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NR<br />
Quotidien<br />
LA<br />
WWW.lnr-dz.com<br />
5<br />
LA NOUVELLE RÉPUBLIQUE<br />
NUMERO<br />
SPECIAL<br />
<strong>Juillet</strong><br />
2012<br />
d’information indépendant - n° 4371 - Jeudi 5 juillet 2012 - Prix : 10 DA
5 <strong>Juillet</strong><br />
, Et non pas 7 ans comme il est communément admis par l’opinion publique et enseigné par l’école algérienne.<br />
Avant-propos<br />
Certains<br />
historiens<br />
attribuent<br />
le déclenchement<br />
de la guerre d’Algérie<br />
à mai 1945, date des<br />
massacres à grande<br />
échelle de la population<br />
civile dans l’Est<br />
du pays. Les batailles<br />
depuis 1932, de<br />
causes à effets, ont<br />
démontré le jour<br />
même de la libération<br />
de la France du joug<br />
nazie par les tirailleurs<br />
algériens, et<br />
africains aux côtés<br />
des troupes alliées, le<br />
caractère monstrueux<br />
de la colonisation. Ce<br />
8 mai 1945 en droite<br />
ligne de la Charte de<br />
l’Atlantique de 1941<br />
proclamant le droit à<br />
l’autodétermination<br />
de tous les peuples, à<br />
Sétif, des membres du<br />
PPA défilent avec les<br />
pieds-noirs fêtant la libération<br />
de la métropole.<br />
Les Algériens<br />
tout en réclamant la<br />
libération de leur chef<br />
Messali Hadj brandissent<br />
le drapeau algérien.<br />
Des heurts éclatent<br />
entre manifestants.<br />
Certains<br />
historiens évoquent<br />
d’abord une boucherie,<br />
dont se seraient<br />
rendus coupables des<br />
nationaux dans les<br />
quartiers français.<br />
Tandis que selon<br />
d’autres versions l’insurrection<br />
a dégénéré<br />
pour gagner les villes<br />
voisines. L’armée française,<br />
la milice composée<br />
de colons,<br />
l’aviation et même la<br />
marine se sont<br />
adonné à des massacres<br />
en série sous<br />
le commandement du<br />
général Duval, qui a<br />
mis à exécution les<br />
termes d’un télégramme<br />
daté du 11<br />
mai 1945 émanant du<br />
chef du gouvernement<br />
français, le général<br />
De Gaulle. <strong>La</strong> répression<br />
fut terrible<br />
dans tout le Constantinois.<br />
On compte<br />
45 000 morts. Le gouvernement<br />
français<br />
n’en reconnaît qu’une<br />
quinzaine de milliers.<br />
Parmi les victimes, on<br />
dénombre des<br />
femmes, des enfants,<br />
et des vieillards qui<br />
n’ont pu fuir. Une<br />
commission patronnée<br />
par le général<br />
Paul Tubert sur instruction<br />
du général<br />
De Gaulle camoufle la<br />
vérité en enfouissant<br />
les cadavres dans des<br />
fours à chaux, sinon<br />
en les brûlant lorsqu’ils<br />
n’étaient largués<br />
en mer vifs. Les<br />
qualificatifs ne sont<br />
pas assez puissants<br />
pour décrire la particularité<br />
de ces crimes<br />
monstrueux. Pour<br />
beaucoup d’historiens,<br />
1945 est la date<br />
qui a mis en branle le<br />
déclenchement de la<br />
guerre d’Algérie.<br />
Cette date charnière<br />
fut pour la suite des<br />
évènements le symbole<br />
d’une rupture<br />
avec les partisans de<br />
l’assimilation, autrement<br />
de l’autonomie.<br />
<strong>La</strong> réorganisation de<br />
la résistance devenait<br />
nécessaire. Le regroupement<br />
des mouvements<br />
nationalistes<br />
algériens qui militaient<br />
au sein d’associations<br />
autour de Ferhat<br />
Abbas ou au<br />
Parti populaire algérien<br />
(PPA) préparèrent<br />
dès lors les<br />
conditions politiques<br />
pour déclarer une<br />
guerre sans merci à la<br />
France. Les radicaux,<br />
d’anciens militants au<br />
PPA, entreront dans la<br />
clandestinité pour former<br />
l’Organisation secrète<br />
(OS), l’embryon<br />
du bras armé du Comité<br />
révolutionnaire<br />
pour l’unité et l’action<br />
(CRUA) qui deviendra<br />
le Front de libération<br />
nationale. C’est le FLN<br />
qui provoquera une<br />
série d’attentats à travers<br />
plusieurs régions<br />
d’Algérie. Le 1 er novembre<br />
1954 marquera<br />
l’entrée des Algériens<br />
en guerre<br />
contre le colonialisme<br />
français. Une guerre<br />
qui durera jusqu’en<br />
juillet 1962, date de la<br />
proclamation de l’indépendance<br />
après<br />
132 ans d’occupation.<br />
En réalité, la guerre a<br />
duré 132 ans, puisque<br />
les historiens ont enregistré<br />
des batailles<br />
frontales entre les armées<br />
algériennes et<br />
françaises dès le<br />
début des années<br />
1833 et 1834. Des archives<br />
révèlent qu’en<br />
1834, un premier<br />
traité de paix et<br />
d’échange de prisonniers<br />
avait été signé<br />
entre des généraux<br />
français et des chefs<br />
de guerre algériens<br />
qui avaient le grade<br />
d’émirs.<br />
Amar K.<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
3<br />
<strong>La</strong> guerre d’Algérie a duré 132 ans<br />
Impétueuse Algérie<br />
, L’Algérie fête le cinquantième anniversaire d’une indépendance<br />
extraite au forceps des ténébreuses périodes, où les empires<br />
occidentaux maintenaient captifs des peuples pour les asservir<br />
à leurs besoins. Une partie des Etats fondaient leurs développements<br />
militaires et socioéconomiques sur le commerce<br />
des humains et sur l’annexion de leurs territoires. Les esclavagistes<br />
partaient d’Afrique via le Sud de l’Europe pour vendre des<br />
enfants, des femmes et les hommes capturés dans les régions<br />
qui les ont vu naître, jusqu’en Amérique du Sud, ou du Nord.<br />
Contrairement aux idées reçues, l’esclavagisme ne concernait pas<br />
que les humains de couleur noire ; parmi eux, se trouvaient des<br />
Nord-Africains, et des prisonniers en provenance de la péninsule<br />
arabe. <strong>La</strong> traite des esclaves réduisait l’humain à une<br />
quelconque marchandise. Le colonialisme compactait les droits<br />
des peuples autochtones jusqu’à l’asservissement, par la destruction<br />
de leurs personnalités juridiques, par la négation de leur<br />
culture, de leur histoire. Ce négativisme, outre l’asservissement<br />
du colonisé, allait jusqu’au refus du droit à une existence<br />
décente, voire à l’existence même. Spolié de ses terres les plus<br />
généreuses, le peuple algérien face aux envahisseurs n’avait<br />
d’autre choix que de se défendre contre un concept de domination<br />
monstrueux, indigne de l’identité humaine, et que des<br />
crapules comme Sarkozy, encore de nos jours dans l’hexagone,<br />
vaille que vaille, tentent de glorifier comme une action civilisatrice.<br />
<strong>La</strong> colonisation, ne l’oublions jamais, avait réduit les Algériens<br />
à la précarité la plus abominable, à une indigence des<br />
plus horrifiantes, qui ne pouvait qu’engendrer de la haine visà-vis<br />
des colons cloîtrés dans leur égoïsme matériel et culturel,<br />
au point qu’ils n’aient rien vu des fossés qui se creusaient<br />
avec ces «bouniouls» comme ils aimaient les appeler, à les offenser,<br />
à les humilier, jusqu’au point qu’ils se permettaient d’interdire<br />
l’accès de certains quartiers «aux chiens et aux Arabes».<br />
Ce racisme élémentaire venait de citoyens français qui euxmêmes<br />
avaient subi des exactions d’ordre raciste de la part des<br />
SS, et ont dû, en tant que vaincus, lors de la Seconde Guerre<br />
mondiale, connaître les camps de travail obligatoires, sinon les<br />
camps de concentration. <strong>La</strong> nature déshumanisante du système<br />
colonial avait fait que des colons espagnols, italiens, portugais,<br />
maltais, belges, écossais, polonais ou alsaciens puissent sous le<br />
couvert de la nationalité française s’approprier les meilleures<br />
terres algériennes pour reléguer la population algérienne au rang<br />
de vassaux au service «d’une noblesse» qui développait le<br />
culte du droit à la différence. Les Algériens considérés comme<br />
des Français musulmans se faisaient distinguer par la dissemblance<br />
des croyances. L’apartheid adopté par la puissance coloniale<br />
n’était pas lié à la couleur de la peau, mais au culte pratiqué,<br />
d’où la promulgation à Tours du décret Crémieux élevant<br />
au rang de citoyen français la communauté juive algérienne, établissant<br />
ainsi sans ambage le caractère discriminatoire du colonialisme,<br />
car juridiquement les musulmans étaient désormais<br />
considérés comme des sujets, et non comme des citoyens en<br />
droits et en devoirs. Les Algériens musulmans n’avaient que des<br />
devoirs à exécuter et aucun droit à faire valoir. Cette oppression<br />
politique, en plus du développement séparé avec les «Algériens<br />
pieds-noirs» allait faire traverser des périodes cruelles à tous ces<br />
«Français musulmans». Ceux qui ne mourraient pas les armes<br />
à la main, ceux qui n’étaient pas bannis, ou envoyés aux travaux<br />
forcés pour un morceau de pain volé, étaient emportés par<br />
les épidémies cycliques de peste, de choléra, de typhus. <strong>La</strong> famine<br />
et la malnutrition faisaient au sein de la population infantile<br />
des dégâts irréparables se matérialisant par le rachitisme,<br />
la poliomyélite ou la tuberculose. Les minis ethnocides entre 1932<br />
et 1962 furent légion. L’histoire se tait d’un côté de peur de choquer<br />
les bonnes consciences qui ont inventé le slogan « liberté<br />
égalité fraternité». Peu d’intellectuels se sont impliqués pour dénoncer<br />
l’oppression et les crimes commis en Algérie. Peu d’historiens<br />
ont décrit avec la célérité et l’impartialité indispensables<br />
l’ampleur des crimes et des dommages collatéraux subis par les<br />
opprimés. Souvent, ils sont tentés de mettre au même pied<br />
d’égalité le bourreau et sa victime pour sauvegarder les bienfondés<br />
de la morale collective, de la raison d’Etat et du secret<br />
d’Etat.<br />
Amar Khelifi<br />
Un peuple en liesse. (Photo > D. R.)<br />
<strong>La</strong> liberté c’est bien,<br />
tout la liberté, c’est mieux<br />
Présentement, les Algériens fêtent le cinquantième<br />
anniversaire de la fin de la domination coloniale<br />
qui a duré 132 ans. 132 ans, c’est long, quand on<br />
endure les spoliations, l’exclusion, la faim, la misère,<br />
la torture physique en même temps que la torture psychologique,<br />
puis les atrocités propres à toutes les<br />
guerres. <strong>La</strong> guerre d’Algérie fut une guerre sans merci,<br />
et cruelle. Elle fut menée par des armées professionnelles<br />
françaises dans le but de légitimer une action<br />
débile face à la puissance militaire de l’empire colonial,<br />
il y eut des combattants généralement faiblement<br />
armés, mais possédant une bravoure que les récits ne<br />
peuvent décrire tant le dévouement dans le combat<br />
n’était que sacrifices pour la patrie à libérer. L’histoire<br />
de l’Algérie reste entièrement à écrire au-delà des susceptibilités,<br />
des manœuvres politiciennes et des heurts<br />
de mémoires. Nos enfants et les générations futures<br />
ont le droit de maîtriser ces connaissances de notre<br />
histoire, fussent-elles amères à narrer ou à vomir. <strong>La</strong><br />
<strong>Nouvelle</strong> <strong>République</strong> de manière humble a élaboré ce<br />
petit dossier pour que les Algériens ouvrent une des<br />
multiples fenêtres illustrant notre passé. Un passé impétueux,<br />
glorieux et cependant, ne l’oublions jamais,<br />
jonchait de martyrs pour que nous puissions jouir de<br />
notre liberté.<br />
A. K.
5 <strong>Juillet</strong><br />
Un décret du 26 avril 1851 modifia<br />
ce système et y substitua celui<br />
des concessions sous condition<br />
résolutoire. Cette modification<br />
n'ayant pas produit les résultats<br />
attendus, un décret du 25 juillet<br />
1860 décida que la vente à prix<br />
fixe ou aux enchères publiques, ou<br />
même de gré à gré dans certains<br />
cas, serait dorénavant la règle<br />
pour l'aliénation des terres domaniales.<br />
Les concessions furent<br />
supprimées par le décret du 31<br />
décembre 1864. Le nouveau régime<br />
de colonisation rendait nécessaire<br />
l'allotissement préalable<br />
des terres à vendre et le décret de<br />
1860 avait déjà ordonné que la<br />
fixation de périmètres de colonisation<br />
précéderait la distribution<br />
des terres domaniales.<br />
Les nationalités des colons<br />
De 1871 à 1881, la superficie des<br />
terres concédées aux immigrants<br />
et aux colons a été de 457 120 hectares<br />
; la valeur de ces terres<br />
s'élève à 41 589 923 F. Les dépenses<br />
d'installation des colons<br />
sont évaluées à 14 939 135 F.<br />
7 339 familles, comprenant 27 981<br />
personnes, résidaient au 31 décembre<br />
1881 sur ces concessions.<br />
Il y a 7 764 concessions de lots de<br />
villages ; 1 241 de lots de fermes<br />
et 1 175 de lots industriels (terres<br />
impropres à la culture). A cette<br />
époque, la population européenne<br />
de l'Algérie comprend des Français,<br />
plus nombreux à eux seuls<br />
que le reste de la population d'origine<br />
européenne.<br />
Ils sont colons pour la plupart,<br />
ont émigré surtout de la France<br />
méridionale, du bassin de la Garonne<br />
et de l'Alsace-Lorraine. Les<br />
Espagnols (Andalous, Murciens,<br />
Valenciens, Catalans, Baléares)<br />
sont maraîchers, alfatiers, bûcherons,<br />
défricheurs et sont très<br />
répandus dans le département<br />
d'Oran. Les Italiens se sont fixés<br />
de préférence, ainsi que les Maltais,<br />
dans le département de<br />
Constantine. On compte en Algérie<br />
quelques milliers de Suisses<br />
et d'Allemands dispersés dans<br />
tout le Tell.<br />
Code de l’indigénat<br />
Voici le mode de groupement des<br />
Arabes : une réunion de tentes<br />
abritant plus ou moins de familles<br />
est un douar, sorte de grande<br />
commune ; l'ensemble de plusieurs<br />
douars constitue une ferka,<br />
administrée par un cheikh. Un certain<br />
nombre de ferkas composent<br />
la tribu, à la tête de laquelle est un<br />
caïd. Les tribus se groupent en<br />
aghaliks, ayant pour chef un agha.<br />
A partir de 1881, un code de l'indigénat,<br />
très défavorable aux musulmans<br />
est promulgué. Il réduit<br />
notamment le droit de circulation,<br />
et définit un statut fiscal alourdi.<br />
Première Guerre mondiale<br />
Dans une fresque consacrée à<br />
l'histoire sociale de l'Algérie de<br />
1870 à 1962, René Gallissot raconte<br />
comment le socialisme ré-<br />
publicain, d'abord marqué par<br />
l'antisémitisme, s'avère incapable<br />
de reconnaître la citoyenneté des<br />
autochtones colonisés.<br />
Cantonnés dans un statut musulman,<br />
ces derniers sont mobilisés<br />
en masse sur les champs de bataille<br />
de la Première Guerre mondiale.<br />
René Gallissot<br />
Autodétermination<br />
Le parti socialiste, arcbouté<br />
dans la défense de l'empire ré-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 – Jeudi 5 juillet 2012<br />
4<br />
<strong>La</strong> colonisation<br />
Une spoliation des terres<br />
, Les principales mesures<br />
de colonisation ont été la<br />
création de centres européens<br />
et la concession gratuite<br />
de terres. Un arrêté<br />
du gouverneur général du<br />
18 avril 1841 des ordonnances<br />
des 21 juillet et 9<br />
décembre 1845 avaient<br />
établi le système des<br />
concessions sous condition<br />
suspensive, le concessionnaire<br />
ne pouvant hypothéquer<br />
les biens concédés<br />
provisoirement et les<br />
transmettre à des tiers<br />
qu'avec l'autorisation de<br />
l'administration.<br />
Dates clés<br />
1515 - Fondation d'un Etat algérois par les frères<br />
Barberousse. Ben Allal Ben Embarek, lieutenant d'Abd<br />
El-Kader, tué au combat dans la province d'Oran, le 11<br />
novembre 1843. Koléa, détruite par un tremblement<br />
de terre en 1825, puis rebâtie, a des rues étroites<br />
plantées d'arbres et bordées de maisons à<br />
l'européenne.<br />
1830. Invasion française.<br />
1847. Reddition d'Abd El-Kader. Au carrefour des rues<br />
de la <strong>République</strong> et <strong>La</strong>moricière, il y avait un monument<br />
en l'honneur du général <strong>La</strong>moricière (1806 -<br />
1865), le fondateur des Régiments de Zouaves.<br />
1830. Prise d Alger. Tentative d'occupation des villes<br />
de Blida, Médéa, Mers El-Kébir, Oran et Bône (Annaba).<br />
1831. Occupation définitive d'Oran qui avait été<br />
d'abord cédé au frère du bey de Tunis ; première occupation<br />
de Bône<br />
1832. Occupation définitive de Bône et du Sahel d'Alger.<br />
Reconnaissance de l'émir Abd El-Kader par les<br />
tribus de la plaine d'Eghris.<br />
1833. Attaque d'Oran par Abd El-Kader. Prise d'Arzew,<br />
de Mostaganem et de Bougie (Béjaïa)<br />
1834. Traité du général Desmichels avec Abd El-Kader.<br />
1835. Expédition dans la plaine de la Mitidja. Combats<br />
de Mostaganem. Occupation de Rachgoun ; expédition<br />
de Mascara.<br />
1836. Première occupation de Tlemcen ; expédition<br />
dans la province de Titeri ; combat de la Sikkak ; occupation<br />
de la Galle. Première expédition de<br />
Constantine.<br />
1837. Traité de la Tafna ; deuxième expédition de<br />
Constantine, prise de cette ville.<br />
1838. Établissement de camps près de Koléa, Blida et<br />
El-Harrouch. Création de Philippeville (Skikda).<br />
1839. Occupation de Blida ; Prise de Djidjelli. Expédition<br />
des Portes de fer. Défaite des lieutenants d'Abd<br />
El-Kader à la Chifa.<br />
1840. Défense héroïque de Mazagran. Prise de Cherchell,<br />
de Médéa, de Miliana<br />
1841. Combat du Sig. Destruction des villes de l'émir,<br />
Boghar et Taza. Expéditions de Takdemt et de Mascara.<br />
Occupation de Mila.<br />
1842. Destruction de Sebdou. Occupation de Tlemcen.<br />
Expédition de Kabylie et entre le Chélif et la Mina.<br />
Reconnaissance sur Tébessa.<br />
1843. Expédition chez les Beni-Menasser et les Beni-<br />
Monad. Fondation de Téniet El-Had, de Tiaret, d'Orléansville<br />
et de Ténès. Expédition dans l'Ouarsenis.<br />
Prise de la smala d'Abd El-Kader. Nombreux combats<br />
contre l'émir dans la province d'Oran. Expéditions<br />
dans le Sud, au djebel Amour et chez les Oulad Sidi-<br />
Cheikh.<br />
1844. Prise de Biskra et de Dellys. Création de Batna,<br />
soumission des Flitta et des Amraoua. Expédition de<br />
<strong>La</strong>ghouat. Bataille d'Isly gagnée sur les troupes maro-<br />
Un peuple asservi durant 132 ans. (Photo > D. R.)<br />
caines.<br />
1845. Insurrection du Dahra réprimée par le colonel<br />
Pélissier. Soumission de l'Ouarsenis. Expédition dans<br />
l'Aurès. Massacre de la colonne Montagnac à Sidi Brahim.<br />
Soumission des Hachem-Gharaba et du Hodna.<br />
Expédition chez les Trara.<br />
1846. Soumission des Flitta. Défaite de Bou-Maza près<br />
de Ténès. Abd El-Kader est repoussé de la Kabylie.<br />
Fondation d'Aumale.<br />
1847. Défaite des Oulad-Dlellal, soumission des Nemencha.<br />
Reddition de Bou-Maza. Expédition entre<br />
Mila et Collo. Reddition d'Abd El-Kader (23 décembre).<br />
1848. Soumission de Moulay-Mohammed et de<br />
Ahmed, ex-bey de Constantine. Expédition chez les<br />
Beni-Senous.<br />
1849. Siège et prise de Zaatcha. Soumission de Bou-<br />
Saâda. - 1850. Expédition en Kabylie et dans l'Aurès<br />
1851. Bou-Baghla se soulève en Kabylie. Expédition<br />
entre Béjaïa et Collo.<br />
1852. Création de Djelfa. Prise de <strong>La</strong>ghouat.<br />
1833. Expédition en Kabylie et à Ouargla. Bou-Baghla<br />
est tué chez les Beni-Mellikech.<br />
1854. Expédition en Kabylie.<br />
1856. Expédition à Drâa El-Mizan<br />
1857. Soumission de la Grande-Kabylie<br />
1857. Expédition sur la frontière du Maroc.<br />
1860. Insurrection du Hodna. Pacification de la Kaby-<br />
publicain, et le parti communiste<br />
qui, dominé par des préséances<br />
internationales, ne sait<br />
pas reconnaître la nation algérienne,<br />
sont tragiquement absents<br />
d'un combat qui aboutira<br />
à l'autodétermination de l'Algérie<br />
en 1962.<br />
Pierre Montagnon, Histoire de<br />
l'Algérie, Pygmalion, 2006.<br />
Voir sur Internet<br />
www.lnr-dz.com<br />
L'indignation rétrospective ne suffit pas à comprendre les raisons pour lesquelles des hommes et des femmes ont pu être ravalés, pendant des décennies, au rang<br />
de sous-citoyens par une <strong>République</strong> qui se proclamait patrie des droits de l'homme.<br />
RReennéé GGaalllliissssoott,, L<strong>La</strong>a RRééppuubblliiqquuee ffrraannççaaiissee eett lleess iinnddiiggèènneess, L'Atelier, 2007.<br />
lie orientale.<br />
1862. Prise du Chérif Mohammed ben Abdallah à<br />
Ouargla.<br />
1864. Insurrection des Oulad-Sidi-Cheïkh de Si-<strong>La</strong>zreg,<br />
dans la province d'Oran, et de Si-<strong>La</strong>la dans le Sud<br />
de la province d'Alger. Insurrection dans la Kabylie<br />
orientale.<br />
1865. Soumission des Oulad-Sidi-Cheikh.<br />
1868. Insurrection dans le Sud de la province de<br />
Constantine<br />
1871. Grande insurrection des Kabyles de la province<br />
d'Alger et de celle de Constantine<br />
1876. Insurrection d'EI-Amri.<br />
1881. Insurrection de Bou-Amama dans le Sud-Ouest<br />
de la province d'Oran. Jusqu'en 1870, l'Algérie n'était<br />
restée essentiellement qu'un territoire militaire, dont<br />
l'administration chaotique reflétait l'indécision qui<br />
régnait en France sur le statut du pays.<br />
Elle fut régie d'abord par des généraux en chef :<br />
Bourmont, Clauzel, Berthezène, Savary, Voirol (1830-<br />
34); puis par des gouverneurs : d'Erlon, Clauzel, Damrémont,<br />
Valée, Bugeaud, Cavaignac, Changarnier,<br />
Charon, d'Hautpoul, le maréchal Randon; ensuite par<br />
un ministre de l'Algérie et des colonies, Pierre-Napoléon<br />
(1858), Prosper de Chasseloup-<strong>La</strong>ubat (1859);<br />
enfin, après 1861, par un gouvernement général : le<br />
maréchal Pelissier, le maréchal Mac-Mahon, le général<br />
Chanzy.
