Novembre - Nervure Journal de Psychiatrie

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■ EDITORIAL G. Dubret
Les pédophiles :
qu’en penser,
qu’en dire,
qu’en faire ?
Comme pour chaque fait
divers mettant en scène un
agresseur sexuel et des victimes
auxquelles tout un chacun peut
s’identifier, l’embrasement médiatique
de la fin de l’été a été immédiat. La récidive,
quelques jours après sa sortie de prison, d’un
homme plusieurs fois condamné dans le passé
pour des actes de pédophilie, constitue en
effet, un douloureux problème de société
pour lequel les réponses ne seront jamais univoques,
mais devront articuler, sous l’égide
d’une volonté politique rigoureuse, des
mesures pénales et des mesures de soins pour
lesquelles les psychiatres sont concernés.
Malheureusement, l’embrasement médiatique
n’est pas propice aux analyses approfondies ni
aux opinions pertinentes. Chaque acteur est
amené à jouer son rôle de façon caricaturale :
les journalistes affolés traquent tout psychiatre
susceptible de dire quoi que ce soit qui puisse
faire de l’audience. Les quelques psychiatres
concernés, ravis de disposer d’une « fenêtre de
tir », tentent de développer des analyses complexes
qui résistent mal au formatage réducteur
du 20 heures, tandis que le politique,
délaissant son rôle d’arbitre et de maître
d’œuvre de la santé publique, s’efforce de
surfer sur l’émotion générale.
Dans cette cacophonie, personne ne comprend
rien et, peu à peu, deux idées s’imposent
: celles de la dangerosité universelle de
tous les pédophiles et celles de l’impérieuse
nécessité de mesures radicales.
Ce qui peut se résumer dans cette brève de
comptoir maintes et maintes fois répétée
« tous les pédophiles sont des assassins d’enfants
en puissance et la seule solution c’est de
leur couper les c... ».
(suite page 3 )
Les médecins ont toujours été confrontés au problème
posé par l’acceptation du traitement prescrit
et à sa prise régulière, Hippocrate déjà dénonçait
la faiblesse des patients qui, bien trop souvent
mentent quand ils sont interrogés sur le respect des
recommandations de leur médecin.
En psychiatrie, cette problématique s’est accentuée
depuis les années 50 avec l’apparition de nouvelles
thérapeutiques tel le Largactil ® en 1952 ou le Tofranil
® en 1955 permettant une guérison, sinon une
nette amélioration des symptômes et une diminution
significative des rechutes. Ces nouvelles thérapeutiques
ont révolutionné la prise en charge des
patients présentant des troubles mentaux en particulier
des psychotiques chroniques. Aujourd’hui cette
problématique est omniprésente tant dans l’esprit
des praticiens que dans les congrès scientifiques internationaux,
en témoigne la dernière version du Diagnostic
and Statistical Manual of mental Disorders
(DSM IV) qui dans une catégorie additionnelle énumérant
les facteurs cliniques devant retenir l’attention
cite « la non-observance du traitement » Z91.1 (1).
De l’expérience des psychiatres confrontés aux refus
de soins, aux échappements thérapeutiques, et aux
mésusages des traitements est née une réflexion sur
les raisons de ces difficultés et les moyens d’infléchir
l’attitude des patients vis-à-vis des soins.
Les Unités d’Hospitalisation de Courte Durée
(UHCD) sont définies administrativement en
France comme faisant partie des Services d’Urgence
depuis 1991 (1).
Elles permettent aux patients accueillis dans les
Services d’Urgence de bénéficier d’une structure
d’hospitalisation complète, afin de permettre un
retour à domicile ou une orientation spécifique
dans de meilleures conditions de sécurité et d’efficacité.
Les UHCD sont donc des unités d’hospitalisation à
part entière disposant 24 heures sur 24, 7 jours
sur 7, d’une présence médicale autorisant des exa-
Napoléon n’était pas fou
En 2004 et 2005, Napoléon fut mis sur le devant
de la scène à maintes reprises. En 2004 notamment
pour le bicentenaire du Sacre (2 décembre
1804), et en 2005 pour la célèbre victoire d’Austerlitz,
qui fit couler beaucoup de sang en 1805, et
beaucoup d’encre deux siècles plus tard. Que peuton
encore écrire sur Napoléon Bonaparte ? Un des
grands spécialistes français de la période qui nous
intéresse ici souligne qu’« avec des dizaines de milliers
d’ouvrages qui lui sont consacrés, Napoléon est,
avec Jésus-Christ, le personnage historique qui a le plus
suscité l’intérêt des historiens et des écrivains » (29).
Déjà, en 1931, J. Bainville ouvrait son célèbre Napoléon
de la façon suivante : « Sur Napoléon, sur ce qui
le touche de près ou de loin, sur les événements auxquels
son nom est mêlé, on a écrit tant de livres, tant d’essais,
d’études, sans compter les mémoires, que le zélé bibliographe
Kircheisen avait réuni près de deux cent mille
fiches. Et ce n’est pas fini » (1) (I). L’Homme Napoléon
a fasciné de son vivant, sa légende s’est construite –
De l’observance
lui-même n’y était pas pour rien, c’est peu de le dire
– dès ses premiers éclats militaires en Italie, et il fascine
toujours autant deux siècles après son Sacre.
Difficile, impossible peut-être, de rester indifférent
au parcours vertigineux de Napoléon Bonaparte. En
quelques pages, nous ne pouvons, bien entendu,
retracer la vie de Napoléon, et cela n’aurait ici que peu
d’intérêt. Il faut pour cela se référer aux nombreuses
biographies, mais aux plus sérieuses (nous en donnons
quelques unes en références à la fin de cet article).
Nous tenterons d’apporter notre pierre à l’édifice,
gigantesque, en proposant de dresser un tableau
peut-être inédit de l’Empereur, un tableau qui ira
chercher au plus intime, qui visera à mettre en lumière
les aspects qui nous semblent essentiels pour dévoiler
une part de vérité sur l’homme Napoléon. Les
travaux des meilleurs spécialistes nous aideront à
mieux cerner le personnage. Les mots mêmes de
De cette réflexion est né un vocabulaire technique.
C’est ainsi qu’on a pu observer dans la littérature les
termes d’observance, de compliance ou d’adhésion.
Ces termes, usités par tous, sont souvent employés
avec peu de spécificité. C’est pourquoi nous nous
intéresserons plus précisément aux définitions de ces
termes, à l’évolution des stratégies d’amélioration de
l’observance et aux rôles et aux dérives potentielles de
l’évolution actuelle.
L’observance premier concept développé se définit
selon le petit Robert comme l’action d’observer habituellement,
de pratiquer une règle en matière religieuse.
Médicalement, l’observance est le fait de se
soumettre à une règle, en l’occurrence la règle dictée
par le médecin par l’intermédiaire de sa prescription.
Il semble que ce terme corresponde à une obéissance
passive, le patient ne participant aucunement à la
décision thérapeutique.
Un autre terme employé dans un sens similaire est la
compliance, ce mot emprunté à la physique définit les
caractéristiques des corps élastiques. La compliance a
pour éthymologie le verbe complaire, ce qui introduit
une nuance supplémentaire à la simple obéissance, le
désir du patient de plaire à son médecin.
Evaluation de la prescription des
psychotropes dans une unité
d’hospitalisation de courte durée
■ PSYCHO BIOGRAPHIE N. Brémaud
(suite page 7 )
■ URGENCE
(suite page 3 )
mens cliniques répétés, des prises de décisions diagnostiques,
thérapeutiques ou d’orientation.
Du point de vue de l’activité psychiatrique, toutes
ces unités reçoivent un nombre important et croissant
de patients, que ce soit pour des tentatives de
suicide ou pour des symptomatologies spécifiquement
psychiatriques.
L’UHCD des Hôpitaux du Léman
L’Unité d’Hospitalisation de Courte Durée (UHCD)
des Hôpitaux du Léman a été créée en juin 2005.
(suite page 6 )
NOVEMBRE 2007 1
ISSN 0988-4068
n° 8 - Tome XX - 11/2007
Tirage : 10 000 exemplaires
Directeur de la Publication et de la
Rédaction : G. Massé
Rédacteur en chef : F. Caroli
Rédaction : Hôpital Sainte-Anne,
1 rue Cabanis - 75014 Paris
Tél. 01 45 65 83 09 - Fax 01 45 65 87 40
Abonnements :
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Prix au numéro : 9,15 €
E-mail : info@nervure-psy.com
AU SOMMAIRE
ÉDITORIAL
Les pédophiles :
qu’en penser, qu’en dire,
qu’en faire ? p.1
FMC
De l’observance p.3
URGENCE
Evaluation de la prescription
des psychotropes dans une
unité d’hospitalisation de
courte durée p.6
PSYCHO BIOGRAPHIE
Napoléon n’était pas fou p.7
RÉFLEXION
La dé-pression p.13
HUMEUR
Assujettir ou asservir ? p.14
THÉRAPEUTIQUE
S’ABONNER
à
■ FMC A. Merlot
L. Sache
Insertion sociale et
autonomie chez le patient
psychotique : résultats
des enquêtes ACT et ISA p.15
ANNONCES EN BREF p.20
ANNONCES
PROFESSIONNELLES p.23
mais aussi
à la Revue,
c’est si simple

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Communément ces termes, très usités,
renvoient à l’évaluation, par un
observateur, de la concordance entre le
comportement d’un individu concernant
la prise du traitement, l’hygiène
de vie par exemple et les recommandations
du médecin.
Un patient observant ou compliant est
un patient qui participe passivement à
son traitement en se conformant à la
parole médicale parfois au détriment de
ses propres convictions.
La non-observance peut être de plusieurs
types : absence de prise de médicamenteuse,
prises injustifiées, erreur
de posologie, prise de traitement non
prescrit, erreur dans les horaires de
prise. Cette non-observance peut être
intentionnelle ou non. Sur un plan
purement quantitatif, il paraît difficile de
définir un patient observant ou nonobservant
; les études sont en désaccord,
certaines proposent de définir un
pourcentage, dose prise/dose théorique
à prendre, spécifique d’une molécule,
permettant l’évaluation de l’observance
(Barbeau G. et al.).
Plus récemment, le terme d’adhésion a
pris une importance croissante dans le
discours médical et en particulier psychiatrique.
Ce terme met l’accent sur le
rôle actif que prend le patient dans le
choix de son traitement. Ce nouveau
visage du patient suppose une interaction
très forte entre celui-ci et les soignants
afin de pouvoir intégrer une
connaissance scientifique suffisante pour
pouvoir prendre part à la décision thérapeutique,
faisant de l’ordonnance le
témoin d’une négociation. Le rapport
de force devrait donc céder place à
une collaboration puisque l’adhésion
suppose que le patient se conforme à
la prescription médicale après avoir
donné son accord seulement.
Actuellement ce problème est omniprésent
en médecine, tant en médecine
somatique qu’en psychiatrie, en aigu
et en chronique.
Par exemple selon une récente étude
réalisée par le laboratoire Pfizer (COM-
PLy, J-C Péchère et al.), sur 4500 personnes
(11 pays différents) 22% des
personnes interrogées affirment ne pas
avoir observé à la lettre leur dernier
traitement antibiotique, la moitié a
conservé le reste de leur traitement
afin de le réutiliser ultérieurement. Pour
les hypertendus, on retrouve des taux
de non-observance tournant autour de
60%.
En psychiatrie, on observe selon les
études de 16 à 80% de non-observance.
Chez les patients schizophrènes
on retrouve environ 50% de nonobservants
à un an de la sortie d’hospitalisation
et 75% à 2ans (2). Parmi ces
Les pédophiles : qu’en penser,
qu’en dire, qu’en faire ?
Et puis le soufflet retombe et le sujet
n’intéresse plus grand monde. C’est
pourtant loin du tumulte qu’il faut
penser ces questions douloureuses.
Que sait-on aujourd’hui de la pédophilie,
en particulier sur le plan psychopathologique
?
De façon provocatrice, on pourrait
dire qu’on ne sait pas grand-chose, si
ce n’est ce que les pédophiles veulent
bien nous en dire.
Ainsi, les connaissances sur le sujet
restent toujours fragmentaires et empiriques.
Mais, en cela, elles ne diffèrent
en rien de l’histoire des connaissances
médicales en général. C’est
seulement lorsque les médecins rencontrent
des patients et les troubles
dont ils sont porteurs, qu’ils peuvent
commencer à formuler des hypothèses
éthiopathogéniques, proposer
des schémas thérapeutiques et constituer
un corpus théorique. Sans cette
rencontre, aucune observation clinique
n’est possible et toute élaboration
théorique reste hasardeuse.
Or, les pédophiles ne consultent pas
spontanément. Leurs rencontres avec
les psychiatres ou les psychologues
s’inscrivent, nécessairement, dans un
contexte judiciaire. C’est la justice
pénale qui va susciter, organiser et
parfois imposer cette rencontre. C’est
ainsi qu’une grande part des connaissances
acquises sur ce sujet découle
de l’application de la loi du 18 juin
1998 qui permet d’articuler des
mesures de soins et des mesures
pénales.
Le tout judiciaire
Qu’a-t-on appris ? Les premiers enseignements
ont permis de prendre des
distances vis-à-vis des conceptions historiques
et, en particulier, vis-à-vis du
concept de pervers sexuel hérité de
Dupré et de Kraft-Ebing. Même si les
élaborations théoriques freudiennes
sur les perversions sexuelles ont été
éclairantes, le terme de pervers sexuel
induit la confusion entre les notions de
perversions et de perversité. Surtout,
il sous-entend qu’il existe une intrication
obligatoire entre l’orientation
sexuelle d’un sujet et la structure de sa
personnalité. Dès lors, toute personne
dont l’orientation sexuelle s’écarterait
d’une stricte hétéro-sexualité devrait
De l’observance
présenter une personnalité structurée
sur un mode pervers.
Il en découle une philosophie démissionnaire
chez certains psychiatres
persuadés que seule la justice pénale
serait concernée par cette question
et qui répètent ici ou là : « Tous les
délinquants sexuels sont des pervers. Il
n’y a pas de traitement pour les pervers.
C’est à la justice pénale de s’en
débrouiller... ».
Mais les élaborations théoriques ne
peuvent précéder l’observation clinique
et l’observation clinique nous
amène à distinguer clairement les
troubles de l’orientation sexuelle et
les troubles de la personnalité.
Les troubles de l’orientation
sexuelle
L’orientation sexuelle de chaque sujet
résulte de l’aboutissement, de l’achèvement
des conflits structurants et des
processus de maturation qui permettent
à chacun d’accéder à une sexualité
adulte. Cette maturation ne va
pas sans avatar, comme l’indique
Freud de la façon la plus explicite :
« L’intérêt sexuel exclusif de l’homme
pour la femme n’est pas une chose qui
va de soi (...) mais bien un problème
qui mérite d’être éclairci ». Dans les
« Trois Essais sur la théorie de la sexualité
», il développe l’idée qu’au cours
de ses premières années l’enfant tire
des différentes parties de son corps
des plaisirs qu’il organise dans une
activité auto-érotique. Cette diversité
des zones érogènes qui se développe
avant l’avènement des fonctions
génitales proprement dites, correspond
à « la disposition perverse polymorphe
».
C’est le conflit œdipien et la menace
de castration qui instituent le parent
de l’autre sexe comme objet de désir,
et le parent du même sexe comme
objet d’identification.
L’accès à une sexualité adulte, après la
phase de latence et les investissements
intellectuels qui permettent la sublimation,
nécessite une résolution harmonieuse
de ces conflits fondamentaux,
faute de quoi les perversions
sexuelles de l’adulte viennent signer la
persistance ou la réapparition d’une
composante partielle de la sexualité. Il
ne s’agit donc pas d’une déviation par
patients, 71% n’observent que partiellement
la prescription, , 33% ne respectent
pas la durée du traitement et
16% n’achètent pas les médicaments
(Zagury 98) (3). Pour les traitements
antidépresseurs, on retrouve 30 à 70%
de non-observance, 20 à 40% dans le
cas de la lithiothérapie (4). Il existe toutefois
une très grande disparité des
résultats selon les études en partie expliquée
par la grande difficulté de l’évaluation
de l’observance liée à de
grandes disparités méthodologiques
(questionnaires, dosages des concentrations
sanguines des médicaments) (5),
ce problème étant également présent
dans la pratique clinique.
La question de l’observance thérapeutique
est incontournable pour les praticiens
et en particulier pour ceux travaillant
avec les pathologies chroniques.
En effet, les études s’accordent sur le
fait que l’observance décroît avec la
durée de l’affection (Reynaud et Malarewicz,
1996) (2). Ce problème est majoré
chez les patients souffrant de pathologies
difficiles à percevoir par le malade
lui-même. C’est le cas des pathologies
somatiques telles que l’hypertension
artérielle ou le diabète qui, en dehors
des décompensations aiguës, ne pré-
rapport à un instinct primitivement
normal, mais de la persistance ou la
réapparition d’une pratique du plaisir
acquise dans les premiers stades
du développement.
Si l’orientation hétérosexuelle représente,
à la fois, la norme dans le
consensus social et l’orientation majoritaire
sur le plan statistique, d’autres
choix d’objet sexuel sont connus
depuis toujours. Parmi eux, dans la
seconde moitié du XX e siècle, l’orientation
homosexuelle s’est clairement
dégagée de toute notion de pathologie.L’orientation
pédophilique, quant
à elle, n’a pas de statut clair au regard
de la pathologie. Pas plus que l’homosexualité,
elle ne peut être assimilée
à une maladie mentale. On mesure
rapidement combien cette assimilation
serait confusionnante.
Comme l’orientation homosexuelle
ou hétérosexuelle, l’orientation pédophilique
peut ou non être exclusive.
Chez les sujets non exclusifs, malgré
une orientation prépondérante,
d’autres émotions érotiques, voire
d’autres expériences sont possibles,
de façon plus ou moins durable.
Sur le plan pénal, c’est la mise en acte
de la pédophilie qui est condamnée,
au regard du retentissement catastrophique
subi par les enfants victimes.
L’orientation pédophilique elle-même,
si elle ne donne lieu à aucun passage
à l’acte, n’entre pas dans le champ
pénal. Elle reste une contrainte psychopathologique
qui s’impose au sujet.
Comme tout sujet, le sujet pédophile
doit adapter ses comportements : passage
à l’acte ou acceptation de la frustration.
Cette frustration sera moins
difficile lorsque la pédophilie n’est pas
exclusive, mais la tolérance ou l’intolérance
à la frustration introduit un
deuxième éclairage, celui des troubles
de la personnalité.
Les troubles de la
personnalité
Comme pour les sujets homosexuels
ou hétérosexuels, la personnalité des
sujets pédophiles peut être structurée
sur un mode névrotique ou pervers
(voire sur un mode psychotique). Pour
bon nombre de sujets, la structure de
personnalité, mal affirmée, laisse la
place à une immaturité affective plus
ou moins accompagnée d’aménagements
pervers. Pour d’autres, encore,
les mécanismes de défense observés
font évoquer un état-limite.
(suite page 5 )
sentent des manifestations cliniques
visibles qu’à un stade très évolué. C’est
bien entendu également le cas de la
psychose, aiguë mais également chronique
dont, le déni, les troubles de la
pensée, de la perception de la réalité et
du jugement sont des éléments constitutifs.
La non-observance dans le cas des
pathologies somatiques telles l’hypertension
artérielle (HTA) ou le diabète
est à l’origine d’une importante surmortalité
du patient non-compliant en
particulier pour cet exemple précis par
complications cardio-vasculaires (coronaropathies,
AVC etc…). Il existe pour
la société un surcoût important lié à
l’augmentation du nombre de jours
d’hospitalisation liés aux décompensations
et complications intercurrentes.
Dans le domaine de la santé mentale,
la non-observance est à l’origine de
conséquences dommageables pour l’individu
lui-même mais également pour
son entourage et pour la société tout
entière. Sur le plan individuel, l’arrêt
des traitements est à l’origine d’une
augmentation des rechutes que ce soit
dans le cas des troubles bipolaires ou
des psychoses chroniques. Pour la schizophrénie,
40% des rechutes survenant
un an après une première hospitalisation
sont liées à une mauvaise
observance du traitement (2). La noncompliance
entraîne une altération de
la qualité de vie du patient liée, à une
recrudescence des symptômes pouvant
même menacer le pronostic vital
des patients (passage à l’acte auto-agressif),
et aux répercussions sociales et
familiales de ces rechutes (perte d’emploi,
conflits familiaux…). Les rechutes
sont également sources d’un accroissement
des dépenses de santé, en effet
selon la même étude de Weiden et
Olfson, 40% du coût hospitalier direct
est attribuable aux rechutes par défaut
d’observance. Le surcoût induit par l’inobservance
totale constitue 7% du coût
total lié au nombre de jours d’hospitalisation
pendant une période de 12
mois (6). Il existe un risque plus spécifique
à la non-observance des traitements
psychiatriques : le risque de passage
à l’acte dans un contexte
d’acutisation symptomatique. En effet,
les facteurs de risque de passage à l’acte
identifiés par les cliniciens sont : la
rupture de traitement, la consommation
de toxiques et la désocialisation
(7, 8). Ce risque pour la société a
contribué à modifier l’attitude des pouvoirs
publics (loi du 30 juin 1838 modifiée
par la loi du 27 juin 1990 relatives
aux hospitalisations sans
consentement) et l’attention particulière
des praticiens vis-à-vis de l’observance
des patients souffrant de troubles
mentaux.
Ces ainsi que pour des raisons à la fois,
sanitaires, sociales et éthiques les psychiatres
sont amenés à travailler sur
l’évaluation de l’observance médicamenteuse
et sur son amélioration. Initialement,
l’évaluation de l’observance
était essentiellement basée sur les signes
d’imprégnation médicamenteuse. Pour
les premiers neuroleptiques utilisés dans
les années 50, un patient observant
était un patient présentant les effets
secondaires extrapyramidaux et anticholinergiques
(rigidité extra-pyramidale,
hypo ou hypersialie…). Les effets
secondaires étaient indissociables des
effets bénéfiques. L’apparition des neuroleptiques
à action prolongée (Haldopéridol
Décanoas, Zuclopenthixol
AP, Flupenthixol AP, Pipotiazine L4,
Fluphénazine decanoas) marque un
tournant dans la prescription médicamenteuse.
L’assurance de la prise du
traitement lors de chaque injection réalisée
par un soignant et les effets secondaires
théoriquement minorés soutiennent
l’hypothèse d’une meilleure
observance de ces traitements. Mais
cette hypothèse se révèle au moins
partiellement inexacte. En effet, différentes
études montrent que le problème
de l’observance reste entier avec
les neuroleptiques à action prolongée.
LIVRES
FMC ■ 3
Fragments psychologiques
sur la folie
La naissance de la psychose
François Leuret
Préface de Pierre Morel
Avant-propos de David F. Allen
Postface de Thierry Tremine
Editions Frison-Roche, 44 €
François Leuret (1797-1851) a suivi
l’enseignement d’Esquirol à la Salpêtrière
et est devenu externe chez
Royer-Collard à Charenton. Il a soutenu
sa thèse en 1826 ; dix ans plus
tard il est déjà médecin chef à Bicêtre.
F. Leuret a été préoccupé par le paupérisme,
mais il est aussi le véritable
théoricien de la dissociation psychotique.
Les Fragments psychologiques
sur la folie constituent la naissance
même d’une véritable psychopathologie
des psychoses. Leuret abandonne
les monomanies et réorganise
la clinique de la grande folie autour
de deux pôles.
La folie qui paraît vraisemblable, bien
organisée, sans trouble du langage,
est représentée par les « Arrangeurs ».
On pourrait presque y croire car les
patients font montre de conviction
et de logique. C’est l’ancêtre du « délire
d’interprétation », la base de la paranoïa.
En face du tableau clinique
des arrangeurs, on trouve la pauvreté
sémantique des « Incohérents » ; langage
en ruine, jeu de sonorités,
salade de mots, jargonophasie et barrages.
On y reconnaît le délire paranoïde,
pauvre et mai systématisé...
Bien avant Bleuler, Leuret théorise le
« manque de force » dans les associations
à l’œuvre dans l’incohérence
paranoïde.
L’intégration
professionnelle des
personnes handicapées
Le travail en milieu ordinaire
Dossier Professionnel Documentaire
2007 n°5
Diffusion CTNERHI, 15,50 €
L’intégration professionnelle des personnes
handicapées en milieu ordinaire
est organisée par la loi pour
l’égalité des droits et des chances, la
participation et la citoyenneté des
personnes handicapées qui réaffirme
le principe de non discrimination en
raison du handicap dans le cadre professionnel
et impose aux employeurs
de prendre les mesures appropriées
pour permettre aux travailleurs handicapés,
bénéficiaires de l’obligation
d’emploi, d’accéder ou de conserver
un emploi correspondant à leur qualification.
L’obligation d’emploi reste
fixée à 6% dans les entreprises de
20 salariés et plus, publiques et privées,
et le champ des bénéficiaires
est étendu aux titulaires d’une carte
d’invalidité et de l’allocation aux
adultes handicapés. Ce dossier fait le
point sur l’application de la loi à l’aide
d’articles de fond, d’extraits de rapports
pour approfondir les problématiques
soulevées et présente la situation
de l’emploi des travailleurs
handicapés en intégrant l’ensemble
des textes, décrets et arrêtés, publiés
au cours de l’année 2006. Il se compose
de trois parties. La première examine
l’emploi dans le secteur privé
(en y incluant les entreprises adaptées
et les centres de distribution de
travail à domicile, et dans les trois
fonctions publiques selon les données
administratives disponibles. La
seconde expose les pratiques, des représentations
des employeurs et renseigne
sur les points de vue des travailleurs
handicapés vis-à-vis de
l’emploi. Enfin, la troisième partie propose
une bibliographie sur l’intégration
professionnelle par type de handicap.
