La Légion française des combattants dans les Alpes ... - Accueil
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108<br />
Pétain félicite Oarnand du succès obtenu par la réunion constitutive<br />
par le télégramme suivant: « Ai pris connaissance documents relatifs à<br />
<strong>Légion</strong> Française <strong>des</strong> Combattants de Nice. Vous adresse à tous<br />
chaleureuses félicitations et affectueuses pensées de votre Chef » 16.<br />
Les adhésions affluent à la section de Nice dès le 7 octobre: 1. 3 54 en<br />
trois jours. se répanissant ainsi: 733 A. C. 14-18. 338 A. C. 39-40. 274<br />
A. C. <strong>des</strong> deux guerres. Darnand nomme <strong>les</strong> chefs de sections communa<strong>les</strong><br />
à panir du 12 octobre et <strong>des</strong> réunions constitutives ont lieu à Cap d'Aille<br />
13. Cannes le 20 ". Gattières. Levens. Drap. <strong>La</strong> Turbie. Roquebrune le 21.<br />
Beaulieu. Beausoleil. Vence. Grasse l'le 27. Saint-Manin-du-Var le 29;<br />
cl<strong>les</strong> se poursuivent jusqu'à la fin du mois de février 1941. Le «groupe<br />
Oamand )) se rapproche <strong>des</strong> milieux d'associations d'anciens <strong>combattants</strong>. à<br />
la satisfaction du préfet Ribière 19, Pounant, lors d'une réunion tenue le<br />
19 octobre. <strong>les</strong> dirigeants de la Fédération et de l'A.R.A.C. décident de ne<br />
pas adhérer à la <strong>Légion</strong>. d'inviter leurs membres à la noyauter. de dénoncer<br />
l'entourage de Pétain et <strong>les</strong> prétentions italiennes. de développer une<br />
mystique de revanche 20.<br />
L'Union Dépanementale (U.D.L.F.C.) s'organise progressivement<br />
avec la création de six secrétariats: Administratif et Financier, Entraide et<br />
Action sociale. Action civique. Propagande. Liquidation <strong>des</strong> associations<br />
dissoutes et liaisons avec <strong>les</strong> associations maintenues 21, Jeunesse et SpOrtS et<br />
le découpage de quatre secteurs géographiques: Nice-Ville ". Est. Ouest.<br />
Montagne 23. Les « Amis de la <strong>Légion</strong>» sont créés le 23 octobre, s'ouvrant<br />
aux mobilisés non <strong>combattants</strong>. aux veuves et orphelins de guerre, aux<br />
femmes de prisonniers. aux sympathisants enfin. Leur président Edmond<br />
Renaud 24 est un ami de Damand.<br />
Le 10 novembre. <strong>les</strong> légionnaires du dépanement sont invités à prêter<br />
serment panout où <strong>les</strong> sections ont déjà été constituées 2S. A Nice, outre <strong>les</strong><br />
sept quartiers. <strong>des</strong> délégations de Menton, Fontan 26 et Saint-<strong>La</strong>urentdu<br />
Var viennent participer à la cérémonie qui se déroule sans discours ni<br />
défilé. Le texte du serment est .<br />
16. L·&/airtur. 13 octobre 1940<br />
17. Elle ra.·m:mble 1.000 personne-s<br />
18. Elle rassemble 2.000 personnes.<br />
19. Archives Nationa<strong>les</strong>. (abrégé par la suite A.N .), FIC III 11 37. rappon du<br />
l n novembre 1940<br />
20. J. Girard. lA RiJistanct dam It! AlptJ. Marifimu, these de Y' cycle. Nice 197 3.<br />
p.29.<br />
21. Ce service deviendra l'Aaion combattante en avril 1941<br />
22. TI comprend deux sous-secteurs et sept quaniers<br />
23. Il oompr
109<br />
(( Je jure de continuer à servir la France avec honneur <strong>dans</strong> la paix.<br />
comme je rai servie SOus <strong>les</strong> armes.<br />
Je jure de consacrer toutes mes forces à la Patrie, à la Famille, au<br />
Travail.<br />
Je m'engage à pratiquer l'amitié et l'entraide vis-à-vis de mes<br />
camara<strong>des</strong> <strong>des</strong> deux guerres, à rester fidèle à la mémoire de ceux qui sont<br />
tombés au champ d'honneur.<br />
J'accepte librement la discipline de la <strong>Légion</strong> pour tout ce qui me sera<br />
commandé en vue de cet idéal » 27.<br />
Il est lu à N ice par le Chef M élandri et repris par près de ),000<br />
personnes rassemblées devant le M onument aux Morts. malgré une pluie<br />
