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Cahier du CEDIC no3.pdf

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Si Galton a utilisé ses connaissances de l’hérédité pour décrire des lignées de familles de<br />

scientifiques35 , l’établissement d’arbres généalogiques a en effet servi plus tard à prouver que la<br />

prostitution, le paupérisme et la faiblesse d’esprit avaient une cause biologique36 .<br />

La première étude de ce type a été faite par Richard L. Dugdale en 1875 aux Etats-Unis. Ce dernier<br />

n’est pas ce qu’on appelle un scholar ; en effet, il ne possède aucun degré universitaire, il est lui aussi<br />

un amateur, en somme, comme prétend l’être Jörger. Grâce à un petit héritage, Dugdale a la possibilité<br />

de se consacrer entièrement à ses intérêts qui se situent dans le domaine social. Actif dans de<br />

nombreuses sociétés locales, il est nommé au comité de l’Association pour la prison de New York. A<br />

partir de ce moment, les détenus des prisons deviennent son champ d’investigation. Il pense y trouver<br />

les origines de la pauvreté et <strong>du</strong> crime. Constatant qu’il y a beaucoup de détenus appartenant à une<br />

même famille, il se met à dresser un tableau sur leur lignée, remontant sur sept générations, en leur<br />

donnant un nom fictif, « The Jukes ». 37 Comme Jörger après lui, il décrit en quelques lignes le parcours<br />

personnel de chaque membre de la famille. Il étudie en tout 709 personnes, dont 540 qu’il nomme<br />

« Juke blood », littéralement de sang pur des Juke, et 169 appelés « X blood », qui sont ceux entrés<br />

dans la famille par mariage. Bien que Dugdale semble avoir pris des précautions dans ses conclusions<br />

en n’attribuant pas toutes les caractéristiques de cette famille à l’hérédité, cette méthode laisse<br />

supposer qu’il existe « des lignées de déchets sociaux, véritables pépinières de parasites et de<br />

nuisibles de toute espèce » dont les « Juke » représentent les « archétypes » ». 38<br />

Jörger connaît-il la publication de Dugdale ? Le rapport a été publié sous forme de livre en 1877 et a<br />

connu quatre rééditions jusqu’en 1915. Jörger ne le mentionne pas, mais son article se caractérise par<br />

une bibliographie très sommaire et peu de notes de référence, alors le fait de ne pas faire allusion à<br />

l’étude sur les « Juke » ne veut pas dire que Jörger ne connaissait pas ce rapport. D’autant plus qu’en<br />

Grande-Bretagne aussi, de vastes enquêtes, équivalentes à celles sur les « Juke », ont été faites sur<br />

les pauvres de Londres dans les années 1880 – 1890. 39 On en trouve aussi des exemples en France,<br />

35 Cf. Galton, Francis, Hereditary genius an inquiry into its laws and consequences, London 1892.<br />

36 “Science of human betterment” in, Mazumdar, Pauline M. H., “The Galton Lecture 1998 : Eugenics : The<br />

Pedigree Years”, in Human Pedigree Studies, ed. by Robert A. Peel, London 1999, p. 20.<br />

37 Cf. Estabrook, Arthur H., The Jukes in 1915, 1916, http://www.disabilitymuseum.org/lib/docs/759.htm (June<br />

26, 2006), Disability History Museum.<br />

38 Carol, Anne: Histoire de l’eugénisme en France. Les médecins et la procréation XIXe-XXe siècle. Paris 1995,<br />

p. 118.<br />

39 Kevles, Daniel J.: Au nom de l’eugénisme. Génétique et politique dans le monde anglo-saxon, trad. de<br />

l’anglais, Paris 1995, p. 101.<br />

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