La reproduction intégrale du
Chapitre II sur l’emploi de la loi handicap
et ses décrets d’application ainsi
que des références statistiques sont
proposés en annexes.

4
LIVRES ET REVUES
Ethnopsychiatrie
psychanalytique
François Laplantine
Beauchesne, 26 €
Née de la rencontre de l’ethnologie et
de la psychanalyse, l’ethnopsychiatrie
psychanalytique permet de comprendre
non seulement des processus d’acculturation
qui échouent, mais encore des
formes de transculturation qui réussissent,
de nouvelles formes de subjectivité
pouvant être qualifiées d’hybrides,
de métisses ou de mutantes qui sont
autant de devenirs possibles du sujet.
Après avoir rappelé la genèse de cette
approche pluridisciplinaire qui se constitue
dans une interaction entre la clinique
et le terrain, François Laplantine
pose les jalons d’une théorie complexe
du sujet et du social ou, plus précisément,
du désir et du collectif. Puis, il fait
part de recherches qu’il a successivement
effectuées. A Djerba, en Tunisie,
où il étudie les rites de préparation au
mariage. En pays baoulé, en Côte d’Ivoire,
où il se trouve confronté à plusieurs interprétations
des troubles mentaux. En
Italie du Sud où, jusqu’au début des années
1990, une thérapie collective consistait
à jouer et à danser la tarentelle pour
soigner la morsure de la tarentule. En
Amérique latine, enfin, où il interroge
la signification de la croissance spectaculaire
des mouvements pentecôtistes
contemporains.
Stress et violence à l’école
Revue francophone du Stress et du
Trauma 2007, n°3
Princeps Editions
L’objectif de ce numéro thématique de
la Revue francophone du Stress et du
Trauma est de sensibiliser chercheurs
et professionnels à une question qui
mérite qu’on lui accorde un plus grand
intérêt et qui concerne plus de 14 millions
d’élèves et d’étudiants. Ce numéro
présente les résultats de travaux actuellement
menés en France et à l’étranger.
La complexité écologique de l’objet
autorise plusieurs angles d’approche.
Ainsi, se trouvent réunis des textes qui,
selon leur obédience, apportent des réponses
concrètes aux interrogations
soulevées, à la fois, par les chercheurs
(cliniciens ou psychosociologues) et les
professionnels confrontés, chaque jour,
à la question de la santé à l’école.
Les deux premiers articles sont consacrés
à l’étude de la violence à l’école.
Benjamin Patty et Dominique Lassare
montrent, à travers une étude longitudinale,
à quel point la représentation
sociale de la violence et la tendance
agressive de l’élève sont liées. Ils suggèrent
que la représentation de la violence,
distincte pour les élèves et les enseignants,
peut être à l’origine de conflits.
Gilles Brandibas et al. abordent le problème
du harcèlement (ou bullying) entre
élèves. Cette problématique est mise
en lien avec la santé physique des collégiens
et des lycéens. Lony Schiltz
aborde la question de la prise en charge
psychologique en milieu scolaire. Le témoignage
de 30 années d’expérience
clinique est rapporté à travers plusieurs
recherches qui mettent en avant l’intérêt
du recours à l’art-thérapie auprès
d’adolescents présentant des troubles
de la conduite agie. Rosine Diwo et al.
interrogent la notion de risque suicidaire
chez l’adolescent en brossant l’ensemble
des facteurs d’émergence, et en
détaillant les actes de prévention primaire,
secondaire et tertiaire. Ce dernier
point mentionne plus particulièrement
les actions réalisables dans un
contexte scolaire et fait de ce texte un
véritable outil de travail pour tout professionnel
confronté à la question de
l’élève suicidant.
Les articles qui suivent portent, essentiellemet,
sur le stress en tant que facteur
susceptible d’amoindrir la santé
psychique et/ou physique des élèves.
Michelle Dumont et Danielle Leclerc
s’intéressent aux conséquences que celui-ci,
selon son évolution (stabilité, augmentation
ou diminution), peut avoir
sur les capacités d’adaptation, les ressources
personnelles et les performances
scolaires des élèves du secondaire. Les
résultats suggèrent la mise en place
d’outils capables d’endiguer le stress
lors du développement de l’élève. Marina
Delgrande Jordan et al., dans une
étude menée auprès de plus de 2 000
élèves suisses, et réalisée dans le cadre
de l’enquête internationale Health behaviour
in school-aged children, font état
de troubles de la santé directement liés
au stress généré par le travail scolaire.
Là aussi, une détection précoce et une
prise en charge adéquate sont suggérées.
Dans le même sens, Christian Réveillère
et Robert Courtois montrent que
les stress majeurs et mineurs qui ont
trait à la vie écolière affectent plus par-
ticulièrement la santé psychique des
élèves issus du primaire et du secondaire.
Deux articles abordent ensuite,
selon des perspectives théoriques distinctes,
la notion d’ajustement. Selon
une approche interculturelle, Virginie
Boutry-Avezou et al. placent la question
de l’adaptation des adolescents issus
de l’immigration au coeur de leur
travail. Loin de faire un constat d’échec
du modèle d’intégration français, les
auteurs montrent que les adolescents
de la seconde génération de l’immigration
semblent être plus adaptés au
cadre de vie scolaire que les Français
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
dits de souche. Elisabeth Spitz et al. questionnent,
plus particulièrement, la notion
de coping auprès des étudiants. Le
manque d’adaptation à la vie universitaire
semble être alimenté par une détresse
psychologique, un isolement, et
des difficultés à gérer le temps de travail.
Enfin, Fabienne Lemétayer pose la
question de l’intégration de l’enfant cancéreux
dans un cadre de vie scolaire.
Une synthèse des travaux permet de
pointer les différents problèmes que
peut susciter sa réinsertion à la fois pour
les enseignants qui en ont la charge,
mais également pour l’enfant lui-même.

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Vingt et un pour cent des patients interrompent
le traitement après un an seulement
(9). L’étude de Tattan et al.
montre que 72% des patients sous traitement
retard interrompent ce traitement
sur une période d’environ 1mois
chaque année (10). Les résultats de différentes
études sont aujourd’hui contradictoires
concernant la supposée supériorité
des NAP sur les formes
orales (11). Malgré l’hétérogénéité des
résultats, en pratique clinique, ces traitements
restent fréquemment utilisés
chez des patients ayant présenté de
nombreuses rechutes liées à une mauvaise
observance.
Depuis les années 90, les laboratoires
pharmaceutiques ont mis sur le marché
les neuroleptiques de nouvelle génération
ou antipsychotiques atypiques
tels la Risperidone, l’Olanzapine, l’Amisulpride
ou l’Aripiprazole présentés
comme ayant une plus grande efficacité
et de moindres effets secondaires permettant
une meilleure observance.
Parallèlement au développement de
ces nouvelles molécules, dans un mouvement
venant d’outre-Atlantique, les
psychiatres et pharmacologues relayés
par les associations de patients insistent
sur la nécessité pour le patient
d’adhérer au projet de soins.
Le concept d’adhésion s’est développé
sur un constat : les résultats d’observance
sont très mitigés chez les
patients souffrant d’une pathologie
chronique et ce malgré les avancées
pharmacologiques permettant d’amé-
liorer les galéniques et de diminuer les
effets indésirables des traitements. De
cette constatation est née l’hypothèse
selon laquelle la seule façon d’améliorer
ces résultats serait de travailler sur
l’acceptation du traitement avec le
patient. Le préambule étant, pas d’observance
sans consentement et pas de
consentement sans une information,
loyale, claire et appropriée, délivrée
aux patients. C’est aux Etats-Unis que,
sous la pression des associations d’usagers,
l’information est devenue une
obligation réglementaire incluant l’accès
direct au dossier médical. Ce droit à
l’information s’est très vite diffusé dans
les sociétés occidentales, ainsi en 1997,
Rigo Van Meer estime qu’aux Pays-
Bas, 80% des patients schizophrènes
connaissent leur diagnostic, sur leur
demande dans 20% des cas seulement
(12). En France, la conférence de
consensus des 13 et 14 janvier 1994
sur les stratégies thérapeutiques à long
terme dans les psychoses schizophréniques,
conclut que les équipes soignantes
doivent informer le patient et
ses proches sur la maladie, ses symptômes,
la valeur de leur réduction éventuellement
incomplète ou les signes
prémonitoires de rechute, le nom des
médicaments, l’effet thérapeutique
attendu et les éventuels effets indésirables
(Agence Nationale pour le Développement
de l’Evaluation Médicale
ANAES). Cette orientation a ensuite
été confirmée par les recommandations
de mars 2000 de l’Agence Natio-
Les pédophiles : qu’en penser,
qu’en dire, qu’en faire ?
Chaque fois, les tableaux cliniques
sont très différents.
La pédophilie des sujets névrosés s’accompagne
d’un fort sentiment de culpabilité.
Les mécanismes de refoulement
parviennent parfois (souvent ?)
à endiguer les passages à l’acte. Ils collectionnent
les images pédophiles et
c’est leur fréquentation de certains
sites internet qui finit par les amener
devant la justice.
Les sujets immatures sont souvent
des adolescents ou de jeunes adultes
inhibés dans leur sexualité avec les
partenaires de leur âge. Leurs passages
à l’acte sont souvent qualifiés
de pédophilie exploratrice. Les enfants
leur apparaissent moins intimidants
que ne le sont les femmes adultes.
Les sujets pervers restent redoutables.
Totalement étanches à tout sentiment
de culpabilité, n’admettant d’autre loi
que celle que dicte leur désir de jouissance,
ils tissent un réseau relationnel
marqué par la relation d’emprise
ou le déni d’altérité. Pire, ils avancent
souvent sous le masque d’une apparente
normalité.
Les sujets limites, quant à eux, voient
leurs passages à l’acte facilités par les
mécanismes de clivage qui les protègent
de la culpabilité. Ils n’ont pas de
jouissance à la transgression, mais
leurs instances surmoïques sont souvent
défaillantes.
Un tel catalogue souffre de son caractère
schématique, voire caricatural.
Il mérite amplement la critique, mais
n’a d’autre but que de démontrer la
diversité des tableaux cliniques rencontrés
et d’imposer l’idée que pour
une telle diversité clinique, il n’existe
pas de réponse univoque. D’autant
que, on l’aura compris, le caractère
dangereux et le potentiel de
récidive ne seront jamais les mêmes
chez un sujet pédophile exclusif et
pervers, et chez un névrosé surtout si
son orientation pédophilique n’est
pas exclusive.
Quelques principes
intangibles
Quoi qu’il en soit des indications pronostiques
qui peuvent se dégager de
cette grille de lecture qui croise les
troubles de l’orientation sexuelle et
les troubles de la personnalité, dans
tous les cas, l’orientation pédophilique,
lorsqu’elle donne lieu à des
passages à l’acte délictueux ou criminels,
doit faire l’objet d’une réponse
pénale.
Pas plus que toute autre orientation
sexuelle, la pédophilie ne peut être
assimilée à une maladie mentale. C’est
dire qu’en aucune façon, elle ne peut
donner lieu à des soins sous contrainte
ou à des hospitalisations sans
consentement dans le cadre de la loi
du 27 juin 1990. Outre les problèmes
éthiques qu’il importe de ne pas
méconnaître, de tels soins sous
contrainte courraient, avant tout, le
risque d’être parfaitement inefficaces.
Mais, on l’a vu, les passages à l’acte
pédophilique sont sous-tendus par
des troubles de personnalité, qui pour
certains, pourront bénéficier d’une
prise en charge soignante. Les soins
doivent alors s’articuler aux mesures
pénales, durant la peine privative de
liberté et, au-delà, en ambulatoire.
C’était toute la subtilité et les enjeux
de la loi du 18 juin 1998.
Cette articulation de la peine et du
soin exige que les pratiques soignantes
s’inscrivent dans un cadre rigoureux :
- les indications de soins doivent être
posées par les psychiatres, non par
les magistrats ;
- la confidentialité est le moteur essentiel
des soins. Sans respect du secret
médical, aucune relation de soins ne
pourra s’instaurer ;
- ces soins doivent faire régulièrement
l’objet d’évaluations externes (expertises,
rapports des médecins coordonnateurs)
qui permettent de dissiper
tout risque d’illusion de soins et de
renseigner le magistrat sur l’évolution
du suivi ;
- ces soins ne peuvent s’envisager sans
la participation active du sujet. C’est
dire combien des soins sans consentement
ou sous contrainte seraient
illusoires ;
- pour certains sujets, l’indication de
soins sera récusée par les experts, soit
parce qu’ils nient les faits, soit parce
que la dimension perverse de leur
personnalité apparaît trop importante.
Ceux-là relèvent alors des seules
nale d’Accréditation et d’Evaluation en
Santé, relatives à l’information des
patients qui insiste sur la nécessité de
donner une information validée, hiérarchisée,
intelligible, synthétique sur
la pathologie les traitements et les effets
secondaires y compris exceptionnels
(syndromes malins, dyskinésies tardives).
Plus récemment la loi du 4 mars
2002 officialise l’accès du patient aux
informations médicales le concernant
(13). Cette évolution place les cliniciens
face à la difficile problématique
d’une information claire, loyale, appropriée
et de la définition d’un consentement
éclairé. En effet, la compréhension
du patient varie en fonction
de son niveau éducatif, de la gravité
de sa pathologie mentale et peut donc
évoluer au cours du temps. Ce problème
est évoqué dans la conférence
de consensus de janvier 1994 : « Bien
que la fonction essentielle du médecin
soit d’entendre et de comprendre son
patient, il peut être amené à le
contraindre, en particulier en lui imposant
des soins. Dans le cadre de la Loi du 27
Juin 1990, l’hospitalisation sur demande
d’un tiers et l’hospitalisation d’office
sont prévues pour des patients qui ne
sont pas en mesure de consentir à l’hospitalisation
et pour lesquels la prescription
des soins devra être imposée (ce à quoi le
praticien est par ailleurs tenu par déontologie).
En fait le recours à ce cadre
légal, qui concerne souvent des schizophrènes,
reste heureusement rare et ne
justifie pas que l’impasse soit faite sur
mesures pénales. Il en va de même de
ceux qui ne consentiraient pas aux
soins qui leur sont proposés. Pour certains
sujets, les murs de la prison
seront longtemps nécessaires pour
protéger la société.
Les nouvelles orientations
politiques
Alors qu’au sein des groupes de travail
Santé-Justice réunis ces dernières
années, nous étions arrivés à un
consensus entre les professionnels de
la justice et de la psychiatrie sur les
principes énoncés plus haut, la récidive
d’un sujet pédophile en fin de
peine est venue balayer les acquis.
Le pouvoir politique annonce aujourd’hui
la création d’hôpitaux fermés,
baptisés Centres Sociaux Médico-Judiciaires
de Sûreté. Ces centres seront
susceptibles de recevoir sur le mode
de l’internement (rétention de sûreté)
des sujets condamnés qui, après avoir
purgé la totalité de leur peine, présentent
toujours une particulière dangerosité
attestée par une expertise
médicale. Dans ces centres, selon le
projet de loi, seront proposées, de
façon permanente, des prises en charge
médicale et sociale.
On est ainsi passé rapidement, de l’articulation
de la peine et du soin à
l’instrumentalisation de la psychiatrie,
convoquée ici comme seule discipline
médicale susceptible d’instaurer des
soins sous contrainte et des hospitalisations
sans consentement.
Au-delà des mesures de soins, dans ce
domaine où les connaissances sont
balbutiantes, où le manque d’assise
théorique limite les pratiques à un
empirisme sans grande fiabilité, il est
à craindre que ce soient les possibilités
d’enfermement sans délai qui
soient visées par le pouvoir politique.
Dans le pragmatisme ambiant, peu
importent les mesures de soin, pourvu
que l’agresseur soit enfermé à vie.
Si c’était le cas, nous devons affirmer
clairement que nous n’accepterons
pas que la psychiatrie soit instrumentalisée
comme variable d’ajustement
de la politique pénale, pour instaurer
des peines de perpétuité réelle. ■
Gérard Dubret
Psychiatre des Hôpitaux, Expert près la Cour
d’Appel de Versailles, C. H. René Dubos,
Pontoise.
une réflexion concernant les mécanismes
psychiques en jeu dans l’information et le
consentement ».
Les laboratoires pharmaceutiques, en
étroite collaboration avec les professionnels
de la maladie mentale, ont
très vite su devenir des acteurs important
dans le domaine de l’adhésion en
développant des ouvrages, programmes
psycho-éducatifs destinés aux patients
psychotiques. Ces supports s’appuyant
sur des travaux tels que les modules
de Liberman qui visent à aider les
patients psychotiques chroniques et
leur famille à retrouver une qualité de
vie optimale (14).
Si cette évolution fondamentale dans la
prise en charge de la pathologie mentale,
soutenue par les associations de
patients, paraît évidemment souhaitable
puisque, valorisant une relation
soignant-soigné égalitaire, plus soucieuse
du respect de la liberté de l’individu,
elle paraît plus inquiétante si on la resitue
dans son contexte socio-politicoéconomique
(3). Le patient tend aujourd’hui,
dans le respect des règles fixées
par le libéralisme économique, à devenir
un consommateur de soins. Le
patient psychotique, nouveau consommateur
de soins, éclairé par les programmes
éducatifs négocie sa prise en
charge avec les soignants, ce nouveau
contrat introduit une responsabilisation
du patient, « le patient doit s’autogouverner
de par son adhésion » (3). Les
laboratoires pharmaceutiques ont très
vite adapté leur stratégie de communication
institutionnelle et de leur marketing
diffusant des plans de traitement
individuels, des publications de vulgarisations
scientifiques, de nombreux
produits dérivés (piluliers, réveils et
autres). J Palazzolo précise que la psychose
n’est plus définie comme un obstacle
à l’accès aux traitements mais
comme une entité marketing. Ce système
peut s’avérer pernicieux pour le
patient pensant initialement être valorisé
par cette nouvelle image endossée.
S’il n’est pas observant, il devient le
seul fautif, consommateur incapable
de se servir habilement de son pouvoir,
mettant hors de cause le système
de santé et les traitements eux-mêmes.
Sans l’attention des cliniciens la stratégie
d’amélioration de l’adhésion risque
d’être petit à petit déléguée par le système
public au secteur privé, les clefs
de la réussite thérapeutique étant présentées
par les firmes pharmaceutiques
sous la forme de nombreux modules
éducationnels. Cette délégation s’annonce
néfaste à long terme puisqu’elle
risque d’une part de freiner une
réflexion plus générale sur l’amélioration
de l’observance au profit d’un seul
axe de celle-ci : l’éducatif, se faisant
notamment au détriment du travail
relationnel entre le patient et ses soignants
moteur d’une adhésion de qualité.
D’autre part on est en droit de se
demander si cette incursion du privé
dans un domaine jusqu’ici sous la responsabilité
du système public ne posera
pas à l’avenir un problème d’accès
aux soins pour les plus démunis. Plusieurs
études ont pourtant montré que
plus que les croyances ou le mode de
vie du malade mental, ce sont les possibilités
d’accès aux soins réguliers qui
influencent l’adhésion (3). ■
A. Merlot
Service du Dr Vacheron – Centre Hospitalier
Sainte-Anne – 1 rue Cabanis – 75014 Paris
Bibliographie
(1) DSM-IV,AMERICAN PSYCHIATRIC
ASSOCIATION, in Diagnostic and statistical
manual of mental disorders (4th ed).
1995
(2) WEIDEN P. et al., Cost of relapse in
schizophrenia, Schizophrenia bulletin 1995,
21, 419-29.
(3) J. PALAZZOLO et al., L’observance
médicamenteuse et psychiatrie, 2004, 23-
28 et 37-48.
(4) 0LIVIER-MARTIN, Exhaustion depression,
Encephale 1996, Spec n°7, 46-51.
FMC ■ 5
Le CMP unique
ordonnateur des soins
Le CMP pivot du secteur
Pluriels 2007 n°68
La lettre de la MNASM
Pierre Caillault tente de degager, au
travers des multiples expériences de
CMP recensées par la Mission d’appui
en santé mentale sur l’ensemble
du territoire national, quelques principes
généraux sur lesquels la créativité
des équipes pourrait s’appuyer
pour développer des outils adaptés
aux territoires desservis, intégrés dans
le dispositif global de soins, respectant
les particularités locales et répondant
au mieux aux besoins des
populations. Alain Gouiffès décrit la
mise en place d’un Centre d’accueil
et de soins psychiatriques intersectoriel
à Rouen. Laurent El Ghozi précise
ce qu’attendent les élus d’un dispositif
de santé mentale.
Les allocataires des minima
sociaux : CMU, état de santé
et recours aux soins
Bénédicte Boisguérin
Etudes et résultats 2007 n°6
Drees
Une enquête a été effectuée par la
DREES au deuxième trimestre 2006
auprès de personnes allocataires de
minima sociaux (RMI, API et ASS) au
31 décembre 2004. A la date de l’enquête,
les allocataires toujours présents
dans le dispositif bénéficient
plus fréquemment de la couverture
maladie universelle complémentaire
(CMUC) que ceux qui en sont sortis.
La majorité des personnes n’ayant
pas recours à la CMUC sont déjà couvertes
par un organisme complémentaire
ou bien ont des revenus
trop élevés. Par ailleurs, l’état de santé
de ces allocataires est moins bon que
celui de la population générale. De
plus, les bénéficiaires des minima sociaux
ont plus dé problèmes de santé
affectant leur travail que les personnes
sorties de ces dispositifs. Près d’un
tiers des allocataires de l’API et du
RMI et 45% des allocataires de l’ASS
disent avoir renoncé à au moins un
soin pour des raisons financières dans
les douze derniers mois, principalement
dentaire et d’optique.
www. sante.gouv.fr/drees/index.htm
Pour toute information : drees-infos@sante.gouv.fr
(5) BLONDIAUX I., ALAGILLE M.,
GINESTET D., L’adhésion au traitement neuroleptique
chez les patients schizophrènes,
Encéphale 1998, XIV, 431- 8.
(6) TAZAROURTE M., CATTEAU J., FALL
A., Le coût de l’inobservance aux psychotropes,
Synapse 1999, 154, 27-30.
(7) HODGINS S., Mental disorder, intellectual
deficiency, and crime: evidence from a
birth cohort, Arch. Gen. Psychiatry 1993,
49, 476-483.
(8) SWANSON J. W., HOLZER C. E.,
GANJU V. K., JONO R. T., Violence and
psychiatric disorder in the community: evidence
from the epidemiologic catchment areas
surveys, Hosp. Community Psychiatry
1990, 42, 7761-770.
(9) TUNNICLIFFE S., HARRISON G.,
STANDEN P.J., Factors affecting compliance
with depot injection treatment in the community,
Soc Psychiatry Psychiatr Epidemiol
1992, 27, 230-3.
(10) TATTAN T.M., CREED F.H., Negative
symptoms of schizophrénia and compliance
with médication, Schizophr Bull 2001, 27,
149-55.
(11) MISDRAHI D., BAYLÉ F., Impact des
NAP sur l’observance, Nervure Tome XV-
N°4, Mai 2002.
(12) Document de consensus hollandais relatif
aux conditions minimales du traitement
de la schizophrénie (Schizofrenie Stichting
Nederland), La Lettre de la Schizophrénie
1997, 6, 17-20.
(13) Loi du 4 mars 2002 relative aux droits
du malade et à la qualité du système de santé,
loi n°2002-303, Journal Officiel.
(14) LIBERMAN R.P., Réhabilitation psychiatrique
des malades mentaux chroniques,
Masson 1991.

6
■ URGENCE
LIVRES ET REVUES
100 petites expériences de
psychologie de la séduction
N. Guégen
Dunod
Sexy, puisque c’est le thème, amusant,
et surprenant souvent. C’est ainsi
que se présente cet ouvrage qui collige
des résultats d’expériences sur la
séduction. Savez-vous, par exemple,
que la femme élisabéthaine mettait
une pomme sous son aisselle et qu’une
fois cette dernière imprégnée de son
musc, elle la donnait à son amant
afin qu’il puisse la humer où qu’il
soit ? L’époque contemporaine appelait
une vérification expérimentale
d’un tel fait. Or les phérormones ont
des effets indéniables : des femmes
qui vivent ensemble synchronisent
leur cycles hormonaux et celles qui
sont proches d’hommes voient leur
cycles diminuer en longueur. Et pour
le sex-appeal ? Il semble que cela
fonctionne aussi, dans les deux sens
(masculin-féminin et réciproquement),
voire que le génotype HLA l’influence,
via les dites phérormones. Bon, par
ailleurs, apprendre que les hommes
sont attirés par les poitrines fortes ne
surprendra personne mais, par contre,
qu’en est-il de la longueur des pieds
de la partenaire ? Ou du degré de rasage
du mâle potentiellement choisi ?