battante. en présence <strong>des</strong> autorités civi<strong>les</strong> et militaires. Le Préfet signale au<br />
ministre de l'Intérieur que la manifestation s'est déroulée <strong>dans</strong> le<br />
recueillement 28,<br />
Le 25 novembre, la section de Nice ct l'Union Départementale<br />
reçoivent la première visite d'inspection d'un cadre national. Emile M eaux,<br />
délégué général de la <strong>Légion</strong> 29. Le 15 décembre, l'U.D.L.F.C. crée trois<br />
nouveaux organismes : la section de la Jeunesse de la <strong>Légion</strong> 30 confiée à<br />
l'avocat V an Cauwelaert JI , le Centre d'Etu<strong>des</strong> de la Rénovation<br />
Nationale 32 appelé à Ct redresser <strong>les</strong> intelligences <strong>française</strong>s ») en organisant<br />
huit cyc<strong>les</strong> de conférences au Centre Universitaire Méditerranéen)) et la<br />
section corporative et professionnelle où VOnt militer côte à côte <strong>des</strong><br />
sy ndicalistes issus de la S.F.I.O et du P.P.F. !<br />
LE RECRUTEMENT<br />
Si la <strong>Légion</strong> e·st assez ouvene <strong>dans</strong> son recrutement]4, ses chefs,<br />
n'étant pas élus, n'en sont pas le reflet exact et appartiennent presque tOuS à<br />
l'extrême-droite: c'est ainsi que sur <strong>les</strong> 20 cadres ayant milité à<br />
l'U.D .L.F.C . jusqu'en 1942 on dénombre 8 P .P .F . ", 6 monarchistes, 2<br />
Jeunesses Patriotes, 1 Franciste, 2 sans parti et 1 ancien membre de la<br />
S,F.l.O, Trois d'entre eux ont fait partie de la « Cagoule », notamment<br />
27. L'&/airtur, 9 novembrc 1940.<br />
28. A.N .. F I C I II 11 37. cappon du 18 nov,mbre 1940<br />
29. Il s'est rendu au préalable:: â Toulouse, Montauba n et Toulon.<br />
30. Dite communément Je::une <strong>Légion</strong>. die s'amalgamera à la ].F.a.M.<br />
H. Ancien président de l'A.C .E.N., officier au 94(' B.A.F .. puis chef J.F.a .M .<br />
;2. Dirigé par le professeu r Sourdillat. membre de l'Action Française.<br />
33. Histoire et politique: la famille et la substance <strong>française</strong>s: l'énergie spiriturelle ct la<br />
morale sociale; la vie littéraire; étu<strong>des</strong> politiques et socia<strong>les</strong>: l'ordre juridique;<br />
l'esthétique; la vie spirituelle et religi euse<br />
34. Divers rapports de police signalent la présence de communistes en 1941.<br />
35. Dans un rapport du 12 octobre 1940, le Commissaire Divisionnaire de Police<br />
Spéci ale. signale que le P.P.F. s' immisce de plus en plus <strong>dans</strong> la L.F.C.
4/2<br />
Si <strong>les</strong> effectifs croissent, l'enthousiasme ne règne pas partout ainsi que<br />
nous l'apprend un rapport de l'U.D.L.F.C. transmis au Préfet en juin 1941<br />
et portant sur l'état d'esprit de 97 sections appartenant aux secteurs Ouest,<br />
Est et Montagne: Il excellent, 14 très bon, 46 bon, 5 assez bon, 3 moyen,<br />
16 critiques, 2 sans opinion. Panni <strong>les</strong> observations critiques. qui<br />
concernent aussi bien <strong>des</strong> communes urbaines du littoral (Beaulieu, Saint<br />
Jean-Cap Ferrat, Biot, Cagnes, Cannes) que <strong>des</strong> communes rura<strong>les</strong> de<br />
l'intérieur (L'Escarène, Sospel, Valdeblore, Saint-Cézaire, Gourdon, <strong>La</strong><br />
Bollène, Saint'Sauveur, Le Broc, Pégomas, Saint-Paul-de-Vence, Gattières),<br />
on peut lire <strong>les</strong> mentions suivantes: « la discipline laisse à désirer »,<br />
« <strong>les</strong> derniers adhérents sont peu sincères ». « peu d'enthousiasme H,<br />
« tiède », « insouciant ». (c décevant ». (c s'est refroidi », « passif », « moins<br />
bon )J, « un tiers de bons », (c médiocre» 47<br />
Les cadres de l'U .D.L.F.C. songent alors à mordre sur la dasse<br />
ouvrière et organisent un meeting au dépôt T.N.L., le 13 juillet 1941. qui<br />
attire 2.000 personnes dont seulement 500 ouvriers. Le délégué à la section<br />