5 <strong>Juillet</strong><br />
L'émir Abd-El-Kader<br />
Le fondateur de l’Etat algérien moderne<br />
<strong>La</strong> lutte de libération de l’Algérie<br />
contre les Ottomans<br />
commença à la même période<br />
historique du débarquement<br />
de l’armée française<br />
à Sidi Fredj. Cette coïncidence<br />
trouve ses origines<br />
dans l’exacerbation de la population<br />
algérienne à payer<br />
des impôts de plus en plus<br />
élevés. Des révoltes éclatent<br />
un peu partout à travers le<br />
pays.<br />
Dans l’Oranie, le père d’Abd-el-kader est<br />
condamné à mort par Hassan Bey, le gouverneur<br />
d’Oran. Or, cette condamnation arriva<br />
au moment de la prise d'Alger par les Français<br />
en 1830. Mahieddine, le vieux marabout,<br />
se mit alors à prêcher la «guerre sainte». L'objectif<br />
était la reprise d'Oran. Des milliers de<br />
musulmans accoururent et se rangèrent sous<br />
ses ordres ; le gouverneur d'Oran, Hassan, en<br />
fuite, demanda asile à celui dont il avait mis<br />
la tête à prix. Lors d’un voyage, en 1820, à la<br />
Mecque et Médine, Abd-el-kader, avec des pèlerins<br />
et son père Mahieddine, navigua sur Le<br />
Castor, brick de commerce du capitaine français<br />
Jovas, il passa par Alexandrie. Pendant<br />
son séjour en Égypte, Abd-el-kader fut frappé<br />
des changements que Méhémet Ali venait<br />
de faire à son armée et des améliorations de<br />
l'administration de ses États ; ce modèle (qui<br />
avait permis une quasi-indépendance vis-àvis<br />
des Ottomans comme des Anglais et des<br />
Français) les frappa, lui et son père. L’Emir<br />
Abd-el-kader fut l’un des plus grands hommes<br />
d’Etat dans l’histoire de l'Algérie contemporaine.<br />
Il est le fondateur de l’Etat algérien<br />
moderne et le leader de sa résistance contre<br />
le colonialisme français entre 1832 et 1847. Il<br />
fut également l’un des plus grands hommes<br />
du soufisme, de la poésie et de la théologie<br />
et, par-dessus tout, il fut un apôtre de la paix<br />
et de la fraternité entre les différentes races<br />
et religions. Ce qui lui valut de nombreuses<br />
amitiés et l’admiration des plus grands<br />
hommes politiques dans le monde. Abd-elkader<br />
Mohieddine ibn Mustafa, connu sous<br />
le nom de l’Emir Abd-el-kader Al-Jazaïri, naquit<br />
le vendredi 23 rajab de l'an 1222 hégirien<br />
/correspondant à l'année 1807 de l’ère chrétienne<br />
au village d’El-Guet'na, situé sur Oued<br />
el-Hammam, à l’ouest de Mascara, et grandit<br />
auprès de ses parents qui lui prodiguèrent<br />
soins et protection.<br />
L’époque 1831–1847<br />
C’est la période qui se distingue par rapport<br />
aux autres périodes dans la vie de l’Emir en<br />
raison des évènements importants et réalisations<br />
qui l'ont marqués et pour lesquels il<br />
avait mis en œuvre ses potentialités scientifiques<br />
et sa grande expérience politique et militaire.<br />
Malgré un contexte difficile, la résistance<br />
ne l'empêcha guère de jeter les bases<br />
et fondements de l’Etat moderne, en raison<br />
de la complémentarité qui existe entre les<br />
deux.<br />
Après la chute d’Oran en 1831, le désordre qui<br />
régna et la dégradation de la situation ont<br />
conduit les chouyouk et ulémas de la région<br />
d’Oran à rechercher une personnalité à laquelle<br />
pourrait être confiée la direction de<br />
leurs affaires. Leur choix se porta sur Cheikh<br />
Mohieddine, père de Abd-el-kader, en raison<br />
de ses qualités avérées de courage et de témérité.<br />
C'est lui en effet qui avait dirigé la première<br />
résistance contre les Français en 1831,<br />
et son fils Abd-el-kader a également fait<br />
preuve de courage et d’audace au cours des<br />
combats livrés sur les remparts de la ville<br />
d’Oran lors du premier accrochage avec les<br />
occupants. Cheikh Mohieddine déclina l’offre<br />
en raison de son âge avancé et devant l’insistance<br />
des chouyoukh et savants de la région,<br />
proposa son fils Abd-el-kader en disant<br />
: «Mon fils Abd-el-kader est un jeune homme<br />
pieux, intelligent, capable de régler les litiges<br />
et un cavalier émérite bien qu'ayant grandi<br />
dans le culte et la dévotion à son Seigneur ;<br />
Ne pensez surtout pas que je vous le propose<br />
pour me remplacer car étant une partie de<br />
moi-même, je ne peux souhaiter pour lui ce<br />
que je rejette pour moi-même. Mais j’ai choisi<br />
le moindre mal lorsque j'ai réalisé à quel<br />
point vous aviez raison , tout en étant<br />
convaincu qu’il sera plus indiqué que moi<br />
pour accomplir ce que vous m'aviez demandé<br />
…je vous fais donc don de lui…..»<br />
Cette proposition fut accueillie favorablement<br />
à l’unanimité et le 27 novembre 1832, les<br />
chefs de tribu et les ulémas se réunirent dans<br />
la plaine de Ghriss, près de Mascara, pour exprimer<br />
leur premier plébiscite à Abd-el-kader<br />
sous l’arbre de Dardara au cours duquel il<br />
reçut le titre de Nacer-eddine (le protecteur<br />
de la religion), suivi d’un deuxième plébiscite<br />
général le 4 février 1833. Dans de telles conditions,<br />
l’Emir prit en charge la lourde responsabilité<br />
de la guerre sainte, de défense de la<br />
population et de la terre d’islam alors qu’il<br />
était en pleine jeunesse. Cette période fut<br />
marquée par des victoires militaires et politiques<br />
qui contraignirent l’ennemi français à<br />
hésiter dans l'application de sa politique expansionniste<br />
devant la résistance acharnée<br />
qu'il rencontra à l’Ouest, au Centre et à l’Est.<br />
L’Emir Abd-el-kader avait réalisé dès le départ<br />
que la confrontation ne pouvait avoir lieu<br />
qu’avec la création d’une armée institutionnelle<br />
régulière prise en charge par l’Etat. A cet<br />
effet, il publia un communiqué en son nom à<br />
la population dans lequel il insistait sur la nécessité<br />
de mobiliser les troupes et organiser<br />
les effectifs dans tout le pays. Les tribus de<br />
la région ouest et du Centre répondirent à son<br />
appel et se rassemblèrent autour de lui, prêts<br />
à lui obéir. Il constitua une armée institutionnelle<br />
qui s’adapta rapidement aux conditions<br />
qui prévalaient et put ainsi remporter plusieurs<br />
victoires militaires dont la plus importante<br />
fut la bataille de Maktâa qui avait<br />
valu au général Trezel et au gouverneur général<br />
D’Orléans d’être relevés de leurs fonctions.<br />
Sur le plan politique, il arracha à l’ennemi<br />
la reconnaissance de son autorité et<br />
l'obligea à traiter avec lui en position de souveraineté.<br />
Cela ressort des deux traités celui<br />
de Desmichels conclu le 26 février 1834 et<br />
celui de la Tafna le 30 mai 1837. Toutefois, le<br />
changement intervenu dans le rapport de<br />
forces sur les plans interne et régional a eu<br />
des conséquences négatives sur le cours de<br />
la résistance de l’Emir. Il n’était pas seulement<br />
contraint de lutter contre les Français<br />
mais de se préoccuper également de ceux qui<br />
avaient une vision à court terme. Les drames<br />
se succédèrent notamment après que les<br />
Français eurent adopté la politique de la terre<br />
brûlée telle qu’elle ressort de l’expression<br />
du gouverneur général, le Maréchal Bugeaud<br />
: «Vous ne labourerez pas la terre et si vous<br />
la labourez, vous ne sèmerez pas et si vous<br />
semez, vous ne récolterez pas…» Cette politique<br />
eut un effet notable sur le recul des<br />
forces de l’Emir notamment après la perte de<br />
ses bases arrières au Maroc, après que Moulay<br />
Abderrahmane, sultan du Maroc, eut resserré<br />
l’étau autour de lui, prétextant son engagement<br />
à respecter les termes du traité<br />
de «<strong>La</strong>lla Maghnia» et ordonné à ses troupes<br />
de pourchasser l’Emir et ses partisans y compris<br />
les tribus qui s'étaient réfugiées au Maroc<br />
pour fuir la répression de l’armée d’occupation.<br />
<strong>La</strong> période des difficultés<br />
et du travail humanitaire (1848-<br />
1883)<br />
Cette période débute avec la reddition de<br />
l’Emir et se prolonge jusqu’à son décès. Ainsi,<br />
sa reddition eut lieu le 23 décembre 1847<br />
après acceptation de ses conditions par le<br />
commandant français <strong>La</strong>moricière. L’Emir<br />
fut transféré à Toulon alors qu'il avait exprimé<br />
le souhait de se rendre à Alexandrie ou<br />
Acca comme convenu avec les dirigeants<br />
français. Mais ses espoirs furent déçus et<br />
comme à leur habitude, les Français ne respectèrent<br />
pas leurs engagements. Il aurait<br />
plutôt souhaité donc mourir au champ d’honneur<br />
que de subir ce sort et exprima ses regrets<br />
par ces mots : «Si nous avions su que les<br />
choses se dérouleraient ainsi, nous aurions<br />
poursuivi le combat jusqu’à la mort.» Ensuite,<br />
l’Emir et sa famille furent conduits à une<br />
résidence au lazaret et de là à Fort Llamalgue,<br />
le 10 janvier 1848. Lorsque tous les membres<br />
de sa famille et de sa suite furent arrêtés,<br />
l’Emir fut transféré à la ville de Pau à la fin du<br />
mois d’avril de la même année pour y demeurer<br />
jusqu’à son transfert à Amboise le 16 octobre<br />
1852, année de sa libération par Napoléon<br />
III. L’Emir s’établit à Istambul et durant<br />
son séjour, il visita le tombeau de Abu Ayyoub<br />
al Ansari et visita la mosquée Aya Sofia (Sainte<br />
Sophie). Mais il préféra s’établir dans la ville<br />
de Borça pour son histoire, ses beaux sites<br />
et ses monuments historiques. Cependant, il<br />
n’y resta pas très longtemps à cause des<br />
séismes qui secouaient la région de temps à<br />
autre. Il se rendit à Damas en 1855 sur autorisation<br />
du sultan ottoman et là, il se consacra<br />
à la lecture, au soufisme, à la théologie,<br />
aux hadiths, Propos et tradition du prophète<br />
Mohammed (QSSL), et à l’exégèse du Coran.<br />
L’une des positions humanitaires à mettre à<br />
l’actif de l’Emir fut son opposition à la discorde<br />
sectaire qui eut lieu entre chrétiens et<br />
musulmans de Syrie en 1860. L’Emir devint<br />
une personnalité internationale, suscitant le<br />
respect et la considération en tous lieux et il<br />
fut même invité à l’inauguration du Canal de<br />
Suez en 1869. Il mourut le 26 mai 1883 à Doumer,<br />
dans la banlieue de Damas à l’âge de 76<br />
ans. Il fut enterré à proximité du tombeau de<br />
Cheikh Mohieddine ibn Arabi al Andaloussi<br />
. Sa dépouille fut transférée à Alger en 1966.<br />
Parmi ses œuvres :<br />
1/ Dhikra al 'akel wa tanbih al ghafel ( Rappel<br />
au sage et mise en garde de l’inconscient).<br />
2/ Al miqradh al hadd li gat'i lisane mountakidh<br />
din al islam bil batel wal il'had (les tenailles<br />
acérées pour trancher la langue de celui qui<br />
porte atteinte à la religion islamique par le<br />
mensonge et l’athéisme)<br />
3/ Moudhakirat al amir Abd-el-kader (Mémoires<br />
de l’Emir Abd-el-kader)<br />
4/ Al mawakef fi al-tasawif wal wa'd wal irchad<br />
(Les positions en matière de soufisme, de<br />
sermon et d’orientation).<br />
Gloires et défaites de l’Emir<br />
Le 5 mai 1839, il demanda et obtint l'appui du<br />
sultan du Maroc, ainsi que la concession du<br />
territoire situé entre Oujda et Tafna. Il voulut<br />
annexer le Constantinois en y nommant un<br />
«khalifa». En réaction, la France organisa l'expédition<br />
des «Portes de Fer» en octobre 1839,<br />
expédition qui fut considérée comme une<br />
violation du traité de Tafna. À partir de ce moment,<br />
la guerre reprit avec violence. Au mois<br />
d'octobre, dans l'ouest de la Mitidja, l'émir<br />
prend en embuscade le commandant Raffet<br />
et une centaine de soldats français ; ces derniers<br />
marchent contre lui et reprennent Cher-<br />
chell, Mildah, Miliana, etc.<br />
Gouvernement du maréchal<br />
Bugeaud<br />
Le tournant de la guerre fut la nomination du<br />
maréchal Bugeaud comme gouverneur général<br />
de l'Algérie en 1842. Celui-ci changea complètement<br />
la tactique de l'armée française,<br />
aidée de nombreuses troupes composées<br />
d'Algériens : troupes régulières (zouaves et<br />
spahis) et corps irréguliers (les goums). Il harcela<br />
les troupes d'Abd-El-Kader, en cherchant<br />
à les couper de leur base. L'émir fut refoulé<br />
sur les Hauts-Plateaux steppiques avec sa<br />
smala, capitale ambulante estimée à 30 000<br />
personnes. Abd-El-Kader essuya un grave revers<br />
le 16 mai 1843, avec la prise de la smala<br />
par le duc d'Aumale dans la région de Boghar.<br />
Le 11 novembre, la mort au combat de son<br />
khalifa Mohammed Ben Allel fut un nouveau<br />
coup terrible, qui l'affaiblit considérablement20.<br />
Il rassembla le reste de ses troupes,<br />
sous le nom de déïra, et se tourna vers le sultan<br />
du Maroc. Celui-ci intervint mais fut défait<br />
à la bataille de l'Isly (oued près d'Oujda)<br />
le 14 août 1844. Dans le traité de Tanger du<br />
10 septembre 1844, il fut convenu qu'Abd-El-<br />
Kader serait mis hors la loi aussi bien en Algérie<br />
qu'au Maroc. Il délimita en outre la frontière<br />
entre les deux pays. Les Français<br />
n'avaient pas oublié le guet-apens de Sidi-<br />
Brahim, où leurs soldats, commandés par le<br />
colonel Montagnac, furent égorgés sans pitié<br />
par les troupes de l'émir. En 1845, beaucoup<br />
de tribus des hauts-plateaux s'étaient soumises<br />
aux Français. L'émir tenta de les réprimer<br />
; le Goum des Ouled Nail, sous le commandement<br />
de Si Chérif Bel <strong>La</strong>hrech qu'Abdel-kader<br />
avait nommé khalifa, prit part à ces<br />
opérations. Cherchant des alliances, il alla ensuite<br />
en Kabylie, nouveau bastion de la résistance<br />
à l'armée française, où il participa à<br />
deux combats contre les Français en février<br />
1846. L'émir sillonna ensuite la région de<br />
Djelfa, plus au sud, poursuivi par les Français,<br />
mais aidé par la population. Des combats<br />
eurent lieu à Aïn Kahla, à Zenina et à l'oued<br />
Boukahil. Abd-el-kader tenta de relancer la révolte<br />
en 1847, mais échouant finalement à rallier<br />
les tribus kabyles pour faire cause commune,<br />
il dut se réfugier au Maroc. Le général<br />
de <strong>La</strong>moricière apprit qu'Abd-el-kader, refusant<br />
de se rendre au sultan du Maroc, s'était<br />
entendu avec ses principaux officiers, les<br />
fonctionnaires de la cour de Fès, pour tenter<br />
une dernière fois la fortune. Le 13 septembre,<br />
un ex-brigadier du 2 e chasseurs d'Afrique,<br />
qui s'était échappé de la Deïra, accourut annoncer<br />
au général que l'Emir voulait livrer encore<br />
un combat avant de se retirer vers le Sud<br />
avec ceux qui voudront l'y suivre.<br />
<strong>La</strong> défaite<br />
Le 21 décembre 1847, les troupes de l'Emir<br />
Abd-el-kader quittèrent le Maroc, en passant<br />
la rivière Kiss, sous la direction de l'émir seul<br />
à cheval, et entrèrent sur le territoire de l'exrégence.<br />
Le général <strong>La</strong>moricière, prévenu à<br />
temps, envoya sur son passage deux détachements<br />
de vingt spahis, en burnous blancs,<br />
commandés par les lieutenants Bou-Krauïa et<br />
Brahim et se porta sur la frontière ; il y reçut<br />
avec Bou-Krauïa des hommes envoyés d'Abdel-kader,<br />
chargés de porter sa demande<br />
d'aman («assurance/protection/sauf<br />
conduit») pour lui et ceux qui l'accompagnaient<br />
(une feuille de papier avec son cachet,<br />
car le vent, la pluie et la nuit l'avaient empêché<br />
d'y rien écrire). Le général remit aux envoyés<br />
son sabre et le cachet du commandant<br />
Bazaine, en leur donnant verbalement<br />
la promesse de l'aman le plus solennel (il ne<br />
pouvait pas écrire non plus). Abd-el-kader ren-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 – Jeudi 5 juillet 2012<br />
5<br />
voya ses deux officiers et le lieutenant Bou-<br />
Krauïa avec une lettre dans laquelle il négociait<br />
la condition d'être conduit à Alexandrie<br />
ou à Saint-Jean-d'Acre. Le général <strong>La</strong>moricière<br />
y consentit par écrit.<br />
Le rendez-vous fut fixé le 23 décembre 1847<br />
sous un arbre qui existe toujours (les Français<br />
y ont mis une plaque). L’Emir fit la prière<br />
d’el-Asr à Sidi-Brahim, à 5 km de l’endroit où<br />
a été signé l’armistice (Sidi Tahar), puis passa<br />
la nuit à Ghazaouet. Le 24 décembre, Abd-elkader<br />
fut reçu par les généraux <strong>La</strong>moricière<br />
et Cavaignac et par le colonel Montauban, au<br />
marabout de Sidi-Brahim, théâtre de ses victoires.<br />
On l'amena ensuite à Nemours<br />
(Dgemma-Ghazouat) devant le duc d'Aumale.<br />
Le prince ratifia la parole donnée par le général<br />
<strong>La</strong>moricière, en exprimant l'espoir que<br />
le roi lui donnerait sa sanction. Le gouverneur<br />
général annonça à l'Emir qu'il le ferait embarquer<br />
le lendemain pour Oran, avec sa famille<br />
; l'Emir s'y soumit sans émotion et sans répugnance.<br />
Avant de quitter le prince, Abd-elkader<br />
lui envoya un cheval de soumission,<br />
pour consacrer sa vassalité et sa reddition.<br />
Prisonnier en France<br />
L'Emir insista pour quitter Oran le plus tôt<br />
possible. On lui offrit de partir immédiatement<br />
sur la frégate à vapeur l'Asmodée, ce<br />
qu'il accepta. Le navire quitta Oran en emportant<br />
l'émir et sa suite, composée de 61<br />
hommes, de 21 femmes et de 15 enfants des<br />
deux sexes, en tout 97 personnes dont sa famille<br />
(sa mère, âgée, deux de ses beauxfrères,<br />
ses trois femmes et ses deux fils, dont<br />
le plus jeune avait huit ans). <strong>La</strong> traversée fut<br />
mauvaise et les captifs très fatigués. Arrivé en<br />
rade de Toulon le 29 décembre 1847, Abd-elkader<br />
fut déposé au <strong>La</strong>zaret de Saint-Mandrier,<br />
puis transféré une dizaine de jours plus<br />
tard au fort <strong>La</strong>malgue à Toulon. <strong>La</strong> Révolte<br />
des At-Amokrane (les Mokrani), survenue le<br />
16 mars 1871 en Algérie, est la plus importante<br />
insurrection contre le pouvoir colonial<br />
français depuis le début de la conquête de l'Algérie<br />
en 1830. Elle est menée par le cheikh Mohand<br />
Amokrane (Mohamed Mokrani) et le<br />
cheikh Mohand Ameziane Ahaddad cheikh<br />
Ahaddad, chef de la confrérie des Rahmaniya.<br />
Histoire<br />
En 1870, un notable kabyle, Mohand Amokrane,<br />
surnommé Cheikh El-Mokrani, est rétrogradé<br />
au titre de bachagha pour avoir<br />
soutenu la révolte du Cheikh Bouaquaz, un<br />
proche de son père, en 1864-1865. Le mouvement<br />
soulève 250 tribus, près du tiers de la<br />
population algérienne. Les insurgés sont<br />
contraints à la reddition après l’attaque des<br />
Français. Ils sont arrêtés à l’Alma le 22 avril<br />
1871, et le 5 mai le bachagha Mokrani mourut<br />
au combat près de l’oued Soufflat. Les<br />
troupes françaises (vingt colonnes) marchent<br />
sur Dellys et Draâ El Mizan. Le cheikh Haddad<br />
et ses fils se rendent le 13 juillet, après la bataille<br />
d'Icheriden. L’insurrection ne prend fin<br />
qu’après la capture de Bou-Mezrag, le 20 janvier<br />
1872. <strong>La</strong> répression fut très sévère et se<br />
traduisit, une fois matée l'insurrection, par des<br />
internements de Kabyles et déportations en<br />
<strong>Nouvelle</strong>-Calédonie (on parle des «Algériens<br />
du Pacifique»), mais aussi par d'importantes<br />
confiscations de terres, qui ensuite ont obligé<br />
de nombreux Kabyles à s'expatrier.<br />
Notes et références<br />
1. [1] [archive] et [2] [archive]<br />
2. Lettre de Mokrani au Gal. Augerand, en page<br />
768 du Rapport de M. Léon de <strong>La</strong> Sicotière au nom<br />
de la «Commission d’Enquête sur les actes du<br />
Gouvernement de la Défense Nationale », Versailles,<br />
Cerf et fils, 1875.
5 <strong>Juillet</strong><br />
L’héroïne <strong>La</strong>lla N’Soumer<br />
Très jeune, elle a mémorisé le<br />
Coran. Elle grandit au sein d’une<br />
famille maraboute où sa liberté<br />
était restreinte. On l’a maria de<br />
force à son cousin mais fut ramenée<br />
par son mari et sa belle-famille<br />
chez ses parents après seulement<br />
30 jours car elle ne voulait<br />
pas consommer ce mariage. Le<br />
village la met ainsi que sa famille<br />
en quarantaine. On la laisse tranquille<br />
dès qu’on la prend pour<br />
une folle. Elle arpente la montagne<br />
et ne revient qu’au coucher<br />
du soleil et découvre la «grotte<br />
du Macchabée».<br />
Quelques temps après, elle décide<br />
de rejoindre son frère marabout<br />
au village de Soumer. En restant<br />
à son ombre, elle commence<br />
à étudier le Coran et l’astrologie.<br />
Les habitants du village se débarrassent<br />
de la mauvaise image<br />
qu’ils ont de Fatma N’Soumer et<br />
commencent à la respecter et apprécier<br />
son talent et son intelligence.<br />
Elle a dirigé une école coranique<br />
aux côtés de son frère Si<br />
Mohand Tayeb et s’occupait des<br />
pauvres et des enfants.<br />
Un jour, elle se confie à son frère<br />
et convoque les villageois pour<br />
leur annoncer la vision qu’elle<br />
avait chaque nuit à propos des<br />
hordes farouches qui viennent<br />
les exterminer. C’est en 1852<br />
qu’elle a eu cette révélation qui<br />
mobilisa toute la Kabylie qui fut<br />
conquise mais seulement après<br />
de violents combats. L’insurrection<br />
a été menée par <strong>La</strong>lla Fatma<br />
N’Soumer avec beaucoup de noblesse<br />
et de courage et qui a<br />
poussé les Français jusqu’à la surnommer<br />
«la Jeanne d’Arc du<br />
Djurdjura».<br />
En 1854 et à peine âgée de 24 ans,<br />
<strong>La</strong>lla Fatma N’Soumer a donné à<br />
Oued Sebaou une leçon de courage<br />
et de détermination à l’armée<br />
française et mena son peuple<br />
à la victoire.<br />
Malgré la prise d’Azazga par le<br />
général Randon et la répression<br />
qu'ont subi ses troupes, Fatma<br />
N’Soumer ne se rendit pas, au<br />
contraire, elle mobilise la population<br />
et mène plusieurs batailles<br />
contre l’ennemi français et leur<br />
infligent de graves défaites<br />
comme celles d’Icherridene et de<br />
Tachkrit et les pertes furent<br />
lourdes pour l’ennemi (800<br />
morts).<br />
Randon demande une trêve que<br />
Fatma N’Soumer accepte pour<br />
renforcer et réorganiser ses<br />
troupes mais comme prévu les<br />
Français ne l’ont pas respectée<br />
et lancent des attaques contre<br />
plusieurs villes qu’ils gagnent en<br />
1957.<br />
Fatma N’Soumer lança une dernière<br />
attaque mais elle perd la bataille.<br />
Elle fut arrêtée et emprisonnée<br />
dans les Issers et Tablat.<br />
Sa fortune fut dépensée et sa bibliothèque<br />
contenant de précieux<br />
travaux religieux et scientifiques<br />
détruite. Très affectée par la cul-<br />
pabilité de n’avoir pu mener son<br />
combat et celui de son peuple à<br />
terme, elle meurt en 1863 à l’âge<br />
de 33 ans. `<br />
El-Mokrani, le soulèvement de<br />
1871<br />
En 1870, un notable algérien,<br />
Cheikh El Mokrani (de son vrai<br />
nom Mohamed Aït Mokrane) est<br />
rétrogradé au titre de bachagha<br />
pour avoir soutenu la révolte du<br />
Cheikh Bouaqaz, un proche de<br />
son père, en 1864-1865.<br />
El-Mokrani, pour pallier la disette<br />
qui touche alors les campagnes,<br />
investit sa fortune personnelle et<br />
emprunte. L’empressement de<br />
ses créanciers et la pression des<br />
autorités l'oblige à hypothéquer<br />
ses biens. A cela s'ajoute l'annonce<br />
du remplacement de l'autorité<br />
militaire française, dont il acceptait<br />
de dépendre, par une autorité<br />
civile. Il décide alors de se<br />
révolter, mais, en homme d'honneur,<br />
il en avise auparavant le général<br />
Augerand (Cf. Lettre de Mokrani<br />
au Gal. Augerand, en page<br />
768 du Rapport de M. Léon de <strong>La</strong><br />
Sicotière au nom de la «Commission<br />
d’Enquête sur les actes du<br />
Gouvernement de la Défense Nationale»,<br />
Versailles, Cerf et fils,<br />
1875). Après quoi il entre en rébellion<br />
en mars 1871.<br />
Mais la première manifestation<br />
de l'insurrection est intervenue<br />
en réalité, dès janvier 1871, sous<br />
la forme d'une révolte de spahis<br />
qui ont refusé d'être envoyés sur<br />
le front de métropole, alors que<br />
les intéressés estimaient leur engagement<br />
valable uniquement<br />
pour servir en Algérie. Cette révolte,<br />
d'abord déclenchée à Aïn<br />
Guettar et à Mondjebeur, s'est ensuite<br />
étendue au Tarf et à Bou<br />
Hadjar, ainsi qu'à Annaba encerclée<br />
pendant 3 jours. Quelque 20<br />
colons ont été tués, jusqu'à ce<br />
qu'une répression très forte soit<br />
engagée.<br />
Est complètement fausse, par<br />
contre, l'assertion répandue selon<br />
laquelle le décret Crémieux du 24<br />
octobre 1870, attribuant la citoyenneté<br />
aux juifs d'Algérie, aurait<br />
été la cause de la révolte kabyle.<br />
On sait cela par Mokrani luimême,<br />
puisque sa lettre exposant<br />
les causes de sa rébellion au général<br />
Augerand ne contient pas la<br />
moindre allusion à ce décret.<br />
Cette légende a, en réalité, été inventée<br />
par les Européens et militaires<br />
locaux, hostiles à cette accession<br />
d'indigènes à la citoyenneté.<br />
Quoi qu'il en soit, la révolte des<br />
spahis fut amplifiée à partir du<br />
16 mars 1871 par sa prise en main<br />
par El-Mokrani, dont l'influence<br />
était très forte. Elle constitua la<br />
plus importante insurrection et<br />
la dernière d'Algérie durant l'occupation<br />
française.<br />
Le mouvement soulève 250 tribus,<br />
près du tiers de la population<br />
algérienne. <strong>La</strong> plupart des villes et<br />
des villages de Kabylie et des<br />
Hauts-Plateaux sont pillés. Les insurgés<br />
sont contraints à la reddition<br />
après l’attaque de la Kabylie<br />
par les Français. Ils sont arrêtés à<br />
l’Alma le 22 avril 1871, et le 5 mai<br />
le bachaga El-Mokrani meurt au<br />
combat près de l’oued Soufflat.<br />
Les troupes françaises (vingt colonnes)<br />
marchent sur Tizi Ouzou,<br />
Dellys et Draâ El-Mizan. Le cheikh<br />
Haddad et ses fils se rendent le 13<br />
juillet, après la bataille d'Icheriden.<br />
L’insurrection ne prend fin<br />
qu’après la capture de Bou-Mezrag,<br />
le 20 janvier 1872.<br />
<strong>La</strong> répression fut très sévère et se<br />
traduisit par 100 000 Algériens<br />
morts, d'importantes confiscations<br />
de terres, l'exil de la famille<br />
Mokrani au sud, l'émigration de<br />
beaucoup d'Algériens, surtout<br />
vers la Syrie, la déportation d'une<br />
partie des «révoltés» en <strong>Nouvelle</strong>-<br />
Calédonie et la parution du Code<br />
de l'Indigénat (1881), très défavorable<br />
aux musulmans. Il réduit<br />
notamment le droit de circulation,<br />
et définit un statut fiscal<br />
alourdi.<br />
Citoyens de seconde zone<br />
Rattaché à la France, le territoire,<br />
divisé en trois départements : Algérois,<br />
Constantinois, Oranais,<br />
est l'objet de nombreuses réformes<br />
administratives et d'un<br />
peuplement de plus en plus intense<br />
puisque 131 000 colons<br />
s'installent de 1871 à 1881. Cette<br />
émigration est constituée pour<br />
moitié de Français avec, à l'Est,<br />
des Italiens et des Maltais, à<br />
l'Ouest, des Espagnols). Le Code<br />
de l'Indigénat, en 1881, consacre<br />
une citoyenneté de seconde zone<br />
pour ceux qui se sentent étrangers<br />
sur leur propre territoire et<br />
qui ne bénéficient que médiocrement<br />
des «bienfaits» de la civilisation.<br />
Après la Première Guerre mondiale,<br />
pendant laquelle les troupes<br />
algériennes apportent leur<br />
concours à la France, celle-ci peut<br />
se croire définitivement chez elle,<br />
outre Méditerranée, d'autant plus<br />
qu'elle s'est installée entre-temps<br />
en Tunisie (1881) et au Maroc<br />
(1906).<br />
En 1930, le gouvernement célèbre<br />
avec faste le «Centenaire de l'Algérie<br />
française», mais si les troubles<br />
et les soulèvements ont cessé, de<br />
jeunes Algériens commencent à<br />
polir d'autres armes pour reconquérir<br />
leur liberté.<br />
Mouvement des Jeunes<br />
Algériens<br />
Les Algériens ne peuvent rester<br />
dans l'état de soumission où les a<br />
réduits la conquête française,<br />
mais la prise de conscience nationale<br />
ne rencontre guère d'écho<br />
favorable, ni auprès des colons, ni<br />
en métropole.<br />
Au début du XX e siècle, le mouvement<br />
«Jeunes Algériens» prend<br />
consistance : intellectuels et lettrés<br />
qui le composent, imprégnés<br />
des idéaux de l'école républicaine,<br />
ne réclament pas une Algérie algérienne,<br />
mais plutôt une Algérie<br />
«francisée» - mêmes devoirs, mais<br />
aussi mêmes droits pour ses habitants<br />
que pour ceux de la métropole.<br />
L'émir Khaled, petit-fils d'Abd El-<br />
Kader, est un de ses animateurs.<br />
Problème fondamental des relations<br />
entre les deux communau-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 – Jeudi 5 juillet 2012<br />
6<br />
, <strong>La</strong>lla Fatma N’Soumer est une personnalité kabyle qui marqua la résistance algérienne contre l’occupation française. De son vrai nom Fatma<br />
Sid Ahmed, elle est née vers 1830 à Ouerja, sur la route d’Aïn El-Hammam en Kabylie. Le surnom de «N’Soumer» lui a été donné car elle a vécu<br />
dans le village de Soumer.<br />
tés, la question de la citoyenneté<br />
n'est pas résolue par le décret de<br />
1919 accordant la nationalité française<br />
à 20 000 Algériens.<br />
En effet, celle-ci est donnée à des<br />
conditions jugées draconiennes :<br />
la renonciation au statut personnel<br />
de musulman, autant dire<br />
l'apostasie».<br />
Un courant de pensée influencé<br />
par des penseurs égyptiens, les<br />
ouléma réformistes, regroupés,<br />
au milieu des années 1920, autour<br />
des cheikhs Abdelhamid Ben<br />
Badis (1889-1940) et Bachir Ibrahimi<br />
(1889-1965).<br />
Créée le 5 mai 1931 à Alger, l'Association<br />
des Oulémas musulmans<br />
algériens se fixe un but religieux<br />
et moral, puis évolue vers une revendication<br />
d'indépendance, mais<br />
«avec le temps et avec l'aide et la<br />
volonté de la France».<br />
Ces partis politiques jouent aussi<br />
un rôle : le Parti Communiste Algérien<br />
(P.C.A.) et surtout l'Etoile<br />
Nord-Africaine, née en 1926-1927.<br />
Son fondateur et principal animateur,<br />
Ahmed Messali Hadj (né en<br />
1898 à Tlemcen, mort en 1974 en<br />
banlieue parisienne), réclama très<br />
vite l'indépendance.<br />
Dissoute, reconstituée, à nouveau<br />
dissoute, l'Etoile renaîtra en 1937<br />
sous le nom de Parti Populaire<br />
Algérien (P.P.A.). A nouveau dissous<br />
en 1939, le PPA resurgira<br />
après la Seconde Guerre mondiale<br />
en Mouvement pour le<br />
triomphe des libertés démocratiques<br />
(MTLD) puis, en 1954, en<br />
Mouvement national algérien<br />
(MNA).<br />
L'avant-guerre avait vu se tenir le<br />
Congrès musulman de 1936, qui<br />
avait dressé une «Charte revendicative»<br />
restée sans suite. Tout<br />
comme furent sans lendemain les<br />
projets de réforme Blum-Viollette<br />
pendant le Front Populaire (1936-<br />
1938).<br />
Cheikh Bouamama<br />
Cheikh Bouamama Mohammed<br />
Ibn <strong>La</strong>rbi, Ibn Cheikh, Ibn Mohammed,<br />
Ibn Brahim, Ibn Attaj, Ibn<br />
Sidi Cheikh Abdelkader, né en<br />
1833 et mort le 7 octobre 1908,<br />
était à la fois une figure historique<br />
et un personnage mystique.<br />
Armé d'une large culture que les<br />
savants et érudits de Kairaouane<br />
lui avaient inculquée, il fonda sa<br />
Zaouia dans le but unifier les différents<br />
courants de confrérie et<br />
de rassembler les Bouchikhi .Il<br />
avait réussi à mettre fin aux divergences<br />
tribales de son époque. Il<br />
constitua sa base militaire dans<br />
son fief natal Moghrar Tahtania à<br />
<strong>La</strong>biodh Sidi Cheikh ex-Geryville.<br />
En bon meneur d'hommes, il dirigeait<br />
la résistance contre le colonialisme<br />
en Algérie de 1881 à 1908,<br />
il avait commandé de nombreuses<br />
batailles, causant d'importantes<br />
pertes aux ennemis.<br />
Il avait jusqu'à sa mort résisté à<br />
toutes les pressions aussi bien<br />
militaires que politiques.