A propos, saviez-vous que les femmes
semblent aimer les hommes qui ont
de l’humour, mais pas vraiment le
contraire ? Des appariements en
couple par caractéristiques physiques,
en passant par l’attirance par tel ou
tel type de voix ou de ratio hanchestaille,
sans oublier quelques surprises
de ce qui peut marcher, ou pas, dans
la drague, ce livre se lit de façon très
fluide. Son optique est résolument
celle d’une psychologie évolutionniste
: comment la femelle va-t-elle
choisir le mâle qui garantira le mieux
sa protection alors qu’elle s’occupera
des enfants à venir ? Et comment le
mâle choisira-t-il une (ou des) femelles
aptes au mieux à pérenniser et à faire
fructifier son semen. Les enseignements
des différentes expériences
rapportées font l’objet d’hypothèses
allant en ce sens. Une optique que
l’on peut discuter ; mais en tout cas
des résultats constatés souvent troublants
...
Geneviève Rodis-Lewis,
interprète de Descartes
Revue philosophique de la France et
de l’étranger 2007 n°3
Presses Universitaires de France, 21 €
Le 11 juin 2005 d’est tenu en Sorbonne
un colloque intitulé Une autre
histoire de la philosophie du XVII e siècle,
en hommage à la mémoire du P. G.
Rodis-Lewis. Les articles réunis dans
ce numéro sont issus des communications
qui y furent présentées.
C’est par ses travaux sur Descartes
que la notoriété de G. Rodis-Lewis est
aujourd’hui la plus grande : elle est
celle qui introduit à sa lecture l’étudiant
comme l’honnête homme, qui
découvrent la vie de ce philosophe
à travers la bibliographie qu’elle lui
consacra en 1996, ou les grandes
lignes du développement de sa pensée
dans l’étude générale qu’elle publia
en 1971. Elle reste, en effet, l’une
des meilleures sources de renseignements
concernant des auteurs
postcartésiens, tels Desgabets, ou Malebranche.
C’est aussi elle qui replaça
parmi les « grands » philosophes Arnauld,
alors échoué au milieu des
« petits cartésiens ». Elle est, enfin, la
seule à avoir proposé un travail d’envergure
sur l’inconscient ou l’individualité
selon Descartes. Enfin, l’œuvre
de Geneviève Rodis-Lewis ne concerne
pas les seuls érudits ou philosophes
modernistes : la rigueur intellectuelle
qu’elle incarna demeure un exemple.
Evaluation de la prescription
des psychotropes dans une
unité d’hospitalisation de
courte durée
C’est une Unité Fonctionnelle d’Hospitalisation
de dix lits. Sauf cas exceptionnel,
la durée d’hospitalisation dans
l’UHCD doit être inférieure à 36
heures ou deux nuits consécutives.
Lors du projet initial, une procédure a
donc été effectuée avec l’ensemble
des psychiatres de l’institution, afin de
définir les caractéristiques des patients
adultes admis dans l’unité et relevant
d’une pathologie psychiatrique.
Nous avons donc retenu comme
pathologies éligibles pour cette unité,
les états anxieux, les états dépressifs
non graves (non mélancoliques), les
intoxications médicamenteuses volontaires
non graves et les autres pathologies
psychiatriques qui ne présentent
pas de risque apparent d’hétéro
ou d’auto-agressivité.
Nous avons, également, convenu, en
rapport avec les conférences de
consensus actuelles, que tous les
patients ayant effectué une tentative
de suicide doivent être examinés dans
les vingt quatre heures par un psychiatre.
On rappelle à ce propos que l’UHCD
n’a pas comme fonction d’accueillir
les patients agités ou violents, du fait de
l’absence de salle de contention. C’est
donc le Praticien responsable de
l’UHCD qui assure avec l’équipe de
Psychiatrie de Liaison la prise en charge
des patients relevant d’un problème
psychiatrique.
Ces patients bénéficient tous au moins
d’une consultation psychiatrique lors
de leur séjour dans l’UHCD.
Les Hôpitaux du Léman disposent de
43 lits d’hospitalisation de Psychiatrie
Adulte pour un bassin de population
de 115 000 habitants environ. La suite
des soins psychiatriques est assurée
soit par l’équipe de Psychiatrie de Liaison,
soit par les Psychiatres ou Psychologues
du Centre Médico-Psychologique
(CMP) ou, encore, par les
Psychiatres libéraux.
Un rendez-vous avec un professionnel
des soins psychologiques ou les
coordonnées de ces services sont données
systématiquement au patient à
sa sortie. Profitant du lien qui a été
crée dans l’UHCD avec l’équipe soignante,
il est également rappelé au
patient, qu’en cas de récidive d’un raptus
anxieux, il peut à nouveau consulter
notre service. Cette information a
permis à certains patients de reconsulter
notre unité, permettant ainsi
d’éviter un nouveau passage à l’acte.
Un courrier est adressé systématiquement
au Médecin et au Psychiatre qui
s’occupent habituellement du patient.
Objectifs de ce travail et
méthodologie utilisée
Le but de ce travail est de décrire
l’activité psychiatrique de cette unité
et, en particulier, l’activité pharmacopsychiatrique
durant le mois de
février 2007. Une étude rétrospective
a été effectuée par la consultation
dossier par dossier des quarante sept
patients présentant un état de crise
psychologique et hospitalisés durant le
mois de février 2007.
Au total, 3375 patients ont été hospitalisés
dans l’UHCD depuis son
ouverture en juin 2005 jusqu’au mois
de février 2007.
61% de ces patients sont retournés
à leur domicile après leur séjour dans
l’unité.
La Durée Moyenne de Séjour de l’ensemble
des patients est de 1,32 jours.
Evaluation spécifique
de l’activité
psychiatrique de
l’UHCD au cours du
mois de février 2007
Le nombre total de patients hospitalisés
dans l’UHCD et relevant d’une
prise en charge psychiatrique durant
le mois de février 2007 est de 47, ce
qui correspond à 40% des patients
hospitalisés durant cette même période.
59% sont des femmes et 41% des
hommes. L’âge moyen est de 45.3
ans, avec des extrêmes allant de 18 à
93 ans.
Dans 23% des cas, le motif d’admission
est une tentative de suicide, essentiellement
médicamenteuse. 11% des
patients présentent une agitation initiale.
21% sont alcoolisés à leur admission.
2% disent avoir consommé des
drogues. La durée moyenne de séjour
de ces patients est de 1,48 jours, avec
des extrêmes qui vont de une journée
à quatre jours. Le pourcentage de
patients ayant regagné leur domicile
à l’issue du séjour est de 73%.
Le pourcentage de patients hospitalisés
en Unités Psychiatriques ou dans les
Services de Médecine conventionnels,
après passage par l’UHCD, est donc
de 27%. Tous les patients ont bénéficié,
au cours de leur séjour et dans les
premières 24 heures, d’au moins un
entretien psychiatrique. 34% des
patients ont bénéficié d’un deuxième
entretien psychiatrique dans le service.
Deux incidents, à type de fugues sans
conséquence, sont survenus durant le
séjour de ces patients.
Les diagnostics
psychiatriques retenus
selon la CIM 10
Les syndromes dépressifs représentent
30% des cas, dont 36% sont
des syndromes dépressifs majeurs.
Les troubles anxieux représentent
19% des patients, les troubles de la
personnalité représentent 13% des
cas les troubles affectifs bipolaires
représentent 11% des cas, les décompensations
psychotiques avérées
représentent 8,5% des patients, les
alcoolisations aiguës ou chroniques
représentent 17% des patients.
Pour ce qui concerne la
prescription des
psychotropes
Les Benzodiazépines sont prescrites
dans 70% des cas.
L’Alprazolam est prescrit dans 60%
des cas et le Clorazépam dans 26%
des cas.
Le Méprobamate a été prescrit dans
8,5% des cas, essentiellement chez le
sujet âgé.
Les neuroleptiques sont prescrits dans
53% des cas.
La Cyamémazine est prescrite dans
60% des cas et la Loxapine dans 25%
des cas.
Les neuroleptiques atypiques sont
prescrits dans 7% des cas.
Les anti dépresseurs ont été essentiellement
reconduits voire prescrits
dans 30% des cas. Dans 80% des
cas ils sont de la famille des Inhibiteurs
Spécifiques de la Recapture de
la Sérotonine ou des Inhibiteurs de
la Recapture de la Sérotonine et de la
Noradrénaline.
Un Imipraminique, l’Amitriptyline, a
été prescrit une fois pour un épisode
dépressif majeur.
La Miansérine a été prescrite à deux
reprises.
Les normothymiques ont été prescrits
dans 13% des cas, dont 66%
pour le Lithium.
Le Divalproate de sodium a été prescrit
à deux reprises.
Les hypnoptiques ont été prescrits
dans 55% des cas. Il s’agit, dans 46%
des cas, de zolpidem et dans 38 %
des cas de zopiclone.
La Mépronizine a été prescrite dans
11% des cas.
Ces psychotropes ont été prescrits en
association dans 91% des cas.
Dans 15% des cas, aucune prescription
médicamenteuse n’a été proposée.
Il s’agit essentiellement de patients
alcoolisés placés en surveillance dans
le service.
Conclusion
Les Unités d’Hospitalisation de Courte
Durée font désormais partie intégrante
du paysage hospitalier actuel ;
elles représentent des unités incontournables
dans la prise en charge des
patients de plus en plus nombreux
présentant un état de crise psychologique
et reçus par les Services d’Accueil
des Urgences. Ces unités permettent,
dans un premier temps, aux
patients de temporiser ces états de
crise, en leur apportant notamment
un lieu d’écoute adaptée, ce qui
constitue un préliminaire indispensable
à la sédation de l’angoisse.
Les psychotropes utilisés, et notamment
les nouvelles molécules forment
un indispensable arsenal thérapeutique.
Dans notre unité, dans la majorité des
cas, sont prescrits des benzodiazépines,
Manuel de psychiatrie
Masson
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
des hypnotiques ainsi que la Cyamémazine.
Cependant, toutes les classes
pharmacologiques sont représentées,
notamment les anti dépresseurs et les
anti psychotiques de nouvelle génération.
Les entretiens psychothérapeutiques
bien conduits associés à une utilisation
raisonnée de ces psychotropes
permettent donc dans la grande majorité
des situations un retour au calme
rapide, associé à une bonne sédation
de l’angoisse, ce qui favorise un retour
à domicile précoce et dans de bonnes
conditions.
Ce premier contact avec un professionnel
des soins psychologiques
demeure très important car il conditionne
la suite de la prise en charge. ■
Ludovic Sache
Praticien Hospitalier, Responsable de l’Unité
d’Hospitalisation de courte durée des Hôpitaux
du Léman
Bibliographie
(1) Recommandations de la Société Francophone
de Médecine d’Urgence concernant la
mise en place, la gestion, l’utilisation et l’évaluation
des unités d’hospitalisation de courte
durée des services d’urgence, JEUR, 2001,
14, 144-152.
La Psychanalyse face à ses
détracteurs
Vannina Micheli-Rechtman
Aubier, 21 €
Les détracteurs contemporains puisent
dans les dogmes modernes de
la science les arguments de leur
contestation. Pour V. Micheli-Rechtman,
Freud en avait anticipé les principales
tendances. En développant
une généalogie de l’interprétation,
elle resitue les différentes critiques
dans leur contexte historique. La
psychanalyse est alors en débat avec
l’herméneutique (en montrant comment
le freudisme en modifie son
histoire), avec la science (en partant
de la querelle entre les sciences de
la nature et les sciences de l’esprit),
enfin avec la philosophie du langage
(puisque Wittgenstein se présentait
comme un « disciple » de
Freud).

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Napoléon, bien sûr, jalonneront notre
texte, et donneront l’accent de vérité
nécessaire pour appréhender ce qui
fait le particulier, le singulier même, de
Napoléon Bonaparte. L’on évoque souvent
le dictateur, le despote, le tyran,
l’homme assoiffé de puissance, de victoires,
l’extension toujours plus grande
de son pouvoir et des frontières de
son Empire, son mépris pour la vie
humaine, en un mot le versant « froid »
et « mégalomaniaque » de Napoléon.
On ne peut, certes, passer outre ces
traits qui le caractérisent, mais qui le
caractérisent, comme de bien entendu,
en partie. De là à en faire un mégalomaniaque,
au sens psychiatrique du
terme, il n’y aurait qu’un pas, mais un
faux-pas. A cet égard, nous ne pouvons
qu’abonder dans le sens de
T. Lentz qui écrit que « les guerres qu’il
conduisit et, parfois, déclencha, n’avaient
pas pour but de satisfaire on ne sait quel
dérèglement psychologique ou hormonal
» (30)... Nous le verrons, il n’y a
aucun « pathos » du côté de Napoléon,
il n’y a pas de délire de grandeur, au
sens où l’entend la psychiatrie. Napoléon
n’était ni mégalomaniaque, ni psychopathe,
ni fou. Non, Bonaparte a pu
devenir Napoléon, l’Empereur des Français,
qu’en se saisissant avec une intelligence
rare des événements politiques
de l’époque. Il avait, à cet égard, un
point de vue tranché : « ceux qui ne
savent pas se servir des circonstances,
disait-il, sont des niais ». Ce qui l’a
amené à atteindre cette place de
« demi-Dieu » de son vivant, ce n’est
donc certainement pas une quelconque
La part obscure de nousmêmes
Une histoire des pervers
Elisabeth Roudinesco
Bibliothèque Idées
Albin Michel, 18 €
Inutile de débuter la lecture de cet
ouvrage crayon en mains pour en
souligner les passages importants, il
finira entièrement noirci. Le titre est
magnifique et doit tous nous interroger.
Il traite de la perversion en prenant
appui sur l’apport crucial de
Freud quand il estima « la perversion
nécessaire à la civilisation en tant que
part maudite des sociétés et part obscure
de nous-mêmes » ; mettant ainsi
en avant que c’est l’accès à la culture
qui « permet d’arracher l’humanité à
sa propre pulsion d’anéantissement ».
Réactualiser les études sur la perversion
est une nécessité car il s’agit
d’une matière mouvante en permanence.
On se souvient du livre de Marie-Laure
Susini : « L’auteur du crime
pervers » (1). E. Roudinesco revisite
Sade, Sacher Masoch aussi bien sur,
avec des plongeons vers la Grèce Antique
et des explorations vers Foucault.
Elle nous explique que rien ne
peut être compris à notre monde actuel
sans une perspective historique.
Ainsi, on saisit comment, au fil du
temps, on passe de l’enfant masturbateur
à la sexualité dangereuse, à
la femme hystérique, jusqu’à l’homosexuel
- bref tout ce qui n’avait
pas la procréation comme objet. Mais
la politique n’est jamais loin. C’est
ainsi qu’est évoqué Dorian Gray dont
le portrait secret comporte tous les
stigmates de la perversion vécue par
le héros qui conserve face au monde
ses traits de beauté éclatante et d’éternelle
jeunesse. On pourrait ainsi traverser
la littérature wildienne jusqu’à
une réalité la plus effrayante d’un
Adolph Eichmann responsable de l’élimination
de plusieurs millions de juifs,
un être si « affreusement normal » (ni
psychopathe, ni pervers sexuel, ni sadique
... ) qui avait inversé la Loi faisant
du crime une norme, devenant
un véritable génocidaire sans éprouver
la moindre culpabilité. Pire encore
si cela est possible, Höss, commandant
d’Auschwitz entre 1940 et
1943, inventeur de l’efficace gaz d’ex-
Napoléon n’était pas fou
et irrésistible dimension pulsionnelle
ou encore une « folie des grandeurs »
animée par une idéologie que d’aucuns
pourraient lui prêter. Pour en
rendre compte, à travers les événements
de l’époque, nous allons donc
ainsi tenter de nous approcher au plus
près des dits et des actes de l’homme
Napoléon, lesquels devraient pouvoir
mettre en lumière la « normalité » de
celui qui fut et qui reste sans conteste
une des figures les plus fascinantes de
l’histoire de France à bien des égards.
Ecrire encore et toujours sur Napoléon,
donc. Mais après tout pourquoi
pas ? Comme le soulignait H. Monin
au début du XX ème siècle dans La
Grande Encyclopédie : « il est (...) impossible
à personne de porter sur Napoléon
un jugement définitif » (33), et Bainville
dans le même sens : Napoléon « échappe
toujours par quelques lignes des pages
où on essaie de l’enfermer. Il est insaisissable,
non parce qu’il est infini, mais
parce qu’il a varié comme les situations
où le sort le mettait (...). Ainsi chacun
de ses portraits est faux par quelque
endroit » (1).
Contrairement au fou, Napoléon ne
se prenait pas pour Napoléon. En
1946, J. Lacan écrivait à cet égard que :
« Napoléon ne se croyait pas du tout
Napoléon, pour fort bien savoir par quels
moyens Bonaparte avait produit Napoléon,
et comment Napoléon (...) en sou-
termination, le Zyklon B. Dans ses
aveux, à Nuremberg, il inverse la
charge de la preuve : lui est bon père
de famille, aimant sa femme et ses
enfants, bon travailleur qui ne boit
pas ni ne fume pas, habillé modestement
; et s’il a assassiné autant de
juifs, c’est parce que ces derniers aiment
les châtiments et la prison, sont
responsables de la haine qu’ils suscitent
et de la nécessité de leur propre
mise à mort. Il va visiter les chambres
à gaz, contemplant les visages des
victimes « sans crispation » et se sent
rassuré, estimant qu’ils ne souffrent
pas.
On pourrait multiplier les exemples
de cette perversion poussée à l’extrême
par Mengele, qui utilise la science
comme outil de destruction massive
au profit d’une parole d’Etat. C’est
comme cela que chacun a pu répondre,
sans état d’âme, simplement
obéir aux ordres.
Avec le procès de Nuremberg, on
croyait le racisme scientifique disparu.
Avec les études génétiques modernes,
on croyait même la notion de race
mise à mal. On se prend à rêver à
cauchemarder peut-être, quand on
apprend qu’en octobre dernier, James
Watson, prix Nobel, co-découvreur
de la structure ADN, différencie l’intelligence
des noirs et des blancs prenant
à témoin « tous ceux qui ont eu
affaires à des employés noirs ». La mise
entre parenthèse de ces idées, liée à
la période réfractaire d’après guerre
« tend à se dissiper » (Axel Kahn) (2).
E. Roudinesco conclut sur ce que serait
une société perverse qui se dirige
déjà vers la désignation de l’« autre
absolue », rejetée au-delà des frontières
de l’humain (SDF, individu sale,
alcoolique ... ) (3). Un livre passionnant
écrit avec rigueur dont on méditera
la dernière phrase « à supposer... que
nous ne soyons plus capable de nommer
la perversion, cela ne nous évitera
pas d’être confronté avec ses métamorphoses
souterraines : la part obscure
de nous-mêmes ».
F. Caroli
(1) M.L. SUSINI, L’auteur du crime pervers, Fayard
2004.
(2) A. KAHN, Cité par « Le Monde », 31 Octobre
2007
(3) Le Maire d’Argenteuil eut un temps l’idée
d’acquérir un produit répulsif pour chasser les
SDF.
tenait à chaque instant l’existence. S’il
se crut Napoléon, ce fut au moment où
Jupiter eut décidé de le perdre, et sa chute
accomplie, il occupa ses loisirs à mentir à
Las Cases à pages-que-veux-tu, pour
que la postérité crût qu’il s’était cru Napoléon,
condition requise pour la convaincre
elle-même qu’il avait été vraiment Napoléon
» (19). Tout au long de la période du
Consulat (fin 1799 - mai 1804) et de
l’Empire (18 mai 1804- 4 avril 1814,
puis 20 mars au 22 juin 1815), Napoléon
a, en effet, travaillé rudement à
la création de son propre personnage,
de son propre mythe, de sa légende, et
fit tout ce qui était en son pouvoir (et
il était immense) afin que son nom soit
élevé au rang des Alexandre le Grand,
César, Auguste ou autre Charlemagne.
Un objectif simple, donc : rester dans
l’Histoire, ne pas être oublié, que son
nom figure de manière indélébile aux
côtés des plus grands conquérants. Ne
disait-il pas, d’ailleurs : « je ne vis que
dans la postérité » ? Sur l’île de Sainte-
Hélène (son exil dure un peu plus de
cinq ans et demi, du 17 octobre 1815,
à sa mort le 5 mai 1821), Napoléon
n’eut de cesse de vouloir être plus qu’il
ne fut, et ainsi de réécrire (de dicter), de
retraduire, de transformer, d’embellir
son nom et son Histoire. Las Cases
durant les deux premières années, puis
Bertrand, Gourgaud, Antonmarchi
avaient pour tâche de prendre en note
les dictées de Napoléon, auteur de sa
propre histoire, acteur, bien sûr, mais
aussi créateur de sa propre légende.
Le Mémorial de Sainte-Hélène de Las
Cases est, sans doute, un des documents
les plus intéressants pour mieux
cerner l’homme Napoléon, malgré les
réserves qui sont faites parfois à son
égard. Il va sans dire que l’Histoire,
l’épopée napoléonienne, les exploits
rapportés, et l’image de l’Empereur qui
s’en dégage, y sont grandis plus que
de raison, et c’est un point sur lequel
l’ensemble des historiens sont d’accord.
Le document (1600 pages serrées)
reste toutefois incontournable, et, dans
ses « mensonges » mêmes, ou plutôt
dans ses « rectifications » historiques,
dans ses reconstructions, se révèle une
part de vérité qu’il nous faut savoir
déchiffrer.
La puissance et la gloire
« J’aimais plus la puissance
que la gloire » (Napoléon)
A la lecture des multiples Mémoires
contemporains de Napoléon, à la lecture
des innombrables biographies qui
lui furent consacrées, évidemment, la
dimension « hors normes » du personnage,
l’aspect « destin d’exception » et
« ambition démesurée » sautent immédiatement
aux yeux. Et c’est à partir
de certains traits de caractères, à partir
de certains actes, en fonction de certaines
décisions (politiques, militaires,
administratives, etc.) que ses « détracteurs
» ont voulu voir en Napoléon
folie, délire, mégalomanie... H. Monin
soulignait déjà au tout début du XX ème
siècle que « de nos jours, certains physiologistes
n’ont pas craint de le placer
au nombre des ‘’déséquilibrés supérieurs’’
» (33). Et sans doute, il est indéniable
que l’homme Napoléon apparaît
à bien des égards comme une figure
hors normes, hors du commun. En première
approche –et n’est-ce pas là l’idée
que l’on se fait la plupart du temps du
personnage ?- Napoléon est décrit (et il
le fut) comme un homme d’ambitions,
recherchant toujours plus la gloire, les
conquêtes, menant ses hommes, son
Armée Impériale et le peuple avec
autorité, régnant en despote, contrôlant
et censurant la presse, la littérature,
le théâtre, ne supportant pas qu’on
le contredise, que l’on discute ses
ordres, ou alors c’était s’exposer à de
terribles colères… Le goût du commandement,
de la puissance et de la
gloire, Napoléon l’a toujours eu, sans
doute très tôt dans l’enfance semble til.
Mais la célèbre bataille de Lodi (10
mai 1796) marquera un tournant dans
son histoire. Il aura d’ailleurs plus tard
ces mots au sujet de l’impression que
lui fit cette victoire : « je voyais le monde
fuir sous moi comme si j’étais emporté
dans les airs », et, après cette fameuse
campagne d’Italie : « j’ai goûté du commandement
et je ne puis plus y renoncer
». Après l’Italie, puis l’Egypte (où là
encore la propagande par le discours et
par l’image (II) fit admirablement son
travail) Napoléon veut le pouvoir suprême,
absolu. A trente ans, il se sent d’attaque
pour gouverner la France, et l’occasion
–qu’il ne laisse jamais passer- va
lui en offrir la possibilité. Nommé
Consul à vie le 10 mai 1802, puis proclamé
Empereur en 1804 (et roi d’Italie
l’année suivante), son pouvoir, sa
puissance, sa renommée ne cessèrent
de croître dans toute l’Europe. A partir
de Tilsit (rencontre entre le tsar
Alexandre Ier et Napoléon le 25 juin
1807, puis traité signé le 7 juillet, assurant
« paix et amitiés parfaites entre les
deux empereurs ») tout semble possible
à Napoléon. « On a l’impression, écrit J.
Bainville, d’une sorte de vertige, d’un
délire de la puissance, d’un démiurge
insensé qui brasserait sans arrêt le vieux
monde, ôtant ici des rois pour les mettre
ailleurs, donnant aux uns ce qu’il reprend
aux autres, remaniant, agglomérant, divisant,
annexant, et il est impossible de le
suivre dans le détail sans donner au récit
un caractère d’éparpillement et de
papillottement insoutenables pour l’esprit
» (1). Démence, aliénation, folie, délire
de domination et d’orgueil, esprit
obscurci, dérangé, etc. Les qualificatifs
allaient bon train du temps de l’Empire.
Laissons pour l’heure cette question
de côté. T. Lentz résume en fin
de compte en quelques lignes qui en
disent long l’ambition de Bonaparte :
« A vingt-six ans Napoléon Bonaparte
veut le pouvoir, sans hésitation, sans
scrupule. A trente ans, il s’en saisit (…).
Puis il se bat pour le conserver et l’accroître.
A trente-quatre ans, il succède à
Charlemagne » (29). Relevons simplement
qu’en 1802, à la date du 15 août,
on célèbre la naissance de Napoléon (à
partir de 1806 ce jour sera décrété
Fête Nationale). En 1803 – l’année qui
précède le Sacre- le profil de Bonaparte
vient orner les pièces de monnaie ;
en avril 1806 est mis en circulation le
« catéchisme impérial », lequel impose
d’« honorer et servir son empereur », ce
qui signifie « honorer et servir Dieu luimême
». Selon L. Chardigny, « à partir
de 1810, l’imagination de Napoléon
atteint la démesure. Son penchant naturel
au gigantisme frôle la folie des grandeurs
» (4). En 1811-1812, l’Empire
compte 130 départements, s’étendant
de Hambourg à Barcelone, d’Amsterdam
à Rome (800 000 km2 environ).
