative est aussi plus à même de permettre de comprendre et d’analyser les
freins, obstacles ou éléments facilitateurs de la valorisation du travail de quartier, de la
fonctionnalité de quartier et de l’inspecteur de quartier. Nous avons choisi de favoriser une
approche qui favorise ainsi d’abord les pratiques, la parole et la perception des policiers,
responsables de services ou inspecteurs de police, qui sont confrontés directement aux enjeux
que représente ce travail de quartier. La recherche s’est déclinée en deux méthodes principales
de récoltes de données particulières qui constituent le cœur de la recherche : les entretiens
semi-directifs, complétés de quelques observations participantes, et les focus groupes.
3.1 Feuille de route méthodologique
Phase 1 : faire un bilan de la place occupée par le service de quartier et l’inspecteur de
quartier au sein de la police locale et des politiques locales de sécurité + de la position de la
fonctionnalité de quartier au sein de la fonction de police locale.
24

1. Recension ciblée des recherches empiriques nationales et internationales portant
sur les inspecteurs de quartier ou des figures correspondantes
La première phase de la recherche se base sur une étude de la littérature nationale et
internationale. On donne un aperçu structuré des résultats des recherches en rapport avec le
travail de quartier (voir chapitre 2). Par cette méthode, les obstacles à la mise en place d’un
travail de quartier ont été listés. Il existe nombre de publications concernant ce travail de
quartier, ce qui nous a permis de faire un bilan des données déjà analysées avant et après la
réforme de la police. Celles-ci serviront ainsi de mesure zéro (nul meting) permettant
d’évaluer les modifications et les évolutions qu’ont permis (ou contrecarré) les 12 années qui
ont suivi le vote de la LPI de 1998.
2. Echantillonnage des corps de polices locales
S’agissant d’une recherche qualitative, et vu le temps imparti à la recherche, nous avons
privilégié la constitution d’un échantillon varié des corps de police à investiguer. Sans
prétendre à la représentativité de ceux-ci, avons donné la priorité, dans le choix des polices
locales, à trois critères d’hétérogénéité :
- un critère territorial et linguistique (Région flamande, Région bruxelloise, Région
wallonne),
- un critère lié au développement urbain (zone urbaine, zone semi-urbaine, zone rurale),
- un critère de taille des corps de police (petit corps, moyen corps, grand corps).
Des données seront ainsi récoltées dans 7 corps de police locale (2 en Région bruxelloise, 3
en Région flamande, 3 en Région wallonne). Les zones de police suivantes ont été définies, en
accord avec les autorités subsidiantes et les commanditaires de la recherche.
La prise de contact s’est déroulée comme suit. Dans une première phase, nous avons envoyé
un mail aux chefs de zone de tous les corps sélectionnés. Ce mail contenait une lettre avec un
bref exposé des buts de la recherche, de la méthode méthodologique et des documents à
collecter. Pour finir, nous leur avons demandé s’ils étaient d’accord que nous fassions des
observations in situ et que nous organisions des entretiens. Chaque zone a réagi positivement.
Dans une deuxième phase, nous avons contacté les chefs de zone par téléphone pour fixer des
arrangements pratiques. Nous avons reçu les données des responsables de quartier, et puis
nous avons établi un planning. Ce planning englobait la période dans laquelle les entretiens et
les observations devraient se passer ainsi que les coordonnées des personnes en question. Il
est important à mentionner que nous avons déjà garanti à ce moment l’anonymat dans
l’analyse des documents, les observations et les interviews.
25

3. Entretiens semi-directifs et « mini » immersions
Les observations et les entretiens ont été faits dans un délai de trois mois. Nous avons calculé
cinq à six jours par zone (en semaine et pendant les week-ends) pour interroger quelques
personnes clefs et faire les observations.
L’anonymat des enquêtés a été garanti à toutes les étapes de la recherche. Une fois sur place
nous avons reçu la documentation demandée (certaines zones l’avaient envoyé à l’avance à
l’université). Il s’agit d’information importante qui doit nous permettre d’avoir un aperçu
général de l’organisation du travail de quartier, de la fonctionnalité de quartier et de
l’inspecteur de quartier : organigrammes du corps de police, documents internes encadrant le
service de quartier, plan zonal de sécurité, politiques locales en matière de sécurité et de
prévention (plan stratégique, contrat de ville durable, évaluation interne, etc.), moniteur de
sécurité local (le cas échéant), etc. Ces documents servent comme complément des données
empiriques. Nous avons étudié chaque document méticuleusement et résumé l’essence de
l’information obtenue dans un fichier Excel (schèmes).
Les entretiens semi-directifs ont été faits auprès des personnes clefs capables de donner de
l’information concernant le travail de quartier et la fonctionnalité de quartier. Il s’agit de chefs
de zone, responsables de quartier et responsables de la politique locale de sécurité et de
prévention. Ces entretiens sont importants pour obtenir une vue globale de la fonctionnalité de
quartier et de l’organisation du quartier. La méthode utilisée nous permettait aussi d’examiner
de plus près l’intégration du travail de quartier au sein de la police locale ainsi que la place du
travail de quartier et de la fonctionnalité de quartier dans la politique locale de sécurité et de
prévention. L’avantage d’une telle technique de recherche est qu’on peut détecter en avance
quelle information il faut rassembler. Une méthode semi-directive permet de faire l’inventaire
des sujets et/ou des questions en laissant suffisamment d’espace pour permettre aux enquêtés
de s’exprimer sur des sujets divers ou des thèmes qui n’étaient pas prévus sur la liste, mais qui
pourraient être importants pour la recherche.
Plusieurs jours par zone, nous avons accompagné les inspecteurs de quartier dans le cadre des
observations (participantes). Ceci nous permettait de recueillir des données sur le terrain, ce
qui donne une plus-value dans plusieurs domaines. En utilisant plusieurs techniques de
recherche on peut comparer des données, les compléter et les situer dans une perspective plus
large. Dans ce cas, on ne fait pas seulement appel à des informations orales, mais on peut
aussi recueillir des données sur ce qu’on voit et aperçoit soi-même sur le terrain, ce qui
augmente la fiabilité du matériel empirique (Baarda, De Goede & Teunissen, 2005). On peut
plus facilement mesurer les contradictions, contrôler des propos par ce qu’on observe soimême
et contextualiser le travail de quartier. Les observations faites permettent de développer
la dimension professionnelle, notamment concernant les perceptions des inspecteurs de
quartier quant à leurs tâches et leur comparaison vis-à-vis d’actions concrètes sur le terrain. Il
va de soi que les observations étaient limitées dans le temps. Néanmoins nous avons pu voir
sur place comment les interactions entre les inspecteurs de quartier et les habitants des
26

quartiers se déroulent et nous avons obtenu une vue des partenariats. Ces partenariats ont tant
concerné les modèles de collaboration entre les services et fonctionnalités de la police locale
que les partenaires externes (comme la commune). Ces mécanismes d’interaction sont en effet
importants, de même que la manière dont ils sont ressentis (les points positifs et les
obstacles). Sur base de cette information, nous avons pu mieux organiser les focus groupes.
Après concertation avec les membres du comité d’accompagnement nous avons décidé de
mettre l’accent surtout sur les données issues des observations, car la perception des
inspecteurs de quartier par rapport à leur paquet de tâches, ainsi que les obstacles à la mission
et la motivation des acteurs forment un objectif important de la recherche. A cet égard nous
avons dès lors moins privilégié les entretiens et davantage participés aux observations
participatives. Les entretiens seront, dès lors, plus limités et la priorité donnée à l’observation
participante permettra de recentrer les entretiens sur les données concrètes récoltées lors des
immersions et de poser des questions plus pointues et plus spécifiques aux responsables des
services de quartier et aux chefs de corps.
4. Les focus groupes
L’importance de cette interaction nous a motivé à privilégier une autre méthode de récolte de
données permettant de mettre en évidence ces dynamiques relationnelles.
Ainsi, s’agissant de faire apparaître à la fois des pratiques policières et des éléments
d’organisation ayant une influence sur celles-ci, nous avons opté pour le recours à des focus
groupes. Dans les focus groupes on rassemble divers partenaires afin de contrôler
l’information. L’objectif est d’entamer un dialogue dynamique (Wilkinson, 2004 : 177). Les
focus groupes doivent permettre de discuter du vécu et des expériences des inspecteurs de
quartier et de leurs responsables. Ils ont permis à la fois de récolter des données objectives sur
l’organisation concrète du travail et la fonctionnalité de quartier, mais également d’observer
les interactions et les confrontations des points de vue et de faire émerger les enjeux qui
entourent le travail et la fonctionnalité de quartier et les éléments pertinents concernant la
dimension professionnelle. Plus dynamique et spontané que l’entretien individuel, le focus
groupe oblige, en effet, les acteurs interrogés à expliquer leur réponse et à « affûter » leurs
arguments afin d’être convaincants pour le reste du groupe. Il constitue une méthode
favorisant la communication est particulièrement adapté pour déterminer le sens que les
acteurs (re)donnent à leurs actions, mais également « leurs systèmes de valeurs, leurs repères
normatifs, leurs interprétations de situations conflictuelles ou pas » (Quivy & Van
Campenhoudt, 1995 : 196).
Pour la composition de ces focus groupes, nous avons également privilégié les échantillons
variés, plutôt que représentatifs. Concrètement, l’organisation des focus groupes se fera sur
base de deux critères d’homogénéité :
27

- Une homogénéité territoriale. Pour des raisons de langue utilisée, de partage des
tâches entre les deux universités partenaires et, en posant l’hypothèse de différences
en termes de logiques d’actions et des contextes socio-économiques qui peuvent
influencer les pratiques et l’organisation des services, les focus groupes ont été
organisés par Région (bruxelloise, flamande et wallonne).
- Une homogénéité du niveau d’intervention. Afin de permettre une parole la plus libre
possible et dans un souci de comparaison entre des réalités différentes à ces deux
niveaux d’intervention, nous avons distingué les focus groupes composés des acteurs
de terrain des focus groupes composés des responsables policiers. Nous avons
privilégié par ailleurs, pour les deux, des acteurs ayant un nombre significatif d’années
d’expérience.
Les participants aux focus groupes sont des personnes des zones sélectionnées dans une phase
précédente. Les données obtenues lors des observations et des entretiens nous ont, en effet,
principalement donné une vue sur la dimension professionnelle. Bien que nous possédions des
données concernant les autres dimensions (organisation et fonctionnalité), celles-ci étaient
trop limitées pour avoir une vue adéquate sur la transversalité présupposée. Etant donné cette
transversalité constitue la cible principale de la recherche, nous avons organisé et composé les
focus groupes sur base des zones sélectionnées dans la phase précédente de la recherche. Ceci
nous a permis d’analyser plus en profondeur les thèmes de la recherche et de vérifier toutes
les données. Bien que les membres du comité d’accompagnement nous aient demandé
d’ajouter d’autres corps dans les focus groupes, nous avons préféré intégrer cette demande
dans le cadre d’une méthode supplémentaire (cfr. Séminaire, infra). Ainsi nous pouvions
garantir une meilleure validité scientifique dans la méthodologie implémentée.
Deux types de focus groups ont ainsi été prévus (organisation des focus groups):
- 3 focus groupes (un par Région) composés d’une dizaine d’inspecteurs de quartier
des zones de police retenues dans l’échantillon. Ceux-ci ont servi principalement à
investiguer la dimension professionnelle du métier d’inspecteur de quartier, mais
également, de manière plus incidente, de tester nos premières données sur les
dimensions organisationnelle et fonctionnelle (en particulier ici, la question du rôle
spécifique et des missions prioritaires).
- 7 focus groupes (un par zone de police) composés de responsables policiers des 7
fonctionnalités de la fonction de police de base. Ceux-ci se sont axés
principalement, mais pas uniquement, sur l’intégration de la fonctionnalité de quartier
au sein de la fonction de police de base et sur son articulation (réelle, idéelle et
possible) aux autres fonctionnalités et aux autres services (notamment au regard du
modèle de community policing).
Une partie des deux types de focus groupes s’est axé sur la question de l’avenir de la place du
travail de quartier et de la position de la fonctionnalité de quartier (phase deux de la
recherche).
28

Comment avons-nous organisé méthodologiquement les focus groups ?
Les focus groupes « inspecteurs de quartier » se sont axés principalement sur les missions et
les tâches prioritaires et sur les pistes d’améliorations générales du travail de quartier, de la
fonctionnalité de quartier et du service de quartier. Plus concrètement, ces focus groupes
s’organisaient autour de deux parties : une première partie qui concernait les missions et les
tâches spécifiques (idéelles et réelles) des inspecteurs de quartier et la conception générale qui
en ressort de ce qu’est très concrètement la spécificité de cette fonctionnalité. La deuxième
partie concernait les pistes d’amélioration (institutionnelles, organisationnelles et
professionnelles) du travail des inspecteurs de quartier, du service de quartier et de la
fonctionnalité de quartier. Par partie, nous avons utilisé quelques instruments
méthodologiques. En ce qui concerne les missions et les tâches , nous avons établi un tableau
sur base des données empiriques qui ont été rassemblées lors des observations et des
interviews. Ce tableau a consisté en une énumération de tâches et a été distribué le jour même
aux inspecteurs de quartier. Ils devaient indiquer le temps qu’ils accordent à chaque tâche. Par
après, tous les résultats ont été fusionnés et additionnés. Cela nous permettait de créer un
tableau récapitulatif. Il est évident que les résultats ont été discutés lors du déroulement des
focus groupes. De cette façon, on a pu vérifier pourquoi certaines différences existent, s’il y a
des différences dans l’organisation de la zone et dans la nature du quartier, quels obstacles
sont constatés et si les missions proposées diffèrent de la pratique de terrain. Nous avons
ensuite soumis au groupe quelques casus, pour lesquels les inspecteurs de quartier devaient
indiquer comment ils prennent en charge ces événements ou ces situations. Cette manière de
faire a permis de vérifier de quelle façon l’on traite les problèmes liés à un quartier, et si on
fait appel à la participation de services internes (de police) ou externes (en dehors de la
police). La deuxième partie du focus groupe s’est concentrée sur les améliorations du travail
de quartier. Pour cette partie, nous avons établi un nouveau tableau avec une énumération des
améliorations possibles. Chaque inspecteur de quartier devait indiquer cinq améliorations
qu’il percevait comme prioritaires. Dans le tableau, il était également prévu que l’inspecteur
puisse ajouter d’autres améliorations. Il est, cependant à remarquer que personne n’a utilisé
cette option. Par après, tous les résultats ont de nouveau été rassemblés et discutés afin de
vérifier pourquoi certaines options ont été choisies et quelles améliorations étaient prioritaires.
On peut retrouver tous les instruments utilisés en annexe.
Les focus groupes « responsables des fonctionnalités de base » s’orientaient en premier lieu
sur la façon dont le travail de quartier est intégré dans la fonction de police locale. Plus
concrètement, ces focus groupes se sont organisés autour de six casus concrets impliquant une
ou plusieurs fonctionnalités du corps de police afin de déterminer les modalités réelles de
collaboration et d’intégration entre ces fonctionnalités, et en particulier avec la fonctionnalité
de quartier. Ces casus situationnelles englobaient plusieurs événements qui nécessitent une
action de la part de la police. Puisque l’approche de criminalité, de l’ordre public ou de
l’insécurité demande souvent la participation de plusieurs fonctionnalités, la question était de
savoir comment cette participation prenait forme dans la pratique. En effet, un pilier
important de la réforme de la police est la réalisation d’une meilleure collaboration entre les
29

différentes fonctionnalités de base. Mais la façon dont elle prend forme dans la pratique n’est
pas claire. Par la même occasion, nous avons sondé la nature des liens de collaboration et la
fonction/utilité que les responsables des différentes fonctionnalités attribuent au travail de
quartier et à la fonctionnalité de quartier. On peut retrouver les casus qui ont été utilisés dans
ce focus groupe dans les annexes. La deuxième partie de ces focus groupes a porté sur les
pistes d’amélioration de cette collaboration et/ou intégration. C’est notamment, mais pas
seulement, dans ce cadre, qu’il est apparu évident que fonctionnalité (pour la fonctionnalité de
quartier mais également pour les autres) était synonyme de services spécifiques.
En pratique, l’organisation de ces focus groupes n’a pas du tout été évidente. On a dû
mobiliser, dans un délai très court, des groupes de personnes dont la fonction même les rend
parfois très peu disponibles. Dès lors, nous avons dû scinder plusieurs focus groupes en de
plus petits groupes, car il n’était pas toujours possible pour les répondants de se libérer au
même moment. Ce qui implique que nous avons dû réserver plusieurs jours pour
l’organisation de tous ces focus groupes. Concrètement, nous avons organisé des focus
groupes dans lesquels plusieurs zones (en Flandre, à Bruxelles et en Wallonie) se réunissaient.
Ces groupes étaient très étendus, mais étaient méthodologiquement intéressants dans la
mesure où la confrontation de réalités différentes a pu être une richesse. On pouvait donc
vérifier les divergences sur place. D’autres focus groupes étaient tellement petits que dans
leur cas nous pouvons plutôt parler d’entretiens multiples. Il s’agissait surtout des focus
groupes avec les responsables des fonctionnalités de base.
5. L’enregistrement et le traitement des données
Comme pour les entretiens, les focus groupes ont été enregistrés à l’aide d’un magnétophone,
après avoir reçu l’accord des répondants et après les avoir rassurés sur leur anonymat. Ces
enregistrements ont été retranscrits. Un focus groupe a refusé l’enregistrement, et dans ce cas
nous avons noté les informations dans un cahier. Après avoir noté toutes les informations,
nous avons analysé et structuré toutes les données sur base de schèmes d’analyse. De cette
façon, nous avons un aperçu de toutes les correspondances et divergences dans les réponses.
Et ça nous permet de les réintégrer dans le contexte des zones et des quartiers au sein de ces
zones dans l’analyse.
Lors des observations participantes, nous avons également noté les observations et les
données récoltées dans un cahier. Dans ce cas également, l’anonymat a été garanti. Les
répondants n’avaient pas d’objections. Nous n’avons pas utilisé ces cahiers quand l’inspecteur
de quartier avait des conversations confidentielles avec les riverains ou lors d’interactions
avec la population. Les informations observées ou l’information portant sur le contenu n’ont
en aucun cas été utilisées pour ne pas trahir la confiance et pour garantir l’honnêteté
scientifique. Lors de l’enregistrement des données, nous avons fait une distinction entre des
données objectives et nos interprétations personnelles.
30

6. Techniques de recherche multiples : avantages et désavantages
Le volet empirique de cette recherche contient plusieurs méthodes de récolte de données. Ceci
nous permet de nuancer et de confronter les données. Les observations et les entretiens sont
basés sur des enquêtes individuelles, contrairement aux focus groups qui permettent, de
manière plus collective, de confronter différentes opinions et visions. L’avantage scientifique
de ceci est que l’on peut plus facilement tracer en carte les interactions. Le travail de quartier
et son interaction au sein de la police locale sont analysés dans le cadre de la structure des
différentes zones de l’échantillon. Le désavantage des focus groupes est cependant que les
débats collectifs, s’ils activent des dynamiques, peuvent également renforcer certaines
visions. La sociologie montre, en effet, que « penser en groupe » est une façon de raisonner
dans laquelle il est plus important de maintenir la cohésion et la solidarité du groupe que
d’envisager les données d’une façon réaliste (Aronson, Wilson & Akert, 2007: 320). Nous
devons prendre en compte cet élément. Ce n’est pas le cas dans des entretiens individuels, ou
de tels biais sont moins présents. Le désavantage de ces entretiens est, cependant, que les
réponses ne peuvent pas être « testées » et qu’on n’a pas de données sur les interactions
mutuelles. Pour cette raison, il est important d’intégrer plusieurs techniques de recherche. Les
analyses comparatives augmentent la fiabilité des résultats et permettent de tenir compte des
modèles d’interaction. Des focus groupes et les entretiens, analysés en parallèle, permettent
de mettre en évidence des visions, des descriptions, des opinions et des interactions. La
contextualisation de ces données est aussi un pilier important de cette recherche. Les
observations permettent de réaliser, en partie, cette contextualisation. On collecte des données
sur le terrain. Grâce à cela on peut vérifier sur place à quelles missions les inspecteurs de
quartier sont réellement confrontés et dans quelle mesure la nature du quartier joue un rôle sur
les pratiques de terrain.
En bref, chaque technique de recherche est alliée à des avantages et des désavantages qui
dépendent de la nature de l’information qu’on essaie d’obtenir.
Phase 2 : réflexion sur l’avenir de la place du travail de quartier et de la position de la
fonctionnalité de quartier
1. Analyse des données de la recherche empirique
Dans cette phase, toutes les données rassemblées ont été analysées. Grâce à ceci, nous avons
pu faire le bilan, d’une part, de la place du travail de quartier et des inspecteurs de quartier au
sein de la police locale et de la gestion locale de la sécurité et, d’autre part, de la position de la
fonction(nalité) de quartier au sein de la fonction de la police locale. Cette analyse nous
permet d’offrir quelques éléments de prospective ainsi que de formuler des recommandations.
Sur demande de la commission d’accompagnement, nous les avons, en partie, testés sur base
de deux séminaires supplémentaire. Les conclusions que nous avons formulées sont basées
sur la littérature scientifique concernant le travail de quartier et la fonctionnalité de quartier
dans le modèle plus large de « community policing ».
31

2. Séminaires supplémentaires
A la demande de la commission d’accompagnement nous avons introduit une méthode de
recherche supplémentaire, afin de récolter d’autres données provenant d’autres zones de
police que celles participant déjà à la recherche. Initialement la commission
d’accompagnement voulait l’introduction de deux focus groupes supplémentaires. Vu la durée
brève de la recherche et le fait que deux focus groupes supplémentaires mettrait en danger la
structure méthodologique de la recherche, nous avons préféré organiser des séminaires. Ces
séminaires (un en français et un en néerlandais) ont été composés sur base d’une liste venant
du SPF Intérieur, sur proposition de la Commission permanente de la police locale. Toutes les
zones proposées ont été contactées par mail et par téléphone. Pendant ces séminaires, les
résultats de la recherche ont été présentés, ainsi que des recommandations basées sur ces
résultats. Sur base du feedback des zones participantes, nous avons pu, le cas échéant, rectifier
et/ou complémenter notre analyse.
32

4. Plein feu sur le travail du quartier : un bilan empirique sur son
organisation, ses missions, ses tâches et sa professionnalité
- « Geen enkele organisatievorm en geen enkel systeem
is volmaakt en zonder organisatorische problemen 18 » -
Cette partie du rapport décrit les résultats des observations, les « mini-immersions », et des
focus groupes 19 . Comme mentionné, la recherche exécutée est inductive, ce qui implique que
les (premiers) pas de recherche sont ciblés sur la présentation synthétique données spécifiques
de terrain. Cette façon de travailler a comme grand avantage qu’on prend les résultats
empiriques comme point de départ afin d’aboutir à des propositions plus générales (Billiet &
Waege, 2006: 34). On génère des idées et des hypothèses (Baarda, De Goede & Teunissen,
2005: 101) dont les points d’attention son placés sur l’étude des structures, des processus et
des interactions. Mettre en œuvre une telle méthodologie de recherche pour le travail de
quartier donne une plus-value car elle permet de se reposer également sur les différentes
(res)sources littéraires tant nationales qu’internationales par rapport à la police de proximité
ou eu community policing qui permettent, elles-mêmes, de poser un certain nombre
d’hypothèses concernant le fonctionnement de ce travail de quartier. Le but est ainsi d’obtenir
une vision sur le travail de quartier actuel au départ des pratiques de terrain. La littérature
rassemblée (aussi bien celle d’avant que d’après la réforme de la police) sert de cadre de
référence. Partant de la base des données rassemblées nous arriverons par après à des
conclusions et des propos plus généraux.
Il va sans dire que la réforme de police belge de 1998 a entraîné beaucoup de changements.
La transformation d’une vision plutôt « militariste » de la police, sur base d’une « hiérarchie »
organisationnelle à trois niveaux (gendarmerie, police judiciaire près les parquets et police
communale) vers une approche orientée vers la communauté et structurée sur deux niveaux
intégrés (fédéral, local ; Van Den Wijngaert, 2006: 550-551) a eu pour conséquence un
changement au niveau de la répartition territoriale, des missions, du leadership et de
l’exécution opérationnelle. Il est évident que cette transition a une influence sur l’intégration
du travail de quartier comme composante de la police locale. Le travail de quartier, qui avant
1998 faisait partie de la police communale, avait dans le passé un rôle plutôt dévalorisé (Van
Outrive, Cartuyvels & Ponsaers, 1991 ; Enhus, 2007). La réforme a théoriquement modifié ce
positionnement, car aujourd’hui on décrit le travail de quartier (en réalité, idéalement, la
fonctionnalité de quartier) comme le fondement des services de police orientée vers la
communauté 20 . Il y a eu aussi des changements au niveau de l’ancrage géographique de la
police locale (classification zonale ; zones monocommunales ou pluricommunales ;
18
A.T. Collier, F. Herzberg, A.E. Pearson et al. (1988), Organisatie en personeelsmanagement, Amsterdam:
Harvard Classics, 79.
19
Pour une description plus détaillée de l’encadrement méthodologique voir le chapitre 3.
20
Circulaire ministérielle PLP 10 du 9 octobre 2001 concernant les normes d’organisation et de fonctionnement
de la police locale visant à assurer un service minimum équivalent à la population (M.B., 2001.X.16).
33