5 <strong>Juillet</strong><br />
<strong>La</strong> NR 4371 — Jeudi 5 juillet 2012<br />
7<br />
Histoire de batailles<br />
De Cheikh Bouamama à la résistance des Touareg<br />
,Mohammed Ibn <strong>La</strong>rbi Ibn Cheikh Ibn Mohammed Ibn Brahim Ibn Attaj Ibn Sidi Cheikh Abd el-Kader, dit Cheikh Bouamama, né en 1833 et mort<br />
le 7 octobre 1908, était à la fois une figure historique, un combattant reconnu et un personnage mystique. Durant cette phase difficile de l'histoire<br />
d'Algérie, sa famille fut obligée de s'exiler, de quitter le pays pour s'établir en territoire marocain.<br />
Cheikh Bouamama fonda sa propre<br />
zaouia dans la région d'El Mekrar<br />
el-Tahtani, ce qui accrut sa popularité<br />
et augmenta le nombre de<br />
ses disciples et adeptes dans les régions<br />
sahariennes.<br />
<strong>La</strong> résistance de Cheikh Bouamama<br />
dura plus de vingt trois ans.<br />
Il fut connu par ses capacités exceptionnelles<br />
à affronter les forces<br />
d'occupation qui ne réussirent pas<br />
à mettre un terme à son activité<br />
malgré toutes leurs tentatives politiques<br />
et militaires, jusqu'à son<br />
décès le 17 octobre 1908 à Oujda<br />
au Maroc.<br />
Il réussit à mettre fin aux divergences<br />
tribales de son époque et<br />
constitua sa base militaire dans<br />
son fief natal Moghrar Tahtani sur<br />
la route de Naâma et Abiodh Sidi<br />
Cheikh. En habile meneur<br />
d'hommes, il a dirigé la résistance<br />
contre l’occupant en Algérie de<br />
1881 à 1908, en participant à de<br />
nombreuses batailles, causant<br />
d'importantes pertes aux ennemis.<br />
A l'instar des autres régions d'Algérie,<br />
l'Ouest oranais a souffert des<br />
affres de la malveillance française<br />
à travers sa politique basée sur<br />
l'entretien de la discorde parmi les<br />
Algériens, rôle dévolu aux bureaux<br />
arabes chargés de semer la zizanie<br />
et entretenir les rivalités entre les<br />
tribus et entre les grandes familles<br />
et à créer la discorde.<br />
En 1845, le Traité de <strong>La</strong>lla Maghnia,<br />
imposé par l'armée française, sépare<br />
la tribu des Ouled Cheikh en<br />
deux, les Ghraba à laquelle appartient<br />
Bouamama et les Chraga.<br />
Mais Cheikh Bouamama ayant saisi<br />
les intentions des occupants français,<br />
avait proclamé la lutte pour<br />
débarrasser le pays et ses habitants<br />
de son joug.<br />
Il suffirait de dire que le refus de<br />
l'occupation française par le<br />
peuple algérien constitue le facteur<br />
le plus important ayant<br />
poussé Cheikh Bouamama à préparer<br />
et organiser l'action révolutionnaire<br />
contre l'occupant dans<br />
l'Ouest oranais. Mais il existe sans<br />
aucun doute également un ensemble<br />
de raisons ayant contribué<br />
pour une grande part à accélérer<br />
le déclenchement de la révolte<br />
parmi lesquelles :<br />
Les causes directes : L'assassinat<br />
le 22 avril 1881 d'un officier français,<br />
le lieutenant Wayne Bruner<br />
qui occupait le poste de chef du<br />
bureau arabe de la région d'El-<br />
Bayadh, lors de ses vaines tentatives<br />
de mettre un terme à l'activité<br />
du Cheikh Bouamama peut être<br />
considéré comme étant la cause<br />
principale dans le déclenchement<br />
de l'affrontement entre ce dernier<br />
et l'occupant français.<br />
Les causes indirectes : De par son<br />
statut d'homme de religion et chef<br />
de zaouia, Cheikh Bouamama est<br />
imprégné de l'idée de la lutte<br />
contre les conquérants.<br />
Causes économiques : <strong>La</strong> dégradation<br />
de la situation économique<br />
dans la région du Sud oranais a<br />
contribué à l'embrasement de la<br />
lutte et au déclenchement de la<br />
résistance, surtout après la propagation<br />
de la famine qui avait décimé<br />
les populations et causé la<br />
perte de tous leurs biens, sans ou-<br />
blier la misère engendrée par la<br />
politique inique menée par l'administration<br />
française, notamment<br />
l'interdiction faite à certaines tribus<br />
de se déplacer entre 1879 et 1881,<br />
en particulier celles d'Aflou, El-<br />
Bayadh ainsi que les tribus nomades<br />
des monts du Ksour, provoquant<br />
ainsi un mécontentement<br />
sérieux. Cette interdiction avait<br />
entraîné la mort d'une grande partie<br />
du cheptel, le pourcentage de<br />
pertes ayant atteint pour la seule<br />
région d'Aflou environ 80% dont<br />
37% pour l'année 1879-1880 et 43%<br />
pour l'année 1880-1881.<br />
Les étapes de la résistance<br />
Première étape<br />
Cheikh Bouamama ne déclara la<br />
lutte contre l’occupant français,<br />
dans la région du Sud oranais<br />
qu'après avoir préparé toutes les<br />
tribus sahariennes par le biais des<br />
disciples de la confrérie répartis à<br />
travers la région notamment les<br />
tribus des Trafi, des Rézaynia , d'El-<br />
Ahrar, Frenda et Tiaret. Le premier<br />
affrontement militaire eut lieu le<br />
27 avril 1881 au lieu dit Sfisifa au<br />
sud de Aïn Sefra, et s'acheva par la<br />
défaite de l'armée française.<br />
Compte tenu de la gravité de la situation,<br />
les autorités françaises<br />
s'empressèrent d'envoyer des renforts<br />
supplémentaires vers la région<br />
afin de réprimer la révolte et<br />
la liquider. Ces troupes étaient<br />
commandées par le général Colineau<br />
d'Annecy, commandant du<br />
secteur militaire de Mascara.<br />
Le deuxième affrontement militaire<br />
entre Algériens et Français eut lieu<br />
le 19 mai 1881 au lieu dit El-Mouilek,<br />
situé près de Ksar Chellala<br />
dans les monts Ksours. Il y eut de<br />
violents combats dont Cheikh<br />
Bouamama sortit victorieux malgré<br />
la supériorité de l’ennemi sur<br />
le plan matériel et humain. Après<br />
cette bataille, Cheikh Bouamama<br />
demeura maître de la situation. Il<br />
se dirigea vers <strong>La</strong>biod Sidi Cheikh,<br />
ce qui aida les insurgés au cours de<br />
cette période à couper les fils du<br />
télégraphe reliant Frenda à El-<br />
Bayadh et à attaquer les centres de<br />
la société franco-algérienne des alliés.<br />
Afin de faire face aux victoires<br />
répétées enregistrées par Cheikh<br />
Bouamama, les autorités françaises<br />
engagèrent des mouvements<br />
rapides consistant à envoyer<br />
ses troupes vers le sud ouest<br />
en vue d’encercler l’insurrection<br />
et la liquider, pour ensuite se propager<br />
dans la région et étendre<br />
son influence sur tous les ksours<br />
de l’Ouest oranais.<br />
Le colonel Négrier fut chargé de<br />
punir les tribus ayant participé à<br />
l’insurrection avec Cheikh Bouamama.<br />
Le 15 août 1881, il fait raser<br />
le mausolée de Sidi Cheikh et profane<br />
sa tombe, ce qui constitue<br />
une véritable atteinte aux valeurs<br />
spirituelles du peuple algérien et à<br />
ses us et coutumes. Cela fut suivi<br />
par les massacres terribles commis<br />
par l’armée d’occupation à<br />
l’encontre des populations isolées<br />
des plaines et collines dans la région<br />
d’El-Bayadh. Les mêmes<br />
crimes furent commis à l’encontre<br />
des populations de Chellala dahrania<br />
(située à l’ouest).<br />
Cheikh Bouamama. (Photo > D. R.)<br />
Par ailleurs, le général Louis fit détruire<br />
les deux ksours que possédait<br />
Cheikh Bouamama, à savoir le<br />
ksar supérieur de Meghrar et le<br />
ksar inférieur de Meghrar. De<br />
même que fut détruite la zaouia<br />
de Cheikh Bouamama et que furent<br />
tués bon nombre d’habitants<br />
isolés.<br />
Compte tenu de l’accroissement<br />
numérique des troupes françaises<br />
auxquelles des renforts affluaient<br />
de toutes les régions, la pression<br />
s’accrut sur Cheikh Bouamama qui<br />
fut contraint de se retirer en direction<br />
de la région de Figuig au<br />
Maroc, où son activité diminua et<br />
ses partisans se dispersèrent.<br />
Le 16 avril 1882, les troupes d’occupation<br />
pourchassèrent Cheikh<br />
Bouamama sur le sol marocain<br />
mais il réagit par une attaque violente<br />
sur le chott de Tighri qui occasionna<br />
aux Français des pertes<br />
humaines considérables, le<br />
contraignant à se replier.<br />
Cette défaite eut un impact considérable<br />
dans les milieux militaires<br />
français et accrut la ténacité et la<br />
résistance des insurgés, démontrant<br />
ainsi une fois de plus leur supériorité<br />
sur les troupes françaises.<br />
Deuxième étape<br />
Au cours de cette étape, la résistance<br />
de Cheikh Bouamama fut caractérisée<br />
par un calme relatif<br />
après qu’il se fut établi dans son village<br />
natal, El-Hammam El- Fougani,<br />
à Figuig où il était arrivé en juillet<br />
1883, afin d’entreprendre la réorganisation<br />
de ses troupes pour l’avenir.<br />
Inquiètes de cette activité intense,<br />
les autorités françaises s’empressèrent<br />
d’adresser un<br />
télégramme signé par le général<br />
Soucié, chef du 19 e bataillon, au<br />
gouvernement de Paris, l’appelant<br />
à exercer des pressions sur le Sultan<br />
du Maroc afin qu’il chasse<br />
Cheikh Bouamama du territoire<br />
marocain car il constitue un danger<br />
pour les intérêts de la France<br />
dans la région.<br />
Ceci amena Cheik Bouamama à<br />
quitter la région vers la fin de l’année<br />
1883 pour se réfugier dans le<br />
Touat et demander la protection<br />
des habitants de l’oasis de Deldoul.<br />
Il y demeura jusqu’à 1894 et<br />
fonda une zaouia où il entreprit de<br />
dispenser un enseignement religieux<br />
afin de poursuivre son combat<br />
et stopper l’expansion française<br />
dans le sud ouest. Il adressa<br />
des messages à l’ensemble des<br />
chefs des tribus sahariennes, notamment<br />
les touaregs qui lui proposèrent<br />
de venir s’installer chez<br />
eux afin de pouvoir s’entraider<br />
dans la lutte contre l’ennemi français.<br />
D’autre part, certaines tribus<br />
installées aux frontières algéro-marocaines<br />
l’appuyèrent et se rallièrent<br />
à lui. Les autorités françaises<br />
tentent d’étouffer la révolte et d'en<br />
limiter l'extension dans le sud par<br />
la mise en place d’établissements<br />
économiques comme la création<br />
de centres commerciaux dans le<br />
territoire du Touat et de Tadikalt.<br />
Troisième étape<br />
Cheikh Bouamama réussit à rallier<br />
de nombreux partisans et gagner<br />
la confiance des populations<br />
des régions sahariennes. Les autorités<br />
françaises tentent de le rallier<br />
à leur cause. Des contacts sont<br />
pris par le biais de la délégation<br />
Française à Tanger en 1892 afin de<br />
négocier avec lui la question de<br />
l’aman (la paix négociée) mais ne<br />
débouchent sur aucun résultat.<br />
Les rapports d’amitié qui existaient<br />
entre Cheikh Bouamama et les autorités<br />
marocaines suscitèrent l’inquiétude<br />
des autorités coloniales<br />
françaises, notamment après qu’il<br />
fut reconnu comme chef des tribus<br />
des Ouled Sidi Cheikh ayant sous<br />
son autorité toutes les régions sahariennes.<br />
Elles tentèrent une nouvelle<br />
fois de gagner son amitié afin<br />
de faciliter leurs tentatives d’expansion<br />
et d’étendre leur influence<br />
sur les régions sahariennes. Pour<br />
cela, le gouverneur général, <strong>La</strong>verrière<br />
décida le 16 octobre 1899<br />
d’accorder l’aman total sans conditions.<br />
Au début du vingtième siècle,<br />
Cheikh Bouamama entra au Maroc<br />
et s’installa dans la région d’Oujda.<br />
Le combat mené par Cheikh Bouamama<br />
durant de nombreuses années<br />
avait considérablement entravé<br />
l’expansion française dans<br />
l’extrême sud, en particulier le côté<br />
occidental et ce, malgré le blocus<br />
important que le pouvoir français<br />
en la personne du général Lyautey<br />
avaient tenté d’imposer à la<br />
résistance.<br />
Conséquences de la résistance<br />
de Cheikh Bouamama<br />
-L’insurrection de Cheikh Bouamama<br />
constitua un défi important<br />
face à la politique de la IIIème <strong>République</strong><br />
visant le parachèvement<br />
des opérations d’occupation totale<br />
de l’Algérie et parvint à retarder<br />
et entraver les projets français<br />
dans le Sud ouest.<br />
-<strong>La</strong> révolte de Cheikh Bouamama<br />
représente la phase finale de la<br />
stratégie des leaderships dans l’affrontement<br />
du pouvoir français à<br />
travers les résistances populaires.<br />
-<strong>La</strong> révolte de Cheikh Bouamama<br />
fut l’une des résistances populaires<br />
les plus violentes au cours du dix<br />
neuvième siècle après la résistance<br />
de l’Emir Abdelkader.<br />
-<strong>La</strong> révolte de Cheikh Bouamama a<br />
dévoilé la faiblesse des Français<br />
dans l’affrontement de la résistance.<br />
Les Français ont été amenés<br />
à rechercher des solutions politiques<br />
afin de mettre fin à la révolte<br />
en particulier après la<br />
deuxième étape 1883-1892, lorsque<br />
se posa la question de l’aman<br />
(trêve) recherchée par les autorités<br />
françaises alors que Bouamama<br />
la refusait.<br />
-Les pertes humaines et matérielles<br />
furent également parmi les conséquences<br />
les plus notables de la révolte.<br />
-<strong>La</strong> révolte a accéléré l’achèvement<br />
des projets de voie ferrée dans la<br />
région reliant le nord au sud.<br />
-Même si, en raison des entraves<br />
rencontrées et plus précisément<br />
les difficultés à unifier les deux<br />
branches des Ouled Sidi Cheikh<br />
ainsi que les pressions exercées<br />
par le Sultan marocain Abdelaziz<br />
sur la révolte et son confinement<br />
aux frontières, la résistance de<br />
Cheikh Bouamama n’a pas pu réaliser<br />
son objectif qui était de chasser<br />
les occupants de la région, elle<br />
a cependant démontré ses capacités<br />
de résistance, son endurance et<br />
le blocage de l’expansion française<br />
dans la région.<br />
Film documentaire<br />
Un film sur Cheikh Bouamama a<br />
été réalisé en 1985 en Algérie. L'acteur<br />
principal Athmane Ariouat<br />
joue le personnage de Cheikh<br />
Bouamama. Benamar Bakhti est le<br />
réalisateur.<br />
<strong>La</strong> résistance des Touareg (1881)<br />
Les Touaregs avaient manifesté<br />
dès l’arrivée des premières missions<br />
françaises de reconnaissance<br />
leur opposition à l’implantation de<br />
communauté étrangère. C’est durant<br />
la fin du 19eme siècle que la<br />
France avait entamé le parachèvement<br />
de son occupation en envoyant<br />
des militaires par expéditions<br />
successives. L’insurrection<br />
ne tarda pas des Touaregs constituant<br />
ainsi le prolongement des<br />
luttes menées par les populations<br />
du nord. Les batailles entre les missionnaires<br />
et les Touaregs ont été<br />
sanglantes. L’armée française qui<br />
avait de posséder des armes à feu<br />
due se plier devant la ténacité des<br />
épées et d’une meilleure connaissance<br />
du terrain. <strong>La</strong> France choisit<br />
alors de n’envoyer que des missionnaires<br />
civils ou religieux pour<br />
asseoir son expansionnisme sous<br />
le fallacieux prétexte de mener des<br />
opérations à caractère scientifique<br />
ou en matière de santé publique.<br />
...
5 <strong>Juillet</strong><br />
Histoire de batailles<br />
Causes de la résistance des Touareg<br />
Les études académiques qui ont<br />
abordé la résistance des Touareg<br />
dans la région du Hoggar ont démontré<br />
de façon indiscutable que l'essence<br />
de ces révoltes était le refus du<br />
colonialisme.<br />
<strong>La</strong> deuxième cause fut la découverte<br />
par les populations touareg des véritables<br />
motivations cachées derrière<br />
les missions françaises qui se sont<br />
succédé dans la région et qui consistaient<br />
en réalité à mettre en place les<br />
voies susceptibles de faciliter l'occupation<br />
et la domination de la région<br />
par la force, en encourageant la christianisation<br />
des populations.<br />
Etapes de la résistance des<br />
Touareg<br />
Première étape<br />
Echec des premières missions<br />
Les populations touareg ont estimé<br />
nécessaire de faire face à ces missions<br />
de reconnaissance et de prospection<br />
et de tout mettre en œuvre<br />
pour les faire échouer car leur objectif<br />
consistait en réalité à préparer<br />
le terrain à l'occupation de la région.<br />
Il en va de même des missions.<br />
Deuxième étape<br />
Emergence du cheikh Amoud<br />
Cheikh Amoud fut l'un des résistants<br />
et héros des révoltes populaires durant<br />
cette période. En effet, lorsque<br />
l'intérêt des Français pour le sud algérien<br />
se développa, la résistance du<br />
Cheikh Amoud se manifesta en tant<br />
que défi nationaliste lancé à la puissance<br />
coloniale. Les actions au cours<br />
de cette résistance consistèrent à liquider<br />
toutes les missions aussi bien<br />
religieuses que militaires.<br />
Troisième étape<br />
Répercussions de la résistance<br />
des Touareg sur la situation au<br />
Sahara.<br />
<strong>La</strong> liquidation de la mission du colonel<br />
Flatters le 16 avril 1881 est considérée<br />
comme le début d'une nouvelle<br />
étape dans la résistance des Touareg<br />
dont les répercussions sur la résistance<br />
populaire furent positives,<br />
assurant sa continuité et mettant<br />
d'autre part momentanément un<br />
terme aux ambitions du colonialisme<br />
d'occuper le Sahara<br />
Réactions des forces françaises<br />
Cette situation poussa les autorités<br />
françaises à réfléchir à la mise en<br />
place d’un nouveau plan conforme à<br />
sa politique d'occupation du Sud et<br />
ce, à travers la création de postes<br />
militaires avancés au cœur du Sahara<br />
afin de faciliter à l'avenir le travail<br />
des missions. C'est ce qui se produisit<br />
au cours des années 1893 et<br />
1894. Par ailleurs, cette étape constitua<br />
un second souffle pour la résistance<br />
des populations de l'extrême<br />
sud. C'est ce qui arriva à la mission de<br />
Colo lequel fut tué le 31 octobre 1891<br />
avec ses hommes dans la région d'El-<br />
Goléa.<br />
Toutefois, la poursuite par l'ennemi<br />
de la liquidation des soutiens de la résistance<br />
à travers les massacres commis<br />
sur les insurgés lui a permis d'établir<br />
sa présence dans cette région.<br />
8 mai 1945 à Sétif<br />
Chronique d’un massacre annoncé<br />
Pour célébrer la chute de l’Allemagne<br />
nazie, les nationalistes algériens des<br />
Amis du manifeste et de la liberté<br />
(AML) de Ferhat Abbas et du PPA<br />
(dissous) de Messali Hadj (en résidence<br />
surveillée) organisent un défilé<br />
à Sétif avec les drapeaux alliés en<br />
tête. Des pancartes et drapeau algériens<br />
sont déployés. Les pancartes<br />
portent les slogans «Libérez Messali»,<br />
«Vive l’Algérie libre et indépendante»,<br />
«Vive la charte de l’Atlantique», «A<br />
bas le colonialisme». Bouzid Saâl, qui<br />
refuse de baisser le drapeau algérien<br />
qu’il brandit, est assassiné par un<br />
policier à bout pourtant. Cela déclenche<br />
une émeute qui sera suivie<br />
d’une répression atroce. Au printemps<br />
1945, l’ambiance est tendue<br />
parmi la population européenne. Des<br />
bruits alarmistes circulent sur un imminent<br />
soulèvement musulman. D’autant<br />
que l’Algérie connaît depuis<br />
quelques mois une situation alimentaire<br />
catastrophique, résultat de l’absence<br />
de presque tous les hommes<br />
valides. Messali Hadj est déporté à<br />
Brazzaville le 23 avril 1945. Le PPA organise,<br />
le 1 er mai, dans tout le pays,<br />
des manifestations qui se veulent pacifiques<br />
et sans armes, et où pour la<br />
première fois est brandi un drapeau<br />
algérien. Les manifestations se sont<br />
passées dans le calme sauf à Alger et<br />
à Oran où ont eu lieu des affrontements<br />
avec la police ; la répression<br />
était brutale faisant plusieurs morts.<br />
Quelques jours plus tard, c’est l’annonce<br />
de la reddition allemande.<br />
C’est la fin de la guerre : des manifestations<br />
étaient prévues un peu partout<br />
pour le 8 mai.<br />
Répression et massacres<br />
A Sétif, le rassemblement séparé des<br />
manifestations officielles est autorisé<br />
à condition qu’il n’ait pas un caractère<br />
politique. Aucune bannière<br />
ou autre, symbole revendicatif n’est<br />
toléré. Un drapeau autre que celui<br />
de la France ne doit en aucun cas<br />
être déployé. Les slogans anti-français<br />
sont également interdits tout<br />
comme le port d’armes, de bâtons<br />
ou de couteaux. Les manifestants envahissent<br />
les rues dès 8h du matin.<br />
Estimés à plus de 10 000 personnes,<br />
ils se mettent en branle chantant<br />
l’hymne nationaliste Min Djibalin (du<br />
haut de nos montagnes). Ils défilent<br />
avec des drapeaux des pays alliés<br />
vainqueurs du nazisme. Bravant l’interdit,<br />
ils brandissent aussi des pancartes<br />
sur lesquelles des tracts significatifs<br />
sont inscrits comme «Nous<br />
voulons être vos égaux». Le pas est<br />
franchi. Quelques instants plus tard,<br />
et alors que la tension monte de plusieurs<br />
crans, c’est en chiens de<br />
faïence que se regardent manifestations<br />
et policiers déployés en grand<br />
nombre en cette journée de fête qui<br />
ne tardera pas à tourner au drame.<br />
«Vive l’Algérie libre et Indépendante»<br />
met la poudre au feu. En tête de la manifestation,<br />
Aissa Cheraga, chef d’une<br />
patrouille de scouts musulmans, arbore<br />
le drapeau algérien, l’occasion<br />
pour le commissaire Olivieri de s’en<br />
emparer. Nul ne sait quelles étaient<br />
ses intentions mais c’est trop tard,<br />
puisque la situation dégénère et<br />
prend une tournure tragique. Selon<br />
un témoin, des Européens, en marge<br />
de la manifestation, se précipitent<br />
sur la foule et y mettent leur grain de<br />
sel. Les porteurs des banderoles et<br />
des drapeaux refusent de céder aux<br />
injonctions des policiers. Un jeune<br />
homme de 26 ans, Bouzid Saâl, est<br />
abattu par un policier. Les autres policiers<br />
lui emboîtent le pas en ouvrant<br />
le feu à leur tour. C’est la panique<br />
générale. Il a fallu du temps<br />
pour que les choses reviennent à la<br />
normale. L’entrée persuasive des tirailleurs<br />
a fait craindre le pire. Mais<br />
comme si tout le monde s’est donné<br />
le mot, la manifestation de Sétif fait<br />
tâche d’huile et un mouvement similaire<br />
est signalé dans différents villages<br />
environnants. A Aïn Kebira,<br />
Beni Aziz, Amouchas, Kherrata et<br />
bien d’autres villages, les indigènes<br />
affichent bruyamment leur élan de<br />
solidarité à leur frères de Sétif. Le<br />
soir même, c’est la ville de Guelma<br />
qui plonge dans l’horreur. Le souspréfet<br />
Achiary, un ancien résistant,<br />
ordonne de tirer sur les manifestants.<br />
Des renforts convergent vers la ville<br />
pour ramener le calme et, le cas<br />
échéant, utiliser la manière pour dissuader<br />
les manifestants à continuer<br />
leurs mouvements. Un bataillon d’infanterie<br />
de Sidi Bel Abbès arrive le 9<br />
dans la journée pour évacuer les Européens<br />
encerclés par les émeutiers.<br />
Les massacres des jours suivants<br />
Dans un télégramme daté du 11 mai<br />
1945, le général de Gaulle, chef du<br />
gouvernement français provisoire,<br />
ordonne l’intervention de l’armée,<br />
sous le commandement du général<br />
Duval, qui mène une terrible répression<br />
contre la population indigène. <strong>La</strong><br />
marine y participe grâce à son artillerie,<br />
ainsi que l’aviation. Le général<br />
Duval rassemble toutes les<br />
troupes disponibles, soit deux mille<br />
hommes. Ces troupes viennent de la<br />
Légion étrangère ; des tabors marocains,<br />
qui se trouvaient à Oran en<br />
passe d’être démobilisés et qui protestent<br />
contre cette augmentation<br />
imprévue de la durée de service, une<br />
compagnie de réserve de tirailleurs<br />
sénégalais d’Oran, des spahis de<br />
Tunis et des tirailleurs en garnison à<br />
Sétif, Kherrata et Guelma.<br />
<strong>La</strong> répression, menée par l’armée et<br />
la milice, est d’une incroyable violence<br />
: exécutions sommaires, masacres<br />
de civils, bombardements de<br />
mechats. Le croiseur Duguay-Trouin<br />
et le contre-torpilleur Le Triomphant<br />
tirent plus de 800 coups de canon<br />
depuis la rade de Béjaïa sur la région<br />
de Sétif. L’aviation bombarde plusieurs<br />
agglomérations.<br />
Une cinquantaine de mechas sont incendiées.<br />
Les automitrailleuses font<br />
leur apparition dans les villages et<br />
tirent à distance sur les populations.<br />
Les blindés sont relayés par les militaires<br />
arrivés en convois sur les lieux.<br />
De nombreux corps ne peuvent être<br />
enterrés.<br />
Ils sont jetés dans les puits, dans les<br />
gorges de Kherrata. Pendant deux<br />
mois, l’Est de l’Algérie connaît un déchaînement<br />
de folie meurtrière.<br />
Un journaliste américain écrira : «It<br />
was an open season», pour décrire la<br />
chasse à l’homme, à l’indigène de-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 — Jeudi 5 juillet 2012<br />
8<br />
, Mohammed Ibn <strong>La</strong>rbi Ibn Cheikh Ibn Mohammed Ibn Brahim Ibn Attaj Ibn Sidi Cheikh Abdelkader, dit Cheikh Bouamama, né en 1833 et mort le<br />
7 octobre 1908, était à la fois une figure historique, un combattant reconnu et un personnage mystique. Durant cette phase difficile de l'histoire<br />
d'Algérie, sa famille fut obligée de s'exiler, de quitter le pays pour s'établir en territoire marocain.<br />
venu une cible sur laquelle les soldats<br />
tirent à bout pourtant. Les corps des<br />
victimes gisaient partout, dans toutes<br />
les rues de ces villes meurtries et<br />
sans défense. Les milices poussent<br />
l’horreur jusqu’à exécuter sommairement<br />
successivement des dizaines,<br />
voir des centaines d’Algériens qui,<br />
avant de mourir, devaient creuser<br />
leurs tombes. A Guelma, les prisonniers<br />
sont transportés en dehors de<br />
la ville, à Kef El-Boumba, près d’Héliopolis,<br />
où ils sont tous abattus. Des<br />
corps arrosés d’essence sont brûlés<br />
sur la place publique ou dans les<br />
fours à chaux. Des groupes entiers de<br />
prisonniers, enchaînés et alignés,<br />
sont écrasés par les roues de chars,<br />
des nourrissons sont pris par les<br />
pieds pour être projetés contre les rochers.<br />
Les blindés et l’artillerie, aidés<br />
par l’aviation, pilonnent toutes les<br />
«zones de dissidence». L’horreur avait<br />
atteint son comblé. De nombreux musulmans,<br />
dirigeants politiques et militants,<br />
du Parti du peuple algérien<br />
(PPA), des Amis du manifeste des libertés<br />
(AML) (dont le fondateur Ferhat<br />
Abbas) et de l’association des<br />
oulémas furent arrêtés. Lorsqu’une<br />
faction ou un douar demandait<br />
l’aman (le pardon), l’armée réclamait<br />
les coupables. Le 28 février 1946, le<br />
rapporteur de la loi d’amnistie ( qui<br />
fût votée) déclarait en séance :<br />
«Quatre mille cinq cents arrestations<br />
sont effectuées, quatre-vingt-dix-neuf<br />
condamnations à mort sont prononcées,<br />
soixante-quatre condamnations<br />
aux travaux forcés à temps. Deux<br />
mille cinq cents autres indigènes attendent<br />
encore d’être jugés.»<br />
<strong>La</strong> répression prend fin officiellement<br />
le 22 mai. L’armée organise des cérémonies<br />
de soumission où tous les<br />
hommes doivent se prosterner devant<br />
le drapeau français et répéter en<br />
chœur : «Nous sommes des chiens et<br />
Ferhat Abbas est un chien.»<br />
Des officiers exigent la soumission<br />
publique des derniers insurgés sur la<br />
plage des Falaises, non loin de Kherrata.<br />
Certains, après ces cérémonies,<br />
sont embarqués et assassinés. Pendant<br />
de long mois, les Algériens musulmans<br />
continuèrent à fuir pour se<br />
mettre à l’abri, au bruit de chaque<br />
mouvement suspect du colonialiste.<br />
Les évènements de Sétif, Guelma et<br />
Kherrata sont les précurseurs de<br />
lendemains encore plus sanglants<br />
mais aussi de la naissance de mouvements<br />
indépendantistes prêts à entrer<br />
en action pour libérer le pays<br />
du joug colonialiste. Le 8 mai 1945,<br />
plus de 45 000 Algériens ont trouvé la<br />
mort dans une répression jamais égalée.<br />
Ces tueries, au lieu d’asservir l’indigène,<br />
l’ont au contraire encouragé à<br />
réfléchir à la manière de faire plier<br />
l’ennemi. Le CRUA, né bien après la<br />
dissolution de l’OAS, a décidé de passer<br />
à l’action. Celle-ci surviendra le 1 er<br />
novembre 1945 quand ces mêmes indigènes<br />
ont décidé de découdre avec<br />
l’ennemi.<br />
(*) Source :<br />
Le professeur Mohammed<br />
ben Moussa Sharif
5 <strong>Juillet</strong><br />
8 Mai 1945 à Sétif<br />
Des pancartes et drapeau algériens sont déployés.<br />
Les pancartes portent les slogans < Libérez Messali>,<br />
“Vive l’Algérie libre et indépendante>, <<br />
Vive la charte de l’Atlantique>, < A bas le colonialisme>.<br />
Bouzid Saâl, qui refuse de baisser le drapeau<br />
algérien qu’il brandit, est assassiné par un policier à bout<br />
pourtant. Cela déclenche une émeute qui sera suivie<br />
d’une répression atroce. Au printemps 1945, l’ambiance<br />
est tendue parmi la population européenne. Des bruits alarmistes<br />
circulent sur un imminent soulèvement musulman.<br />
D’autant que l’Algérie connaît depuis quelques mois<br />
une situation alimentaire catastrophique, résultat de l’absence<br />
de presque tous les hommes valides. Messali Hadj<br />
est déporté à Brazzaville le 23 avril 1945. Le PPA organise,<br />
le 1er mai, dans tout le pays, des manifestations qui se veulent<br />
pacifiques et sans armes, et où pour la première fois<br />
est brandi un < drapeau algérien>. Les manifestations se<br />
sont passées dans le calme sauf à Alger et à Oran où ont<br />
eu lieu des affrontements avec la police ; la répression était<br />
brutale faisant plusieurs morts. Quelques jours plus tard,<br />
c’est l’annonce de la reddition allemande. C’est la fin de<br />
la guerre : des manifestations étaient prévues un peu partout<br />
pour le 8 mai.<br />
Répression et massacres<br />
A Sétif, le rassemblement séparé des manifestations officielles<br />
est autorisé à condition qu’il n’ait pas un caractère<br />
politique. Aucune bannière ou autre, symbole revendicatif<br />
n’est toléré. Un drapeau autre que celui de la France ne<br />
doit en aucun cas être déployé. Les slogans anti-français<br />
sont également interdis tout comme le port d’armes, de<br />
bâtons ou de couteaux. Les manifestants envahissent les<br />
rues dès 8 heures du matin. Estimés à plus de 10 000 personnes,<br />
ils se mettent en branle chantant l’hymne nationaliste<br />
Min Djibalin (du haut de nos montagnes). Ils défilent<br />
avec des drapeaux des pays alliés vainqueurs du nazisme.<br />
Bravant l’interdit, ils brandissent aussi des<br />
pancartes sur lesquelles des tracts significatifs sont inscrits<br />
comme < Libérez Messali>, > Nous voulons être vos<br />
égaux> ou > A bas le colonialisme>. Le pas est franchi.<br />
Quelques instants plus tard, et alors que la tension monte<br />
de plusieurs crans, c’est en chiens de faïence que se regardent<br />
manifestations et policiers déployés en grand<br />
nombre en cette journée de fête qui ne tardera pas à<br />
tourner au drame. <br />
met la poudre au feu. En tête de la manifestation, Aissa Cheraga,<br />
chef d’une patrouille de scouts musulmans, arbore<br />
le drapeau algérien, l’occasion pour le commissaire Olivieri<br />
de s’en emparer. Nul ne sait quelles étaient ses intentions<br />
mais c’est trop tard puisque la situation dégénère et<br />
prend une tournure tragique. Selon un témoin, des Européens,<br />
en marge de la manifestation, se précipitent sur la<br />
foule et y mettent leur grain de sel. Les porteurs des bandroles<br />
et des drapeaux refusent de céder aux injonctions<br />
des policiers. Un jeune homme de 26 ans, Bouzid Saâl, est<br />
abattu par un policier. Les autres policiers lui emboîtent<br />
le pas en ouvrant le feu à leur tour. C’est la panique générale.<br />
Il a fallu du temps pour que les choses reviennent à<br />
la normale. L’entrée persuasive des tirailleurs a fait<br />
craindre le pire. Mais, comme si tout le monde s’est donné<br />
le mot, la manifestation de Sétif fait tâche d’huile et un mouvement<br />
similaire est signalé dans différents villages envornnants.<br />
A Aïn Kebira, Beni Aziz, Amouchas, Kherrata et bien<br />
d’autres villages, les indigènes affichent bruyamment leur<br />
élan de solidarité à leur frères de Sétif.<br />
Le soir même, c’est la ville de Guelma qui plonge dans<br />
l’horreur. Le sous-préfet Achiary, un ancien résistant, ordonne<br />
de tirer sur les manifestants. Des renforts convergent<br />
vers la ville pour ramener le calme et, le cas échéant,<br />
utiliser la manière pour dissuader les manifestants à<br />
continuer leurs mouvements. Un bataillon d’infanterie<br />
de Sidi Bel Abbès arrive le 9 dans la journée pour évacuer<br />
les Européens > encerclés par les émeutiers.<br />
Les massacres des jours suivants<br />
Dans un télégramme daté du 11 mai 1945, le général de<br />
Gaulle, chef du gouvernement français provisoire, ordonne<br />
l’intervention de l’armée, sous le commandement<br />
du général Duval, qui mène une terrible répression contre<br />
la population indigène. <strong>La</strong> marine y participe grâce à son<br />
artillerie, ainsi que l’aviation. Le général Duval rassemble<br />
toutes les troupes disponibles, soit deux milles hommes.<br />
Ces troupes viennent de la Légion étrangère ; des tabors<br />
marocains, qui se trouvaient à Oran en passe d’être démobilisés<br />
et qui protestent contre cette augmentation imprévue<br />
de la durée de service, une compagnie de réserve de<br />
tirailleurs sénégalais d’Oran, des spahis de Tunis et des<br />
tirailleurs en garnison à Détif, Kherrata et Guelma.<br />
<strong>La</strong> répression, menée par l’armée et la milice, est d’une incroyable<br />
violence : exécutions sommaires, masacres de<br />
civils, bombardements de mechats. Le croiseur Duguay-<br />
Trouin et les contre-torpilleurs Le Triomphant, tirent plus<br />
de 800 coups de canon depuis la rade de Bejaia sur la région<br />
de Sétif. L’aviation bombarde plusieurs agglomérations.<br />
Une cinquantaine de < mechats> sont incendiées.<br />
Les automitrailleuses font leur apparition dans les villages<br />
et tirent à distance sur les populations. Les blindés<br />
sont relayés par les militaires arrivés en convois sur les<br />
lieux. De nombreux corps ne peuvent être enterrés. Ils sont<br />
jetés dans les puits, dans les gorges de Kherrata. Pendant<br />
deux mois, l’Est de l’Algérie connaît un déchaînement de<br />
folie meurtrière.<br />
Un journaliste américain écrira : < I twas an open season>,<br />
pour décrire la chasse à l’homme, à l’indigène devenu une<br />
cible sur laquelle les soldats tirent à bout pourtant. Les<br />
corps des victimes gisaient partout, dans toutes les rues<br />
de ces villes meurtries et sans défense. Les milices poussent<br />
l’horreur jusqu’à exécuter sommairement successivement<br />
des dizaines, voir des centaines d’Algériens qui,<br />
avant de mourir, devaient creuser leurs tombes. A Guelma,<br />
les prisonniers sont transportés en dehors de la ville, à Kef<br />
El-Boumba, près d’Héliopolis, où ils sont tous abattus. Des<br />
corps arrosés d’essence sont brûlés sur la place publique<br />
ou dans les fours à chaux. Des groupes entiers de prisonniers,<br />
enchaînés et alignés, sont écrasés par les roues de<br />
chars, des nourrissons sont pris par les pieds pour être<br />
projetés contre les rochers. Les blindés et l’artillerie,<br />
aidés par l’aviation, pilonnent toutes les < zones de dissidence>.<br />
L’horreur avait atteint son comblé. De nom-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
9<br />
, Pour célébrer la chute de l’Allemagne nazie, les nationalistes algériens des Amis du manifeste et de la liberté (AML) de Ferhat Abbas et du PPA<br />
(dissous) de Messali Hadj (en résidence surveillée) organisent un défilé à Sétif avec les drapeaux alliés en tête.<br />
Chronique d’un massacre<br />
Une armée dans toute sa barbarité. (Photo > D. R.)<br />
breux musulmans, dirigeants politiques et militants, du<br />
Parti du Peuple Algérien (PPA), des Amis du manifeste des<br />
libertés ( AML) (dont le fondateur Ferhat Abbas) et de l’association<br />
des oulémas furent arrêtés. Lorsqu’une faction<br />
ou un douar demandait l’aman (< le pardon>), l’armée réclamait<br />
les coupables. Le 28 février 1946, le rapporteur de<br />
la loi d’amnistie ( qui fût votée) déclarait en séance : <<br />
Quatre mille cinq cents arrestations sont effectuées,<br />
quatre-vingt-dix-neuf condamnations à mort sont prononcées,<br />
soixante-quatre condamnations aux travaux forcés<br />
à temps. Deux mille cinq cents autres indigènes attendent<br />
encore d’être jugés. ><br />
<strong>La</strong> répression prend fin officiellement le 22 mai. L’armée<br />
organise des cérémonies de soumission où tous les<br />
hommes doivent se prosterner devant le drapeau français<br />
et répéter en ch?ur : < Nous sommes des chiens et Ferhat<br />
Abbas est un chien. > des officiers exigent la soumission<br />
publique des derniers insurgés sur la plage des Falaises,<br />
non loin de Kherrata. Certains, après ces cérémonies,<br />
sont embarqués et assassinés. Pendant de long mois, les<br />
Algériens musulmans continuèrent à fuir pour se mettre<br />
à l’abri, au bruit de chaque mouvement suspect du colonialiste.<br />
Les évènements de Sétif, Guelma et Kherrata sont les<br />
précurseurs de lendemains encore plus sanglants mais<br />
aussi de la naissance de mouvements indépendantistes<br />
prêts à entrer en action pour libérer le pays du joug colonialiste.<br />
Le 8 mai 1945, plus de 45.000 Algériens ont trouvé la mort<br />
dans une répression jamais égalée. Ces tueries, au lieu d’asservir<br />
l’indigène, l’ont au contraire encouragé à réfléchir<br />
à la manière de faire plier l’ennemi.<br />
Le CRUA, né bien après la dissolution de l’OAS, a décidé<br />
de passer à l’action. Celle-ci surveindra le 1er novembre<br />
1945 quand ces mêmes indigènes ont décidé de découdre<br />
avec l’ennemi.