L’on peut noter déjà ce qui guidait, ce
qui poussait Napoléon à étendre toujours
plus les frontières de son Empire :
« Je n’avais qu’un but, disait-il : tout
réunir, tout concilier, faire oublier toutes
les haines, rapprocher, rassembler tant
d’éléments divergents et en recomposer
un tout : une France, une patrie ». Dictateur,
Bonaparte le fut, sans conteste.
Les spécialistes s’accordent cependant
pour préciser que cette dictature n’est
peut-être pas tout à fait comparable à
celles plus anciennes, ou à celles qui
suivront. L’un de ses meilleurs biographes,
F. Masson, soulignait par
exemple que la dictature de Napoléon
est « d’une espèce nouvelle (…) ; c’est de
la souveraineté nationale qu’elle procède
en droit, et, en fait, c’est l’armée, c’est-àdire
la force, qui l’a établie ; c’est par le
consentement du peuple et par la force
qu’elle se maintient » (31).
PSYCHO BIOGRAPHIE ■ 7
LIVRES
Le Mérite et la République
Essai sur la société des émules
Olivier Ihl
nrf essais, Gallimard, 25 €
Olivier Ihl, professeur à l’Institut d’études
politiques de Grenoble, spécialiste de
sociologie historique, s’est consacré
ces dernières années à l’étude de la
République, de la citoyenneté et de
la construction des espaces de représentation
politique. Ses recherches
actuelles portent sur la formation des
sciences de gouvernement en Europe
depuis la Révolution française. Il a
publié aux Editions Gallimard La fête
républicaine (Collection Bibliothèque
des Histoire, 1996). L’histoire de l’émulation
raconte l’institutionnalisation
d’une technique de gestion des
conduites. Aujourd’hui banalisée et
professionnalisée, elle s’est transformée
en une entreprise de cotation
sociale. A la fois hiérarchisée et fonctionnelle,
cette technique dont l’Etat
se porte garant s’est instituée en
moyen de réglementer les formes de
la grandeur sociale. Que ce soit au
moyen de signes honorifiques ou de
primes en numéraire, elle a donné
naissance à une véritable discipline.
Ce livre retrace les formes variables
que cette dernière a prises selon les
époques ou encore les périls qui lui
ont permis de se constituer comme
un domaine de pratiques et de savoirs.
En faisant du mérite une ingénierie
de gouvernement, les institutions
de la démocratie libérale ont
redéfini l’échelle des valeurs. Elles
n’ont pas abaissé les grandeurs, encore
moins avili les dignités comme
le craignaient leurs détracteurs, effrayés
par la montée de la roture ou
de l’Etat. Elles en ont fait un nouveau
moyen de salut : celui d’une émulation
proclamée gardienne des formes
du paraître.
Contingence et nécessité
des lois de la nature au
XVIII e siècle
La philosophie seconde des
lumières
André Charrak
Vrin, 26 €
Au milieu du XVIII e siècle, les philosophes
se réclamant de Locke et de
Newton interrogent le statut des lois
de la nature et se demandent si elles
pourraient s’avérer aussi nécessaires
que les vérités mathématiques. Ils critiquent
Leibniz sur la nécessité ex hypothesi
des lois et se prononcent sur
leur révision wolffienne : d’une manière
très cohérente, c’est finalement
le concept central de monde possible
qui se trouve écarté. Cette histoire,
essentielle pour approfondir notre
compréhension du problème de la
connaissance à cette époque, se joue
autour de Maupertuis, qui a la Théodicée
sous les yeux lorsqu’il écrit son
Essai de cosmologie ; de l’Académie
de Berlin, dont cet ouvrage étudie
certaines archives inédites ; de d’Alembert
et de Kant enfin, qui en thématisent
les enjeux fondamentaux. Ces
débats éclairent ce qu’il convient de
désigner comme la philosophie seconde
des Lumières. Car l’idée de nature,
jusqu’à la fin du XVIII e siècle, et
du fait même de la recherche d’une
nécessité supérieure dans les phénomènes,
impose de situer la philosophie
naturelle par rapport à la métaphysique
et, parfois, de poursuivre
l’une par l’autre. En témoignent les
longues discussions qui portent sur
la théologie physique, c’est-à-dire sur
le rapport de l’intelligence souveraine
à l’ordre du monde, aux lois qui le
régissent et à ses manifestations empiriques.

8
LIVRES
■ PSYCHO BIOGRAPHIE
Eléments pour une histoire
de la psychiatrie occidentale
Jacques Postel
L’Harmattan, 29 €
Cet ouvrage rassemble une quinzaine
de contributions à l’histoire de la psychiatrie.
Dans une large perspective,
le lecteur y découvre de la Renaissance
à l’époque contemporaine, une
série d’études allant de la mélancolie
décrite par Du Laurens, à la
découverte du Largactil, premier neuroleptique
de la révolution psychopharmacologique.
Mais c’est à l’œuvre
de Pinel, le fondateur de la psychiatrie
moderne, et à ses mythifications
successives, que l’auteur a consacré
le plus de pages ; Esquirol ensuite, le
grand patron de la médecine aliéniste
; Georget et Bayle, ses élèves
directs ; sont évoqués également le
traitement moral et sa décadence, le
magnétisme animal, l’importance
de la découverte freudienne, sans
omettre Kraepelin et son monument
nosographique qui résiste à l’usure
du temps ; la naissance de la première
revue de psychologie médicale,
les rôles respectifs de la pratique
de secteur et des neuroleptiques dans
l’amélioration du sort des malades
mentaux sont d’autres étapes auxquelles
ce parcours invite.
Races, racisme et
antiracisme dans les années
1930
Carole Reynaud Paligot
Presses Universitaires de France,
20 €
L’élaboration scientifique de la notion
de race fut l’œuvre de la communauté
anthropologique. Les années
1930 furent, pour l’anthropologie
raciale, le temps des doutes parce
que l’anthropométrie n’avait pas tenu
toutes ses promesses et parce que sa
pratique, sans pour autant avoir été
abandonnée, n’avait guère permis
d’avancer dans la classification raciale
du genre humain. De nouvelles
perspectives apparurent qui s’appuyèrent
sur les avancées scientifiques
du moment, la sérologie et la
génétique. Aborder l’étude de l’anthropologie
raciale soulève la question
des représentations de l’altérité.
Comment penser la différence fut
une question centrale pour l’anthropologie.
Si les savants français se mobilisèrent
contre les théories « racistes »
de l’anthropologie raciale nazie, ils
continuèrent à concevoir les races de
couleur sous le prisme de l’inégalité.
La question eugéniste ne leur resta
pas étrangère, tandis que, à la fin des
années 1930, certains d’entre eux
dérivaient vers l’antisémitisme.
L’approche psychologique a prolongé
alors la thématique raciale. La psychologie
raciale connut, en effet, un
essor notable tant chez les scientifiques
que chez les littéraires. Les
scientifiques étudièrent la question
de la transmission des caractères psychologiques
des différentes races au
regard des nouvelles perspectives
scientifiques tandis que philosophes,
sociologues, littéraires s’appropriaient
le concept qui devint une véritable
problématique pour aborder l’étude
des sociétés de l’époque, allant même
parfois jusqu’à faire de l’antagonisme
entre les races un moteur des relations
internationales. La psychologie
raciale trouva, également, un terrain
propice au sein du monde colonial
et elle fut censée éclairer les politiques
coloniales tout comme les politiques
de l’immigration. La psychologie ethnique
fut appliquée aux indigènes
des colonies et permit d’identifier les
immigrés désirés et indésirables sur
le territoire métropolitain.
Séminaire d’histoire de la psychiatrie
Coordoné par le Pr J.D. Guelfi et le Dr F. Bing
Sous l’égide du Dr J. Postel
Ce séminaire aura lieu le deuxième mardi de chaque mois à 20h
Plus récemment, J. Tulard, dans son
incontournable Napoléon, donne définitivement
la « couleur » de la dictature
napoléonienne : « l’Empire était avant
tout une dictature de salut public, destinée
à préserver les conquêtes révolutionnaires
(…). Le gouvernement impérial
prit dès 1804 l’allure d’une dictature
personnelle (…). Les ministres furent
réduits au rôle de simples exécutants
(…). La dictature napoléonienne, c’est
au fond le césarisme de la Rome antique,
un compromis entre les nécessités d’un
gouvernement de salut public, en lutte
contre l’Europe, et les susceptibilités héritées
de la Révolution à l’égard du pouvoir
monarchique. Césarisme ? ou plus exactement
Bonapartisme, car le mérite du
vainqueur de Marengo est d’avoir substitué
son nom à celui du vainqueur
d’Alésia (…). Tout repose sur le charisme
personnel de Napoléon : le régime
s’identifie à un individu » (39).
Mais passons sur l’homme politique,
sur l’homme de conquêtes et de
guerres, encore qu’il se défendît bien
d’être qualifié d’« homme de guerre »
car, conquérant et guerrier, il ne le fut
–et il l’a répété maintes fois– que pour
obtenir la paix dans toute l’Europe,
pour obtenir l’unité des peuples, l’alignement
des classes sociales, un code
européen, une même monnaie, les
mêmes lois, etc., et, ne cessait-il de
répéter encore, s’il fut contraint à certaines
guerres, la faute en revenait à
l’Angleterre : « c’est le système de guerre
perpétuelle adopté par l’Angleterre qui
m’y a forcé » ; ou encore : « c’est l’Angleterre
qui m’a poussé, forcé à tout ce
que j’ai fait ». Un idéal de paix (encore
une fois qui n’avait rien de délirant au
sens de la psychose) qui pousse inévitablement
Napoléon à incarner le Père
de l’Europe unie, fédérée et pacifiée,
mais un idéal qui aura fait en quelques
années près de deux millions de
morts (III) : « J’ai voulu l’empire du monde,
et, pour me l’assurer, un pouvoir sans
bornes m’était nécessaire ». Comme le
propose A. Jourdan : « la volonté de
puissance n’exclut pas tout idéalisme, et
peut-être celle-là est-elle justement le fruit
de celui-ci. L’Empereur nourrit des rêves.
Sa vision d’une Europe unie, civilisée,
francisée, pacifiée, qu’est-elle sinon une
utopie ? » (17).
J. Godechot a souligné, avec raison,
que « dans la carrière prodigieuse de
Napoléon, sous ses activités multiples, il
est difficile de retrouver l’homme » (14).
Dans la même veine, G. Gengembre
s’interroge : « peut-on retrouver l’homme
véritable sous les travestissements de la
légende et les habits du mythe ? » (13).
L’image du Napoléon stratège de génie,
conquérant et despote, c’est probablement
celle que la plupart d’entre nous
avons héritée de nos années d’école
ou de nos lectures d’enfance. On peut
Programme 2007-2008
13 novembre 2007 : R. Major, Faut-il brûler Freud ?
11 décembre 2007 : M. Valleur, Histoire des addictions « Le jeu »
8 janvier 2008 : J.F. Braunstein, G. Canguilhem et les normes
12 février 2008 : S. Wasersztrum, Histoire des « psychotropes »
11 mars 2008 : C. Imbert, Histoire de la « folie » avant 1652
8 avril 2008 : J. Carroy, Intrduction à l’histoire de la psychologie
13 mai 2008 : D. Zagury, Introduction à l’histoire de la criminologie
10 juin 2008 : F. Hocini, Naissance de l’adolescence
8 juillet 2008 : M. Plon, L’avenir de la paychanalyse
Renseignements : Dr F. Bing. Tél. : 01 40 13 06 15. Centre Hospitalier Sainte-Anne,
Institut H. Ellenberger, Bibliothèque H. Ey, 1 rue Cabanis, 75674 Paris Cedex 14
éventuellement avoir par ailleurs l’idée
d’un personnage dont le regard fascinait
ceux qui le côtoyaient, d’un homme
à l’esprit toujours vif et prompt, toujours
tout entier à son objet, jamais distrait,
un homme qui avait à l’extrême le
goût de l’ordre, de la hiérarchie, de la
cohésion et de l’organisation, qui prenait
le plus souvent et depuis tout jeune
un ton doctoral, manifestant « une espèce
d’exaltation froide (…). Il est sans
fièvre (…), tantôt majestueux (…), tantôt
brutal (…), tantôt affable et cajolant
(…), tantôt cynique » (1), très lucide sur
la précarité de son pouvoir, ne se laissant
surprendre par rien, contrôlant
constamment ses émotions, indifférent
au danger, croyant en sa bonne étoile,
surveillant tout, voulant tout savoir sur
tout, et tout comprendre, véritable
génie de la stratégie et de la tactique
militaire, offensif et souvent offensant,
misogyne, donnant « le mot d’ordre à
l’univers », pour reprendre l’expression
de Chateaubriand (5). Autant de traits
qui laissent une image de Napoléon
quelque peu froide et sans fissures, sans
failles… Peut-être est-il ainsi utile d’aller
maintenant en marge de l’image
qu’a bien voulu nous laisser l’auteur
de son propre mythe, d’aller à la rencontre
du sujet Napoléon, celui qui se
montre divisé, celui qui donne à voir et
à entendre la position subjective d’un
être aux prises avec ses angoisses, ses
doutes, sa culpabilité, et les divers
« remèdes » qu’il aura tenté de trouver
et de s’appliquer pour pouvoir faire
face sur tous les fronts…
De l’inflation phallique
S’il y a bien, chez Napoléon, un trait
structural qui pourrait le désigner en
propre, ce serait celui de l’omniprésence
de la promotion et de l’inflation
du signifiant phallique, ainsi que la figure
de Maître -et, bien plus, de Pèrequ’il
incarna pendant toute la durée
de son règne. « Tout le problème de l’obsessionnel
[car Napoléon, nous allons le
voir, était sans conteste névrosé, avec
une dimension obsessionnelle évidente],
disait J. Lacan, est de trouver à son désir
la seule chose qui puisse lui donner un
semblant d’appui » (22), et ce qui vient
prendre place ici, et qui fonctionne
comme appui du désir, poursuit-il,
« c’est un objet qui est toujours (…)
réductible au signifiant Phallus » (22). Et
bien, il faut prendre au mot Napoléon
et entendre ici cette vérité : « on dit
que je suis ambitieux, on se trompe : je
ne le suis pas, ou, du moins, mon ambition
est si intimement unie à mon être
qu’elle n’en peut être distinguée ». Effectivement,
nous allons en rendre compte,
le plus intime de son être, d’une
certaine manière, se confond avec son
ambition. Par ailleurs, avec lucidité mais
butant inévitablement sur ce qui cause
cette ambition démesurée, il pouvait
dire à Las Cases : « le vrai est que je
n’ai jamais été maître de mes mouvements,
et que je n’ai jamais été réellement
tout à fait moi (…). Je n’ai jamais
été véritablement mon maître, mais j’ai
toujours été gouverné par les circonstances
(…). Je n’étais point le maître de
mes actes parce que je n’avais pas la
folie de vouloir tordre les événements à
mon système, mais au contraire, je pliais
mon système sur la contexture imprévue
des événements (…) », et, du temps
de sa gloire : « une puissance supérieure
me pousse à un but que j’ignore ; tant
qu’il ne sera pas atteint, je serai invulnérable,
inébranlable ; dès que je ne lui
serai plus nécessaire, une mouche suffira
pour me renverser ». Très tôt, du
reste, Napoléon pressentait que ce qui
le guidait ainsi lui serait un jour fatal :
« j’avais en moi l’instinct d’une issue malheureuse
(…), j’en portais le sentiment
au-dedans de moi ». Pas de certitude
inébranlable, donc, quant à son destin,
mais des croyances (en sa bonne étoile),
et puis des doutes, une fragilité -
qui l’avaient d’ailleurs dans son adolescence
menés sur les versant de la
dépression et d’idées de suicide (IV)- qui
auront finalement raison d’un Empereur
et d’un Empire aux pieds d’argile.
Tout ceci, donc, pour dire quoi ? Pour
dire que l’ascension fulgurante, le pouvoir,
puis la chute de Napoléon illustrent,
parfaitement, la logique subjective
parcourue par un certain nombre
de sujets névrosés obsessionnels. Au
fond de l’expérience du sujet obsessionnel
- dont une des caractéristiques
est, sans nul doute, ce que l’on peut
appeler avec Lacan le « mirage de narcissisme
frénétique »- il y a toujours une
« certaine crainte de se dégonfler, en rapport
avec l’inflation phallique » (23). Monter
très haut, descendre très bas, ce trajet
n’est pas rare chez l’obsessionnel.
D. Jamet résume ainsi la vie de Napoléon
: « Si bas, si haut, si bas (…). Surgi
du néant, monté au zénith, précipité, tel
un ange déchu, du trône le plus élevé
dans l’abîme. Raccourci fulgurant d’une
trajectoire unique dans le ciel de l’Histoire
» (16). Dans le fond, partout en
Europe, Napoléon a planté ses drapeaux.
Il ne s’est pas cru maître du
monde, il l’était (mais, pour lui, nous le
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
verrons, toujours en-deçà d’un
Alexandre le Grand, d’un César, d’un
Charlemagne). Partout le sceau phallique
de sa puissance, de sa gloire, de sa
supériorité…Comme le fait valoir
Dominique Miller, le sujet obsessionnel
(c’est vrai pour certains chefs d’entreprise,
certains hommes politiques ou
militaires, etc.) « surinvestit le champ
imaginaire, où il plante le phallus, seul
soutien possible du désir ». Et le phallus,
l’obsessionnel « le veut visible dans son
symptôme, érigé, tout droit sur l’horizon
» (32). S’étendre toujours davantage,
accumuler les conquêtes et les territoires,
ériger des monuments pour fixer
définitivement la grandeur de l’Empereur
(les arcs de triomphe et la colonne
Vendôme par exemple (V)), et, surtout,
laisser son nom, on l’a vu, aux
côtés des plus grands de l’Histoire. Pour
ce faire, pas d’autre choix, pour Napoléon,
que de mettre sous sa coupe les
puissants de ce monde. Très tôt capté,
captivé par les César, Auguste, Charlemagne,
lesquels revêtaient bien évidemment
tous les insignes phalliques
de puissance, de pouvoir, de gloire et
de prestance, Napoléon lui-même s’est
forgé cette « cuirasse phallique » véritable
rempart à la menace de castration
propre au sujet névrosé (VI). A de
nombreuses reprises Napoléon s’est
identifié, principalement à César ou à
Charlemagn (VII). Il allait même jusqu’à
dire (sans y croire, au sens d’un délire
(VIII)) que : « Charlemagne, c’est moi ».
Et avant même ces grandes figures historiques,
c’est au héros corse Pascal
Paoli que le tout jeune Bonaparte s’était
identifié. Il faut y voir ici avec Lacan
un des traits marquants et toujours
repérable chez l’obsessionnel à un
moment ou à un autre : « chez tout
obsessionnel (…) vous voyez toujours
apparaître à un moment de leur histoire
le rôle essentiel de l’identification à l’autre
(…) qui, dans tous les cas, a pour lui le
prestige d’être plus viril, d’avoir la puissance.
Le Phallus apparaît ici sous sa
forme non pas symbolique, mais imaginaire.
Disons que le sujet se complémente
d’une image plus forte que luimême,
une image de puissance » (22).
Vaincre les grands de ce monde, c’était
dans le fond pour Napoléon aller audelà
de l’identification imaginaire, c’était
dégrader, destituer l’Autre, c’était faire
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N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
« déchoir le grand Autre de sa position,
pour le rabattre à une place de semblable,
de petit autre. Il tente ainsi de
défaire l’Autre de ses qualités de puissance
et de maîtrise, et s’assure, par làmême,
les siennes propres » (32). Chateaubriand,
dans sa Vie de Napoléon,
l’avait fort bien perçu en son temps :
Napoléon, écrivait-il, « croyait paraître
d’autant plus grand qu’il abaissait les
autres ». Louis Chardigny enfin, plus
récemment, faisait ce même constat
que Napoléon « ne prit jamais la peine
de rehausser un peu les mérites de ses
ennemis pour se donner un peu plus de
mérite à lui de les avoir vaincus » (4). Ce
que l’on désigne, aujourd’hui, sous le
terme de phallicisme de l’obsessionnel
renvoie à cette position subjective qui
fait valoir, en permanence, le « souci »
du sujet à veiller à ce que le phallus
–avec la dimension de virilité et de
puissance qui l’accompagne- soit partout
présent (la dimension du viril était
à cet égard omniprésente chez Napoléon,
et il disait que son nom même
était doué d’une vertu virile (IX)). Une
des questions que se pose l’obsessionnel
est de savoir comment être homme
sans risquer de perdre le phallus. La
misogynie connue de Napoléon est
une façon de répondre à cette crainte.
On peut, tout à fait, envisager que pour
un sujet tel que Napoléon, rien ne
venait jamais inscrire de façon adéquate
et pleinement satisfaisante sa
propre masculinité, sa propre virilité.
L’obsessionnel trouve nombre de
moyens pour mettre sur pieds l’entreprise
phallique à laquelle il se voue
inconsciemment, et le sujet lui-même
en est souvent le représentant. On le
note de diverses manières dans la
« fabrique » de son corps ou de son
image et dans l’importance accordée
à sa propre image (on a souvent fait
état de la propreté méticuleuse et du
soin minutieux de Napoléon pour sa
toilette, et, sur cette question de l’image,
il pouvait dire notamment : « on
devient l’homme de son uniforme » (X)) ;
dans sa pensée sans cesse en mouvement,
dans ses projets continuels, bref,
dans ses capacités infinies de travail,
que nous allons voir dans la suite de
notre texte. Autant dire que Napoléon,
comme tout névrosé obsessionnel, s’est
construit sa propre forteresse –ou sa
propre « muraille réconfortante », son
propre « quadrage sécurisant », selon
les termes de L. Israël (15)- et a jeté ici et
là des ancres (XI) pour consolider, toujours
davantage, son système défensif.
Dans un chapitre consacré à la névrose
obsessionnelle, Henri Ey écrivait fort
bien en ce sens que « dans toute son
attitude, le sujet paraît vouloir interposer
une armure entre le monde extérieur
et sa personne » (7). La structure de la
névrose obsessionnelle prête ainsi merveilleusement
à la métaphore militaire.
Lacan l’évoquait notamment en termes
de « fortifications à la Vauban » (20), ce
qui convient plutôt bien au personnage
de Napoléon. D’autres termes viennent
également aisément : l’armure ou
la carapace défensives, les « stratégies »,
les « manœuvres » (pour notamment
ravaler l’Autre au rang d’objet déprécié),
les exploits, ou les « ruses » de l’obsessionnel
(XII), etc. Tout ce que l’obsessionnel
met en place, finalement, a
pour visée une certaine reconnaissance
de l’Autre, et l’Autre qui est important
pour l’obsessionnel, selon Lacan, « c’est
l’Autre devant qui tout cela se passe.
C’est (…) le lieu où s’enregistre l’exploit,
où s’inscrit son histoire. Ce que l’obsessionnel
veut avant tout maintenir (…)
c’est cet Autre où les choses s’articulent
en termes de signifiant » (22), et l’on sait
à quel point, des premières campagnes
d’Italie jusqu’à son exil final, Napoléon
a maintenu fermement cet Autre où
il a effectivement enregistré son Histoire
et ses exploits en termes de signifiants,
dans les Bulletins de la Grande
Armée, dans les tableaux et gravures
qui le représentent en héros, dans ses
ultimes Mémoires à Ste Hélène, dans
son soucis constant de la reconnaissance
populaire... Ce désir insatiable
de reconnaissance de l’Autre pousse
le sujet à en faire toujours plus, à aller
toujours plus loin, toujours plus haut
(on peut dire, dans ce sens, que Napoléon
n’a considéré son règne comme
assuré et sa dynastie comme définitivement
fondée que lorsque le pape
Pie VII – quelle figure de l’Autre !accepte
de venir le sacrer Empereur
des français). Lacan a insisté, à plusieurs
reprises, sur ce « côté performance » (22),
sur les « travaux forcés » ou autres
conduites coercitives inhérents à la position
obsessionnelle : ces sujets « s’infli-
gent toutes sortes de tâches particulièrement
dures, éprouvantes (…) ; chez l’obsessionnel
le travail est puissant » (22).
Nous allons le voir, Napoléon en effet
se vouait corps et âme au travail, et
c’est avec raison que L. Chardigny le
définit comme « bagnard de le réflexion,
de l’imagination, de la décision, de l’autorité
» (4) (XIII). A cet égard d’ailleurs,
l’auteur rappelle que Napoléon se définissait
lui-même comme « le plus esclave
de tous les hommes, obligé d’obéir à
un maître qui n’a point de cœur : le calcul
des événements et la nature des
choses ». Manquant toujours de temps,
et ne connaissant pas de limites dans le
travail, dans les exploits ou dans les
conquêtes, Napoléon, au bout du
compte, ne pouvait que se confronter
à de l’insatisfaction, toujours, et à un
sentiment d’infériorité, ce qui n’est pas
à première vue l’idée que l’on se fait de
l’Empereur.