épartition structurelle de quartiers au sein des zones). La façon dont tout ceci a une influence
sur le fonctionnement actuel de la police de quartier sera examinée plus en détail.
Les dimensions traitées plus tôt (professionnelle, fonctionnelle et organisationnelle) sont
importantes pour l’analyse du travail de quartier. Le travail de quartier fait aussi partie d’un
ensemble plus large (la police comme organisation), ce qui explique que la place de ce service
dans la police locale doit être examinée de plus près. La transversalité par rapport à la gestion
des problèmes de quartier et des interactions avec les habitants des quartiers est essentielle
dans cette approche ainsi que l’approche dans et entre les territoires déterminés
géographiquement (quartier, commune et zone de police) dans lesquels les inspecteurs de
quartier sont actifs.
4.1 Introduction : remarque préalable
Examiner l’importance d’une approche transversale est, comme nous l’avons indiqué, un
objectif important de cette recherche. Pour obtenir une image adéquate du travail de quartier,
il est important d’intégrer ensemble des dimensions « organisationnelles », « fonctionnelles »
et « professionnelles » dans l’analyse des données.
Les observations ou « mini-immersions » ainsi que les focus groupes ont largement montré
une certaine divergence entre ces trois dimensions. Sur le plan organisationnel, par exemple,
il est difficile de percevoir la façon dont les différentes fonctionnalités de base du corps de
police, et les services qui doivent – en pratique – les mettrent en œuvre, interagissent.
Certaines zones de police ont ainsi préconisé le développement d’une structure dans laquelle
tous ces services ont la possibilité de se contacter régulièrement (hébergement commun dans
le commissariat, réunions hebdomadaires ou mensuelles, implémentation d’une grille
d’organigramme, instauration de coordinateurs, etc.). D’autres zones tentent de mettre en
place ce type de structure mais en investissant davantage le terrain (accentuation de
l’importance de contacts informels, investissement dans des projets spécifiques pour des
phénomènes, etc.). Au plan fonctionnel, il apparaît que les objectifs et les missions du travail
de quartier sont particulièrement difficiles à définir. Bien qu’il soit fait référence au cadre
législatif ou réglementaire, les descriptions de ces objectifs ou de ces missions sont souvent
relativement vagues et peu concrètes. Le travail de quartier est encore considéré comme
devant être intégré dans un service spécifique, flexible qui doit d’abord tenir compte des
besoins locaux, sans que l’on sache comment ces derniers sont définis. Concrètement, cette
position justifie souvent une approche empirique des objectifs et des missions : ce serait ainsi
aux opérateurs du travail de quartier de chercher activement une définition spécifique à leur
domaine et cela, en miroir (parfois en négatif) des autres services assurant d’autres
fonctionnalités de base. Un tel positionnement n’est pas sans poser des contradictions : d’un
côté, plusieurs zones de police considèrent le travail de quartier d’abord comme intégré dans
un service administratif (gestion des « pièces ») et de récolte de l’information, d’un autre côté,
il faudrait que les inspecteurs de quartier soient aussi des spécialistes en matière de quartier,
chargés d’être présents, le plus souvent possible, dans celui-ci. Ces demandes contradictoires
34

sont possibles en raison justement d’une définition trop imprécise des objectifs et des
missions du travail de quartier. Au plan professionnel, on constate également un fossé
important entre, d’une part, les compétences préconisées par le « profil de fonction » proposé
par les responsables policiers et, d’autre part, les obstacles concrets en matière de recrutement
qui empêchent de rencontrer ce profil « idéal ».
Nous aurons l’occasion de revenir sur ces différents résultats, mais ces premiers constats nous
permettent de souligner que la ligne de démarcation entre les trois dimensions n’est pas
toujours très claire. Ces constatations montrent néanmoins que les approches aux niveaux
organisationnel, fonctionnel et professionnel s’influencent réciproquement et que c’est
souvent dans l’interaction entre ces différentes dimensions que l’on peut identifier les enjeux
les plus intéressants quant à la place (et à l’avenir) du travail de quartier. En d’autres termes,
s’il peut être intéressant d’identifier, en les isolant, chacun de ces niveaux de compréhension
de la réalité policière, c’est surtout l’interaction, les compromis et les tensions entre ces
différentes dimensions qui rendent notre objet de recherche particulièrement intéressant mais
également complexe à analyser et à comprendre. Non seulement ces dimensions peuvent être
en concurrence du fait que chacune d’entre elles favorise des logiques (d’action) différentes,
mais ces concurrences sont au centre de la détermination des dynamiques policières
(Monjardet, 1996, 198).
4.2 La place du travail de quartier dans la police locale du point vue de
l’organisation
Par définition, les organisations se caractérisent par des liens de collaboration dont la finalité
est de réaliser un objectif ou des objectifs préétabli(s) (Van Aken, 2003: 66). Il va de soi que
ces objectifs peuvent être très divers et très différents, comme c’est le cas de l’organisation
policière avec ses fonctionnalités de base.
Dans plusieurs domaines la police locale n’est pas une organisation comme les autres,
notamment en raison d’une finalité très générale (maintenir et restaurer l’ordre public, en ce
compris en luttant contre la délinquance) et d’un moyen particulier (l’usage légitime de la
force et de la contrainte) (Bittner, 2004: 165). Ces caractéristiques sont aussi celles du travail
de quartier. En outre, sa structure est ancrée géographiquement, ce qui fait que son
fonctionnement dépend de la localité dans laquelle elle agit, de ses intérêts propres et de ses
spécificités. Deux groupes principaux s’imposent dans ses rapports de collaboration, à savoir
les parties intéressées, internes et externes. La première catégorie est orientée sur les
collaborateurs de la police. En général il s’agit de dirigeants, du « middle management » (les
responsables des fonctionnalités et des services devant les mettre en oeuvre) et des exécutants.
Bien que beaucoup ait déjà été dit sur le rôle des dirigeants et des exécutants dans la
littérature, il est important de mentionner qu’il n’y a que très peu de sources disponibles
concernant ces responsables. Néanmoins ces membres du personnel sont responsables des
missions et de la coordination des fonctionnalités de base (i.e. le travail de quartier, l’accueil,
l’intervention, l’assistance policière aux victimes, le trafic, la recherche locale et le maintien
35

de l’ordre public) et des services devant les mettre en oeuvre. La deuxième catégorie de
partenaires, les « externes », est composée par les citoyens et leurs représentants. Par
l’introduction du « community policing » comme modèle de fonctionnement actuel, la place
de la police est décrite comme « organisme dans la société civile qui, ensemble avec les
citoyens, participe à la préservation pour chacun des droits de l’homme » (Van Ryckeghem
& Hendrickx, 2001 : 67, nous traduisons). Ceci implique que le contact avec la population est
primordial pour garantir un fonctionnement optimal.
Ces deux catégories de partenaires, les collaborateurs de la police et la population, jouent un
rôle important dans la manière dont la police locale essaie de structurer son organisation,
c'est-à-dire la façon dont est défini le canevas sur lequel elle répartit les opérations entre ses
collaborateurs. Cela a une influence sur la description des services, les tâches fixées et les
voies de communication implantées (Keuning & Eppinck, 1993: 83). Comme nous l’avons
déjà mentionné, les zones de police locale sont ancrées géographiquement. Ceci a également
un effet sur la structure organisationnelle. Depuis la fusion des zones Maasmechelen et
Lanaken en 2011, il y a aujourd’hui 195 zones de police. Il y a 51 zones mono communales,
dans lesquelles l’encadrement structurel est limité à la commune en question et le chef de
corps dépend comme dirigeant de la gestion de police locale (De Kimpe, 2006) de l’autorité
politique d’un seul bourgmestre. Il y a aussi 144 zones pluricommunales. Dans ces zones, le
chef de corps dépend de l’autorité d’un collège de bourgmestres avec ce que cela implique de
complexité et de négociations politiques. La police locale est, comme niveau de la police
intégrée, représentée par la Commission Permanente de la Police Locale (CPPL). Hormis
quelques textes fondateurs (dont la circulaire PLP 10), la structure organisationnelle
(organigramme) d’un corps de police n’est pas uniformisée par les normes. Celle-ci dépend
donc de la gestion policière menée, de la ou des politique(s) communale(s) et de la vision des
dirigeants. Tous ces aspects sont importants pour mieux comprendre l’intégration
organisationnelle du travail de quartier. En effet, celle-ci dépend de la façon dont ce travail est
intégré dans la structure générale.
Dans le cadre du projet de recherche, nous avons étudié le travail de quartier de huit zones de
police. Dans la sélection, nous avons tenu compte des Régions (Région Wallonne, Région de
Bruxelles-Capitale, Flamande), la composition de la zone (zones mono communales et
pluricommunales), le territoire (urbain, semi-urbain, rural) et la taille du corps (grande,
moyenne et petite). Même si cet échantillonnage n’autorise pas à généraliser nos résultats, la
diversité de cette sélection nous permet d’analyser la structure organisationnelle de corps de
police locale très différents, et connaissant des réalités contrastées, et par conséquent, de
proposer une vision tendancielle sur la façon dont le travail de quartier est incorporé dans la
police locale.
4.2.1 La place du travail de quartier dans l’organigramme
Si la structure organisationnelle d’un corps de police local dépend de la gestion policière
menée dans la zone en question, ceci implique logiquement l’existence de divergences parfois
36

importantes dans cette structure. En général, on peut dire qu’il y a deux niveaux structurels
qui peuvent faire l’objet d’une analyse : d’une part, la répartition verticale des tâches et,
d’autre part, la répartition horizontale des tâches.
La première – répartition verticale – renvoie à la répartition entre la direction, le « middle
management » et l’exécutant. Dans certaines organisations, cette délimitation est plus souple
c'est-à-dire que la concertation entre les différents cadres est effectuée de manière moins
rigide du point de vue hiérarchique. Dans les autres organisations, c'est-à-dire dans la plupart
de corps de police locale investigués, la structure connaît une séparation plus stricte, très
hiérarchisée, voire militaire. Tout dépend donc la valeur que l’on donne à une structure
hiérarchique (Debandt & Walravens, 2005). La structure horizontale, quant à elle, renvoie à la
répartition des activités entre personnes qui collaborent au même niveau de direction et
d’exécution. Dans les corps de police locale, les classifications fonctionnelles 21 et
géographiques 22 joue un rôle important dans cette répartition. Une comparaison des données
empiriques indique, dès le début, que la structure verticale est la même dans tous les corps
observés. Cependant au niveau de la répartition des tâches horizontale il y a une (forte)
variation entre les différents corps.
Un premier indicateur de différenciation se situe au niveau du partage entre les zones
monocommunales et les zones pluricommunales.
Tout d’abord, si un corps de police locale couvre plusieurs communes, dans la plupart des cas,
cela a une influence sur la répartition des commissariats 23 sur plusieurs territoires (en général
pour garantir l’accessibilité et la coordination communale). Evidemment, cela a un impact sur
l’organisation structurelle, car on doit tenir compte d’une plus grande répartition territoriale
des compétences (décentralisation et, le cas échéant, déconcentration de lieux décisionnels) et
de la multiplication de canaux de communication qu’induit un morcellement des lieux de
gestion du service de police locale. Dans beaucoup de cas, les liens de collaboration sont
beaucoup moins concentrés. La situation est différente pour les zones monocommunales
investiguées, qui ont toutes un seul commissariat, mais cette situation est clairement due ici au
fait que par ailleurs les zones monocommunales de notre échantillon étaient toutes de tailles
réduites.
Dans la classification fonctionnelle, il y a une deuxième distinction. En comparant les
données des huit corps nous trouvons trois différences.
1) Il y a les zones de police locales qui utilisent une délimitation hiérarchique dans les sept
fonctionnalités de base. Celle-ci implique qu’est présupposée une certaine spécialisation en
matière de compétences et d’exécution des tâches ; pour le dire autrement les fonctionnalités
sont majoritairement organisée en services spécifiques, avec un responsable de ce service qui
21 Synchronisation des missions de police de base.
22 Activités dispersées sur un territoire (relativement grand).
23 En général, subdivisé en un commissariat principal et plusieurs commissariats secondaires, dans lesquels
seulement une partie des fonctionnalités est mise en oeuvre.
37

devient, généralement et dès lors, responsable de la fonctionnalité. Stricto sensu, dans ce
cadre, toutes les fonctionnalités sont subdivisées, comme dans la « structure linéaire »
(aplatie, qui possède un nombre très limité de niveaux hiérarchiques). Ceci implique qu’il y a
une hiérarchie horizontale entre les différents services chargés de mettre en œuvre ces
fonctionnalités. Pour le travail de quartier, ceci signifie que :
• Toutes les tâches orientées quartier (i.e. la fonctionnalité de quartier) sont
assimilées au travail de quartier (i.e. les missions et les tâches du ou des services de
quartier et/ou des inspecteurs de quartier).
• Dès lors, et ce constat est d’importance, la fonctionnalité de quartier est limitée, en
termes organisationnels, à un service particulier spécifique.
• On trouve une certaine « compétence spécifique à la fonctionnalité », qui est présente
surtout – parfois uniquement- chez les responsables des quartiers et chez les inspecteurs
de quartier.
• L’utilisation des informations (et la communication sur ces informations) relatives aux
problèmes des quartiers est, dans la plupart des cas, limitée au travail de quartier sauf
s’il s’avère nécessaire que ces informations soient communiquées aux services internes
prenant en charge d’autres fonctionnalités (intervention, trafic, recherche, etc.), à la
police fédérale et /ou à des services externes (Sûreté de l’Etat, Service de
Renseignements de l’armées etc.), mais dans ces cas pour d’autres finalités que celle(s)
de la fonctionnalité de quartier.
• Les réunions concernant le travail de quartier se passent en général en interne au sein du
service de quartier, sauf dans les cas (exceptionnel) où d’autres réunions sont planifiées
(cfr. supra).
2) Mais il existe aussi des zones de police avec une structure décentralisée. On peut
comparer cette façon de travailler à une « organisation divisionelle ». Ces zones sont
caractérisées par un certain décloisonnement entre services et entre fonctionnalités. Par cette
façon de travailler les responsables et les inspecteurs de quartiers peuvent être confrontés à
des tâches qui transcendent les missions du service de quartier. Il n’est par exemple pas
exceptionnel que les responsables des quartiers soient par exemple aussi responsables du
service d’intervention. En conséquence, les connaissances sont diverses, ce qui mène à un
certain décloisonnement entre les diverses fonctionnalités. Les zones pluricommunales qui
implémentent une pareille structure se servent du principe de décentralisation géographique
en divisions très autonomes. La conséquence est cependant que les contacts entre les
différents commissariats sont réduits au minimum. La création de divisions plus petites est
considérée comme un atout pour la zone en sa totalité. Ainsi on peut mieux répondre aux
besoins et spécificités de la politique locale (bien que ceci n’est pas toujours visible dans la
pratique) et de la population.
3) Finalement, il y a un seul corps qui a subdivisé sa structure sur base de projets.
L’organisation fonctionne sur base de projets qui nécessitent une participation de tous les
services.Le projet « nuisance sociale » n’est, par exemple, pas limité à l’apport du travail de
38

quartier. Toutes les fonctionnalités sont impliquées dans l’approche. On fait appel à des
coordinateurs de projets pour avoir une vue d’ensemble de la participation des collaborateurs
(dirigeants et exécutants). On peut comparer cette structure à une « grille ». Là où une
« organisation linéaire » agit plutôt en partant du principe de l’unité de commandement, la
structure de projet connaît un double commandement, c'est-à-dire, d’un côté, la structure
hiérarchique classique et, de l’autre côté, la structure du projet (Debandt & Walravens, 2005).
Cette façon de travailler a été mise en place afin de mieux répondre aux besoins du citoyen.
Des problèmes de nuisances, de criminalité ou d’insécurité sont abordés sous différents
angles. Puisque toutes les fonctionnalités sont impliquées dans les projets, la communication
interne est plus facile et plus directe. En effet, en faisant appel à l’expertise de tous les
services, on développe la concertation. Le travail de quartier dans cette structure est donc en
contact direct avec, d’un côté, les coordinateurs de projets et, de l’autre côté, les
fonctionnalités de base (trafic, intervention, recherche, etc.). Plus encore, si les problèmes de
nuisances, de criminalité ou d’insécurité concernés se situent spécifiquement dans un quartier
particulier, on peut alors parler d’une approche policière orientée quartier qui devient alors
une approche par « fonctionnalité de quartier ». En d’autres termes, si le projet se fait par
quartier, tous les services qui interviennent dans ce projet participent alors à une
fonctionnalité de quartier. Ce cas est cependant rare pour l’ensemble des données récoltés.
Comme indiqué au début de ce chapitre, il n’y a aucune structure organisationnelle sans
pièges ou difficultés. La « structure linéaire » fonctionne selon le principe d’une hiérarchie
strictement déterminée. Comme l’indiquent les données empiriques, ceci facilite l’efficacité
de la tâche, mais rend la coordination mutuelle plus difficile. Le système par « grille » permet
d’éviter cela, mais entraîne des risques de conflits de loyauté et demande beaucoup de
motivation de tous les collaborateurs. Un fonctionnement décentralisé de son côté pourrait
mener à une réduction de la professionnalisation. Comme nous allons voir plus loin dans ce
chapitre, la structure organisationnelle à un impact sur la fonction et la pratique de terrain du
travail de quartier. Dans un premier temps, nous allons d’abord nous intéresser aux quatre
« D » : la décentralisation, la déconcentration décisionnelle, la déspécialisation et le
décloisonnement avec les autres services.
4.2.2 Les quatre « D » : décentralisation, déconcentration décisionnelle,
déspécialisation et décloisonnement avec les autres services
Comme mentionné, il y a une grande variation en matière de décentralisation de la prise de
décisions et en matière de marge décisionnelle. Un des buts importants de la réforme de la
police était de diminuer la subdivision hiérarchique stricte (Van Den Broeck & Eliaerts,
1994). Cela devait permettre le développement d’un partenariat qui réponde aux besoins de la
population et qui vise toutes les mailles de la chaîne de sécurité (Vandevenne, 2001). Cela
devait permettre aussi une approche « par fonctionnalités », plutôt qu’une approche « par
services ». Bien qu’au niveau organisationnel, plusieurs tentatives ont été faites, dans la
pratique la réalisation d’un fonctionnement décentralisé n’est pas facile à mettre en oeuvre. La
39

coordination entre les niveaux verticaux (dirigeants, middle management et exécutants), par
exemple, est difficile à réaliser.
La description relativement imprécise du travail de quartier, sur laquelle nous reviendrons
plus tard, est un bel exemple de ce problème. Une comparaison des données issues des
entretiens et des focus groupes, des documents concernant le travail de quartier et des plans
zonaux de sécurité nous montrent que les descriptions de missions définies par les dirigeants,
le « middle management » et les inspecteurs de quartier sont souvent contradictoires. Au
niveau des dirigeants, l’idée dominante, très doctrinale parfois, qui règne de la fonctionnalité
de quartier se résume, comme déjà souligné, à une « plus grande visibilité » des inspecteurs
de quartier, d’un « contact plus étroit » de ceux-ci avec la population, d’un travail de quartier
« qui résout des problèmes », d’un service qui permet de répondre « activement et
proactivement aux besoins liés aux quartiers », etc. De leur côté, et de manière très contrastée,
la description de leurs missions que font les inspecteurs de quartier renvoie davantage à des
tâches administratives et judiciaires, parfois peu en phase avec cette « visibilité, cette
« résolution des problèmes du quartier » et cet « accès au public ». La vision du « middle
management » de son côté se situe entre ces deux pôles, mais reste limité également au travail
de quartier. Pour les responsables du service de quartier, le travail de quartier doit être un
service avec une fonction de résolution des problèmes au niveau d’un territoire
géographiquement déterminé (les quartiers), ce qui nécessite un contact plus étroit avec la
population. Mais ils reconnaissent également que, vu les tâches très hétérogènes auxquelles
les inspecteurs de quartier sont confrontés, ce n’est pas toujours réalisable dans la pratique.
Les données issues des observations nous montrent qu’il y a très peu de synchronisation dans
les décisions entre ces trois niveaux. Les inspecteurs de quartier, par exemple, évoquent qu’on
tient trop peu compte de leur expérience sur le terrain dans l’organisation du travail de
quartier. Dans ce cadre, il est important de mentionner que ces données sont issues des
entretiens. Nous n’avons par contre que très peu d’observations sur le déroulement de ces
relations « dans les coulisses ». Le manque de confiance à l’égard des inspecteurs de quartier
est effectivement un constat récurrent de la recherche et se retrouve dans l’immense majorité
des zones étudiées. Un bel exemple de ce manque de confiance est la réticence concernant
l’implémentation des moyens technologiques d’information et de communication. Les
dirigeants sont par exemple hostiles à l’utilisation d’Internet et du GSM par les inspecteurs de
quartier parce que ceux-ci ne leur permet qu’un contrôle trop réduit du va-et-vient des
inspecteurs de quartier. La possession d’une adresse mail personnelle ou d’un numéro de
GSM leur donnerait trop de liberté vis-à-vis des décisions de la hiérarchie et leur permettrait
de mener des conversations qui grèveraient leur temps de travail. Cette réticence se retrouve
également dans la majorité des zones étudiées.
En ce qui concerne la déspécialisation et le décloisonnement entre les divers services, on peut
parler d’une forte variation d’une zone de police à l’autre. Il y a des zones qui, favorisant une
organisation policière plus souple en théorie du moins au niveau de ses fonctionnalités, mais
qui se traduit surtout par une incitation à un fonctionnement polyvalent au niveau de la
40

communication et de la collaboration entre les services. Il y a d’autres zones qui insistent
davantage sur l’importance d’une spécialisation approfondie (notamment du travail de
quartier) vu la nécessité de disposer de suffisamment d’aptitudes en lien avec le service
auquel on appartient. Une telle constatation n’est pas cependant pas nouvelle. Elle a toujours
fait partie des débats concernant l’organisation de la police. L’un des buts de la réforme était
de combattre les cloisonnements entre les services et les fonctionnalités (Van Den Broeck &
Eliaerts, 1994). En effet, une spécialisation approfondie peut avoir comme conséquence une
vision trop étroite, qui conduit à une concurrence malsaine entre les services. Le résultat en
est que les corps de police risquent de ne plus fonctionner comme une unité, ce qui peut être
néfaste dans l’approche de la criminalité et la nuisance et dans les contacts avec la population.
Les données empiriques, principalement issues des observations et des focus groupes,
soulignent que les inspecteurs de quartier sont régulièrement « mis à disposition » pour des
tâches émanant d’autres services. Ils doivent par exemple fréquemment entreprendre des
contrôles routiers, participer à des surveillances lors d’événements locaux ou zonaux, donner
du renfort lors d’appels d’urgence, fournir de l’information dans des dossiers venant d’autres
services (recherche, intervention, trafic, etc.), prendre contact avec des victimes de
cambriolages afin de les informer des mesures de prévention, etc. En d’autres mots, participer
à d’autres services que celui prenant en charge le travail de quartier, en palliant le manque
d’effectifs d’autres services. Au-delà de cette participation, en tant qu’inspecteurs de quartier,
à d’autres services, il existe également des cas où l’inspecteur de quartier « change »
régulièrement de « casquette ». Il y a par exemple des zones de police locales dans lesquels
les inspecteurs de quartier sont, chaque semaine, responsables des appels d’intervention et/ou
de l’accueil. En d’autres mots, ils exécutent plusieurs tâches (et plusieurs fonctionnalités) et
ne sont plus vus, durant celles-ci, comme des inspecteurs de quartier qui s’occupent
principalement du travail de quartier. On peut, dès lors, parler d’une forme de déspécialisation
et de décloisonnement, mais qui (on y reviendra) ne va que dans un sens : celui du quartier
vers d’autres services, et non le contraire.
Concernant la spécialisation en matière de quartier, on voit également des contrastes
importants. Ce sont surtout les inspecteurs de quartier et les responsables de quartier qui en
sont demandeurs. Les dirigeants de certaines zones, de leur côté, trouvent plus important que
les inspecteurs de quartier exécutent plusieurs tâches en même temps, car cela doit stimuler la
collaboration avec les autres services. Il est important de signaler que la nature de la zone ne
joue aucun rôle dans cette situation. Ce constat est assez intéressant, dans la mesure où on
s’attendrait à ce que ce type de discours se retrouve surtout dans des zones de police très
urbanisées, dans lesquelles la densité de population, le taux d’emploi, le tourisme sont plus
élevés et, dès lors, les interventions et les événements locaux sont plus fréquents. D’autres
corps fonctionnent selon le principe de la « spécialisation avec polyvalence », selon laquelle
les missions des inspecteurs de quartier sont principalement renvoyées au travail de quartier,
mais comprennent quand même des tâches régulières qui vont au-delà du niveau de quartier.
41

Cependant, la déspécialisation et le décloisonnement ne se limitent pas au fait d’avoir des
inspecteurs de quartier polyvalents, qui effectuent d’autres tâches renvoyant à d’autres
services, mais a aussi à la mise en place de collaborations et au développement d’une
meilleure communication entre les services assurant des fonctionnalités différentes. En
analysant les données empiriques de plus près, il est frappant de constater que tous les corps
de police rencontrent des difficultés dans ces domaines. Ainsi le travail de quartier est, en
première instance et majoritairement, vu comme ressortissant à un service qui collecte de
l’information au niveau du quartier, dans lequel les inspecteurs de quartier transmettent de
l’information sans qu’ils reçoivent un feedback sur l’utilité et l’utilisation de celle-ci. Ce
problème n’est pas uniquement signalé par les inspecteurs de quartier, mais aussi par les
responsables des quartiers. La communication et la collaboration se déroulent selon un
schéma unilatéral. Ceci questionne sérieusement l’intégration du travail de quartier au sein de
la police locale et la façon de diriger l’organisation. Nous y reviendrons plus tard.
La décentralisation, quant à elle, se caractérise par la dispersion de la présence physique de la
police sur tout le territoire. Les avantages en sont la visibilité sur le terrain, l’accessibilité et la
disponibilité (Van Den Broeck & Eliaerts, 1994 ; Smeets, & Strebelle, 2000). La police est
une organisation qui est caractérisée par les fonctions qu’elle exécute et par son ancrage
spécifiquement géographique (Ponsaers, Cools et al, 2010). Les corps de police locaux
dépendent, assez logiquement, du territoire dans lequel ils sont actifs. Les contacts avec la
population se déroulent également plus facilement lorsqu’ils prennent place dans les limites
d’un territoire bien défini. La collecte d’informations et l’approche de la criminalité ou des
désordres sont facilitées par un ancrage localisé qui rend l’assistance policière plus aisément
qualificative et significative. En d’autres termes, l’organisation d’un corps de police locale
dépend, entre autres, du territoire dans lequel il est inséré. Le travail de quartier est par
excellence celui dans lequel cet ancrage prend une signification spéciale, puisque par
définition celui-ci s’intègre dans un territoire particulier. En effet, chaque zone doit subdiviser
son territoire en quartiers dans lesquels les inspecteurs de quartier doivent opérer, avec par
ailleurs, depuis la PLP 10, une obligation d’affecter à chaque inspecteur de quartier un
territoire de minimum quatre mille habitants. Mais, dès la mise en place, déjà ancienne de la
figure de l’inspecteur de quartier, il a toujours été considéré – et c’est encore le cas
aujourd’hui - que travailler dans des unités territoriales plus restreintes est une plus-value car
cela facilite l’exécution de missions policières et augmente la visibilité. Plus encore, dans
certaines zones, ces quartiers sont parfois déterminés par leurs contextes
sociodémographiques spécifiques (quartiers sociaux, zones industrielles, zones commerciales,
quartiers rurales, etc). En délimitant ces territoires, l’inspecteur en question peut alors se
focaliser plus facilement sur la spécificité de son quartier.
En analysant les données empiriques, nous pouvons constater que chaque zone, sauf une,
organise cependant ses quartiers selon les principes décrits dans la loi sur la fusion des
communes de 1977. Ces principes impliquent une subdivision territoriale, délimitée sur base
de frontières géographiques de la commune. Un seul corps utilise un tout autre principe en ne
tenant pas compte de l’organisation communale et subdivise ses quartiers sur base de la
42

fonction des différents territoires. Ce corps utilise une structure en étoile (partant du centre de
la commune principale). Au sein de cette structure, les quartiers sont délimités sur base de
leurs caractéristiques intrinsèques. L’objectif de cette structure est de promouvoir plus
d’homogénéité au sein des quartiers, en partant du constat que, initialement, les quartiers qui
avaient été subdivisés selon la loi de 1977 imposaient une structure rigide qui ne permettait
que peu de flexibilité. En outre, en ancrant les territoires sur d’autres critères que purement
géographiques, la collaboration entre les différents inspecteurs de quartier était plus facile à
réaliser. Enfin, ce choix a été motivé par la possibilité, dès lors, pour les inspecteurs de
quartier de se focaliser sur les caractéristiques et une gestion spécifiques aux quartiers.
Les observations ont ainsi montré que les inspecteurs de quartier sont motivés par le
développement d’une connaissance maximale de leur territoire spécifique. Il ressort du
discours des dirigeants et des responsables de quartier, que la connaissance du quartier est
utilisée à l'avantage de la connaissance de toute la zone. Cela permet, par exemple, une
meilleure connaissance du va-et-vient des habitants ou des usagers des centres commerciaux
ou des zones industrielles. Ces informations sont ainsi régulièrement consultées par d’autres
services du corps de police ainsi que par des partenaires externes (non policiers). Par ailleurs,
cela permet aussi de garantir une meilleure répartition des effectifs de police dans toutes les
parties de la zone en question. Il est ainsi souligné que, sans cette façon de travailler, certains
quartiers connaîtraient une présence importante de police (sur les « hot spots 24 », par
exemple), là où d’autres quartiers entreraient à peine en contact avec la police. La
conséquence en serait une diminution des contacts policiers avec certains groupes de la
société. Dans ce cadre, l’obligation d’avoir un inspecteur de quartier pour au minimum quatre
mille habitants joue un rôle trop important dans la délimitation des quartiers. Ce principe fait
en effet débat, car certains inspecteurs de quartier fonctionnent dans des territoires très petits
mais avec une densité élevée de population alors que d’autres gèrent des territoires très
étendus avec une densité de population très basse, pour lesquels le critère du nombre
d’habitants a peu de sens. Ce principe peut donc, s’il est appliqué dans son orthodoxie, être
contreproductif, ou à tout le moins être considéré comme s’appliquant au détriment de la
qualité du travail. Cette situation est particulièrement perceptible dans des territoires ruraux,
où l’on considère que plus de flexibilité dans l’organisation géographique des quartiers est
souhaitable pour éviter une visibilité réduite, trop de déplacements et un meilleur accès des
habitants à l’inspecteur de quartier.
4.2.3 L’organisation du travail de quartier
Dans cette partie de la recherche, nous allons nous pencher plus en profondeur sur le travail
de quartier. Là où le volet précédent s’est surtout centré sur la place organisationnelle du
service de quartier dans la police locale, nous allons accorder dans cette partie plus d’attention
à l’organisation concrète de ce service ainsi qu’à la visibilité et l’accessibilité sur le terrain.
24 Ce sont des territoires connaissant une grande concentration de faits de nuisance ou de criminalité (Goeminne,
Enhus & Ponsaers, 2006: 157).
43

Dans la mesure où chaque corps de police locale a une certaine liberté dans la manière dont
son organisation se développe, il n’est pas surprenant qu’il y ait des divergences. Les
personnes et/ou les organes qui dirigent directement ou indirectement le service de quartier
sont essentiels dans cette analyse. Comme mentionné, plusieurs niveaux (dirigeants,
responsables de service et exécutants) sont impliqués dans la façon dont le travail de quartier
est structuré. Il est donc opportun de préciser ces personnes et/ou organes.
4.2.3.1 Qui décide en matière d’organisation du travail de quartier ?
Plusieurs personnes ont une influence sur le fonctionnement du service de quartier. Ils ont,
selon leur fonction, plus ou moins d’influence sur les processus de décision concernant le
travail de quartier.
L’autorité en matière de gestion de la police locale est exercée par le bourgmestre (zones
mono communales) ou le collège de police (zones pluricommunales). Dans ce dernier cas,
plusieurs bourgmestres sont concernés. Leur stratégie en matière de la sécurité locale a une
influence sur la politique policière menée, ainsi que sur la façon dont le travail de quartier est
intégré dans la stratégie en matière de sécurité locale. Il est important de mentionner que, dans
certains cas, des bourgmestres signalent des problèmes directement à ce service, via son
responsable, par exemple, D’autres passent par biais du coordinateur de sécurité intégrale ou
par le fonctionnaire de prévention (si la commune en possède un) ou, encore, via le chef de
zone. La raison de ces différences est cependant peu claire. Il n’est pas toujours évident de
savoir s’il s’agit là d’une manière de communication formalisée ou informelle et, dans ce
dernier cas, si c’est en raison de connaissance interpersonnelle ou non, ou encore si cette
communication est ponctuelle ou systématique. Nous devrions interroger d’autres acteurs
pour y obtenir une réponse.
A côté, il y a le chef de zone, qui dirige le corps de police locale et est souvent le moteur de la
politique policière locale (De Kimpe, 2006). Il joue un rôle clef pour tout ce qui concerne la
gestion du corps. Comme nous le verrons, les différents corps diffèrent en matière de structure
organisationnelle et concernant la manière dont le travail de quartier est intégré dans la police
locale. A plusieurs égards, ceci est fonction de la gestion de ce chef de zone. Nous avons eu la
possibilité d’interroger directement sept des huit chefs de corps 25 . Leur vision sur
l’organisation du corps de police local et du rôle du travail de quartier varie d’une zone à
l’autre, mais on peut distingue, d’une part, les chefs de corps qui perçoivent ce service comme
participant de manière importante à l’approche de la criminalité, des désordres et de
l’insécurité liée au territoire, et ceux qui, d’autre part, définissent difficilement le travail de
quartier et le renvoie à un service qui, même dans les discours , manque de clarté, de
définition, voire de finalité précise.
25 Un seul chef de zone ne pouvait pas participer aux enquêtes en raison du manque de temps.
44