5 <strong>Juillet</strong><br />
<strong>La</strong> guerre d’Algérie a commencé à Sétif<br />
Neuf ans de préparation et de luttes internes<br />
,<strong>La</strong> crise de leadership au sein du parti a failli emporter le dernier espoir d’émancipation du peuple algérien du joug colonial.<br />
Car le MTLD, principal parti nationaliste,<br />
était le seul qui pouvait<br />
bousculer l’ordre établi par la<br />
puissance coloniale. En se trouvant<br />
devant l’inéluctable séparation<br />
entre le président et les<br />
membres du comité central, un<br />
groupe d’activistes a opté pour la<br />
solution qu’attendait la base depuis<br />
les événements de Sétif et<br />
Guelma en 1945 : le passage à<br />
l’action armée.<br />
Quels étaient alors les moments<br />
forts allant de la scission au passage<br />
à l’action en passant par la<br />
naissance du CRUA, le 23 mars<br />
1954 ?<br />
<strong>La</strong> crise au sommet du parti a<br />
connu son point de non retour<br />
lorsque la direction du parti avait<br />
appelé, le 10 décembre 1953,<br />
pour la tenue d’un congrès national<br />
algérien. Cette proposition,<br />
pour rappel, avait été rejetée lors<br />
du congrès tenu six mois plus<br />
tôt. Messali, en résidence surveillée<br />
à Niort, avait décidé alors<br />
d’utiliser tous les pouvoirs en sa<br />
possession pour que la direction<br />
ne réussisse pas dans cette entreprise.<br />
En estimant que le comité<br />
central se lançait dans une voie<br />
de réformisme, le président avait<br />
décidé de porter le débat dans la<br />
rue pour que l’opinion sache<br />
l’orientation déviationniste, selon<br />
lui, du comité central.<br />
Ces divergences étaient-elles surmontables<br />
? Les historiens qui<br />
ont étudié la question ont estimé<br />
que le différend concernait la<br />
ligne directrice du parti. Du coup,<br />
toute réconciliation n’aurait été<br />
qu’éphémère. L’historien algérien,<br />
Mohamed Harbi, dans son<br />
livre «Aux origines du FLN», a expliqué<br />
que les divergences remontaient<br />
au second congrès du<br />
MTLD d’avril 1953. Il a retenu notamment<br />
quatre points :<br />
1) <strong>La</strong> recherche d’appuis extérieurs<br />
2) <strong>La</strong> politique électorale<br />
3) L’unité nord-africaine<br />
Dates clés<br />
1515 - Fondation d'un Etat Algérois par les<br />
frères Barberousse..<br />
Ben Allal Ben Embarek, lieutenant d'Abd-el-<br />
Kader, tué au combat dans la province<br />
d'Oran, le 11 novembre 1843.<br />
Koléa, détruite par un tremblement de terre<br />
en 1825, puis rebâtie, a des rues étroites<br />
plantées d'arbres et bordées de maisons à<br />
l'européenne.<br />
1830 - Invasion française.<br />
1847. - Reddition d'Abd el-Kader.<br />
Au carrefour des rues de la <strong>République</strong> et <strong>La</strong>moricière,<br />
il y avait un monument en l'honneur<br />
du général <strong>La</strong>moricière (1806 - 1865), le<br />
fondateur des Régiments de Zouaves.<br />
1830. Prise d Alger; tentative d'occupation des<br />
villes de Blida, Médéa, Mers-el-Kébir, Oran et<br />
Bône (Annaba).<br />
1831. Occupation définitive d'Oran qui avait<br />
été d'abord cédé au frère du bey de Tunis;<br />
première occupation de Bône<br />
1832. Occupation définitive de Bône et du<br />
Sahel d'Alger. Reconnaissance de l'émir Abdel-Kâder<br />
par les tribus de la pleine d'Eghris<br />
1833. Attaque d'Oran par Abd-el-Kâder. Prise<br />
d'Arzew, de Mostaganem et de Bougie (Béjaia)<br />
1834. Traité du général Desmichels avec Abdel-Kâder.<br />
1835. Expédition dans la plaine de la Métidja.<br />
Combats de Mostaganem. Occupation de<br />
4) <strong>La</strong> politique des alliances en Algérie<br />
Cette situation a engendré deux<br />
tendances qui n’étaient pas<br />
prêtes à céder sur leurs positions<br />
de principe. L’un des animateurs<br />
de la troisième voie dite<br />
neutraliste, Ahmed Mahsas, a<br />
constaté que : «les risques de la<br />
division se sont aggravées plus<br />
que jamais. Nous sommes toujours<br />
en présence de deux parties<br />
hostiles».<br />
C’est à ce moment-là, il y a cinquante<br />
quatre ans, un certain<br />
23 mars, que naissait le CRUA. <strong>La</strong><br />
réunion s’est déroulée dans une<br />
école coranique Al Rachad. Elle<br />
a regroupé quatre militants : Boudiaf,<br />
Ben Boulaid, Dekhli et Bouchebouba.<br />
Toutefois, si les deux<br />
premiers avaient fait partie de<br />
l’organisation paramilitaire du<br />
MTLD, l’OS, les deux derniers<br />
étaient des politiques proches<br />
des centralistes. Le comité s’est<br />
fixé pour objectif la réunification<br />
du parti et son orientation vers<br />
l’action armée à court terme.<br />
Selon Gilbert Meynier : «Pour<br />
Boudiaf, l’objectif était de convoquer<br />
un congrès unitaire où<br />
toutes les tendances seraient représentées,<br />
y compris les anciens<br />
de l’OS, écartés depuis 1951<br />
et interdits de congrès en 1953,<br />
de refuser de reconnaître la délégation<br />
provisoire messaliste…».<br />
Cependant, si les centralistes<br />
étaient bien représentés, l’autre<br />
tendance en conflit ne voyait<br />
qu’un parti pris flagrant contre<br />
elle. En effet, Messali ne voyait<br />
dans les membres du CRUA que<br />
l’ombre des centralistes et à leur<br />
tête Hocine <strong>La</strong>houel, membre influent<br />
du comité central. En effet,<br />
pourvu que Messali n’ait pas le<br />
dernier mot, les centralistes, il<br />
faut le dire, étaient prêts à jouer<br />
toutes les cartes. D’ailleurs, dés<br />
le premier numéro du patriote,<br />
Rachgoun; expédition de Mascara.<br />
1836. Première occupation de Tlemcen; expédition<br />
dans la province de Titeri; combat de<br />
la Sikkak; occupation de la Galle. Première<br />
expédition de Constantine.<br />
1837. Traité de la Tafna; deuxième expédition<br />
de Constantine, prise de cette ville.<br />
1838. Établissement de camps près de Koléa,<br />
Blida et El-Harrouch. Création de Philippeville<br />
(Skikda).<br />
1839. Occupation de Blida; prise de Djidjelli.<br />
Expédition des Portes de fer. Défaite des lieutenants<br />
d'Abd el-Kâder à la Chifa.<br />
1840. Défense héroïque de Mazagran. Prise de<br />
Cherchell, de Médéa, de Miliana<br />
1841. Combat du Sig. Destruction des villes de<br />
l'émir, Boghar et Taza. Expéditions de Takdemt<br />
et de Mascara. Occupation de Mila.<br />
1842. Destruction de Sebdou. Occupation de<br />
Tlemcen. Expédition de Kabylie et entre le<br />
Chélif et la Mina. Reconnaissance sur Tébessa.<br />
1843. Expédition chez les Beni-Menasser et<br />
les Beni-Monad. Fondation de Téniet-el-<br />
Had, de Tiaret, d'Orléansville et de Ténès. Expédition<br />
dans l'Ouarsenis. Prise de la smala<br />
d'Abd-el-Kader. Nombreux combats contre<br />
l'émir dans la province d'Oran. Expéditions<br />
dans le Sud, au djebel Amour et chez les<br />
Oulad-Sidi-Cheikh.<br />
1844. Prise de Biskra et de Dellys. Création de<br />
Batna, soumission des Flitta et des Amraoua.<br />
bulletin du CRUA, le parti pris<br />
contre Messali était clairement affiché.<br />
<strong>La</strong> raison à cela, selon<br />
Harbi était que : «Le financement<br />
du bulletin et son impression<br />
sont assurés par une somme de<br />
deux cent mille francs (2 000 NF)<br />
avancés par le comité central».<br />
Les soupçons qui pesaient sur<br />
Dekhli et Bouchebouba étaient<br />
avérés exacts lorsque les deux<br />
tendances, centralistes et messalistes,<br />
préparaient séparément<br />
leurs congrès pour l’été 1954. Dekhli<br />
et Bouchebouba ont soutenu<br />
nettement le point de vue<br />
du comité central au sein du<br />
CRUA, alors que Boudiaf et Ben<br />
Boulaid, les deux autres<br />
membres, ont estimé inutile la<br />
convocation du congrès centraliste.<br />
Ils ont proposé la préparation<br />
de l’insurrection immédiate<br />
afin que la lutte réunisse tout le<br />
peuple autour de cet idéal. Mais<br />
la tergiversation des centralistes<br />
a conduit le groupe à se scinder.<br />
Ceux qu’on appelait les activistes<br />
du CRUA ont convoqué, le 25 juin<br />
1954, à l’insu des deux autres<br />
membres, une réunion à laquelle<br />
ont participé vingt-deux militants<br />
de l’organisation spéciale. C’était<br />
le fameux groupe des 22. Ce jourlà<br />
la discussion était orientée<br />
dans le sens de réunir les conditions<br />
pour défier un système colonial<br />
injuste qui a trop duré. <strong>La</strong><br />
décision d’affronter la puissance<br />
coloniale n’a rencontré aucune<br />
opposition parmi les présents.<br />
Ils ont, pour ce faire, créé un<br />
conseil collégial contenant cinq<br />
membre : Boudiaf, Ben Boulaid,<br />
Bitat, Ben M’hidi et Didouche.<br />
Leur mission était de réunir les<br />
conditions pour qu’une action<br />
armée soit déclenchée dans un<br />
temps relativement court.<br />
Cependant, le conseil de la révolution<br />
a pris définitivement la<br />
place du CRUA après la tenue de<br />
la conférence des cadres, de la<br />
tendance centraliste, le 1 er juillet<br />
à Alger. Cette conférence a scellé<br />
la division entre centralistes et<br />
activistes. Au reproche de Zoubir<br />
Bouadjadj, membre des 22, à l’encontre<br />
des centralistes les accusant<br />
de trahir le CRUA, Bouchebouba<br />
a répondu : «Le CRUA<br />
n’existe plus. Nous l’avons formé<br />
pour éviter la scission, nous<br />
avons échoué : le CRUA doit disparaître».<br />
En outre, lorsque les 13-15 juillet,<br />
Messali a convoqué, à Hornu, en<br />
Belgique, le congrès de la rupture<br />
qui a prononcé la dissolution<br />
du comité central et l’exclusion<br />
des ses principaux responsables,<br />
le conseil de la révolution<br />
ne pouvait dorénavant compter<br />
que sur ses forces.<br />
Il ne restait, par conséquent, au<br />
conseil de la révolution qu’à<br />
convaincre les Kabyles de se<br />
joindre à eux pour se lancer véritablement<br />
dans l’action armée.<br />
<strong>La</strong> rencontre entre Ben Boulaid<br />
pour le groupe des 22 et Krim<br />
Belkacem et Amar Ouamrane<br />
pour la «fédération du MTLD» de<br />
Kabylie, a eu lieu au café maure,<br />
El Arich, à Alger.<br />
Dans «les fils de la toussaint»,<br />
Yves Courrière a raconté cette<br />
entrevue avec plus de précision<br />
: «Ben Boulaid est très étonné de<br />
voir Krim et Ouamrane l’approuver.<br />
<strong>La</strong> Kabylie est prête à se<br />
joindre à vous, dit Krim Belkacem,<br />
mais tu connais notre sympathie<br />
pour le vieux Messali». En<br />
somme, fin août, Krim et Ouamrane<br />
se sont ralliés aux 22 et Krim<br />
a été désigné pour être le sixième<br />
membre du conseil de la révolution.<br />
C’était le « comité des six »,<br />
lequel a été rejoint par les<br />
membres de la délégation extérieur<br />
du MTLD composée de Ben<br />
Bella, Khider et Ait Ahmed. Ce<br />
nouveau groupe, dit des neuf, a<br />
rédigé un appel à tous les Algériens<br />
les exhortant de rejoindre<br />
Expédition de <strong>La</strong>ghouat. Bataille d'Isly gagnée<br />
sur les troupes marocaines.<br />
1845. Insurrection du Dahra réprimée par le<br />
colonel Pélissier. Soumission de l'Ouarsenis.<br />
Expédition dans l'Aurès. Massacre de la colonne<br />
Montagnac à Sidi Brahim. Soumission<br />
des Hachem-Gharaba et du Hodna. Expédition<br />
chez les Trara.<br />
1846. Soumission des Flitta. Défaite de Bou-<br />
Maza près de Ténès. Abd-el-Kâder est repoussé<br />
de la Kabylie. Fondation d'Aumale.<br />
1847. Défaite des Oulad-Dlellal, soumission<br />
des Nemencha. Reddition de Bou-Maza. Expédition<br />
entre Mila et Collo. Reddition d'Abd<br />
eI-Kâder (23 décembre).<br />
1848. Soumission de Moulay-Mohammed et<br />
de Ahmed, ex-bey de Constantine. Expédition<br />
chez les Beni-Senous.<br />
1849. Siège et prise de Zaatcha. Soumission<br />
de Bou-Saâda. - 1850. Expédition en Kabylie<br />
et dans l'Aurès<br />
1851. Bou-Baghla se soulève en Kabylie. Expédition<br />
entre Béjaia et Collo.<br />
1852. Création de Djelfa. Prise de <strong>La</strong>ghouat.<br />
1833. Expédition en Kabylie et à Ouargla.<br />
Bou-Baghla est tué chez les Beni-Mellikech.<br />
1854. Expédition en Kabylie.<br />
1856. Expédition à Dra-el-Mizan<br />
1857. Soumission de la grande Kabylie<br />
1857. Expédition sur la frontière du Maroc.<br />
1860. Insurrection du Hodna. Pacification de<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
10<br />
le nouveau parti, le FLN, dont le<br />
seul but était la libération nationale.<br />
Pour conclure, l’intransigeance<br />
de chaque partie à imposer sa<br />
perception de ce que devait être<br />
la conduite du mouvement national<br />
a rendu l’union chimérique.<br />
En revanche, le point positif,<br />
s’il en est un, était que chaque<br />
militant, étant libéré de la discipline<br />
partisane, pouvait décider,<br />
en son âme et conscience, du<br />
chemin à suivre.<br />
Ce dernier a bien entendu choisi<br />
le plus raisonnable et le plus bénéfique<br />
pour l’avenir de ses enfants.<br />
Pour Harbi : « la base ne<br />
pensait qu’à l’action. Pour cette<br />
raison, toute entreprise qui pourrait<br />
rompre avec le byzantinisme<br />
où s’enfonçait les discours avait<br />
des chances de succès ». Finalement,<br />
malgré la division tant douloureuse<br />
des politiques algériens<br />
au sein du principal parti nationalistes,<br />
l’histoire ne retiendra<br />
que l’immense ?uvre de ses<br />
meilleurs fils : la libération du<br />
pays. D’ailleurs, un proverbe ne<br />
dit-il pas que : « A quelque chose<br />
malheur est bon ».<br />
Sources :<br />
1) Yves Courrière : les fils de la Toussaint.<br />
2) Mohamed Harbi : aux origines du<br />
FLN.<br />
3) Gilbert Meynier : histoire intérieure<br />
du FLN.<br />
L'indignation rétrospective ne<br />
suffit pas à comprendre les raisons<br />
pour lesquelles des<br />
hommes et des femmes ont pu<br />
être ravalés, pendant des décennies,<br />
au rang de sous citoyens<br />
par une <strong>République</strong> qui se proclamait<br />
patrie des droits de<br />
l'homme.<br />
René Gallissot, <strong>La</strong> <strong>République</strong><br />
française et les indigènes, L'Atelier,<br />
2007.<br />
la Kabylie orientale.<br />
1862. Prise du Chérif Mohammed ben Abdallah<br />
à Ouargla.<br />
1864. Insurrection des Oulad-Sidi-Cheïkh de<br />
Si-<strong>La</strong>zreg, dans la province d'Oran, et de Si-<br />
<strong>La</strong>la dans le Sud de la province d'Alger. Insurrection<br />
dans la Kabylie orientale.<br />
1865. Soumission des Oulad-Sidi-Cheikh.<br />
1868. Insurrection dans le Sud de la province<br />
de Constantine<br />
1871. Grande insurrection des Kabyles de la<br />
province d'Alger et de celle de Constantine<br />
1876. Insurrection d'EI Amri.<br />
1881. Insurrection de Bou-Amama dans le<br />
Sud-Ouest de la province d'Oran.<br />
Jusqu'en 1870, l'Algérie n'était restée essentiellement<br />
qu'un territoire militaire, dont<br />
l'administration chaotique reflétait l'indécision<br />
qui régnait en France sur le statut du<br />
pays. Elle fut régie d'abord par des généraux<br />
en chef : Bourmont, Clauzel, Berthezène, Savary,<br />
Voirol (1830-34); puis par des gouverneurs<br />
: d'Erlon, Clauzel, Damrémont, Valée,<br />
Bugeaud, Cavaignac, Changarnier, Charon,<br />
d'Hautpoul, le maréchal Randon; ensuite par<br />
un ministre de l'Algérie et des colonies,<br />
Pierre-Napoléon (1858), Prosper de Chasseloup-<strong>La</strong>ubat<br />
(1859); enfin, après 1861, par un<br />
gouvernement général : le maréchal Pelissier,<br />
le maréchal Mac-Mahon, le général<br />
Chanzy.
5 <strong>Juillet</strong><br />
Portrait<br />
Messali Hadj, né à<br />
Tlemcen le 16 mai<br />
1898 et mort à Gouvieux,<br />
dans l’Oise, le 3 juin<br />
1974, est un homme politique<br />
algérien. Il réclame<br />
dès 1927, l'indépendance de<br />
l'Algérie. Il est le fondateur<br />
du Parti du peuple algérien<br />
(PPA), du Mouvement pour<br />
le triomphe des libertés démocratiques<br />
(MTLD) et du<br />
Mouvement national algérien<br />
(MNA). Après une lutte<br />
de pouvoir entre ses mouvements<br />
et le Front de libération<br />
nationale (FLN) au<br />
cours de laquelle, il sera la<br />
cible d’attentats, il cède à ce<br />
dernier la conduite des<br />
mouvements prônant l'indépendance<br />
de l'Algérie. Il<br />
se retire alors de la vie politique.<br />
Emprisonné à<br />
maintes reprises et déporté,<br />
il continue à militer après la<br />
dissolution de l'ENA par le<br />
Front populaire en janvier<br />
1937. Il participe alors à la<br />
fondation du Parti du<br />
peuple algérien (PPA) le<br />
11 mars 1937. Il est élu président<br />
du parti à sa fondation.<br />
En 1954, il fonde le Mouvement<br />
national algérien<br />
(MNA). Assigné à résidence<br />
Angoulême (Charente), Messali<br />
Hadj perd peu à peu son<br />
influence.<br />
A partir de cette date, les<br />
tensions entre les deux organisationsindépendantistes<br />
vont donner lieu à des<br />
règlements de compte sanglants,<br />
après le refus du<br />
MNA de se dissoudre dans le<br />
FLN, il y aurait eu dans cette<br />
lutte fratricide 10 000 morts<br />
et 25 000 blessés. En 1958,<br />
Messali est libéré et choisit<br />
de résider en France, mais<br />
reste sous surveillance policière.<br />
Le 18 septembre 1959,<br />
Messali Hadj échappe de<br />
peu à un attentat pendant<br />
un footing avec ses gardes<br />
du corps à Chantilly. En 1961,<br />
il ordonne à ses partisans de<br />
céder les pouvoirs aux représentants<br />
du Gouvernement<br />
Provisoire Algérien<br />
pour mener à bien les négociations<br />
avec la France.<br />
Messali Hadj n'obtient la<br />
nationalité algérienne qu'en<br />
1965. Il meurt en 1974 sans<br />
avoir pu revoir son pays<br />
natal. Décédé à Gouvieux le<br />
3 juin, il est inhumé le<br />
7 juin à Tlemcen.<br />
N. R.<br />
L’année 1927<br />
Les membres de l’ENA<br />
sont Salah Bouchafa, Messali<br />
Hadj, Amar Imache,<br />
Hadj-Ali Abdelkader, Djeffal,<br />
Si Djilani, Belkacem<br />
Radjef et Belghoul, qui en<br />
jouèrent les principaux<br />
rôles. El-Emir Khaled El-<br />
Hassani Ben El-Hachemi<br />
(connu sous le nom de<br />
l’émir Khaled El-Hassani<br />
Ben El-Hachemi, petit-fils<br />
de l’émir Abd El-Kader),<br />
exilé en Égypte en fut le<br />
président d’honneur.<br />
Hadj ali Abd El-Kader est<br />
membre du Comité directeur<br />
du Parti communiste<br />
français (PCF) quand le<br />
Komintern demande que<br />
l’action du parti se développe<br />
parmi les travailleurs<br />
nord-africains.<br />
Hadj ali Abd el-Kader<br />
fonde alors l’Etoile nordafricaine<br />
dans ce but.<br />
Cette organisation, selon<br />
la volonté de Hadj ali Abd<br />
el-Kader, est fondamentalement<br />
laïque et compte<br />
se battre en complète collaboration<br />
avec la classe<br />
ouvrière française. Elle recrute<br />
la majeure partie de<br />
ses militants dans l’émigration<br />
ouvrière algérienne<br />
à dominante kabyle,<br />
militants qui sont placés<br />
sous haute<br />
surveillance par le Service<br />
des affaires indigènes<br />
nord-africaines de la Préfecture<br />
de police de Paris.<br />
Les buts de cette association<br />
sont «la défense des<br />
intérêts sociaux, matériels<br />
et moraux» des travailleurs<br />
de cette région.<br />
En 1927, elle accueille Messali<br />
Hadj. Ce jeune Tlemcénien<br />
a des points de vue<br />
qui divergent de ceux de<br />
Hadj Ali Abdel-Kader.<br />
moins préoccupé par la<br />
laïcité et faisant état de<br />
points de vue nationalistes,<br />
il veut engager le<br />
mouvement sur le terrain<br />
politique en se faisant<br />
porte-parole d’une revendication<br />
d’indépendance<br />
de l’Afrique du Nord<br />
(Maroc, Algérie et Tunisie<br />
au sein d’un ensemble national<br />
que serait l’Algérie).<br />
Il est membre et permanent<br />
du Parti communiste<br />
et il est adhérent et militant<br />
de la CGTU. Le parti<br />
comprenait 4000 membres<br />
en 1924.<br />
«Le peuple algérien qui est<br />
sous la domination française<br />
depuis un siècle n’a<br />
plus rien à attendre de la<br />
bonne volonté de l’impérialisme<br />
français pour<br />
améliorer notre sort.»<br />
Le discours de Messali<br />
Hadj est influencé à la fois<br />
par «l’islam politique» et<br />
le nationalisme arabe.<br />
Messali Hadj avait été le<br />
premier homme politique<br />
à réclamer l’indépendance<br />
de l’Algérie publiquement<br />
lors d’un congrès anticolonial<br />
à Bruxelles les 10 et 15<br />
février 1927, sous l’égide<br />
du Parti communiste.<br />
Parmi les revendications<br />
politiques essentielles apparaissent<br />
:<br />
1. L’indépendance totale<br />
de l’Algérie.<br />
2. Le retrait total des<br />
troupes d’occupation.<br />
3. Constitution d’une<br />
armée nationale, d’un gouvernement<br />
national révolutionnaire,<br />
d’une Assemblée<br />
constituante élue au<br />
suffrage universel. Le suffrage<br />
universel à tous les<br />
degrés et l’éligibilité dans<br />
toutes les assemblées<br />
pour tous les habitants de<br />
l’Algérie. <strong>La</strong> langue arabe<br />
considérée comme langue<br />
officielle.<br />
4. <strong>La</strong> remise en totalité à<br />
l’Etat algérien des<br />
banques, des mines, des<br />
chemins de fer, des forts et<br />
services publics accaparés<br />
par les conquérants.<br />
5. <strong>La</strong> confiscation des<br />
grandes propriétés accaparées<br />
par les féodaux alliés<br />
des conquérants, les<br />
colons et les sociétés financières<br />
et la restitution<br />
aux paysans des terres<br />
confisquées. Le respect de<br />
la moyenne et petite propriété.<br />
Le retour à l’Etat<br />
algérien des terres et forêts<br />
accaparées par l’Etat<br />
français.<br />
6. L’instruction gratuite<br />
obligatoire à tous les degrés<br />
en langue arabe.<br />
7. <strong>La</strong> reconnaissance par<br />
l’Etat algérien du droit syndical,<br />
de coalition et de<br />
grève, l’élaboration des<br />
lois sociales.<br />
8. Aide immédiate aux fellahs<br />
pour l’affectation à<br />
l’agriculture de crédits<br />
sans intérêts pour l’achat<br />
de machines, de semences,<br />
d’engrais, organisation<br />
de l’irrigation et<br />
amélioration des voies de<br />
communications.<br />
9. Abolition immédiate du<br />
Code de l’indigénat et de<br />
toutes les mesures d’exception.<br />
10. Amnistie pour tous<br />
ceux qui sont emprisonnés,<br />
en surveillance spéciale<br />
ou exilés pour infraction<br />
au Code de l’indigénat<br />
ou pour délit politique.<br />
11. Liberté de voyage absolue<br />
pour la France et<br />
l’étranger.<br />
12. Liberté de presse, d’association,<br />
de réunions,<br />
droits politiques et syndicaux.<br />
13. Remplacement des délégations<br />
financières élues<br />
au suffrage restreint, par<br />
un Parlement national algérien<br />
élu au suffrage universel.<br />
14. Suppression des communes<br />
mixtes et des terri-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
11<br />
Messali dénonce l’odieux code de l’indigénat<br />
, L’Etoile nord-africaine (ENA) était une association fondée en France en 1926 par un noyau de travailleurs émigrés<br />
essentiellement kabyles, devenue un parti politique comprenant plusieurs militants.<br />
Vers la fin de la servitude des Algériens. (Photo > D. R.)<br />
toires militaires, remplacement<br />
de ces organismes<br />
par des assemblées municipales<br />
élues au suffrage<br />
universel.<br />
15. Accession de tous les<br />
Algériens à toutes les fonctions<br />
publiques sans aucune<br />
distinction, fonction<br />
égale, traitement égal pour<br />
tous.<br />
16. L’instruction obligatoire<br />
en langue arabe accession<br />
à l’enseignement à<br />
tous les degrés, création<br />
de nouvelles écoles<br />
arabes. Tous les actes officiels<br />
doivent être simultanément<br />
rédigés dans les<br />
deux langues.<br />
17. Application des lois sociales<br />
et ouvrières. Droit<br />
au secours de chômage<br />
aux familles algériennes<br />
en Algérie et aux allocations<br />
familiales.<br />
L’année 1928<br />
En 1928, l’Etoile nord-africaine<br />
se sépare du Parti<br />
communiste français<br />
(PCF) dont la «bolchevisation»<br />
voulue par le Komintern<br />
l’éloigne de ce qui<br />
sera sa revendication principale,l’autodétermination.<br />
Les autorités françaises<br />
dénoncent la «menace<br />
pour l’autorité de l’Etat».<br />
L’ENA est dissoute le 20<br />
novembre 1929.<br />
LNR
5 <strong>Juillet</strong><br />
<strong>La</strong> longue marche de l’Algérie<br />
indépendante<br />
,En cinquante ans d’existence, l’Algérie peut se targuer d’avoir atteint des seuils de développement –économique<br />
et humain- que très peu de nations auraient atteint en si peu de temps. Cela dit, le parcours n’a pas été sans embûches,<br />
loin s’en faut. En effet, des périodes difficiles ont entravé sa marche vers le progrès et la démocratie : la<br />
décennie 1990 restera, pour les Algériens, une page noire dans leur histoire contemporaine, mais qui les rendra<br />
plus immunisés contre toute tentative de déstabilisation, à l’image de celles qui broient actuellement nombre de<br />
notre région.<br />
Reste, en ce cinquantenaire historique,<br />
à consolider les réformes<br />
démocratiques et à parachever la<br />
construction des institutions. Car,<br />
sur ce registre, beaucoup reste à<br />
faire. Pour mieux cerner la question<br />
des réformes en Algérie, il y<br />
a lieu de la situer dans son<br />
contexte historique, en suivant<br />
les différentes étapes qu’a traversées<br />
le pays depuis son indépendance<br />
en 1962 : de Ben Bella<br />
à Bouteflika, en passant par Boumediene,<br />
Chadli et le HCE, des<br />
progrès ont été enregistrés, mais<br />
le pays a toujours connu des périodes<br />
de régression plus ou<br />
moins dangereuses. Un bilan<br />
s’impose.<br />
Du monolithisme politique au multipartisme<br />
Première option adoptée lors du<br />
congrès de Tripoli en juin 1962,<br />
par le Conseil national de la révolution<br />
algérienne (CNRA) : pour<br />
la réalisation de la «révolution<br />
démocratique populaire», calqué<br />
sur le modèle socialiste en vogue.<br />
Une révolution socialiste d’essence<br />
collectiviste allait donc inspirer<br />
des institutions régentées,<br />
dès 1963, par un parti unique, le<br />
FLN qui veille à l’application du<br />
programme et de ce qui était appelé<br />
« les tâches de la révolution<br />
démocratique », qui se traduit essentiellement<br />
par une politique<br />
sociale au profit des masses pour<br />
élever le niveau de vie des travailleurs,<br />
et une démocratisation<br />
de l’enseignement, l’accès au logement<br />
et aux soins, et la libération<br />
de la femme. »<br />
Les réformes démocratiques ont<br />
commencé réellement en 1967,<br />
avec l’organisation des premières<br />
élections municipales, qui seront<br />
suivi dix ans plus tard des premières<br />
élections législatives.<br />
D’autres rendez-vous politiques,<br />
comme le référendum sur la<br />
Constitution de 1976, auront<br />
parmi un large débat sur les différentes<br />
préoccupations citoyennes,<br />
dans les limites de ce<br />
que pouvait autoriser le système<br />
politique en place.<br />
Cela dit, l’ère Boumediène était<br />
beaucoup plus tournée vers la<br />
consolidation du développement<br />
économique, à travers notamment<br />
les politiques d’industrialisation<br />
et de nationalisation et le<br />
renforcement de l'indépendance<br />
nationale.<br />
Sous le règne de Houari Boumediène,<br />
toute opposition politique<br />
était réduite à néant ; mais des<br />
mouvements politiques de<br />
gauches, tels que le PAGS, ont pu<br />
trouver des brèches pour s’exprimer<br />
et activer, notamment<br />
dans les syndicats et les médias.<br />
Même si le dirigisme du FLN empêchait<br />
encore toute ouverture<br />
démocratique réelle.<br />
L’avènement de Chadli Bendjedid,<br />
en 1979, allait ouvrir une nouvelle<br />
ère à tous les niveaux de la<br />
vie nationale, en engageant le<br />
pays sur la voie du libéralisme<br />
économique, mais avec le maintien<br />
du monolithisme politique.<br />
Le pays connut alors ses premiers<br />
soubresauts populaires,<br />
avec les manifestations de 1980<br />
en Kabylie, et de 1986 à Constantine,<br />
qui sonnaient comme de sérieux<br />
avertissements. En 1986,<br />
les débats largement médiatisés<br />
sur la Charte nationale permettront<br />
pour la première fois à des<br />
voix «discordantes» d’avoir droit<br />
de cité.<br />
Mais ce qui va marquer sérieusement<br />
cette période, c’est le<br />
nouveau cap économique pris<br />
par le pouvoir, avec la fameuse<br />
campagne de «restructuration»<br />
des entreprises nationales, piloté<br />
par l’ex-Premier ministre, Abdelhamid<br />
Brahimi, aujourd’hui en<br />
exil, et qui, aggravé par le crash<br />
pétrolier de1986, plongera l’Algérie<br />
dans une crise inédite. Incapable<br />
de se redresser, le pays<br />
se trouve rapidement confrontée<br />
à une explosion populaire incontrôlable.<br />
L’Algérie, sortie du «cauchemar»<br />
Spontanés ou manipulé, les événements<br />
d’octobre 1988 imposeront<br />
de nouvelles ruptures déchirantes<br />
: fin du parti unique,<br />
autorisation d’une presse privée<br />
et partisane. Cela appelait l’adoption<br />
d’une nouvelle Constitution.<br />
Une Constitution qui fixait tout un<br />
train de réformes politiques, institutionnelles<br />
et économiques,<br />
mais qui manquait d’un vrai<br />
consensus national. Pour preuve,<br />
les premières élections pluralistes,<br />
de juin 1990, donnaient la<br />
majorité à un parti fasciste qui<br />
menaçait de remettre en cause<br />
tous les acquis arrachés de haute<br />
lutte. Une deuxième expérience,<br />
les législatives de décembre 1991,<br />
accentueront le danger d’un<br />
ordre intégriste fatal pour la démocratie<br />
et la souveraineté du<br />
pays.<br />
L’interruption du processus électoral<br />
qui suivit la démission de<br />
Chadli Bendjedid mettra fin au<br />
«cauchemar», mais posera vite le<br />
problème de légitimité politique<br />
à pourvoir aux nouvelles institutions<br />
conçues sous la pression<br />
des événements.<br />
<strong>La</strong> création d’une instance suprême<br />
–le Haut comité d’Etat-, et<br />
du conseil consultatif pour se<br />
substituer respectivement à la<br />
présidence déclarée vacante et<br />
une Assemblée populaire nationale<br />
arrivée à sa fin de mandat, ne<br />
se fera pas sans difficultés : le<br />
premier président du HCE, Mohamed<br />
Boudiaf, sera assassiné<br />
au bout de trois mois. S’en suit<br />
une décennie de violence terroriste<br />
qui a menacé la <strong>République</strong><br />
dans ses fondements même.<br />
C’est sous la menace permanente<br />
d’un terrorisme déchainé, aidé<br />
par des organisations internationales<br />
influentes, et dans un<br />
contexte de crise économique<br />
accrue, que l’armée algérienne<br />
reprend l’initiative pour organiser<br />
des élections présidentielles qui<br />
porteront, en 1995, l’ancien ministre<br />
de la Défense Liamine Zeroual<br />
à la tête de l’Etat.<br />
L’Algérie commençait à redresser<br />
la barre en continuant à lutter<br />
sur deux fronts : la lutte contre les<br />
groupes islamistes armés qui,<br />
aculés, pratiquaient la politique<br />
de la terre brûlée, et la consolidation<br />
du processus de reconstruction<br />
des institutions. C’est<br />
alors que seront organisées les<br />
deuxièmes élections législatives<br />
pluralistes, en 1997, suivi des<br />
élections locales durant la même<br />
année, alors que le terrorisme<br />
continuait son entreprise macabre.<br />
En 1999, le président Zeroual<br />
cède sa place à Abdelaziz Bouteflika<br />
pour permettre la mise en<br />
œuvre du projet de la réconciliation<br />
nationale, qui sera adopté<br />
par voie de référendum.<br />
Ce projet va permettre la reddition<br />
de milliers d’islamistes<br />
armés. En parallèle, Bouteflika<br />
initie des réformes structurelles<br />
et politiques profondes, dont certaines,<br />
comme la réforme de<br />
l’éducation et celle du statut personnel,<br />
ont rencontré une farouche<br />
résistance dans les milieux<br />
conservateurs.<br />
<strong>La</strong> relance économique qui bénéficie<br />
de recettes pétrolières exceptionnelles,<br />
se traduit par le<br />
lancement de grands projets<br />
–l’Autoroute Est-Ouest, Tramway,<br />
Métro, modernisation des voies<br />
ferroviaires, trois nouvelles villes<br />
en construction…-, mais aussi<br />
par une nette amélioration du<br />
niveau de vie des Algériens, et<br />
d’efforts soutenus pour relancer<br />
la vie culturelle, pour laquelle<br />
d’importants budgets sont alloués.<br />
De nouvelles réformes institutionnelles<br />
et politiques sont également<br />
prévues pour le restant<br />
du troisième mandat du président,<br />
lesquels sont censés impulser<br />
plus de démocratisation<br />
dans les institutions, tout en<br />
veillant à la stabilité du pays,<br />
dans une conjoncture régionale<br />
instable.<br />
Les dernières élections législatives<br />
ont montré la voie.<br />
<strong>La</strong>rbi Balta<br />
<strong>La</strong> NR 4371 — Jeudi 5 juillet 2012<br />
12<br />
EXPOSITION<br />
DE PHOTOS<br />
INÉDITES SUR LA<br />
COLONIALISATION<br />
FRANÇAISE<br />
Le coup de gueule<br />
de Ouahab Hebbat<br />
Le Médias Club s’apprête<br />
à organiser une<br />
exposition de photos<br />
inédites sur la colonisation<br />
française en Algérie. Interrogé<br />
par «Algeriepatriotique»,<br />
Ouahab Hebbat,<br />
directeur général de<br />
l’agence New Press, a indiqué<br />
que l’exposition, qui<br />
s’étalera sur toute l’année<br />
du Cinquantenaire de l’Indépendance,<br />
comprend<br />
des images jamais diffusées<br />
jusque-là et donc inconnues<br />
du grand public.<br />
L’exposition aura lieu à la<br />
Maison de la presse Tahar-<br />
Djaout, à Alger. «Ce projet<br />
me tenait à cœur. Je réfléchis<br />
depuis des mois à la<br />
manière de contribuer à<br />
cet événement important<br />
de l’histoire de notre pays<br />
et l’idée m’est venue d’organiser<br />
cette exposition<br />
dans le cadre du club médias<br />
qui vient juste d’être<br />
inauguré», souligne Ouahab<br />
Hebbat, qui regrette,<br />
néanmoins, que sa<br />
louable initiative n’ait pas<br />
eu l’écho escompté : «Je<br />
ne comprends pas comment<br />
les organismes économiques<br />
que j’ai contactés<br />
pour participer à cette<br />
démarche patriotique<br />
n’ont pas daigné répondre<br />
à mes nombreuses sollicitations<br />
pour les y associer<br />
sous la forme qu’ils veulent»,<br />
se demande notre<br />
interlocuteur, profondément<br />
déçu. Quoi qu’il en<br />
soit, le Médias Club a obtenu<br />
«l’aval et les encouragements»<br />
de la direction<br />
de la Maison de la presse<br />
pour l’organisation de<br />
cette exposition qui drainera<br />
sûrement beaucoup<br />
de monde, tant le sujet<br />
passionne et les photos<br />
attirent de par leur caractère<br />
original. «Les photos<br />
que nous allons exposer<br />
n’ont jamais été diffusées<br />
à ce jour.<br />
Elles comportent des<br />
scènes terribles de la colonisation<br />
française et sont<br />
une preuve matérielle des<br />
horreurs commises par la<br />
France en Algérie depuis<br />
1832 jusqu’à l’indépendance<br />
et même après,<br />
précise le directeur de New<br />
Press, puisque des photos<br />
montrant les actes terroristes<br />
commis par l’OAS seront<br />
également exposées<br />
pour la première fois.»<br />
Nous souhaitons une<br />
grande réussite à cette<br />
manifestation qui lèvera le<br />
voile sur une partie de<br />
l’histoire récente de l’Algérie<br />
qui est loin d’avoir<br />
livrée tous ses secrets.<br />
Sarah H.