Du travail et du temps
Le travail, donc. Napoléon était un
bourreau de travail. Il disait lui-même :
« le travail est mon élément (…). J’ai
connu les limites de mes jambes ; j’ai
connu les limites de mes yeux ; je n’ai
jamais pu connaître celles de mon travail
». Et encore : « si je reste longtemps
sans rien faire, je suis perdu » (XIV). L’historien
H. Calvet nous donne une idée
juste des rapports de Napoléon au travail
: « la possibilité exceptionnelle de
fournir un travail constant, sans repos,
prolongé par une méditation de tous les
instants. Napoléon pourra rester à son
bureau jusqu’à dix-huit heures par jour,
se relever la nuit, et, seul, étudier et critiquer
les rapports les plus rebutants ; il
pourra varier à son gré l’heure de son
sommeil, l’abréger au-delà des limites du
vraisemblable (…). Il contrôlera jusqu’aux
plus petits détails de son administration
(…). Tout est classé méthodiquement
dans ses papiers » (3). Et tout est
« classé » pareillement dans son esprit.
Napoléon le disait ainsi : « les divers
objets et les diverses affaires sont casés
dans ma tête comme dans une armoire.
Quand je veux interrompre une affaire,
je ferme son tiroir, et j’ouvre celui d’une
autre. Elles ne se mêlent point l’une avec
l’autre et jamais ne me gênent ni me
fatiguent ». Lorsque Napoléon, Premier
Consul, présidait les séances du Conseil
d’Etat, celles-ci pouvaient durer (ce
n’était pas rare) plus de sept heures,
avec une courte pause ; parfois les
séances se déroulaient la nuit et
duraient de vingt-deux heures à cinq
heures du matin… Napoléon était
doué d’une mémoire prodigieuse qui a
souvent fait l’admiration de ceux qui
le croisaient (XV), il est constamment
décrit comme étant, sans cesse, en
mouvement, comme étant un
« monstre d’activité », comme un esprit
en perpétuelle agitation d’idées, toujours
pressé d’en savoir plus, d’en faire
plus (« je suis né et construit pour le travail
»), rien ne doit lui échapper, et rien
ne doit venir entraver la bonne marche
de son travail et de ses projets. C’est
ainsi que Napoléon souhaitait que quel
que soit l’endroit où il se trouvait pour
travailler (il avait le changement en horreur),
les pièces et les affaires devaient
être exactement disposées dans le
même ordre qu’aux Tuileries. « Cet
homme de guerre, écrivait G. Lefebvre,
ne sera jamais plus heureux que dans
le silence de son cabinet, au milieu de
ses fiches et de ses dossiers » (28). Tout est
organisé et ritualisé dans la vie de
Napoléon, et le travail, bien sûr,
n’échappe pas à la règle. H. Ey écrit
parfaitement ce qui pourrait s’appliquer,
sans retenue, à Napoléon, à savoir
que « le travail, les distractions, deviennent
des conduites rigides, de tyranniques
règlements auxquels l’obsédé se soumet
avec une sorte de joie de n’être pas libre,
d’être l’esclave de son implacable machinerie
intérieure » (7). Ordré, organisé à
l’extrême pour lui-même, il le fut également
pour la Nation, et pour l’Europe.
Dans un chapitre portant, fort justement,
le titre de L’empereur de l’ordre,
T. Lentz écrit ainsi que « Napoléon
voyait dans le pouvoir personnel la condition
sine qua non d’un retour à l’ordre
(…). Toute l’organisation de l’Etat napoléonien
fut conçue selon un schéma pyramidal
avec, à son sommet, le Premier
Consul puis l’Empereur. Ce schéma
s’animait autour des principes d’autorité
et de hiérarchie. Il s’agissait ici de l’application
au civil (…) d’un modèle militaire,
recherchant la rigueur et l’efficacité
(…). Ce souci d’organisation dans
l’ordre et sous l’autorité du gouvernement
fut sensible dans tous les
domaines » (30).
Sans cesse occupé (il travaille constamment,
le jour, la nuit, au théâtre, en
mangeant, etc.), Napoléon, pour
reprendre les termes de C. Soler au
sujet de l’obsessionnel, « s’assure qu’il
n’y a pas de place pour le vide » (37), et,
à cet égard, le temps lui manque continuellement.
« Toujours pressé, dévorant
ses lendemains », écrivait Bainville dans
son Napoléon. « Demandez-moi tout ce
que vous voudrez, disait Napoléon, hormis
du temps ; c’est la seule chose hors de
mon pouvoir ». Ce manque de temps à
la fois le faisait avancer (« le temps,
disait-il, est le grand art de l’homme
Entretiens psychanalytiques
en milieu psychiatrique
2007-2008
par des analystes de la Société Psychanalytique de Paris
Le troisième mardi de chaque mois de 11h à 12h30
Programme 2007-2008
Mardi 16 octobre Paul Denis
Mardi 20 novembre Jean-Luc Donnet
Mardi 18 décembre Gérard Lucas
Mardi 22 janvier Michel Ody
Mardi 19 février Marilia Aisenstein
Mardi 18 mars Bernard Brusset
Mardi 20 mai Robert Asseo
Mardi 17 juin Gérard Bayle
Centre Hospitalier Sainte-Anne
Service du Dr Vacheron, Pavillon Piera Aulagnier - Salle Polyvalente
Renseignements : Dr Ch. Baldacci, Secrétariat du Dr Vacheron - 01 45 65 83 09
J.L. Baldacci, Centre de consultations et de traitements psychanalytiques - 01 43 29 31 40
PSYCHO BIOGRAPHIE ■ 9
LIVRES ET REVUES
Le discours et le symbole
Edmond Ortigues
Nouvelle édition
Précédé de
Edmond Ortigues et le
tournant linguistique
Vincent Descombes
Suivi de
Entretien avec Edmond
Ortigues
Pierre Le Quellec-Wolff
Beauchesne, 29 €
L’œuvre d’Edmond Ortigues (1917-
2005) aborde les domaines de la théologie,
de l’histoire, de la philosophie,
de l’épistémologie, de l’anthropologie,
de la logique, de la linguistique
et de la psychanalyse. Il a notamment
publié Œdipe africain (1966),
Religions du livre, religions de la Coutume
(1981), Le Monothéisme (1999),
Sur la philosophie et la religion, les entretiens
de Courances (2003), et La Révélation
et le Droit (2007).
Depuis sa parution en 1962, Le Discours
et le Symbole a été considéré
comme une référence pour tout ce
qui se rapporte à la philosophie de
l’analyse structurale ce qui fait dire à
V. Descombes : « Quant à la philosophie
du structuralisme, ce n’est pas Foucault
qui l’a donnée dans Les Mots et
les Choses, mais Edmond Ortigues dans
Le Discours et le Symbole ». Le livre se
présente comme une « revue générale
des formes à travers lesquelles
nous nous cherchons nous-mêmes ».
L’examen patient des rapports entre
la forme et le sens donne lieu à une
méditation sur les concepts d’expression,
de signal, de signe, de symbole,
de langue et de discours.
L’ouvrage est ici proposé dans une
nouvelle édition, corrigée et augmentée.
La préface de Vincent Descombes
montre comment il offre le
moyen de surmonter la philosophie
de la conscience, sur les trois versions
du « tournant linguistique ». Un entretien
inédit avec Pierre Le Quellec-
Wolff, réalisé quelques semaines avant
le décès du philosophe, témoigne du
regard porté par Edmond Ortigues
sur son livre, plus de quarante ans
après sa première publication.
Représentations sociales et
interventions en santé
publique
Santé Publique 2007 n°5
Revue de la Société Française de
Santé Publique, 28 €
Certains articles de ce numéro portent
sur les représentations sociales
de différents acteurs tandis que
d’autres articles y font référence,
abordant les facteurs explicatifs des
comportements ou des habitudes
en matière de santé. M. Lenoir et D.
Berger explorent les représentations
du bien-être de l’élève adolescent selon
une équipe éducative ; D. Berger
et P. Courty proposent de cerner les
représentations développées par des
enseignants, infirmiers et travailleurs
sociaux en formation sur le cannabis
et l’impact sur leur futur rôle d’éducateurs
sanitaires ; D. Houéto et al.
s’intéressent aux représentations de
la fièvre de l’enfant pour mieux comprendre
le recours, ou non, aux soins
par les parents.
Ces articles présentent une diversité
tant au niveau des pratiques que des
analyses des représentations sociales
en santé publique. Il s’agit de deux
types de connaissances en interaction
dans la définition et le type d’interventions
auprès de clientèles cibles.

10
■ PSYCHO BIOGRAPHIE
LIVRES ET REVUES
La gloire de Bergson
Essai sur le magistère
philosophique
François Azouvi
nrf essais, Gallimard, 22,50 €
Les contemporains de Bergson se
sont jetés à corps perdu sur sa philosophie
qui, valorisant l’intuition et
critiquant l’intelligence, leur a rendu
le monde moins opaque en lui donnant
un sens, une direction à son évolution.
Si les partisans de la démocratie
parlementaire, particulièrement
ceux de gauche, se réclamaient
de Descartes, la droite nationaliste,
conservatrice, volontiers adversaire
du système parlementaire mais également
la gauche antiparlementaire,
révolutionnaire ou anarchisante manifestèrent
leur ferveur pour un bergsonisme
exaltant l’élan vital.
Dans l’histoire du magistère philosophique,
l’épisode bergsonien marque
le moment où la valeur philosophie
peut prendre toute son importance.
La raison en est évidente : c’est lorsque
la France s’installe durablement dans
le gouvernement de tous par tous
que l’opinion peut jouer pleinement
son rôle et les débats intellectuels envahir
la scène publique.
Ce qui rend possible l’affaire Dreyfus
comme affaire nationale est aussi ce
qui rend possible le bergsonisme
comme phénomène global. Pour la
première fois, des questions philosophiques
sont portées devant tous.
Elles le demeureront : Bergson a disparu
; mais le surinvestissement des
thèmes philosophiques par les Français,
la conviction que le plus haut
magistère est celui des philosophes
n’ont pas cessé tout au long du XX e
siècle : conseillers du Prince, ministres
ou adversaires organiques du pouvoir,
les philosophes ont joué ces
rôles, avec des bonheurs inégaux
mais en étant investis d’une magistrature
extraordinaire, sans rapport
avec leur poids dans l’Université. Il
ne semble pas que le nouveau siècle
tranche en cela sur le précédent.
Un million d’emplois non
médicaux dans les
établissements de santé en
2005
Arnaud Fizzala
Etudes et résultats 2007 n°605
Drees
En 2005, le personnel non médical
dans les établissements de santé représentait
1 030 000 emplois, ce qui
correspondait à 950 000 équivalents
temps plein (ETP). Les trois quarts des
ETP non médicaux sont situés dans
des hôpitaux publics, 12% dans les
établissements privés à but non lucratif
et autant dans les cliniques privées.
Avec sept ETP sur dix, le personnel
soignant, composé d’infirmiers, aidessoignants,
agents de services hospitaliers,
rééducateurs et psychologues,
constitue l’essentiel des effectifs de
l’hôpital. Le reste du personnel correspond
aux emplois administratifs
(12,4% des ETP), techniques et ouvriers
(11,5% des ETP), médico-techniques
(4,6% des ETP) et éducatifs ou
sociaux (1,4% des ETP).
Entre 1997 et 2005, le nombre
d’ETP non médicaux a augmenté
de 100 000, hausse portant sur le
personnel soignant et due, principalement,
à la mise en place de la réduction
du temps de travail. Le temps
partiel concerne plus d’un emploi sur
cinq et particulièrement le personnel
des établissements privés.
www.sante.gouv.fr/drees/index.htm
Pour toute information : drees-infos@sante.gouv.fr
(...) ; c’est par cette seule considération
que j’ai réussi dans tout ce que j’ai
fait »), mais il devait le plus possible
tenter de le maîtriser, sous peine d’être
confronté de façon douloureuse à la
perte (« du temps ? j’en ai trop perdu »,
et le temps même consacré à l’amour
était pour Napoléon une perte de
temps (XVI), tout comme le théâtre d’où
il ressortait le plus souvent après le premier
acte) : comme l’écrit encore J.
Bainville, plus d’une fois, « le temps, qui
lui a toujours été mesuré, l’étrangle » (1).
Napoléon est un homme pressé (XVII).
Alors, pour lutter contre le temps qui
passe, et qui, dans la problématique
obsessionnelle, renvoie toujours à la
mort qui est en toile de fond (XVIII) (« la
mort qu’il s’agit de tromper par mille
ruses », disait Lacan (21)), Napoléon se
doit donc, ce temps, de le « quadriller »
: comme le relevait le baron Fain :
Napoléon « aimait la règle (...). Toutes
les heures de sa journée avaient une destination,
les jours de la semaine avaient
aussi la leur » (8) ; Napoléon disait
même ceci : « j’ai l’habitude de prévoir
trois ou quatre mois d’avance ce que je
dois faire », et, de temps, il en avait si
peu, qu’il déclara brusquement un jour
à Talleyrand qu’il n’avait « pas le temps
de s’amuser à sentir et à regretter comme
les autres hommes »…
Du père et de la
culpabilité
PRIX MICHEL SAPIR 2008
sous l’égide de la Fondation de France
RELATION SOIGNANT-SOIGNÉ
Ce prix de 5 000 euros
est destiné à l’auteur du meilleur travail inédit sur :
Les incidences inconscientes dans la relation
soignant soigné et leur effet sur le soin
Les manuscrits seront soumis au jury du prix présidé par
le Professeur Jean Jacques Kress
et composé de :
Madame le Docteur Simone COHEN-LÉON, Docteur Guy EVEN,
Professeur Jean GUYOTAT, Docteur Simon Daniel KIPMAN,
Docteur Daniel OPPENHEIM, Madame Marie Odile SUPLIGEAU
et Docteur Arthur TRENKEL
Les manuscrits en langue française (de 30 à 100 pages) sur un travail clinique
et ses soubassements théoriques, doivent être adressés en 6 exemplaires
dactylographiés
avant le 30 juin 2008
à Madame le Docteur Cohen-Léon (AREFFS)
11 square de Clignancourt - 75018 Paris
e-mail : s.cohenleon@free.fr
Le Prix sera décerné en décembre 2008
A l’arrière-plan de la problématique
obsessionnelle, la mort pointe le bout
de son nez.
A notre sens, il semble tout à fait pertinent
de formuler l’hypothèse qui voudrait
que la névrose de Napoléon se
soit déclenchée à la mort de son père :
« pour peu que le sujet obsessionnel rencontre
la mort de près, écrit C. Le Boulengé,
par exemple dans celle du père
qui le met en première ligne pour le tour
suivant, nous trouvons la conjoncture
classique de déclenchement, de précipitation
dans un désir aveugle – se découvrant
brusquement mortel, il se trouve
devant l’impératif ‘’hâte-toi de jouir de
la vie’’ » (27). Cette hypothèse que peut
faire aisément le psychanalyste rencontre
la vérité historique sous la précieuse
plume de J. Godechot : « un
événement va lui permettre de manifester
ses aspirations à l’autorité : la mort de
son père » (14). Napoléon ne déclare pas
là d’« obsessions » au sens où on l’entend
habituellement dans la phénoménologie
de la névrose obsessionnelle,
mais il est indéniable qu’à partir
du décès du père, Napoléon prit en
mains les rennes de son destin, et
construisit rigoureusement, d’une certaine
façon, la logique de sa névrose. Le
père, la mort, le temps. Un triptyque
qui s’impose dans toute structure obsessionnelle
(XIX).
Le père de Napoléon, Charles (Carlo-
Maria Buonaparte) meurt le 24 février
1785, à l’âge de trente-neuf ans à
peine. Napoléon n’a pas encore seize
ans. Au moment du décès, Charles est
« accablé de soucis et de dettes » (XX).
Napoléon apprend sa mort au mois
de mars. « A présent, écrit F. Paoli, sa
famille serait son premier souci, après
ses études dans lesquelles il se plongea
avec frénésie pour tenter de soulager sa
douleur. Il n’avait pas d’autre option que
de donner l’exemple, se sentant confusément
appelé à devenir le chef de la
famille (…) et à poursuivre les entreprises
de son père » (34). Son père avait
mis tous ses espoirs en Napoléon, qui
avait très tôt –dès la toute petite enfance-
fait preuve de beaucoup d’énergie,
de vivacité, d’intelligence et d’autorité.
Pour Charles, et donc pour toute la
famille, c’est Napoléon qui devait être
promu chef de famille. A la mort du
père, Napoléon reste impassible, et
refuse d’aller s’isoler à l’infirmerie de
l’école militaire de Paris : « J’ai assez de
force d’âme pour supporter cette peine
sans qu’on prît soin de me consoler ».
Sans vouloir faire l’analyse du complexe
familial de la famille de Napoléon,
il faut toutefois souligner deux
points bien connus des historiens : Letizia,
sa mère (née Ramolino), aux dires
de Napoléon, « supportait tout, bravait
tout ; c’était une tête d’homme sur un
corps de femme ». Letizia alliait « une
autorité redoutable à une tendresse et
une activité incessantes » (34). L’autorité,
en effet, il est tout à fait clair que
c’est elle qui l’incarnait à la maison :
« Letizia, écrit T. Lentz, menait la Casa
Buonaparte d’une main ferme en lieu et
place d’un mari absent » (30). Alors, sans
doute Napoléon eut-il une mère décrite
comme virile, qui faisait l’autorité à
la maison, sans doute eut-il un père
endetté et, aux yeux de Napoléon, certainement
chéri, mais revêtant toutefois
les habits d’un père quelque peu
inconsistant, faible, soumis, cachant mal
son sentiment d’infériorité. A vrai dire,
deux éléments peuvent retenir ici notre
attention pour illustrer les rapports de
Napoléon à son père. Tout d’abord (il
s’agit d’un détail, certes, mais tellement
évocateur du regard de l’enfant névrosé
sur son père jamais assez admirable
ou suffisamment héros à ses yeux) :
lors d’une visite de Charles à Napo-
léon, à Brienne, en juin 1784 (Napoléon
a quinze ans), ce dernier est affecté
du trop de politesse de son père,
« faisant assaut de courtoisie avec le
moine, se disputant à qui passerait le
premier aux portes », comme il le rapportera
bien plus tard. De la bassesse,
de la platitude, voilà comment le jeune
Napoléon interpréta la scène. Et puis,
par ailleurs, d’une façon certainement
très ancrée, l’idée que Charles -qui
s’était battu contre les français le 8 mai
1769 à Ponte Novo aux côtés de son
héros Paoli pour la liberté de la Corse
(Napoléon allait naître trois mois plus
tard)- avait dû en ce temps collaborer
avec les français, se soumettre (c’était
soit l’exil, soit la soumission), et, à cet
égard, nous partageons le point de vue
de F. Paoli qui écrit : « il n’est pas impossible
que se soit développé, dans l’inconscient
de cet enfant hypersensible,
comme un désir de revanche par rapport
aux malheurs de la défaite
qu’avaient connus ses parents (…) ou
au sort qui était fait, sous ses yeux, à la
grande majorité de ses compatriotes » (34).
Sans la mort –survenue tôt– du père de
Napoléon, ce dernier n’eût sans doute
pas été l’Empereur Napoléon. Il est
indéniable, en effet, que la mort du
père était nécessaire –mais il y fallait
en plus les circonstances politiques– à
l’envol du futur Aigle Napoléon. Ainsi
que l’écrivait P. Bartel dans La jeunesse
inédite de Napoléon, la mort de ce père
« complaisant des vainqueurs, allant des
salons du gouverneur aux antichambres
de Versailles » sera pour Napoléon une
sorte de délivrance, car il pourra maintenant
–alors qu’il n’a que seize ans !- se
montrer, en opposition à son père,
radicalement, excessivement patriote
corse. Du reste, bien plus tard, à Ste
Hélène, Napoléon dit ceci - qui résonne
pour nous d’une façon particulière
à l’entendre dans la problématique typiquement
névrotique de l’homme dans
son rapport au père-, que rien de tout
cela (le Consulat, l’Empire, son destin si
fabuleux) n’aurait pu arriver si son père
n’avait pas disparu avant la Révolution.
Il va de soi que ce « soulagement » -
inconscient- ne va pas sans un sentiment
de culpabilité. Il peut, bien entendu,
y avoir différents niveaux de lecture
du moment du sacre de Napoléon.
Pour ce qui retient notre intérêt ici,
nous suivrons cette lecture qu’en fait
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Freud, et qui précisément met en relief
ce sentiment de culpabilité névrotique.
Au moment du couronnement de
Napoléon, donc, celui-ci prononce à
son frère Joseph ces mots célèbres :
« Joseph, si notre père nous voyait ! ».
Dans sa célèbre lettre à Romain Rolland,
Un trouble de mémoire sur l’Acropole,
après avoir évoqué cet épisode,
Freud écrit ainsi : « il faut admettre qu’un
sentiment de culpabilité reste attaché à la
satisfaction d’avoir si bien fait son chemin
: il y a là depuis toujours quelque
chose d’injuste et d’interdit. Cela s’explique
par la critique de l’enfant à l’endroit
de son père, par le mépris qui a
remplacé l’ancienne surestimation infantile
de sa personne. Tout se passe comme
si le principal, dans le succès, était d’aller
plus loin que le père, et comme s’il était
toujours interdit que le père fût surpassé
» (11). Corrélativement, pour Freud, le
sentiment d’infériorité n’est pas éloigné
de ce sentiment de culpabilité
d’avoir fait mieux que le père (XXI).
Du doute et de la chute
« Mon étoile m’ordonne de courir
aux extrêmes »
« Rien de plus difficile que de se
décider » (Napoléon)
Nous passerons sur un certain nombre
de points et de traits qui appuient la
thèse d’une structure obsessionnelle de
l’Empereur : nous pensons entre autres,
et en vrac, au soin extrême qu’il mettait
dans sa toilette et dans sa vêture, dans
son soucis de la propreté, de l’ordre,
de l’organisation, dans sa manie d’aller
toujours dans le détail des choses,
dans sa manie de compter (« un des
neveux de l’Empereur racontait que,
chaque jour, Napoléon recevait et portait
sur lui, écrit sur un très étroit morceau de
papier, l’état de ce qu’il appelait la fortune
de la France et aussi l’état de sa fortune…Il
avait ce papier dans sa poche et le
consultait plusieurs fois dans la journée
» (31)) (XXII), dans sa fuite devant les
femmes qui lui manifestaient trop leur
désir (« en amour, disait-il, la seule victoire
c’est la fuite »), dans ce que Lacan
relevait du « goût d’ubiquité de l’obsessionnel
», à savoir à être dans plusieurs
endroits à la fois (24) (XXIII), notion
typique de l’obsessionnel qui veut se
soutenir comme étant partout, indis-

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
pensable, sur tous les fronts. C’est, toutefois,
dans les éléments vus plus haut
(rapport à la puissance, à la gloire, au
signifiant phallique, à l’Autre, au temps,
au travail, au père, etc.), dans le discours
de Napoléon –qui jalonne notre
texte- ainsi que dans le parcours logique
de sa vie, que nous voyons le mieux se
dessiner chez Napoléon ce qu’il n’est
pas exagéré de nommer son « armature
névrotique ».
C’est donc, maintenant, sur la fin de
ce parcours que nous allons clore
notre étude. Et, notamment, sur les
doutes, sur les incertitudes des derniers
temps, qui le menèrent jusqu’à la
chute que l’on connaît. On l’a vu, la
grenouille, à vouloir se faire aussi grosse
que le bœuf, à force de s’étendre et
d’enfler, en vient fatalement à se
dégonfler. Il est assez étonnant de voir
que Napoléon, au faîte de sa gloire
et de sa puissance, en 1810, poursuit
tout de même son œuvre d’extension
de l’Empire. D’Empire en pire, oserions-nous
dire, il n’y a qu’un pas.
Napoléon le franchit. Et c’est ce pas de
trop qui va le mener, rapidement, à sa
chute spectaculaire : « du triomphe à la
chute, disait-il, très lucide, il n’est qu’un
pas ». A vrai dire, jusqu’à sa chute,
tout au moins jusqu’à l’effritement
progressif de l’Empire –dans le courant
de l’année 1812, et surtout après la
retraite de Russie- Napoléon avait une
confiance quasi aveugle en sa bonne
étoile. Il en a souvent parlé, mais c’est
un trait que l’on méconnaît souvent
chez lui. Napoléon n’était pas franchement
religieux –du moins son attitude
et certains de ses propos dénotaient-ils
chez lui une certaine
ambivalence-, par contre qu’il fut
superstitieux, certainement (XXIV). C’est
du reste une religion particulière propre
à l’obsessionnel que de croire, comme
Napoléon, aux présages, aux pressentiments
(« les pressentiments sont les
yeux de l’âme », disait-il), aux portebonheurs,
aux talismans, etc. Dans son
article Napoléon et l’occulte, J. Bertaut
écrit que « depuis son adolescence, il n’a
cessé de parler de son étoile, elle éblouit
son imagination, elle lui donne une
confiance invincible en son destin », pré-
cisant, toutefois, avec raison qu’il « serait
absurde de prétendre qu’il ait réglé sa
vie et ses actions sur des présages, des
prémonitions ou des augures, mais il les
a rarement dédaignés » (2). Toujours estil
que son étoile s’est éteinte (« l’étoile
pâlissait ; je sentais les rênes m’échapper
et je n’y pouvais rien »), et que les
doutes et les incertitudes s’amplifièrent
et s’emparèrent de l’Empereur
de façon assez dramatique, jusqu’à
l’installer, jusqu’à l’immobiliser par
moments dans une position d’inhibition
qui n’est certainement pas pour
rien dans la défaite de Waterloo (précisons
toutefois que Napoléon avait
été fragilisé, ébranlé par sa première
abdication le 6 avril 1814, et qu’il
revenait de quelques mois d’exil sur
l’île d’Elbe). Nous ne nous étendrons
pas sur la question du doute chez l’obsessionnel,
si ce n’est pour rappeler
simplement qu’il est le symptôme
constant, l’élément pathognomonique
de ce type de névrose. Deux choses
encore : le doute vient masquer l’angoisse
du névrosé (angoisse de perdre,
liée à l’angoisse de castration) ; et le
doute vient suspendre le temps de
l’obsessionnel –véritable impossibilité
à conclure-, jusqu’à ce que le sujet se
précipite, se hâte finalement d’en finir,
en risquant tout parfois, quitte à courir
au-devant d’un désastre, au-devant
de sa perte, déjà anticipée et pressentie,
comme on l’a vu pour Napoléon
dans les temps qui précèdent tout
juste Waterloo... hésitations et doutes
qui émergèrent surtout lors de la
redoutable campagne de Russie en
1812. On a plutôt, habituellement,
l’idée d’un Napoléon Bonaparte sûr
de lui, sûr de ses décisions, tranchant,
ne tergiversant pas... Et pourtant...