Le responsable de quartier joue, quant à lui, un rôle important dans la coordination du travail
de quartier ainsi que dans l’interaction entre les dirigeants et les exécutants. En ce sens, on
peut réellement considérer qu’il constitue le « middle management », ce qui implique
notamment qu’il est attendu qu’il donne son opinion sur la gestion du travail de quartier et la
coordination sur le terrain.
L’inspecteur de quartier est, comme exécutant, celui qui doit assurer un suivi des décisions en
matière de missions et de tâches de quartier. Il connaît « ce qui se passe dans le quartier » et
doit donc traduire ces décisions en actions opérationnelles. Un inspecteur de quartier a une
double tâche d’exécution. Lorsqu’il est présent dans son quartier, il opère en principe seul.
Mais il est néanmoins important qu’il établisse de contacts dans le quartier et qu’il collabore
avec les services internes de la police et avec des partenaires externes.
Dans la suite du rapport, nous clarifierons le rapport mutuel entre ces niveaux et leur
contribution respective au travail de quartier. Mais il est important que nous puissions déjà
nous former une première image des acteurs concernés par ce travail.
4.2.3.2 L’organisation du travail de quartier : restructuration(s) favorisant l’accessibilité et
la visibilité
Comment est concrètement organisé le travail de quartier ? Pour répondre à cette question, il
nous faut tenir compte du fait que chaque zone a plus ou moins la liberté de donner
d’avantage de consistance à cette organisation. Bien que nous ayons récolté déjà bon nombre
d’informations, il est important de souligner que nous n’avons pas de vision totale sur le
fonctionnement de tous les corps de police locale. L’information que nous traitons dans ce
document n’est donc, en d’autres mots, pas exhaustive. On doit tenir compte du fait que nos
données sont basées sur le fonctionnement organisationnel des huit zones observées.
Quelle est l’influence de ceci au niveau de l’organisation opérationnelle du travail de
quartier ? Dans toutes les zones de police investiguées, il y a d’autres petites sections que le
service de quartier qui sont , directement ou indirectement, impliquées dans le travail de
quartier : par exemple, cellule « environnement », cellule « étrangers », équipe chargée des
nuisances, brigade à vélo, cellule « apostilles ». L’existence de ces sections ou leur
appartenance à un service varient d’une zone à l’autre. Il y a par exemple des zones qui ont
directement intégré la cellule « apostilles » dans au sein du service de quartier.. De même, il
existe parfois des nécessités de synergie entre le service de quartier ou les inspecteurs de
quartier et ces sections particulières. Des dossiers concernant l’environnement, par exemple,
demandent une connaissance approfondie du territoire parce que c’est « le cas depuis
toujours » (choix par habitude). Même si toutes ces sections ont le même dénominateur (le
travail de quartier), cela n’implique pas pour autant qu’il existe une concertation structurelle
entre ces entités, sauf lorsqu’une collaboration (ponctuelle) est nécessaire. Si un inspecteur de
quartier prend, par exemple, acte d’une grave atteinte à l’environnement (comme un
déversement de déchets chimiques dangereux), il doit passer cette information à la cellule
45

« environnement », pour qu’elle puisse ouvrir un dossier. Dans ce cas, une concertation
s’avère nécessaire. En cas de petits délits (comme le déversement clandestin dans un jardin),
c’est l’inspecteur de quartier lui-même qui doit prendre des mesures. Mais il peut demander,
pour cela, de l’information à la cellule « environnement ».
En focalisant sur le service de quartier lui-même nous constatons que l’encadrement structurel
entre les zones varie. On peut distinguer quatre méthodes de travail. La plupart des zones
organisent ce service de quartier avec un ou plusieurs responsables qui prenne(nt) la
responsabilité de tous les inspecteurs de quartier. Les groupes se voient tous les jours
pendant le briefing du matin et/ou toutes les semaines lors de la réunion de quartier afin
d’ajuster les activités mutuelles et de bénéficier d’une image globale des événements ayant eu
lieu dans tous les quartiers. En cas de besoin, il existe aussi des collaborations plus
ponctuelles sur des dossiers difficiles, après le constat d’actes de criminalité ou en cas
surcharge de travail. Chaque inspecteur de quartier est responsable de son quartier. De temps
à autre, on établit des plans d’action dans lesquels le travail de quartier est intégré à un projet
plus large (comme la prévention de cambriolages, la récurrence de tapages, les chancres
urbains). Dans cette façon de travailler, les niveaux hiérarchiques sont plus visibles. Dans ce
cadre, l’inspecteur de quartier fonctionne essentiellement dans les limites de son quartier, sauf
dans les cas où on « l’actionne » pour d’autres activités (sécurité routière, accueil,
intervention, etc.).
Il existe aussi des zones qui ont divisé le service de quartier en plusieurs sous-sections. Ici
aussi il y a des différences entre les corps étudiés. Il y a des zones qui font une distinction
entre les inspecteurs de quartier et les équipes « par projet ». La première catégorie
fonctionne selon la méthode décrite ci-dessus. La deuxième catégorie « est créée » à
l’occasion d’événements spécifiques qui ont eu lieu dans le quartier. En général, il s’agit de
gérer un territoire strictement délimité (une rue ou un petit quartier) dans lequel des équipes
de quartier sont régulièrement présentes pour patrouiller, collecter de l’information ou
résoudre des problèmes. Il s’agit dans la plupart des cas de jeunes policiers qui prestent des
missions ou des tâches qui se situent entre celles des inspecteurs de quartier et celles des
policiers d’intervention. Les objectifs de ce type de ces équipes sont multiples. On veut par
exemple développer les interventions orientées spécifiquement sur des « hot spots » (des
territoires avec une haute concentration de criminalité ou de nuisances et donc passibles de
multiples interventions de la police). Un autre objectif est de rapprocher la fonctionnalité
d’intervention du travail de quartier. Certaines situations demandent, en effet, un fort ancrage
local, mais en même temps des interventions plus répressives, peu compatibles, par nature,
avec des modalités classiques du travail de quartier. Enfin, des problèmes présents dans un
quartier peuvent engendrer, si on n’y met pas fin, un phénomène de cercle vicieux. Ce type de
structure autorise une plus grande spécialisation qui permet une approche plus adéquate. Une
question importante est celle de savoir ce que l’on fait de ces équipes de projet lorsque les
problèmes ne se reproduisent plus. Les observations indiquent que les équipes patrouillent
encore fréquemment et collectent encore des informations après que la situation spécifique à
46

l’origine de leur création a disparue ou a été résolue. Il n’est donc pas toujours clair de savoir
quelle sera l’évolution suivante de ce type de travail.
Il y a aussi des zones qui font une distinction entre les inspecteurs de quartier et les équipes
chargées des nuisances. La première catégorie fonctionne de nouveau selon la même méthode
décrite ci-dessus. La deuxième a été créée parce qu’on ressentait un besoin, d’une part, de
créer des équipes orientées spécifiquement sur le phénomène des nuisances dans les quartiers,
et qui soient, d’autre part, capables de gérer celles-ci en dépassant l’ancrage microlocal propre
au travail de quartier. Ainsi, quand, par exemple, plusieurs quartiers sont confrontés à des
nuisances occasionnées par des rassemblements de jeunes, les équipes répondent à ces
événements sans se limiter aux frontières du quartier. Les objectifs sont de nouveau
multiples : pouvoir faire appel à une section qui transcende les territoires des quartiers,
disposer d’inspecteurs qui interviennent tant de manière préventive que répressive et pouvoir
cibler certains événements qui demandent exceptionnellement une spécialisation
(rassemblement de jeunes, nuisances liées aux drogues, tapages nocturnes, etc.).
D’autres zones opèrent selon le principe des équipes quartiers. On trouve ce type de
structures surtout dans des zones pluricommunales. Dans ce système, les inspecteurs de
quartier sont groupés dans des territoires qui englobent plusieurs quartiers. Ils sont dirigés par
un responsable d’équipe qui coordonne son team d’inspecteurs et les assiste en cas de besoin.
Ce responsable d’équipe, la plupart du temps un inspecteur principal, passe l’information à la
gestion de quartier et donne du feedback au(x) responsable(s) de quartier. En d’autres mots, il
est l’intermédiaire entre ce(s) dernier(s) et les inspecteurs de terrain. Cette façon de travailler
a été créée pour permettre un travail plus polyvalent des inspecteurs de quartier ainsi que pour
coordonner le feedback entre les différents niveaux. Enfin, la répartition géographique des
quartiers est en principe plus présente dans les zones pluricommunales, ce qui fait que ce
dirigeant d’équipe coordonne la communication entre les différents collaborateurs des
quartiers. Une pareille structure, qui rajoute un échelon hiérarchique, nécessite une plus
grande concertation, ce qui n’est pas toujours le cas en pratique. A part cela, il n’est pas clair
de savoir si cette façon d’opérer diminue réellement le cloisonnement entre les dirigeants, les
responsables de quartier et les exécutants.
Pour finir, il y a une zone qui intègre sa section de quartier dans une structure
organisationnelle orientée vers des projets (voir supra). Ceci implique que plusieurs types
d’acteurs jouent un rôle dans la structure spécifique du travail de quartier. Les coordinateurs
de projets doivent maintenir une vue d’ensemble sur le fonctionnement des différentes
fonctionnalités. Comme mentionnée, la répartition hiérarchique entre les niveaux est moins
présente, mais une telle structure demande une très grande flexibilité de la part de tous les
collaborateurs. Ceci implique qu’on attache beaucoup d’importance à la gestion des
événements (criminalité, insécurité, nuisance) en essayant d’optimaliser la collaboration entre
les services. Quelles sont les conséquences pour le service de quartiers ? Tout comme la
première catégorie, ce service est divisé en plusieurs quartiers avec chacun un seul inspecteur
de quartier responsable de celui-ci. Ces inspecteurs doivent exécuter leurs missions
47

spécifiques de quartier, mais ils sont également mis à la disposition de projets spécifiques
(drogues, jeunes, nuisances). Ils doivent ainsi en théorie collaborer étroitement avec les autres
services. Ce qui demande de nouveau beaucoup de concertation, organisée, en l’occurrence,
sur base de réunions de quartier. En principe, les dirigeants et/ou les représentants des
différents services doivent être présents à ces réunions. Néanmoins, ici aussi les résultats
montrent que cette concertation structurelle n’est pas toujours réalisée en pratique.
En prenant en considération toutes ces catégories, on peut affirmer que chaque corps essaie
d’organiser son travail de quartier selon les besoins qu’il rencontre sur le terrain. Comme
mentionné, la gestion de police locale, les processus de décision des dirigeants et la politique
locale jouent un rôle important dans ces subdivisions. Chaque zone essaie à sa façon de
contribuer à une plus grande visibilité et accessibilité, bien qu’on ne retrouve pas toujours
cette contribution dans la pratique. Grosso modo, on peut dire qu’il y a des corps, qui, tenant
compte de la contribution des autres services, essaient d’intégrer le travail de quartier dans
leur cadre organisationnel, pour ainsi mieux répondre aux besoins de la population. D’autres
zones, de leur côté, utilisent ce service comme une entité à part entière, très spécifique. Enfin
il y a des corps où l’on s’occupe plus de l’introduction d’une plus grande spécialisation en
matière de certains événements liés à la criminalité ou aux nuisances.
4.2.4 Modalités d’évaluation individuelles et collectives
La façon dont le travail de quartier et les inspecteurs de quartier sont évalués est de toute
première importance pour garantir un fonctionnement optimal. Ce qui est important dans de
pareilles procédures, c’est les critères utilisés (indicateurs) pour ces évaluations. En effet,
ceux-ci doivent pouvoir à la fois refléter le fonctionnement opérationnel, réel, du service,
mais également les tâches quotidiennes des inspecteurs de quartier. En d’autres termes,
évaluer le travail de quartier sur des missions ou une organisation idéale (ou idéelle) sans tenir
compte des réalités pratiques a peu de sens. De la même manière, l’évaluation mise en place
doit s’attacher à la spécificité du travail de quartier et, en ce sens, être spécifique à celui-ci.
Concrètement, toutes les zones fonctionnent selon le même type de procédures d’évaluation
professionnelle c'est-à-dire sur base d’entretiens annuels d’évaluation individuelle. Si des
problèmes se manifestent, on organise également un entretien individuel ad hoc durant lequel
on essaie de déterminer ce qui pourrait être changé individuellement. En général, on peut dire
qu’il s’agit de vérifier si l’inspecteur de quartier est capable de finaliser toutes ses tâches à
temps, comment il s’accommode de son travail, quels sont les aspects positifs et négatifs, etc.
Cette procédure sert donc surtout à améliorer les compétences professionnelles et
individuelles de l’inspecteur de quartier en question.
L’évaluation du travail quotidien des inspecteurs de quartier est par contre plus délicate. A
l’heure actuelle, non seulement cette évaluation est rare (et ne sert que très peu d’instrument
d’amélioration du travail de quartier lui-même) mais, dans les faits, la seule évaluation
utilisée est quantitative, ce qui n’est pas sans poser problème. Ainsi, les chefs de zone
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présentent régulièrement le travail des inspecteurs de quartier au cabinet du bourgmestre sur
base du nombre de PV établis ou de dossiers finalisés. Ceci est en contradiction avec la nature
du travail de quartier et peut avoir un effet contreproductif sur celui-ci et la façon d’agir de
l’inspecteur de quartier : celui d’encourager les inspecteurs de quartier à privilégier les PV et
les dossiers au détriment d’un travail plus qualitatif de contacts avec la population ou de
résolution de problèmes qui n’est, à l’heure actuelle, pas ou peu évalué. Nous pouvons donc
que conclure que les procédures d’évaluation actuelle ne tiennent très peu, voir pas du tout,
compte de la nature et de la spécificité du travail de quartier.
4.3 La fonction du travail de quartier
Le rapport de la commission permanente de la police locale, d’un côté, et les résultats issus
des recherches précédentes, de l’autre côté, montrent que la définition claire et univoque de la
fonction de travail de quartier (ou, de manière encore plus évidente, la fonctionnalité de
quartier) est un point délicat. Il y a clairement une absence de clarté sur qui constituent les
missions prioritaires et les attentes à ce sujet. Les résultats empiriques soulignent que ces
difficultés sont toujours d’actualité. Le travail de quartier ne se laisse pas facilement
déterminer. Dans cette partie, on abordera les difficultés rencontrées et on se focalisera
également sur les visions des acteurs rencontrés quant à ce travail de quartier. On abordera
ainsi tant les missions « idéales » que les « tâches en pratiques ». Cette distinction est
importante car, sur certains points, il n’y a pas de sérieuses divergences entre les deux. Pour
finir, nous passerons en revue les missions prioritaires et le rôle spécifique des policiers de
quartier.
4.3.1 Le travail de quartier, un « métier » qui ne se laisse pas facilement définir...
Le travail de quartier est considéré, par tous, comme important, parce qu’il permet, d’une
part, de se positionner dans un rapport de rapprochement avec la population et, d’autre part,
de répondre à des problèmes relatifs au quartier. Les notions de « proximité », de « résolution
des problèmes » et de « visibilité », souvent citées bien que très peu définies, sont présentées
comme les objectifs de base du travail de quartier. Néanmoins, peu d’indications concrètes
sont données quant à leur traduction opérationnelle et, partant, quant à la traduction
opérationnelle du travail de quartier.
Le travail de quartier est aussi défini comme ressortissant à un service « spécial »,
« particulier » ou « spécifique » et à un ensemble de missions et de tâches moins bien
encadrées ou définies que pour les autres services (ou fonctionnalités) du corps de police. En
général, les zones de police tentent tant bien que mal de donner un contenu à ce travail, tant
au plan théorique qu’au plan des pratiques. Ce contenu et la manière de le définir varient
cependant d’une zone à l’autre. Au regard des résultats des recherches précédentes (cfr.
Chapitre 2), le constat de cette difficulté de définir et de cette diversité de contenu est loin
d’être nouveau. Il semble donc que la réforme des services de police n’a, à ce stade, pas
permis de fondamentalement changer les choses.
49

Si plusieurs zones de police essaient d’y remédier, cela se traduit surtout par une
augmentation des charges administratives (de bureau), en particulier par l'accroissement ou la
diversification du traitement de dossiers administratifs ou judiciaires (apostilles). Les
inspecteurs de quartier dénoncent ce paradoxe, qui a pour conséquence que le travail de
quartier ne puisse pas s’effectuer de manière performante : la « visibilité », la « disponibilité »
et « la résolution des problèmes », présentées pourtant comme les objectifs de leur travail, ne
peuvent pas être exécutées adéquatement par manque de temps, en raison de cette surcharge
administrative, alors même qu’une des traductions opérationnelles de celles-ci est une plus
grande fréquence de la présence dans le quartier.
Par ailleurs, les inspecteurs de quartier considèrent que les modèles « théoriques » de
« community (oriented) policing » ou de « police de proximité », et leurs traductions
normatives, ne sont pas suffisamment concrets pour permettre une véritable
opérationnalisation, contrairement à d’autres métiers policiers, dont les référentiels d’actions
sont plus clairs ou mieux définis.
Prenons l’exemple de la fonctionnalité d’intervention. Cette fonctionnalité est souvent
considérée par la police comme un travail de « police-pompier » : la police reçoit un appel, se
rend sur place et fait une intervention. Le cas échéant, un rapport d’intervention ou un PV est
rédigé et les policiers sont de nouveau disponibles pour une nouvelle tâche. Les référentiels
de l’intervention sont l’urgence, la réactivité et l’approche symptomatique. Le critère
d’efficacité prioritaire est souvent la rapidité d’intervention et la capacité à mettre rapidement
fin à un problème de criminalité ou d’ordre public, sans en chercher forcément les causes
profondes. C’est donc un référentiel concret, évaluable et facilement applicable. Le travail de
quartier ne bénéficie pas de ce type de référentiel : plus mouvant, plus vague, plus « social »,
plus difficilement évaluable (hormis justement le nombre de dossiers administratifs ou
judiciaires, ce qui explique peut-être son augmentation), le travail de quartier s’inscrit dans
des marges floues, entre prévention (idéale) et répression (en cas de besoin), et les inspecteurs
de quartier doivent souvent gérer seul leur travail (cf. infra). Ainsi, si le travail de quartier est
unanimement défini par les zones de police sélectionnées comme « une richesse », et si tous
sont d’accord pour dire que l’approche de quartier doit être différente des approches des
autres services, concrètement et/ou opérationnellement le travail de quartier ne se laisse pas
aisément définir...
4.3.2 Les missions du travail de quartier vues de plus près
Le fait que le travail de quartier ne se laisse pas facilement définir a un effet sur sa description
des missions prioritaires qui le composent et, dès lors, de ses finalités. Les résultats
empiriques le montrent aussi. Quand on demande aux chefs de zone, aux responsables des
quartiers et aux inspecteurs de quartier quel est le contenu exact du travail de quartier,
beaucoup d’entre eux ne savent pas quoi répondre. Il n’y a que peu de résultats cohérents. Il y
a, par exemple, une différence de vision concernant le travail de quartier et sa ou ses missions
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idéale(s) (ou idéelle(s)) et le travail de quartier tel qu’il se présente concrètement dans la
pratique en termes de tâches effectivement prestée quotidiennement.
1) On trouve une première mission du travail de quartier dans le terme lui-même : travailler
dans le quartier. Le travail de quartier est, comme déjà mentionné, le travail policier le plus
ancré géographiquement. C’est perçu comme un atout, car une bonne connaissance du
territoire stimule le fonctionnement local. On fait appel aux connaissances de l’inspecteur de
quartier pour planifier ou organiser des interventions dans le quartier (par exemple l’approche
des nuisances ou des désordres liés aux drogues dans un quartier spécifique). Cette
connaissance renvoie au know-how sociodémographique, aux habitants et à la vie dans le
quartier. Chaque inspecteur de quartier est responsable d’un territoire spécifique. Ce
fonctionnement lié à un territoire (ou ce que certains nomment la « police de proximité ») a
comme avantage qu’on peut établir des contacts proches avec la population. Mais les
responsables des quartiers et les inspecteurs de quartier signalent qu’il s’agit d’une façon de
travailler idéale qui n’est pas toujours appliquée dans la pratique. Des aspects comme la
« visibilité » et l’« accessibilité » demandent beaucoup d’assertivité de la part des inspecteurs
de quartier. Concrètement, la « surcharge de travail » invoquée par les inspecteurs de quartier,
et le manque d’autonomie ou de sens d’initiative de la part de ces inspecteurs constituent à ce
titre des obstacles à cet idéal. Ce qui explique que les contacts avec la population sont peu
évidents. Les observations confirment cette situation.
2) Une deuxième mission du travail de quartier concerne la réalisation de l’ensemble des
tâches polyvalentes. Les inspecteurs de quartier rencontrent régulièrement un large panel
d’événements liés au quartier, qui ne sont pas classifiables de manière univoque. Il peut s’agir
de tapages, de problèmes causés par des travaux dans la commune (par exemple au trottoir),
des querelles entre riverains, de nuisances causées par les pigeons, etc. La police locale a par
définition un paquet de missions polyvalentes. Elle est régulièrement confrontée à des
situations inédites et imprévisibles. Et il n’en est pas autrement en ce qui concerne le travail
de quartier. Bien au contraire. Dans beaucoup de domaines, cette multiplicité des problèmes à
gérer est la caractéristique la plus visible de ce service, comme nous allons voir dans le
compte rendu du paquet de tâches. Ces tâches font fréquemment partie des dossiers en cours
de traitement, ce qui fait que les inspecteurs doivent exécuter plusieurs missions en même
temps, contrairement à son collègue de l’intervention, qui ne peut s’attaquer à une nouvelle
tâches qu’après la finalisation de la tâche précédente. Cette approche polyvalente pose
souvent des problèmes au responsable de quartier, car elle ne s’accompagne que rarement
d’objectifs concrets ainsi que de descriptions de mission bien délimitées.
3) Le travail de quartier joue aussi un rôle très important dans la mesure de visibilité et de
disponibilité de la police sur le terrain. Autour de cette finalité, il y a souvent une image
idéalisée, voire idéologique. Les chefs de zone, les responsables de quartier et les inspecteurs
de quartier soulignent tous l’importance d’être régulièrement présents dans le quartier pour
assurer cette visibilité et cette disponibilité. Mais dans la pratique, cela arrive très peu. Les
intervenants interrogés le justifient régulièrement par la surcharge de travail administratif (de
bureau). Néanmoins, les observations et les résultats de focus groupes montrent qu’on ne sait
51

simplement pas comment on doit être visible et disponible. Une pareille mission demande une
grande aptitude à prendre des initiatives et un besoin de bien cadrer le contenu de ce travail de
quartier. Cela entraîne beaucoup d’imprécision et de difficultés sur le terrain. Des tâches
administratives de bureau, à l’image des contrôles de domiciliation, sont alors utilisées
comme une façon d’entretenir des contacts avec la population. Selon les inspecteurs de
quartier, cela permet de contacter des citoyens qu’on ne pourrait jamais joindre autrement. Ne
pas être sur le quartier ne signifie pas non plus ne pas être disponible : ainsi, les inspecteurs de
quartier font transiter de l’information par le site portail de la zone de police locale (de
l’information générale, des numéros de téléphone, les heures d’ouverture de la division, etc)
ou à l’aide de dépliants/folders, afin de permettre aux citoyens de s’informer facilement sur
quand et comment ils peuvent contacter leur inspecteur de quartier. Mais dans la pratique, ce
contact est très rare et les citoyens viennent surtout au commissariat ou s’adressent à un
inspecteur dans la rue. Quoi qu’il en soit, et dans ce cadre, on ne peut que noter qu’il existe
chez les intervenants interrogés une confusion entre une finalité et les moyens d’assurer une
fonction, ce que sont en réalité la visibilité et l’accessibilité. On peut, en tous les cas, insister
sur le fait que si l’on encourage (y compris en leur en donnant le temps) les inspecteurs de
quartier à être dans leur quartier, cela ne doit s’accompagner d’une définition plus claire des
objectifs et des finalités de cette visibilité et accessibilité (en d’autres termes, « visibilité » et
« accessibilité » pour quoi faire ?).
4) Par ailleurs, les chefs de zone, les responsables de quartier et les inspecteurs de quartier
proposent que le travail de quartier ait une finalité essentiellement informative. Dans la
pratique, d’autres fonctionnalités et d’autres services externes contactent régulièrement les
inspecteurs de quartier pour obtenir de l’information concernant des événements ou des
habitants du quartier. Cette finalité est considérée par tous les enquêtés (y compris les
responsables des autres fonctionnalités de base) comme l’objectif le plus important et le plus
utile du travail de quartier. Une organisation de police ne peut pas fonctionner de manière
optimale sans information. En effet, l’information signifie le pouvoir (Bacon, dans Russel,
2006 : 572) et le pouvoir signifie la possibilité de gérer des situations. Cette mission
informative est, en d’autres mots, nécessaire et d’une importance primordiale. Cependant, la
façon dont les inspecteurs de quartier rassemblent et transmettent leurs informations n’est pas
sans poser question. En effet, les observations nous montrent qu’on abuse régulièrement de
cette dimension du travail de quartier. On essaie, par exemple, souvent et sans raisons
spécifiques d’obtenir des informations à caractère privé sur les citoyens (comme des numéros
de GSM). Toutes ces données sont méticuleusement notées dans des cahiers ou dans des
fichiers. Quand on demande pourquoi, ils répondent que ceci « peut être utile plus tard ». En
d’autres mots, on peut avoir des objections éthiques et se poser des questions sur la façon dont
les inspecteurs de quartier traitent parfois l’information.
5) Une cinquième finalité ou mission est renvoyée à l’intervention proactive et préventive. Il
s’agit à la fois de détecter des formes possibles d’insécurité, de désordre ou de criminalité
(proactivité), afin de prévenir ceux-ci ou d’en prévenir l’escalade (prévention). Dans ce cadre,
le travail de quartier a aussi une importante mission de transmission de messages vis-à-vis des
52

autres fonctionnalités ou services. Cette façon de travailler demande de nouveau un sens de
l’initiative des inspecteurs de quartier, mais aussi des responsables de quartier, car ceux-ci
doivent diriger les tâches. Concrètement, il y a souvent ici aussi un manque de clarté sur la
façon dont cette mission doit être remplie. Il y a par exemple des difficultés concernant la
distinction entre prévention et répression. L’inspecteur de quartier fait partie de la police
locale, et est policier, ce qui implique qu’il a un rôle de gardien de l’ordre et une obligation de
répression, en cas d’infraction. Néanmoins, beaucoup d’inspecteurs ainsi que les responsables
des quartiers soulignent que ceci est difficile, voire peu pertinent, dans la pratique. On veut en
premier lieu favoriser un contact facile et productif avec la population. Pour cette raison, on
met l’accent sur une meilleure communication, pas toujours compatible avec des actions
répressives, même si, de temps à autre, la situation demande une intervention plus sévère. En
résumant les observations et les résultats des focus groupes, on peut affirmer qu’il y a des
inspecteurs qui refusent les tâches répressives et d’autres qui trouvent qu’une position
préventive est préférable, mais qui n’ont pas de problèmes à être répressifs en cas de besoin.
6) Le travail de quartier inclus aussi une fonction informative, de conseil, importante à
l’égard des citoyens : l’inspecteur doit contacter et informer les citoyens concernant des
dossiers en cours ou assurer le suivi des appels. Selon la zone de police, les inspecteurs de
quartier doivent informer les victimes de cambriolages des mesures préventives existantes
(technoprévention), informer des jeunes des risques de sanctions qui les attendent en cas de
graves délits (en concertation avec les parents), contacter des gens qui fait un appel pour
vérifier le suivi, etc. Pour les intervenants interrogés, cette mission est importante, car elle
s’inscrit dans le contact avec la population et rapproche cette dernière de la police. Dans ce
cas aussi on a souvent une image idéalisée de cette fonction. Il y a par exemple des zones qui,
tout en soulignant l’importance de la fonction, ne la traduisent pas sur le terrain.
7) La fonction de médiation est aussi une partie importante du travail de quartier. Des
quartiers peuvent être confrontés à des différends entre habitants (notamment, mais pas
seulement, des conflits de voisinages) ou entre un riverain et un tiers (par exemple entre un
commerçant et un habitants). Dans ces cas, des inspecteurs de quartier sont conduits de se
rendre sur place et à essayer de trouver une solution. Ces cas se sont régulièrement produits
lors des observations. Il est évident qu’une solution n’est pas toujours envisageable (par
exemple si les différends persistent). Dans ce cas, on fait appel au feedback du responsable de
quartier.
8) Le travail de quartier a un important rôle d’intermédiaire entre la police locale et la
commune. Les inspecteurs de quartier exécutent bon nombre de tâches administratives pour
cette dernière. Par ailleurs, les inspecteurs de quartier doivent régulièrement informer la
population d’actions communales. Cette fonction est importante, car l’inspecteur de quartier
est souvent conduit à devoir rendre des comptes pour des problèmes ou des situations pour
lesquels la commune n’intervient pas ou tardivement, ce qui pourrait mener à un
mécontentement chez les habitants. L’inspecteur de quartier joue un rôle important dans ce
processus. Il peut par exemple contacter lui-même les services communaux et assurer le suivi
53

avec le citoyen. Il peut lui-même entreprendre des démarches ou inciter le citoyen à prendre
en charge le problème (pour autant que ceci est dans les pouvoirs du citoyen). De telles
interactions augmentent la qualité de vie du quartier. Il faut mentionner que cette mission
n’est pas toujours envisagée concrètement de cette façon. Beaucoup dépend encore une fois
des initiatives que l’inspecteur entreprend individuellement, mais de la gestion du responsable
du quartier.
9) A côte de ceci, le travail de quartier a aussi une fonction administrative. Par ce terme, nous
ne voulons pas dire du « travail rédactionnel », mais des tâches administratives qui doivent
être exécutées pour le compte de la commune et d’autres services administratifs. En effet,
l’inspecteur de quartier est responsable de beaucoup de ces tâches, dont les contrôle de
domiciliation sont de loin les plus nombreux, dans toutes les zones investiguées. Toutes les
personnes interrogées signalent que ces tâches prennent une immense majorité de leur temps.
10) Enfin, les inspecteurs de quartier doivent être à la disposition des autres services ou autres
fonctionnalités. Il ne s’agit pas d’une mission spécifique de quartier, car en théorie toutes les
services doivent être disponibles pour celle-ci.
Il est important à signaler, in fine, que la nature du quartier détermine plus ou moins les
missions. Chaque zone a sa propre composition sociodémographique. En autre, entre toutes
les zones il y a des différences, ce qui est surtout très clair dans les zones urbaines. Dans ce
contexte, l’inspecteur de quartier n’a pas uniquement confronté aux habitants, mais aussi aux
personnes qui « passent » dans le quartier (des touristes, des gens qui y travaillent, des
écoliers venant d’autres quartiers …), et cela influence aussi la nature du travail quotidien,
dont une surcharge plus élevée en ce qui concerne certaines nuisances liées au quartier.
4.3.3 Les tâches prioritaires et le rôle spécifique du travail de quartier
Dans les documents fournis par les zones investiguées (plan de sécurité zonal et présentation
de travail de quartier, essentiellement), le travail de quartier est défini comme l’idée
fondamentale d’un service policier orienté vers la communauté. Les responsables de quartier
indiquent néanmoins qu’une telle philosophie devrait être, théoriquement, suivie et soutenue
dans tous les services du corps de police, même si il ne fait aucun doute que le travail de
quartier est le service dans lequel ces principes sont (ou devraient être) les plus facilement
identifiables. La réponse à la question de la spécificité du contenu du travail de quartier doit
contenir est, comme nous l’avons déjà dit, très générale, voire vague. Tous sont d’accord pour
dire qu’il faut encourager la responsabilisation de la population dans sa prise en charge de la
sécurité, mieux signaler les problèmes aux services compétents, travailler en priorité sur des
phénomènes, porter une attention spéciale aux attentes et besoins des citoyens, collecter de
l’information, prévenir les problèmes et réprimer en cas de besoin ; tout cela en orientant le
travail « sur le quartier ». Au-delà de ces éléments, les principes de base théoriques (visibilité,
accessibilité et disponibilité) sont difficilement traduits dans la pratique opérationnelle sous
formes de tâches bien délimitées.
54