5 <strong>Juillet</strong><br />
Célébration du cinquantenaire de l’Indépendance<br />
Participation d’élus russes et sudafricains<br />
, Coopération est sans doute<br />
le maître mot de la présence<br />
des représentants des mairies<br />
d’Ekaterinbourg de la fédération<br />
de Russie et de leurs homologues<br />
de la ville de Nelson<br />
Mandela Bay d’Afrique du Sud<br />
qui sont depuis ce dernier lundi<br />
à Annaba.<br />
Ils répondent à l’invitation que leur a<br />
adressée la commune d’Annaba à<br />
venir participer aux festivités du cinquantenaire<br />
de l’indépendance de<br />
l’Algérie. Durant les deux précédentes<br />
journées, les membres de la<br />
délégation de la Fédération de Russie<br />
composée d’élus, scientifiques, techniciens<br />
et hommes et femmes de culture<br />
se sont penchés sur les acquis<br />
enregistrés par l’Algérie durant les 50<br />
précédentes années. Ils se sont bien<br />
imprégnés des avancées technologiques<br />
et scientifiques qui leur ont<br />
été présentées lors de leurs différentes<br />
étapes de leur visite dans les<br />
murs de celle qui fut, il y a quelques<br />
années, capitale de l’acier et un des<br />
poumons de la pétrochimie et de l’industrie<br />
ferroviaire. Durant leur petite<br />
croisière en mer, au palais de la culture<br />
et des arts Mohamed Boudiaf un<br />
des héros de la guerre de libération, à<br />
la basilique St Augustin ou lors de<br />
leur visite des ruines romaines, les<br />
hôtes russes se sont bien imprégnés<br />
de l’aménagement de la 4ème ville<br />
d’Algérie, de ses atouts et atours. Ils<br />
sont pris connaissance du patrimoine<br />
culturel et de la volonté des pouvoirs<br />
publics de veiller à la protection de<br />
Publicité<br />
l’environnement tout en maintenant<br />
le cap sur le développement économique<br />
et social. Les contacts qui se<br />
sont multipliés entre les élus des<br />
deux entités communales représentatives<br />
de la grande cité d’Ekateringbourg<br />
de la Fédération de Russie et<br />
celle de Annaba ont servis d’occasion<br />
de dresser et présenter des perspectives<br />
pour l’élaboration et la réalisation<br />
de projets conduits dans le cadre<br />
d’un accord de coopération. Point<br />
d’orgue de ces contacts, la fructification<br />
des échanges qui a vu plusieurs<br />
élus des deux pays s’exprimer. Chacun<br />
a pu réaffirmer son soutien à<br />
toute initiative allant dans le sens des<br />
intérêts des populations des deux<br />
villes d’Algérie et de Russie. Cependant,<br />
ce sont l’organisation et le déroulement<br />
des festivités marquant le<br />
cinquantenaire de l’indépendance de<br />
l’Algérie qui ont beaucoup plus caractérisé<br />
les discussions. C’est que ces<br />
festivités ont démarré depuis plusieurs<br />
jours à Annaba. Les membres<br />
des deux délégations de Russie et<br />
d’Afrique du Sud qui séjourneront<br />
jusqu’au 6 juillet dans la capitale de<br />
l’Edough ont pris connaissance de<br />
l’animation prévue dans le cadre d’un<br />
riche programme élaboré par la commune<br />
de Annaba. Celle-ci a vu grand<br />
pour bien marquer ces festivités commémoratives<br />
du cinquantenaire de<br />
l’indépendance de notre pays. A ces<br />
hôtes, elle a proposé de nombreuses<br />
visites touristiques de différents sites<br />
historiques, culturels et industriels<br />
comme le complexe des engrais<br />
phosphaté Fertial. Comme elle a<br />
prévu des prises de contact aves des<br />
adhérents de la Chambre de Commerce<br />
et d’Industrie « Seybouse » Annaba<br />
ainsi que des cérémonies officielles<br />
d’inauguration, baptisation et<br />
mise en service d’infrastructures de<br />
divers secteurs socio-économiques.<br />
D’où l’intérêt manifesté par plusieurs<br />
élus de la ville d’Ekateringbourg qui<br />
s’étaient préalablement imprégnés du<br />
cinquantenaire de l’indépendance de<br />
l’Algérie. Au moyen d’un interprète,<br />
plusieurs d’entre eux ont tenu à exprimer<br />
leur satisfaction quant à l’excellence<br />
des relations multiformes<br />
entre les deux pays. Le gala artistique<br />
animé par la chanteuse libanaise<br />
Elissa durant la soirée de ce dernier<br />
lundi a été une autre occasion que<br />
n’ont pas ratée les représentants élus<br />
des deux grandes cités. Ils ont en<br />
effet discuté de nombreuses opportunités<br />
d’échanges dans tous les domaines.<br />
Aujourd’hui 4 juillet, les contacts devraient<br />
se poursuivre pour une<br />
meilleure approche et une vision plus<br />
lointaine des relations. Et lorsqu’au<br />
programme il est prévu que ces<br />
contacts sont élargis au directeur de<br />
l’exécutif de wilaya, il y a de quoi dire<br />
que les échanges vont être très fructueux<br />
entre les deux villes. Les produits<br />
artisanaux de divers horizons<br />
de la grande Algérie seront présentés<br />
aussitôt achevée la cérémonie d’inauguration<br />
du salon de l’artisanat de<br />
Annaba.<br />
A. Djabali<br />
Nlle <strong>République</strong> / 5/7/12 / ANEP 927931<br />
ALGÉRIE<br />
<strong>La</strong> NR 4371 — Jeudi 5 juillet 20122<br />
13<br />
Guerre de Libération<br />
Parution du livre-récit d’Ait Mehdi<br />
Mohamed Amokrane<br />
«Le dur et invraisemblable parcours d’un combattant»,<br />
(Mémoires et témoignage) d’Aït Mehdi Mohamed<br />
Amokrane sur la guerre de Libération nationale<br />
vient de paraitre aux éditions Rafar. Récit<br />
d’un acteur de la lutte armée pour l’indépendance<br />
de l’Algérie écrit avec le concours de notre<br />
confrère Aït Mouhoub Mustapha. Le témoignage<br />
du lieutenant de l’Armée de libération nationale<br />
(ALN), Mokrane Aït Mehdi constitue, lit-on dans le<br />
prologue d’Aït Mouhoub «un instrument d’une<br />
importance inestimable». D’abord pour «les historiens<br />
avides de sources fiables pour approcher la<br />
vérité des faits historiques» dont celle ayant trait à<br />
la wilaya III, région qui a abrité le Congrès de la<br />
Soummam. <strong>La</strong> sortie du livre coïncidant avec la<br />
célébration du cinquantenaire de l’Indépendance<br />
de l’Algérie rappelle pertinemment l’importance<br />
de la sauvegarde et la transmission de la mémoire<br />
par l’écriture des acteurs et actrices de l’histoire<br />
du mouvement de Libération nationale. Le<br />
témoignage d’Aït M Mohamed Amokrane, dans un<br />
des chapîtres sur la traversée de la ligne Morice,<br />
illustre la valeur historique du récit de Si Mokrane.<br />
Il est question de la nuit du 28 au 29 avril 1958,<br />
plus connu par «<strong>La</strong> bataille de Souk Ahras» au<br />
cours de laquelle «620 moudjahidine trouvèrent la<br />
mort, dont 120 sur les 150 affectés à la wilaya III».<br />
Durant cette même nuit, cette unité de l’ALN, que<br />
le sous-lieutenant Ben Messabih, originaire de<br />
Mascara, compagnon de Si Mokrane «trouva la<br />
mort». Aussi c’est au cours de cette nuit qualifiée<br />
par Aït Mouhoub «de véritable boucherie» que<br />
«les deux officiers déserteurs de l’armée française<br />
ont émis le vœu de rentrer en Algérie et de participer<br />
à l’effort de de la guerre menée par le<br />
peuple algérien en wilaya III» en prenant<br />
connaissance des pratiques barbares perpétrées<br />
par l’armée française, à l’intérieur du pays et<br />
«d’une guerre disproportionnée, menée par les<br />
Algériens contre la quatrième puissance militaire<br />
de l’Otan», souligne-t-on. Si Mokrane est natif de<br />
Draâ El Mizan le 23 mars 1931. Il fut arrêté le 14<br />
septembre 1957 dans ce qui est connu «l’Affaire<br />
des officiers algériens», et incarcéré à la Maison<br />
d’arrêt de Fresnes à Paris jusqu’à janvier 1958.<br />
Après qu’il ait regagné la Tunisie après sa<br />
deuxième évasion en mars 1958, Si Mokrane a pris<br />
part à la Bataille de Souk Ahras. Après l’indépendance,<br />
Si Mokrane intégra les rangs de la Gendarmerie<br />
nationale.Il fut le fondateur de l’école de la<br />
Gendarmerie nationale de Sidi Bel-Abbès, baptisée<br />
au nom du martyr Ben Messabih. Il a été notamment<br />
commandant du groupement régional<br />
de l’Est, Constantine. Décédé en juin 2011, Si Mokrane,<br />
en étant un valeureux combattant durant<br />
la guerre de libération a contribué à l’édification<br />
de l’Algérie indépendante. Par son récit contenu<br />
dans le livre en question, le défunt Si Mokrane a<br />
apporté aussi son édifice dans la sauvegarde de la<br />
mémoire collective pour mieux appréhender nos<br />
lendemains.<br />
Karima Bennour
5 <strong>Juillet</strong><br />
Histoire d’Algérie<br />
Commerces, paix et guerres<br />
Le débarquement<br />
Sidi Ferruch ou Sidi Fredj est une<br />
plage à 30 kilomètres à l’ouest d’Alger.<br />
Ce lieu historique du débarquement<br />
des Français qui a commencé<br />
le 14 juin 1830, a permis à<br />
l'armée française la prise d'Alger<br />
survenue le 5 juillet. Première opération<br />
qui a conduit à la destruction<br />
du pouvoir des Deys, et de la<br />
milice turque appelée Régence<br />
d'Alger, dépendance au moins nominale<br />
de l'Empire ottoman. <strong>La</strong><br />
date de ce débarquement est retenue<br />
comme le premier jour de la<br />
colonisation de l’Algérie. Cette<br />
conquête est la résultante de relations<br />
bilatérales entre l’Algérie et<br />
la France extrêmement tendues<br />
par le non règlement d’un contentieux<br />
financier qui traîne depuis<br />
1796, date à laquelle Bonaparte<br />
remporte une éclatante victoire<br />
sur l’Autriche. L’empereur s’est<br />
fait livré par l’Algérie d’importantes<br />
quantités de blé pour assurer<br />
le ravitaillement de sa campagne<br />
d’Egypte en 1798. Depuis<br />
cette date, les Français n’ont cessé<br />
de différer le règlement de leur<br />
dette. Le 16 mai 1830, les troupes<br />
de la flotte française prennent le<br />
départ du port de Toulon en direction<br />
d’Alger pour officiellement<br />
selon l’histoire enseignée dans les<br />
manuels scolaires, punir le Dey<br />
d’Alger pour avoir frappé avec son<br />
éventail le consul de France, Pierre<br />
Deval, qui devait s’expliquer sur le<br />
grand retard reproché à son pays<br />
dans le règlement de la dette<br />
contractée par Napoléon lors de<br />
sa campagne d’Egypte. <strong>La</strong> Régence<br />
d’Alger avait approvisionné<br />
en blé, en bestiaux, en laine les<br />
armées du<br />
«Directoire» vers 1795-1796 sans<br />
que les crédits aient été honorés,<br />
sauf partiellement sous la «Restauration».<br />
Ce contentieux entre<br />
la France et la Régence d’Alger allait<br />
dégrader les relations commerciales<br />
et politiques entre les<br />
autorités des deux pays.<br />
Organisation du protectorat<br />
De 1515 jusqu'en 1830, date de la<br />
conquête de l'Algérie par la France,<br />
la Régence d'Alger est un État qui<br />
s'étend depuis l'est d'Oujda à<br />
l'Ouest jusqu’à <strong>La</strong> Calle à l'Est. En<br />
droit province de l'Empire ottoman,<br />
elle dispose progressivement,<br />
de fait, d'une large autonomie.<br />
Après la défaite de Charles<br />
Quint en 1541, sa capitale, Alger,<br />
devient le port le plus puissant de<br />
la rive sud de la Méditerranée.<br />
Sous la domination ottomane, son<br />
appellation en arabe est : wilayates<br />
el-Djezaïr.; à l'époque des Deys,<br />
ou nommée parfois appelée Mamelakat<br />
el-Djezaïr en arabe.<br />
Cette province est formée par plusieurs<br />
beyliks, qui sont sous l'autorité<br />
des Beys, puis de Deylic<br />
sous l'autorité de Deys. <strong>La</strong> Régence<br />
est gouvernée par des Pa-<br />
chas, des Aghas, des Beys et des<br />
Deys. Les provinces, ou Beylic,<br />
sont : Alger, Constantine, Oran,<br />
Mascara, Mazouna, Tlemcen et<br />
Médéa.<br />
Les guerres franco-algériennes<br />
En 1681, le 18 octobre le Dey<br />
d’Alger déclare officiellement<br />
la guerre à la France de Louis<br />
XIV.<br />
En 1681, les barbaresques capturent<br />
un navire de guerre français<br />
et emmènent à Alger le capitaine<br />
et l'équipage pour les réduire en<br />
esclavage. En 1682-1683, l'amiral<br />
français Abraham Duquesne commande<br />
par deux fois le bombardement<br />
d’Alger, et força le Dey à restituer<br />
tous les esclaves chrétiens.<br />
En représailles au bombardement<br />
de Duquesne les Turcs supplicient<br />
le consul de France, le Père Jean Le<br />
Vacher en l'utilisant comme boulet<br />
de canon humain. Les Algériens<br />
en représailles à la violence<br />
des bombardements attachèrent<br />
à la bouche de leurs canons plusieurs<br />
Français de distinction dont<br />
les membres mutilés vinrent tomber<br />
sur les bâtiments français<br />
En 1684, le vice-amiral de<br />
Tourville dirige une expédition<br />
vers Alger. Des négociations<br />
aboutirent et la paix fut signée.<br />
<strong>La</strong> paix que Tourville avait<br />
conclue avec les Algériens fut de<br />
nouveau rompue par ces derniers.<br />
Le maréchal d'Estrées, en 1688,<br />
avec ses navires de guerre torpilla<br />
la ville d'Alger avec plus de 10 000<br />
bombes. À la suite de cette expédition,<br />
la paix fut définitivement<br />
conclue avec la Régence. Elle dura<br />
plus d'un siècle. Mais les corsaires<br />
algériens, tout en respectant le pa-<br />
villon de la France, n'en continuèrent<br />
pas moins à écumer la mer<br />
méditerranée, rançonnant et causant<br />
de grands ravages sur les<br />
côtes d’Espagne. 1811, les accords<br />
de paix vont vite après cette date<br />
être remis en cause notamment<br />
après que David Bacri nommé par<br />
Napoléon consul général à Alger<br />
est décapité en 1811 par ordre du<br />
Dey d’Alger. Cet évènement est la<br />
première étape qui va envenimer<br />
les rapports entre les Français et<br />
les ottomans.<br />
<strong>La</strong> crise économique va<br />
provoquer la conquête de<br />
l’Algérie<br />
Le Dey Hussein, ne pouvant prélever<br />
sa part majoritaire sur l’ancienne<br />
dette concernant les livraisons<br />
de blé par l’Algérie, ni sur<br />
les nouvelles transactions commerciales<br />
toujours pas réglées,<br />
convoque le consul français Deval<br />
pour normaliser les situations des<br />
dettes de la France.<br />
C’est donc suite à ce conflit commercial<br />
que survient l’affaire du<br />
«coup d'éventail». Cet incident<br />
qualifié de diplomatique sera le<br />
casus belli pour déclarer la guerre<br />
au Régent Le Dey Hussein d’Alger<br />
représentant l’empire ottoman qui<br />
voit sa trésorerie faire banqueroute.<br />
Les revenus de la Régence avec le<br />
déclin de ses forces navales n’a<br />
plus les faramineux revenus que<br />
lui procuraient les 35 galères composant<br />
la force de frappe d’Alger<br />
contrôlant l’ensemble du trafic<br />
maritime en Méditerranée. Il est<br />
important de préciser que la marine<br />
algérienne imposait aux différentes<br />
flottes pénétrant en mer<br />
Méditerranée un impôt, pour assu-<br />
rer leur protection contre les pirateries<br />
ou les agressions de pays<br />
tiers. D’autres évènements ont<br />
marqué cette période par plusieurs<br />
confrontations navales dont<br />
celle qui a vu s’affronter la Marine<br />
algérienne à l’expédition américaine<br />
en 1815, ou avec les Marines<br />
britanniques et hollandaises en<br />
août 1816 au large de la baie d’Alger.<br />
Britanniques et Hollandais subirent<br />
de lourdes pertes et sont repoussés<br />
vers le large ; toutefois<br />
l’armada algérienne perd également<br />
un grand nombre de navires.<br />
Révoltes internes<br />
<strong>La</strong> Régence d’Alger avec la limitation<br />
du commerce extérieur est<br />
affaiblie par une dissidence interne<br />
de la paysannerie, des montagnards,<br />
et des commerçants. <strong>La</strong><br />
révolte débutera en 1802, pour<br />
s’aggraver jusqu’à la veille du débarquement<br />
français en 1832.<br />
Cette scission entre la population<br />
et les représentants du protectorat<br />
ottoman est consécutive aux<br />
pertes qu’enregistre le Trésor public<br />
et à la décision d’augmenter<br />
trop forts les impôts.<br />
Les populations vont ouvertement<br />
afficher leur désir de se débarrasser<br />
des dignitaires Turcs en leur<br />
déclarant la guerre. Sur le plan militaire,<br />
la flotte d'Alger se retrouve<br />
vite en position de faiblesse pour<br />
contenir les attaques des flottes<br />
européennes. A partir de 1815, les<br />
navires de guerres français et britanniques<br />
dominent la Méditerranée.<br />
Alger résiste aux persécutions<br />
des flottes étrangères. Le<br />
dernier bombardement de la ville<br />
fut l’ œuvre de la Marine britannique.<br />
(Lord Exmouth).<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
14<br />
,<strong>La</strong> colonisation française trouve ses racines dans les échanges politiques et commerciaux qu’avaient entretenu Français et Algériens durant les<br />
siècles précédant le débarquement de 1832 à Sidi Fredj. Alger disposait à cette époque d’une puissance maritime redoutable à plusieurs égards.<br />
Les bateaux de guerre étaient entièrement usinés dans les ports d’Algérie, dotés d’une redoutable supériorité maritime et de forteresses au niveau<br />
des principaux ports. Les Algériens vont s’imposer comme protecteurs des trafics maritimes circulant en Méditerranée contre la piraterie<br />
et les pays tiers. Alger avait même imposé un impôt à tous les pays qui traversaient la grande bleue pour commercer.<br />
L’attaque d’Alger le 4 juillet 1830. (Photo > D. R.)<br />
Guerres et commerces<br />
<strong>La</strong> France commerçait traditionnellement<br />
avec l’Afrique du Nord<br />
et avait des concessions qu’elle<br />
avait achetées aux Algériens, et<br />
que reconnurent les sultans turcs<br />
suzerains du Dey d’Alger en 1518,<br />
1692, 1694 et 1801.<br />
<strong>La</strong> situation avantageuse des<br />
concessions d'Afrique, leur richesse<br />
en grains, en bestiaux, en<br />
laines, en cire, en miel, etc., la facilité<br />
de répandre les marchandises<br />
de fabrique française dans<br />
l'intérieur de l'Afrique, enfin les<br />
produits de la pêche du corail,<br />
procuraient de grands avantages<br />
aux compagnies qui, avant la révolution,<br />
exploitaient les concessions.<br />
Ce commerce fut languissant<br />
et presque nul durant les<br />
longues guerres de la révolution et<br />
de l'empire.<br />
<strong>La</strong> force navale de l'Angleterre diminua<br />
les échanges commerciaux<br />
de la France outre mer sans pour<br />
autant affecter les négoces avec<br />
Alger qui restera neutre dans les<br />
conflits armés entre européens.<br />
Cependant, en 1798, lors de la<br />
campagne d'Égypte, les Algériens,<br />
contraints par <strong>La</strong> Porte, déclarèrent<br />
la guerre à la <strong>République</strong> française<br />
et attaquèrent la Galle, établissement<br />
où se trouvaient alors<br />
environ 200 hommes et vingt canons.<br />
Ils s'en emparèrent et en détruisirent<br />
les fortifications.<br />
Mais cette hostilité forcée n'eut<br />
pas de suite, et en 1801, après la<br />
paix d'Amiens, les marchands français<br />
reparurent sans obstacle sur<br />
la côte africaine.(*).<br />
A. K.<br />
Sources : Historia [archive],<br />
«<strong>La</strong> conquête d'Alger», page 320 France- Ministère<br />
de la marine et des colonies
5 <strong>Juillet</strong><br />
Guerre de Libération<br />
, <strong>La</strong> guerre d’Algérie longtemps escamotée par les autorités française a été meurtrière, totale et parfois particulièrement barbare.<br />
Marine, aviation, infanterie, légions<br />
étrangères, parachutistes, chasseurs<br />
alpins, gendarmerie, police, appelés<br />
du service militaire, réservistes,<br />
services de renseignements et barbouzes<br />
de l’Organisation de l’armée<br />
secrète (OAS) avaient pour mission<br />
de maintenir l’ordre colonial, de pacifier<br />
le pays contre des insurgés<br />
qu’on appela avec dérision les fellagha,<br />
nom donné aux insurgés qui ne<br />
tarderont pas à être qualifiés de terroristes.<br />
<strong>La</strong> réalité est dissimulée à l’opinion<br />
publique tant nationale qu’internationale,<br />
pour occulter les horreurs<br />
que commettent certains régiments<br />
de l’armée régulière usant d’exécutions<br />
sommaires, et surtout de la<br />
torture. Les premières années de la<br />
guerre seront à l’avantage de l’Armée<br />
de libération nationale qui est devenue<br />
experte en guérilla rurale.<br />
L’organisation politique du FLN avait<br />
fait de ce parti un symbole de liberté<br />
au plan internationale et nationale<br />
pour balayer les thèses françaises<br />
d’une intégration à la Soustelle.<br />
L’image de la France se salit.<br />
Les chefs du FLN sont accueillis et<br />
respectés dans les pays socialistes,<br />
dans les pays arabes, dans les capitales<br />
du Tiers-Monde, à la conférence<br />
de Bandung en 1955, ainsi qu’à<br />
l’ONU et aux Etats-Unis par le jeune<br />
sénateur qui deviendra le président<br />
des Américains, John Kennedy. <strong>La</strong><br />
question algérienne s’internationalise<br />
avec les attentats d’Alger, avec<br />
la grève des 8 jours largement observée<br />
par les Algériens pour légitimer<br />
les actions du FLN. L’enjeu était de<br />
permettre à l’ALN, coupée de ses<br />
bases logistiques, de reconstituer<br />
ses forces, et mettre un terme à la<br />
propagande des dirigeants de la IV e<br />
<strong>République</strong>. Avec l’arrivée de de<br />
Gaulle au pouvoir, les Français misent<br />
toujours sur une victoire militaire,<br />
les parachutistes ont tous les<br />
pouvoirs, et les pieds-noirs conservent<br />
l’espoir que l’Algérie sera éternellement<br />
française. Mis à part<br />
quelques intellectuels s’offusquant<br />
que la torture continue à être pratiquée,<br />
et de quelques centaines de<br />
sympathisants pour la cause nationale<br />
pour la plupart communistes, le<br />
reste de l’opinion ne comprend pas<br />
que les autochtones revendiquent<br />
non plus les mêmes droits, mais l’indépendance.<br />
L’année 1954<br />
C'est essentiellement par la presse<br />
que la population avait appris l'insurrection.<br />
Le 1 er novembre, jour férié,<br />
on n'avait pas beaucoup écouté la<br />
radio mais le 2 novembre, tout le<br />
monde fut au courant. Tous les journaux<br />
titrèrent sur l'insurrection. Peu<br />
de texte, mais des photos parlantes,<br />
une carte impressionnante des lieux<br />
où s'étaient produits les attentats<br />
et les noms en caractère gras des<br />
sept morts (deux civils européens,<br />
trois militaires européens, deux civils<br />
musulmans) alertèrent l'opinion publique.<br />
Pour dire vrai, les Européens ne s'affolèrent<br />
pas et si les éditions se vendirent<br />
mieux que d'habitude, c'était<br />
en raison de ce super fait divers que<br />
l'on annonçait à grand fracas. Les<br />
Algérois n'avaient rien entendu des<br />
bombes qui avaient explosé aux<br />
quatre coins de leur ville. Seuls les<br />
voisins des points stratégiques visés<br />
avaient entendu l'explosion d'un<br />
vague pétard. Ce ne pouvait être<br />
bien grave. En revanche, la simultanéité<br />
des attentats montrait clairement<br />
que cette manifestation était<br />
bien coordonnée, donc qu'il fallait se<br />
méfier. Mais ce n'était pas suffisant<br />
pour engendrer la panique. <strong>La</strong> population,<br />
ce 2 novembre 1954, fut loin<br />
de mesurer l'importance de ce qui se<br />
passait. Et puis la violence, le risque<br />
étaient monnaie courante dans le<br />
folklore pied-noir.<br />
Après les attentats meurtriers du 1 er<br />
novembre 1954, plus connus sous le<br />
vocable de «Toussaint rouge» par<br />
les Français, allait se développer durant<br />
8 ans une guerre pas comme les<br />
autres, entre deux armées et deux<br />
populations. <strong>La</strong> population algérienne<br />
qui a été spoliée de ses<br />
meilleures terres dès le début de<br />
l’invasion française sera de nouveau<br />
déracinée par l’administration coloniale<br />
pour être parquée et encadrée<br />
dans des camps de fortune,<br />
pour l’empêcher de ravitailler les<br />
Le Congrès de la Soummam<br />