Comme l’avait déjà fort bien repéré
J. Bainville, « l’ennemi de Bonaparte, c’est
le doute (...), mais son style tranchant
abuse (...) ; à tous les moments de sa vie
où il a dû prendre une grande décision,
on l’aura trouvé irrésolu » (1). Et c’est le
doute, selon J. Bainville, mais également
pour nombre d’historiens, qui est
en grande partie responsable de la
défaite la plus célèbre de Napoléon,
lequel est décrit là, devant l’énormité du
risque, comme atteint de la « fièvre du
doute », manifestant « lenteur funeste,
indolence, apathie » (1)...
Conclusion
La place nous manque pour relater,
précisément, les conditions et les circonstances
de la chute de l’Empereur.
Il faut se reporter à Bainville, à Lefebvre,
à Madelin… Dans le fond, nous rapporterons
ces mots de Napoléon : « personne
que moi n’est cause de ma chute.
J’ai été mon principal ennemi, l’artisan de
mes malheurs. J’ai voulu trop embrasser
». S’il est vrai que Napoléon a très
souvent accusé l’Angleterre de l’avoir
forcé à la guerre, cette lucidité au terme
de son règne, cet aveu concernant sa
propre responsabilité quant à sa chute,
vient en opposition radicale avec ce
qu’avançait le psychanalyste René
Laforgue, à savoir que : « en vertu d’une
revendication paranoïaque (…) Napoléon
a toujours accusé l’Angleterre d’être
le bourreau à qui il refuserait la paix,
alors qu’il pouvait la faire et qu’elle le
demandait » (25). Cela nous permet de
dire quelques mots de conclusion sur
cette étude faite en 1941 par Laforgue
sur Napoléon. Soit dit en passant, à
notre connaissance, très peu d’auteurs,
dans le champ de la psychopathologie
ou de la psychanalyse, se sont intéressés
de près à Napoléon. Le Dr. Frugier
avait tenté un Essai médico-psychologique
en 1985, mais c’est sans doute
Laforgue qui laisse l’étude la plus
importante. Celle-ci est intéressante à
bien des points de vue mais, à notre
sens, elle échoue radicalement dans
ses tentatives d’explication et de compréhension
du personnage. Là encore,
il est trop tard pour voir ici dans le
détail, de quelle manière Laforgue se
fourvoie, mais nous mentionnerons –il
le faut bien, tout de même- ce qui nous
semble être l’essentiel à relever. Certes,
« nous pouvons constater chez Napoléon
l’existence d’un caractère névrotique,
sans que nous puissions affirmer que,
chez lui, tel ou tel symptôme prédominait
» (25), mais alors, on voit difficilement,
après avoir évoqué la « névrose de
Napoléon », comment Laforgue en vient
brusquement au « trait de caractère
paranoïaque » que l’auteur isole uniquement
dans la dite « revendication »
pathologique de l’Empereur. Le saut
se fait par le biais d’éléments biographiques
plus ou moins fiables de l’enfance
de Napoléon, ainsi que par des
hypothèses ou déductions plus ou
moins forcées. Pour seul exemple, après
avoir avancé que les troubles de la
nutrition et du sevrage dans la vie du
nourrisson pouvaient avoir « une part
déterminante dans la constitution du
caractère paranoïaque », l’auteur s’interroge
et nous donne sa réponse :
« que savons-nous de son enfance [à
Napoléon] pour expliquer chez lui l’existence
de traits de caractère paranoïaque
? (…). Il est probable (XXV) que Napoléon
a été un enfant prématuré et exposé
à de nombreux traumatismes, peutêtre
déjà dans le sein maternel. Nous
savons dans quelles conditions sa mère l’a
porté (…) ». Hypothèses non vérifiables
historiquement, et surtout…si tous les
enfants prématurés exposés à des dits
« traumatismes » quelconques devenaient
paranoïaques… Notons enfin
que selon Laforgue : « il n’y a pas de
doute que, dès le début, les circonstances
se révèlent contraires à l’enfant ; le climat
familial lui est défavorable, le moment
de sa venue mal choisi et, par surcroît, sa
mère lui est sans doute (XXVI) hostile (…).
Il paraît douteux que l’enfant ait été désiré
par sa mère »… La forte personnalité
de cette dernière serait d’ailleurs à
l’origine du « super-ego » de Napoléon…
Passons sur ces tentatives d’explications
psycho-biographiques. Rude
tâche que de vouloir comprendre ou
expliquer l’homme Napoléon ainsi que
son « destin » d’exception. Sans doute,
l’arrivée d’un homme tel que Napoléon
ne s’explique pas, ne se comprend
pas sans prendre en compte la situa-
tion politique de l’époque (XXVII). Cet
« homme exceptionnel » est arrivé dans
une « conjoncture extraordinaire » (16).
Pas de tentative d’explication –au sens
d’un déterminisme causal repérable
dans la seule histoire biographique -
mais, par contre, la volonté, pour nous,
de mettre en évidence le désir qui animait
Napoléon, de jeter un éclairage
inédit sur son parcours logique qui l’a
fait monter au zénith d’une manière
fulgurante pour en redescendre brutalement,
de faire valoir de quelle manière
son rapport au pouvoir et à la gloire,
à l’Autre, au temps, au travail, etc., pouvait
constituer autant d’éléments mettant
en relief la structure névrotique
du grand homme, et non pas - au
regard de l’ampleur de l’Empire, de sa
dimension « hors normes », et du caractère
hors du commun de son empereur-
et non pas, donc, sa soi-disant
folie. Disons que la figure et le destin de
Napoléon –au-delà de l’intérêt historique
que l’on peut y prêter- nous donnent,
d’une certaine manière, un enseignement
quant à la structure et à la
logique subjective du névrosé obsessionnel.
Napoléon ne se réduit pas aux
seuls caractères narcissique et phallique
qui se dégagent nécessairement, par
endroits, du portrait qui vient d’être
esquissé, et qui se signalent notamment
–avant le moment de la chute- et selon
les termes de H. Ey, par « une conduite
assurée, impulsive, la recherche à tout
prix de la réussite et du prestige, l’impossibilité
de tolérer les échecs ou critiques
» (7). Il est bien difficile de donner
en quelques pages seulement un
tableau d’ensemble suffisant de Napoléon.
« Pour cerner le personnage,
comme le suggère T. Lentz, il faudra
aller ‘’piocher’’ dans diverses études et, au
final, se livrer à l’exercice de la synthèse
» (30). Nous avons tenté ici de le faire,
sans préjugés ni passion. Dans le fond,
puisqu’il circule régulièrement et depuis
son vivant, précisément, un certain
nombre de préjugés quant à sa soidisant
« folie », ou mégalomanie, ce sera
peut-être l’un des points qu’il nous faudra
retenir : voici un homme aux ambitions
et aux pouvoirs certes démesurés,
prêt à sacrifier des milliers
d’hommes pour la grandeur de la France
et pour la paix en Europe, mais un
homme qui n’est fou en aucune façon.
Il n’y a pas à se laisser « impressionner »
par ce qui peut se manifester comme
du « hors normes ». La démesure ne
renvoie pas systématiquement à la
pathologie. A aucun moment de sa vie
Napoléon ne présenta ce que nous
appellerions, aujourd’hui, certitudes
délirantes, délire, phénomènes élémentaires
du type hallucinations verbales
ou phénomènes hypocondriaques,
pas de « réponse » non plus
-en termes de mission à accomplir- à ce
qui aurait pu être un « appel » de l’Autre
(divin par exemple), n’étant en aucune
façon « hors lien social », et n’ayant pas
eu non plus à construire de quelconques
suppléances pour parer à une
éventuelle psychose… Par ailleurs, et
avant toute chose peut-être, Napoléon
ne se prenait pas pour Napoléon –voir
la citation de Lacan au début de cet
article- et il ne se prenait pas non plus
pour Dieu le Père, alors que beaucoup
auraient voulu le mettre à cette place.
Du reste, avec humour et recul, ne se
prenant pas trop au sérieux, il pouvait
lancer ainsi : « La place de Dieu le Père ?
Ah ! je n’en voudrais pas ; c’est un culde-sac
! ». ■
N. Brémaud
Bibliographie
Sur Napoléon, en dehors des références
mentionnées dans le corps de notre texte,
et que nous donnons ci-dessous, il faut lire
l’ensemble des travaux de J. Tulard (notamment
le Dictionnaire Napoléon en 2
volumes, chez Fayard), de T. Lentz, de J.-O.
Boudon, les ouvrages classiques de Jean
Thiry, Frédéric Masson, Albert Vandal, et J.
Mistler (Napoléon et l’Empire) ainsi que la
monumentale Histoire du Consulat et de
l’Empire, de Louis Madelin (rééditée dans la
collection Bouquins chez R. Lafont). Voir
PSYCHO BIOGRAPHIE ■ 11
aussi, bien sûr, la Correspondance générale de
Napoléon, ainsi que ses Lettres (notamment
à Désirée Clary, Joséphine, et Marie-Louise).
Des dizaines, voire des centaines d’ouvrages
seraient dans le fond à lire pour se
faire une idée précise de la période du
Consulat et de l’Empire, ainsi que de l’homme
Napoléon, aussi nous renvoyons à la
bibliographie détaillée donnée par J. Tulard
dans son ouvrage Napoléon (chez Fayard,
qui doit être remise à jour, car datée de
1977). Les deux gros volumes Bonaparte
et Napoléon (chez Perrin) de A. Castelot,
bien que faits pour aller à la rencontre d’un
large public, restent des ouvrages incontournables,
rigoureux et sérieux du point
de vue historique, et d’une lecture tellement
agréable.
(1) BAINVILLE J., Napoléon, Paris 1931,
Fayard.
(2) BERTAUT J., Napoléon et l’occulte, Historia,
1962, 193, 793-800.
(3) CALVET H., Napoléon, Paris 1969, PUF
Coll. Que sais-je ?.
(4) CHARDIGNY L., L’homme Napoléon,
Paris 1987, Perrin.
(5) CHATEAUBRIAND F.-R. de, Vie de
Napoléon (1840), Paris 1999, Livre de
Poche.
(6) EY H., Etudes Psychiatriques (Etude
LIVRES
Les Exécuteurs
Des hommes normaux aux
meurtriers de masse
Harald Welzer
Nrf Essais
Gallimard, 22 €
Les exécuteurs, dans les génocides,
sont des hommes ordinaires. Nul n’en
doute à la suite des travaux d’historiens
comme Raul Hilberg ou Christopher
Browning après les procès instruits
à Nuremberg et Tokyo au
lendemain de la deuxième Guerre
mondiale, et les Tribunaux internationaux
chargés de poursuivre les criminels
au Ruanda et dans l’ex-Yougoslavie.
Harald Welzer montre que la pression
du groupe s’attache à restituer
non plus la cause immédiate, mais
le processus qui y a conduit. Il prend
au mot Adolf Eichmann, qui déclarait
à l’issue de son procès à Jérusalem
: « Je ne suis pas le monstre qu’on
fait de moi. Je suis victime d’une erreur
de raisonnement ».
Comme les exécuteurs allemands,
rwandais, serbes et croates, dont les
cas sont étudiés dans ce livre, Eichmann
récuse l’idée qu’il aurait agi
monstrueusement et en dehors des
catégories morales de la communauté
des hommes.
Si l’idée qu’on puisse les qualifier de
meurtriers est restée étrangère aux
exécuteurs dans leur immense majorité,
c’est que le projet anti-humain
auquel ils consacrèrent leur énergie
avait bâti un système d’imputabilité
morale avec des raisons de pratiquer
le meurtre de masse.
Harald Welzer démontre que, dans
un dispositif social, il suffit qu’une
seule coordonnée, l’appartenance sociale,
se décale pour que tout l’ensemble
change et que s’établisse une
réalité autre que l’antérieure. Décalage
scientifique, fondé sur une théorie
des races, ou ethnique, il consiste
en une redéfinition radicale de qui
fait partie ou non de l’univers d’obligation
générale. La distinction inéluctable
et absolue entre appartenants
et non-appartenants est
commune à ces sociétés meurtrières.
Une fois lancées, les pratiques d’exclusion,
de spoliation et de déportation
transforment le déplacement
géographique initial en « nettoyage »,
extermination pure et simple.
Dans le système des valeurs reconfiguré
que les exécuteurs vivent
comme une morale avec ses obligations
à l’égard de leur communauté,
la question de ce qu’on fait des nonappartenants
n’est plus alors qu’une
affaire de degré, et non de principe.

12
LIVRES
■ PSYCHO BIOGRAPHIE
Marcel Mauss, savant et
politique
Sylvain Dzimira
Préface de Marcel Fournier
La Découverte, 20 €
Sylvain Dzimira montre comment la
pensée anthropologique de Marcel
Mauss ne se comprend qu’à la lumière
de sa philosophie politique, et
réciproquement.
Fondateur de l’ethnologie scientifique
française, il a été l’héritier principal
d’Emile Durkheim et de l’école française
de sociologie, inspirateur revendiqué
de Georges Bataille, Roger
Caillois, Claude Lévi-Strauss et, à travers
lui, de Jacques Lacan.
Son parcours intellectuel, dont son
Essai sur le don, demeure mal compris.
Très probablement parce que
Marcel Mauss, ami et collaborateur
de Jaurès, militant du socialisme associationniste,
n’a jamais dissocié
science et politique. En cela il s’est
montré le fidèle descendant des Saint-
Simon, Auguste Comte et Durkheim
qui, à l’encontre de la prescription de
Max Weber, se voulaient en même
temps savants et politiques.
La solidarité
Histoire d’une idée
Marie-Claude Blais
Bibliothèque des idées
Gallimard, 22,50 €
Le mot de solidarité a beau être employé
à tout propos, il reste mystérieux,
difficile à définir et à cerner. Il
a connu une première heure de gloire
dans la France de la Belle Epoque
avant de tomber dans une indifférence
dont il a été tiré par un regain
de faveur à partir des années 1980.
Ce livre précise ce que recouvre une
telle adhésion.
Il retrace la genèse de l’idée en reconstituant
les problématiques qui
ont présidé à son élaboration, faisant
ainsi apparaître que derrière le rayonnement
actuel de la notion de solidarité
se dissimule l’héritage de deux
siècles de réflexion sur les rapports
entre l’individuel et le social. Toute
l’histoire du concept contemporain
de « société » s’y trouve impliquée,
de même que celle du projet d’une
« science sociale ».
Marie-Claude Blais éclaire, en particulier,
un moment clé de l’histoire de
la République, ce moment où, contesté
sur sa droite et sur sa gauche, le régime
républicain cherche à concilier
deux exigences à la fois contradictoires
et indissociables : la liberté individuelle
et la justice sociale. La solidarité
s’impose alors comme la
promesse d’une troisième voie possible
entre l’individualisme libéral et
le socialisme collectiviste.
Ce n’est qu’en fonction de ce passé
que l’on peut comprendre la faveur
consensuelle dont elle jouit aujourd’hui.
La question n’est plus de se demander
s’il faut revenir à la fraternité ou
à la charité, pas plus que de savoir si
l’on doit se rattacher à l’idéal révolutionnaire
ou au dogme chrétien.
Repensée, l’idée de solidarité pourrait
être, plus que jamais, pertinente,
au moment où tout événement a
une répercussion mondiale et où la
moindre décision engage le monde
que nous laissons aux générations
futures.
Elle présente l’avantage de mettre en
avant la dimension consciente et
volontaire de toute association humaine.
Elle permet, surtout, de signifier
le caractère extra-contractualiste
de cette association : aucune société
ne peut se concevoir en dehors de
son histoire, de ce qui la constitue au
passé et de ce qu’elle projette pour
son avenir.
n°19, Mégalomanie), Paris 1950, Desclée
de Brouwer.
(7) EY H., BERNARD P., BRISSET Ch.,
Manuel de Psychiatrie, Paris 2960, Masson.
(8) FAIN (baron), Mémoires, Paris 2001,
Seuil Arléa.
(9) FREUD S., Psychopathologie de la vie
quotidienne (1901), Paris 1967, Payot.
(10) FREUD S., Le moi et le ça (1923), in
Essais de Psychanalyse, Paris 1981, Payot.
(11) FREUD S, Un trouble de mémoire sur
l’Acropole, in Résultats, Idées, Problèmes
(vol.2), Paris 1985, PUF.
(12) GADEAU L., Le temps dans la problématique
obsessionnelle : le Père en question,
L’Evolution Psychiatrique, 1998, 63, 3,
507-514.
(13) GENGEMBRE G., Napoléon, Paris
2001, Larousse, coll. La vie, la légende.
(14) GODECHOT J., Napoléon, in Le
Mémorial des Siècles, sous la dir. de G. Walter,
Paris 1969, Albin Michel.
(15) ISRAËL L., Initiation à la psychiatrie,
Paris 1984, Masson.
(16) JAMET D., Napoléon, Paris 2003, Plon
(coll. Si j’avais défendu).
(17) JOURDAN A., L’empire de Napoléon,
Paris 2000, Champs Flammarion.
(18) KOJÈVE A., Introduction à la lecture
de Hegel, Paris 1994, Tel Gallimard.
(19) LACAN J., Propos sur la causalité psychique,
in Ecrits, Paris 1966, Seuil.
(20) LACAN J., L’agressivité en psychanalyse,
in Ecrits, Paris 1966, Seuil.
(21) LACAN J., La psychanalyse et son enseignement,
in Ecrits, Paris 1966, Seuil.
(22) LACAN J., Séminaire V, Les formations
de l’inconscient (1957-58). Paris 1998,
Seuil.
(23) LACAN J. Séminaire VIII, Le transfert
(1960-61). Paris 1991, Seuil.
(24) LACAN J., Séminaire IX, L’identification
(1961-62). Inédit.
(25) LAFORGUE R., Psychopathologie de
l’échec (1941), Paris 1975, Payot.
(26) LAS CASES E. de, Mémorial de Sainte-Hélène
(1823), Paris 1999, Points Seuil.
(27) LE BOULENGÉ C., Les conditions de la
jouissance, Quarto, 1993, 51, 95-106.
(28) LEFEBVRE G., Napoléon (1936), Paris
1969, PUF.
(29) LENTZ T., Napoléon : ‘’mon ambition
était grande’’, Paris 1998, Découvertes Gallimard.
(30) LENTZ T., Napoléon, Paris 2005, PUF
Que sais-je ?.
(31) MASSON F., Napoléon chez lui (1893),
Paris 1977, Tallandier.
(32) MILLER D., Le symptôme chez l’obsessionnel,
in Hystérie et Obsession, Angers,
Recueil, 1986, 2, 81-89.
(33) MONIN H., Napoléon Ier, article de La
Grande Encyclopédie, Paris, 1885-1902,
tome 24.
(34) PAOLI F., La jeunesse de Napoléon,
Paris 2005, Tallandier, Bibliothèque napoléonienne.
(35) SILVESTRE M., Structure lacanienne
de la névrose obsessionnelle, Revue nationale
des collèges du Champ Lacanien,
2002, 1, 137-156.
(36) SOLANO-SUAREZ E., L’identification
au symptôme à la fin de l’analyse, La Cause
Freudienne, 2001, 48, 102-108.
(37) SOLER C., Le choix de la névrose,
Quarto, 1986, 24, 49-57.
(38) STENDHAL, Vie de Napoléon, Paris
1939, Gründ.
(39) TULARD J., Napoléon, Paris 1977,
Fayard.
Notes
(I) « Ce n’est pas fini », en effet, il suffit de consulter
sur internet le nombre de pages qui lui sont
consacrées… G. Gengembre souligne : « nul
ne sait combien d’ouvrages ont été consacrés à
Napoléon. En 1998, Jean Tulard pouvait avancer
une estimation de cent-mille titres ». Napoléon
est « le personnage historique le plus représenté
dans les arts après le Christ, de la peinture
au cinéma (…) » (13).
(II) Napoléon demandait à ce que des peintres
le suivent dans ses campagnes militaires afin
que ses exploits soient reproduits. Ce fut le cas
d’Antoine Gros, qui devint le peintre officiel
de Napoléon (voir entre autres sa célèbre toile :
Bonaparte visitant les pestiférés de Jaffa).
(III) Selon T. Lentz : 800 à 900 mille morts
français, et un peu plus côté étrangers (30).
(IV)A dix-sept ans, le 26 avril 1786, influencé
sans doute par ses nombreuses lectures (Rousseau,
le Werther de Goethe, etc.) mais, également,
souffrant de l’éloignement de son île
Corse (il est à l’époque affecté dans une compagnie
de bombardiers à Valence, en France),
le jeune Bonaparte écrivait : « toujours seul au
milieu des hommes, je rentre pour rêver avec moimême
et me livrer à toute la vivacité de ma mélancolie.
De quel côté est-elle tournée aujourd’hui ?
du côté de la mort (…). Je suis absent depuis six
à sept ans de ma patrie (…). Quelle fureur me
porte donc à vouloir ma destruction ? Sans doute,
que faire dans ce monde ? Puisque je dois mourir,
ne vaut-il pas autant se tuer ? (…). Puisque
je commence à éprouver des malheurs, que rien
n’est plaisir pour moi, pourquoi supporterai-je des
jours que rien ne me ‘’prospère’’ ? ». Bien plus
tard encore, après sa première abdication, Napoléon
tente de se suicider en ingurgitant du
poison qu’il portait sur lui depuis la retraite de
Moscou en 1812, mais il semble que le sachet
se fût éventé, et que la mort ne voulut pas de
lui. Toujours est-il que l’on y voit là une des
caractéristiques que peut prendre la « dépression
» obsessionnelle. Comme l’indique D. Miller
: « la dépression fait facilement retour sur le
sujet obsessionnel qui ne parvient pas à soutenir
sa valeur phallique » (32).
(V) G. Gengembre souligne que « Bonaparte
ne cesse de penser à des colonnes » (13).
(VI) Impossible, pour Napoléon, d’envisager de
faire face à la « castration ». L’on y verra cette
vérité, pour notre part, notamment dans ces
propos de 1814 qui ne sont pas qu’orgueil ou
fierté : « Laisser la France plus petite que je ne
l’ai trouvée ? Jamais ! ». D’où son abdication.
(Ce qui fait horreur, pour l’obsessionnel, c’est
avant tout la castration de l’Autre, c’est de découvrir
que l’Autre manque. Du point de vue
subjectif, de ce qui fait son propre rapport à
l’Autre sexe, on l’a vu, Napoléon répond par
une misogynie féroce (« Nous autres, peuples
d’Occident, nous avons tout gâté en traitant les
femmes trop bien »). Du point de vue politique,
dans cette optique, et compte-tenu de l’organisation
névrotique qui se lit à tous niveaux
chez Napoléon, on doit pareillement envisager
son désir profond de rassemblement et
d’unification de l’Europe comme une tentative
de suturation de la béance structurale de la castration
: surtout qu’il n’y ait pas de failles. Impossible,
évidemment, et c’est en partie, nous
le verrons, la cause de ses angoisses, de ses incertitudes,
et de sa chute). Pour ce qui concerne
l’aspect « hyperactif » (de nos jours, il eût été
sans nul doute, dans son enfance, caractérisé
de la sorte ; voir à cet égard l’ouvrage de F.
Paoli paru récemment, La jeunesse de Napoléon
[34]), la dimension de l’exploit tout comme
celle d’un désir qui demande, inlassablement,
à en avoir toujours plus, laissent entrevoir chez
Napoléon la division subjective du névrosé,
car, dans le fond, comme le soulignait Lacan
à propos de l’obsessionnel et de ses exploits :
« dans l’exploit le sujet domine, apprivoise, voire
domestique une angoisse fondamentale » [22],
autrement dit ce Freud –tout juste un siècle
après Napoléon- nomme angoisse de castration.
(VII) Tous les dictateurs ne sont pas comparables.
Aucun n’est à défendre, mais Napoléon
n’est pas Hitler. Pour la plupart des historiens
la comparaison ne tient pas longtemps, et sur
bien des points. Pour ne considérer que cet aspect
parcellaire -mais néanmoins utile- notons
que l’identification à un Autre (identification,
et non transitivisme, ou certitude délirante d’être
un Autre ou d’être l’Envoyé ou l’Elu d’un Autre)
renvoie, de façon certaine, à la structure de la
névrose (hystérie et obsession essentiellement).
A notre connaissance, Hitler, lui, ne s’est pas
identifié à un Autre. Et sa folie, plus justement
sa psychose paranoïaque, ne fait pas de doute.
(VIII) Encore une fois, Napoléon ne se croyait
pas, ne se prenait pas pour Napoléon, et encore
moins pour César, Alexandre ou Charlemagne.
Comme le précise très justement H.