corporative. Serra 48, y déclare notamment: c( <strong>La</strong> <strong>Légion</strong> est et restera avec<br />
le peuple. Ceux qui espèrent le contraire en seront pour leurs frais. Cc sont<br />
<strong>les</strong> ouvriers qui referont la France ... C'est la classe ouvrière qui fera la<br />
Révolution Nationale, avec un seul drapeau, celui de la France, avec un seul<br />
chef. le Maréchal» 49. Le préfet Ribière rend compte de cette réunion<br />
publique en faisant état de sa profonde déception'<br />
« Cette réunion fut l'objet de discours démagogiques qui soulevèrent<br />
<strong>dans</strong> certains milieux légionnaires de très vives oppositions. Un membre<br />
influent de la <strong>Légion</strong> me confia qu'il était inutile de faire la Révolution<br />
Nationale pour entendre encore de pareils discours. <strong>La</strong> <strong>Légion</strong> a voulu aller<br />
trop vite. soucieuse du nombre de ses adhérents. elle n'a pas tenu compte de<br />
la qualité de ses membres. Le noyautage par <strong>des</strong> éléments suspects a ainsi été<br />
rendu possible ») 50.<br />
Le Préfet signale à plusieurs reprises le caractère fourre-tout de la<br />
L.F.C. et le flou de son idéologie '<br />
f( <strong>La</strong> <strong>Légion</strong> constitue plus une foule qu'une troupe et la Révolution<br />
Nationale a besoin d'une élite composée de Français dévoués et sûrs. et qui<br />
dit élite dit minorité. plus qu'un troupeau où entre le premier venu» 51.<br />
47 . A.D 122W2111l<br />
48. Ouvrier ayant appartenu à la S.F.I.O. et ayant animé le syndicat c.G.T. <strong>des</strong><br />
Transpons sous le Front Populaire. organisant d ("'s grèves<br />
49. t'Ec/aireur. 14 juillet 1941.<br />
lO. A.N .. FIC III 1137. rapport du 4 août 1941<br />
5I.A.N., FIC IJJ 1137, rapport mensudde septembre 1941
414<br />
qu'avec mon cœur de Lorrain, je me rendais <strong>dans</strong> cette campagne familière<br />
que j'associe en ce moment à la France et à cette ville<br />
Sans doute. l'histoire ne recommence pas, mais il faut savoir en tirer<br />
<strong>les</strong> enseignements. Sachons donc nous rappeler.<br />
Aujourd'hui, c'est autour du Maréchal qu'il nous faut nous masser,<br />
parce qu'il est à la fois le souverain légitime et le chef.<br />
Jeanne était désintéressée. Excluons donc de notre pensée toute idée<br />
d'intérêt personnel et n'oublions pas que si grands soient <strong>les</strong> mirac<strong>les</strong> de la<br />
Providence, ils nous demandent une cenaine participation.<br />
Le miracle français ne sera complet que par l'effort <strong>des</strong> Français.<br />
Comme au XV e siècle, nous avons la promesse du salut, si nous savons<br />
nous refaire l'âme de Jeanne, une âme de dévouement, de courage et de foi.<br />
Je vous le dis avec mon cœur: "Ayez confiance. Suivez le Maréchal<br />
pour que vive la France" » S7,<br />
Le premier anniversaire de la <strong>Légion</strong> est préparé avec beaucoup de<br />
soin . <strong>La</strong> ( Chronique L.F.C. » du 7 août est intitulée « Fête de la<br />
Résurrection <strong>française</strong>)) :<br />
" Chaque légionnaire, le jour de son serment, accepte librement la<br />
discipline de la <strong>Légion</strong><br />
Le 31 août va montrer au pays entier que cette discipline légionnaire<br />
n'est pas une formule-creuse.<br />
Pendant une journée entière, chacun devra se consacrer à la Ugio n.<br />
Au souvenir <strong>des</strong> morts de \4-\8 et de 39-40, dont la flamme venue de<br />
l'Arc de Triomphe rappellera l'invisible présence, nous joindrons notre foi<br />
en l'avenir. Nous savons que cet avenir sera beau, si nous savons le<br />
préparer. Il faut que nul d'entre nous ne recule devant la tâche à accomplir<br />
pour lui, pour ses enfants et pour la France.<br />
Le 31 août, <strong>les</strong> légionnaires se rendront aux convocations qui leur<br />
seront adressées par la presse, par la radio et directement par leurs chefs.<br />
Le 3\ août, <strong>dans</strong> notre département, Nice, Puget-Théniers, Saint<br />
