La Trilogie Medee - Théâtre des Champs Elysées
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30 <strong>Trilogie</strong> Médée<br />
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Le ténor Pierre Gaveaux créa les rôles de Floresky dans Lodoïska et de Roméo<br />
dans Roméo et Juliette de Steibelt –, et composa aussi pas moins de trente-cinq<br />
opéras, dont deux sont particulièrement connus pour leur titre, repris par les<br />
ouvrages plus fameux qui s’en inspireront : Léonore ou L’amour conjugal (1798,<br />
rôle-titre tenu par Scio-Legrand) qui précède Fidelio de Beethoven, et L’échelle<br />
de soie (1808) qui annonce <strong>La</strong> Scala di seta de Rossini.<br />
Médée, bien que créée sur une scène qui n’est pas l’Opéra de Paris, est<br />
cependant intitulée, lorsqu’elle est publiée par son auteur en 1797, opéra<br />
et non opéra-comique comme l’alternance chanté / parlé pourrait le sousentendre.<br />
De fait, l’opéra-comique apparu en France aux alentours de 1750 évolue très<br />
vite d’un genre très léger à un genre plus « social », emblématique de l’identité<br />
nationale <strong>des</strong> peuples ; il donnera le la aux formes nouvelles qui éclosent en<br />
Allemagne avec le Singspiel, en Espagne avec la zarzuela, en Angleterre avec<br />
le comic opera ; il essaimera en Scandinavie et en Russie pour curieusement<br />
revenir 1819 en Italie à la toute fin du XVIII e siècle, avec notamment la Nina<br />
pazza per amore de Giovanni Pasiello qui adoptera les récitatifs parlés et le<br />
style larmoyant inauguré par Le déserteur de Pierre-Alexandre Monsigny en<br />
1769.<br />
Médée en est évidemment la <strong>des</strong>cendante. Comme Carmen près d’un siècle<br />
plus tard, elle n’a d’opéra-comique que la nomenclature, car le sujet est avant<br />
tout tragique, souvent appelé « drame lyrique ».<br />
De par la gravité de son sujet et le contenu dramatique, l’ambition de<br />
Cherubini est ici clairement d’approcher au plus près la tragédie lyrique<br />
réformée et italianisée par Christoph Willibald Gluck et les nombreux Italiens<br />
qui l’ont précédé à Paris (Piccini, Sacchini, Salieri, etc). Comme les tragédies<br />
lyriques de Gluck et de ses successeurs, Médée est en trois actes – délaissant<br />
la structure en cinq actes qui avait fait loi depuis la création de l’opéra français<br />
par Jean-Baptiste Lully. […]<br />
Cet opéra est un <strong>des</strong> prototypes de l’opéra romantique dans lequel se<br />
reconnaîtront Beethoven, Weber, Wagner et même Brahms. Son intensité<br />
et son efficacité dramatiques sont à l’égal de la rigueur implacable d’une<br />
écriture musicale sans faille, où le pathos ne s’étale pas, mais où l’émotion<br />
naît de la matière sonore même, <strong>des</strong> éclairages harmoniques et de l’étau<br />
d’une rythmique encore toute XVIIIe siècle. Cherubini ne cherche pas,<br />
contrairement à ses compatriotes, à séduire par <strong>des</strong> lignes de chant, il exige<br />
notre adhésion en tant que témoins d’un drame humain poignant, renouvelant<br />
l’exploit de la purgation <strong>des</strong> passions de la tragédie antique d’Euripide, restée<br />
miraculeusement proche de chacun de nous.<br />
© <strong>La</strong> Monnaie – septembre 2011<br />
Médée dans la presse<br />
[…] <strong>La</strong> direction musicale est confiée à Christophe Rousset, à la tête de ses<br />
Talens Lyriques, et cette partition lui va comme un gant. Déjà l’ouverture –<br />
ardente et raffinée, aux accents schubertiens – souligne, avec <strong>des</strong> moyens<br />
musicaux nouveaux, le drame qui s’annonce, tandis que défilent <strong>des</strong> images<br />
d’amateur sur <strong>des</strong> mariages et <strong>des</strong> enfants… […] Pour camper le rôle-titre, il<br />
fallait bien le talent, l’énergie, le physique de la soprano allemande Nadja Michael<br />
(dont on rappellera qu’elle fut championne de natation). […]<br />
Une Médée incan<strong>des</strong>cente.<br />
<strong>La</strong> Libre Belgique – 08/09/2011<br />
Médée triomphe à la Monnaie<br />
Nous l’avions aimée en 2008, mais elle est forte, plus poignante encore, retravaillée<br />
par Krzystof Warlikowski et dirigée par Christophe Rousset, l’un et<br />
l’autre soudés comme jamais dans les entrailles de l’opéra de Cherubini, dans<br />
les miroirs sans fin de cette tragédie née du chaos de l’humanité. […] Peu de<br />
metteurs en scène peuvent à ce point faire dialoguer le mythe, l’humain et son<br />
actualité, qui ensanglante le quotidien le plus réel. Pas une image gratuite, pas<br />
un détail qui ne trouve son intelligence, son prolongement lisible.<br />
Une superbe production<br />
Comme en 2008, plus puissante encore, Nadja Michael embrase sa Médée, du<br />
corps et de la voix, immense, sorte d’Amy Winehouse, avec ses tatouages, son<br />
fourreau noir. Une incarnation exceptionnelle […] Et que dire de Christophe<br />
Rousset et de ses Talens lyriques, qui construisent sans faille la montée de la<br />
terreur, tout en rendant limpide les subtilités de la partition. […]<br />
Le Soir – 08/09/2011<br />
Fureur magistrale<br />
<strong>La</strong> plus célèbre mère infanticide sévit à nouveau à la Monnaie. Démythifiée par<br />
Krzysztof Warlikowski, Médée de Cherubini, est aussi déjantée qu’effroyable.<br />
[…] Voici que surgit Médée, qu’on n’attendait pas. Moulée dans une robe noire<br />
en latex, choucroute de jais sur la tête, la furie vient tenter de récupérer son<br />
homme… Il suffit que le génial rénovateur du langage théâtral européen s’empare<br />
de Médée, de Luigi Cherubini, pour que l’un <strong>des</strong> plus grands mythes grecs<br />
passe à la moulinette. Le metteur en scène polonais a en effet réécrit en langage<br />
très actuel les récitatifs ennuyeux présents dans le livret d’origine. C’est direct<br />
(« Bordel ! »), mais étrangement, ça fonctionne : en marquant si nettement<br />
le hiatus entre notre époque et celle du compositeur, Warlikowski démontre<br />
combien la tragédie d’Euripide est restée miraculeusement proche de nous.<br />
Le Vif – 09/09/2011