Ey [6] dans son Etude Psychiatrique n°19 consacrée
à la mégalomanie, une des idées délirantes
de grandeur parmi les plus communes est celle
du délire de filiation (le sujet s’affirme d’origine
illustre). S’il y a bien quelque chose dont Napoléon
a souffert –au sens d’un sentiment d’infériorité-,
c’est bien justement de trop bien savoir
qu’il ne descendait en aucune manière
d’une famille royale. F. Masson, écrit ainsi : Napoléon
« affirme, et avec quelle singulière vigueur,
à quel point (…), dès qu’il est sorti de la réalité du
droit démocratique pour chercher à son pouvoir des
origines de droit divin, il s’est trouvé inférieur à ceux
qu’il a remplacés (…) » [31].
(IX) Le baron Fain (1778-1837) –qui fut, successivement,
secrétaire-archiviste au cabinet de
Napoléon, maître des requêtes au Conseil d’état,
puis secrétaire du portefeuille- écrivait dans ses
Mémoires : « ce qu’il [Napoléon] redoutait le plus,
c’était de passer pour trop facile » [8]. Une fois
installé aux Tuileries : « il me fallait de nécessité,
dit Napoléon, me créer un extérieur, me composer
une certaine gravité, en un mot, établir une
étiquette, autrement l’on m’eût journellement
frappé sur l’épaule ».
(X) Ce que Chateaubriand a reformulé ainsi :
« Napoléon était son propre mime ; il ne se serait
pas cru un héros s’il ne se fût affublé du costume
d’un héros » [5]. Pour sa part, J. Tulard souligne
que « rarement personnage historique aura eu
autant le souci de se composer une silhouette »
[39].
(XI) Ce que Napoléon jetait d’ancres pour la
« sécurité », la « tranquillité » de sa propre personne,
se retrouvait également dans sa politique
et dans sa façon de mener le monde et
d’écrire l’Histoire. Bainville écrivait : « par tous
les moyens il [Napoléon] jette des ancres afin de
consolider, de fortifier toujours plus sa dynastie, sa
famille (…) ». Puis, après la désastreuse retraite
de Russie : « il a jeté des ancres. Aucune n’a
tenu » [1].
(XII) « Ici, c’est la mort qu’il s’agit de tromper par
mille ruses, et cet autre qu’est le moi du sujet entre
dans le jeu comme support de la gageure des mille
exploits qui seuls l’assurent du triomphe de ses
ruses » [21]. Autre connotation militaire intéressante
(l’Armée, est-il besoin de le souligner ?
est une institution typiquement obsessionnelle)
associée à la structure du névrosé obsessionnel,
donnée par M. Silvestre : l’obsessionnel
« envoie son Moi sur le champ de bataille » [35].
(XIII) C’est nous qui soulignons.
(XIV) F. Masson écrivait en ce sens : « Le repos,
pour lui, c’était de passer d’un travail à un
autre » [31].
(XV) S. Freud lui-même (admirateur dans sa
jeunesse de l’empereur) connaît cette caractéristique,
et écrit dans sa Psychopathologie de la
vie quotidienne : « Napoléon, qui était passé maître
dans l’art de traiter les hommes, a fourni, pendant
sa malheureuse campagne de 1814, une
preuve étonnante de sa mémoire des noms. Se
trouvant dans la ville de Craonne, il se rappela
avoir connu, vingt ans auparavant, le maire de
cette ville, De Bussy, dans un certain régiment.
La conséquence en fut que De Bussy, ravi et enchanté,
se consacra à son service avec un dévouement
sans borne » [9].
(XVI) René Laforgue écrivait dans son étude
sur Napoléon : « la plupart des maîtresses de
Napoléon furent des momentanées. Le moment
était bref, le plus souvent unique. Il ne dépassa
jamais le temps que la distraction impériale lui
consacrait » [25].
(XVII) Ce trait caractéristique de la hâte et du
temps qui presse et oppresse, se retrouve du
début à la fin de la vie de Napoléon. En 1795
(il a vingt-six ans) Napoléon écrit à Désirée
Clary, sa première fiancée : « Jouissons donc
bien vite, ma bonne amie, hâtons-nous d’être heureux,
le temps vole, les saisons se renouvellent et
la vieillesse arrive ». Par ailleurs, au moment de
la bataille fatidique de Waterloo. Napoléon,
hésitant, pressentant d’une certaine façon la
défaite au-devant de laquelle il allait, ne parvient
pas à se décider à attaquer, et laisse ainsi
passer de précieux moments. Puis « une hâte
le saisit. Soudain le voilà pressé. Il veut le résultat
tout de suite, la bataille décisive, de tout ou
rien, avec l’envie d’en finir » [1]. En embrassant
d’un seul regard le parcours, la destinée vertigineuse
de Napoléon, on peut dire en effet
avec J. Bainville, qu’il « court au devant de sa
perte comme s’il avait hâte d’en finir » [1]…ce
qui n’est pas sans rappeler les mots de jeunesse
de celui qui n’était encore que le jeune Bonaparte
: « Quelle fureur me porte donc à vouloir
ma destruction ? ».
(XVIII) Selon les termes de D. Miller, pour l’obsessionnel
« la mort est toujours à l’horizon, et bien
souvent l’habite déjà » [32]. La mort réelle, en
soi, n’était rien pour Napoléon, c’était bien davantage
la « vie éternelle » -à savoir l’inscription
de sa place et de son nom, à jamais, dans l’Histoire-
qui surpassait tout, et qui le poussait toujours
plus loin dans ses exploits et dans l’élaboration
de sa propre légende : « la mort n’est
rien, disait-il, mais vivre vaincu et sans gloire,
c’est mourir tous les jours ».
(IX) Sur ce point nous renvoyons notamment
à l’article de L. Gadeau, Le temps dans la problématique
obsessionnelle : le Père en question
[12].
(XX) Paoli F., La jeunesse de Napoléon [34].
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Pour avoir une idée suffisamment précise du
portrait du père et de la mère de Napoléon,
nous renvoyons au chapitre 2 de cet ouvrage.
(XXI) Voir S. Freud, Le moi et le ça [10]. Nous
avons déjà évoqué plus haut ce sentiment d’infériorité
chez Napoléon vis-à-vis de ses illustres
prédécesseurs, un sentiment attisé par les souverains
de l’époque qui, malgré ses nombreuses
victoires, le considéraient toujours comme un
« parvenu ».
(XXII) Outre les aspects déjà mentionnés, ces
soucis d’ordre, de propreté et d’économie chez
Napoléon (« Une économie qu’il peut faire le ravit
», souligne F. Masson [31]) signent de façon
tout à fait paradigmatique le « caractère anal »
inhérent à la névrose obsessionnelle.
(XXIII) Lacan insiste, notamment, dans sa séance
du 21 mars 1962 sur « cette espèce d’avidité
presque féroce chez l’obsessionnel d’être celui qui
est partout pour n’être justement nulle part ».
(XXIV) Il faudrait ici relire la Psychopathologie
de la vie quotidienne de Freud, et relever, notamment,
comment y est spécifiquement articulée
la névrose obsessionnelle et la superstition,
cette dernière étant, pour L. Israël, « L’armure
préférée de l’obsessionnel » [15].
(XXV) nous soulignons
(XXVI) nous soulignons.
(XXVII) Et encore, pour le « comprendre », ce
serait sans aucun doute un minimum. A vrai
dire le programme serait bien plus large. Si l’on
suit la pensée de Hegel, selon la lecture qu’en
a faite Kojève : « Qu’est-ce que ‘’comprendre’’
Napoléon, sinon le comprendre comme celui qui
parfait, en le réalisant, l’idéal de la Révolution
française ? Et peut-on comprendre cet idéal, cette
Révolution, sans comprendre l’idéologie de l’Aufklärung,
du Siècle des Lumières ? D’une manière
générale, comprendre Napoléon, c’est le comprendre
en fonction de l’ensemble de l’évolution
historique antérieure, c’est comprendre l’ensemble
de l’histoire universelle » [18].
Le système d’assurance
santé aux Etats-Unis
Un système fragmenté et
concurrentiel
Sylvie Cohu et Diane Lequet-
Slama
Etudes et résultats 2007 n°600
Drees
La majorité des Américains (60%) sont
couverts par une assurance privée de
santé, le plus souvent proposée par
les employeurs.
Les assurances publiques concernent,
respectivement, les personnes âgées
de plus de 65 ans ou les personnes
handicapées dans l’incapacité de travailler
(Medicare) et certaines familles
pauvres, ainsi que des enfants, au travers
des programmes Medicaid et
SCHIP. 15,9% de la population ne dispose,
en revanche, d’aucune couverture
maladie.
Le système de santé des Etats-Unis se
distingue par son coût très élevé et
la hausse des primes d’assurance a
récemment conduit à un certain désengagement
de la part des employeurs.
Medicare, seul programme à vocation
universelle pour les plus de 65 ans,
a été réformé en 2003, en offrant une
extension de la couverture maladie
aux dépenses de médicaments et en
ouvrant la possibilité d’une délégation
de la gestion à des opérateurs
privés.
Les réseaux de soins proposés par les
compagnies privées, les Managed Care
Organisation, sont devenus le modèle
dominant par rapport à l’assurance
maladie traditionnelle et réunissent
les fonctions d’assurance et de production
des soins. Plus de 70% des
Américains ont souscrit, sous diverses
formes, un plan de Managed Care
dans le cadre de l’entreprise ou à titre
individuel.
Une généralisation de l’assurance maladie
à l’ensemble de la population a
été mise en œuvre au Massachusetts
et plusieurs États sont tentés par une
expérience similaire. Le système de
santé sera au centre des prochains
débats aux États-Unis.
www.sante.gouv.fr/drees/index.htm
Pour toute information : drees-infos@sante.gouv.fr

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Comme le dit son nom, la dé-pression
est une chute de pression.
Contrairement aux apparences, la
pression n’est pas le résultat des circonstances
extérieures, mais bien le
reflet d’une attitude mentale.
Cette attitude est composée de projection
et d’anticipation.
La projection est le pouvoir du mental
de créer des formes, qui sont
ensuite confondues avec la réalité.
L’anticipation est cette habitude de
projeter un futur inexistant et de le
vivre comme s’il était réel.
Tous ces subterfuges inventés par le
moi servent à maintenir son existence,
et à éloigner le spectre de l’instant
présent, ouverture non limitée
en laquelle le moi perd sa consistance
pour se dissoudre dans la conscience
silencieuse.
Une pression ne peut chuter que si
elle est élevée. Essayez de sauter par
une fenêtre située au rez-de-chaussée,
et vous comprendrez que la différence
de niveau induit le choc, alors
que l’absence de différence n’entraîne
pas de choc.
L’attente est une pression inventée
par le moi. Elle consiste à fixer le
mental sur un but. Si ce but est
atteint, le moi se réjouit. Si le but n’est
pas atteint, le moi est déçu. La déception
peut être intense, et peut conduire
à la décision, encore créée par le
moi, de détruire ce corps qui semble
en être le responsable. Le suicide
devient ainsi un objet de désir comme
un autre, nouveau subterfuge destiné
à fuir l’insaisissable présent.
Le moi, en effet, ne supporte pas de
ne pas avoir une pâture à se mettre
sous la dent. Le passé et le futur sont
sa nourriture. Ils le maintiennent et
le font fleurir, comme une bonne
terre le fait avec une fleur. Ils sont
tous deux son enfant. Sans lui, que
deviendraient-ils ? Imaginez un passéfutur
sans moi à qui se rapporter. Ne
serait-ce pas comme un bonbon vide
et sans sucre ?
Le moi est donc le personnage central
à l’origine des attentes, des déceptions
et des dé-pressions qui s’ensuivent.
Comment pourrait-on soigner la dépression
sans s’occuper de ce moi qui
en constitue l’axe ? Ce serait comme
vouloir opérer un abdomen pour guérir
d’une migraine.
Nous en arrivons donc à l’évidence
que pour soigner une dé-pression, il
convient de prendre en considération
le moi qui l’a créée.
Or, ce moi est un personnage volatil.
Quand on veut l’attraper, il se défile.
Il est aussi inconsistant qu’un nuage
dans le ciel. Pour la bonne raison,
qu’il n’est qu’une pensée. Une pensée,
cela ne semble pas grand-chose, mais
pourtant une pensée qui revient sans
cesse est une obsession. Le moi est
ainsi une obsession. Toutes les pensées
s’égrènent autour de lui. Il est
comme un roi omnipotent, qui asservit
ses sujets sans guère s’occuper de
leur devenir.
Le seul ennemi que redoute le moi
est le regard. Comment une chose
aussi impalpable que le regard pourrait-elle
effrayer le roi ? Pour la bonne
raison, que lorsqu’une pensée est
observée, celle-ci disparaît. Faites-en
l’essai une fois, et vous le saurez pour
toujours. L’observation de la pensée
moi amène sa disparition.
Environnement, rythmes
cicardiens, troubles de
l’humeur : nouvelles
perspectives
Les relations entre environnement
et santé sont admises, aujourd’hui,
comme une évidence par la communauté
scientifique. Si les facteurs
de risque sont bien connus comme
origine, ou facteurs d’expressivité
d’une vulnérabilité dans les pathologies
somatiques, on commence à
en cerner, de mieux en mieux, les
contours en matière de psychopathologie.
Les relations entre stress,
maladie psychosomatique, anxiété et
dépression sont ainsi étudiées de
longue date. On a ainsi, de plus en
plus souvent, recours à des modèles
expérimentaux chez l’animal et de
nombreuses voies de recherche sont
explorées.
Boris Cyrulnik a d’ailleurs beaucoup
fait pour relier l’observation animale
à des modèles expérimentaux théoriques
avec le souci de les ouvrir à
une réflexion tirée de la clinique. Il est
particulièrement intéressant de constater
que ces recherches viennent
recouper des constatations cliniques
et, dans certains cas, une approche
psychanalytique qui pourrait sembler
a priori très éloignée. On peut ainsi
décrire chez le rat des troubles du
comportement avec diminution de
l’activité motrice après une séparation
maternelle précoce (XXème ECNP : Chung et al).
Par ailleurs, il apparaît de plus en plus
comme une évidence que l’environnement
peut intervenir dans deux
directions opposées : soit comme facteur
de risque pouvant induire ou
aggraver une pathologie, soit comme
facteur de protection. Une exposition
d’un groupe de souris à une sur-sti-
La dé-pression
mulation environnementale semble
ainsi avoir des effets de type anxiolytique
chez des souris par comparaison
avec un groupe témoin (XX ème
ECNP, Pokk et al).
Un des éléments essentiels de l’environnement
animal demeure l’évolution
de son activité et donc de son
métabolisme sur un registre cyclique.
Nous connaissons ainsi différents
cycles biologiques, saisonniers, menstruels,
circadiens, pour n’en citer que
quelques uns. De plus, les relations
entre environnement, cycles biologique
et pathologique ouvrent,
aujourd’hui, de nouvelles voies de
recherche et des perspectives thérapeutiques
prometteuses. Les altérations
du cycle veille/sommeil, depuis
l’amplification de facteurs génétiques
jusqu’à la traduction en réceptologie
neurochimique d’une part, et jusqu’à
l’expression clinique sur un mode
dysthymique d’autre part, sont actuellement
particulièrement étudiées.
Ainsi, le travail de recherche sur les
récepteurs présents au niveau de
l’horloge biologique, tels que les
récepteurs mélatoninergiques, a permis
une nouvelle approche dans le
traitement de la dépression et des
troubles liés au stress. Cette recherche
serait d’autant plus novatrice qu’elle
explore des voies différentes ne mettant
pas en cause les systèmes muscariniques,
histaminiques, sérotoninergiques
et noradrénergiques
responsables des principaux effets
secondaires des antidépresseurs
actuellement utilisés. ■
Charles Alezrah, Paul Bonnan,
Norbert Skurnik
Vous nous direz : « mais n’est-ce pas le
moi qui observe la pensée moi ? ».
Comment une pensée pourrait-elle
observer une autre pensée ? Est-ce
qu’un miroir peut observer un autre
miroir qui se reflète en lui ? Ce qui
observe la pensée ne peut être qu’en
dehors d’elle. Le regard est ainsi hors
de portée de la pensée moi, puisqu’il
la perçoit.
Le regard est ce qu’on nomme, parfois,
la conscience. La conscience n’est
pas une personne, puisqu’elle est
capable de l’observer. La conscience
est donc libre de la personne. Pour
cette raison, on la qualifie d’impersonnelle.
Etant impersonnelle, elle ne
peut qu’être libre de la souffrance
qui, elle, est bien personnelle. Peut-on
souffrir de l’ulcère de jambe du voisin
? La souffrance se réfère ainsi à ce
moi, encore lui. A ne pas la
confondre avec la douleur qui, elle,
appartient au corps.
Pour guérir de la dépression, il
convient donc de se libérer de l’emprise
du moi.
Une des voies de libération est celle
de l’accueil ; l’accueil des perceptions,
des sensations, des émotions, des pensées.
L’accueil n’appartient pas à la
personne. La personne elle-même, en
tant que perception, est contenue en
lui. Ce qui contient ne peut être
contenu. La bouteille de coca-cola
est libre de son contenu. Versez le
breuvage sur le sol. La bouteille n’en
est pas affectée.
L’inverse de l’accueil est le refus. Ce
dernier est un des magistrats au service
du roi. Par le refus, le roi affirme
son autorité. Un roi qui dirait toujours
oui ne serait plus un roi ! Le
moi et le refus sont donc les deux
alliés du roi qui les manie avec dextérité,
pour transformer toute situation
en un problème. Sans refus et
sans moi, où est donc passé le problème
? Le problème disparaît en
même temps que celui qui l’a créé.
Le chagrin et la tristesse sont un des
artifices créés par le moi pour éviter sa
propre disparition. Ils se référent tous
deux au passé-futur, dont la mélopée
est souvent d’actualité. Sans passé et
sans futur, que restent-ils de ces deux
compères ?
La dé-pression est ainsi soignée par
la disparition ; non pas celle du corps,
comme le croient les amateurs d’émotions
fortes, mais celle de la pensée
moi. Et cette disparition ne se fait pas
d’un tour de baguette magique. C’est
pour l’inviter que l’ermite se retire
quarante années dans sa grotte. L’agitation
est en effet peu propice à sa
disparition. Le recueillement et la tranquillité
sont les sédiments qui préparent
sa fin. Un mental tranquille
devient transparent, comme le
brouillard qui cesse dès lors que les
particules qui le composent ne sont
plus agitées. Dans un mental tranquille,
le sens du moi s’atténue,
comme l’aiguille affolée d’une boussole
qui trouve un point de stabilité.
En prolongeant cette expérience du
silence sans pensée, le sens du moi
finit par perdre de sa prééminence.
Le monde peut alors être perçu tel
qu’il est, sans le filtre déformant des
interprétations personnelles. Un
monde tel qu’il est n’est ni beau, ni
laid, ni agréable, ni désagréable. Il
n’est qu’une perception qui émerge
dans le regard qui la contient. Le
monde n’est ainsi pas plus consistant
que l’image de l’oiseau qui se reflète
dans la fenêtre ouverte. L’inconsistance
du monde contraste avec la
consistance du regard qui le perçoit.
Le regard est lui-même la consistance,
la densité, qui donne vie au spectacle
perçu. Sans regard, pas de spectacle.
Nous arrivons ainsi au terme de cette
promenade, qui nous a amenés du
plus loin au plus près. Qu’y a-t-il donc
LIVRES ET REVUES
L’enfant et son sexe
La lettre de l’enfance et de l’adolescence
Revue du Grape 2007, n°68
Erès, 14 €
RÉFLEXION ■ 13
Ce n’est pas l’anatomie seule qui décide du sexe, mais une série d’opérations
psychiques qui se déroulent tout au long de sa maturation et qui décident de
la sexuation, tout comme le démontre l’article d’Olivia Dauverchain, qui met
aussi en lumière la particularité de la position féminine. L’étude de cultures différentes,
dont Olivier Douville donne des exemples et des commentaires, illustre
que la division sexuelle est construite selon des critères précis mais variables,
et se tient dans un équilibre fluctuant selon le contexte temporel et historique.
Ce qui paraît « naturel » nécessite un long travail psychique d’appropriation pour
devenir « accommodable », voire pour s’en accommoder ; ainsi peut-on le lire à
propos des garçons et de leur sexe dans l’article de Martine Menès, qui amène
au deuxième point, la relation entre l’enfant et le sexuel. La rencontre de la
question sexuelle est pour l’enfant toujours traumatique parce que trop radicalement
étrangère au monde de la connaissance construite. C’est cette rencontre,
toujours mauvaise, du sexuel par l’enfant que développe l’article
d’Albert Nguyên.
Nicolas Murcier et Laurent Ott, mettent en tension l’embarras des jeunes et celui
des adultes, ce que confirme l’analyse par Marie-Hélène Inglin-Routisseau
de la littérature romanesque où la sexualité des jeunes est mise en scène. L’enfant
objet, de toutes les « préventions », est pourtant soumis à un déferlement
permanent de la sexualité sur la scène publique sur laquelle il est parfois appelé
pour être exposé précisément à la place dont on dit vouloir le garder.
Claude Allard analyse une des modalités de ce phénomène dans son article sur
les nouvelles « Lolitas ».
Jean-François Solal montre, par une illustration clinique, qu’une adolescente ne
renonce pas facilement à la sexualité perverse polymorphe de son enfance et
que le tabou de la virginité, ancré dans des représentations œdipiennes somme
toute très classiques, reste vivace derrière la tendance à la précocité des relations
sexuelles.
On comprend avec la contribution d’Hubert Lisandre que les nouvelles possibilités
de « sa(ça)voir » proposées par Internet trouvent leur efficace dans le fonctionnement
psychique de leur utilisateur. L’envahissement par les images vient
masquer le silence des mots.
La rubrique « Entretien avec... » prolonge le dossier en témoignant de la rencontre
entre l’inconscient et la civilisation, à travers une expérience d’accueil et
d’écoute de jeunes adolescentes dont les conditions de vie rendent le rapport
à la réalité sexuelle particulièrement cru et parfois violent. Les praticiennes du
dispositif EVA (Espace, Vie, Adolescence) donnent un témoignage de leur action
auprès de ces jeunes en grande souffrance, et rappellent que le sexuel reste
le lieu privilégié d’exploitation des femmes.
La vie sexuelle à Rome
Géraldine Puccini-Delbey
Taillandier
Ah ! comme il est agréable de lire un livre sur la sexualité qui nous change des
turpitudes politiciennes actuelles sur le sujet. Certes, la vie sexuelle n’est pas
que plaisir et l’exercice de la sexualité est souvent une occasion de pouvoir, de
régulation des rapports entre les sexes et les classes sociales. La violence y est
souvent présente. Mais peut-il en être autrement de la sexualité et du dynamisme
pulsionnel qui l’anime tout en empruntant aussi bien des voies créatives
que des chemins délétères et destructeurs ?
Ce livre d’une maître de conférence de langue et de littérature latine, écrit avec
verve, nous entraîne dans la Rome antique. Outre la longue promenade historique,
agréable en soi pour se replonger dans l’univers romain antique, les représentations
de la sexualité qui y sont exposées alimentent le questionnement
qui ne devrait être qu’incessant des variations de la vie sexuelle selon les époques
et les individus.
Ainsi, on apprend que les romains ne faisaient pas la distinction entre hétérosexuels
et homosexuels mais qu’il y avait ceux qui « pénètrent et ceux qui sont
pénétrés ». Les interdits et les tabous se faisant autour de cette modalité de l’activité
sexuelle. A partir de cette donnée générale, dont le lecteur pourra apprécier
toutes les subtilités au cours des quelques passionnantes 400 pages, Géraldine
Puccini-Delbey construit son exposé autour de trois parties. La première
partie consacrée au modèle du citoyen viril étudie l’institution du mariage, les
relations sexuelles hors-mariage, les amours masculines et l’inceste.
La deuxième partie intitulée « Corps et sexualité » décrit l’érotisme, la politique
des corps et les maladies sexuelles. Enfin, la troisième partie pose des « Regards
critiques sur la vie sexuelle ». Les discours médicaux, la réflexion des philosophes,
la critique des moralistes et le point de vue des historiens notamment autour
de la figure de l’empereur comme monstre sexuel sont successivement abordés.
Concernant ce dernier point, on sait à quel point certains empereurs romains
seraient parfaitement en phase avec nos représentations modernes du
monstre sexuel. On retrouve là les relations entre le pouvoir politique et la
sexualité et cette propension qu’avaient les empereurs romains à s’accaparer
les femmes des autres, sans que personne n’y trouve à redire (ou ne puisse y
redire). Evidemment et heureusement, ces pratiques totalitaires et machistes où
dominent le déni d’altérité et la relation d’emprise n’existent plus maintenant
chez les dirigeants politiques contemporains.
M. David
de plus près que le regard lui-même ?
Même les lunettes sont pour lui un
objet d’observation. La guérison de
la pression et de la dé-pression ne
peut donc se faire qu’à travers une
compréhension, qui libère de l’habitude
de prendre pour réel ce qui ne
l’est pas, et qui clarifie le monde
opaque des projections mentales et
des conséquences qu’elles entraînent.
Rendons, ainsi, hommage à la joie
qui se cache derrière le chagrin, et
qui rayonne dès lors que ce dernier
s’éteint, comme le soleil qui brille dès
que les nuages s’effacent. ■
Jean-Marc Mantel
Psychiatre, Vence (Alpes-Maritimes)

14
■ HUMEUR
Nous confondons, souvent, l’un et
l’autre alors que l’éducation ainsi
que nombre de thérapies auraient
comme vocation commune d’élever
l’individu au rang de sujet et non plus
d’objet de toutes nos attentions.