Manin-Vésubie, <strong>La</strong>ntOsque et Sospel seront <strong>les</strong> théâtres de nos<br />
rassemblements.<br />
Pour la première fois, depuis sa création, la <strong>Légion</strong> veut que tous ses<br />
membres se réunissent en quelques points choisis: qu'ils se rendent compte<br />
de sa puissance et de son universalité; qu'ils apprennent à se connaître;<br />
qu'ils se donnent, à eux-mêmes, le puissant réconfort de leur volonté et de<br />
leur courage.<br />
57 . CEcla;' .. ur, 12 mai 1941
416<br />
Quant à la « Chronique L.F.C. n du JO octobre, « Enthousiasme et<br />
Foi n, elle affirme notamment·<br />
« Un an, presque jour pour jour, après la constitution de la section de<br />
Nice, l'amiral Darlan lui a fait l'honneur de l'inspecter. .. Jamais la foule n'a<br />
été plus près de la <strong>Légion</strong>, jamais celle-ci n'a mieux démontré quel<br />
instrument souple de liaison elle représente entre <strong>les</strong> chefs et le peuple.<br />
<strong>La</strong> Révolution Nationale vient de vivre à Nice une <strong>des</strong> apothéoses. Au<br />
chef tranquille et fon sur qui s'appuie le Maréchal. la <strong>Légion</strong> du<br />
département tout entier a fait un accueil à sa mesure ..<br />
U ne revue? Non pas: une offrande!<br />
Nous vous avons montré, Monsieur l'Amiral et nous sommes sûrs que<br />
le Maréchal le saura par vous comme s'il en avait été témoin. la <strong>Légion</strong> <strong>des</strong><br />
<strong>Alpes</strong>-Maritimes est là pour servir la France, son idéal et ses Chefs ».<br />
<strong>La</strong> dernière manifestation importante est organisée <strong>dans</strong> la dernière<br />
semaine du mois d'août 1942. avec la préparation du deuxième anniversaire<br />
de la L.F.C., le 30 août devant être la « journée de la Terre de France»<br />
célébrée à Gergovie. Le 23, <strong>dans</strong> chaque commune du dépanement est<br />
prélevée une parcelle de terre <strong>des</strong>tinée à être versée <strong>dans</strong> « le creuset de<br />
l'unité <strong>française</strong> »). A Nice, la cérémonie a lieu <strong>dans</strong> le jardin du monastère<br />
de Cimiez, en présence <strong>des</strong> autorités civi<strong>les</strong>, militaires et religieuses selon le<br />
scénario suivant: Salut aux couleurs. c( Marseillaise n, minute de silence.<br />
allocution du Chef Sauvaigo. Ce dernier déclare entre autres:<br />
" Le Maréchal nous a appelés. Nous répondons: présent! Et le gage<br />
que nous lui apponons c'est un peu de notre terre, le gage dont on ne peut<br />
suspecter la valeur ni la sincérité, car la terre, disait le Maréchal, la terre<br />
seule ne meun pas.<br />
o France! Voici la terre de Nice; celle qui nous a nourris; celle sous<br />
laquelle dorment nos mans. Au mélange sublime <strong>des</strong> terres de tes<br />
provinces, elle n'apponera peut-être pas plus de générosité ni plus de<br />
nob<strong>les</strong>se. car nob<strong>les</strong>se et générosité sont à revendre en terre de France. Mais<br />
elle apportera sûrement plus d'amour. cet amour dont tu as tant besoin,<br />
l'amour <strong>des</strong> moments diffici<strong>les</strong>, l'amour qui crée <strong>les</strong> mirac<strong>les</strong>, l'amour enfin<br />
qui unit deux êtres de même chair et de même sang, que la mort seule<br />
pourra séparer.<br />
Vive Nice! Vive la France! )) 64<br />
A Villeneuve-Loubet, c'est <strong>dans</strong> la propriété du Maréchal que la terre<br />
est prélevée. Le 27, devant la Préfecture, <strong>les</strong> Chefs Mélandri et Sauvaigo<br />
procèdent au mélange <strong>des</strong> parcel<strong>les</strong> qui sont déposées <strong>dans</strong> une urne<br />
fabriquée à Vallauris". Le Chef Dépanemental déclare:<br />
64. L'Eclaireur, 24 août 1942<br />
65 . Les communes occupées de Menton ct de Fontan n'ont pas été oubliées lors du<br />
prélèvement. d'où la colère <strong>des</strong> irrédentistes.
