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La Trilogie Medee - Théâtre des Champs Elysées

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10 <strong>Trilogie</strong> Médée<br />

11<br />

Médée, par Pierre Audi<br />

Par son drame psychologique intense, Médée nous plonge dans un monde<br />

où l’héroïne dresse sa pure violence idéaliste contre l’univers matérialiste et<br />

opportuniste de son époux, Jason, et de leur « protecteur » Créon. Des mon<strong>des</strong><br />

divergents s’affrontent, aussi démesurés, aussi extrémistes les uns que les<br />

autres. Des mon<strong>des</strong> de passions outrancières qui, à défaut de laisser la raison<br />

triompher à leur place, se détruisent mutuellement, ivres de leur soi-disant<br />

bon droit. L’amour possessif que Médée voue à l’homme auquel elle a lié sa<br />

vie et son <strong>des</strong>tin révèle que l’amour n’est pas tant l’affaire <strong>des</strong> dieux que celle<br />

<strong>des</strong> hommes, excessifs par essence, puisque l’être qui représente l’Amour – en<br />

l’occurrence Médée – ira jusqu’à s’octroyer le droit de détruire sur son passage<br />

tout ce qui s’y trouve, à commencer par ses propres enfants.<br />

Le mystère qui pèse sur ce mythe a fait l’objet de nombreuses interprétations<br />

et il a inspiré <strong>des</strong> poètes de toutes les époques. Thomas Corneille a composé<br />

son livret en regardant, par-<strong>des</strong>sus l’épaule de son frère aîné Pierre (dont<br />

Médée fut la toute première tragédie), en direction de Sénèque et, plus loin,<br />

d’Euripide. Mais ce regard n’est pas non plus sans mener jusqu’à nous.<br />

Pour Thomas Corneille, comme ça l’était déjà pour Pierre, l’affaire est<br />

entendue : seul l’amour fait vivre les êtres humains que nous sommes, et c’est<br />

à ce titre qu’il doit avoir tous les droits ; or si tel est le cas, ce qui fait vivre les<br />

hommes est aussi bien ce qui les tue, car qui a tous les droits ne se reconnaît<br />

plus aucun devoir... L’amour est donc tragique pour autant qu’il est à la fois<br />

nécessaire et impossible.<br />

Toutefois, dans la présente version, si le caractère baroque de l’opéra a<br />

été totalement respecté, le contenu de l’œuvre n’en est pas moins passé à<br />

travers le filtre d’un regard artistique soucieux de mettre en relief les affinités<br />

troublantes qui existent entre deux types de « sociétés du Spectacle » : le<br />

protectorat exercé par Louis XIV sur les arts de son temps et le voyeurisme<br />

éhonté qui domine les sociétés de contrôle du XXI e siècle. Les mêmes<br />

questions se posent aujourd’hui comme hier : quelle place la vérité peut-elle<br />

revendiquer dans un monde aussi artificiel ? Et cette vérité peut-elle être de<br />

l’ordre de l’amour absolu ? Quant à cet amour, s’il est absolu et donc vindicatif,<br />

suffit-il à faire de la vengeance un droit moral ? En se transformant en Ange de<br />

la mort, Médée ne nous invite-t-elle pas à mettre en question notre éternelle<br />

propension à échapper à toutes nos responsabilités ?<br />

« L’Amour c’est moi » : sans doute cette stupéfiante affirmation continuera-telle<br />

encore longtemps d’être un <strong>des</strong> sujets de débat les plus controversés et<br />

les plus fascinants qui soient.<br />

Emmanuelle Haïm<br />

© simon fowler, virgin classics<br />

Emmanuelle Haïm direction musicale<br />

Chef d’orchestre et claveciniste, fondatrice<br />

et directrice artistique du Concert d’Astrée,<br />

Emmanuelle Haïm assure la direction musicale de<br />

cette Médée. Pianiste et organiste de formation, elle<br />

poursuit en 2011 sa collaboration avec les gran<strong>des</strong><br />

formations américaines en dirigeant le Los Angeles<br />

Philharmonic et sera en décembre 2012 à la tête du<br />

très renommé New York Philharmonic. <strong>La</strong> saison<br />

2011-2012 de son ensemble le Concert d’Astrée<br />

débute avec Agrippina de Haendel (mise en scène<br />

Jean-Yves Ruf) à l’Opéra de Dijon puis à l’Opéra de<br />

Lille. C’est avec Le Couronnement de Poppée que<br />

met en scène Jean-François Sivadier qu’Emmanuelle Haïm et le Concert d’Astrée<br />

ont la joie d’aborder à nouveau Monteverdi à l’Opéra de Lille ainsi qu’à l’Opéra de<br />

Dijon (mars et avril 2012). Cette saison d’opéra prend fin avec la reprise d’Hippolyte<br />

et Aricie de Rameau (mise en scène Ivan Alexandre) à l’Opéra National de Paris (juin,<br />

juillet 2012). Le Concert d’Astrée a été l’ensemble baroque invité aux Victoires de la<br />

musique à Paris en février 2012. Ce même mois est paru également le disque Fêtes<br />

Baroques (concert donné en décembre 2011 avenue Montaigne) chez Virgin Classics.<br />

Pierre Audi<br />

© erwin olaf<br />

Pierre Audi mise en scène<br />

Après la production d’Orlando Furioso de Vivaldi<br />

en mars 2011, il signe la mise en scène de ce<br />

Médée. Né au Liban, nourri de culture française,<br />

naturalisé britannique, Pierre Audi ne connaît<br />

pas les frontières. Diplômé d’Oxford en histoire,<br />

il fonde en 1979 à Islington (au nord de Londres)<br />

le <strong>Théâtre</strong> Almeida, un théâtre expérimental à la<br />

tête duquel il restera jusqu’en 1989. Il y dirige de<br />

nombreuses productions d’auteurs contemporains<br />

comme Botho Strauss, Koltès, Vivier, Bussotti et a<br />

l’habitude de travailler avec <strong>des</strong> plasticiens comme<br />

Georg Baselitz, Karel Appel, Jannis Kounnelis ou<br />

Anish Kapoor. En 1988, il est nommé directeur artistique du Nederlandse Opera<br />

d’Amsterdam. Il y montera notamment pour la première fois au Pays-Bas la<br />

Tétralogie de Wagner (1997-1998).

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