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Liens et documents - Etienne Chouard - Free

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précèdent presque toujours les réunions à quatre, lesquelles se tiennent avec l'assistance <strong>et</strong> la présence des plus hautes<br />

autorités de l'OMC.<br />

La «Quad» s'est comportée jusqu'ici comme un véritable directoire mondial. C'est à son initiative que se tiennent<br />

de manière systématique des réunions informelles, qui ont généralement lieu à l'invitation du directeur général. S'y<br />

r<strong>et</strong>rouvent, sans publicité aucune, les représentants des États r<strong>et</strong>enus par la «Quad», auxquels s'associent des partenaires<br />

de circonstance, parmi lesquels on r<strong>et</strong>rouve souvent l'Australie, la Corée, la Nouvelle-Zélande, la Suisse, <strong>et</strong> quelques pays<br />

dont l'adhésion aux propositions entraînera celle d'autres États. On y arrête des décisions qui sont ensuite présentées<br />

comme étant à prendre ou à laisser par les autres États membres. L'accès à ces réunions est interdit aux<br />

représentants des États qui ne sont pas invités, en dépit du fait qu'elles ont lieu dans les locaux de l'OMC <strong>et</strong><br />

qu'on y traite des matières en rapport avec l'OMC. Dans le jargon des initiés, on appelle cela des réunions green room,<br />

par référence à la couleur verte des murs du bureau du directeur général en 1995.<br />

C<strong>et</strong>te pratique ramène le multilatéralisme à peu de chose puisque, chaque fois que se tient une réunion informelle, plus de<br />

cent États sont exclus de délibérations décisives. Une telle pratique aboutit à la restauration de rapports bilatéraux<br />

entre les pays riches <strong>et</strong> les autres. On est très loin de c<strong>et</strong>te égalité de tous, États riches <strong>et</strong> États pauvres, devant des<br />

règles communes, égalité tant vantée par ceux qui, à droite comme à gauche, <strong>et</strong> en particulier le commissaire européen<br />

Pascal Lamy10, prétendent lutter contre le chaos des rapports commerciaux internationaux.<br />

C<strong>et</strong>te pratique des réunions informelles a connu de nouveaux développements en vue de la préparation de la IVe conférence<br />

ministérielle, qui allait se tenir à Doha. Lesdites réunions se sont tenues au niveau ministériel, extra muros, à Mexico puis à<br />

Singapour. Et certains ministres, qui, estimant avoir le droit de participer à toute réunion de l'OMC, s'y sont<br />

présentés sans avoir été invités, se sont vu en interdire l'accès. Les mêmes pratiques se sont répétées en vue de la<br />

conférence de Cancún, avec multiplication des réunions informelles au siège de l'OMC <strong>et</strong> organisation de ce qu'on appelle<br />

désormais des « mini-ministérielles » réservées à une bonne vingtaine de pays à Sydney, Montréal <strong>et</strong> Charm el-Cheik.<br />

Même si l'OMC nourrit son site Intern<strong>et</strong> de milliers de pages de <strong>documents</strong> divers, c<strong>et</strong>te institution, à la différence de toutes<br />

les autres, se caractérise par un degré élevé d'opacité qui facilite le travail de la «Quad». L'OMC est la seule organisation<br />

internationale intergouvernementale dont les travaux se déroulent à huis clos. Son instance de décision la plus<br />

importante, entre les conférences ministérielles, est le Conseil général, qui réunit, en principe, les ambassadeurs des cent<br />

quarante-huit États membres. On a vu ce qu'il en est dans les faits.<br />

Le Conseil général siège comme organe compétent pour toutes les affaires relevant de l'OMC, mais également pour donner<br />

son acquiescement à l'analyse des politiques commerciales des États membres. Il se transforme enfin en Organe de<br />

règlement des différends pour acter les décisions prises dans le cadre du règlement des conflits. Or, les débats de c<strong>et</strong> organe<br />

se déroulent à huis clos, ce qui est contraire à ce principe universel selon lequel la justice doit être rendue en public. Ainsi,<br />

les débats de la Cour internationale de justice de La Haye - autre institution intergouvernementale qui, elle, fonctionne selon<br />

les principes de base d'une authentique juridiction - sont publics.<br />

La manière dont se préparent <strong>et</strong> se déroulent les conférences ministérielles est très révélatrice du système oligarchique en<br />

vigueur à l'OMC. La conférence ministérielle, son organe suprême, constituée des ministres du Commerce extérieur de tous<br />

les États membres, est compétente dans toutes les matières sur lesquelles ils s'accordent <strong>et</strong> se réunit au moins tous les<br />

deux ans. Jusqu'ici, elle s'est tenue chaque fois dans des endroits différents; après Singapour en 1996, ce fut Genève en<br />