418<br />
la municipalité actuelle soit chose faite <strong>dans</strong> un délai aussi court que<br />
possible. Le départ de la municipalité acruelle sera considéré comme un<br />
succès de la <strong>Légion</strong> et constituera un excellent élément de propagande ». Le<br />
Préfet doit rappeler à l'ordre <strong>les</strong> maires du département par une circulaire<br />
du 3 juillet 194\ leur enjoignant de collaborer avec <strong>les</strong> présidents L.F.C.<br />
<strong>La</strong> population est surveillée par l'Action Civique, qui rédige de<br />
nombreux rapports sur <strong>les</strong> fonctionnaires ( peu loyaux », <strong>les</strong> personnalités<br />
« douteuses )), <strong>les</strong> auditeurs de la radio anglaise et tous ceux qui n'acceptent<br />
pas sans broncher le nouveau régime. Nous citons ci-après deux extraits de<br />
ces rapports. Le premier, rédigé par le Chef Adjoint Départemental de<br />
l'Action Civique le 27 septembre \94\, concerne l'ancien député radical de<br />
Nice, Paul Deudon, P.G. rapatrié de l'Oflag X B : " A surveiller, esprit<br />
déplorable et dangereux pour le Maréchal, a refusé de signer le manifeste de<br />
reconnaissance au Maréchal à son départ» " . Le second, rédigé par la<br />
section de Grasse le 21 décembre 194\, concerne <strong>les</strong> fonctionnaires de cette<br />
commune: ( Les légionnaires constatent avec regret chez trop de<br />
fonctionnaires un loyalisme insuffisant, évitant de faire directement de<br />
l'opposition se réfugient <strong>dans</strong> une tiédeur qui leur paraît suffisante pour se<br />
mettre à l'abri. D'autres ne craignent pas de se livrer en public à<br />
d'intolérab<strong>les</strong> critiques. Il en est même qui poussent l'audace jusqu'à faire<br />
l'apologie du régime passé, dont ils continuent à se réclamer et dont ils se<br />
permettent de tenir <strong>des</strong> propos offensants il l'égard du Maréchal ».<br />
<strong>La</strong> propagande, outre <strong>les</strong> affiches, est assurée plus efficacement par <strong>des</strong><br />
messages radiodiffusés deux fois par semaine à \3 heures sur <strong>les</strong> on<strong>des</strong> de<br />
Radio-Méditerranée 1) et, plus encore, par <strong>les</strong> innombrab<strong>les</strong>" Chroniques<br />
de la <strong>Légion</strong>» publiées dan$ la presse quotidienne à partir d'octobre<br />
1940 ". Certaines de ces "Chroniques" sont <strong>des</strong> attaques de la<br />
«dissidence»: «Manœuvres perfi<strong>des</strong>" le 27 octobre 1940 ", «Le crime<br />
de Syrie» le \2 juin \941, "<strong>La</strong> trahison gaulliste» le 17 juin, «Les<br />
histoires de Peaux-Rouges» le Il septembre 1942, d'autres <strong>des</strong> plaidoyers<br />
en faveur de la Révolution Nationale et de l'Ordre Nouveau européen:<br />
«Les ordres» le \4 août 194\,« Réalisations» le \7 août,« <strong>La</strong> <strong>Légion</strong> de<br />
la Grande Relève» le 21 juillet 1942, " <strong>La</strong> <strong>Légion</strong> Française et la <strong>Légion</strong><br />
Tricolore» le 28 juillet, " Le courage français face à la collaboration» le 1\<br />
août.<br />
72. AD .. 166 W. XIV<br />
73 . Cinq minutes tous <strong>les</strong> jours à partÎr de septembre 1942, consacrées à la LF.C .. au<br />
S.O.L.etàlaj.F.O.M<br />
74. 8 en 1940. 45 en 1941. 30 jusqu'en novembre ]942<br />
7l. Consacrée à Mnoncer <strong>les</strong> propos de René CassÎn
419<br />
L'intolérance se manifeste sun:out par l'intimidation d'André Gide,le<br />
21 mai 1941, auquel le Secrétaire Général De Tissot conseille de renoncer à<br />
la conférence qu'il doit prononcer sur Henri Michaux à Nice:<br />
« n est un peu choquant de voir André Gide affronter le public<br />
français en ce mois de mai 1941 en dépit d'une actualité qui condamne son<br />
œuvre beaucoup mieux que n'impone quelle critique ...<br />
n est difficilement admissible à l'heure où le Maréchal veut<br />
développer chez la jeunesse <strong>française</strong> l'esprit de sacrifice, de voir monter à la<br />
tribune un <strong>des</strong> hommes qui s'est fait le champion triomphant de l'esprit de<br />
jouissance.<br />