En particulier, responsables policiers et inspecteurs de quartier insistent beaucoup sur
l’importance de la spécificité de chaque quartier (contexte sociodémographique et
économique, caractéristiques géographiques et/ou urbanistiques, équipements socioculturels,
caractère commercial ou habitats, composition de la population, etc.) dans la définition des
tâches de quartier, de la masse de travail et de la gestion du temps. Ainsi, par exemple, dans
les zones urbaines les inspecteurs de quartier doivent maintenir des contacts avec un large
éventail d’organisations et de citoyens (magasins, centres socioculturels, touristes, etc.), on
doit fréquenter régulièrement des marchés et des événements locaux, on a plus de contacts
avec d’autres acteurs de la « fonction policière » (policing). Dans les zones résidentielles, les
inspecteurs de quartier sont plus confrontés à des projets de prévention concernant des
cambriolages, on est surtout présent le soir et il est plus difficile de contacter les gens.
4.3.4 Intégration opérationnelle au sein de l’ensemble des fonctionnalités de base
La position opérationnelle au sein de la police locale est, comme mentionnée, une composante
importante du travail de quartier. Sur base des résultats de la recherche, nous constatons que
le contact et les rapports entre les fonctionnalités de base sont peu, voir difficilement
décelables, même si, comme nous l’avons déjà maintes fois souligné, les fonctionnalités sont
assimilées à des services spécifiques et, dès lors, les contacts et les rapports devraient être
plus visibles. Même dans ce cadre, chaque service reste « dans son pré carré » sauf en cas de
besoin précis. C’est surtout perceptible au départ des données provenant des focus groupes 26
durant lesquels nous avons étudié la coordination les sept fonctionnalités de base. Nous avons
interrogé «le quand » et le « comment » les services du corps comme la recherche ou
l’intervention, etc., font appel au travail de quartier. Le but était de vérifier de quelle façon les
corps de police locale prennent en charge et traitent la criminalité, les désordres et l’insécurité
de manière collective. Lors de ces focus groupes, les responsables des sept fonctionnalités de
base ont donné une image très idéalisée de la façon dont les services collaborent. On a discuté
de chaque casus jusque dans les détails et tous les responsables ont expliqué de quelle façon
ils prenaient en charge un casus. Ceci se passerait, selon leurs dires, sans problème et chaque
service aurait sa place dans la détection de la criminalité, des désordres et de l’insécurité. En
interrogeant plus en profondeur sur la finalité et les missions prioritaires de chaque service,
nous avons cependant constaté que cette vision n’était pas conforme la réalité. Ce qui est en
soi peu étonnant. Chaque forme de collaboration a des avantages et des désavantages ou des
obstacles. Mais il est remarquable de constater que les services n’ont que très peu de
connaissance de leurs finalités et missions (ou tâches) respectives et que lorsqu’il s’agit de
définir ce que font les « autres », il y a beaucoup de stéréotypes et un décalage avec la
pratique quotidienne de ces services. De la même manière, on n’a pu que constater, encore
une fois, que la fonctionnalité de quartier était intégralement attribuée par l’ensemble des
responsables rencontré aux services et/ou aux inspecteurs de quartier et n’est pas perçue du
26 Voir chapitre 3 pour plus d’information concernant l’approche méthodologique. On peut retrouver les faits qui
ont été utilisées dans les groupes cible dans l’annexe.
55

tout comme une approche particulière (orientée « quartier ») pouvant être prise en charge par
d’autres services ou d’autres policiers. Lorsqu’il y a une intervention d’autres policiers au
travail de quartier, elle est perçue comme un soutien, un appui à au service de quartier et/ou
aux inspecteurs de quartier et non comme la participation à la fonctionnalité de quartier.
Mais il y a cependant, comme toujours, des différences entre les zones de police investiguées
qui dépendent de la connaissance mutuelle (et souvent interpersonnelle) entre responsables
des services/fonctionnalités et/ou entre exécutants de ces services et de la façon dont celle-ci
exprime ceci dans la pratique. Ce qui peut également jouer un grand rôle, c’est le fait que des
services soient physiquement proches l’un de l’autre, par exemple lorsqu’ils partagent les
mêmes bâtiments, ce qui permet aux personnes de se rencontrer y compris de manière
informelle (dans les couloirs, autour de la machine à café, etc.). A contrario, l’éloignement
physique constitue parfois un obstacle important à cette connaissance mutuelle, et dès lors un
obstacle à la collaboration.
Quelles conséquences cela a pour le travail de quartier ? Dans les grandes lignes, on ne sait
que peu ou rien des missions ou tâches de ce service. La plupart des responsables de six autres
fonctionnalités de base trouvent que le travail de quartier est important, essentiellement grâce
à l’information qu’il fournit. Dans ce cadre, toutes les personnes interrogées insistent sur
l’avantage que constitue un travail lié à un petit territoire car cela permet de récolter beaucoup
d’informations pointues.
Dès lors, l’articulation opérationnelle de la fonctionnalité de quartier aux autres
fonctionnalités de base s’axe fondamentalement à la collecte des informations par les services
de quartier/inspecteurs de quartier, sans pour autant que celle-ci ne s’accompagne, comme
nous l’avons déjà dit, d’un feedback. Ce type de relation est donc limitée et plutôt unilatéral.
Il y a, bien entendu, d’autres exemples des contacts formels ou informels entres services, mais
ils constituent l’exception plutôt que la règle. Par exemple, la plupart des zones de police ont
une approche spécifique en matière de cambriolage. Après intervention de la police lors d’un
cambriolage, l’inspecteur de quartier joue un rôle de seconde ligne : il est chargé de contacter
la victime afin de lui proposer un accompagnement psychosocial et/ou des conseils de techno
prévention. Dans la réalité, il arrive souvent que l’inspecteur de quartier passe avant que la
victime ait fait une déclaration officielle. Cet exemple montre que la coordination entre les
différents services de la police ne fonctionne pas toujours de manière optimale. Ces
dysfonctionnements peuvent trouver leur origine tant dans les services de quartiers euxmêmes
que dans la manière dont le corps de police est organisé : faible intégration des
inspecteurs de quartier dans les réunions opérationnelles, manque de volonté de collaboration
de part et d’autres, refus de répondre à des demandes d’autres services, etc.
Du fait que certaines structures organisationnelles du travail de quartier devraient avoir pour
objectif d’augmenter ses rapports de collaboration, ce résultat est un tant soit peu inquiétant.
On est très loin d’un des piliers de la réforme de la police qui encourageait le
décloisonnement des services (et plus encore… des fonctionnalités). Bien que des tentatives
(comme l’augmentation du nombre de réunions communes) ont été entreprises, la réalité est
56

moins positive. Sur base de l’analyse des données empiriques, nous constatons qu’il y a deux
raisons à cette situation. D’abord, comme nous l’avons souligné, il y a le manque de
connaissance du contenu, de la finalité spécifique et des missions des fonctionnalités de base,
et en particulier une méconnaissance du service de quartier. Le travail de quartier reçoit ainsi
régulièrement des dossiers qui outrepassent leurs tâches. Il s’agit surtout de tâches
administratives. Leur contribution à l’augmentation d’une prise en charge efficace de la
criminalité, des désordres et de l’insécurité est plutôt réduite. Des services assurant des
fonctionnalités de base comme la recherche, l’intervention ou l’aide aux victimes ne
contactent le travail de quartier qu’en cas de besoin d’information, même s’il existe des
nuances d’une zone de police à l’autre. Le corps qui fonctionne selon une structure orientée
projets (voir supra), par exemple, connaît moins de difficultés dans ce domaine parce que
chaque service doit fournir une contribution à des projets et cette approche semble davantage
correspondre à une approche transversale des fonctionnalités.
Il est encore important de souligner un autre constat de la recherche : les responsables des
fonctionnalités de base ne prennent que rarement des initiatives pour augmenter cette
(inter)connaissance. C’est d’autant plus dommageable que ces responsables ont une mission
dirigeante de coordination. Ils font partie du middle management, ce qui implique qu’ils ont
un important rôle d’intermédiaire entre le cadre dirigeant et les exécutants. Ceci devrait
permettre des initiatives pour augmenter la communication entre tous les niveaux. D’autre
part, une majorité de ces responsables insiste sur la nécessité d’une plus grande spécialisation
(expertise) au sein du travail de quartier afin de stimuler le décloisonnement, même si ils ne
donnent pas de contenu précis à celle-ci. Quoi qu’il en soit, il semble que le rôle que joue le
responsable de quartier dans cette situation doit également être soulignée comme important.
Les initiatives de cette personne-clef sont également peu perceptibles et cela pose des
questions qui renvoient à nouveau à l’absence de description précise du travail de quartier.
Tous ces aspects peuvent donc être renvoyés en boucle au fait que le travail de quartier ne se
laisse pas facilement définir.
4.3.5 Intégration dans la politique policière locale (PZS) et les politiques locales de
prévention et de sécurité
L’intégration du travail de quartier dans la politique de police locale est double. D’un côté il
est principalement considéré comme lié à un territoire, qui permet de détecter des problèmes à
un échelon plus réduit, de collecter des informations (intelligence led policing) et de résoudre
des problèmes (problem oriented policing). De l’autre côté, il est vu comme la travail policier
par excellence qui s’inscrit au sein de la population (à cause des territoires plus restreints dans
lesquelles il opère). Cependant, alors que les principes du « community oriented policing »
(COP) ou de la « police de proximité » (notion exploitée par la plupart des zones
francophones) sont pourtant fortement réduits au travail de quartier, ceux-ci (et en particuliers
les « piliers » de ces modèles) sont souvent considérés comme trop théoriques ou trop
« managériaux » pour être applicables en pratique par les policiers de terrain.
57

En ce qui concerne l’intégration du travail de quartier dans la gestion de la sécurité locale, les
inspecteurs de quartier se définissent comme des « ponts entre la population et la commune ».
Plusieurs tâches demandent, en effet, une bonne connaissance de la politique locale,
notamment en matière de sécurité. Les résultats soulignent quatre variables importantes.
D’abord il y a une grande différence entre les zones monocommunales et les zones
pluricommunales. Dans ces dernières, les politiques locales peuvent varier selon les
communes. Ceci a clairement une influence à la fois sur la prise en compte des politiques de
sécurité ou de prévention locales par les politiques policières, et par les pratiques policières de
terrain, et sur les contacts, généralement moins soutenus, entre les communes et la police
locale. D’une certaine manière, plus la commune est « éloignée » de la zone – en termes de
concertation et de collaboration – moins il y a de chance que l’inspecteur de quartier
connaisse la politique locale de prévention et de sécurité.
Plus concrètement, le travail de quartier est plus au moins impliqué dans la gestion de la
sécurité locale. Comme nous avons vu, il y a des zones de police qui élargissent la structure
du travail de quartier, par exemple en faisant appel aux « teams de nuisances ». Ceux-ci ont
été créés parce que la gestion de sécurité de la zone en question focalise sur une plus grande
attribution du travail lié au territoire, dans laquelle toutes les fonctions (de nature policière et
non policière) doivent collaborer en cas de besoin. L’importance qu’on attache à la
contribution du travail de quartier à la gestion de la sécurité locale dépend aussi largement de
la valeur qu’on lui attribue. Chaque commune ne perçoit pas celui-ci comme une plus-value.
Encore une fois, cette perception est largement en rapport avec le manque de définition
précise du travail de quartier. En d’autres termes, si les responsables communaux, ou les
responsables des services de quartier, ne savent pas précisément ce que font ou doivent faire
les inspecteurs de quartier ou ce que recouvre concrètement le travail de quartier, il est
difficile de les intégrer dans une politique de prévention et de sécurité locale, qui elle est
généralement plus définie, notamment en termes d’objectifs.
Un autre élément qui influence cette intégration est l’existence d’un « coordinateur » local de
la politique de prévention et de sécurité. Certaines communes ont nommé un responsable de
la sécurité intégrale ou un fonctionnaire de prévention, d’autres pas. Cette désignation d’un
intermédiaire du niveau local en matière de sécurité ou de prévention joue un rôle sur la
manière dont les informations transitent entre le citoyen (qui informe la commune) et la police
locale, et au final vers le travail de quartier selon un schéma assez hiérarchique. Par contre,
des communes sans coordinateur local contacteront directement soit le responsable du
quartier, soit, et le plus souvent, l’inspecteur de quartier lui-même. Dans certain cas, le
bourgmestre contacte lui-même directement le responsable de quartier ou, parfois, le chef de
la zone.
Le degré dans lequel une commune ou des communes investi(ssen)t dans la sécurité varie de
zone en zone. Ceci aussi a un effet important sur l’intégration du travail de quartier dans la
gestion de la sécurité locale. Le travail de quartier a, comme déjà souligné, en théorie une
fonction proactive et préventive. Ceci implique que les inspecteurs de quartier doivent,
58

idéalement, détecter les causes de l’(in)sécurité pour y remédier. Le travail de quartier
fonctionne à une échelle réduite ce qui permet d’établir un contact plus étroit avec la
population. Dans des zones où l’on investit beaucoup dans la politique de sécurité locale, on
prendra plus facilement le travail de quartier comme un élément important de la chaîne de
sécurité (niveau proactif et niveau préventif), surtout en matière de désordres sociaux, de
différends entre les habitants et de détection des sentiments d’insécurité. Cependant, en
pratique à nouveau, la plupart des zones reconnaissent les difficultés sur le terrain pour
assurer ce type de tâches, car les inspecteurs de quartier investissent beaucoup plus de temps
dans le travail administratif (les dossiers doivent être finalisés à temps).
Enfin, mentionnons, même si c’est à titre ici plus anecdotique, que la fusion des communes de
1977 a également joué un rôle important dans la politique policière et dans le travail de
quartier de certaines zones. Il y a, par exemple, des communes flamandes dans lesquelles une
majeure partie des citoyens est francophone (ou l’inverse), avec comme conséquence des
problèmes de communication entre inspecteurs de quartier et habitants (par exemple, en
matière de rédaction de PV), ce qui pose question en termes de réelle « proximité » de la
police.
4.3.6 L’intégration des travailleurs de quartier dans les réunions de concertation
interne
Chaque zone de police essaie d’améliorer le travail de quartier en organisant des réunions de
concertations en interne. La nature et la fréquence de ces réunions dépendent d’une zone à
l’autre. De manière générale, toutes les zones organisent :
• Une réunion générale de quartier (+/- 3 fois par an). Sont présents à ces réunions : les
responsables des quartiers et les inspecteurs de quartier. Le but de ces réunions est de
passer de l’information, de stimuler la communication entre les différents collaborateurs
des quartiers et l’analyse des problèmes généraux.
• Des réunions d’équipes d’un quartier. Sont présents : tous les collaborateurs du quartier.
Le but est de traiter des problèmes pratiques ou des urgences spécifiques à ce quartier.
• Le comité de direction mensuel. Sont présents : le chef de zone et les responsables des
directions et/ou des fonctionnalités. Le but est d’échanger des idées concernant les
stratégies opérationnelles.
Dans la plupart des zones, ces réunions sont effectives. Dans d’autres zones (minoritaires),
ces réunions sont régulièrement supprimées. Dans les deux cas cependant, il semble que ces
réunions ne soient pas assez nombreuses pour présenter une réelle plus-value. Cependant, tous
les acteurs rencontrés soulignent surtout l’importance de contacts informels entre les
différentes fonctionnalités (par téléphone, par email et par des rencontres spontanées). Les
inspecteurs de quartier participent aussi aux réunions des habitants et des comités de quartier,
59

mais ils n’y sont pas obligés.
4.3.7 L’absence de formations (pertinentes) adaptées à la spécificité du travail de
quartier
Les inspecteurs de quartier qui sont en fonction depuis avant la réforme de la police n’ont
jamais eu de formation spécifique de quartier. En général ils proviennent de la police
communale, et dans quelques cas des brigades territoriales de la gendarmerie. Par contre, ceux
qui ont été désignés au travail de quartier au cours des douze dernières années (par mutation
interne ou en venant de l’extérieur) ont bénéficié de ce type de formation spécifique de
quartier (formation fonctionnelle, soit de huit jours, soit de deux semaines). Cette formation
de quartier est orientée sur la pratique et à la fin de leur formation, les apprenants doivent
rédiger un travail (« paper ») sur une problématique de quartier et sur la façon de résoudre
cette problématique. Pour ces inspecteurs, la formation n’est cependant pas considérée
comme un véritable plus pour le travail de quartier, parce que sa durée est trop courte et que
l’enseignement est peu concret. D’un autre côté, l’amélioration de cette formation spécifique
n’est pas considérée comme une priorité. Par contre, les inspecteurs de quartier préconisent
une intégration de la fonctionnalité de quartier dans la formation de base des cadres d’agent
ou d’inspecteur. Cette intégration est considérée comme étant plus pertinente qu’une
formation spécifique, car elle permettrait de familiariser les aspirants agents ou inspecteurs à
cette fonctionnalité et de mieux intégrer celle-ci à la fonction de police. Il faudrait aussi que la
formation policière (de base) soit plus en concordance avec la réalité de terrain. L’image
existante de la police (comme fonctionnant d’abord selon la logique du « crime fighting »),
qui est souvent celle des aspirants de police, ne concorde pas non plus avec la réalité. Ceci est
aussi, et peut-être surtout, le cas pour le travail de quartier.
Il faut souligner que plusieurs services de quartier comptent, à côté des inspecteurs, des agents
de police. Eux aussi ont eu une formation policière (adaptée au cadre d’agent de police) et la
formation spécifique de travail de quartier. Si un agent a moins de compétences qu’un
inspecteur (il ne peut, par exemple, pas effectuer de tâches judiciaires), ce n’est pas forcément
considéré comme une carence ; bien au contraire. Les services de quartier qui comptent aussi
bien des agents de police que des inspecteurs ne distinguent d’ailleurs pas les deux : tous sont
appelés « agents de quartier » ou « inspecteurs de quartier », à la fois pour éviter cette
distinction et parce c’est ainsi qu’ils sont appelés – et perçus – par les citoyens.
4.4 La professionnalisation des inspecteurs de quartier
Maintenant que nous avons une image de la façon dont le travail de quartier est organisé, nous
allons davantage nous intéresser dans cette partie à la professionnalisation de l’inspecteur de
quartier. Nous porterons notre attention, entre autres, sur leur profil de compétence, leur
paquet de tâches et leurs attentes.
60

4.4.1 Le profil de compétence : les attentes d’une candidature flexible et variée
Les zones de polices mentionnent unanimement l’importance d’un profil de compétence
diversifié, flexible, parce que le travail de quartier exige de leurs collaborateurs des
connaissances, des aptitudes et des comportements spécifiques et, en tout état de cause,
différents des autres fonctionnalités/services de la police. Concrètement, en raison du
caractère nécessairement autonome du travail de quartier, cela semble se traduire par un profil
de compétence plus vague, moins clairement établi, que pour les autres services du corps, à
l’image de qui vient d’être dit pour les missions et les objectifs du travail de quartier. On
retrouve dans ce « profil flexible », tel que défini par les zones de police investiguées, une
large gamme, très diversifiée, de compétences très générales, même si cette « polyvalence »
n’est pas perçue comme un manque de qualifications mais comme une richesse nécessaire.
Les responsables de quartier attendent ainsi de leurs inspecteurs de quartier les compétences
suivantes :
• Pouvoir travailler de manière autonome : cette compétence est considérée comme
primordiale. Bien que les inspecteurs de quartier puissent faire appel à l’appui et à
l’assistance de leurs collègues, ils travaillent en général individuellement. Ceci implique
qu’ils doivent de manière autonome répondre à des problèmes, traiter des dossiers,
régler leur travail et élaborer des réseaux. Il faut, dès lors, être capable de prendre des
initiatives (pour établir ces réseaux et mieux connaître les « mouvements » d’un
quartier).
• Posséder de l’empathie c'est-à-dire pouvoir se transposer dans l’univers mental des
autres (de tous les « groupes cibles»).
• Etre « communicatif » : avoir les capacités et l’envie d’entrer en contact avec les gens et
établir des réseaux avec des partenaires internes et externes. Cela signifie également être
accessible (pas seulement physiquement) et être visible (présence effective dans le
quartier).
• Etre médiateur : les inspecteurs de quartier sont régulièrement confrontés à des
différends ou des problèmes de conflits (différends entre voisins, conflits entre la
population et la commune, etc.).
• Etre flexibles c'est-à-dire pouvoir gérer un éventail de tâchess large et varié.
• Etre prêts à des interventions préventives aussi bien que répressives. Bien que ces deux
éléments demandent, en théorie, une autre façon d’intervenir, dans la pratique ils sont
souvent entremêlés. Il s’agit d’une certaine dualité et il faut pouvoir gérer cette dualité.
• Etre loyal tant à l’égard de la police que de la population. Cela signifie concrètement
qu’il faut être capable d’intervenir de manière spécifique, hors des voies traditionnelles
61

de la police, notamment pour les « tâches d’orientation sociale », tout en n’entrant pas
en contradiction avec celles-ci.
• Satisfaire à une certaine répartition de valeurs et de normes.
• Pouvoir récolter et gérer beaucoup d’information et transmettre ces dernières. En
d’autres termes, être un « point d’information » au niveau d’un quartier.
• Pouvoir juger objectivement. Les inspecteurs de quartier ne peuvent pas prendre parti
dans certains différends ou désaccords entre citoyens.
• Etre assertif.
• Etre discret.
• …
Les zones de polices sont évidemment unanimes pour souligner que ces compétences sont des
compétences idéales que les inspecteurs de quartier devraient idéalement posséder. En raison
des problèmes de recrutement (cfr. infra), on ne peut pas toujours garantir ces compétences
chez les inspecteurs de quartier.
Une pareille présentation du profil de compétence idéal a en grande partie encore une fois liée
au fait que le travail de quartier est difficile à définir. Ce qui est notable dans cet aperçu du
profil est le fait que personne n’y répond, parce qu’il est tout simplement très difficile de
posséder autant de qualités personnelles et de compétences professionnelles. En particulier,
les inspecteurs de quartier doivent être capable d’une flexibilité importante en raison du
caractère polyvalent du travail de quartier et de son absence de définition univoque, ce qui
implique une capacité d’autonomie et de prises d’initiatives très importantes. Il est clair qu’un
profil aussi idéal ne peut presque jamais se présenter dans la pratique, et l’absence de réelle
évaluation du travail quotidien des inspecteurs de quartier a pour effet que, de toute manière,
on ne peut pas concrètement valoriser ce profil, quand bien même il existerait. A cela, il faut
encore rajouter les difficultés réelles de recrutement des inspecteurs de quartier (voir infra),
notamment en raison du manque de candidats, qui conduisent à ce que ce profil soit très
théorique.
4.4.2 Les demandes et attentes des zones de police vis-à-vis des inspecteurs de quartier
Les zones de polices sont claires en ce qui concerne leurs attentes vis-à-vis des inspecteurs de
quartier.
En premier lieu, ceux-ci doivent être visibles et accessibles dans leur quartier : les citoyens
doivent être en mesure de voir leur inspecteur de quartier et de lui poser des questions. Dans
62

toutes les zones de police investiguées, les inspecteurs de quartier ont un « jour de quartier »
par semaines (permanence). Ce jour-là, les citoyens peuvent venir au commissariat ou au
bureau du quartier pour parler à l’inspecteur de quartier (plaintes, demandes de clarification
de procédures communales, demandes d’information concernant le quartier, etc.).
En deuxième lieu, il faut que tous les dossiers administratifs et judiciaires (cfr « tâches »)
soient clôturés dans des délais raisonnables, ce qui demande un grand investissement de
temps (« time management »). La conséquence en est que les inspecteurs de quartier ne
peuvent pas toujours être présents dans leur quartier. Cette situation, comme nous l’avons
déjà souligné, n’est pas sans paradoxe. D’un côté, les inspecteurs de quartier doivent être
suffisamment visibles, et d’un autre côté, le travail administratif est un obstacle à une
présence dans le quartier.
En troisième lieu, les inspecteurs de quartier doivent répondre aux demandes internes de la
police locale et aux demandes externes. Il s’agit, en très grande majorité, de demandes
d’informations. De l’avis des inspecteurs de quartier, tant les partenaires internes
(intervention, recherche, accueil) qu’externes (Sûreté de l’Etat, Service de renseignement
militaire, police fédérale, assistants sociaux, différents services communaux, Office des
étrangers, autres zones de police, etc.) voient dans le travail de quartier « un service de
renseignement au niveau de quartier ». On attend des inspecteurs de quartier qu’ils sachent
tout ce qui se passe dans leur quartier. Ici également nous pouvons souligner une certaine
ambiguïté du travail de quartier. D’un côté, selon les inspecteurs de quartier, les partenaires
internes et externes dénigrent leur travail (vu comme un « métier de fin de carrière ») ou leur
service (vu comme un service où l’on peut déposer tous les dossiers inachevés). D’un autre
côté, on leur demande toujours plus d’informations, parce que les inspecteurs de quartier sont
ceux qui la meilleure connaissance du quartier et de ses habitants. Cette situation est d’autant
plus mal vécue par les inspecteurs de quartier, que s’ils fournissent beaucoup de
renseignement, ils ne bénéficient que rarement d’un feedback de ce qui en est fait.
En quatrième lieu, les inspecteurs de quartier doivent également être capables de résoudre ou
de relayer une grande diversité de problèmes. Ils doivent résoudre eux-mêmes des « petit
problèmes » comme des différends de voisinages, des dépôts clandestins, des problèmes
administratifs, des enquêtes de domiciliation, etc. Les « problèmes plus graves » sont, dans la
plupart des cas, transmis à des services spécialisés parce que ces problèmes demandent un
plus grand investissement en temps. Si un inspecteur de quartier constate, par exemple, des
dépôts de déchets sur un terrain non utilisé, il essayera de résoudre le problème lui-même (en
collaborant éventuellement avec les services communaux). Si le problème se répète, il devra,
par exemple, envoyer le dossier à la cellule Environnement de la police locale qui entamera
elle même une enquête. Le fait que les inspecteurs de quartier transmettent de l’information et
des dossiers mais ne reçoivent pas de feedback quant à ceux-ci posent cependant question
quant à l’existence de collaborations internes et/ou externes. Un des piliers de la réforme de la
police devait être l’amélioration des flux d’informations entre les différents services. Ce
renvoi d’information vers les services de quartier semble d’autant plus pertinent qu’il est
63