Le 20 août 1956 s'est tenu dans un hameau,<br />
près du village d'Ifri, le congrès<br />
de la Soummam, un des évènements<br />
les plus marquants de la guerre d'Algérie.<br />
Pendant plusieurs jours, la région a<br />
vécu dans un huis clos sécuritaire indispensable<br />
à la réussite de ce<br />
conclave. C’est le colonel Amirouche,<br />
farouche opposant aux colonialistes,<br />
qui est chargé de la sécurité des<br />
congressistes.<br />
<strong>La</strong> plateforme de la Soummam devait<br />
faire le point sur la situation militaire et<br />
politique, élaborer les perspectives générales,<br />
et définir les moyens d’action<br />
et de communication. Des centaines de<br />
insurgés en provisions alimentaires,<br />
en armes, en hommes, et en argent.<br />
2 350 000 Algériens vivent dans des<br />
conditions lamentables dans plus<br />
de 2 000 «centres de regroupent».<br />
5 000 000 vivent dans des bidonvilles<br />
sous le contrôle des SAS. De<br />
1954 à 1957 les troupes de l’Armée<br />
de libération nationale causent l’essentiel<br />
des pertes subies par les différents<br />
corps de l’armée française, ce<br />
qui oblige Paris à instaurer l’état<br />
d’urgence dans une partie de l’Algérie<br />
le 1 er avril 1955. Les occupants<br />
peuvent désormais contrôler par<br />
des laissez-passer la circulation des<br />
personnes, suspendre le cas échéant<br />
les déplacements, limiter drastiquement<br />
les libertés de la presse, arrêter<br />
sur simple présomption, emprisonner<br />
indéfiniment les suspects.<br />
C’est à cette date que sera décidée<br />
l’envoi de renfort prit dans les<br />
contingents des appelés. 200 000<br />
soldats appelés débarquent en janvier<br />
1956 en Algérie en renfort des effectifs<br />
déjà opérationnels, ils seront<br />
400 000 à la fin de l’année, et 450 000<br />
en 1957. Le service militaire est rallongé<br />
à 27 mois. Les militaires de<br />
carrière, les spahis et les harkis verront<br />
leurs effectifs augmenter considérablement.<br />
<strong>La</strong> guerre atteint son<br />
paroxysme de terreur et de violences<br />
le 20 août 1955 lorsqu’un soulèvement<br />
de paysans est réprimé de<br />
manière sauvage par des bombardements<br />
par avions et artillerie. Près<br />
de Batna, non loin de là, à Tizint, village<br />
situé à 70 kilomètres de Khenchela,<br />
des légionnaires ouvrent le<br />
feu sur des civils invalides qui discutaient,<br />
huit furent tués sur le coup,<br />
deux blessés graves furent achevés ;<br />
dix-sept personnes dont une petite<br />
fille furent abattues, selon ce que<br />
rapporte d’après les faits qu’il a<br />
constaté sur place Jean Daniel dans<br />
l’Express, ajoutant qu’en cette période<br />
«trois jours avant Noël, la région<br />
de Batna a subi une opération<br />
en règle de ratissage. Bombardement<br />
par avions et artillerie et incendie<br />
massif ont entièrement rasé un<br />
douar. En Kabylie, au douar Irdjama<br />
dans la commune mixte de Taher, un<br />
caïd impopulaire dont les abus et la<br />
corruption avaient été dénoncés depuis<br />
des années, c'est-à-dire bien<br />
avant que la rébellion ne commence,<br />
a été abattu par les maquisards.<br />
Soixante-cinq maisons ont été incendiées.<br />
<strong>La</strong> population est passée<br />
presque entièrement au maquis».<br />
Les tueries dans le Constantinois en<br />
ce 20 et 21 août 1955 constitueront<br />
le point culminant de la barbarie<br />
dont feront encore preuve les autorités<br />
coloniales. D’après les rapports<br />
faits par l’administration des éléments<br />
algériens sous le contrôle du<br />
FLN s’en sont aveuglément pris aux<br />
Européens, notamment à Philippeville<br />
(Skikda) et El Halia. «71 civils européens<br />
et des dizaines de musulmans<br />
profrançais sont massacrés à<br />
la hache et au couteau. <strong>La</strong> répression<br />
fera officiellement 1 273 victimes,<br />
bien plus en réalité. Soustelle donne<br />
carte blanche à l’armée. Dans l’Est,<br />
la psychose devient permanente.<br />
Pour les Européens, chaque musulman<br />
est un égorgeur potentiel, et<br />
tous les Français deviennent des ratonneurs<br />
par le droit à la légitime défense.<br />
L’escalade de la guerre totale est sur<br />
des pentes de plus en plus raides ;<br />
elle se poursuivra jusqu’à l’indépendance.<br />
Au début de l’année 1956, la<br />
France se trouve engagée dans une<br />
forme nouvelle de conflit sur le territoire<br />
algérien : la guérilla. Conscient<br />
des capacités nécessaires pour<br />
mener cette nouvelle sorte de guerre<br />
et voyant les possibilités que peuvent<br />
apporter les hélicoptères dans<br />
ces engagements d'un nouveau type,<br />
le général de Maricourt, commandant<br />
de l'Air en Algérie, propose un<br />
nouveau concept d'action pour les<br />
troupes aériennes qu'il résume par<br />
la formule : «Il est plus facile à un oiseau<br />
de marcher qu'à un serpent de<br />
voler.» Il s'agit d'armer les hélicoptères<br />
qui auront à transporter des<br />
hommes capables d'interventions<br />
rapides. Ces combattants seront des<br />
aviateurs et des commandos destinés<br />
à être transportés par hélicoptères<br />
et à combattre au sol après le<br />
travail fait par l’aviation de chasse et<br />
les bombardiers.<br />
Selon Guy Pervilé, les effectifs ne furent<br />
pas tous employés de la même<br />
moudjahiddine étaient venus avec leurs<br />
colonels de wilaya Si M’hamed, Ouamrane,<br />
Mohamed Saïd, Ben Tobbal, Zighout,<br />
Ben M’Hidi, Abane Ramdane,<br />
<strong>La</strong>rbi Ben M’hidi, Zighout Youcef, Krim<br />
Belkacem et bien d’autres chefs historiques<br />
militaires ou civils.<br />
<strong>La</strong> révolution algérienne est connue et<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
15<br />
façon. Leur grande majorité fut affectée<br />
à des missions statiques de «quadrillage»,<br />
destinées à assurer la sécurité<br />
des personnes et des biens dans<br />
l’Algérie utile, avec le renfort des<br />
«unités territoriales» recrutées parmi<br />
les réservistes français d’Algérie et<br />
de plusieurs catégories de «supplétifs»<br />
musulmans (harkis, goumiers,<br />
groupes mobiles de protection rurale,<br />
moghaznis des Sections administratives<br />
spécialisées, groupes<br />
d’autodéfense des villages). Pendant<br />
ce temps, les troupes d’intervention<br />
(légionnaires, parachutistes, commandos<br />
de l’air et de la marine...) devaient<br />
traquer les unités «rebelles»<br />
dans leurs bastions montagneux,<br />
déclarés «zones interdites». L’aviation<br />
fournit ses moyens de transports,<br />
trois «groupes d’appui tactique»<br />
(avions de liaison, de reconnaissance<br />
et d’appui aux troupes<br />
terrestres), et deux groupes d’hélicoptères<br />
(le troisième étant rattaché à<br />
l’«aviation légère de l’armée de<br />
terre»). Elle s’illustra surtout le 22 octobre<br />
1956 en interceptant l’avion<br />
marocain transportant les chefs de<br />
la délégation extérieure du FLN (Ben<br />
Bella, Khider, Aït Ahmed et Boudiaf)<br />
qui négociaient secrètement avec le<br />
président du Conseil Guy Mollet.<br />
De son côté, la marine surveillait les<br />
côtes, et réussit le 16 octobre 1956<br />
l’arraisonnement du navire égyptien<br />
Athos, chargé d’armes destinées aux<br />
bases marocaines de l’ALN. L’expédition<br />
franco-britannique sur le canal<br />
de Suez, préparée après la nationalisation<br />
du canal par l’Égypte (26<br />
juillet 1956) et déclenchée au début<br />
de novembre, immobilisa pendant<br />
plusieurs mois 30 000 hommes des<br />
troupes d’intervention, sans atteindre<br />
son but politique : le renversement<br />
du colonel Nasser, protecteur<br />
du FLN.<br />
Malgré ce déploiement de forces et<br />
ces coups d’audace, le FLN et l’ALN<br />
réussirent à compléter leur implantation<br />
dans tout le territoire algérien<br />
et à porter la guérilla dans<br />
toutes les grandes villes, y compris<br />
Alger, par des attentats sélectifs ou<br />
aveugles. Le nombre total d’actions<br />
« terroristes » répertorié par le 2 e<br />
bureau de l’armée française atteignit<br />
son maximum en janvier 1957.<br />
Les membres du «Comité d’organisation<br />
et d’exécution» siégeant clandestinement<br />
à Alger crurent pouvoir<br />
mobiliser toute la population<br />
algérienne par une grève insurrectionnelle<br />
de 8 jours à partir du 27 janvier<br />
1957 pour démontrer la représentativité<br />
du FLN à l’ouverture de<br />
la session de l’ONU.<br />
…<br />
reconnue, forçant l’admiration du<br />
monde entier après ses victoires sur le<br />
terrain en deux ans à peine.<br />
<strong>La</strong> guerre a cette période s’est étendue<br />
à l’ensemble du territoire national.<br />
Le congrès de la Soummam devait<br />
consacrer la prépondérance du civil sur<br />
le militaire, il en sera autrement.
5 <strong>Juillet</strong><br />
Ben Bella, itinéraire d’une révolte<br />
Avant 1939, Messali Hadj ou Ferhat Abbas<br />
, Ahmed Ben Bella est né le 25 décembre 1916 dans une famille modeste de Maghnia à quelques kilomètres de la<br />
frontière marocaine. Son père, originaire de Marrakech, cumule pour poursuivre les emplois d’agriculture et de commerçant.<br />
Ben Bella fréquente les<br />
écoles française et coranique.<br />
A Maghnia, l’entente<br />
règne entre colons<br />
et musulmans jusque sur<br />
les terrains de foot où le<br />
jeune Ahmed passe l’essentiel<br />
de son temps libre.<br />
Titulaire du certificat<br />
d’études à l’âge de 11 ans,<br />
il poursuit des études secondaires<br />
à Tlemcen, une<br />
ville voisine où il hébergé<br />
par un ami de son père. Il<br />
découvre là-bas la discrimination<br />
et éprouve, pour<br />
la première fois, l’impression<br />
d’être un étranger<br />
dans son propre pays. A<br />
14 ans, blessé par l’irrespect<br />
que manifeste un professeur<br />
européen au prophète<br />
Mohammed (Qssl),<br />
il connaît sans doute ses<br />
premiers questionnements<br />
sur l’identité algérienne.<br />
A cette époque,<br />
une opposition au statut<br />
colonial de l’Algérie commence<br />
à se manifester au<br />
sein de certaines élites urbaines.<br />
Ferhat Abbas,<br />
pharmacien marié à une<br />
Française, habillé à l’occi-<br />
Le décret Crémieux accorde la nationalité<br />
française aux seuls israélites, mesure qui<br />
heurte les autres Algériens.<br />
- Une monnaie nationale - Frapper monnaie<br />
dans un climat de guerre était un signe de domination<br />
et un symbole d’autorité et cela<br />
est une très nette affirmation de la souveraineté.<br />
Parallèlement à l’établissement de sa<br />
puissance politique sur le plan territorial par<br />
l’unification du pays, l’Emir a voulu donner<br />
à l’Etat qu’il créait, une base financière et une<br />
monnaie qui, n’étant pas frappée en son<br />
nom à Tagdempt instaurait déjà un caractère<br />
national dans la construction d’un Etat à<br />
l’exemple des Etats modernes du XIXe siècle.<br />
<strong>La</strong> Frappe d’une monnaie nationale par cet<br />
homme extraordinaire a donné plus de grandeur<br />
dans l’affirmation de l’Etat qu’a créé<br />
l’Emir. Cette monnaie prouve que l’Emir a<br />
non seulement unifié le pays mais il a aussi<br />
entamé la modernisation de l’Etat qu’il tente<br />
de créer.<br />
Fantassin de l’Emir<br />
6-13 octobre 1837. Second siège de Constantine,<br />
le général Damrémont est tué dès le<br />
début des combats ainsi que le général Perrégaux.<br />
Le général Valée succède à Damrémont.<br />
<strong>La</strong> ville tombe après une lutte héroïque<br />
de 7 jours et subira pillage et atrocités<br />
pendant les jours qui suivront sa chute.<br />
Ahmed Bey réussit à s'échapper.<br />
Octobre 1837. Le Maréchal Valée est nommé<br />
Gouverneur général en Algérie.<br />
31 octobre 1838. Pour la première fois, l'appellation<br />
officielle «Algérie» (euphonie de<br />
Al-Djezaïr) parait aux bulletins des lois n°<br />
609 (ordonnance du roi des Français<br />
n° 7 654 sur l'administration civile de l'Algérie).<br />
Jusqu'alors on parlait de «Possessions<br />
françaises de l'Afrique du Nord».<br />
1839<br />
- Occupation de Blida et prise de Jijel (Djidjelli).<br />
28 octobre 1839. Une expédition menée par<br />
le duc d'Orléans, franchit le défilé des Bibans<br />
(Portes de Fer), violant ainsi le Traité de la<br />
Tafna.<br />
19 novembre 1839. L’Emir Abd-el-Kader dénonce<br />
la violation du Traité par les Français<br />
dentale et bien vu des autorités<br />
françaises, milite<br />
pour l’assimilation<br />
[zoom] du peuple algérien.<br />
Messali Hadj, personnage<br />
charismatique<br />
aux allures de prophète,<br />
est quant à lui issu d’un<br />
milieu modeste de Tlemcen.<br />
Il réactive l’Etoile<br />
Nord-africaine, mouvement<br />
d’inspiration communiste<br />
dissous en 1929,<br />
le 28 octobre et reprend la guerre contre la<br />
France.<br />
23 décembre 1839. Abd-El-Kader défait les<br />
Français à la bataille de Oued El Alleug.<br />
1840<br />
Bataille de Mazagran. Prise de Cherchell, de<br />
Médéa, de Miliana.<br />
29 décembre 1840. Le général Bugeaud est<br />
nommé Gouverneur général en Algérie.<br />
1841<br />
- Combat du Sig.<br />
- Destruction des villes de l'Emir, Boghar et<br />
Taza.<br />
- Occupation de Mila.<br />
Mai 1841. Saccage de la ville de Takdempt, capitale<br />
de l’Emir Abd-el-Kader, par l'armée<br />
française.<br />
1842<br />
- Destruction de Sebdou.<br />
- Occupation de Tlemcen.<br />
17 octobre 1842. Massacre des tribus Arib par<br />
le général Bugeaud.<br />
1843<br />
16 mai 1843. Prise de la Smala de l’Emir Abdel-Kader.<br />
Après une traque de plusieurs jours et profitant<br />
de ce qu'Abd-el-Kader patrouille à<br />
quelque distance avec ses hommes, le duc<br />
d’Aumale, cinquième fils du roi Louis-Philippe,<br />
à la tête de 600 cavaliers, surgit au cœur<br />
de la Smala sans défense et s'en empare près<br />
du puits de Taguine, au sud ouest de Béjaïa<br />
(Bougie). Le butin est énorme, incluant les<br />
manuscrits de l'Emir. Il s’empara de la tente<br />
de l’Emir, alors absent, fit prisonniers nombre<br />
de ses parents, dispersa ses manuscrits et<br />
pilla ses trésors. <strong>La</strong> mère, la femme et les enfants<br />
d’Abd-el-Kader parvinrent toutefois à<br />
s’échapper.<br />
Face à la résistance farouche qui s’oppose à<br />
l’attaque surprise des Français, le duc d’Aumale<br />
note : «C’était grandiose et terrifiant [...].<br />
Des hommes qui refusent de mourir sans<br />
avoir défendu leur vie.»<br />
Les plus importants des nombreux prisonniers<br />
seront exilés, en résidence surveillée, à l'île<br />
Sainte Marguerite à Cannes où ils finiront<br />
leurs jours. Ils y sont d'ailleurs enterrés, dans<br />
un petit cimetière à l'Est du Fort, où des<br />
et revendique le premier<br />
l’indépendance. En 1937,<br />
déçu par l’échec du projet<br />
Blum-Viollette [zoom] et<br />
par la politique du Front<br />
populaire, Messali Hadj<br />
crée le Parti du peuple algérien<br />
(PPA). Ses ardentes<br />
revendications indépendantistees<br />
entraînent l’interdiction<br />
du mouvement<br />
deux ans plus tard. Il est<br />
peu probable que Ben<br />
Bella ait été en relation<br />
avec de tels mouvements.<br />
Mais il ne put les ignorer,<br />
en particulier à Tlemcen,<br />
foyer actif de contestation<br />
contre la présence française.<br />
Après avoir échoué<br />
au brevet, en 1934, il renonce<br />
aux études et regagne<br />
Maghnia où pendant<br />
deux ans, il travaille<br />
à la ferme familiale, enchaîne<br />
les petits métiers et<br />
fresques rappellent leur passage.<br />
Cet événement somme toute sans gloire, ne<br />
fut pas décisif, mais aura un énorme retentissement<br />
en France. <strong>La</strong> propagande de la<br />
monarchie de juillet en tira grand profit, au<br />
point d’en faire un des clichés de la conquête<br />
coloniale française pour le reste du siècle.<br />
Février 1843. Promulgation d’un décret ministériel<br />
portant création des bureaux arabes.<br />
31 juillet 1843. Bugeaud est nommé maréchal.<br />
1844<br />
- Prise de Biskra et de Dellys.<br />
- Expédition de <strong>La</strong>ghouat.<br />
6 août 1844. Bombardement de Tanger (Maroc)<br />
par l'escadre française du prince de Joinville.<br />
14 août 1844. A la bataille d'Isly au Maroc, les<br />
troupes de Bugeaud, battent l'armée du Sultan<br />
marocain qui, par le Traité de Tanger,<br />
s'engage à mettre Abd-el-Kader hors-la-loi<br />
sur le territoire marocain.<br />
1845<br />
- Expédition dans l'Aurès.<br />
- Expédition chez les Trara.<br />
5-19 juin 1845. Massacre de la tribu des Ouled<br />
Riah par le maréchal Pélissier pour réprimer<br />
le soulèvement du Dahra..<br />
8 août 1845. Massacre collectif de 500 personnes<br />
asphyxiées par le général Saint Arnaud<br />
dans une grotte près de Beni Menaceur (environs<br />
de Cherchell).<br />
23 au 26 septembre 1845. Bataille du Djebel<br />
Kerkour et de Sidi Brahim.<br />
Le colonel Montagnac attaque les troupes<br />
d'Abd-el-Kader, au Djebel Kerkour, c'est un<br />
désastre, le colonel est tué et la colonne est<br />
écrasée. Les survivants français se replient<br />
vers le Marabout de Sidi Brahim, où ils se retranchent<br />
pendant trois jours.<br />
Le 26 septembre : les Français tentent une sortie<br />
mais ils sont décimés, seuls 15 chasseurs<br />
et un hussard réussiront à fuir. Abd-el-Kader<br />
sera blessé au visage.<br />
Novembre 1845. Légalisation et réglementation<br />
de l’exercice du culte hébraïque en Algérie.<br />
1845 - 1850. Révolte de l'oasis de Zaatcha et<br />
Zibane menée par Cheikh Bouziane.<br />
1846<br />
s’inscrit à la préparation<br />
militaire.<br />
Assimilation : étymologiquement,<br />
rendre semblable.<br />
Avant 1940, Abbas<br />
croit sincèrement que les<br />
Algériens peuvent devenir<br />
français par un processus<br />
semblable à celui<br />
qu’ont connu les Bretons<br />
ou les Occitans. Ne déclare-t-il<br />
pas en 1936 : «<br />
[…] je ne mourrai pas<br />
pour la « partie algérienne»,<br />
parce que cette<br />
partie n’existe pas. Je ne<br />
l’ai pas découverte. J’ai interrogé<br />
l’histoire, j’ai interrogé<br />
les vivants et les<br />
morts ; j’ai visité les cimetières<br />
: personne ne m’en<br />
a parlé.» Projet Blum-Viollette<br />
: Elaboré en 1936 par<br />
le gouvernement du Front<br />
populaire, il consiste à<br />
donner la citoyenneté<br />
française à une vingtaine<br />
de milliers d’Algériens<br />
triés sur le volet. Malgré<br />
son extrême timidité, il<br />
n’est même pas présenté à<br />
la Chambre par le président<br />
du Conseil, Léon<br />
Blum.<br />
Révolte de Benacer Ben Chohra au Centre et<br />
Sud-Est.<br />
1847<br />
<strong>Juillet</strong> 1847. Déplacement de l’Emir Abd-el-<br />
Kader au Maroc<br />
En vertu du Traité de Tanger, le Sultan du<br />
Maroc contraint l'Emir Abd-el-Kader à quitter<br />
le Maroc.<br />
23 décembre 1847. Chassé du Maroc par le<br />
Sultan, Abd-el-Kader se présente aux spahis<br />
du colonel Yusuf au col de Guerbous, près de<br />
la frontière marocaine, et fait sa reddition au<br />
général Louis Juchault de <strong>La</strong>moricière.<br />
25 décembre 1847. L’Emir Abd-el-Kader est<br />
transféré en France.<br />
1848<br />
- Expédition chez les Beni-Senous.<br />
29 janvier 1848. Abd-el-Kader, arrive à Toulon,<br />
où il est interné au Fort <strong>La</strong>malgue,<br />
contrairement aux promesses, qui lui ont été<br />
faites avant sa reddition, de le laisser se retirer<br />
dans un pays musulman.<br />
24 février 1848. Abdication du roi Louis-Philippe.<br />
25 février 1848. Proclamation de la Seconde<br />
<strong>République</strong> Française.<br />
5 juin 1848. Ahmed Bey se rend aux forces<br />
françaises.<br />
26 juin 1848. Paris - Après les journées révolutionnaires<br />
et la chute de la dernière barricade,<br />
15 000 prisonniers politiques seront<br />
déportés en Algérie.<br />
Novembre 1848. L’Emir Abd-el-Kader est<br />
transféré à la prison d'Amboise.<br />
21 novembre 1848. L'Algérie est divisée en 2<br />
zones : Les Territoires civils et les Territoires militaires.<br />
10 décembre 1848. Louis Napoléon Bonaparte<br />
devient le premier Président de la seconde<br />
<strong>République</strong>.<br />
11 décembre 1848. <strong>La</strong> Constitution de 1848<br />
proclame l'Algérie partie intégrante du territoire<br />
français.<br />
Les Territoires civils de Bône (Annaba), d'Oran<br />
et d'Alger, deviennent des départements<br />
français (Alger, Oran et Constantine) dirigés par<br />
des préfets.<br />
Les indigènes d'Algérie (les Musulmans et les<br />
Juifs) deviennent des «sujets» français.<br />
<strong>La</strong> NR 4371 — Jeudi 5 juillet 2012<br />
17<br />
ALI LA POINTE<br />
LA RÉDEMPTION<br />
Agé de 27 ans au moment de<br />
sa mort, Ali <strong>La</strong> pointe avait un<br />
caractère fougueux et entier.<br />
Mais ce qui caractérisera le<br />
personnage c’est son courage<br />
et sa vivacité d’esprit. Né à<br />
Miliana le 14 mai 1930 sous le<br />
patronyme de Ammar Ali, il<br />
s’est fait connaître à Alger<br />
comme joueur de « tchic-tchic<br />
» à Bab El- Oued. Très vite, il<br />
remplit son casier judiciaire de<br />
différentes condamnations<br />
pour vols d’effets militaires,<br />
coups et blessures volontaires,<br />
violence et voie de faits à<br />
agents et tentative d’homicide<br />
volontaire. Il s’évadera du<br />
chantier de travail à Médéa où<br />
il y purgeait une peine. pour<br />
clore définitivement avec son<br />
passé, il s’engage dans la lutte<br />
et la révolution contre l’occupant.<br />
Très vite il est présenté à<br />
Yacef Saâdi qui l’incorpore<br />
dans son groupe. C’est ce que<br />
rapportera l’ensemble de la<br />
presse locale en 1957, à la<br />
suite de l’explosion causant la<br />
mort d’Ali <strong>La</strong> Pointe. De nombreux<br />
articles reviennent sur<br />
les différents attentats orchestrés<br />
par lui et le grand patron<br />
de la Zone autonome et<br />
quelques coupures de presse<br />
relateront la fameuse explosion<br />
du 5, rue des Abderames<br />
en précisant qu’« Ali <strong>La</strong> Pointe<br />
ne s’est pas fait sauter, il a été<br />
attaqué dans son repère hermétique<br />
par les bérets verts»,<br />
note l’Echo d’Alger. L’objectif<br />
pour la presse de l’époque est<br />
clair : il ne faut pas en faire<br />
un martyr qui a préféré se<br />
faire exploser plutôt que de se<br />
rendre. Il s’agissait de ne pas<br />
susciter des envies de suivre<br />
son exemple. Mais ce que les<br />
journaux ne disent pas, c’est<br />
qu’Ali faisait peur. Sa ténacité<br />
à défier l’adversaire, sa pugnacité<br />
et son courage alimentent<br />
l’espoir, enhardissent<br />
les plus revêches à s’engager<br />
et symbolisent l’Algérien dans<br />
toute sa dimension culturelle<br />
et cultuelle. Il avait<br />
«El-Rahba», se souvient Zohra<br />
Drif. Et de poursuivre : « Avec<br />
lui, on était intouchables, il<br />
avait la puissance, le courage.<br />
Les Français avaient très peur<br />
de lui. Si on se retrouvait face<br />
à un barrage, il fonçait, il<br />
n’hésitait pas et il n’avait pas<br />
peur.» Zohra Drif a de l’admiration<br />
dans la voix. Son regard<br />
s’éclaire lorsqu’elle évoque le<br />
révolutionnaire qu’elle désignera<br />
parfois de loufoque et<br />
d’enfantin. «Il aimait faire des<br />
blagues et rigoler de choses<br />
enfantines comme un gosse.<br />
Comme quelqu’un qui n’a jamais<br />
eu la chance d’être un<br />
enfant», évoque-t-elle soudain<br />
pensive. Ali <strong>La</strong> Pointe,<br />
qui a certes connu la misère,<br />
s’est engagé pour d’autres<br />
raisons.«C’est difficile à dire et<br />
les seuls termes qui me viennent<br />
à l’esprit sont religieux,<br />
mais je dois dire que lorsque<br />
je pense à l’engagement d’Ali<br />
je ne peux m’empêcher d’y<br />
voir une sorte de rachat.» Elle<br />
s’explique : «Nous connaissions<br />
le passé d’Ali et<br />
d’ailleurs qui n’était pas<br />
proxénète à l’époque, mais<br />
lorsqu’il a combattu, on a<br />
l’impression qu’il voulait racheter<br />
ses erreurs, rattraper<br />
ses égarements.»