Les refrains de Nathanaël ont dû peser aussi lourd <strong>dans</strong> la balance que<br />
bien <strong>des</strong> complots politiques.<br />
Alors, Monsieur Gide. nous vous en prions. que Nathanaël se fasse<br />
oublier, lui et toute sa famille. C'est presque un question de goût ...<br />
Vous aurez tort de voir <strong>dans</strong> cette lettre <strong>des</strong> protestations un peu<br />
naïves de barbares trop zélés. On peut repousser Nathanaël et tout ce qui<br />
l'entoure sans pour cela être un Philistin. On peut aussi « obliger» à<br />
comprendre <strong>les</strong> gens qui ne veulent pas comprendre ... Et on peut le faire<br />
avec beaucoup de fermeté. sans être non plus un Philistin.<br />
En espérant que ce rappel à l'ordre sera entendu .. , » 16,<br />
Gide. afin d'éviter tout incident. renonce à prononcer sa conférence et<br />
décommande celle qu'ii devait faire à Cannes. Des rumeurs de démissions<br />
ayant couru à Nice à la suite de cette « interdiction n, la L.F.C. publia une<br />
mise au point le 26 mai 1941 : «Nous n'attachons qu'une importance très<br />
réduite à l'incident qui s'est produit dernièrement à propos d'une conférence<br />
de 1-1. André Gide. Cependant, quelque émotion semble avoir été soulevée<br />
<strong>dans</strong> une certaine partie du public. Aussi tenons-nous à mettre <strong>les</strong> choses au<br />
point. Voici le texte intégral de la lettre adressée par la <strong>Légion</strong> à M. André<br />
Gide, <strong>dans</strong> la matinée du 21 mai 1941... n.<br />
D'autres incidents opposèrent <strong>des</strong> légionnaires à <strong>des</strong> personnalités qui<br />
furent victimes de coups et b<strong>les</strong>sures: le maire de Beaulieu, G>nseiller<br />
général du canton de Villefranche-sur-Mer en octobre 1940, un colonel de<br />
la Garde Républicaine à Cannes en janvier 1941 et le commandant du<br />
District Militaire de Grasse en octobre 1941.<br />
LE REFLUX DE LA LEGION<br />
Si 1941 marque l'apogée du mouvement, 1942 marque le début du<br />
reflux, bien avant l'occupation italienne. Le Préfet le signale déjà <strong>dans</strong> son<br />
rapport mensuel consacré au mois de janvier : «( Il y a pa.rmi la masse <strong>des</strong><br />
76. Lettre publiée <strong>dans</strong> L'Ecla;rtur, du 26 mai 1941
420<br />
légionnaires une grande lassitude, de nombreuses défections se manifestent<br />
déjà. De nombreuses cartes n'ont pas été retirées pour l'année 1942 ) 77, Il<br />
fait allusion à une poursuite de la crise <strong>dans</strong> son rapport bimestriel de maijuin<br />
et rend ainsi compte <strong>des</strong> cérémonies du deuxième anniversaire: (( <strong>La</strong><br />
cérémonie du mélange <strong>des</strong> terres du vendredi 27 août a été notamment<br />
émouvante. Quant au défilé du 30 août, il n'a pas eu un succès comparable à<br />
celui de l'année dernière . Moins de légionnaires avaient répondu à l'appel<br />
de leur chef ct surtout peu de monde s'était déplacé pour y assister)) 71, En<br />
effet, si )0.000 L.F.C. et Amis de tout le département s'étaient rassemblés<br />
à Nice pour le premier anniversaire, seulement 5 ,()(x) assistèrent au second.<br />
<strong>La</strong> déperdition <strong>des</strong> effectifs aneint 40 % en 1942 si l'on en croit un<br />
responsable départemental qui affirme qu'il n'y a plus désonnais que<br />
40.000 L.F.e. et Amis". Des sections loca<strong>les</strong> vivotent déjà en 1942,<br />
comme à Cap d'Ail, entraînant <strong>les</strong> plaintes du nOuveau Président<br />
Départemental Mélandri, <strong>des</strong> suspensions de sections pour plusieurs mois<br />
comme à Saint-Jean-Cap Ferrat ou <strong>des</strong> <strong>des</strong>titutions de chefs comme à<br />
Villeneuve-Loubet et Beausoleil, quand ce n'est pas carrément le Chef de<br />
Section qui abandonne le mouvement légionnaire avec éclat comme à<br />
Peymeinade 8a.<br />
Ce re/lux peut s'expliquer en partie par la création au sein de la L.F.e.<br />
<strong>des</strong> <strong>Alpes</strong>-Maritimes, <strong>dans</strong> le courant de l'été 1941 , d'un organisme<br />
maréchalisu plus (( dur n, plus anticommuniste, plus antisémite. plus<br />