nécessaire à la bonne gestion du quartier et à la résolution de certains problèmes de quartier.
Enfin, les inspecteurs de quartier doivent aussi être disponibles pour collaborer à des tâches
qui demandent l’investissement de plusieurs services du corps de police telles les contrôles
d’alcoolémie (campagnes BOB), des services d’intervention, la surveillance ou le maintien de
l’ordre lors d’événements. Bien que le travail de quartier doive satisfaire à plusieurs attentes,
il n’est pas défini spécifiquement comme un service de réserve pour les autres services du
corps de police. En réalité l’ensemble des services policiers doivent fréquemment être
présents pour appuyer d’autres services ou des campagnes et opérations plus générales.
4.4.3 Les inspecteurs de quartier au travail : une étude approfondie du catalogue de
missions et de tâches orientées quartier et des contacts avec la population
Des recherches précédentes (Van Den Broeck & Eliaerts, 1994; Smeets & Strebelle, 1999;
Hendrickx, Lemonne, Smeets & Strebelle, 1998; Hendrickx, Smeets, Strebelle & Tange,
2000; Easton, Ponsaers, Demarée, Vandevoorde, Enhus, Elffers, Hutsebaut & Moor, 2009;
Van Altert, Enhus & Stol, 2009) nous ont déjà montrés que les inspecteurs de quartier ont un
paquet de tâches très étendues. Cette diversité de tâches n’est pas facile à classifier. Les
raisons sont multiples. D’abord les inspecteurs de quartier doivent exécuter des tâches qui
sont propres au travail de quartier (spécifiques). Puis ils sont régulièrement confrontés à des
tâches d’autres services (dépassant ce travail de quartier). Une telle façon de travailler est
typique au paquet de tâches variées de la police (Manning, 2005) et n’est dans ce sens pas
spécifique aux compétences opérationnelles des inspecteurs de quartier.
Mais quel est donc le contenu exact de ce paquet de tâches ? Pour obtenir une vue réaliste des
tâches des inspecteurs de quartier nous avons établi pendant les observations un modèle dans
lequel nous avons noté toutes les tâches perçues. Ce document a été complété par les données
issues des entretiens 27 . Par après, nous avons contrôlé ces modèles pendant les réunions des
focus groupes avec les inspecteurs de quartier, qui devaient indiquer le temps qu’ils
consacrent à l’exécution de ces tâches (voir annexe). Nous avons utilisé cette technique de
recherche pour avoir une vue globale de la charge de travail, telle que perçue par les
inspecteurs en question. Finalement nous avons essayé d’obtenir une vue de la nature du
contact avec la population. En effet, en faisant le bilan de la littérature du chapitre 2 nous
pouvons constater que le travail de quartier est considéré comme le service proche de la
population. Mais il n’est pas toujours clair de comprendre comment cela se passe en pratique.
4.4.3.1 L’ensemble des tâches à réaliser par les inspecteurs de quartier
L’inspecteur de quartier est, comme nous l’avons déjà dit, investi dans un grand nombre de
tâches qui, dans la plus grande partie des cas, se font sur l’initiative de l’inspecteur de
27 Ces conversations ont eu lieu lors des observations. Nous avons obtenu de l’information concernant
l’ensemble des tâches des inspecteurs de quartier et des responsables de quartier.
64

quartier, sur demande de la population ou sur demande d’autres services. Pendant les
observations, nous avons observé les tâches suivantes :
- Les tâches administratives : enquête de domiciliation, enquêtes de moralité, attestations
diverses, attestations relatives aux étrangers, recherche d’informations et
renseignements administratifs, numération d’immeubles, notifications de retrait de
permis de conduire, etc.
- Les tâches judiciaires : réponses aux apostilles, recueil des plaintes, PV, recherche
d’informations et renseignements judiciaires, etc.
- Les contrôles administratifs des libérés conditionnels, des bulletins centraux de
signalement, inscriptions d’écoles 28 .
- Les convocations des habitants pour les dossiers administratifs ou judiciaires.
- La surveillance générale de l’espace public (îlotage).
- Les surveillances spécifiques (des commerces ambulantes, des habitations durant les
vacances, d’écoles, de trafic, rapport voiries, etc.).
- La gestion des conflits : de voisinage (médiation), entre les habitants du quartier et la
commune, entre jeunes et personnes âgées, etc.
- La gestion de la circulation et du stationnement dans le quartier.
- L’assistance aux particuliers (relais social, services divers).
- La présence aux réunions des associations commerçantes ou de quartier.
- La participation à l’accueil au commissariat et aux permanences de quartier.
- La participation aux campagnes de prévention (par exemple : BOB, MEGA, ...).
- La réserve pour autres services de police.
- L’accompagnement d’huissier et la remise des exploits d’huissiers.
- Le maintien de l’ordre lors d’événements locaux.
- La détection des problèmes de quartier et l’écoute des demandes des habitants du
quartier : dans les deux cas, il faut également tenter d’y apporter des solutions (dans la
mesure du possible).
- Le relais éventuel de ces problèmes vers les services compétents internes ou externes
(par exemple, si un citoyen mentionne des nids-de-poule dans une rue, l’inspecteur de
quartier doit transmettre cette information à la commune).
- La communication d’information (sur des fêtes de quartier, des changements dans la loi
communale ou le règlement de police, conseils de prévention, etc.).
- Le suivi des appels non urgents (par exemple, pour un différend entre voisins
concernant la taille de haies).
- L’appui à d’autres services pour des appels urgents.
Cette liste a été établie lors des observations, pendant lesquelles nous avons étudié le travail
de quartier de huit zones de police pendant trois mois. En raison du fait que cette période est
relativement courte, nous nous sommes conscients de la possibilité que certaines taches ne
soient pas reprises dans l’aperçu schématique. Il est par exemple possible que les inspecteurs
28 Si l’autorité suspecte certains jeunes de ne pas être inscrits, malgré l’obligation scolaire, le dossier est transféré
à l’inspecteur de quartier, par exemple.
65

de quartier soient confrontés lors de leur travail à des problèmes (liés au quartier) qui sont de
nature temporaire. Puisque ces problèmes sont variés et que la période d’observation était
restreinte, il est impossible de mentionner tous ces événements (déversements clandestin,
nuisances sonores, etc). Pour cette raison, nous avons choisi de catégoriser la liste selon leurs
caractéristiques générales.
En effet, les inspecteurs de quartier sont, comme nous pouvons le constater, confronté à une
large panoplie de tâches. Certaines tâches sont de nature générale (comme les tâches
juridiques ou judiciaires), d’autres dépendent de la nature notamment sociodémographique ou
le caractère urbain, semi-urbain ou rural de la zone et du quartier (comme la détection de
problèmes liés au quartier). Concernant ce dernier point, par exemple, les villes sont
caractérisées par une importante densité de la population et une offre étendue d’équipements
et d’activités. La politique de sécurité y est d’ailleurs souvent plus largement développée.
Ceci a des effets au travail de quartier, car les réseaux avec les riverains y sont plus intensifs
(commerçants, animateurs de quartier, travailleurs de rue, réseau associatif, etc), et il y a en
règle générale plus d’activités sociales et culturelles et des populations plus diversifiées. Le
paquet de tâches ne varie pas uniquement selon la zone, mais aussi selon le quartier.
Travailler dans un quartier socialement défavorisé ou en relégation urbaine demande une tout
autre approche que de travailler dans une zone industrielle. En d’autres mots, un travail qui
est par nature lié à un territoire spécifique demande une capacité importante à gérer ces
spécificités.
La liste que nous avons présentée, si elle donne un aperçu des tâches qui pourraient être celles
d’un inspecteur de quartier, ne nous donne cependant pas encore d’image du temps qu’ils y
consacrent. C’est pour cette raison que nous avons interrogé les inspecteurs de quartier sur
leur charge de travail lors de focus groupes.
4.4.3.2 Le temps que les inspecteurs de quartier consacrent à leurs diverses tâches
Lors des réunions avec les focus groupes des inspecteurs de quartier une liste a été distribuée
avec toutes les tâches observées. On leur a demandé d’indiquer combien de temps, ils
consacrent à chaque tâche. Ils avaient le choix entre quatre catégories de réponses :
« quelques heures par jour », « quelques heures par semaine », « quelques heures par mois »
et « jamais ». Certains inspecteurs de quartier ont indiqué que l’écart entre « quelques heures
par mois » et « jamais » est souvent trop grand, car certaines tâches peuvent se produire très
occasionnellement (quelques fois par an) mais se produire quand même. Il s’agit surtout de
contrôles spécifiques (par exemple lors d’événements), des campagnes de prévention ou,
encore, pour certains la tâche de réserve pour les autres services. Nous avons cependant
considéré que ces tâches, à ce point exceptionnelles, constituaient des valeurs aberrantes, ne
disant pas grand-chose sur le travail quotidien des inspecteurs de quartier (sauf évidemment si
ces valeurs aberrantes se cumulent au point de constituer, par addition, une part conséquente
du temps de travail de l’inspecteur, ce qui ne semblait pas être le cas). Le tableau suivant
donne un aperçu des résultats. 25 inspecteurs de quartier au total ont rempli le tableau.
66

Tableau 1: Tâches inspecteurs de quartier (N = 25)
Variables
Tâches administratives (enquête domiciliaire,
moralité, attestations diverses, relatives aux
étrangers …)
Tâches judiciaires (apostilles, recueil plaintes,
PV, recherche informations et renseignements
judiciaires…)
Contrôle administratifs (des libérés
conditionnels, des bulletins centraux de
signalement, domicile…)
Quelques
heures par
jour
Quelques
heures par
semaine
Quelques
heures par
mois
Jamais
18 4 3 0
20 4 1 0
12 8 5 0
Surveillances générale espace public (îlotage) 6 10 5 4
Surveillances spécifiques (des commerces
ambulants, des habitations durant les vacances,
d’écoles, de trafic…)*
9 3 10 0
Numération d’immeubles 1 1 10 13
Rapport voiries 1 4 16 4
Gestion des conflits voisinage (médiation) 5 17 3 0
Gestion de la circulation et du stationnement
dans le quartier
0 6 14 5
Assistance aux particuliers (relais social, services
divers)**
6 12 5 0
Présence aux réunions
commerçantes ou de quartier
des associations
0 4 15 6
Participation accueil au commissariat 4 6 4 11
Participer aux campagnes de prévention*** 0 2 14 6
Réserve pour autres services de police**** 0 3 12 9
Accompagnement d’huissier 0 3 15 7
Remise des exploits d’huissiers 0 1 5 19
Maintien de l’ordre lors d’événements spéciaux 0 2 22 1
Récolter de l’information 13 9 2 0
Détecter les causes des sentiments d’insécurité
dans la population
6 8 11 0
Ecoute des demandes des habitants du quartier 16 8 1 0
Transmission des demandes et attentes locales à
l’autorité ou aux autres services*****
Dispenser de l’information (sur des fêtes de
4 12 8 0
quartier, des changements dans la loi communale,
de l’information policière…).
2 9 13 1
Suivi des appels non urgents 3 10 7 5
Suivi des appels urgents 5 1 11 8
Participation aux campagnes (par exemple :
BOB, MEGA, …)
0 4 12 9
Ce tableau donne le total des questionnaires qui ont été remplis par les inspecteurs de quartier lors de la réunion des focus
groupes.
*3 répondants n’ont pas donné de réponse
**2 répondant n’ont pas donné de réponse
***3 répondants n’ont pas donné de réponse
****1 répondant n’a pas donné de réponse
*****1 répondant n’a pas donné de réponse
67

Comme nous pouvons le constater, certaines réponses sont très claires ; d’autres varient
beaucoup. Ces écarts sont à mettre en parallèle avec l’organisation opérationnelle du travail
de quartier ainsi qu’avec les missions supposées qui leur ont été attribuées. Comme nous
l’avons déjà mentionné, on constate que les visions idéales du travail de quartier ne sont pas
corrélées à la pratique réelle.
On peut déduire du tableau présenté ci-dessus que la plupart des inspecteurs de quartier
exercent des tâches administratives pendant quelques heures par jour. Pour quatre répondants,
il s’agit de quelques heures par semaine et pour trois d’entre eux de quelques heures par mois.
Beaucoup dépend de la façon dont ils structurent et cordonnent leur travail. Aussi la densité
de la population des quartiers joue un rôle. La même constatation vaut pour les tâches
judiciaires. Concernant les contrôles administratifs, il y a une plus grande variation. Ceci
renvoie, d’un côté, à la nature du corps (les procédures établies) et, de l’autre côté, au fait que
beaucoup de zones essaient de simplifier les procédures administratives pour que la
transmission de dossiers se déroule de manière plus efficace. Il est important de signaler que
malgré le fait que cette transmission est considérée comme une surcharge du travail
particulièrement lourde, nos observations nuancent cette image. Beaucoup d’inspecteurs de
quartier y consacrent beaucoup de temps sans que ceci nécessite un « travail de bureau »
exigeant. La conséquence en est que leur contribution à la prise en charge des désordres liés
au quartier, de la criminalité et de l’insécurité en fait les frais.
La surveillance des lieux publics et des territoires spécifiques connaît aussi des écarts
significatifs. Les inspecteurs de quartier indiquent que ces tâches varient d’un moment à
l’autre et ne sont pas bien définies, ce qui explique en partie leur irrégularité (on le fait quand
on n’a rien d’autres à faire ou en cas d’évènements ponctuels).
Certaines tâches ne font plus partie du paquet de tâches de l’inspecteur de quartier. Ceci est
essentiellement le cas dans les corps de police flamands et bruxellois. Il s’agit des
« numérations d’immeubles », de la « participation à l’accueil au commissariat » et de la
« remise des exploits d’huissier ». Ceci est au bénéfice de l’emploi de temps de l’inspecteur
de quartier. D’autres tâches comme l’accompagnement d’huissier ont fortement été réduites,
ce qui indique qu’il y a eu des évolutions dans les tâches attribuées aux inspecteurs de
quartier.
La mission de médiation est très présente dans le paquet de tâches : une large majorité
d’inspecteurs de quartier y consacrent quelques heures par semaine. Cette mission est en
accord avec le profil de fonction établi. De même, les inspecteurs de quartier indiquent qu’ils
consacrent quelques heures par mois aux réunions de quartier. Mais les observations ont
montré que l’inspecteur n’est pas toujours présent à de telles réunions, notamment parce
qu’ils n’y rencontrent généralement pas un accueil positif ou par manque d’initiatives de
l’inspecteur de quartier en question. A côté de tout cela, l’inspecteur de quartier consacre
beaucoup de temps à la détection et la transmission de comptes-rendus en matière de
désordres et de criminalité. Cette charge est cependant, de l’avis des intéressés, difficile à
68

mesurer, tout comme la participation aux campagnes (de prévention), l’appui aux autres
services et le suivi à donner aux appels urgents et non urgents. Enfin, les inspecteurs
indiquent aussi qu’ils consacrent plusieurs heures tous les jours et/ou par semaine à répondre
aux questions des habitants des quartiers et à collecter des informations.
Bien que ce tableau donne un relevé des tâches les plus courantes, il ne nous donne que peu
de vue sur les tâches qui sont spécifiques à leur quartier et qu’ils accomplissent de leur propre
initiative. Vu le délai de la recherche il est impossible d’en obtenir une vue complète.
Plusieurs inspecteurs de quartier indiquent qu’ils répondent aux demandes des habitants de
quartier concernant par exemple des dérangements causés par des jeunes, en contactant
d’autres services, mais aussi en prenant eux-mêmes des initiatives (comme demander de
l’information aux animateurs de jeunesse, ou approcher eux-mêmes les jeunes). Cette attitude
varie cependant d’un inspecteur à l’autre.
En comparant, d’un côté, les tâches et, de l’autre côté, la charge de ces tâches aux missions
supposées, il est frappant de constater que la concordance entre missions et
professionnalisation est relativement faible. Ceci est grande partie à relier à la difficulté de
tracer complètement la « carte » du catalogue des missions et des tâches variées de
l’inspecteur de quartier, mais aussi au fait que des aspects comme la visibilité, la réactivité,
l’intervention proactive ou préventive s’expriment peu sur le terrain. Le fossé entre missions
proposées et tâches réelles est toujours présent. Ceci a probablement aussi un effet sur la
position opérationnelle du travail de quartier au sein de la police locale, en particulier sur les
difficultés en matière de collaboration et de communication que nous avons pu constater.
4.4.3.3 Les contacts avec la population
De manière plus concrète, le traitement des dossiers judiciaires et administratifs constitue,
selon les inspecteurs de quartier, la tâche qui leur prend le plus de leur temps. Ce constat n’est
lui non plus pas réellement nouveau. Nos résultats montrent cependant que cette abondance
n’est pas forcément que spécifique au service de quartier. Par ailleurs, la surcharge de travail
« de bureau » est en partie due à des erreurs de procédure qui ont comme résultat d’obliger
l’inspecteur de quartier à faire du travail inutile ou indu (par exemple, demandes
d’information ou de documents par la commune alors qu’elle aurait dû faire la demande à ses
propres services, apostilles qui sont envoyées deux fois, etc.). Bien que ces dossiers
administratifs et judiciaires prennent beaucoup de temps, les zones de police ne sont pas
forcément partisanes d’un transfert de ces dossiers vers d’autres services. De l’avis même des
inspecteurs de quartier, certaines de ces tâches sont considérées comme primordiales pour le
travail de quartier car elles permettent, à l’exemple des enquêtes de domiciliation, à
l’inspecteur d’être visible, de contacter des citoyens difficilement joignables, d’accéder à des
domiciles, de faire des constatations... Bref, de se faire connaître des habitants du quartier.
Cependant, on peut se poser la question de savoir s’il n’est pas encore une fois paradoxal de
faire passer les dimensions, citées comme centrales, de « visibilité » et d’accessibilité » par le
traitement des dossiers administratifs et judiciaires. D’autres tâches permettraient sans aucun
69

doute de parvenir aux mêmes résultats, surtout vu le temps important investit dans ce
traitement. D’autant que l’on constate que, concrètement, les contacts avec la population se
déroulent essentiellement lors de la présence des inspecteurs de quartier dans leurs propres
quartiers. Cette présence ne constitue, aux dires des inspecteurs, que, au mieux, la moitié de
leur temps de travail, et ne garantit d’ailleurs pas des contacts de qualité, dans la mesure où
présence dans le quartier ne signifie pas encore qu’ils ont le temps de discuter longuement
avec les habitants ou les commerçants puisque à cette présence est encore associée à toute une
série de tâches administratives ou judiciaires.
Concernant la collecte d’information liée au quartier ou aux problèmes de quartiers, on
constate que les inspecteurs de quartier obtiennent souvent celles-ci grâce à quelques
personnes de contact dans le quartier (figures-clefs) ou par des initiatives propres. Tous les
inspecteurs décrivent cet aspect de leur travail comme une des tâches les plus importantes
d’un inspecteur de quartier. Ainsi, par exemple, les inspecteurs de quartier essayent de réunir
les numéros de GSM des habitants du quartier et de les conserver dans un petit livre ou sur
des fiches (avec des coordonnées) lors des enquêtes de domiciliation ou des demandes de
naturalisation... Si d’autres services demandent ces numéros de GSM à l’inspecteur de
quartier, il ne peut cependant pas les fournir, cette information étant de l’ordre de la vie
privée. Plusieurs inspecteurs de quartier le regrettent en raison de la limitation de transmission
d’information que cela entraîne. Ce regret est d’ailleurs démonstratif de la volonté des
inspecteurs de quartier de jouer un plus grand rôle dans une fonction de police davantage
tournée vers l’Intelligence led policing.
4.4.4 L’importance des partenaires et des réseaux
En théorie, les inspecteurs de quartier ont un grand éventail de « partenaires », aussi bien
policiers (que l’on appelle alors les « collaborateurs ») que non policiers (que l’on appelle
alors les « clients »). Néanmoins, les contacts avec ces partenaires sont peu fréquents et n’ont
généralement lieu « qu’en cas de besoin » et non sur une base régulière, notamment quand les
tâches se chevauchent et quand il est nécessaire de partager certaines informations. Au niveau
de la police ceci se traduit, on l’a dit, par des moments de concertation formels et informels.
En externe, il est parfois nécessaire de fixer des accords, par respect des logiques d’action et
de la confidentialité de chacun. Si les inspecteurs de quartier reconnaissent l’importance des
réseaux (principalement avec des citoyens), ils n’investissent, en général et par manque de
temps, que peu de temps et d’énergie pour entretenir ces contacts ou ces réseaux. On peut
subdiviser les partenaires en :
Partenaires internes (au sein de là police locale) : tous les acteurs rencontrés confirment
l’existence de contacts avec toutes les fonctionnalités/services de la police locale. La plupart
des contacts se déroulent cependant avec le service intervention, sans qu’on puisse parler pour
autant d’une collaboration. Il s’agit principalement de passer de l’information.
70

Partenaires externes : tous les acteurs rencontrés disent que les partenaires externes sont très
variés. On peut distinguer quatre réseaux : les services communaux, les assistants sociaux, les
écoles et les citoyens. Il s’agit également davantage de contacts que de collaboration. A côté
de ces réseaux, les inspecteurs de quartier sont régulièrement contactés par la Sûreté de l’Etat,
le Service de renseignement militaire et la police fédérale pour des demandes d’information
sur des dossiers spécifiques.
Comme nous pouvons le constater, il y a une différence entre des « partenaires » formels et
informels. Certains d’entre eux sont déterminés par la nature de la gestion locale de police ou
la gestion en matière de la sécurité, d’autres partenariats se forment à cause d’une situation
concrète à laquelle on est confronté. Il est important à signaler que, malgré que l’on parle de
« partenariats », ceci ne se vérifie pas toujours dans la réalité. Dans la majorité des cas il faut
plutôt parler d’un contact sporadique à l’occasion de transmission d’informations. Une
approche commune des problèmes relatés aux quartiers est peu visible. Ces données sont
remarquables dans ce sens qu’il il n’y a que peu de concordance entre les différents
« partenaires » - bien que ce n’est pas nécessairement le cas. Dans ce sens, on doit plutôt
parler de collègues au lieu de partenaires.
La nature des contacts varie aussi. On peut se rencontrer lors de réunions formelles qui sont
planifiées à l’avance. Mais la plupart des contacts se passent d’une façon informelle et
sporadique. Les faits nous montrent que c’est surtout lors de ces derniers moments que l’on
peut détecter la majorité des liens de collaboration.
4.4.5 Le problème de recrutement des candidats au travail de quartier
Aux dires des acteurs rencontrés, il y aurait une grande différence entre la sélection qui
s’opérait avant la réforme de la police et après. Avant la réforme, on répartissait les
inspecteurs de quartier en tenant compte du profil de l’inspecteur et de la nature du quartier
(on attribuait, par exemple, des quartiers avec beaucoup de problèmes aux inspecteurs les plus
assertifs). Après la réforme, on n’a plus pu appliquer cette procédure pour deux raisons.
D’abord, les postes vacants sont rares avec comme conséquence qu’au lieu de sélectionner par
profil d’inspecteur ou par genre de quartier, on se contente de remplir le poste. Ensuite, parce
qu’il y a peu de candidats inspecteurs de quartier. On fonctionne donc avec les moyens
disponibles. Il faut cependant relativiser la différence qui est faite entre l’avant et l’aprèsréforme
: toutes les recherches portant sur la situation avant 2002 soulignent que l’attribution
d’un quartier sur base de profil différencié d’inspecteur de police était rare. Il y a donc peutêtre
ici un effet de nostalgie et de reconstruction d’une réalité, sans doute bien moins idéale
que présentée par les acteurs rencontrés.
Quoi qu’il en soit, les résultats montrent que le recrutement et la sélection des inspecteurs de
quartier est un processus peu satisfaisant. Il y a peu de candidats en interne : il est donc
difficile de tenir compte des compétences et des attitudes de travail de ceux-ci au cours de la
procédure de sélection. On est donc souvent obligé de travailler avec les ressources
71

disponibles. En outre, ce manque de candidat en interne n’est pas compensé par des
candidatures externes (mobilité au départ d’autres zones de police). Le « problème de
recrutement » ne semble cependant pas uniquement se concentrer sur le travail de quartier
mais s’étendre à tous le cadre inspecteur.
Malgré cette difficulté, toutes les zones de police essaient de « rajeunir » le service de quartier
dans l’espoir d’améliorer l’image du service (notamment en interne) et si la procédure de
recrutement ne permet pas de sélectionner le profil idéal par rapport aux quartiers, il permet,
par contre, d’engager des policiers de quartier plus jeunes. Il est à remarquer qu’on ne
sélectionne cependant que très rarement des candidats qui viennent de terminer l’école de
police (bien qu’en théorie ceci soit parfaitement possible). La raison en est que le travail de
quartier exige une grande capacité d’autonomie (prendre des initiatives, finaliser des dossiers
soi-même et résoudre des problèmes). On préfère, dès lors, des candidats ayant environ cinq
ans de travail à l’intervention ou, plus rarement, qui ont une expérience professionnelle en
dehors de la police. Ceci pour garantir une certaine maturité des gens sur le terrain. Quand un
nouvel inspecteur de quartier est engagé, des « anciens » jouent le rôle de mentor suivant
deux cas de figure : soit un inspecteur de quartier prend sa pension ou change de travail, et
dès lors intègre la nouvelle recrue dans le service et se charge de lui expliquer ses missions et
tâches ; soit la nouvelle recrue est prise en charge pas des collègues du quartier ou d’autres
quartiers.
Une recherche précédente avait souligné que le travail de quartier souffrait d’un « problème
d’image » qui influencerait indirectement le manque de candidats inspecteurs de quartier. En
partant du point de vue des inspecteurs de quartier (et non de autres policiers du la zone de
police) nous ne sommes pas en mesure d’infirmer ou de confirmer ces résultats. Par contre,
nos propres résultats permettent de mettre en évidence que les raisons qui ont motivé les
inspecteurs de quartier à postuler pour le travail de quartier sont principalement, d’une part,
d’ordre pratique, d’autre part, mais de manière moins prioritaire, liées à la qualité de ce travail
(en particulier, les meilleurs contacts avec la population). La vie de famille, par exemple, est
pour toutes les personnes rencontrées la raison principale qui les a conduits à opter pour le
travail de quartier. Les heures de travail d’un inspecteur d’intervention empêchent en effet un
contact régulier avec la famille et avec les enfants. C’est la raison pour laquelle beaucoup de
jeunes inspecteurs de quartier (hommes et femmes) ont intégré le travail de quartier après une
carrière de cinq ans en moyenne. Une deuxième motivation est la nature du travail. Les
inspecteurs de quartier se plaignent de la mauvaise qualité des contacts avec la population lors
du travail d’intervention et de l’absence de suivi. En plus de ces deux arguments, largement
partagés, il y a aussi plusieurs personnes qui voulaient simplement « changer de travail ».
Enfin, certains inspecteurs de quartier – une minorité – ont choisi ce travail par réelle
ambition de faire du travail de quartier : la description des missions leur plaisait et ils
pouvaient se retrouver dans les conditions de travail.
72

4.4.6 Les conditions de travail
Le travail de police nécessite aujourd’hui une bonne connaissance de la technologie surtout
de l’information et de la communication. Plusieurs zones de police locale ont par conséquent
fait des aménagements en ce sens, notamment via l’achat d’ordinateurs supplémentaires. Cela
n’empêche pas qu’il y a des services de quartier qui connaissent un manque considérable de
moyens technologiques : pas d’accès au réseau Internet, trop peu d’ordinateurs, mauvaises
connections radio, etc. La raison invoquée est la faiblesse des budgets locaux ou tout
simplement le manque d’investissements financiers dans le service de quartier. Ce manque de
financement n’est pas uniquement à cause d’un déficit budgétaire. Il y a encore d’autres
facteurs qui jouent un rôle dans le fait que les inspecteurs de quartier ne peuvent que jouir très
peu des moyens subsidiaires technologiques. Les responsables des quartiers et les chefs de
corps insistent par exemple sur la prudence à adopter concernant l’implémentation de TIC
(technologies de l’information et de la communication) et de l’Internet dans le travail
quotidien. Dans la plupart des zones que nous avons observées, une certaine méfiance prévaut
quant à la possibilité de donner des adresses mail aux inspecteurs de quartier et quant à
l’utilisation de GSM. Les chefs de corps et les responsables des quartiers soulignent
l’importance d’être toujours au fait (et capable de contrôler) les va-et-vient des inspecteurs de
quartier. Les inspecteurs de quartier pourraient, selon eux, abuser de ces moyens, du moins si
on leur en donnait un usage illimité. Les inspecteurs de quartier, de leur côté, insistent sur les
opportunités qu’offrent ces outils technologiques, pour être « accessibles » et « disponibles ».
Certains soulignent même que des telles technologies sont, en étant de plus en plus utilisées,
quasi indispensables aujourd’hui. Ce manque de confiance a été constaté aussi bien pendant
les observations que pendant les focus groupes. Le but principal des responsables (du cadre
dirigeant aussi bien que du middle management) est d’avoir à tout moment le contrôle sur le
fonctionnement de leur organisation locale. La difficile coordination entre « la direction » et
les « exécutants », dont nous avons déjà parlé, est en partie à l’origine de cette constatation.
Beaucoup d’inspecteurs de quartier regrettent d’ailleurs le manque d’investissements
financiers dans du matériel de travail pratique comme des vêtements adaptés à la pluie et du
matériel de transport adaptés à des déplacements réguliers. Pour eux, la cause de ce problème
est parfois liée à la politique locale. Dans certaines zones, on promeut, par exemple, des
nouvelles technologies sans demander l’opinion des inspecteurs de quartier concernant
l’efficacité de tels moyens (par exemple, les bicyclettes électriques) alors que, dans un même
temps, le budget disponible pour d’autres besoins est réduit. Comme nous l’avons déjà
mentionné, les inspecteurs de quartier ne sont en principe pas impliqués dans les
investissements concernant le service ou le travail de quartier. La vision de la politique locale
dans cette matière varie de zone en zone. Il y a aussi bien des zones qui vont loin dans de
nouveaux investissements que de zones qui ne mettent que très peu de moyens à disposition
de la promotion de moyens matériels. Les raisons de ces différences en termes
d’investissements pratiques sont essentiellement liées à l’importance qu’on accorde au
fonctionnement de quartier.
73