5 <strong>Juillet</strong><br />
Industrie militaire<br />
Après la libération de la totalité<br />
des régions de l’emprise espagnole,<br />
il est dès lors envisageable<br />
de fonder la Marine algérienne,<br />
ce qui est entrepris à travers la<br />
construction dans un premier<br />
temps de quatre petits navires<br />
de guerre, et au fil du temps, une<br />
véritable industrie militaire voit le<br />
jour à travers plusieurs chantiers<br />
navals (notamment à Cherchell,<br />
Béjaïa et Alger) qui fournissaient<br />
à la Marine algérienne un nombre<br />
considérable de navires de guerre<br />
équipés de canons développés<br />
entièrement par des compétences<br />
algériennes. À partir de là, une<br />
nouvelle page s’ouvre pour la Régence<br />
d’Alger qui à travers sa Marine<br />
peut imposer son leadership<br />
en Méditerranée durant près de<br />
trois siècles.<br />
Après la colonisation militaire,<br />
la colonisation agricole<br />
Par arrêté du 18 avril 1840/1851,<br />
le maréchal Bugeaud fait consacrer<br />
la concession gratuite des<br />
terres. Le peuplement par un peu<br />
plus de cent mille colons des<br />
meilleures terres est fait sous réserve<br />
que ces nouveaux propriétaires<br />
y résident en permanence.<br />
Les crédits nécessaires à la mise<br />
en valeur des terres sont attribués<br />
avec des documents de propriété<br />
immédiate et transmissible<br />
(maréchal Randon décret 1851).<br />
U N E M I N O R I T É A I S É E<br />
De 1872 à 1878, les Français vont<br />
s’inspirer de la loi américaine du<br />
«homestead» en établissant le<br />
principe de l’attribution gratuite<br />
sous condition de résidence deux<br />
à trois ans.<br />
Cette loi va accélérer considérablement<br />
l’arrivée de nouveaux<br />
colons. On comptait 207 615 cultivateurs<br />
européens en 1888<br />
contre 3 254 724 cultivateurs algériens<br />
qui ne possédaient plus<br />
que des terres rocailleuses ou<br />
très mal irriguées. Beaucoup de<br />
Lorrains-Alsaciens se sont fixés<br />
en Algérie. Tous les résistants kabyles<br />
se sont vu confisquer leurs<br />
terres.<br />
1834, 1 er Traité de paix avec les Français<br />
1) Dès 1831, l'Emir Abd El-Kader,<br />
homme d'Etat et, ce que l'on sait<br />
moins, chef soufi et poète, leva<br />
l'étendard de la révolte. <strong>La</strong> tactique<br />
d'Abd-El-Qader, fondée sur<br />
des attaques éclair, rendit très<br />
difficile l'entreprise de conquête<br />
menée notamment par le général<br />
Bugeaud.<br />
Il obtint de la France, par le traité<br />
de la Tafna, en 1837, la reconnaissance<br />
de son autorité sur une<br />
grande partie des provinces de<br />
l'Ouest, avant de reprendre les<br />
armes. L'Emir, qui s'était réfugié<br />
au Maroc et avait obtenu, un<br />
temps, l'appui du sultan maro-<br />
cain, fut contraint de se rendre<br />
en 1847, mais il devait demeurer<br />
longtemps comme un héros de<br />
la résistance nationale aux yeux<br />
de beaucoup d'Algériens.<br />
2) Le général Desmichels écrivit<br />
de nouveau à Abd El-Kader pour<br />
lui demander une entrevue que<br />
l'Emir refusa pour marquer son<br />
rang souverain, au-dessus des généraux<br />
français (il ne daigna accorder<br />
la faveur d'une entrevue<br />
qu'au maréchal Bugeaud, au général<br />
de <strong>La</strong>moricière et au duc<br />
d'Aumale).<br />
Abd El-Kader répondit à la lettre<br />
du général Desmichels que l'islam<br />
lui défendait de se soumettre<br />
aux envahisseurs, mais qu'il lui<br />
permettait d'accepter une paix si<br />
elle lui était proposée.<br />
Il sentait alors le besoin de cesser<br />
les hostilités contre les Français,<br />
et malgré les revers que ces derniers<br />
éprouvèrent près d'Oran,<br />
dans un lieu nommé Dar-el-Bidah<br />
(«Maison blanche»), il continua<br />
les négociations entamées, en engageant<br />
son agha, Mouloud ben<br />
Arrach et le caïd Ouled Mahmoud,<br />
pour s'entendre en dehors<br />
d'Oran, avec le séfarade Mandoukaï<br />
Amar, sur les bases d'un<br />
traité de paix qui allait être passé<br />
entre la France et les Algériens.<br />
Abd El-Kader insistait pour avoir<br />
Mostaganem, mais se voyant refuser<br />
sur ce point, il demanda<br />
Arzew, où il parvint à établir de<br />
fait son autorité sans l'accord des<br />
Français.<br />
Ils arrivèrent à un accord sur les<br />
trois dispositions suivantes du<br />
traité19 :<br />
1. Cessation des hostilités entre<br />
les Arabes et la France ;<br />
2. liberté du commerce pleine et<br />
entière ;<br />
3. remise immédiate des prisonniers.<br />
Les négociateurs d'Abd El-Kader<br />
(civils et militaires de la province),<br />
amendèrent avec habileté une<br />
partie des conditions posées par<br />
les Français à Abd El-Kader et le<br />
traité fut signé le 24 février 1834.<br />
3) Quand les troupes françaises<br />
chassent les Turcs d'Alger en 1830<br />
et commencent à occuper l'Algérie,<br />
dont les côtes constituent<br />
alors un véritable enjeu international<br />
pour les échanges par voie<br />
maritime, beaucoup de chefs locaux<br />
prennent les armes. L'invasion<br />
française suscita d'emblée<br />
une farouche résistance de la part<br />
de tribus révulsées par cette incursion<br />
chrétienne en terre d'islam<br />
et habituées à une autorité<br />
turque très indirecte.<br />
Ainsi, commença la conquête d'un<br />
pays alors faiblement peuplé (3<br />
millions d'habitants environ) et,<br />
presque aussitôt, la résistance<br />
des Algériens.<br />
Cette résistance sera incarnée à<br />
<strong>La</strong> NR 4371 — Jeudi 5 juillet 2012<br />
18<br />
l'Ouest par l'émir Abd-El-Qader<br />
qui proclama la guerre sainte (Djihad)<br />
contre les Français en 1832,<br />
et à l'Est par le bey de Constantine,<br />
El-Hadj Ahmed.<br />
4) A l'Est, le dernier bey de<br />
Constantine, Ahmed, contraint<br />
d'abandonner la ville après deux<br />
sièges, tient tête pendant encore<br />
onze ans dans les Aurès.<br />
<strong>La</strong> conquête se poursuit des années<br />
durant. Prise de villes et de<br />
territoires par les Français (qui<br />
utilisent des méthodes brutales,<br />
pratiquent le refoulement des tribus<br />
et la spoliation des terres) alternent<br />
avec les soulèvements :<br />
1849, 1851, 1859, 1860, 1864, 1871.<br />
Tour à tour, Petite ou Grande Kabylie,<br />
Aurès, Sud-0ranais ou Sud-<br />
Constantinois se rebellent.<br />
5) Les gouvernements français<br />
successifs (monarchie, république,<br />
Second Empire, république<br />
à nouveau) hésitent sur le<br />
type de colonisation à poursuivre<br />
et sur le statut à octroyer à l'Algérie<br />
(nom donné pour la première<br />
fois dans un texte officiel<br />
français, en 1838).<br />
Napoléon III (1808-1873),<br />
conscient de l'injustice faite aux<br />
Algériens, songe à un grand<br />
«royaume arabe»», mais ses<br />
bonnes intentions ne survivront<br />
pas à sa destitution, après la défaite<br />
de Sedan devant les Prussiens,<br />
le 4 septembre 1870.<br />
Près de 600 000 Algériens musulmans appartiennent aux groupes sociaux les plus favorisés (revenus annuels supérieurs à 89 000 F). Ce sont de grands propriétaires fonciers<br />
issus de l’aristocratie précoloniale qui ont su s’accommoder de la domination française. On les trouve aussi parmi une frange de la paysannerie qui a connu un<br />
mouvement d’ascension sociale au début des années 1920, notamment par sa conversion aux spéculations européennes, blé tendre et viticulture. On compte ainsi plus<br />
8 000 grandes explorations musulmanes (plus de 100 ha) et 16 580 moyennes (entre 50 et 100). 7 000 entreprises de toute nature, employant 23 000 personnes, sont aussi dirigées<br />
par des Algériens musulmans (1). Les professions libérales (que l’on songe au pharmacien Ferhat Abbas et au docteur Bendjelloul), tout comme l’armée et la fonction<br />
publique, contribuent également à la formation et à l’essor de cette classe moyenne algérienne musulmane. Cette élite, même réduite, porte témoignage d’une société coloniale<br />
beaucoup moins figées qu’on ne le suppose généralement et qui répond à des règles de fonctionnement et de reproduction qui ne relèvent pas de l’apartheid.<br />
(1) L. Schiaffino, LLee MMoonnddee, 14 juillet 1957.
histoire<br />
Ensembles politiques<br />
Les fondements stratégiques<br />
de l’intégration maghrébine (IV)<br />
, Fondée le 17 février 1989 à<br />
Marrakech, l'UMA ne cesse,<br />
depuis, de faire du surplace. Les<br />
responsables des cinq pays<br />
membres (Algérie, Libye, Maroc,<br />
Mauritanie, Tunisie) continuent<br />
certes de se rencontrer<br />
périodiquement et de développer<br />
une coopération bilatérale dans<br />
plusieurs domaines, mais sans<br />
amélioration substantielle sur le<br />
plan des échanges économiques.<br />
Le produit intérieur brut de l’ensemble des pays<br />
du Maghreb a été évalué en 2011(voir tableau en annexe)<br />
par le FMI à 409,445 milliards de dollars en<br />
2011 contre 387,712 milliards en 2010. Ce PIB global<br />
est artificiellement gonflé par la Libye et l’Algérie<br />
du fait du poids des hydrocarbures et des phosphates<br />
pour le Maroc. Ainsi, en 2011, le PIB du<br />
Maghreb représente 0,57 % du PIB mondial, 2,40<br />
% du PIB de la communauté économique européenne<br />
et 2,72 % du PIB américain et est légèrement<br />
supérieur au PIB de la Grèce qui connaît une très<br />
gave crise d’endettement pour environ 12 millions<br />
d’habitants. Comparé à la population et aux PIB allemand<br />
(3.328 milliards de dollars pour 82 millions<br />
d’habitants) et français (2.808 milliards de dollars<br />
pour 65 millions d’habitants), on mesure l’important<br />
écart. Le PIB maghrébin doit à l’horizon 2020<br />
quadrupler (1.550 milliards de dollars à prix<br />
constants 2010) au minimum si l’on veut éviter des<br />
tensions sociales de plus en plus vives au niveau<br />
de l’espace Maghreb. Il s’agira de relancer le projet<br />
de la Banque d’investissement maghrébine avalisé<br />
en 2010 par l’UMA, une base pour concrétiser<br />
l’interconnexion bancaire entre les pays du Maghreb<br />
tout en harmonisant le cadre légal entre les diverses<br />
banques de la région, objet de la prochaine<br />
réunion des chefs maghrébins d’Etat en octobre<br />
2O12 à Tunis, d’unifier les tarifs douaniers, de prévoir<br />
la création d’une grande université euro-maghrébine,<br />
d’une banque centrale et d’une bourse magrébines,<br />
support d’une monnaie maghrébine, ces<br />
structures devant s’insérer à l’horizon 2020 dans le<br />
cadre d’une banque centrale et d’une bourse euroméditerranéenne,<br />
ce qui suppose la résolution<br />
préalable des taux de change. Le PIB maghrébin<br />
doit être multiplié par cinq à l’ horizon 2020 ou quadruplé<br />
(environ 2.000 milliards de dollars à prix<br />
constants 2012) au minimum si l’on veut éviter des<br />
tensions sociales de plus en plus vives au niveau<br />
du Maghreb. Comme conséquence de cette non-intégration,<br />
le faible attrait des investissements directs<br />
étrangers (IDE). Selon le rapport de la Conférence<br />
des Nations unies sur le commerce et le développement<br />
(CNUCED) publié le 26 juillet 2011 sur<br />
l'investissement dans le monde, en termes de flux<br />
d'IDE, l’Algérie a drainé 2, 594 milliards de dollars<br />
en 2008, 2,761 milliards en 2009 et 2,291 milliards<br />
en 2010 mais essentiellement concentré dans les hydrocarbures.<br />
Le Maroc n’a drainé respectivement<br />
durant les mêmes années que 2,487 milliards de dollars,<br />
1,952 milliard et 1,304 milliard . Pour la Tunisie,<br />
ils sont de l'ordre de 2,758 milliards de dollars<br />
en 2008, 1,688 en 2009 et 1,513 en 2010 et la<br />
Libye 4,111 milliards, 2,674 et 3,833 en 2010 principalement<br />
par la relance de son secteur hydrocarbures.<br />
Ainsi, le total des IDE pour ces quatre pays<br />
du Maghreb totalisent 8, 941 milliards de dollars soit<br />
0,6 % des IDE estimés à 1.500 milliards de dollars<br />
et devant aller à plus de 2.000 milliards à l’horizon<br />
2013. Cela a des répercussions sur le niveau du chômage<br />
souvent surestimé par les données officielles.<br />
Il s’ensuit un taux de chômage inquiétant et une dominance<br />
de la sphère informelle au Maghreb.<br />
Certes, selon une étude de l’OCDE, le PIB par habitant<br />
moyenne 2009/2012 a connu une certaine amélioration<br />
Mais un indicateur global peut voiler d’im-<br />
Au Maghreb, le chômage touche beaucoup plus la frange des universitaires. (Photo > D. R.)<br />
portantes disparités régionales qu’une concentration<br />
excessive du revenu national au profit d’une<br />
minorité croissance peut ne pas signifier développement,<br />
d’où l’importance d’enquêtes plus précises<br />
et d’analyses qualitatives pertinentes. Ainsi,<br />
les statistiques officielles sur le taux de chômage<br />
au Maghreb sont souvent biaisées. Selon les données<br />
du BIT et de la Banque mondiale, si l'Algérie,<br />
le Maroc et la Tunisie ont réussi ces dix dernières<br />
années à ramener le chômage à des niveaux assez<br />
bas, 9,1 % au Maroc, 10,2 % en Algérie et 13,3 % en<br />
Tunisie en 2009 contre respectivement 13,4 %, 30<br />
% et 15,7 % en 2000, cela ne concerne pas nécessairement<br />
des emplois productifs surtout dans des<br />
pays rentiers comme la Libye et l’Algérie grâce à la<br />
rente des hydrocarbures où nous assistons souvent<br />
à des versements de traitements sans contreparties<br />
productives pour calmer le front social. Les rapports<br />
du FMI et de la Banque mondiale montrent<br />
que le chômage des jeunes diplômés est beaucoup<br />
plus important que celui des non-instruits. L'étude<br />
conclut qu'au Maghreb le chômage touche beaucoup<br />
plus la frange des universitaires, plus exigeants<br />
quant à leur emploi et leur salaire, que ceux<br />
qui n'ont pas poursuivi de cursus scolaire. Ainsi, le<br />
taux de chômage au Maghreb est supérieur à 40 %<br />
en tenant compte des emplois précaires et en soustrayant<br />
la sphère informelle marchande, existant<br />
une sphère informelle productive mais marginale.<br />
En effet, la sphère informelle est dominante au<br />
Maghreb. Et bien que jouant comme facteur de<br />
tampon social et constituée de jeunes entrepreneurs<br />
dynamiques qu’il s’agit d’intégrer d’une manière<br />
intelligente, sur le moyen terme, la dynamisation<br />
de l’intégration maghrébine passe par l’intégration<br />
de la sphère informelle et la création<br />
d’entreprises dynamiques dans la sphère réelle<br />
s‘insérant dans le cadre des valeurs internationales<br />
d’autant plus que le Maroc, la Tunisie et l’Algérie<br />
ont signé l’accord de libre-échange avec<br />
l’Union européenne impliquant à l’horizon<br />
2017/2020 d’importants dégrèvements tarifaires,<br />
ce qui peut pousser ceux opérant dans la sphère<br />
réelle à amplifier la sphère informelle d’autant plus<br />
que la plupart des entreprises dans la sphère réelle<br />
sont peu initiées au management stratégique et<br />
sont à dominance familiale avec une gestion autoritaire<br />
ignorant les mutations internationales, freinent<br />
en tant que lobbys l’ouverture par des pressions<br />
protectionnistes et prospèrent (ou déclinent)<br />
grâce à des parts de marché que leur attribuent<br />
l’Etat via la dépense publique. <strong>La</strong> sphère informelle<br />
est le produit des dysfonctionnements des appareils<br />
de l’Etat et du poids de la bureaucratie. Lorsque<br />
un Etat, par des actions autoritaires, émet des lois<br />
qui ne correspondent pas à l’état de la société,<br />
celle-ci enfante ses propres lois qui lui permettent<br />
de fonctionner, sphère qui ouvre la voie à l’Etat de<br />
non-droit et à la corruption par la domination du<br />
cash alors que l’économie moderne repose sur<br />
deux postulats, le contrat et le crédit. Pour les<br />
agents économiques opérant dans la sphère informelle,<br />
dans leur conscience, ils fonctionnent dans<br />
un espace qui est leur droit avec des codifications<br />
précises entretenant des relations complexes avec<br />
la sphère réelle. L’économie informelle est réglée<br />
par des normes et des prescriptions qui déterminent<br />
les droits et les obligations de ses agents économiques<br />
ainsi que les procédures en cas de<br />
conflits ayant sa propre logique de fonctionnement<br />
qui ne sont pas ceux de l’Etat, nous retrouvant<br />
devant un pluralisme institutionnel et juridique<br />
contredisant la vision moniste du droit enseigné<br />
aux étudiants. Les économies maghrébines en<br />
transition sont en effet confrontées à une double<br />
évolution. D’abord économique, avec la transition<br />
d’un système d’économie planifiée, ou de fort interventionnisme<br />
étatique, à celui d’une économie de<br />
marché. Ensuite politique, avec le passage d’un<br />
système non démocratique vers un système plus<br />
démocratique. C’est dans ce cadre que des enquêtes<br />
précises sur le terrain concernant les économies<br />
méditerranéennes et des pays de l’ex-camp<br />
communiste montrent clairement les interdépendances<br />
entre institutions formelles et institutions<br />
informelles, de nombreuses règles formelles n’étant<br />
qu’une validation ex-post de règles informelles issues<br />
de la tradition ou de la coutume. Réciproquement,<br />
une institution formelle peut être prolongée,<br />
voire modifiée par une institution informelle.<br />
Aussi, pour les économistes qui doivent éviter le juridisme,<br />
dans chacun de ces cas de figure, ayant des<br />
incidences réelles sur le comportement des investisseurs,<br />
nous assistons à des logiques différentes<br />
tant pour la formation du salaire et du rapport salarial,<br />
du crédit, du taux d’intérêt, de la formation<br />
profits et des prix qui dépendent dans une large mesure<br />
de la forme de la concurrence sur les différents<br />
marchés. Cette dualité se retrouve, par exemple,<br />
avec la différenciation du taux de change officiel et<br />
celui du marché parallèle, le rapport à la fiscalité<br />
qui conditionne la nature des dépenses et recettes<br />
publiques, en fait par rapport à l’Etat, le paiement<br />
de l’impôt direct étant un signe d’une plus grande<br />
citoyenneté, les impôts indirects étant injustes par<br />
définition puisqu’étant supportés par tous les citoyens<br />
riches ou pauvres. Selon le ministre du Travail<br />
algérien, l’informel contribue à 25 % du PIB en<br />
2010 et plus de 30 % emplois Selon les derniers<br />
chiffres du Haut-Commissariat au plan au Maroc,<br />
l'économie informelle représente 14,3 % du PIB et<br />
37,3 % de l'emploi non agricole. Pour l’Algérie, la<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
19<br />
sphère informelle contrôle 40 % de la masse monétaire<br />
en circulation, à savoir environ 13 milliards de<br />
dollars. Le nombre de commerçants qui travaillent<br />
au noir est passé en 2011 à 1 million contre quelque<br />
600.000 en 2010. Ce sont là des chiffres avancés par<br />
l'Union nationale des commerçants et des artisans<br />
algériens (UGCAA). Cette augmentation est, selon<br />
lui, l’effet de la décision prise par le gouvernement<br />
après les émeutes de janvier de ne pas s’attaquer<br />
à l’informel. Pour le D r Deborah Harrold, professeur<br />
au Bryn Mawr Collège (Colombia), spécialiste du<br />
Maghreb, l’économie informelle représente les 50<br />
% de la taille de l’économie nationale algérienne.<br />
Nous avons approximativement la même taille au<br />
Maroc. Selon une enquête du Soir du Maroc en<br />
date du 20 décembre 2010, la part de l’informel représenterait<br />
entre 50 à 70 %. L'économie informelle<br />
génère au Maroc quelque 280 milliards de dirhams<br />
par an, augmentant de 40.000 unités de production<br />
chaque année, selon les estimations publiées en décembre<br />
2009 dans un rapport du Haut-Commissariat<br />
au plan. Cinquante-sept pour cent des entreprises<br />
de ce secteur sont des commerces de détail<br />
et 20 % travaillent dans le secteur des services. Ce<br />
rapport estime également que le nombre des entreprises<br />
non enregistrées est passé de 1,23 million en<br />
1999 à 1,55 million en 2007, soit une augmentation<br />
de près de 18 %t. Qu’en est-il pour la Tunisie, la<br />
Libye et la Mauritanie ? Une place énorme au Maghreb<br />
comparée aux autres pays où ce secteur ne dépasse<br />
pas les 20 % et un manque à gagner considérable<br />
pour l’Etat - alors qu’elle représente dans des<br />
sociétés organisées comme la Suisse (8 % de l’économie<br />
globale), le Canada (15 %) ou encore la Norvège<br />
(20 %). L’Italie, pays de la «combinazione», affiche,<br />
quant à elle, avant son intégration à l’Union<br />
européenne où ce taux dépassait 50%, un taux de<br />
27 %.<br />
Les actions pour des filières dynamiques intégratrices<br />
que peuvent réaliser à court terme les pays<br />
du Maghreb ensemble ?<br />
Problématique : quelle politique de développement<br />
pour le Maghreb face à la mondialisation ?<br />
Toute étude de marché sérieuse, si l’on veut éviter<br />
le gaspillage des ressources financières, suppose<br />
que l’on réponde au moins à cinq questions qui<br />
concernent d’ailleurs l’ensemble de la politique industrielle<br />
future que l’on ne saurait isoler de la politique<br />
globale. Quel est le choix des secteurs en<br />
fonction de la demande solvable des Maghrébins<br />
sachant que le marché local est un marché instable.<br />
Quelle est la stratégie des filières par rapport<br />
aux mutations mondiales? <strong>La</strong> restructuration<br />
du secteur public industriel et marchand permettra-t-elle<br />
des programmes d’investissement, pour<br />
les transformer en véritables leviers économiques<br />
favorisant l’émergence de secteurs dynamiques<br />
compétitifs dans le cadre des avantages comparatifs<br />
mondiaux dont la prise en compte des industries<br />
écologiques ? Construit-on actuellement des<br />
projets pour un marché local régional ou mondial<br />
afin de garantir la rentabilité financière face à la<br />
concurrence internationale ? Les filières ne sontelles<br />
pas internationalisées avec des sous-segments<br />
éparpillés à travers le monde ? Un partenariat<br />
stratégique n’est-il pas la condition fondamentale<br />
pour à la fois des projets fiables et pénétrer le<br />
marché mondial ? <strong>La</strong> production locale sera-t-elle<br />
concurrentielle en termes du couple coûts-qualité<br />
dans le cadre de la logique des valeurs internationales<br />
? L’urgence d’un système financier adéquat<br />
qui réponde à la nouvelle logique industrielle, car<br />
sans réformes de ce système, actuellement se limitant<br />
à une redistribution de la rente donc un<br />
enjeu de pouvoir, impulser des secteurs.<br />
(A suivre)<br />
Abderahmane Mebtoul
5 <strong>Juillet</strong><br />
, L’horreur a été poussée<br />
à son paroxysme le 8 mai<br />
1945, d’après les témoins<br />
oculaires qui se sont exprimés<br />
plusieurs années<br />
après. Sassi Benhamla, président<br />
de l’Association du<br />
8 Mai 1945 de Guelma, est<br />
parmi ceux qui ont été formels<br />
quand ils avaient témoigné<br />
de l’horreur. Pour<br />
lui, le colonialisme avait<br />
poussé sa machine de répression<br />
à ses extrêmes,<br />
durant les deux premières<br />
semaines de mois de mai<br />
1945 dans la région de<br />
Guelma. Cet ancien militant<br />
du Parti du peuple algérien<br />
(PPA) raconte dans<br />
ce récit comment des cadavres<br />
d’Algériens durent<br />
jetés dans les fours de<br />
chaux à la veille de la<br />
venue de la commission<br />
dite Tubert.<br />
«Dès l’annonce de la constitution<br />
de la commission d’enquête,<br />
présidée par le général<br />
Tubert, les milices et les services<br />
de sécurité se sont attelés<br />
à dissimuler des cadavres en<br />
les jetant dans des fours à<br />
chaux», a d’emblée indiqué le<br />
président de l’Association du 8<br />
Mai 1945. «Les historiens doivent<br />
savoir que les villes et villages<br />
martyrisés par le colonisateur<br />
durant les massacres du 8<br />
mai 1945, avaient vécu ces évènements<br />
différemment, à cause<br />
de l’absence de liaisons entre<br />
eux», a encore souligné ce témoin<br />
des évènements de<br />
Guelma.<br />
C’est ainsi que Benhamla, premier<br />
responsable de la cellule<br />
<strong>La</strong> conférence sur «le déplacement des<br />
populations algériennes dans des camps<br />
de regroupement» sous le colonialisme<br />
français tenue, hier, au forum du quotidien<br />
El Moudjahid, a été marqué par la<br />
présence de Noureddine Yazid Zerhouni.<br />
Pour la circonstance, le vice-Premier mi-<br />
du Parti du peuple algérien<br />
(PPA) à Guelma, a illustré son<br />
propos à partir de ce qu’il avait<br />
vécu dans sa ville natale, en endossant<br />
la responsabilité de ces<br />
crimes au sous-préfet André<br />
Achiary, en poste, à cette<br />
époque, dans cette localité.<br />
C’est dans ce contexte que Benhamla,<br />
un militant infatigable<br />
de la vérité sur les massacres du<br />
8 mai 1945 qui, malgré son âge<br />
avancé et sa maladie, continue<br />
à dénoncer ce crime que la colonisation<br />
cherche à occulter, a<br />
expliqué que tout a commencé<br />
quand, à la veille de la fête du 1 er<br />
Mai, le sanguinaire Achiary interpella,<br />
par le biais des services<br />
de sécurité, les dirigeants<br />
du PPA de Guelma pour leur signifier<br />
qu’il leur était interdit<br />
d’organiser tous.<br />
nistre a troqué sa casquette de représentant<br />
du gouvernement pour témoigner<br />
de la guerre de Libération nationale.<br />
«Je suis parmi vous pas en tant que témoin,<br />
pas en qualité de ministre», prévient<br />
Yazid Zerhouni. Dan son intervention,<br />
il a tenu a rappeler quelques pans<br />
de son parcours de moudjahid. «Je fais<br />
partie du groupe des militants chargés<br />
d'organiser les services de renseignement<br />
de l'ALN dans le maquis», dira-t-il<br />
pour étayer ses propos sur le nombre<br />
d'Algériens retenus dans les campements.<br />
Sur ce point, «la population algérienne<br />
qui vivait dans les campements<br />
érigés par l'armée française est estimée<br />
à 3,5 millions», souligne Zerhouni.<br />
Ce n'est pas tout. Il ajoute un autre chiffre<br />
non moins important. Il s'agit de la population<br />
ayant fui l'armée française. «1,5<br />
million d'Algériens ont quitté leurs domiciles<br />
pour se réfugier ailleurs et dans les<br />
villes», selon l'orateur. En tout, «près de<br />
5 millions sur les 8 millions d'Algériens<br />
ont été déplacés sous le colonialisme»,<br />
conclut l'ex-ministre qui était en charge<br />
Seule une marche pour fêter la<br />
fin de la Seconde Guerre mondiale,<br />
en parallèle à la marche<br />
prévue par les officiels. Et de<br />
préciser : «Nous ignorions à ce<br />
moment-là que la police avait<br />
tiré sur les manifestants du 1 er<br />
mai à Alger.»<br />
Dans son récit, Benhamla situe<br />
le début des provocations<br />
d’Achiary, un sous-préfet inconditionnel<br />
de la colonisation, lorsqu’il<br />
avait précédé à l’arrestation<br />
de Abdelmalek Ouartsi, responsable<br />
à Guelma du PPA et<br />
des Amis du manifeste pour les<br />
libertés (AML). Agissant sous<br />
la couverture des AML, raconte<br />
encore Benhamla, un rescapé<br />
des massacres du 8 mai 1945, le<br />
PPA était en réalité le principal<br />
organisateur des manifestations<br />
du 1 er mai à Guelma. Il y avait<br />
comme une odeur de poudre<br />
en l’air, selon ce témoin, car<br />
selon ses précisions, Archiary<br />
avait commencé à armer les ultras<br />
(milices civiles) dès le 16<br />
avril 1945. <strong>La</strong> répression sanglante<br />
commença à Guelma dès<br />
le 8 mai 1945 à 16 heures, se<br />
rappelle Benhamla. Le crime<br />
était préparé, depuis au moins<br />
un mois, selon le témoignage<br />
de ce militant de Guelma du<br />
PPA. Les gendarmes armés se<br />
tenaient déjà devant les manifestants,<br />
agissant sous les ordres<br />
d’Achiary qui se tenait derrière<br />
eux. <strong>La</strong> première victime fut le<br />
martyr Boumaza qu’une balle<br />
atteignit, dès les premiers coups<br />
de feu. <strong>La</strong> suite est connue : des<br />
milliers de morts. Une véritable<br />
boucherie perpétrée sous les<br />
ordres du sinistre Achiary. Les<br />
colons continuaient à semer la<br />
mort, au-delà du 8 mai 1945.<br />
Benhamla raconte que dès le<br />
début de la deuxième semaine<br />
du mois de mai, les autorités coloniales<br />
distribuèrent des armes<br />
dans les casernes militaires. Le<br />
10 mai, selon lui, neuf personnes<br />
furent froidement exécutées<br />
dans la caserne, parmi eux le<br />
fils du kadi de la ville qui fut fusillé<br />
devant son père. Benhamla<br />
garde l’image d’un enseignant<br />
ultra qui fut d’une sauvagerie<br />
inouie, raconte-il. Il fut derrière<br />
les exécutions sommaires d’Algériens<br />
venus de plusieurs régions<br />
en plein ville de Guelma.<br />
Cet enseignant sanguinaire opérait,<br />
selon Sassi, en faisant exécuter<br />
des Algériens qu’il avait<br />
auparavant listés. Dans son<br />
œuvre macabre, il prenait le soin<br />
de mettre sur sa liste macabre<br />
les noms de ses anciens élèves.<br />
A partir du 11 mai, Guelma était<br />
un véritable terrain de chasse à<br />
l’homme. Benhamla raconte que<br />
du renseignement au profit de l'ALN dans<br />
la région de Mostaganem durant la<br />
guerre d'Algérie. Ce nombre émane de<br />
l'armée française dont les communications<br />
sont interceptées quotidiennement<br />
par les cellules de renseignements de<br />
l'ALN. «Nous interceptons quotidiennement<br />
les communications de la gendarmerie,<br />
de l'armée et de la police françaises»,<br />
révèle Yazid Zerhouni pour appuyer<br />
la véracité de ses statistiques<br />
relatives à la population algérienne barricadée<br />
dans les campements de l'armée<br />
coloniale. «Nous avons des informations<br />
sur l'armée coloniale en temps réel»,<br />
s'enorgueillit Yazid Zerhouni. Ces campements<br />
dans des zones faciles à surveiller<br />
obéissent à une logique militaire française.<br />
Elle vise à contrecarrer la Révolution<br />
algérienne, en séparant la population<br />
des moudjahidine. «Pour tuer un poisson,<br />
il suffit de retirer l'eau où il vit.<br />
Pour tuer l'action des moudjahidine, il<br />
faut les séparer de sa population», explique<br />
Yazid Zerhouni. L'orateur est revenu<br />
ensuite sur la nécessité de relire les<br />
ouvrages écrits par des historiens étran-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
20<br />
Saci Benhamla raconte les massacres du 8 mai 1945 à Guelma<br />
Achiary et les milices civiles étaient derrière l’horreur<br />
ZERHOUNI APPORTE SON TÉMOIGNAGE SUR LA RÉVOLUTION<br />
3,5 millions d'Algériens ont vécu dans des campements<br />
les milices avaient d’abord libéré<br />
les prisonniers et fait sortir<br />
les malades des hôpitaux<br />
avant de les exécuter en plein<br />
ville. Ce fut une boucherie indescriptible,<br />
se souvint encore<br />
l’un des derniers témoins du<br />
massacre de Guelma. Il se rappelle<br />
également la carrière de<br />
pierre, appelée carrière Tive.<br />
C’est là que les milices acheminaient<br />
des Algériens arrêtés<br />
dans les localités, villages et<br />
douars environnants, et les<br />
achevaient froidement. Les dépouilles<br />
étaient jetées dans des<br />
fosses profondes avant qu’elles<br />
ne soient brûlées. Les habitants<br />
de Guelma sentaient l’odeur de<br />
la chair brûlée, se remémore encore<br />
ce témoin de l’horreur perpétré<br />
par le colonialisme contre<br />
des civils sans armes à Guelma<br />
quelque temps seulement après<br />
la libération de Paris de l’occupation<br />