antirépublicain qu'elle, le S.O.L. 81, qui commet rapidement <strong>des</strong> actions<br />
répréhensib<strong>les</strong> 82 qui nuisent à l'image de marque de la <strong>Légion</strong>. n C'est<br />
semble-t-il à l'initiative de Gallet, Gombert et Bassompierre" que<br />
Darnand songea à créer son propre « pani )) où se regrouperaient <strong>les</strong><br />
hommes résolus à aller de l'avant au service de la Révolution Nationale:<br />
c( J'ai choisi, ou plutôt j'ai invité ceux qui étaient de véritab<strong>les</strong><br />
révolutionnaires. ceux qui pensaient, sur le plan social, qu'une véritable<br />
révolution devait se faire, qu'il fallait qu'on change complètement de<br />
77.A.N .. F I C 1lI11l7, rapportdu.l fivr;'r 1942<br />
78. A.N .. F I C III Il n. rapport bimestrid sur juillet-août 1942<br />
79. Témoignage de Jean Char<strong>les</strong>. Secrétaire Général de l'UD.L.F .C .<br />
80. En mai 1941. le R.P. Bruckberger a également rompu avec éclat en provoquant un<br />
esclandre au C.U.M. lors d'une conférence: de Massis sur Péguy<br />
81. Compte tenu de l'importanct de c(' mouvement ('t d('s limit('s de pagination. nous<br />
ne pouvons nous étendre davantage sur le S.OL<br />
82. Des S.O.L. mo<strong>les</strong>tent <strong>des</strong> passants« juifs )J sur la Promenade <strong>des</strong> Anglais en juillet<br />
1941 . provoquent <strong>des</strong> incidents avec <strong>des</strong> maires ct <strong>des</strong> policiers en novembre. débaptisent le<br />
boulevard de la R'épublique à Beausoleil ('n février 1942. envahissent la synagogue de Nice<br />
en mal<br />
83 . Entraînant par exemple la démission du Pr.."sident de Saint-Etienne-de- Tinée<br />
84. DELPERRIE DE BAYAC, op. dt., p. 96
421<br />
régime, j'ai invité tous ces hommes à se joindre» 8S, Environ 2.000<br />
Azuréens s'y inscrivent. Le S.O.L. sera étendu à toute la zone non occupée<br />
en décembre 1941.<br />
Une autre raison du reflux peut être cherchée <strong>dans</strong> le remaniement de<br />
l'état-major départemental en janvier 1942 qui porte à <strong>des</strong> postes de<br />
responsabilité <strong>des</strong> hommes moins dynamiques. D'autre part, le mouvement<br />
de collaboration le plus influent <strong>des</strong> <strong>Alpes</strong>-Maritimes, le P.P.F. essaie de<br />
noyauter le mouvement L.F.C. sous couvert du Service de l'Action Civique<br />
confié à l'un <strong>des</strong> siens 86, ce qui peut rebuter de nombreux légionnaires peu<br />
ou pas politisés.<br />
LF.5 PROMOTIONS<br />
Oamand et ses principaux « lieutenants ) vont être appelés à <strong>des</strong><br />
fonctions na.tiona<strong>les</strong> ou régiona<strong>les</strong>:<br />
- en juin 1941, Darnand est promu Inspecteur régional du Sud-Est,<br />
Gallet Chef de la Propagande parlée de la Z.N.o. à Vichy, Bassompierre<br />
Secrétaire Régional L.F.C. de Provence.<br />
- en décembre 1941, Damand est nommé Inspecteur général du<br />
S.O.L. à Vichy où vont le rejoindre successivement De Tissot, Gombert,<br />
Lefèvre, Giaume. Fournier.<br />
- en janvier 1942, 4 c( Niçois» sont nommés au Conseil National<br />
L.F.C.: Bensa (Action Civique), Renaud (Président <strong>des</strong> Amis); Serra<br />
(Action Corporative) et Tourtou (Adjoint au Maire de Nice et secrétaire du<br />
P.P.F.). Quelques mois plus taro, Serra deviendra Inspecteur National <strong>des</strong><br />
Groupements <strong>Légion</strong>naires d'Entreprises.<br />
De nombreux remaniements concernent donc l'état-majar L.F.C. <strong>des</strong><br />
<strong>Alpes</strong>-Maritimes en 1941-1942: Darnand cède la Présidence au Chef de<br />
Secteur de Nice Mélandri, Gallet la Vice-Présidence au Chef de la<br />
Propagande Acquaviva, Bassompierre le Secrérariat Général à De Tissot<br />
puis à Giaume et à Char<strong>les</strong>, Gombert le commandement <strong>des</strong> S.O.L. à<br />
Durandy.<br />
CONCLUSION<br />
<strong>La</strong> <strong>Légion</strong> a joué un grand rôle <strong>dans</strong> <strong>les</strong> <strong>Alpes</strong>-Maritimes avant<br />
l'occupation italienne. Elle fut incontestablement un mouvement de masse ,<br />