Une autre condition matérielle importante de travail, mentionnée par les inspecteurs de
quartier ou leurs responsables, est l’accessibilité aux moyens de transport. Les inspecteurs de
quartier utilisent en général des voitures, des bicyclettes, des cyclomoteurs ou se déplacent à
pied : cela dépend en général de la taille du quartier, de la distance entre le commissariat et le
quartier et/ou de la (bonne) volonté de l’inspecteur. Dans des zones plutôt rurales, on utilise
plus facilement des voitures ou des cyclomoteurs (et on continue à pied sur place), alors que
dans les zones urbaines on utilise davantage des bicyclettes, des cyclomoteurs ou on se
déplace à pied. Les inspecteurs soulignent l’importance du moyen de déplacement qui joue un
rôle sur l’accessibilité de l’inspecteur. Les citoyens ont ainsi moins de problèmes à s’adresser
à un inspecteur de quartier, ou à l’interpeller, s’il se déplace à pied ou en bicyclette.
Les heures de travail des inspecteurs de quartier dépendent largement des zones. Il est en
effet très difficile de créer un horaire uniforme pour le travail de quartier puisque la nature du
quartier conditionne largement l’horaire. Il y a des quartiers, pour lesquels, on entre surtout en
contact avec les gens pendant la journée (des zones industrielles, des quartiers de commerce),
des quartiers où le contact se déroule surtout le soir (des zones d’habitats) et des quartiers
avec des contacts tant en journée que le soir (régions urbaines, aires de jeux, logements
sociaux). La plupart des inspecteurs de quartier travaillent cependant cinq jours par semaine :
quatre en journée et un en soirée. Ce type d’horaire ne permet pas aux inspecteurs qui le
désireraient, et pour lesquels le type de quartier le nécessite, de travailler davantage en soirée.
Le même constat peut être fait pour le WE. Dans certains cas (la majorité), les inspecteurs de
quartier peuvent travailler le WE deux fois par mois (et gagner plus d’argent durant cette
période) mais ne peuvent pas, en raison de la loi, en faire davantage. Les WE sont pourtant,
de l’avis de nos inspecteurs, des moments d’activité importante dans certains quartiers. Les
inspecteurs rencontrés sont majoritairement en faveur d’un horaire plus flexible dans lequel
ils peuvent eux-mêmes déterminer à quel moment leur travail serait le plus utile. A ce sujet, il
y a d’ailleurs concordance entre le discours des responsables des quartiers et des inspecteurs
de quartier. Cependant, les inspecteurs de quartier considèrent que cette flexibilité ne doit pas
se transformer en horaires à pause (à l’image de ceux de l’intervention) car cela rentrerait en
contradiction avec les raisons qui les ont fait choisir d’intégrer un service de quartier (à savoir
des horaires majoritairement de jour, pour des raisons familiales). La flexibilité jouerait
davantage sur un décalage relatif des heures prestées (commencer un peu plus tard, finir un
peu plus tard, par exemple ; travailler un WE supplémentaire si nécessaire).
Les inspecteurs de quartier font, par ailleurs, tous les jours un planning de leurs tâches s (par
des fiches, un tableau en Excel ou un document Word). Leur champ de travail (les tâches
diverses qu’ils doivent prester) peut être très étendu : planifier ce travail constitue donc un
moyen nécessaire – mais chronophage – pour ne pas parcourir des distances inutiles. En
d’autres termes, pour gagner du temps, ils en investissent (et en perdent) beaucoup dans leur
« time management », ce qui constitue une tâche administrative supplémentaire. Les
inspecteurs de quartier accordent beaucoup d’importance à cette planification, car elle
structure leur paquet de tâches, d’un côté, et détermine, de l’autre côté, l’itinéraire qu’ils ont à
suivre. Les tâches administratives et juridiques doivent être finalisées dans un laps de temps
74

déterminé. Ceci stimule les inspecteurs de quartier à bien gérer leur occupation de temps.
C’est d’autant plus essentiel qu’une des caractéristiques du métier d’inspecteur de quartier est
qu’il reçoit chaque jour des tâches s diverses et qu’il doit souvent les exécuter en même
temps. Ce planning est de toute première importance pour organiser leur travail. Les
observations montrent néanmoins qu’on investit beaucoup de temps dans ces planifications,
ce qui a pour conséquence que parfois leur objectif initial qui est de gagner du temps est
neutralisé par le temps que les inspecteurs de quartier prennent à organiser les itinéraires et à
« remplir » des fichiers Excel. Sans évidemment pouvoir confirmer cette hypothèse, on peut
d’ailleurs poser la question de savoir si l’importance en termes de temps accordé par les
inspecteurs à ce planning n’est pas une manière d’éviter d’être présent dans le quartier.
Certaines observations le laissent attendre.
Concernant la question du salaire des inspecteurs de quartier, les réponses sont partagées.
D’un côté, les responsables de quartier regrettent le manque de primes et d’avantages (ce qui
nuit selon eux à l’image du travail de quartier). D’un autre côté, les inspecteurs de quartier
n’ont pas de problèmes avec leurs salaires. Ils préfèrent les avantages d’une vie familiale et un
horaire intéressant de ce point de vue à un salaire (primes comprises) plus élevé. La plupart
des inspecteurs de quartier n’expérimentent pas de diminution de leur qualité de vie, au
contraire. Ce constat offre un contraste important avec la recherche précédente, qui montrait
qu‘une rémunération moins élevée avait des effets sur la motivation à choisir le travail de
quartier ainsi que sur l’image de marque de ce service (cfr chapitre 1). Bien que notre
recherche montre effectivement que les inspecteurs de quartier ont, dans la pratique, moins de
possibilités d’augmenter leur salaire (les dites primes), cette situation ne semble pas
contrebalancer les avantages en matière d’augmentation de la qualité de leur vie.
4.5 Conclusion
La première chose qui nous frappe au regard des résultats est le fait qu’il y a nombre des
constats qui dépassent le niveau du travail de quartier. Certains aspects (notamment des
obstacles) sont surtout à renvoyer à l’organisation de la police locale dans sa globalité. Il est
clair que la transversalité supposée entre les trois dimensions (professionnelle,
organisationnelle et fonctionnelle) est peu perceptible. Souvent il y a une proposition très
idéalisée qui est difficile de constater dans la réalité quotidienne. Et ceci pour plusieurs
raisons. La coordination entre les différents niveaux (chefs de corps, responsables des
quartiers, inspecteurs de quartier) n’est que très peu visible. Il y a un manque de confiance
entre ces niveaux et les processus décisionnels concernant l’organisation du travail de quartier
se déroule souvent sans tenir compte des opérateurs sur le terrain. Beaucoup de questions
concernent le rôle des responsables de quartier. En effet, ce sont ces personnes qui font partie
des « middle management » qui, à ce titre, doivent engendrer une collaboration étroite avec,
d’un côté, le chef de zone et, de l’autre côté, les inspecteurs de quartier. Pour autant, leur
contribution dans la définition d’un travail de quartier adéquat est difficile à cerner. Ce qui est
par contre très clair, c’est que son rôle d’intermédiaire est dans beaucoup de cas sous-estimé,
tant en amont, qu’en aval. Le « missing link » entre la ou les missions attribuées au travail de
75

quartier de quartier et le catalogue de tâches prestées par les inspecteurs de quartier peut, en
général, être renvoyé à ce fossé entretenu en grande partie par l’absence de vision réaliste des
responsables de quartier par rapport à la réalité de terrain. Dès lors, on peut sérieusement
interroger la manière dont le responsable de quartier transmet cette vision, et cette réalité
« idéalisée », au chef de zone et sur ce que ce dernier connaît finalement de cette réalité de
terrain. Quoi qu’il en soit, il est clair que le rôle du responsable de quartier et les initiatives
qu’il prend sont particulièrement importants dans l’élaboration des missions du travail de
quartier.
Par ailleurs, l’intégration du travail de quartier au sein de la (fonction de) police locale et la
collaboration entre les différentes fonctionnalités de base ne se passe pas sans problèmes non
plus. Même s’il n’est évidemment pas toujours nécessaire de travailler en partenariats, et si
ceux-ci ne doivent pas forcément être formalisés pour être effectifs, certaines formes de
criminalité ou de désordres demandent clairement que se développent une concertation et une
collaboration opérationnelle entre les différents services et fonctionnalités. Ce qui est
frappant, dans ce cadre, c’est le manque de connaissance entre les services et fonctionnalités,
quant au contenu, aux missions et tâches prioritaires, mais aussi et peut-être surtout, à cette
volonté, profondément ancrée chez les responsables de travailler uniquement « dans son pré
carré ». Il n’y a, en d’autres termes, pas de demandes de transversalité. Au contraire, cela peut
même être présenté comme un affaiblissement des spécificités ou des spécialisations de
chacune des fonctionnalités ou services. Ici aussi on peut se poser la question du rôle que
joue, dans ces perceptions, les responsables de fonctionnalités. Ce constat va cependant bien
au-delà de l’objet de cette recherche.
Concernant plus spécifiquement le responsable de quartier (middle management), nous avons
pu constater que la littérature consultée et les recherches portant sur le travail de quartier
n’abordent que très peu, ou très à la marge, son rôle et son importance, tant en ce qui
concerne la réalisation d’une meilleure collaboration entre les différents services que dans la
définition de la (des) missions(s) ou des tâches attribuées aux services de quartier et/ou aux
inspecteurs de quartier.
Nous avons également pu constater une demande de plus en plus forte d’une spécialisation au
niveau du travail de quartier, mais qui n’est pas sans lien avec la faiblesse d’une définition
claire du travail de quartier. Ce qui ressort clairement de nos données est que l’on ressent le
fonctionnement polyvalent comme une difficulté et non comme une richesse. Selon les
personnes interrogées, cette polyvalence est un obstacle à la définition d’un cadre solide et
bien déterminé, qui pourrait favoriser le fonctionnement territorial du travail de quartier et sa
plus grande efficacité. Pour autant, il faut bien constater, que la polyvalence n’est en réalité
pas une caractéristique propre au travail de quartier. C’est une particularité du travail policier
qui est par nature imprévisible et dont les tâches sont irréductibles. Comme le rappelle
Monjardet, « la mission policière est infinie, indéterminée, indéfinissable, non mesurable,
floue, toujours recommencée » (2008 : 29). Ce qui est sans doute beaucoup problématique
pour le travail de quartier n’est donc pas cette polyvalence, mais l’absence de référentiel clair
76

aux tâches assignées, ou, en d’autres termes, d’objectifs au travail de quartier qui
s’accompagnent d’indicateurs spécifiques du travail bien fait et de l’accomplissement positif
et de la valorisation de la fonction.
Chaque zone essaie d’organiser son corps selon les besoins de la (des) commune(s) en
question. La compétence décisionnelle du chef de zone et du (des) bourgmestre(s) dans cette
opération est donc également primordiale. La structure organisationnelle, tant verticale
(hiérarchique) qu’horizontale (entre services et fonctionnalités), de la police dans sa globalité
a un effet indéniable sur l’organisation du travail de quartier. Comme nous venons de le dire
au début de ce chapitre, aucune organisation est sans problèmes. Il y aura toujours des
avantages ou des désavantages aux formes et options choisies. La réforme de police avait
comme objectif de réduire les cloisonnements entre niveaux hiérarchiques, entre services et
entre fonctionnalités, caractéristiques. Mais, sur le terrain, ceci particulièrement difficile à
réaliser. Mais cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas tendre vers une situation dans laquelle la
coordination entre la politique policière et la traduction de celle-ci sur le terrain soit
optimalisée. Le chapitre suivant nous donne quelques perspectives.
77

5. Réfléchir sur l’avenir du travail de quartier : vers un modèle de
quartier
Cette partie du rapport se focalise sur la deuxième partie de la recherche. En d’autres mots,
nous allons ici cibler la place et la position du travail de quartier et de la fonctionnalité de
quartier au sein de la police locale. Ces pistes de réflexion sont proposées sur base de
l’analyse du matériau empirique. Nous avons également organisé deux séminaires (un en
français et un en néerlandais) pour tester nos réflexions. Ces séminaires ont été composés sur
base d’une liste de participants qui nous a été envoyée par le SPF Intérieur, sur proposition de
la Commission permanente de la police locale. Les participants étaient principalement des
chefs de zone et des responsables de quartier. Nous avons ensuite intégré les réflexions et les
recommandations faites lors de ces séminaires dans nos résultats finaux. L’honnêteté
scientifique et méthodologique imposent de mentionner qu’il y a eu, dans la dynamique de
ces séminaires et ce que l’on a pu en retirer, des différences significatives, qui sont en grande
partie dues à l’organisation pratique de ceux-ci. Lors du séminaire francophone, l’équipe a
ainsi éprouvé quelques difficultés dans la gestion du temps (notamment de parole), auxquelles
il faut rajouter des problèmes liés à une mauvaise traduction de certaines terminologies (du
néerlandais au français) qui ont pu entraîner des malentendus quant aux concepts utilisés et,
dès lors, leur compréhension. Il est évident que cela eu un effet sur les réactions des
répondants. Pour cette raison, nous nous sommes principalement basés dans cette partie sur
les données issues du premier séminaire, complétées par des données issues du deuxième
séminaire (nous n’avons utilisé que les données pour lesquelles nous étions sûrs que la
synchronisation entre le matériau présenté et la réaction à ce matériau était cohérente).
Les éléments prospectifs proposés ont été encadrés à base d’un modèle qui peut offrir du
support à la structure interne (organisationnelle) du travail de quartier au sein de la police
locale. La transversalité entre les trois dimensions qui ont été utilisées dans le volet empirique
en est le pivot. Comme nous l’avons assez largement montré dans ce rapport, en pratique cette
transversalité est imparfaite, voire peu présente à l’heure actuelle. Ceci s’explique par une
coordination très faible entre les niveaux hiérarchiques (dirigeants, middle management et
exécutants), les manques constatés en matière de la définition du travail de quartier et les
différences importantes de perception des missions prioritaires de ce travail de quartier. On
peut rajouter que la confusion constante, chez les personnes interrogées, entre services de
quartier et fonctionnalité de quartier (confusion dans les terminologies, mais également
recouvrement organisationnel) joue également un rôle dans cette insuffisance de
transversalité. Le modèle de quartier que nous proposons contient plusieurs idées
fondamentales qui chacune contribue à des améliorations internes possibles. A la fin de ce
chapitre, nous porterons plus en profondeur notre attention sur l’évolution future du travail de
quartier. Ceci est important, car les circonstances actuelles sont principalement concentrées
sur deux aspects : le travail dans des zones administratives délimitées (les quartiers) et la
collecte d’informations. Dès son origine, la police a toujours été caractérisée par un
fonctionnement ancré territorialement et a toujours fondé celui-ci sur la récolte des
78

informations (Van De Brink, 2010 : 5). Par sa structure et son encadrement, le travail de
quartier développe préférentiellement ces dimensions. Mais ces dimensions sont tellement
(sur)valorisées que les autres dimensions du travail de quartier sont refoulées à l’arrière-plan.
Hors ces dimensions, il n’est, dès lors, pas toujours clair de savoir quelle est ou pourrait être
la réelle plus-value du travail de quartier. Nous aborderons cette question dans cette partie.
Il est important de mentionner que le modèle de quartier présupposé est orienté à une
réflexion générale. En conséquence, ce modèle servira comme référence pour les
recommandations dans le chapitre suivant. Dans cette optique, il est important de ne pas voir
les deux parties séparés l’une de l’autre. Les réflexions générales servent comme point de
départ pour les recommandations spécifiques.
5.1 Le point de départ : la transversalité entre les trois dimensions
Le concept de « transversalité » n’est pas univoque. Il y a beaucoup d’imprécisions
concernant la conceptualisation de ce terme, qui ont pour effet qu’un nombre important de
synonymes ont vu le jour au cours des années rendant sa compréhension plus complexe
encore. Au départ de ses trois dimensions (professionnelle, fonctionnelle et
organisationnelle), Monjardet (1996) a voulu offrir un modèle qui offre une alternative à la
structure typiquement classique et hiérarchique qui caractérise en général une organisation de
police et qui sert encore trop souvent à l’analyse de celle-ci. Ces dimensions ne sont pas
indépendantes les unes des autres, c’est au contraire les interrelations (la dynamique) entre ces
dimensions qui offrent une plus-value. Une approche transversale s’impose donc.
Pour Smeets (2009), on retrouve concernant la police, trois manières d’interpréter la
transversalité, sans qu’aucune de ces manières ne soit exclusive l’une de l’autre. Toutes les
trois ont pour but d’offrir une alternative à l’organisation traditionnelle verticale qui
caractérise la police. Premièrement, la transversalité dans les missions prioritaires ou dans la
fonction de police (entre les fonctionnalités). Deuxièmement, la transversalité dans les
modalités d’intervention, les modus operandi mis en œuvre. Ces deux premières
interprétations sont souvent renvoyées à l’approche par problèmes (le problem oriented
policing). Troisièmement, la transversalité dans et entre les territoires concernés. C’est
l’approche que l’on peut qualifier de territorialisée, qui se concrétise souvent par l’accent mis
sur le quartier, mais sans supprimer d’autres niveaux de référence et l’importance des liens
entre eux (la zone de police ou la commune).
Les deux premières façons ciblent donc la transversalité entre les différentes fonctionnalités,
les missions prioritaires de la police et les modalités d’intervention. Au niveau du travail de
quartier cela renvoie au degré d’intégration de celui-ci au sein de la police locale et à la
manière dont cette intégration est réalisée sur le terrain. Les fonctionnalités de base, telles
qu’établies après la réforme de la police, diffèrent au niveau des missions qu’elles réalisent.
L’intervention, en tant que fonctionnalité est, par exemple, caractérisée par la rapidité
d’intervention en réaction à un appel (saisine extérieure). Le travail de quartier, de son côté,
79

doit permettre de garantir la visibilité, la disponibilité et l’accessibilité des inspecteurs de
quartier au sein d’un territoire relativement limité (le quartier) sans que ce travail ne soit lié
directement à des appels urgents. Mais cette diversité entre les fonctionnalités de base ne
signifie pas qu’il n’y a pas de points de contact ou de synergie entre les missions que les
différents policiers (des différentes fonctionnalités) exercent. Un bel exemple est celui des
cambriolages. Lorsque la police reçoit un appel concernant un cambriolage, une équipe
d’intervention arrive sur place. Par après l’inspecteur de quartier peut reprendre contact avec
les victimes afin de donner de l’information concernant des mesures de prévention (pour
mieux protéger la maison). Le service aide aux victimes peut, par ailleurs, également
accompagner les citoyens victimisés. Cet exemple montre que les missions prioritaires des
fonctionnalités de base peuvent s’entrecroiser et par définition faciliter une meilleure
collaboration. Mais, comme nous l’avons vu, ceci ne se passe pas toujours de manière aussi
idéale dans la réalité.
Il y a deux dimensions qui peuvent plus au moins neutraliser ce « cloisonnement » entre les
fonctionnalités de police et entre les services qui aujourd’hui encore sont identifiés comme
devant prendre en charge spécifiquement ces fonctionnalités.
D’abord le travail de police en général et le travail de quartier en particulier sont liés à un
fonctionnement polyvalent, comme nous l’avons déjà dit. L’approche de la criminalité, des
nuisances et de l’insécurité, c'est-à-dire les missions principales de l’organisation de la police,
n’est pas toujours prévisible et exige une posture de « policier généraliste », c'est-à-dire qui
soit capable de prendre en charge « tout et n’importe quoi ». Bittner (2004) a largement
démontré que l’aptitude de pouvoir gérer « l’inconnu » (des situations que l’on ne peut pas
prévoir) est la tâche la plus difficile, la plus complexe, mais aussi la plus importante de la
police (tant en termes quantitatif que qualitatif). La polyvalence est cependant considérée
comme la caractéristique spécifique du travail de quartier, pour lequel les inspecteurs doivent
exercer une pléthore de mission et de tâches, sans qu’ils ne puissent en estimer au préalable le
contenu ou les résultats. Cette qualification de « polyvalent » ou de « généraliste » est souvent
perçue comme une faiblesse, un manque de spécialisation et entraîne la confusion entre
fonctionnalité et services ou policiers spécifiques. Ceci s’explique en partie par le fait que
l’on essaie trop souvent d’évaluer et de définir les missions prioritaires et les sept
fonctionnalités de base en se référant aux « good practices » ou à un noyau dur des tâches
(kern taken) qui renvoient souvent aux missions les plus valorisées de lutte contre le crime
(« crime fighting »), qui sont justement celles pour lesquelles on considère qu’il faut être
spécialisé. Néanmoins certaines recherches ont déjà montré qu’il est plus opportun de
réfléchir au rôle de la police en termes de processus (Vandevoorde, Vaerewyck, Enhus, et al,
2003 ; Enhus, 2006), orienté sur les missions diverses auxquelles les policiers sont confrontés
plutôt qu’en termes de « noyau dur » de tâches. Réfléchir en termes de processus, cela
implique que, plutôt que des « tâches » individuelles, l’on cible les événements situationnels
tels qu’ils se déroulent dans la société. On donne moins de priorité à des tâches qu’à des
situations, des problèmes, etc. Dès lors, le rôle de la police consiste à prendre en charge, et de
80

manière polyvalente et transversale, des situations, des problèmes, etc. et cela en impliquant
toutes les fonctionnalités.
La deuxième dimension qui doit permettre de « neutraliser » le « cloisonnement » entre
fonctionnalités et services renvoie à la fonction du middle management (en l’occurrence : les
responsables des fonctionnalités de base). On parle peu du rôle de ces acteurs dans les
recherches portant sur les structures de la police. Et pourtant c’est le niveau par excellence qui
peut contribuer à l’amélioration et la coordination des contacts entre les différentes
fonctionnalités de base, quitte à commencer par une amélioration et une meilleure
coordination des contacts entre les différents services du corps de police. Le middle
management est le maillon clef entre les décideurs et les exécutants. Par conséquent, il peut
transmettre des expériences pratiques au profit de la gestion policière locale et il peut
expliquer les objectifs de la politique policière locale aux exécutants. En d’autres mots, un tel
acteur peut transcender la structure classique « top down » (pour les décisions) et « bottom
up » (pour les informations) qui est caractéristique des structures très hiérarchiques. En outre,
le middle management a une importante tâche de coordination, bien que cette tâche ne soit
pas toujours mise en pratique sur le terrain. En effet, ce niveau peut tracer la carte des points
de contact entre les différentes fonctionnalités de base/services. Ceci suppose une forte
capacité à prendre des initiatives. Il va de soi que chaque événement de nuisance, de
criminalité ou d’insécurité n’a pas besoin d’une approche « multifonctionnelle ». Cela
dépend, évidemment, de la situation en question et du contexte dans lequel elle se présente
(mais ceci est caractéristique du travail en processus).
En d’autres mots, le rôle du middle management comme pivot de la fonction de police locale
doit être davantage valorisé pour consolider la position, d’une part, du travail de quartier et,
d’autre part, de la fonctionnalité de quartier au sein de la police locale. Qu’est-ce que cela
signifie concrètement pour les autres niveaux ? Le chef de la zone doit être le dirigeant qui
mène, oriente et coordonne les responsables des fonctionnalités de base. En d’autres mots, il
doit veiller à la réalisation effective de la transversalité entre les différents services et
fonctionnalités. A côté de cela, le bourgmestre ou le collège de police jouent également un
rôle important dans l’implémentation de cette transversalité au sein de la (politique de la)
police locale, mais également dans le cadre de la politique locale en matière de prévention et
de sécurité. Les exécutants sont le point de référence (ici : ce sont les inspecteurs de quartier).
C’est eux qui réalisent le travail de quartier sur le terrain et qui livrent donc un input
important lorsqu’il s’agit d’initier la collaboration d’autres fonctionnalités de base/services. Il
est important que le travail de quartier ne soit plus utilisé comme service de « dumping » des
autres fonctionnalités ou services. Il doit évoluer jusqu’à devenir le point de référence central
(nous reviendrons plus tard, dans les conclusions, sur cette question).
Le deuxième type d’approche en matière de transversalité est la transversalité dans et entre
les territoires concernés (quartier, ville/commune, zone de police). C’est l’approche que l’on
peut qualifier de territorialisée, qui se concrétise souvent par l’accent mis sur le quartier, mais
sans supprimer d’autres niveaux de référence et l’importance des liens entre eux (la zone de
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police ou la commune). Comme nous l’avons à maintes reprises soulignée, la notion de
« travail territorialisé » est au coeur du travail de quartier, mais également de la fonctionnalité
de quartier (approche orienté quartier). La police (locale) est une organisation qui a toujours
favorisé un fonctionnement lié à un territoire. Le raisonnement est qu’en ciblant un territoire
spécifique, on peut plus efficacement entreprendre des actions de recherche, de maintien de
l’ordre et de collecte d’information. Le passage d’une police communale (et de brigades
territoriales de gendarmerie) à une police locale (zonale) lors de la réforme de 1998 a permis
aux corps de police de disposer, en théorie du moins, de suffisamment de policiers dans un
territoire déterminé pour assure un « service minimum » équivalent pour tous les citoyens. La
délimitation des quartiers (subdivision) dans les zones a également changé depuis la réforme
de la police avec pour objectif que la police locale puisse davantage se consacrer aux
habitants d’un quartier (Ponsaers, Cools et al, 2010 : 245) pour améliorer sa visibilité et sa
disponibilité. L’AR relatif aux normes d’organisation et de fonctionnement détermine qu’il
faut un inspecteur de quartier pour (minimum) quatre mille habitants (cf. chapitre 2).
Cependant, et il est important de le souligner, si cette norme a le mérite d’offrir un cadre, elle
ne tient compte que d’une seule dimension du travail de quartier (le nombre d’habitants) en
laissant de côté d’autres dimensions tout aussi importantes. Cette norme renvoie en réalité aux
normes administratives (sur base principalement de la densité de population) par lesquelles
les communes sont déjà géographiquement subdivisées en de plus petits territoires sans inciter
à réfléchir à d’autres dimensions. En d’autres termes, en privilégiant le nombre d’habitants,
on permet aux zones de police de ne rien faire de plus que ce qui était déjà fait dans la ou les
communes composant cette zone. On ne les encourage pas à se baser sur d’autres dimensions.
Ceci entre en contradiction avec la philosophie du véritable travail policier « territorialisé »
qui ne renvoie pas simplement à l’idée que ce travail doit s’exercer sur un territoire précis,
avec des frontières géographiques précises, mais qui renvoie à l’idée que ce travail doit
s’adapter à la spécificité de ce territoire, en tenant compte de toutes ces dimensions sociales.
Cette notion vaut d’autant plus pour le travail de quartier. En effet, les inspecteurs de quartier
fonctionnent dans des quartiers intégrés aux zones de police locale qui ont elles-mêmes déjà
des caractéristiques particulières. Leurs misions sont donc à la fois influencées par la (nature
de la) zone dans laquelle ils travaillent et par la manière dont le quartier dans lequel ils
opèrent est défini en termes de limites géographiques. La subdivision administrative actuelle
– qui reste dominante – tient rarement compte des facteurs démographiques (compositions de
la population), socioéconomiques, culturels, etc. Dans la structure actuelle du travail de
quartier, la délimitation administrative des quartiers ne recouvre pas souvent la réalité sociale
de ces quartiers, même si les inspecteurs de quartier tentent quand même d’exercer leurs
missions sur base de ces réalités sociales. Ainsi, certains quartiers sont tellement étendus que
les inspecteurs de quartier ne peuvent y être présents qu’occasionnellement. Les subdivisions
actuelles et administratives des quartiers empêchent, dans ce sens, un travail de quartier
efficace. Dans la réalité sociale, un quartier a toujours plusieurs fonctions, qui ont chacune un
effet sur le rôle de l’inspecteur de quartier. D’abord, les quartiers ont une fonction spécifique.
Les inspecteurs de quartier doivent connaître leur quartier : les facteurs environnementaux et
82

la vie sociale qui s’y déroule. Ils doivent y établir des réseaux et collaborer avec des
partenaires externes. Mais des quartiers ont aussi une fonction globale. La détection de
criminalité et/ou des nuisances au niveau de quartier, ainsi que les interventions orientées
« quartier » font souvent partie d’événements qui transcendent le niveau micro-local. Cela
ressort clairement du matériau empirique. Des services internes et externes contactent les
inspecteurs de quartier pour obtenir de l’information concernant des événements qui se
passent aussi dans un territoire plus large. Dans la structure actuelle, le travail de quartier
reste en premier lieu restreint au fonctionnement d’un territoire dont les frontières sont
administrativement définies. La notion de « territorialité » n’est pas appliquée.
Quels effets pourraient avoir une vision davantage territoriale ? En premier lieu, cela
encouragerait la transversalité au sein d’un – et entre les – territoires(s). On travaille dans des
territoires plus restreints, délimités selon des caractéristiques contextuelles plus larges,
notamment sociales. Cela permet d’intégrer les interventions policières dans un contexte plus
étendu. Aujourd’hui, l’inspecteur de quartier opère dans les limites de son quartier. On n’en
tient pas compte de la zone à laquelle le quartier appartient, surtout en raison de la place
actuelle du travail de quartier au sein la police locale (cf. supra). En mettant les points de
contact entre les différentes fonctionnalités de base davantage au premier plan, la
connaissance ciblée sur les quartiers pourrait être produite dans un contexte plus large, viceversa.
Ceci demande dans une large mesure une autre façon de travailler (du travail local avec
une large vision), qui met l’accent sur l’efficacité territoriale de l’intervention.
Le point de départ du modèle est donc bien la transversalité. Elle est la clé de voûte des
réflexions futures que nous allons proposer. Pour ce qui suit, nous allons nous focaliser sur la
structure organisationnelle du travail de quartier, les missions de ce travail et le rôle de
l’inspecteur de quartier. Nous terminerons par une réflexion sur l’évolution future.
5.2 L’organisation du travail de quartier dans la police locale
Dans cette partie du modèle de quartier, nous nous focalisons sur la structure
organisationnelle du travail de quartier. Comme nous l’avons vu dans le volet empirique, il y
a beaucoup de problèmes dans la manière dont le travail de quartier prend forme. Il s’agit
essentiellement de la structure éprouvée comme hiérarchique, qui peut empêcher une
collaboration optimale entre les divers niveaux (donneurs d’ordre – middle management –
exécuteurs). La position du travail de quartier au sein de la police locale n’est pas sans
remarques non plus. Bref, cette partie focalise sur la dimension organisationnelle et sur la
façon de laquelle celle-ci peut contribuer à une approche transversale au niveau du travail de
quartier.
Chaque organisation est liée à une structure hiérarchique (Collier, Herzberg et al, 1988 : 65).
Mais la mesure dans laquelle cette hiérarchie s’exprime dépend de l’organisation. Une
composante importante du modèle proposé concerne la place du travail de quartier dans la
structure organisationnelle. Le fait que ce sont les zones de police qui déterminent elles-
83