nazie.L’imagination meurtrière<br />
des milices sanguinaires<br />
fut poussée jusqu’à son paroxysme<br />
quand elles décidèrent<br />
de mettre les cadavres dans des<br />
fours à chaux du fameux Djebel<br />
El-Boumba. Elles cherchaient,<br />
raconte Benhamla, à dissimuler<br />
les traces de leur ignoble<br />
crime, à la veille de la venue de<br />
la mission d’enquête à Guelma<br />
(commission Tubert). Près de<br />
12 000 Algériens furent froidement<br />
exécutés à Guelma, lors<br />
de ces évènements qui ensanglantèrent<br />
l’Algérie. Ces massacres<br />
furent aussi le véritable<br />
déclencheur d’une colère qui<br />
s’étendra sur l’ensemble du territoire<br />
national. Ce fut le 1 er novembre<br />
1954, une révolution populaire<br />
pour l’indépendance, au<br />
cours de laquelle Guelma la martyre<br />
fut une haute place du combat<br />
libérateur du peuple algérien.<br />
gers, notamment français. Dont des<br />
contre-vérités sont prises pour des faits<br />
réels et admis par tous. «J'espère que<br />
les historiens algériens se pencheront<br />
davantage sur cet épisode colonial», souhaite<br />
Yazid Zerhouni lequel conseillera<br />
aux «jeunes chercheurs algériens la maîtrise<br />
de la langue française pour mieux<br />
comprendre le contenu des archives de<br />
l'armée française. En paraphrasant Kateb<br />
Yacine, «la langue française est un butin<br />
de guerre». Sur le contexte de contre-vérité<br />
qui se résume à «l'inexistence de<br />
l'Etat algérien» avant la colonisation,<br />
Yazid Zerhouni s'inscrit en faux et réfute<br />
«ces mensonges» pris pour une vérité<br />
absolue. Si on parle de la naissance d'un<br />
Etat algérien, «il faut placer cette problématique<br />
dans le contexte de<br />
l'époque», affirme l'intervenant en citant<br />
l'Italie et l'Allemagne. «L'Etat allemand a<br />
été fondé en 1870. L'unification de l'Italie<br />
a eu lieu en 1830», alors que «le roi Massinissa<br />
a unifié le pays et les peuples<br />
d'Afrique du Nord depuis l'Atlas jusqu'en<br />
Egypte, avant l'ère chrétienne».<br />
Mahmoud Chaal
5 <strong>Juillet</strong><br />
Ainsi commence l’année 1958<br />
De la IV e à la V e <strong>République</strong><br />
, Enlisée dans la<br />
guerre d’Algérie, la<br />
IV e <strong>République</strong> succombe<br />
à la crise du<br />
13 mai 1958 qui crée<br />
les conditions du retour<br />
au pouvoir du<br />
général de Gaulle.<br />
«13 mai 1958» À Alger, une<br />
manifestation à la mémoire<br />
de trois prisonniers<br />
français exécutés par le<br />
Front de libération nationale<br />
( FLN ) tourne à<br />
l’émeute.<br />
Un comité présidé par le<br />
général Massu, exige la<br />
formation d’un gouvernement<br />
de salut public.<br />
13 et 14 mai 1958:<br />
À Paris, Pierre Pflimlin,<br />
partisan de réformes libérales<br />
en Algérie, est investi<br />
à la tête d’un gouvernement<br />
de centre-droit qui<br />
est dénoncé par les activistes<br />
algérois comme un<br />
«gouvernement d’abandon».<br />
15 mai 1958:<br />
À Alger, le général Salan,<br />
détenteur des pouvoirs civils<br />
et militaires, s’adresse<br />
à la foule place du Forum<br />
et achève son allocution<br />
en criant :<br />
« Vive de Gaulle ».<br />
À Paris, communiqué du<br />
général de Gaulle : « Je me<br />
tiens prêt à assumer les<br />
pouvoirs de la <strong>République</strong>».<br />
- 24 mai 1958 - Opération<br />
résurrection en Corse, des<br />
parachutistes venus d’Alger<br />
prennent le contrôle<br />
De Gaulle à Alger en 1958. (Photo > D. R.)<br />
de l’île qui passe à la dissidence.<br />
?<br />
27 mai 1958 : Communiqué<br />
du général de Gaulle :<br />
«J’ai entamé le processus<br />
régulier nécessaire à l’établissement<br />
d’un gouvernement<br />
républicain».<br />
- 28 mai 1958: À Paris, démission<br />
du gouvernement<br />
Pflimlin et manifestation<br />
pour la défense de la <strong>République</strong>.<br />
- 29 mai 1958 : Message au<br />
Parlement du président<br />
de la <strong>République</strong> René<br />
Coty annonçant sa déci-<br />
sion de faire appel «au<br />
plus illustre des Français<br />
». De Gaulle reçu à l’Élysée.<br />
1 er et 2 juin 1958 : De<br />
Gaulle est investi à la tête<br />
du dernier gouvernement<br />
de la IV <strong>République</strong> et reçoit<br />
les pleins pouvoirs<br />
avec mission de préparer<br />
une nouvelle constitution.<br />
- 4 juin 1958: Premier<br />
voyage du général de<br />
Gaulle en Algérie: «Je vous<br />
ai compris».<br />
4 Septembre 1958:<br />
De Gaulle présente solennellement<br />
le projet de<br />
<strong>La</strong> fin de la guerre d’Algérie<br />
(1958 / 1962)<br />
- L'émeute algéroise du 13 Mai<br />
1958, entraîne la chute de la 4°<br />
<strong>République</strong>.<br />
-Le Général De Gaulle impose<br />
à l'armée et aux Européens l'indépendance<br />
de l'Algérie. Résolu<br />
à résoudre de manière<br />
pragmatique le problème algérien,<br />
le Général doit tenir<br />
compte des circonstances qui<br />
vont le conduire progressivement<br />
à l'idée de l'indépendance<br />
algérienne:<br />
<strong>La</strong> détermination du FLN qui<br />
forme un Gouvernement provisoire<br />
de la république Algérienne<br />
(GPRA) Le désaveu de<br />
l'opinion internationale. <strong>La</strong> lassitude<br />
des Français devant ce<br />
conflit interminable. Une série<br />
de discours jalonne sa propre<br />
évolution et prépare progressivement<br />
l'opinion à l'indépendance<br />
algérienne.<br />
En Septembre 1958, De Gaulle<br />
propose en vain au FLN une<br />
reddition honorable, la "Paix<br />
des Braves". En Septembre<br />
1959, il franchit une étape dé-<br />
cisive en reconnaissant aux algériens<br />
le droit à l'autodétermination.<br />
Puis il évoquera successivement<br />
" L'Algérie algérienne",<br />
un "Etat algérien<br />
souverain". Dés 1960, il entame<br />
avec le FLN des pourparlers<br />
qui aboutissent, le 18 Mars<br />
1962, aux accords d'Evian, reconnaissant<br />
l'indépendance<br />
de l'Algérie.<br />
- Les Européens et l'armée, qui<br />
ont porté De Gaulle au pouvoir,<br />
ont le sentiment d'une<br />
trahison. Ils rêvent d'un nouveau<br />
13 Mai qui le chasserait<br />
du pouvoir. En Janvier 1960,les<br />
activistes d'Alger déclenchent<br />
une semaine d'émeute, la "semaine<br />
des barricades". En<br />
Avril 1961, quatre Généraux<br />
(Challe, Salan, Jouhaud et Zeller<br />
- les deux premiers étant<br />
d'anciens commandants en<br />
chef d’Algérie) provoquent un<br />
Putsch qui échoue devant le<br />
refus des soldats du contingent<br />
de suivre les officiers rebelles<br />
et devant la fermeté du<br />
Constitution, place de la<br />
<strong>République</strong> à Paris. - 28<br />
septembre 1958: <strong>La</strong> nouvelle<br />
Constitution est<br />
adoptée par référendum<br />
( près de 80 % de OUI ).<br />
3 octobre 1958:<br />
À Constantine, de Gaulle<br />
annonce un ambitieux<br />
programme de réformes<br />
en faveur des Musulmans<br />
d’Algérie.<br />
23 et 30 novembre 1958:<br />
Premières élections légis<br />
latives de la V <strong>République</strong>,<br />
au scrutin majoritaire à<br />
deux tours.<br />
Chef de l'Etat. Désormais, les<br />
activistes se retrouvent dans<br />
l'Organisation armée secrète<br />
(OAS): par une série d'attentats<br />
en Métropole et en Algérie,<br />
celle-ci s'efforce de rendre impossible<br />
tout accord avec le<br />
FLN, puis une fois celui-ci acquis,<br />
d'en empêcher l'application.<br />
- 700 000 Européens doivent<br />
quitter avec déchirement l'Algérie.<br />
L’action de l'OAS aboutissant<br />
en effet à rendre impossible<br />
la cohabitation des<br />
deux communautés européenne<br />
et musulmane, ils<br />
abandonnent une terre sur laquelle<br />
ils sont nés et laissent<br />
leurs biens, pour affronter un<br />
difficile reclassement en Métropole.<br />
Quant à l'OAS, elle<br />
tente à diverses reprises d'assassiner<br />
le Général De Gaulle:<br />
le 22 Août 1962, celui-ci<br />
n'échappe à la mort que de<br />
justesse lors de l'attentat du<br />
petit Clamart, prés de Paris.<br />
Eric Le Barbu<br />
21 décembre 1958 :<br />
Le général de Gaulle est<br />
élu président de la <strong>République</strong>.<br />
Le 31 mai 1958, le dernier<br />
président<br />
De la IV e <strong>République</strong>, René<br />
Coty, raccompagne sur les<br />
marches de l’Élysée,<br />
Charles De Gaulle qui est<br />
venu lui confirmer qu’il<br />
acceptait de former un<br />
gouvernement et qui sera<br />
bientôt le premier président<br />
de la Vème <strong>République</strong>.<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
21<br />
Après<br />
la colonisation<br />
militaire,<br />
la colonisation<br />
agricole<br />
Par arrêté du 18 avril<br />
1840/1851 le maréchal<br />
Bugeaud fait consacrer<br />
la concession gratuite<br />
des terres. Le peuplement<br />
par un peu plus de<br />
cent milles colons des<br />
meilleures terres est fait<br />
sous réserve que ces<br />
nouveaux propriétaires y<br />
résident en permanence.<br />
Les crédits nécessaires<br />
à la mise en<br />
valeur des terres sont<br />
attribués avec des documents<br />
de propriété immédiate<br />
et transmissible<br />
( maréchal Randon décret<br />
1851).<br />
De 1872 à 1878 les français<br />
vont s’inspirer de la<br />
loi américaine du « homestead<br />
» en établissant<br />
le principe de l’attribution<br />
gratuite sous<br />
condition de résidence<br />
deux à trois ans. Cette<br />
loi va accélérer considérablement<br />
l’arrivée de<br />
nouveaux colons.<br />
On comptait 207 615 cultivateurs<br />
européens en<br />
1888 contre 3 254 724<br />
cultivateurs algériens<br />
qui ne possédaient plus<br />
que des terres rocailleuses<br />
ou très mal irriguées.<br />
Beaucoup de<br />
Lorrains Alsaciens se<br />
sont fixés en Algérie.<br />
Tous les résistants Kabyles<br />
se sont vus confisquer<br />
leurs terres, notamment<br />
en Petite Kabylie<br />
et en Grande<br />
Kabylie à cette époque.<br />
<strong>La</strong> guerre d'Algérie est un facteur<br />
de déstabilisation économique<br />
C'est un gouffre financier qui relance<br />
l'inflation, creuse le déficit<br />
budgétaire, détériore la balance<br />
commerciale, épuise les ressources<br />
en devises. Dès 1957, il<br />
faut freiner l'expansion et renoncer<br />
aux dépenses sociales. Par<br />
ailleurs, le conflit algérien provoque<br />
une profonde crise morale:<br />
des intellectuels, des étudiants,<br />
des jeunes, des représentants<br />
des Eglises réclament la fin<br />
d'une guerre conduite contre les<br />
aspirations nationales d'un<br />
peuple et protestent contre l'utilisation<br />
de la torture. Enfin, la<br />
Guerre d'Algérie fait éclater la majorité<br />
de Gauche, victorieuse aux<br />
élections de 1956, et paralyse le<br />
pouvoir. Une partie de la majorité<br />
rejette en effet la politique<br />
du gouvernement de Guy Mollet.<br />
Les ministères qui se succèdent<br />
en 1957 - 1958 cherchent une solution<br />
politique à la crise algérienne,<br />
mais sans oser le dire, car<br />
ils manquent d'autorité pour l'imposer<br />
au Parlement, aux Européens<br />
d'Algérie et à l'armée. Le<br />
pouvoir est paralysé et la guerre<br />
débouche sur une crise de régime.<br />
Mais l'Algérie française<br />
trouve aussi des défenseurs chez<br />
les intellectuels de gauche. Pour<br />
une partie des socialistes qui suivent<br />
leur secrétaire général, Guy<br />
Mollet, pour des intellectuels<br />
comme l'ethnologue Albert Bayet,<br />
l'indépendance algérienne constituerait<br />
un renoncement à l'œuvre<br />
civilisatrice de la France qui a implanté<br />
en Algérie le progrès, la<br />
laïcité, les droits de l'Homme et<br />
qui abandonnerait la population<br />
algérienne à un islam réactionnaire,<br />
clérical, rétrograde. Certains<br />
intellectuels de droite se radicalisent<br />
à partir de 1960. On retrouve<br />
de nombreux professeurs<br />
et écrivains au colloque de Vincennes<br />
de juin 1960 qui rassemble<br />
les partisans de l'Algérie française<br />
ou parmi les signataires en octobre<br />
1960, du «Manifeste des intellectuels<br />
français» qui dénonce<br />
les «121» comme des «professeurs<br />
de trahison». Enfin, quelques-unes<br />
appuieront l'OAS tout en réprouvant<br />
les attentats sanglants organisés<br />
par celle ci.
5 <strong>Juillet</strong><br />
Les 13 e Assises de Taza<br />
Place forte de l'Emir Abd-El-Kader<br />
, <strong>La</strong> wilaya de Tissemsilt<br />
organise en collaboration<br />
avec la direction de la culture<br />
et la fondation de<br />
l'Emir Abd-El-Kader, sous<br />
l’égide de la ministre de la<br />
Culture, du 3 au 5 juillet de<br />
chaque année, les 13 es Assises<br />
de la ville de Taza, relevant<br />
de la commune de<br />
Bordj Emir Abd-Elkader.<br />
S'insérant dans le cadre de la célébration<br />
du 50 e anniversaire de<br />
l'Indépendance, cette manifestation<br />
sera consacrée à l’exploit<br />
de plusieurs activités dont le colloque<br />
du fondateur de l'État algérien<br />
moderne, treizième du genre<br />
sur l'Emir Abd El Kader dont la<br />
ville, considérée comme la forteresse<br />
de l'Emir, porte le nom de<br />
Taza. Les valeurs de la tolérance<br />
chez l’Emir Abd-El-Kader seront<br />
abordées aux «13 es assises de<br />
Taza», prévues ce mardi dernier<br />
dans la commune de Bordj Emir<br />
Abd- El-Kader (Tissemsilt). Ces<br />
assises, organisées chaque année<br />
pour commémorer un événement<br />
historique important ayant trait à<br />
la résistance populaire algérienne<br />
contre l'occupation française, traiteront<br />
cette fois-ci du conseil de<br />
la Choura, tenu à la citadelle de<br />
Taza le 3 juillet 1839, où l’Emir annonça<br />
à nouveau le jihad suite à<br />
la violation par les forces coloniales<br />
du Traité de Tafna. De nombreux<br />
chercheurs et spécialistes<br />
en archéologie, histoire et<br />
sciences politiques traiteront, lors<br />
de cette rencontre, du parcours<br />
militant de l'Emir Abd- El- Kader et<br />
de sa pensée prônant la paix, la réconciliation<br />
et la tolérance, a souligné<br />
le président de l'association<br />
«Taza» d’archéologie et du patrimoine,<br />
Ahmed Chelghoum. Ces<br />
assises de trois jours s'inscrivent<br />
dans le cadre de la célébration<br />
du cinquantième anniversaire du<br />
recouvrement de l'Indépendance<br />
nationale. Co-organisée par l'association<br />
d’archéologie et du patrimoine<br />
de Taza et la direction de la<br />
culture, cette rencontre sera mise<br />
à profit par le Dr Azzedine Bouyahiaoui,<br />
spécialiste en archéologie<br />
de l'université d'Alger pour présenter<br />
les résultats des fouilles<br />
effectuées au cours des dix dernières<br />
années sur le site archéologique<br />
de la citadelle de l'Emir<br />
Abd El-Kader à Taza. Les organisateurs<br />
ont également programmé<br />
plusieurs activités culturelles et<br />
sportives, dont des «portes ouvertes»<br />
au musée de Bordj Emir<br />
Abd-El-Kader et des expositions<br />
de photos sur les réalisations et<br />
les acquis de l'Indépendance, ainsi<br />
que des représentations folkloriques<br />
de différents genres artistiques:<br />
kabyle, chaoui, oranais et<br />
sahraoui.En plus de tournois de<br />
football, de volley-ball et de handball,<br />
des récitals poétiques et des<br />
ateliers scientifiques sur l’archéologie<br />
seront animés par des associations<br />
versées dans l’histoire<br />
et le patrimoine culturel. Entre<br />
autres des conférences seront<br />
présentées lors de ces assises.<br />
L'objectif de cette rencontre, a indiqué<br />
le président de l'association<br />
archéologique et du patrimoine<br />
de la ville de Bordj Emir<br />
,Il est réputé pour son franc-parler et sa droiture, admirateur<br />
de l’Algérie Libre dès son plus jeune âge et séduit<br />
par la lecture de tout ce qui se rapporte à l’histoire<br />
de l’Algérie, c’est pour défendre un idéal de justice et<br />
d’égalité que Ami Mohamed Khiar entrera en résistance<br />
contre le colonialisme français.<br />
Né en 1936 dans le quartier populaire Djebbès, 1er Novembre<br />
actuellement, dans une famille de modestes<br />
gens, dès l’âge de 18 ans suite à un massacre perpétué<br />
par l’armée française dans la ville de Bordj Bou Arreridj,<br />
où 10 Moudjahidine ont été tués, Ami Mohamed,<br />
puisque tous l’appellent ainsi, décide non pas d’émigré<br />
en France mais de lutter contre la France. « J’avais 18<br />
ans et ma mère venait de me signer l’autorisation d’immigré<br />
en France mais à la vue de ce massacre j’ai brulé<br />
Le traité de la Tafna qui fut par la suite bafoué par le colonisateur. (Photo > D. R.)<br />
Abd-El-Kader (Taza), de mettre<br />
en évidence les exploits et les<br />
œuvres du chef de la résistance<br />
populaire contre le colonisateur<br />
français sur le plan politique, littéraire<br />
et religieux, le but étant<br />
également a-t-il ajouté, de donner<br />
la lumière sur l'histoire de la région<br />
et son site archéologique, à<br />
savoir la citadelle de l’Émir Abd-<br />
El-Kader connu sous le nom de<br />
Taza Le bastion de «Taza», édifié<br />
en juin 1838 par le khalifa de Miliana,<br />
Mohamed Ben Allal sur<br />
ordre de l’Emir Abd-El-Kader, comprenait<br />
plusieurs édifices de type<br />
militaire adaptés aux conditions<br />
de guerre de cette époque, notamment<br />
la citadelle, les usines<br />
militaires, les entrepôts, la prison,<br />
l’écurie et la boulangerie. <strong>La</strong><br />
même source a souligné que l’organisation<br />
de ces assises, qui<br />
s’étaleront jusqu’au 5 juillet, coïncide<br />
avec la commémoration d’un<br />
événement historique ayant trait<br />
à la résistance populaire algé-<br />
rienne contre le colonialisme français<br />
qui est la tenue du Conseil de<br />
la choura à la citadelle de «Taza»<br />
un 3 juillet 1839, où l’Emir Abd-Elk-<br />
Kader avait annoncé de nouveau<br />
le jihad en réplique au désavouement<br />
du Traité «Tafna» par le colonisateur.<br />
Le programme élaboré<br />
pour ces assises prévoit des<br />
conférences abordant «Les traités<br />
de paix entre le président de<br />
la <strong>République</strong> de l’époque et<br />
l’Emir Abd-El-Kader» et «<strong>La</strong> résistance<br />
nationale chez l’Emir»,<br />
«L’originalité chez l’Emir Abd-El-<br />
Kader, l’habit comme modèle», en<br />
plus de sujets traitant de l’identité<br />
nationale et de la lutte contre le<br />
trafic d’objets antiquaires, selon<br />
la même source. Lors de cette<br />
rencontre, le Dr. Azzedine Bouyahiaoui,<br />
professeur d’archéologie à<br />
l’Université de Bouzaréah (Alger),<br />
animera une communication où<br />
il présentera les résultats des<br />
fouilles effectuées l’an dernier au<br />
niveau du site archéologique du<br />
Portrait d’un révolutionnaire<br />
Ammi Mohamed Khiar<br />
les papiers et je me suis engagé comme Fidie dans la révolution<br />
algérienne », se rappela-t-il. Son portrait révèle<br />
la personnalité exemplaire d’un algérien citoyen qui<br />
consacra toute son énergie à la Révolution et à l’Algérie.<br />
Notre interlocuteur n’aime pas trop parler de sa personne,<br />
néanmoins il nous accorde une courte discussion,<br />
mais qui en dit long sur sa longue vie. « J'ai accepté<br />
d'être avec eux, en abandonnant tout mes projets<br />
pour la juste cause dira-t-il en substance. En 1956,<br />
j’étais obligé de quitter Bordj Bou Arreridj parce qu’on<br />
vient de découvrir notre groupe. Je rejoins le maquis à<br />
1ere wilaya ensuite la 3ème jusqu’à 1962, ensuite j’ai<br />
travaillé au sein l’ANP jusqu’à 1983 », dira-t-il fièrement.<br />
Sa modestie nous laisse quelque peu avide d’en savoir<br />
<strong>La</strong> NR 4371 - Jeudi 5 juillet 2012<br />
22<br />
bastion de l’Emir Abd-El-Kader<br />
connu sous le nom de «Taza», implanté<br />
dans la commune de Bordj-<br />
Emir Abd-El-Kader. Les participants,<br />
a-t-il précisé, aborderont<br />
entre autres thèmes «<strong>La</strong> personnalité<br />
de l’Emir Abd-El-Kader pendant<br />
sa lutte contre le colonisateur»,<br />
«Synthèse d’un livre sur le<br />
fondateur de l’Etat algérien», et<br />
«Le rôle des monuments dans la<br />
promotion de la coexistence entre<br />
les peuples». Un concours national<br />
de la meilleure Toile exprimant<br />
la paix, des tables rondes,<br />
des tournois sportifs, des portes<br />
ouvertes sur le musée communal,<br />
une exposition des arts traditionnels,<br />
des récitals poétiques,<br />
des soirées artistiques et une visite<br />
touristique au site archéologique<br />
précité, figurent également<br />
au programme. Les organisateurs<br />
de cette assise et les participants,<br />
notamment la nouvelle génération,<br />
revivre le rôle joué par l’Émir<br />
Abd-El-Kader. Par ailleurs, sur le<br />
site de Taza, où l’Émir Abd-El-<br />
Kader a tenu son dernier conseil<br />
de guerre le 3 juillet 1839 a pris<br />
une importance aussi grande que<br />
Tagdempt, Boughar, Mascara et<br />
Saïda. Pour les spécialistes de<br />
l'histoire, le Traité de la Tafna<br />
sanctionne la première phase de<br />
la stratégie militaire de l’Émir Abd-<br />
El-Kader considérant le paraphe<br />
par l’Émir Abd-El-Kader de ce document<br />
comme l'expression de<br />
la haute maîtrise du jeune Emir,<br />
âgé de 25 ans (30 mai 1837). Il<br />
s'agit, indique-t-on, d'un document<br />
original qui n'a été divulgué qu'en<br />
1950 par un chercheur français,<br />
Marcel Emmuari.<br />
L’Émir Abd-El-Kader devrait<br />
constituer un exemple pour les<br />
jeunes d'aujourd'hui de par ses<br />
comportements et ses écrits entre<br />
la tradition et la modernité de ses<br />
conceptions politiques et militaires.<br />
Par ailleurs, la création de<br />
la citadelle à Taza, exprimait la<br />
vue éclairée du fondateur de l'État<br />
algérien moderne. Cette même<br />
maîtrise que l’Émir Abd-El-Kader<br />
Ibn Mahieddine avait démontré<br />
sur le terrain durant les batailles<br />
de Khang Netah en 1833 et de la<br />
Macta en 1835.<br />
Abed Meghit<br />
plus. Il se contente d’ailleurs d’effleurer son parcours<br />
de moudjahid ; ses actions et ses performances, ils les<br />
résument d’ailleurs en quelques mots : « Tout ce que<br />
nous avons fait c’est peu devant ce que le peuple a<br />
donné », dira-t-il « Sans lui, rien n’aurait été fait ou<br />
gagné », ajoute-t-il.<br />
Ami Mohamed profite de notre présence pour lancer un<br />
appel à la direction de l’éducation d’intégrer dans ses<br />
cours d’histoire ou d’éducation civique des conférences<br />
avec des Moudjahidines pour donner aux jeunes<br />
un témoignage vivant et réel de notre révolution.<br />
L’autre point sur lequel notre interlocuteur insiste est<br />
celui d’inculquer aux jeunes la notion de nationalisme,<br />
de l’amour de la patrie et surtout la vérité et la liberté.<br />
S.-K. B.
NR<br />
LA<br />
LA NOUVELLE RÉPUBLIQUE<br />
, Krim Belkacem est un des<br />
grands noms de la Révolution<br />
du 1 er Novembre 1954. Un nom<br />
associé aux plus grands<br />
événements de l’histoire de la<br />
guerre de Libération.<br />
Chef historique, surnommé le lion<br />
des djebels par les soldats français,<br />
Krim Belkacem est né le 15 décembre<br />
1922 à Aït Yahia Moussa,<br />
dans la daïra de Drâa El Mizan,<br />
dans la wilaya de Tizi-Ouzou. Fils de<br />
caïd, il fréquente l’école Sarrouy à<br />
Alger où il obtient son certificat<br />
d’études. Le 21 août 1942, il s’engage<br />
aux chantiers de la jeunesse<br />
à <strong>La</strong>ghouat. Inquiet des idées nationalistes<br />
de son fils, son père accélère<br />
son passage sous les drapeaux<br />
et le fait entrer dans l’armée. Le<br />
jeune homme devient un excellent<br />
tireur et, en novembre 1944, il est<br />
nommé caporal-chef au 1 er régiment<br />
de tirailleurs algériens. Une<br />
année plus tard, il est démobilisé.<br />
Ce sera le retour au village natal, auprès<br />
des siens. Il occupe alors le<br />
poste de secrétaire auxiliaire de la<br />
commune. Krim Belkacem adhère<br />
ensuite au PPA et commence à implanter<br />
des cellules clandestines<br />
dans les villages environnants. Inquiètes<br />
de cette influence qu’il<br />
commence à avoir sur la population,<br />
les autorités françaises le<br />
convoquent le 23 mars 1947 au<br />
motif d’«atteinte à la souveraineté<br />
de l’Etat». Prenant d’abord l’avis<br />
du PPA, Krim Belkacem choisit de<br />
prendre le maquis, sous le nom de<br />
Si Rabah. Des menaces et des pressions<br />
sont exercées sur son père<br />
afin qu’il livre son fils mais il refuse<br />
d’abdiquer. En guise de représailles,<br />
Krim Belkacem dresse une<br />
embuscade contre le caïd qui n’est<br />
autre que son cousin et le gardechampêtre.<br />
Ce dernier est tué sur<br />
le coup. Il est alors jugé en 1947 et<br />
1950 pour différents crimes et<br />
condamné à mort par contumace.<br />
Désigné responsable du PPA-MTLD<br />
pour toute la Kabylie et, à la tête<br />
d’un état-major composé de 22 maquisards,<br />
il multiplie les contacts<br />
avec les militants et la population,<br />
réussissant l’exploit de faire enrôler<br />
dans son maquis quelque 500<br />
éléments et ce, à la veille du 1 er novembre<br />
1954. Il a pour proche collaborateur<br />
Amar Ouamrane. Le 9<br />
juin 1954, Krim Belkacem rencontre,<br />
à Alger, Mostefa Ben Boulaïd,<br />
ainsi que Mohamed Boudiaf et<br />
Didouche Mourad. Ces derniers<br />
font tout pour le convaincre de la<br />
nécessité d’une troisième force.<br />
Toutefois, Krim ne rompt pas avec<br />
les messalistes vu que deux de ses<br />
représentants, en l’occurrence Ali<br />
Zamoum et Aït Abdesslam, participent<br />
en juillet 1954 au congrès<br />
d’Hornu en Belgique. Un accord<br />
est finalement passé avec les cinq<br />
responsables du «groupe des 22».<br />
Krim Belkacem et la délégation algérienne à Evian. (Photo > D. R.)<br />
Il rompt avec Messali Hadj en août<br />
1954, sans en informer les militants.<br />
En devenant le 6 e membre de<br />
la direction du FLN (les six chefs<br />
historiques), Krim est le responsable<br />
de la zone de Kabylie. Il encourage<br />
alors Abane Ramdane à<br />
accélérer les préparatifs de la réunion-bilan<br />
afin de doter la Révolution<br />
d’un programme et d’une<br />
structure cohérents : le congrès<br />
de la Soummam se tient le 20 août<br />
1956. Au terme de cette réunion,<br />
Krim devient l’un des membres les<br />
plus influents du Conseil national<br />
de la révolution algérienne (CNRA)<br />
et du Comité de coordination et<br />
d’exécution (CEE). S’installant avec<br />
ce dernier à Alger, il suit néanmoins<br />
de près le fonctionnement de sa wilaya.<br />
A l’automne 1956, les services<br />
secrets français lancent l’opéra-<br />
5 <strong>Juillet</strong><br />
Figure de la Révolution<br />
Krim Belkacem : lion aux djebels, renard à Evian<br />
tion «Oiseau bleu» aux fins de lutter<br />
contre Krim et ses hommes.<br />
300 volontaires sont recrutés pour<br />
former ce «contre-maquis», munis<br />
d’armes et de munitions. Pourtant,<br />
Mehlal Said, Zaidet Ahmed, Omar<br />
Toumi, Makhlouf Said et Hammadi<br />
parviennent à déjouer cette opération<br />
et à la tourner à leur avantage.<br />
Face à cette humiliation, 10 000<br />
soldats français investissent les<br />
maquis dans l’espoir d’anéantir les<br />
hommes de la «Force K» (Oiseau<br />
bleu) mais ils essuient un second<br />
camouflet car tous ont déjà rejoint<br />
les rangs de Krim Belkacem, emportant<br />
avec eux plus de 250 fusils<br />
de guerre.<br />
Création de la Zone autonome<br />
d’Alger<br />
Vers novembre-décembre 1956,<br />
Krim Belkacem a pour mission de<br />
créer, avec ses compagnons du<br />
CCE, à savoir Abane Ramdane,<br />
<strong>La</strong>rbi Ben M’Hidi et Benyoucef Benkhedda,<br />
la Zone autonome d’Alger<br />
(ZAA) afin de superviser la guérilla<br />
urbaine dans l’Algérois. Il s’attribue<br />
les liaisons avec toutes les<br />
wilayas, ce qui fait de lui le chef<br />
d’état-major de la zone algéroise et<br />
le stratège de la lutte armée. Mais<br />
au cours de la bataille d’Alger, Ben<br />
M’Hidi est capturé, ce qui pousse<br />
Krim Belkacem à fuir Alger le 5<br />
mars 1957, accompagné de Ben-<br />
Désigné responsable du PPA-MTLD pour<br />
toute la Kabylie et, à la tête d’un étatmajor<br />
composé de 22 maquisards,<br />
il multiplie les contacts avec les militants<br />
et la population, réussissant l’exploit de<br />
faire enrôler dans son maquis quelque<br />
500 éléments et ce, à la veille<br />
du 1 er novembre 1954.<br />
Il a pour proche collaborateur<br />
Amar Ouamrane.<br />
khedda puis Bentobbal. Il gagne la<br />
Tunisie via les maquis. En août de<br />
la même année, le CNRA se réunit<br />
au Caire pour entériner les décisions<br />
arrêtées la veille au cours<br />
d’une réunion extraordinaire du<br />
CCE. Benkhedda et Dahlab se re-<br />
<strong>La</strong> NR 4371 – Jeudi 5 juillet 2012<br />
trouvent écartés du nouveau comité,<br />
quant à Abane, il est isolé.<br />
Krim, Bentoubbal et Boussouf<br />
constituent, dès lors, le noyau dur<br />
des chefs par lequel passent toutes<br />
les décisions. A la formation du<br />
GPRA, le 19 septembre 1958, Krim<br />
Belkacem est au faîte de sa puissance<br />
(il est vice-président et ministre<br />
des forces armées), ce qui ne<br />
plaît pas à tout le monde, d’où cette<br />
tentative de coup d’Etat fomentée<br />
par les colonels <strong>La</strong>mouri,<br />
Naouaoura et Aouacheria et qui le<br />
vise directement. Dans le deuxième<br />
GPRA (janvier 1960-août 1961),<br />
Krim garde la vice-présidence mais<br />
passe aux affaires étrangères. Enfin<br />
dans le troisième, il cumule viceprésidence<br />
et ministère de l'Intérieur,<br />
de même que c'est à lui qu'est<br />
confiée la délégation qui va négocier<br />
les accords d’Evian et dont il<br />
sera le signataire, du côté algérien.<br />
Au lendemain du cessez-le-feu, naissent<br />
des désaccords : Krim s’oppose<br />
à Ben Bella et à l’état-major général.<br />
Il se retrouve, suite à la victoire<br />
de ces derniers, écarté de la<br />
vie politique. Il se tourne momentanément<br />
vers les affaires et part<br />
s’installer en France. Il repasse<br />
dans l’opposition après le coup<br />
d’Etat du 19 juin 1965. Accusé<br />
d'avoir organisé, au mois d'avril<br />
1967, un attentat contre Boumédiene,<br />
manipulé et trahi par une<br />
partie de son entourage, il est<br />
condamné à mort par contumace.<br />
Lors d’une interview accordée au<br />
quotidien national El Moudjahid (le<br />
25 mars 1998), sa fille Karima, médecin,<br />
a déclaré que son père renonça<br />
définitivement à la politique<br />
en août 1967 : «Le 4 août 1967, il entassa<br />
précipitamment toute sa famille<br />
avec quelques effets dans la<br />
Volkswagen familiale et roula toute<br />
la nuit jusqu'au Maroc. Le lendemain,<br />
il est condamné par contumace.»<br />
Commence alors une dure<br />
vie d’exil.<br />
En 1968, il crée avec quelques amis<br />
dont Slimane Amirat, les colonels<br />
Amar Ouamrane et Mohand Oulhadj,<br />
le Mouvement pour la défense<br />
de la révolution algérienne<br />
(MDRA), parti qui active dans la<br />
clandestinité. Krim Belkacem est<br />
retrouvé mort, le 18 octobre 1970,<br />
étranglé avec sa cravate dans une<br />
chambre de l’hôtel Intercontinental<br />
à Francfort.<br />
Il avait 48 ans. Il a été enterré dans<br />
le carré musulman de la ville allemande<br />
jusqu'au 24 octobre 1984,<br />
date à laquelle, réhabilité, sa dépouille<br />
a été rapatriée. Il repose, aujourd’hui,<br />
au «Carré des Martyrs» à<br />
El-Alia, à Alger. Krim Belkacem a<br />
été, à l’époque, le plus jeune colonel<br />
au monde.<br />
Voir sur Internet<br />
www.lnr-dz.com