grâce à son idéologie floue et à son caractère antitransalpin marqué 87 ; dIe<br />
sut réunir à plusieurs reprises à Nice, <strong>dans</strong> un patriotisme de kennesse, <strong>des</strong><br />
85. Lts proûs dt coi/aboratÎon, op. cit., p. 254.<br />
86. Rappon <strong>des</strong> Renseignements Généraux au préfet, 12 février 1942<br />
87. Il est révélateur de constater que la L.F.C. est presque constamment mentionnée<br />
<strong>dans</strong> <strong>les</strong> (, Noti1.iari ) de la C.I.A.F
422<br />
dizaines de miHiers de manifestants; elle servit de terrain d'expérimentation<br />
88 ; elle constitua une pépinière de cadres que l'on retrouvera plus tard<br />
au S.O.L., bien sûr, mais aussi à la Milice et à la Waffen S.S. "<br />
$nus l'occupation, italienne d'abord, puis allemande, la L.F.C. ne sera<br />
plus qu'un grand corps vide, sans dynamisme aucun, se manifestant par <strong>des</strong><br />
« Chroniques» de plus en plus réactionnaires et par son action sociale,<br />
tandis que la plupart <strong>des</strong> sections se désagrègeront et que de nombreux<br />
présidents présenteront leur démission pour « raisons de santé )) quand as<br />
ne passeront pas à la Résistance comme ceux de Carros et de Saint-Etiennede-Tinée.<br />
Jean-Louis PANICACCI.<br />
88. Prem ière section départementale. premier Service d'Ordre <strong>Légion</strong>naire'<br />
89. Ddrnand, Gallet. De Tissot. Bassompierre. Anhus. Gomben. Durandy, Boudet<br />
Gheusi, Serra. Boire. Giaume. Lefèvre. FournÎer
ANNEXE<br />
L'ETAT-MAJOR L.F.C. DES ALPES-MARITIMES<br />
DE 1940 A 1942<br />
423<br />
Chef départemental : Joseph Damand (1897, entrepreneur) puis Michel<br />
Mélandri (1890, négociant).<br />
Chef départemental adjoint: Pierre Gallet (1917, officier) puis Pierre<br />
Acquaviva (1906, avocat)<br />
Secrétaire général: Jean Bassompierre (1914, officier) puis Noël de Tissot<br />
(1914. enseignant), Alfred Giaume (1904. inspecteur d'assurances). Jean Char<strong>les</strong><br />
(1911. avocat).<br />
Secrétaire à la Propagande: Noël de Tissat puis Pierre Acquaviva ct Roger<br />
Arnéodo (1913, avocat).<br />
Secrétaire à l'Action Civique: André Robert (1887, officier) puis Georges<br />
Bensa (1898, avocat).<br />
Secrétaire à l'Administration et aux Finances: Pierre Dalmas (1887. agent<br />
commercial)<br />
Secrétaire à l'Action Sociale: Marcel Dalmas (I892, architecte) avec comme<br />
adjoint Jacques Lefèvre.<br />
Secrétaire à la Jeunesse : Ju<strong>les</strong> Bouchon (1898, architecte).<br />
Chef de l'Action Corporative: François Snra (1902. ouvrier).<br />
Chd de l'Action Combattante: Marius Masse (Président <strong>des</strong> Médaillés<br />
Militaires)<br />
Chef <strong>des</strong> Groupements <strong>Légion</strong>naires Paysans: Pierre Jaboulet (1909,<br />
ingénieur du Génie Rural).<br />
Directeur de l'Institut de formation légionnaire: J.-M. SourdiUat 0907,<br />
professeur).<br />
Directeur du Centre d'étu<strong>des</strong> de rénovation nationale : J.-M. Sourdillat.<br />
Directeur <strong>des</strong> restaurants légionnaires : Fortuné Esmiol (1905 . négociant).<br />
Président du Tribunal d'Honneur : James-Philippe Fourni er (commerçant).<br />
Président <strong>des</strong> Amis de la <strong>Légion</strong>: Edmond Renaud (1903, entrepreneur).<br />
Chef de la Jeune <strong>Légion</strong>: René Van Cauwdacrt (1914, avocat)<br />
Chef de Secteur de Nice: Michel Mélandri. puis François Sauvaigo (1889,<br />
ingénieur de la Ville de Nice).<br />
Chef de Secteur. Ouest: Antonin Chapdet (1880. oŒcier)<br />
Chef du Secteur Est: André Massena. prince d'Essling puis Marius Durand<br />
(officier).<br />
Chef de Secteur Montagne: Adrien Reyjal (1879. officier. maire de<br />
Massoins).<br />
Chef du sous-secteur Vésubie: Char<strong>les</strong> Passeron (1883. médecin. maire de<br />
<strong>La</strong>ntosque).<br />
Chef du sous-secteur Var: Edmond Liautaud (1897. greffier-commerçant).<br />
Chef du sous· secteur Tinée: Félix Nancy (1884. greffier en chef).<br />
Chef départemental S.O.L. : Marcel Gombert (1891. garagiste) puis Paul<br />
Durandy (1910. médecin) avec comme adjoint Jean Boudet-Gheuû (1904, avocat).