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CCoonntteess eett llééggeennddeess<br />
De Modane à Bonneval<br />
’or ’or de la olombiere olombiere 3/4<br />
Cet été, <strong>Terra</strong> <strong>Modana</strong> vous propose de suivre la drôle d’aventure survenue il y a quelques années à<br />
une jeune fille et à son père en vacances du côté de Bramans… Un feuilleton signé Jean Clochard.<br />
Résumé des épisodes précédents<br />
En vacances en Haute Maurienne, Hélène et<br />
son père se lancent dans l’exploration des<br />
anciennes mines de la Colombière, au-dessus<br />
de Bramans. Après avoir découvert<br />
l’entrée de cette ancienne exploitation de<br />
cuivre, de fer, de plomb et d’argent qui<br />
appartenait à Mme de Warens, la protectrice<br />
de Jean Jacques Rousseau, ils parcourent<br />
un lacis de tunnels et de salles.<br />
Finalement, ils se heurtent à une galerie<br />
sans issue. Au moment où ils souhaitent<br />
regagner la sortie, la porte d’un couloir<br />
dérobé se découvre dans un grondement<br />
sourd. Hélène et son père s’engagent dans<br />
le passage secret d’où provient une étrange<br />
lueur. Ils atteignent enfin une grande salle,<br />
superbement taillée dans le roc. Alors qu’ils<br />
admirent l’ouvrage, une voix les fait sursauter<br />
:<br />
“Bonjour Hélène. Enfin tu es là. Approche.<br />
N’aie pas peur. Je t’attendais...”<br />
<br />
La voix provient d'une des loges qui se greffent sur la salle<br />
principale.<br />
Le coeur battant, émus et bouleversés au delà de toute<br />
expression, habités par la crainte mais, curieusement, sans la<br />
moindre sensation de panique, nous nous y rendons à petits<br />
pas, presque solennellement. Nous découvrons un vieil<br />
homme, couché sur un lit fabriqué avec des pièces de bois<br />
hétéroclites qui semblent être des étais et des manches<br />
d'outils.<br />
Les vêtements sont d'une autre époque et pourtant propres et<br />
bien tenus. Ils me rappellent les caricatures révolutionnaires<br />
représentant les paysans. Le visage et les mains ont la couleur<br />
de l'or et jettent des éclats vifs sous la lumière intense. Les che-<br />
"Nous découvrons un vieil homme, couché sur un lit fabriqué avec des pièces de<br />
bois hétéroclites qui semblent être des étais et des manches d'outils.<br />
Les vêtements sont d'une autre époque et pourtant propres et bien tenus. Ils me<br />
rappellent les caricatures révolutionnaires représentant les paysans. Le visage et<br />
les mains ont la couleur de l'or et jettent des éclats vifs sous la lumière intense.<br />
Les cheveux longs et lisses sont d'argent."<br />
Illustration X. Lett<br />
veux longs et lisses sont d'argent.<br />
Les éclairs d'or jouent sur sa main quand elle s'élève, index<br />
tendu, pour nous montrer le mur qui lui fait face. Une inscription<br />
est là, en lettres violettes, non pas portée par la pierre,<br />
mais comme suspendue dans l'air. Et nous lisons :<br />
Quand dans le ciel, le quinze, Marie s'élèvera, Quand le<br />
zéro et le deux suivront et deux et zéro, La dernière de trois,<br />
Hélène, arrivera, Et toi tu quitteras ce lieu minéral.<br />
En retombant sur la poitrine la main fait entendre un bruit<br />
de cuirasse. Le corps est en métal ! Le temps ne l'a pas altéré.<br />
C'est de l'or ! C'est fou !<br />
- Hélène, ma chère enfant, ma délivrance... J'ai tant attendu<br />
ce 15 août 2002 ... Plus de deux cents ans ... Deux cents<br />
ans...<br />
Et un soupir profond achève sa phrase.<br />
En un éclair je comprends le sens de l'inscription. La fête de<br />
Marie, c'est l'Assomption, c'est le 15 août, c'est aujourd'hui.<br />
Nous sommes bien en 2002, et Hélène est bien la dernière<br />
de trois enfants ... Qu'est-ce que tout cela signifie ?<br />
- Il y a bien longtemps je travaillais dans cette mine. C'etait<br />
dur, mais ne croyez pas que la tristesse régnait. Nous étions<br />
de joyeux compagnons et les chants plus souvent que les<br />
plaintes résonnaient dans nos trous. L'hiver nous restions<br />
dans la vallée où nous devenions menuisiers, forgerons...<br />
Ah ! Ma jeunesse... Mme de Warens était bonne et généreuse<br />
avec nous. Pour elle nous ne ménagions pas notre peine.<br />
Le filon était peu étendu mais très riche. A la fonderie, les lingots<br />
de cuivre, de fer, de zinc s'entassaient. Mais il y avait<br />
aussi de l'argent et même de l'or...<br />
Mme de Warens réservait ces métaux précieux à la création<br />
d'écoles pour les enfants pauvres, encouragée dans ses projets<br />
par M.Rousseau. L'étude m'était facile. Je savais lire et<br />
compter et j'avais l'habitude du commerce du monde. Pour<br />
ces raisons sans doute, et par confiance aussi, Mme de<br />
Warens me chargea de porter à Chambéry la production<br />
d'or de toute une saison. C'était beaucoup. J'en chargeai<br />
deux mulets et partis pour la ville. Mais la nuit tombée je fis<br />
demi-tour, je revins à la mine, je pris sur mon dos les sacs de<br />
cuir bourrés d'or, et je m'enfonçai dans une galerie au fond<br />
de laquelle j'avais ménagé une cachette secrète. Mon trésor<br />
était à peine enfoui qu'une déflagration formidable m'assourdit<br />
et me fit perdre connaissance. Quand je m'éveillai<br />
j'étais dans la salle où nous nous trouvons, et une voix me<br />
dit :<br />
-- "Honte à toi, homme du Mal ; je te condamne à creuser<br />
cette mine pendant deux cents ans. Tu extrairas l'or nuit et<br />
jour, et puisque tu l'aimes tant tu t'en nourriras jusqu'à ce<br />
que ta chair devienne or elle-même. Vois cette inscription :<br />
elle contient ton pardon".<br />
Et depuis ce jour maudit, je creuse et je me repens. Hélène,<br />
le pardon doit venir de toi, de l'Enfance que j'ai privée du<br />
Savoir...<br />
Suite et fin dans le prochain numéro.