mêmes cette place, et cette structure hiérarchique, conduit à ce que, dans la pratique, il y ait
parfois d’importantes divergences. En soi, c’est plutôt un constat positif. Chaque corps a ainsi
la possibilité de structurer son organisation selon les besoins de la zone en question. Nous
avons vu des structures avec une hiérarchie très rigide et d’autres dans lesquelles la hiérarchie
est limitée au minimum (sous forme de matrice).
L’organisation idéale n’existe évidemment pas. Dans la doctrine criminologique, les débats
concernant la décentralisation dans la police existent déjà depuis longtemps (Van Outrive,
1985 ; Fijnaut, 1985 ; Van Den Broeck & Eliaerts, 1994 ; Smeets & Strebelle ; 2000). La
réforme de la police entendait réduire la structure hiérarchique à un strict minimum afin
d’améliorer la coopération et de diminuer les spécialisations qui créaient de cloisonnement
entre services (et fonctionnalités). Certaines structures organisationnelles essaient de s’y
conformer et d’autres préfèrent se tenir à une structure plus classique. Mais aucune
organisation ne peut exister sans hiérarchie (Debandt & Walravens, 2005) et cela vaut aussi
pour les corps de police (locales). Ces organisations, en particulier, se caractérisent par
l’autorité légitime qu’elles peuvent exercer pour maintenir l’ordre et restaurer la paix
publique. Si cette autorité, et les moyens spécifiques d’y parvenir (dont l’usage de la
contrainte), ne sont pas accompagnés et encadrés par plusieurs niveaux de responsabilité, cela
pourrait avoir des conséquences sur les droits fondamentaux et les libertés des citoyens dans
notre démocratie. Par ailleurs, cette structure offre pas mal d’avantages pratiques. Elle évite le
chaos et stimule le contrôle. Par contre, il est nécessaire de réfléchir à la nature de la
hiérarchie, notamment en ce qui concerne les relations entre les différents niveaux, les
différents services et les différentes fonctionnalités de base. De ce point de vue, les résultats
empiriques nous montrent qu’il y a un vrai problème de manque de confiance. Nous avons
donné l’exemple des moyens technologiques que les inspecteurs de quartier ne peuvent pas
utiliser en raison de la méfiance des responsables policiers. Une telle constatation va à
l’encontre d’une réelle transversalité. Cette méfiance empêche la possibilité de réaliser des
modèles de coopération adéquats. La structure actuelle souligne aussi le décalage entre la
politique policière locale et les pratiques sur le terrain. Pour le travail de quartier, cela se
traduit par un manque de valorisation. Les inspecteurs de quartier se caractérisent par leur
grande marge de manœuvre (théorique). Ils ont l’occasion d’organiser leur propre travail et
ont une grande autonomie dans sa gestion. Cependant ils ne sont pas impliqués dans les
processus de décision. Les inspecteurs de quartier, de leur côté, sont également très méfiants à
l’égard de leurs supérieurs. Les missions et priorités ne sont pas toujours suivies et le manque
de valorisation implique une distance dans l’exécution des missions spécifiques au quartier.
Nous soulignons à nouveau, dans ce cadre, l’importance de la fonction du middle
management qui doit permettre de contourner ce type de difficultés grâce à sa position clef.
Celle-ci peut atténuer le fossé, ne fut-ce qu’en termes de connaissance réciproque, entre la
direction et le terrain.
En effet, la valorisation du travail de quartier n’est pas uniquement liée à une position plus
forte (ou plus centrale) dans l’organigramme. La connaissance mutuelle entre les différentes
fonctionnalités/services doit également être améliorée. Dans cette optique, nous devons de
84

nouveau référer à la confusion conceptuelle que nous avons mentionnée dans l’introduction
ainsi qu’au début de ce chapitre. En effet, les résultats empiriques montrent que le travail de
quartier est essentiellement vu comme ressortissant à un service spécifique et pas comme une
fonctionnalité à part entière. De ce fait la conviction règne que le travail de quartier est
« quelque chose de spécial », isolé des autres « métiers policiers ». Il est évident que ceci a
des implications pour la position du travail de quartier au sein de la police locale. Le fait que
le travail de quartier n’est pas vu comme une fonctionnalité s’appliquant à l’ensemble des
services du corps de police à un effet sur son image et sur sa valorisation. Le fait que le cadre
législatif stimule cette confusion dans la terminologie est un élément important. Le PLP 10
traite la fonctionnalité de quartier, mais se réfère principalement au travail de quartier. Ce qui
influence la façon dont le travail de quartier est organisé.
En outre, il faut mettre en place un dispositif d’évaluation plus adéquat. Les évaluations
quantitatives actuelles sont peu corrélées à la philosophie du travail de quartier, ce qui
accentue le manque de valorisation dont souffre celui-ci. Cette valorisation pourrait définir de
manière plus explicite le caractère polyvalent du travail de quartier, en tenant compte du
contexte dans lequel ce service est actif et la richesse de cette polyvalence. Dans cette
philosophie, un système d’évaluation plus adapté pourrait mettre en valeur les événements
liés au quartier, détectés par les inspecteurs de quartier et la manière dont ils ont été traités. Il
peut aussi mettre en évidence les partenariats conclus et la façon dont ils se concrétisent dans
le quartier, la commune et la zone.
5.3 La finalité du travail de quartier
Dans cette partie, nous focalisons sur la finalité du travail de quartier. En effet, cet élément est
d’importance primordiale pour l’élaboration de recommandations ainsi que pour la
valorisation du travail de quartier.
Comme nous l’avons déjà souligné dans le volet théorique et empirique de la recherche, on
peut se poser plusieurs questions concernant l’absence de réelle définition du travail de
quartier. Il s’agit surtout, à l’avenir, de définir une attitude claire concernant sa ou ses
finalités, c'est-à-dire sa ou ses mission(s) prioritaire(s). Là où les autres fonctionnalités de
base ont un cadre de référence plus ou moins apparent, le travail de quartier reste
difficilement discernable. Nous avons déjà eu l’occasion d’insister sur l’importance d’une
vision orientée sur les processus afin de mieux situer et intégrer le travail de quartier, dans la
police locale et la politique de sécurité locale. Mais ceci ne nous permet pas encore de nous
faire une idée concernant les missions effectives de ce service. La description actuelle du
travail de quartier est en premier lieu ciblée sur la collecte d’information au niveau du quartier
(Intelligence Led Policing au niveau du quartier). Puisque agir dans un petit territoire
délimitée offre la possibilité de rassembler un nombre significatif de données, les autres
services de la police perçoivent ces dimensions (quartiers et information) comme un atout
pour l’ensemble du travail policier. En effet, ils peuvent faire appel à l’expertise des
inspecteurs de quartier dans ce domaine, seule expertise qui, de fait, leur est réellement
85

econnue. Nous avons déjà indiqué l’importance capitale de l’information dans la fonction de
police. Sans information, on ne peut pas prendre en charge les problèmes. Mais il faut se
poser la question de savoir si cela doit être la seule finalité du travail de quartier. Dans les
circonstances actuelles, on recueille des informations jusque dans le moindre détail et on les
intègre dans des carnets ou des fichiers informatiques. Les recherches dans ce domaine
soulignent cependant abondamment que de toutes les informations qu’on recueille, seule une
petite fraction est utilisable et utile (Easton, Vynckier & De Kimpe, 2009). D’une certaine
manière, « trop d’information tue l’information ». Dès lors, cette mission n’est ni suffisante,
ni intéressante en soi, et il faut aussi intégrer d’autres missions afin de garantir un « service de
police excellent ».
5.3.1 Le travail de quartier orienté vers le développement de la qualité de vie au sein
d’un quartier
Le travail de quartier est un service dont les missions dépassent à plusieurs égards le
« simple » travail de police. A côté du travail de police (donner suite aux appels urgents en
cas de besoin, détecter la criminalité, assister d’autres fonctionnalités, etc.), le travail de
quartier prend aussi en charge des événements spécifiques au quartier. Et pour cette dernière
mission, on n’a actuellement aucun cadre de référence. Les résultats empiriques montrent
clairement que les missions du travail de quartier telles qu’elles sont décrites actuellement
(ainsi que le catalogue de tâches de l’inspecteur de quartier) ne tiennent pas ou peu compte de
ces événements spécifiques au quartier. La raison en est notamment que les contextes dans
lesquels s’inscrivent les nuisances, l’insécurité et les désordres sont d’ordre divers et que l’on
ne peut pas les catégoriser de façon univoque. Avec comme effet que l’investissement
consenti par l’inspecteur de quartier pour améliorer la qualité de vie n’est pas ou peu pris en
compte dans l’élaboration de la politique policière locale. Par conséquent, les missions du
travail de quartier restent limitées et tiennent peu compte de l’approche de ces problèmes. Dès
lors, et comme nous l’avons déjà dit, le travail de quartier ne bénéficie pas non plus d’un
dispositif d’évaluation qui lui est spécifique. Actuellement, l’évaluation continue à se baser
sur le nombre de PV qu’un inspecteur de quartier rédige ou le nombre de dossiers ou
apostilles qu’il traite. Ceci se peut traduire en retour par une certaine attitude chez l’inspecteur
de quartier qui a tout intérêt, dès lors, à ce que son travail consiste principalement en des
tâches administratives (de bureau), à la fois plus facile à réaliser et plus faciles à évaluer.
Ce travail orienté sur le quartier est décrit dans le monde anglo-saxon comme du
« neighbourhood policing » (Hughes & Rowe, 2007: 317). La notion de « policing » est
cependant un concept plus large que la notion de « police », car elle fait plus largement,
référence à un type spécifique de fonction sociale qui peut être définie comme « all explicit
efforts to create visible agents of (…) control, whether by government or by nongovernmental
institutions » (Bayley & Shearing , 1996 : 585). Dans cette définition, la fonction
policière peut donc être exercée par une pléthore d’acteurs, privés ou publics, dont les
activités sont principalement tournées vers une sécurité assurée au travers des modalités de
surveillance et de dissuasion, qui peuvent inclure des modalités d’action plus ou moins
86

contraignantes pour ceux qui en font l’objet. La police est caractérisée par le fait quelle a reçu
la légitimité d’un Etat pour maintenir l’ordre et restaurer la paix publique. Il y a ainsi des
sociétés qui n’ont pas de police, mais chaque société fait appel à une forme de policing
(Bowling & Foster, 2002 : 981). Dans « neighbourhood policing », il s’agit d’intégrer
l’ensemble des activités de policing existante au niveau d’un quartier (Hughes & Rowe,
2007), et pas seulement de s’intéresser à la seule fonction de la police. C’est peut-être ici que
se situe ce qui caractérise – et spécifie - plus particulièrement la finalité (ou la spécificité) du
travail de quartier : sa situation, au sein d’un quartier bien pensé en termes de territoire, entre
la police et le policing. Cette piste peut constituer le point de départ et le point d’articulation
du travail de quartier. Elle renvoie, d’un côté, à la place centrale du quartier et, de l’autre
côté, au rôle des missions (et tâches) prioritaires. C’est ce qui est notamment privilégié dans
le modèle néerlandais, qui se focalise principalement sur l’importance du territoire lui-même
(Straver, Ulrich & van Duijneveldt, 2010 ; van den Brink, 2010).
Mais quel doit donc être le contenu de ces activités ? On doit travailler dans le quartier et on
doit obtenir du responsable de quartier les possibilités de s’y investir réellement. La fonction
proactive (détecter les causes structurelles de l’insécurité ou du désordre social) et la fonction
préventive (prévenir les causes directes d’insécurité et limiter le plus possible les
conséquences de la délinquance ; Cools, 1997) jouent le rôle le plus important. Les
inspecteurs de quartier interviennent en premier lieu sur les sentiments d’insécurité et le
désordre social et pas sur la criminalité elle-même. La visibilité et la disponibilité telles que
décrites dans la philosophie COP (Van Ryckeghem & Hendrickx, 2001) ne sont pas un point
de départ, mais font partie intégrante de ces missions. Dans ce contexte, le travail de quartier
doit se focaliser principalement sur l’augmentation de la qualité de vie dans un quartier. La
qualité de la vie ou la « quality of life » (QOL) se caractérise selon Felce et Parry (1996 :64)
par :
• Le ciblage des conditions de vie et des situations individuelles, contrairement aux
modèles de police actuels qui ciblent essentiellement la communauté et, dans une
moindre mesure, l’individu.
• L’accent mis sur le sentiment subjectif de satisfaction. On cible la diminution des
sentiments d’insécurité et/ou de malaise liés aux désordres sociaux.
• Le ciblage sur les attentes des habitants de quartier en matière de diminution de
l’insécurité et du désordre.
Les sentiments ressentis d’insécurité et d’agitation/malaise sont très importants dans ce
modèle. Les éléments à prendre en compte sont, entre autres, (Shalok, 1996 : 127) le bien-être
émotionnel (sécurité diminution de l’insécurité), les relations entre les habitants du quartier
(relations interpersonnelles médiation en cas de difficultés), le bien-être matériel (l’état
physique du quartier intervention en cas de nuisances comme les dépôts clandestins), le
bien-être personnel et l’autodétermination (la possibilité de vivre dans un quartier comme
individu libre intervention seulement en cas de besoin). En résumé, l’inspecteur de quartier
87

ne doit pas intervenir si ce n’est pas nécessaire, c'est-à-dire s’il ne se manifeste pas de
problèmes. Nous y reviendrons plus tard.
L’augmentation de la qualité de vie dépend, bien entendu, des caractéristiques du territoire
dans laquelle elle s’inscrit, ce qui explique que le principe de territorialité soit d’une
importance capitale. Un quartier en relégation sociale, ou défavorisé, demandera une autre
manière d’intervenir qu’un quartier résidentiel ou commerçant. Dans ce cadre, et encore une
fois, une subdivision purement administrative des quartiers – basée surtout sur les densités de
populations – n’a pas beaucoup de sens dans l’exécution du travail de quartier. Par ailleurs,
l’inscription et la place d’un quartier dans une zone de police sont aussi importants. Un
quartier ne peut être isolé de la zone dans laquelle elle se trouve et une approche transversale
entre les différents quartiers est un pilier important du modèle proposé. En effet, le travail de
quartier a un statut de passerelle entre la police et la commune. Les inspecteurs de quartier ont
des contacts avec beaucoup de services (au sein de la police et à l’extérieur de la police). Ces
contacts dépassent le niveau du quartier et peuvent aboutir à des Collaborations, voire des
partenariats, beaucoup plus larges. En outre, la politique locale a aussi une influence
importante sur la façon dont on positionne la police dans la gestion de sécurité intégrale. Elle
influence la nature des partenariats conclus ainsi que du discours en matière de sécurité. Dans
des zones qui privilégient la « tolérance zéro » le fonctionnement de la police sera perçu
autrement que dans des zones qui orientent leur fonctionnement sur la résolution des
problèmes.
5.4 Le rôle de l’inspecteur du quartier
La dimension suivante se focalise sur le rôle de l’inspecteur de quartier. Nous stipulons
l’importance de sa position dans la donnée du « quality of life » dont nous avons parlé dans le
volet précédent du modèle de quartier.
Le rôle de l’inspecteur de quartier, dans le modèle présenté, est double. Développer une forme
qualitative de policing implique d’être capable d’appliquer une fonction polyvalente. Ceci
doit se traduire par un catalogue de tâches polyvalentes et par la capacité à travailler dans des
circonstances incertaines et diverses. Ce modèle implique également que ces inspecteurs
puissent intégrer leur expertise territoriale dans la police locale. En première instance, on peut
parler d’un rôle individuel qui vise à instaurer un certain degré de confiance avec les habitants
ainsi qu’avec les partenaires internes et externes avec lesquels les inspecteurs de quartier
doivent collaborer. Par ailleurs, les inspecteurs de quartier ont aussi un rôle collectif. Ils
doivent pouvoir répondre à des problèmes dans le quartier qui peuvent aussi être résolu à un
niveau plus élevé.
L’accessibilité et la disponibilité doivent être placées plus au premier plan. Dans la structure
de société globale actuelle, les inspecteurs de quartier doivent pouvoir faire appel à des
moyens technologiques d’informations et surtout de communication, comme le GSM et
l’Internet. Il faut développer les moyens de contacter les gens qui ne sont pas présents en
88

journée dans les quartiers et permettre à ceux-ci de contacter facilement les inspecteurs de
quartier. L’accessibilité de l’inspecteur de quartier ne peut pas être réduite à une présence
physique dans le quartier et, dès lors, cette fraction de la population qui est présente dans le
quartier durant les « heures de bureau ».
5.4.1 Le contact avec la population : quality of Life & éthique orientée « quartier »
Une stratégie de policing qui est orientée sur l’augmentation de la « quality of life » (modèle
QOL) dans un quartier doit reposer sur une réflexion quant aux dimensions éthiques qui y
sont liées. Les inspecteurs de quartier doivent finalement faire des choix concernant les
interactions. Dans cette optique, le contact avec la population a une importance capitale, car
elle est le point d’accroche de notre démocratie (Neyroud & Beckley, 2001 : 21). Le modèle
QOL n’est pas lié uniquement à la sécurité, perçus en termes de délinquance. Il renvoie
également à la tranquillité et la paix publiques et aux droits des habitants du quartier. Le
policing s’adapte donc en partie au quartier. Les inspecteurs de quartier doivent aussi
respecter cette partie de la population qui n’a pas besoin de faire leur connaissance ou qui ne
veut pas entrer en contact avec eux. Les résultats du Moniteur du Sécurité fédéral (cf. chapitre
2) montraient en effet que tous les citoyens ne désirent pas ou n’ont pas forcément besoin de
connaître leur inspecteur de quartier. Nous ne savons pas si ce résultat est lié à la nature du
quartier. C’est l’inspecteur de quartier qui doit estimer ce besoin ou cette absence de besoin,
et qui doit adapter son travail à ceux-ci. Les dimensions éthiques du « duty », « utility »,
« virtue » et « care », proposés par Gensler (1998), jouent un rôle primordial dans cette
stratégie de policing au niveau du quartier.
5.4.2 Le concept de « motivation »
La définition psychologique de la « motivation » est très difficile à cerner et comprend bon
nombre d’incertitudes (Collier, Herzberg, et al, 1988 : 41). Il s’agit d’un concept qui est
notamment difficile à mesurer. La « motivation » n’est pas statique ; elle change
continuellement et dépend de temps et d’espace. Bien que le cadre théorique soit clair, on
peut affirmer que son application ne l’est pas du tout. Dans la psychologie sociale, on fait une
distinction importante entre la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque (Aronson,
Wilson & Akert, 2007 : 370). La première se rapporte au désir de s’engager dans une activité
par intérêt pour celle-ci. On veut s’impliquer dans un métier parce qu’il suscite
intrinsèquement l’intérêt. La motivation extrinsèque renvoie au désir de s’impliquer pour une
activité en raison d’intérêts externes comme une compensation financière, par exemple. Il est
important à noter que les deux formes ne doivent pas absolument être vues comme séparées
l’une de l’autre.
Les motivations sont, dans la plupart des cas, basées sur de multiples raisons. Sur base des
résultats empiriques, nous constatons que plusieurs inspecteurs de quartier ont opté pour le
travail de quartier tant en raison du contenu des missions ou du type de tâches (motivation
intrinsèque) que pour de raisons extérieures à celui-ci (motivation extrinsèque). On ressent le
89

esoin « d’être plus près de la population », de « moins jouer le policier-pompier » et de
« pouvoir travailler de manière autonome ». Mais il y a aussi des raisons extérieures, comme
des raisons familiales (travailler moins le soir et pendant le week-end). Il est évident que pour
l’organisation du travail de quartier la motivation intrinsèque est plus intéressante que
la motivation externe. Si des gens s’engagent par réel intérêt, cela aura plus facilement un
effet sur la qualité de leurs missions et leurs attitudes (Collier, Herzberg, et al, 1988 : 58). Les
effets à long terme sont, en outre, davantage liés à la motivation intrinsèque, bien que ce ne
soit pas toujours le cas. Après un certain délai, des gens peuvent ressentir le besoin de « faire
quelque chose de différent » ou simplement montrer un intérêt moindre pour leurs missions.
Les motivations externes sont souvent vues comme négatives, parce qu’elles sont perçues
comme de moindre intérêt pour l’organisation et plus « égoïstes ». Elles sont cependant
importantes à comprendre pour pouvoir assurer une organisation efficace, notamment pour
lever les obstacles à un recrutement, et ne sont pas moins légitimes que les motivations
intrinsèques.
A travers du texte, nous avons déjà présenté quelques éléments de nature à développer la
motivation. Concernant la motivation intrinsèque, le plus important est, en premier lieu, de
revaloriser le travail de quartier. Notamment en favorisant le développement du travail de
quartier/fonctionnalité de quartier comme point de référence de la fonction de police locale,
en y intégrant également un système spécifique d’évaluation, en prenant distance avec cette
image du service de quartier comme le « service poubelle » des autres fonctionnalités ou des
autres services ; bref en définissant le travail de quartier comme central. Il est aussi nécessaire
d’améliorer les canaux de communication entre les différents services et les différentes
fonctionnalités, dans les deux sens. Le manque de feed-back vers les inspecteurs de quartier
est une difficulté importante qui empêche une collaboration optimale entre les différentes
fonctionnalités. Car cela accentue à nouveau à l’image dévalorisée que les inspecteurs de
quartier ont souvent d’eux-mêmes et de leur travail. La confiance doit également être
renforcée. Des triggers concernant la motivation externe renvoient, sans surprise, surtout aux
primes (incitants financiers). Actuellement, le système de primes est (et souvent inutilement)
complexe et est perçu, par les inspecteurs de quartier, comme profondément injuste.
5.5 Les prospectives orientées vers le modèle de quartier
Le modèle de quartier présupposé met en première instance l’accent sur l’approche
transversale. Toutes les dimensions et les aspects dont nous avons parlé ne peuvent pas être
vu séparément. En effet, la façon dont le travail de quartier est organisé a des implications sur
la façon dont la fonctionnalité de quartier prend forme. Aussi longtemps que celle-ci sera
uniquement définie comme ressortissant à un service particulier et/ou des policiers
particuliers (les inspecteurs de quartier) cela aura des conséquences sur sa valorisation et sa
revalorisation. Dans cette optique la fonction du middle management à une plus-value
importante. En effet, elle est le point central autour duquel les différentes sections prennent
forme. Dans cette optique, la fonctionnalité de quartier couvre à la fois le travail de quartier
(i.e. les missions et les tâches du service de quartier et /ou des inspecteurs de quartier) et les
90

missions et les tâches des autres services et/ou policiers lorsque celles-ci s’inscrivent dans une
approche orientée quartier. De ce fait, le middle management (le responsable de la
fonctionnalité de quartier) est plus que le responsable du service de quartier : sa mission
dépasse la gestion de celui-ci et le conduit à coordonner tous les services ou policiers
lorsqu’ils sont conduits à intervenir dans le cadre d’une approche orientée quartier. Il a une
vision globale de cette approche et des mesures nécessaires pour que celle-ci soit pertinente et
efficace. Dans le cas où l’on continue à définir le travail de quartier uniquement comme un
service, cela aura des implications sur la façon dont les opérations prennent forme. La
fonctionnalité de quartier est en premier instance une fonctionnalité pour laquelle une façon
de travailler selon des processus (plutôt que des tâches) est primordiale,, ce qui implique que
le contexte et la réalité sociale du quartier ont une influence importante sur la réalisation de
cette fonctionnalité. Elle doit se baser sur la définition d’un territoire relativement limité. En
d’autres mots, la territorialité est une variable importante dans une stratégie de policing bien
fondée (neighbourhood policing). Le rôle spécifique du travail de quartier (i.e. du service de
quartier et/ou des inspecteurs de quartier) doit aussi être bien défini : il est en effet central
dans le développement de la fonctionnalité et doit être particulièrement valorisé comme axe
autour duquel cette fonctionnalité s’articule. En effet, les inspecteurs de quartier ont une
vision experte de leur quartier. A ce titre cette expertise doit servir de point de départ au
développement de la fonctionnalité et dès lors du travail de la coordination du responsable de
la fonctionnalité de quartier. Par conséquent, leur contribution dans cette manière globale de
réfléchir (raisonner globalement et agir localement) est importante.
91

6. Conclusions : les recommandations au travers d’un modèle de
quartier
Avant de commencer, il est important de mentionner que lors des focus groupes l’équipe de
recherche a proposé aux participants une liste comprenant des possibles améliorations
concernant le travail de quartier 29 . Les répondants devaient indiquer sur cette liste leurs cinq
préférences. En annexe, on peut trouver un aperçu des résultats obtenus. Les éléments les plus
importants renvoient à un encadrement plus clair du travail de quartier, un lien et des
collaborations plus étroits avec les autres services du corps (prenant en charge les autres
fonctionnalités de base) et une amélioration des conditions de travail, notamment en matière
de primes. L’équipe a intégré ce feedback dans les recommandations proposées.
Cette dernière partie de la recherche met l’accent sur futures perspectives, d’une part, de la
fonctionnalité de quartier et, d’autre part, du travail de quartier. Celles-ci seront discutées sur
base de recommandations. Cette partie est étroitement reliée au chapitre précédent. Le modèle
proposé se base sur les réflexions générales contenues dans ce rapport qui serviront de
canevas à des recommandations plus spécifiques abordées dans cette partie. Il est en d’autres
mots d’une importance primordiale d’incorporer le chapitre précédent dans cette conclusion
finale. En effet, toutes les perspectives proposées sont liées entre elles.
6.1 Une adaptation de la circulaire PLP 10 et l’introduction opérationnelle du
concept de “fonctionnalité de quartier”
Comme indiqué dans l’introduction du rapport ainsi que dans le chapitre précédent, nous
avons pu constater durant la recherche menée, une forte confusion ou assimilation dans les
corps observés entre, d’une part, le « travail de quartier » et, d’autre part, la notion de
« fonctionnalité de quartier ». Ces termes sont utilisés indifféremment comme s’ils étaient
synonymes. Au-delà de ce constat, cette manière d’envisager les choses a des implications
concrètes à plusieurs niveaux. Tout d’abord, le travail de quartier – assimilé donc à la
fonctionnalité de quartier - est considéré comme une « entité séparée », dissociée de la
fonction de police de base En d’autres termes, tant au niveau organisationnel qu’au niveau
professionnel, la fonctionnalité de quartier est considérée, dans les corps observés, comme le
travail – l’ensemble des missions et des tâches – effectué par le service de quartier et/ou les
inspecteurs de quartier. Cette confusion dans la terminologie entraîne beaucoup de problèmes
au niveau organisationnel. Lorsqu’on considère la fonctionnalité de quartier comme
ressortissant d’un service à part, et pas comme une fonctionnalité qui concerne l’ensemble du
corps de police, ceci a des implications sur l’intégration de cette fonctionnalité et de ce
service au sein de la police locale.
29 Ces améliorations ne concernaient que le travail du service de quartier, dans la mesure où, pour rappel, les
observations et les entretiens ont mis en évidence que la fonctionnalité de quartier est entièrement assimilée,
dans les corps observés, au service de quartier Et/ou au travail des inspecteurs de quartier.
92