1998, puis Seattle en 1999, Doha en 2001 <strong>et</strong> Cancún en 2003.<br />

La préparation comme le déroulement de la conférence sont l'obj<strong>et</strong> de manipulations où la démocratie est loin de trouver<br />

son compte. Pour chacune des cinq conférences tenues jusqu'ici, pas une seule fois les procédures ne furent les mêmes,<br />

celles-ci changeant au gré des opportunités. C'est la «Quad» qui, avec ses alliés (Australie, Corée, Hong Kong11, Nouvelle-<br />

Zélande, Suisse), convient des règles, selon les circonstances.<br />

Après la IIIe conférence ministérielle, celle de Seattle, où aucun accord n'était intervenu, on a vu les pays industrialisés se<br />

multiplier en formules concédant qu'il fallait tirer les leçons de l'échec <strong>et</strong> accorder la priorité à la transparence des<br />

procédures <strong>et</strong> à une participation effective de tous les membres à la décision. L'Union européenne avança même, pour<br />

l'occasion, quelques propositions qui furent vite oubliées une fois que commencèrent les préparatifs de la IVe conférence. Et<br />

les représentants de l'Europe, avec leurs partenaires nord-américains <strong>et</strong> japonais, continuèrent à user <strong>et</strong> à abuser de<br />

pratiques qu'ils avaient déclaré vouloir réformer.<br />

À l'OMC, les pays en développement, pourtant les plus nombreux, sont en permanence victimes de manipulations <strong>et</strong> de<br />

pressions très précisément décrites dans un livre récent12. Ce qu'ils subissent là est en totale contradiction avec le discours<br />

convenu dans les sphères occidentales quant à l'importance du commerce pour le développement.<br />

Ainsi, par exemple, à l'ouverture de la conférence de Doha, M. Lamy annonçait que l'Union européenne offrait 50 millions<br />

d'euros aux pays en développement afin de leur perm<strong>et</strong>tre de respecter leurs engagements à l'égard de l'OMC. Pendant la<br />

conférence, il r<strong>et</strong>ardait la demande de dérogation requise pour que puisse être appliqué l'accord de Cotonou, passé entre<br />

l'Union européenne <strong>et</strong> les pays d'Afrique, des Caraïbes <strong>et</strong> du Pacifique (ACP), jusqu'au moment où ceux-ci eurent appuyé la<br />

demande européenne d'ouverture de négociations sur les matières dites de Singapour (voir chap. 5, "Matières de Singapour<br />

= AMI"). De même, peu avant la conférence de Cancún, l'Union européenne usait de promesses d'octroi <strong>et</strong> de menaces de<br />

r<strong>et</strong>rait du système des préférences généralisées (SPG, voir note 60, p. 277) vis-à-vis de tel ou tel pays en<br />

développement. Lors d'une réunion à Bruxelles, six semaines avant Cancún, M. Lamy annonçait aux pays ACP le lancement<br />

d'un programme d'aide financière en leur faveur afin d'accroître leur capacité à m<strong>et</strong>tre en œuvre les accords commerciaux<br />

internationaux.<br />

Manipulations <strong>et</strong> pressions de la part des pays occidentaux se manifestent tout particulièrement à l'occasion de la<br />

préparation de chaque conférence ministérielle. C<strong>et</strong>te préparation consiste à m<strong>et</strong>tre au point un texte qu'on appelle «proj<strong>et</strong><br />

de déclaration ministérielle». L'objectif de la «Quad» est que ce texte exprime le point de vue des pays industrialisés. Il est<br />

atteint grâce à une procédure qui, dans toute autre institution, serait considérée comme un véritable coup de force.<br />

Tout d'abord, le texte est préparé de concert par le président en exercice du Conseil général <strong>et</strong> le directeur général de l'OMC<br />

qui travaillent sur instruction de la «Quad». L'essentiel des demandes exprimées par les pays en développement <strong>et</strong> formulé<br />

dans des <strong>documents</strong> officiels, en particulier leur souhait de corriger les déséquilibres les plus criants qui caractérisent les<br />

accords existants, n'est pas repris dans le proj<strong>et</strong> de déclaration ministérielle. Par contre, l'essentiel des attentes des pays<br />

48 C’est aux citoyens eux-mêmes, directement, de façonner <strong>et</strong> protéger leur démocratie - <strong>Liens</strong> <strong>et</strong> docs (2009) http://<strong>et</strong>ienne.chouard.free.fr/Europe/<strong>Liens</strong>.php

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