Ensuite, dans les zones de police observées, et dès lors, cette « fonctionnalité de quartier » est
principalement envisagées au travers de l’accomplissement des tâches principales de ce
service ou de ces policiers en particulier. On ne réfléchit pas en termes de processus, ce qui
accentue encore la difficulté de promouvoir, même au départ du travail de quartier, une
approche qui permettrait de faire participer à ce travail de quartier d’autres services ou
d’autres fonctionnalités.
Nous avons donc ici une double réduction : réduction de la fonctionnalité de quartier au
travail de quartier et réduction du travail de quartier aux tâches du service de quartier et/ou
des inspecteurs de quartier. Cette double réduction entraîne nombre de difficultés en termes
d’approches transversales des problèmes de quartier et de collaboration entre les
fonctionnalités de base. Dès lors, pour pouvoir développer une véritable « fonctionnalité de
quartier » il faut absolument envisager celle-ci comme une « approche policière particulière »
qui doit être prise en charge par l’ensemble des services et des policiers d’un corps de police
locale et, d’une part, ne plus la « situer géographiquement » et organisationnellement dans un
service spécifique et, d’autre part, privilégier une approche orientée sur les quartiers qui
s’envisage prioritairement au départ d’un processus plutôt qu’au départ de tâches.
Pour cela un cela, un certain nombre de changements doit être entrepris.
Le cadre juridique actuel, à savoir principalement la « Circulaire ministérielle PLP 10 du 9
octobre 2001 concernant les normes d’organisation et de fonctionnement de la police locale
visant à assurer un service minimum équivalent à la population » accentue cette confusion
conceptuelle. L’assimilation de « la fonction de travail de quartier » et du « travail de
quartier » (termes utilisés dans la circulaire) à cette « fonctionnalité de quartier » appuie l’idée
que cette dernière est d’abord à mettre en œuvre au sein d’un service particulier. Les normes
d’organisation insérées dans cette circulaire, à savoir un inspecteur de quartier pour 4.000
habitants, laissent également entendre que c’est bien à ce policier en particulier, et non à
l’ensemble du corps, que revient la tâche d’assumer cette fonctionnalité.
Il faut donc commencer par modifier la circulaire de manière à bien distinguer ce qui
constitue la fonctionnalité de quartier – i.e. une approche policière orientée sur les quartier qui
doit être prise en charge par l’ensemble de la fonction de police locale et donc potentiellement
par l’ensemble des services et policiers du corps de police locale – et ce qui constitue le
travail de quartier – i.e. les missions et les tâches spécialisées du service de quartier et/ou des
inspecteurs de quartier.
Par ailleurs, les missions citées dans cette circulaire PLP 10 doivent également être clarifiées,
tant pour la fonctionnalité de quartier (qui nécessite d’être définie) que pour le travail de
quartier. Il semble y avoir une autre confusion entre des moyens (visibilité, accessibilité,
rapprochement avec la population) et les objectifs et finalités qui semblent absents. En
d’autres termes, une réflexion doit être menée sur la finalité de la fonctionnalité. A quoi cela
sert et pourquoi la mettre en oeuvre ?
93

Dans ce cadre, un premier élément de réflexion apparaît en filigrane des résultats de cette
recherche et peut constituer une finalité à cette fonctionnalité de quartier : la philosophie du
« quality of life » qui vise à réduire les sentiments d’insécurité et d’agitation/malaise de la
population (voir supra). Dans ce cadre, la détection, la prévention et la diminution des faits de
délinquance, de désordres publics et de conflits sont un moyen – en non un objectif en soi –
permettant cette réduction. Cette philosophie implique de mettre en œuvre toute une série de
méthodes d’intervention et d’approches qui privilégient surtout la régulation et des outils
variés qui permettent de faire émerger une connaissance sur ces sentiments d’insécurité et de
malaise de la population, soit au départ des demandes et attentes des habitants ou des usagers
d’un territoire, soit au départ de la recherche d’informations d’initiative des policiers.
S’agissant de la fonctionnalité de quartier, cette philosophie (ses finalités, méthodes
privilégiées et outils de connaissance) doit être orientée sur le quartier. L’approche
territoriale devient prédominante dans ce modèle.
Dans ce cadre, on comprend mieux que ce soit l’ensemble de la police locale qui soit en
charge de cette approche de la « fonctionnalité de quartier » même si, dans ce cadre, le travail
de quartier – c'est-à-dire les missions et les tâches des services de quartier et/ou des
inspecteurs de quartier – joue un rôle prépondérant puisque c’est au départ de ces services ou
de ces policiers particuliers que l’expertise (la connaissance) peut se développer. Comme
nous l’avons déjà souligné, les inspecteurs de quartier ont, en effet, une vision experte de leur
quartier. A ce titre cette expertise doit être le noyau dur du développement de la fonctionnalité
de quartier.
94

Schématiquement, actuellement nous avons ceci :
Il est préconisé plutôt ceci :
Cette approche implique quatre éléments :
POLICE LOCALE
FONCTIONNALITE DE QUARTIER
Travail de quartier
= missions et tâches du service de Q et/ou
inspecteurs de quartier
POLICE LOCALE
Travail de quartier
= missions et tâches du service de Q
et/ou inspecteurs de quartier
FONCTIONNALITE DE QUARTIER
1) Tout d’abord, que dans le cadre de la fonctionnalité de quartier, le service de quartier et/ou
les inspecteurs de quartier (ceux qui assurent le travail de quartier) deviennent alors les
95

spécialistes de la fonctionnalité de quartier, mais pas les seuls exécutants de celle-ci. La
spécificité du travail de quartier devient alors, d’une part, l’expertise en matière de
connaissance des problèmes d’un quartier et des éventuelles demandes et attentes des
habitants et usagers de ce quartier et, d’autre part, la capacité particulière de ce service ou de
ces policiers à appliquer d’autres méthodes d’intervention que les méthodes classiques
d’intervention policières (i.e. : répression, surveillance et contrôle). Le travail de quartier doit,
puisqu’il s’agit d’une philosophie de « quality of life », privilégier les méthodes de régulation
(détection de problème, prévention, médiation, résolution des conflits). Ce nouveau
positionnement central du travail de quartier est un premier pas dans sa revalorisation. Mais, il
entraîne d’autres changements, notamment le fait que les membres du service de quartier
et/ou les inspecteurs de quartier ne peuvent en aucun cas constituer une réserve d’effectifs
pour les autres services (ou fonctionnalités), que leur intervention dans d’autres
fonctionnalités (par exemple, la recherche) doit servir uniquement à la gestion de leur quartier
et ne doit pas rentrer en concurrence avec leur rôle central dans le cadre de la fonctionnalité
de quartier, qu’il faut au maximum décharger ces policiers des tâches de bureau
(administratives et judiciaires) sans lien avec la gestion de la « qualité de vie » de leur
quartier. Cela implique aussi tout une série de modifications en termes de profil de sélection,
de formation et d’évaluation sur lesquelles nous reviendrons.
2) Qu’au départ de cette expertise et connaissances issues du travail de quartier, l’on puisse
mobiliser les autres services de la police locale (voire des services externes à la police :
services communaux, réseaux sociaux ou associatifs, contrats de sécurité, autres acteurs du
policing, etc.) pour gérer les problèmes détectés ou potentiels dans un quartier. Dans ce cadre,
les autres services de la police ou externe agissent suivant leur propre référentiel et logiques
d’actions, méthodes, outils et finalité (par exemple, le service recherche locale travaille selon
un référentiel répressif) mais pour résoudre un problème lié à un quartier spécifique.
3) Que l’on redéfinisse les quartiers au regard de ses caractéristiques socio-économiques,
démographiques, culturelles, en termes de problèmes spécifiques, de fonctions (résidentiel,
économique, commerçant), etc. et non plus sur la seule base de critères administratifs (nombre
d’habitants, nombres de pièces traitées, frontières communales, etc.). Cela nécessite
également que soient changées les normes organisationnelles actuelles de la circulaire PLP 10
et de son AR. En effet, si la définition des frontières d’un quartier sur base du nombre
d’habitants a ses mérites dans les grandes villes, car la densité de la population y est plus
importante, ce critère n’a pas de valeur ajoutée dans la majorité des zones de police et peut
avoir des effets contre-productifs.
4) La désignation d’un responsable chargé de coordonner la fonctionnalité de quartier et ses
rapports avec les autres services et autres fonctionnalités. C’est ce que nous abordons dans le
point suivant.
96

6.2 Renforcer le “middle management”, notamment les responsables du travail
de quartier et les responsables de la fonctionnalité de quartier
Le rôle du responsable de la fonctionnalité de quartier (qui n’est pas forcément, ni
nécessairement, le responsable du travail de quartier) est d’une importance capitale pour la
mise en place du modèle préconisé.
Le rôle de ce responsable de la fonctionnalité de quartier est principalement un rôle de
contacts et de coordination avec les autres services, internes et externes. C’est ce responsable
qui fait parvenir à ces services les demandes d’intervention ou d’appui dans un quartier, pour
des problèmes récurrents ou graves, à l’initiative du responsable du travail de quartier (voir
ci-dessous). Il doit donc être en mesure de « saisir » les services internes afin de les impliquer
dans la fonctionnalité de quartier. Cela nécessite évidemment non seulement de bonnes
relations avec les responsables de ces différents services, mais également – et cela est
fondamental – l’appui inconditionnel de la direction du corps de police locale. Il doit
également avoir de bonnes connaissances et de bonnes relations avec les services externes :
commune, réseaux associatifs et sociaux, etc. Il convient donc de désigner la personne la plus
compétente pour cette fonction, et celle qui est absolument convaincue de – et est capable de
convaincre sur - l’importance de cette fonctionnalité de quartier comme point de départ de
l’ensemble de la fonction de police locale.
Enfin, ce responsable est aussi celui qui est en charge de réfléchir la gestion des quartiers en
termes de processus. Il a donc un rôle central dans le décloisonnement entre les services
internes de la police locale et, en partenariat avec les autres responsables des fonctionnalités,
dans le décloisonnement entre les fonctionnalités de base. Cela suppose évidemment des
réseaux de communication plus efficaces tant verticalement (en amont et en aval)
qu’horizontalement (avec les autres responsables du « middle management » c'est-à-dire des
services et/ou des fonctionnalités). Dans ce cadre, l’organisation de briefings et de réunions a
une grande importance afin de partager les expertises réciproques.
En d’autres mots, le responsable de la fonctionnalité de quartier est le « chef d’orchestre ».
Le rôle du responsable du travail de quartier est également central. Il peut s’agir d’une autre
personne que le responsable de la fonctionnalité de quartier ; ce qui est peut-être nécessaire
pour éviter à nouveau la confusion entre les deux. Son rôle s’apparente à celui de tous les
responsables de services : rôle de gestion et d’intermédiaire entre les différents niveaux
hiérarchiques. Pour ce dernier point, le responsable du travail de quartier se situe, comme déjà
souligné, à l’intersection des dirigeants du corps de police et des exécutants. C’est notamment
par lui que transitent les demandes d’appui ou d’intervention d’autres services internes ou
externes faits par les membres du service de quartier ou par les inspecteurs de quartier et qui
décide, après discussions, de les transférer au responsable de la fonctionnalité de quartier 30 .
30 Ce qui n’empèche pas des policiers du service de quartier ou des inspecteurs de quartier de faire de leur côté des demandes
punctuele à des services externes ou internes, notamment des demandes d’inforamtion.
97

Il doit également avoir un rôle central dans la détermination des missions (c'est-à-dire des
finalités du travail de quartier) et des tâches effectives des membres du service de quartier
et/ou des inspecteurs de quartier. Il doit veiller à ce que ceux-ci n’exercent que des tâches et
n’utilisent que des méthodes en adéquation avec la philosophie du quality of life orientée sur
leur quartier respectif.
De manière plus aigue que pour les autres services, l’importante décentralisation du travail de
quartier implique un rôle de coordination plus important entre les membres de son service ou
de son équipe. C’est au responsable du travail de quartier à « faire le lien » (et l’état des lieux)
entre les problèmes présents dans les différents quartiers, à organiser des réunions avec
l’ensemble des policiers impliqués dans le travail de quartier. Les inspecteurs de quartier sont,
en effet, le point de référence au niveau du quartier. Ils ont une vue sur les événements liés au
quartier. La connaissance dont disposent les inspecteurs de quartier est d’une importance
capitale pour la détermination de stratégies et missions ciblées dans le cadre de l’application
de la fonctionnalité de quartier.
Enfin, il doit bien évidemment (s’il ne cumule pas cette fonction avec celle de responsable de
la fonctionnalité de quartier) faire régulièrement parvenir au responsable de la fonctionnalité
de quartier, avec qui il travaille en synergie, d’une part, l’expertise et les connaissances issues
du travail de quartier, d’autre part, les demandes d’appui aux autres services du corps de
police ou aux services externes à la police. Il a plus que les autres une vue d’ensemble des
problématiques récurrentes présentes sur la zone de police.
Pour terminer, le responsable du travail de quartier est responsable du profil d e compétence
des membres du service de quartier et/ou des inspecteurs de quartier. Celui-ci doit être réaliste
et orienté spécifiquement sur les compétences indispensables au travail de quartier. Cela
nécessite évidemment que les objectifs du travail de quartier – ses missions - soient réalistes.
6.3 L’intégration de la philosophie “quality of life” dans la formation de police
Il va sans dire que la formation joue un rôle important dans la façon dont la police locale
accomplit ses missions. Cette recommandation est évidemment d’une importance primordiale.
Surtout parce que la formation de base actuelle ne tient pas – ou très peu compte - des aspects
propres à la fonctionnalité de quartier.
Plus concrètement et au regard des résultats de notre recherche, il semble important si l’on
veut développer la fonctionnalité de quartier que la formation de base (pour le cadre de base,
mais également le cadre moyen) porte plus d’attention à celle-ci. C’est sans doute le seul
moyen de faire comprendre aux nouvelles recrues, et aux futur cadre moyen dirigeant, que
cette fonctionnalité ne ressortit pas exclusivement au travail de quartier mais constitue une
base de l’ensemble de la fonction de police locale. Par ailleurs, cela permettrait de
contrebalancer une tendance actuelle des formations de base, surtout à l’égard des aspirants
98

inspecteurs, qui sont encore essentiellement orientées vers l’intervention et la recherche. On y
enseigne, tant dans les cours théoriques que dans les cours pratiques, surtout comment gérer
des faits de criminalité ou de désordres publics graves sur base d’une philosophie privilégiant
le policier « crime fighter » qui applique un « policing by coercion », peu en phase avec les
principes du « community oriented policing » et du « policing by consent » (Bowling &
Foster, 2002).
La formation fonctionnelle « inspecteurs de quartier » actuelle continuerait, dans ce cadre, à
s’adresser prioritairement aux membres du service de quartier et aux inspecteurs de quartier
dans la mesure où le travail de quartier sous l’angle de la philosophie quality of life demande
d’autres qualifications ou compétences que les autres « métiers policiers ». Cette formation
devrait cependant être plus longue car, à l’heure actuelle, elle ne permet pas, aux dires des
inspecteurs interrogés, de véritablement spécialiser ceux-ci. Cette formation devrait, en tout
état de cause, se focaliser sur la détection des problèmes, les méthodes d’interventions
policières alternatives et la constitution de réseaux internes et externes.
6.4 Un système dévaluation adapté sur mesure au modèle
L’introduction d’un système d’évaluation adapté est une recommandation qui est à plusieurs
égards d’importance primordiale.
En ce qui concerne le travail de quartier, le système actuel est essentiellement quantitatif,
basé sur les nombres de pièces prises en charge, de dossiers clôturés, d’apostilles traitées et
des PV rédigés. Il est donc important d’introduire un système qui tienne compte de la
philosophie du « quality of life ». Au regard de la spécificité du travail de quartier, tel que
préconisé par le modèle proposé, il faut mettre en œuvre une évaluation basée à la fois sur
l’expertise et la connaissance du quartier (quantitative et qualitative) et sur les interventions
sur le quartier au départ de méthodes de régulation (quantitative et qualitative).
Au-delà des instruments utilisés jusqu’ici (quantitatif), il conviendrait donc de pouvoir tenir
compte de toutes les interventions de ces policiers, en ce compris les interventions qui ne font
pas l’objet d’un enregistrement dans le système (PV, dossiers, pièces, etc) et qui ne sont pour
l’instant pas comptabilisées, c'est-à-dire, par exemple, la résolution des conflits de voisinages
ou la constitution de réseaux de connaissances. Dans ce cadre, il est préconisé que chaque
policier du service de quartier ou chaque inspecteur de quartier tienne un carnet dans lequel il
indique brièvement chaque jour les problèmes détectés, les interventions (de toute nature), et
les méthodes utilisées. Cela permettra non seulement au responsable du travail de quartier de
vérifier le travail réellement effectué, le temps de présence sur le quartier et les méthodes
privilégiées par ce policier, mais cela servira également au policier de quartier d’outil de
travail pour évaluer la récurrence d’un problème (lorsque celui-ci se présente régulièrement)
dans un quartier et l’impact éventuel que son intervention ou sa méthode d’intervention a, à
moyen, voire à long terme, sur ces problèmes. Il pourra éventuellement, lorsqu’une
intervention ponctuelle est demandée à l’un ou l’autre service interne ou externe à la police,
99

l’indiquer dans son carnet. Dans ce carnet, chaque inspecteur de quartier peut donc indiquer
quels événements il a rencontré, quelle approche il a utilisée et avec quels services il a pris
contact Ce carnet permet donc à la fois l’évaluation individuelle du travail du policier de
quartier, mais également l’évaluation de ce qui se passe dans le quartier, et de l’impact des
interventions sur la qualité de la vie dans le quartier.
En ce qui concerne la fonctionnalité de quartier, ici également il est préconisé d’utiliser non
plus « un carnet de l’inspecteur de quartier » mais un journal du quartier. Celui-ci
comprendrait toutes les informations importantes concernant des problèmes récurrents ou
graves liés à un quartier spécifique et les interventions, approches et méthodes utilisées pour
les régler, que ces interventions proviennent du travail de quartier ou d’autres services
internes ou externes. Le principal objectif de ce journal est d’offrir une vision d’ensemble
d’un quartier et de sa gestion policière et permet, dès lors, de rendre les processus
d’amélioration de la qualité de vie visibles. Le journal de quartier est donc à la fois un
instrument qui peut être utilisé pour l’évaluation, pour l’organisation et la gestion des
collaborations entre services et fonctionnalités et pour le développement d’une approche
quality of life orientée sur les quartiers.
6.5 Une adaptation de quelques modalités techniques qui agissent sur la
motivation extrinsèque (primes – horaires – moyens techniques)
La motivation est, comme mentionné, également un élément central du modèle, en particulier
s’agissant du travail de quartier. Comme nous l’avons déjà souligné, la motivation est
composée de deux aspects (intrinsèque et extrinsèque). La motivation intrinsèque est par
nature liée à la valorisation du travail de quartier. Le modèle proposé a déjà un impact – ou
devrait avoir un impact – important sur cette valorisation : place centrale du travail de
quartier, expertises reconnues, rôle moteur dans les demandes d’appui et d’intervention des
autres services, formation spécifique, reconnaissance de l’autonomie, évaluation plus
qualitative, etc.
La motivation extrinsèque est cependant davantage orientée vers des aspects qui sont plutôt
de nature instrumentale, mais qui sont tout aussi importants pour garantir un travail de
quartier optimal. L’un des principaux obstacles à la candidature à la fonction de membre du
service de quartier ou d’inspecteurs de quartier est financier. Il semble que peu de policiers
acceptent de voir diminuer leur niveau de vie en raison de la perte des valorisations salariales
liées au travail à pause. Cependant, contrairement à ce que l’on pense, le système des primes
(qui permettrait de compenser ces pertes salariales liées aux horaires) n’est pas forcément une
solution miracle. Une recherche récente (dans Enhus, 2010) montre en effet que les primes
font diminuer la motivation des membres du personnel. A contrario, le fait de devoir
accomplir des tâches structurées et claires, qui donne une image claire de où l’on va, a pour
effet d’augmenter la motivation intrinsèque. C’est donc principalement sur cet aspect –
clarification des missions et des tâches et évaluation adaptée – qu’il faut travailler pour
augmenter cette motivation. Un autre constat de la recherche dans ce domaine est qu’un des
100

principaux éléments qui a motivé les inspecteurs de quartier rencontrés à opter pour ce métier
est les horaires de celui-ci qui permettent de combiner vie professionnelle, vie sociale et vie
de famille. Ces horaires cependant sont parfois un obstacle à la possibilité de rencontrer des
habitants et des usagers du quartier lorsque ceux-ci ne sont pas présents dans les heures de
« bureaux » des inspecteurs de quartier.
Il faut donc tenir compte de tous ces éléments. Sans trancher complètement la question, il
semble que la piste la plus prometteuse soit la possibilité d’étendre les horaires du travail de
quartier et de les adapter à la spécificité du quartier. Certains quartiers ne vivent qu’en journée
(quartier de bureau) alors que d’autres ont une vie « sociale » différente en semaine et le WE.
La prestation horaire plus flexible, par exemple en soirée et le WE, doit être possible pour
mieux gérer le quartier et pour rencontrer des personnes absentes durant les actuelles « heures
de bureau ». Cette gestion plus flexible doit être proposés par les policiers de quartier – plus à
même de connaître leur quartier - et bien sûr justifiée pour des raisons d’amélioration de la
gestion du quartier, à charge du responsable du travail de quartier de trancher . Il faut
cependant rester réaliste : le travail de quartier reste principalement un travail de jour et il ne
faudrait pas que ce système soit détourné pour simplement améliorer le « quotidien salarial »
des policiers de quartier. D’autres moyens peuvent également être mis en œuvre pour
atteindre ou communiquer avec des personnes absentes du quartier, tels un plus grand accès
au NTIC ou la mise à disposition de GSM professionnels. Quoi qu’il en soit ce système
nécessite une excellente relation de confiance entre les policiers de quartier et leur
responsable direct.
6.6 L’importance de la confiance dans les possibilités de réussite d’un modèle
de quartier optimal
En guise de conclusion, il est important de mentionner que le modèle proposé ne peut
fonctionner de manière optimale que lorsque tous les niveaux du corps de police ont
suffisamment confiance en leur expertise réciproque. Les inspecteurs de quartier ont
beaucoup de liberté dans leur façon de travailler. Cette autonomie doit être non seulement
entretenue mais encouragée. Ils forment le point de référence du quartier et sont les plus à
même de développer une approche q’inscrivant dans la philosophie quality of life. Ceci
implique qu’ils doivent établir les réseaux nécessaires avec la commune, les citoyens, les
travailleurs sociaux… et qu’ils doivent être les spécialistes de leur quartier et des phénomènes
locaux. En d’autres mots, leur expertise est d’importance primordiale pour la définition d’une
politique orientée sur le quartier. Comme indiqué dans le chapitre précédent il y a un grand
manque de confiance entre les différents niveaux. Et pourtant toutes les positions peuvent se
renforcer mutuellement dans l’exécution de leurs tâches. Par ailleurs, et quel que soi le
modèle préconisé,il est important que tous les niveaux – et certainement le niveau dirigeant -
aient foi dans ce modèle.
101

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109

Annexes
110

Annexe 1 : questionnaire tâches inspecteurs de quartier (focus groupes
inspecteurs de quartier)
Tâches administratives (enquête
domiciliaire, decmoralité, attestations
diverses, relatives aux étrangers …)
Tâches judiciaires (apostilles, recueil
plainte, PV, recherche informations et
renseignements judiciaires…)
Contrôles administratifs (des libérés
conditionnels, des bulletins centraux de
signalement, domicile…)
Surveillances générale espace public
(îlotage)
Surveillances spécifiques (des
commerces ambulants, des habitations
durant les vacances, d’écoles, de
trafic…)
Numération d’immeubles
Rapport voiries
Gestion des conflits de voisinage
(médiation)
Gestion de la circulation et du
stationnement dans le quartier
Assistance aux particuliers (relais social,
services divers)
Présence aux réunions des associations
commerçantes ou de quartier
Participation accueil au commissariat
Participer aux campagnes de prévention
Réserve pour autres services de police
Accompagnement d’huissiers
Remise des exploits d’huissiers
Maintien de l’ordre lors d’événements
spéciaux
Récolte d’informations
Détecter les causes de sentiments
d’insécurité dans la population
Ecoute des demandes des habitants du
quartier
Transmission des demandes et attentes
locales à l’autorité ou aux autres services
Dispenser de l’information (sur des fêtes
de quartier, des changements dans la loi
Questionnaire tâches inspecteur de quartier
Quelques
heures par
jour
Quelques
heures par
semaine
Quelques
heures par
mois
Jamais
111

communale, de l’information
policière…).
Suivi des appels non urgents
Suivi des appels urgents
Participation aux campagnes (par
exemple : BOB, MEGA, …)
112

Annexe 2: les casus (focus groupes inspecteurs de quartier)
1. Vous êtes inspecteur/agent de quartier dans une zone avec une grande diversité
sociodémographique, avec de jeunes familles, des personnes âgées, des allochtones et
des autochtones. Dans ce quartier il y a une maison de quartier dans laquelle vous êtes
présent une fois par semaine. Une dame âgée vient vous voir. Elle vous explique qu’il
y a une place centrale dans la zone d’habitat où de jeunes « d’origine étrangère »
traînent en faisant beaucoup de bruit jusqu'à tard dans la soirée. La femme dit que les
habitants des maisons avoisinantes et elle-même en souffrent. Elle a demandé aux
jeunes de faire moins de bruit le soir, mais sans succès. Elle explique que les jeunes
ont réagi très agressivement. Selon elle, ces jeunes ne reçoivent plus d’éducation. Elle
demande votre aide. Comment allez-vous réagir ?
2. Depuis peu de temps il y a des travaux de transformation dans une zone résidentielle.
La commune a l’intention d’installer un nouveau bloc d’appartements et quelques
facilités sportives. Un jour, un des habitants vous en parle. Il raconte que plusieurs
maisons ont été endommagées suite au transport de matériaux. Quelques habitants,
dont lui-même, ont contacté en vain la commune, mais on n’a pas donné suite aux
plaintes. Il demande votre aide. Comment allez-vous réagir ?
3. En lisant vos mails, vous constatez qu’il y a des plaintes provenant de firmes qui sont
situées dans la zone industrielle de votre quartier. Ils se plaignent de camions mal
parqués. Ces camions proviennent de la firme X, une entreprise de transport située
dans la proximité immédiate. Il y aurait aussi des problèmes de circulation. Ces
camions conduisent imprudemment et empêchent un trafic fluide. On demande votre
intervention. Comment allez-vous réagir ?
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Annexe 3 : les casus (focus groupes responsables des fonctionnalités de base)
1. La police locale de la zone X reçoit un appel concernant une violente querelle entre
voisins. Il s’agirait de deux familles dont on sait qu’elles ne se supportent pas. Un
homme seul, qui habite à côté des deux familles, est témoin de cette querelle et se
décide à contacter la police. Il explique qu’il y a clairement de la violence physique et
qu’il se fait du souci pour les jeunes enfants des voisins. Qu’allez-vous faire ?
2. Un inspecteur de quartier est responsable d’une zone industrielle, adjacente à une zone
d’habitats. Un jour, il reçoit une plainte concernant le déversement de déchets dans les
environs. On ne sait pas s’il s’agit de déchets dangereux ou pas. Qu’allez-vous faire ?
3. La police locale de la zone X reçoit un appel d’une dame âgée. Elle raconte qu’une
bande de jeunes du quartier fait régulièrement du commerce de stupéfiants sur la place
centrale du quartier qu’elle habite, jusqu'à tard dans la soirée. Des jeunes d’autres
quartiers viennent également acheter de la drogue. La femme dit que les habitants des
maisons voisines et elle-même en souffrent et qu’ils commencent à avoir peur. Ils
n’osent plus sortir de leurs maisons après 20h00. Comment allez vous intervenir ?
4. Une commune organise sa braderie annuelle dans un mois. Le même week-end, une
course cycliste est organisée dans la zone de police. Les autorités locales demandent à
la police locale de prendre les mesures nécessaires pour que les deux événements
puissent s’organiser dans des conditions de sécurité maximale. Comment allez vous
gérer cette situation ?
5. Une jeune femme vient porter plaine au commissariat de police. Elle pense que ses
enfants font l’objet de harcèlement sexuel de la part du fils d’un de ses voisins.
Notamment, son fils de 10 ans fait des cauchemars et a peur de sortir non accompagné.
Qu’allez-vous faire ?
6. Un inspecteur de quartier reçoit régulièrement des plaintes concernant une route
commerçante dangereuse. Les riverains se plaignent de la vitesse excessive des
voitures et de problèmes de stationnement qui obligent les voitures à slalomer entre les
voitures garées en double file. Le carrefour envoisinant serait aussi cause de
problèmes de sécurité. Comment allez vous gérer cette situation ?
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Annexe 4 : les résultats concernant les améliorations prioritaires
Tableau 2: Améliorations prioritaires
Les aspects du travail de quartier que les agents de quartier peuvent améliorer
Développer des projets spécifiques au service de quartier 0
Améliorer le feed-back sur les informations ou dossiers transmis par le service de
quartier aux autres fonctionnalités ou services du corps de police
14
Améliorer la collaboration avec les autres fonctionnalités ou services du corps de
police
9
Améliorer la collaboration avec les services communaux 2
Améliorer la collaboration avec le secteur social et associatif 1
Formuler des objectifs clairs au travail de quartier 2
Formuler des tâches claires au travail de quartier 7
Mettre en place un système spécifique d’évaluation du travail de quartier
(qualitatif)
2
Disposer de nouvelles technologies de l’information et de la communication 3
Mieux communiquer les objectifs du travail de quartier aux autres fonctionnalités
ou services du corps de police
11
Améliorer les moyens matériels (voitures, vélos, ordinateurs, gsm, etc) 4
Changer la place du service de quartier dans l’organigramme du corps de police 2
Améliorer les locaux du service de quartier 1
Créer un service de récolte et de traitement des informations (sociales, judiciaires,
etc.) récoltées par les inspecteurs de quartier
3
Diminuer les tâches judiciaires 3
Disposer de Calogs pour le service de quartier 4
Une plus grande participation aux enquêtes judiciaires 0
Créer des teams de quartier avec d’autres fonctionnalités que la fonctionnalité de
quartier
0
Transférer des tâches administratives à d’autres acteurs ou services 17
Changer les horaires du travail de quartier 1
Améliorer la sélection des inspecteurs de quartier 3
Plus grande flexibilité des horaires du travail de quartier 4
Plus de formations continuées pour les inspecteurs de quartier 1
Inclure dans la formation de base des inspecteurs de police un module travail de
quartier
11
Valoriser financièrement le travail de quartier (prime spécifique, par exemple) 12
Redéfinition des quartiers (territoire, taille, etc) 2
Meilleure répartition de la masse de travail par quartier 6
Autres 0
Tous les inspecteurs de quartier ont choisi cinq améliorations prioritaires.
n
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