Assujettir : rendre sujet ?
Oui mais de qui, de quoi ?
Les traditions du Livre avaient peutêtre
répondu sujet du Verbe ? Le
Verbe, concept inouï pour nos oreilles
contemporaines ; à tel point que les
frères Bogdanov dans leur thèse de
Sciences, controversée, proposent de
le comparer au Big Bang. Sujet du
verbe, cela se conçoit, en référence à
la grammaire de notre enfance, on suppose
alors : auteur de sa parole, responsable
de ses dires ; une transposition
psycho-sociale d’un assujettissement,
par ailleurs, transcendant.
Une patiente anxieuse et déçue de son
existence circulaire et insensée, se vante
de n’être assujettie à rien ni personne.
Pourtant, elle se sent prisonnière aussi
bien de certaines croyances familiales
que de sa névrose. Comme si des logiciels
infraconscients parasitent sa sensibilité,
sa pensée et ses choix malgré sa
volonté. Asservie à des scénari fantasmatiques
qu’elle découvre dans ses
rêves , elle voit comment ceux-ci catalysent
sa libido et ont organisés sa biographie
en cercles vicieux. Les fantasmes
occupent l’espace ouvert de sa
psyché, celui potentiellement consacré
à son libre arbitre moribond ; ils agissent
comme un virus informatique en bloquant
son appareil psychique. Ils fonctionneraient
peut-être aussi comme un
virus biologique qui vient s’inscrire en
trop dans le fonctionnement des ARN
messagers pour se faire dupliquer luimême
en priorité, désorganisant par
De l’autisme
Topologie du transfert dans
l’exercice de la psychanalyse
Tomes 1 et 2
Richard Abibon
EFE Editions
Ces ouvrages sont le fruit du travail
d’un groupe de recherche sur l’ « autisme
» à partir d’un point de vue d’observation
lacanien. On retrouve avec
les notions de base, bien connues sinon
bien comprises que sont l’articulation
entre symbolique, imaginaire,
et réel, les outils conceptuels que sont
la phase du miroir, les nœuds borroméens,
les mathèmes, tout cela appliqué
à l’ « autisme », dont les guillemets
indiquent bien la réserve que
cette notion suscite chez l’auteur.
Le tome 1, appuyé sur des cas cliniques
finement décrits traite d’« acoupure
», de trous symboliques, de surfaces,
retournements, images en miroir,
et de la célèbre bande de Moebius.
Cette description topologique, malgré
une formalisation parfois un peu
aride, donne à penser, à associer,
donne envie aussi de créer des liens
avec d’autres topologies, certaines
un peu anciennes (Bion, Pankow),
d’autres parallèles, comme les travaux
de G. Haag en lien avec les théorisations
d’E. Bick et de F. Tustin. On
voit bien, en effet, que l’on est dans
le même espace conceptuel, celui de
symbolisations s’étayant sur une expérience
sensorielle et émotionnelle
à médiation cutanée et oculaire. Ce
tome 1 intéressera tous ceux qui désirent
découvrir un discours un peu
différent sur l’autisme et la psychose
infantile.
Le tome 2 traite des adultes. Là, la
différenciation entre autisme et psychose
sévère est peu marquée. La
formalisation mathématique, tout en
restant dans le domaine de l’accessible
pour peu que l’on se souvienne
de ses études secondaires, est néanmoins
plus poussée. Pourtant, si l’on
arrive à dépasser cette difficulté re-
ailleurs tout le métabolisme de la cellule.
Elle constate son ambivalence à
faire le deuil de ces repères, croyances
et attitudes réflexes fondées sur la peur
et l’habitude, certitudes figées d’une
tragédie annoncée mais, finalement,
sécurisante car connue. Comment
pourrait-elle s’élancer dans l’espace sans
garantie d’une solitude à inventer, elle
qui confond solidarité avec substitution,
confiance avec abus , amour avec
séduction, assujettissement avec asservissement
?
Eric, diagnostiqué schizophrène depuis
longtemps, avoue son goût pour la
pratique de rituels religieux qu’il invente,
il admet son aspiration pour la spiritualité
en général. En effet, prier l’aide
à se dégager de l’emprise qu’auraient
sur lui les voix ; et la prière relativise
encore l’impact ressenti comme totalitaire
et pétrifiant de ses contemporains
sur lui-même. Son père, lui-même,
aurait vécu dans la soumission d’un
grand-père paternel, patriarche incontesté,
ancien chef politique qui terrorise
encore toute la famille et aussi le
patient handicapé mental.
Claire, traitée depuis 20 ans pour psychose
revisite son histoire : sa mère
lui a confirmé qu’elle avait été pour
elle comme une poupée, une petite
fille modèle ravissante avec laquelle
elle a bien joué. Malheureusement, la
patiente ne sait pas sortir de ce rôle
stéréotypé devenu un enfer ; comment
s’émanciper et devenir une femme?
En mimant celle-ci ou celle-la ? Ou
bien, en étant un pur esprit ? Mais rien
n’y fait pour se dégager de ce système
clos : tout la détermine et la contrôle ;
elle se sent systématiquement et malgré
elle asservie comme par réflexe, obligée
sans raison raisonnable à une obéissance
totale et immédiate à ses parents,
la famille, les médecins, la cité, la société
et la culture et ce d’autant qu’elle
lative, on se rend bien compte que
« quelque chose » est au travail. On ne
peut pas s’empêcher de penser aux
capacités étonnantes, voire surhumaines
de certains autistes adultes
dans des domaines très circonscrits,
alors qu’ils sont profondément dépendants
et handicapés dans la vie
sociale la plus courante.
Ces élaborations topologiques, issues
des projections de l’image du corps
propre permettent de proposer un
contenant de pensée à des agis autrement
insensés. Cette lecture fait
penser à une réflexion déjà ancienne
de G. Deleuze, disant (je cite de mémoire)
que la bêtise n’est que le négatif
de l’intelligence, au sens où elle
ne serait pas un manque, mais un
opposé actif. La lecture et l’assimilation
de ces propositions de métaphorisation
permettront à ceux qui
veulent ou peuvent s’en donner le
temps et les moyens d’entrer encore
d’avantage dans une relation profondément
humaine avec ceux que
l’auteur appelle les « dits-autistes ».
A. Frottin
Les premiers entretiens
thérapeutiques avec
l’enfant et sa famille
Préface de Maurice Berger
Sous la direction de Jean-Paul
Matot et Christine Fisch-Desmarez
Dunod, 26 €
Rédigé par un groupe de cliniciens
dont la pratique se situe dans une filiation
à la fois psychanalytique et
systémique, cet ouvrage présente une
démarche en trois niveaux : présentation
du cadre de l’entretien avec
les conditions de sa mise en place et
les limites de son efficacité ; pratique
pédopsychiatrique intégrant les dimensions
individuelles, familiales,
groupales et institutionnelles ; installation
de dispositifs psychothérapeutiques
« sur mesure » pour l’enfant
et sa famille.
Assujettir ou asservir ?
se sent observée et jugée par eux via la
télé, l’ordinateur et tous les moyens de
communication…
Françoise est une amie, mère d’un
jeune psychotique. Désolée que celuici
ait interrompu sa psychothérapie,
elle souhaite conseiller à son fils de
reprendre les séances avec X puisque
« cela lui avait fait du bien ». Elle comprend,
quand je le lui explique, qu’il
pourrait l’entendre comme une double
contrainte du type « Soit libre mon fils »
puisque dans les croyances implicites
du jeune homme, elle occupe le statut
de reine-mère omnipotente.
Néanmoins, elle voudrait encore le protéger
des conséquences d’ actes délictueux
récemment commis en faisant
intervenir son réseau social. Elle s’en
veut car il n’a pas eu de chances dans
la vie, elle ne veut pas qu’il souffre
encore. Elle se sent coupable de n’avoir
pas su protéger l’enfant du surinvestissement
de son père qui l’adorait jusqu’à
se substituer à lui en le téléguidant
dans tous les actes de la vie
quotidienne.
Se substituer aux principes qui règlent
et triangulent les relations humaines,
se substituer au libre arbitre de nos
proches et de nos patients, deux écueils
de nos vies quotidiennes…
Mais est-ce possible d’advenir au rang
de sujet tout seul ? Certains thérapeutes
semblent suggérer que oui, ce qui parait
paradoxal vu leur profession !
Nicolas, souffrant de troubles psychotiques
depuis l’enfance, ne peut s’insérer
socialement et ses parents qui
appréciaient cet enfant calme quoique
écholalique, commencent à s’inquiéter.
Le jeune homme a confié à sa
mère qu’il ressent un interdit à exister
émanant de son père et de son grandpère
paternel. Le grand-père est un
artiste admiré par toute la famille et
apprécié de ses très nombreux amis.
C’est vers la tante paternelle que les
informations ont convergé. Celle-ci sait
aussi que le père de Nicolas avait, luimême,
été un petit garçon souffrant.
Mais sa dépression n’avait pas été soignée
et son anorexie s’amenuisa au
décours des séances d’orthophonie.
Quand il fut papa, il a surinvesti son
fils de même qu’il l’avait été par son
père. Jouant avec l’enfant et l’emmenant
partout avec lui.
Le fils et le petit fils de ce grand-père
très original et peut-être idolâtré, n’ont
pu accéder, eux-mêmes, à une existence
épanouissante et quand le grandpère
fut informé de la théorie du petit
fils sur son inhibition il rétorqua qu’il
n’avait rien fait.
Effectivement, l’inestimable objet de la
transmission, thème des films de Clint
Eastwood et du travail de Pierre
Legendre, semble s’être perdu d’une
génération à l’autre. Et l’impasse de
Nicolas soulève des questions universelles
: Qu’est-ce que devenir un
homme ? Comment devenir fils ? De
quel héritage sommes nous légataire ?
Quelles valeurs transmettons nous ou
pas, consciemment et inconsciemment
?
La fonction paternelle, au sein d’une
famille, peut alors être réanimée lorsque
les thérapeutes proposent que soient
révisées les règles de la coexistence,
l’exigence du respect réciproque, la
soumission commune aux lois élémentaires
de l’humanité, celles qui rendent
possible de se risquer à penser et
à parler. La fonction paternelle n’est
donc pas à confondre avec celle de
géniteur, et n’a pas non plus de rapport
avec l’identité sexuée de ceux qui la
représentent ; cette fonction n’étant
pas identique à la masculinité et son
processus.
C’est grâce à cette vigilance, cette exigence
de respect mutuel, que la loi
interdit aux médecins nord-américains
d’imposer tout traitement médicamenteux
à leurs clients, sauf en cas
d’urgence et voilà que cela amène, en
comparaison avec l’Europe, à une
meilleure observance de la prise de
neuroleptiques de la part des patients
psychotiques.
Quand l’autorité ne peut plus être
confondue avec l’autoritarisme, l’autorité
ne peut plus être imposée. Elle est
décernée, accordée par celui qui se
reconnaît dans une réception filiale.
Filiation qui l’élève et non le rabaisse.
Etre fils symbolique (même pour la
fille) c’est être élevé et reconnu au titre
d’héritier et de représentant de ces
valeurs qui épanouissent.
La fonction paternelle cesse d’être référée
à la chefferie d’une horde primaire,
un patriarcat dévoyé dans l’omnipotence
du législateur absolu, transposition
grotesque des dérives d’un matriarcat
vorace et omniscient de ce qui est bon
pour l’autre.
Nos traditions auraient pu nous le laisser
entendre : se prendre pour dieu
c’est-à-dire « manger du fruit de l’arbre
de la connaissance du bien et du mal,
consacré à dieu », se prendre pour dieu,
c’est-à-dire s’autoproclamer omniscient
et omnipotent, loin de nous émanciper,
nous précipite dans une chute
légendaire.
Cette boursouflure du narcissisme engagerait
notre masculinité dans une course
effrénée vers un assouvissement
impossible et asservirait notre féminité.
Que peut-on apprendre d’une lecture
ouverte du récit du « péché originel » tel
que proposé par La Bible, Livre de la
Genèse chapitre 3 ?
Eve obéit d’emblée au Serpent plutôt
que d’écouter et différer une réponse,
éventuellement qu’elle ne sait pas.
Asservie à la bête à qui elle a délégué
son libre arbitre, abêtie par les promesses
d’en voir de belles, elle exécute
sans délai comme sous hypnose les
propos du séducteur, comme encodée
par le discours du tentateur qui, tel un
instinct, l’automatise. En conséquence
de quoi Adam, en l’imitant, est asservi
à un labeur infini qui l’épuise à en suer,
et Eve, rétrogradée de sa place d’interlocutrice
devient asservie à un époux
qu’elle idolâtre ou diabolise à tout
coup ! Une inimitié se détermine entre
Elle est le Serpent : alors qu’elle lui
écrase la tête, la bête lui blesse le pied !
En somme , elle obéit à ce ou à celui
qui lui casse les pieds. Vous vous reconnaissez
?
Peu de filles d’Eve se sont assujetties
mais cela a généré un grand bruit. Ces
femmes, vite occultées sont pourtant
les modèles archétypiques de l’émancipation.
Nos civilisations, victimes des
lectures univoques qui divisent et
excluent, prouvent encore aujourd’hui
comment le féminin est toujours diabolisé
dans une logique en miroir inversé
d’un masculin idolâtré. Traditionnellement,
le clivage persiste assignant
la féminité et le féminin aux sources
de tout mal. Le Mal et la Tentation
(mégalomaniaque) se trouvant d’un
seul coup miniaturisés au statut de zizi !
La masculinité confondue avec le masculin
se proposant alors comme rempart
moral ou, à l’inverse, comme écran
publicitaire d’une sexualité pervertie,
celle des fantasmes où tout partenaire
est ravalé au rang d’objet c’est-à-dire
convié à se taire.
Mais qu’est-ce que le féminin et le masculin
et comment les articuler ? C’est
ce sur quoi achoppent, sans doute, nos
interlocuteurs de patients et que nous
pouvons apprendre avec eux.
Le féminin semble en rapport avec
notre capacité d’écoute, de réception
voire d’entendement à ne pas
confondre avec obéissance servile ni
encore avec la maternité.
Le masculin est souvent associé à l’action,
au don et à la capacité de se relier
à autrui grâce à la parole donnée, une
parole fiable qui engage celui qui l’a
proférée à ne pas confondre avec la
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
parole du commandement qui engage
celui qui l’écoute voire l’abuse. Le
masculin est à distinguer de la fonction
paternelle qui introduit l’enfant
dans le social et la langue.
D’autres traditions viennent appuyer
ses concepts dont ceux du Yin et du
Yang taoïstes.
La Médecine Traditionnelle Chinoise
nous enseigne, encore, que l’organe
énergétique le plus Yin, en correspondance
avec l’Eau, est le Rein ; son méridien
commence sous la voûte plantaire,
à l’écoute de la Terre. L’organe
sensoriel associé au Rein est l’oreille :
« le Rein s’ouvre à l’oreille » qui est à
l’écoute du Ciel.
Le Yin a comme attribution l’accueil, la
réception, l’écoute. La chair lui est associée,
le Yin génère le Yang.
L’organe énergétique le plus Yang, le
Cœur, résidence de l’Esprit, est en correspondance
avec le Feu, il s’ouvre à la
parole, et son méridien passe par la
main.
Le Yang est corrélé à l’action, au mouvement,
au flux, à l’information, aux
langages, le Yang dynamise le Yin.
Dans la tradition taoïste, le rôle de l’humain
est d’incarner la médiation entre
le Ciel et la Terre c’est-à-dire de servir
de vase alchimique entre le Yin et le
Yang, l’Eau et le Feu. Ceci est rendu
possible par un troisième terme non
nommé mais potentiel comme le
centre du cercle dessinant le Tao qui
comme le moyeu d’une roue, de par
son existence vide, permet le mouvement
de la vie : la genèse du Yang par
le Yin et l’animation du Yin par le Yang
…etc.
Dans leur lecture dynamique de la vie,
même un calcul binaire, celui utilisant
le modèle mathématique Yin/Yang ne
conduit pas au clivage et à des interprétations
exclusives et haineuses car le
3 ème terme reste supposé et continue à
opérer en tant que clé de voûte du
système, même et justement grâce à
son absence.
Cet espace libre dans la clé de voûte de
nos existences et de nos psyché pourrait
se comparer à cette liberté qui nous
est offerte au-delà de nos déterminismes
et que nous obstruons volontiers,
consciemment ou non, derrière
des idéologies ou des idoles utilisées
comme délégués ou substituts. Dans
cette perspective, le féminin défini par
nos traditions serait lié au développement
humble d’une écoute à l’intérieur
de cette ouverture à l’amour chère aux
mystiques et la maternité serait la capacité
à désigner cet espace potentiel de
vie et de parole. Ainsi, nommer le Père
c’est-à-dire le mystère de la vie qui nous
transcende et nous relie dans la dignité
ne peut se réduire à nommer le géniteur
comme certaines psychologies le
proposent.
Alors, à défaut d’entrer dans un servage
profitant aux féodalités et leurs corporations,
s’assujettir consisterait plutôt
à participer à une filiation où les
traditions se lisent aux éclats comme
on rit. ■
Isabelle Delage
Psychiatre, anthropologue des religions
Bibliographie
La Genèse, La Bible, traduction à choisir.
BOGDANOV Igor et Grichka, Avant le Big
Bang, Grasset 2004.
LEGENDRE Pierre, L’inestimable objet de
la transmission, Fayard 1985.
BOTTÉRO Alain, Patients difficiles : la leçon
des échecs, Neuropsychiatrie : Tendances
et Débats n° 30 Juin 2007.
LEFEBVREPhilippe, La Vierge au Livre,
Cerf 2007.
KESPI Jean-Marc, L’homme et ses symboles
en médecine traditionnelle chinoise, Albin
Michel 2002.
OUAKNIN Marc-Alain, Tsimtsoum, Albin
Michel 1992.
NOVARINA Valère, Devant la parole,
P.O.L 1999.
NOVARINA Valère, Lumières du corps,
P.O.L 2006.

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
L
’altération du fonctionnement
social est une des caractéristiques
de la schizophrénie déjà décrite par
Kraepelin et Bleuler, et que l’on
retrouve dans les critères officiels du
DSM IV-R (1). Elle a fait l’objet de
nombreux travaux depuis les années
50, avec la découverte des neuroleptiques
conventionnels puis avec les
avancées de la psychopharmacologie
(2). Les connaissances actuelles permettent
de penser qu’elle est l’une
des expressions directes du processus
pathologique. Elle est ainsi associée à
des troubles cognitifs qui ont un rôle
particulièrement défavorable sur les
possibilités d’autonomie du sujet (3, 4).
En effet, un bon fonctionnement
cognitif est indispensable à l’acquisition
des aptitudes nécessaires aux
interactions sociales normales (5). Les
déficits cognitifs apparaissent même
comme le facteur prédictif le plus
constant des aspects de l’évolution
fonctionnelle (fonctionnement social,
aptitudes professionnelles, soins
personnels, autonomie) dans la schizophrénie
(3).
Les troubles cognitifs sont fréquents
et présents avant même parfois le
début de la maladie schizophrénique
(6). Ils persistent entre les épisodes
aigus, semblent assez stables au
cours de la vie (7), et conditionnent
pour une large part l’évolution du
patient (3, 4, 8). Ils consistent le plus souvent
en une altération des fonctions
exécutives, du raisonnement, de la
mémoire et de l’attention.
Malgré les progrès des traitements
pharmacologiques antipsychotiques,
les altérations du fonctionnement psychosocial
demeurent une source
majeure de handicap chez le sujet
schizophrène (9). Les neuroleptiques
classiques semblent agir peu sur les
symptômes cognitifs. Ils peuvent
même dégrader certaines fonctions
au travers de leurs effets tels que la
sédation et l’ataraxie (10). En revanche,
il semble que les traitements antipsychotiques
de seconde génération peuvent
améliorer ces fonctions, ce qui
pourrait conduire à une meilleure
autonomie sociale des patients (11).
Une méta-analyse comparant neuroleptiques
conventionnels (halopéridol,
fluphénazine) et antipsychotiques atypiques
(clozapine, rispéridone, zotépine,
ziprazidone) a été réalisée sur
12 études en ouvert et trois études
en double aveugle (4). Les études en
double aveugle ont montré une supé-
riorité des antipsychotiques atypiques
sur les processus attentionnels, les
fonctions exécutives et le repérage
visuo-spatial. Les études en ouvert ont
confirmé ces données bien que les
effets sur l’attention soient moins nets.
D’autres traitements pharmacologiques
éventuellement associés aux antipsychotiques
pourraient être prescrits afin
d’améliorer la cognition et constituent
donc une voie de recherche importante
(13).
La prise en charge des troubles de
l’adaptation sociale ne se limite pas
aux traitements pharmacologiques
mais associe également des mesures
incluant les prises en charge institutionnelles,
les mesures légales et des
techniques spécifiques de réadaptation.
Une importante question soulevée
par ces programmes de réhabilitation
sociale est d’identifier les
facteurs prédictifs du fonctionnement
psychosocial qui pourraient constituer
les cibles de l’intervention.
L’adaptation sociale et les troubles
cognitifs doivent donc être évalués de
manière précise au même titre que la
sémiologie psychiatrique classique tant
dans une dimension de recherche que
dans la pratique quotidienne (12).
Aujourd’hui, de nombreux outils de
recherche validés permettent l’évaluation
des troubles cognitifs. Cependant,
ces outils sont longs et fastidieux
et leur mise en œuvre difficile dans
la pratique quotidienne des cliniciens.
Deux enquêtes pharmaco-épidémiologiques
ont été réalisées chez des
patients psychotiques, suivis en CMP,
en centres hospitaliers ou dans d’autres
structures de soins (établissements
recensés en France dans le fichier
national TVF ® du groupe CEGEDIM).
Une première enquête a été réalisée
en 2002, chez des patients présentant
des troubles psychotiques et ayant
bénéficié récemment d’un traitement
par la rispéridone en monothérapie.
Son objectif était d’évaluer l’amélioration
clinique et des troubles cognitifs
(intéressant attention, mémoire et
fonctions exécutives) après 2 à 3 mois
L’Afssaps publie une mise à jour de son livret
« Médicaments et grossesse » en psychiatrie
L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) a mis
à jour son livret consacré aux médicaments utilisés dans les troubles psychiatriques
du guide « Médicaments et grossesse », y incluant les traitements
des dépendances et certains antidépresseurs.
Ce guide est un outil d’aide à la prescription qui a été mis à la disposition
des professionnels de santé fin 2005. Il comprend, actuellement, un livret infectiologie
et un livret psychiatrie. Les livrets se présentent sous forme de tableaux
indiquant par une graduation de couleur le niveau de risque de l’utilisation
de chaque médicament (de contre-indiqué en rouge à possible en
vert foncé), à chaque stade de la grossesse.
L’Afssaps a mis en ligne une mise à jour du livret psychiatrie, qui comprenait
jusqu’alors les hypnotiques, les anxiolytiques, les neuroleptiques et les
antiparkinsoniens anticholinergiques.
La nouvelle version inclut, notamment, les médicaments utilisés pour le traitement
de la dépendance alcoolique (acamprosate, disulfirame et éthanol),
seul l’acamprosate étant « envisageable » au cours de la grossesse, et ceux utilisés
dans le traitement de la dépendance aux opiacés (méthadone et naltrexone,
les données sur l’utilisation de la buprénorphine au cours de la grossesse
étant en cours d’évaluation).
Elle ajoute aussi les antidépresseurs imipraminiques, les antidépresseurs non
imipraminiques et non IMAO sauf les inhibiteurs sélectifs de la recapture de
la sérotonine (ISRS) et les inhibiteurs de la recapture de la sérotonine et de
la noradrénaline, qui sont en cours d’évaluation, et les antidépresseurs IMAO.
Les psychostimulants (adrafinil, méthylphénidate, modafinil, sulbutiamine)
sont également inclus, tous « déconseillés » ou « à éviter par prudence » pendant
toute la durée de la grossesse.
La prochaine mise à jour, qui devrait intervenir d’ici la fin de l’année, portera
sur les normothymique, dont le lithium et le valproate. ■
P.C.
http://afssaps.sante.fr/htm/10/grossess/livret_psy.pdf
Insertion sociale et autonomie
chez le patient psychotique :
résultats des enquêtes ACTet ISA
de traitement par la rispéridone, grâce
à l’utilisation d’un nouvel outil d’autoévaluation
simple et adapté à la pratique
quotidienne, reprenant les principales
dimensions cognitives
explorées en recherche : le questionnaire
ACT (Activités Cognitives Test).
Au travers de cette enquête dénommée
ACT, il s’agissait aussi de tester la
faisabilité de ce questionnaire auprès
d’un grand nombre de patients.
Deux ans plus tard, une seconde
enquête, ISA (Insertion Sociale et Autonomie),
a été menée chez des patients
présentant des troubles psychotiques
suivis en ambulatoire et ayant bénéficié
récemment d’un traitement antipsychotique.
L’objectif était d’évaluer
après 5 à 7 mois de traitement l’évolution
de certaines aptitudes cognitives
avec le questionnaire ACT ainsi que
l’amélioration de l’autonomie sociale
des patients au moyen de l’échelle
EAS (échelle d’autonomie sociale).
Dans les deux enquêtes le profil symptomatologique
des patients traités et
leur évolution, les différents traitements
psychotropes associés au traitement
antipsychotique et l’évolution
clinique des patients étaient décrits.
Elles n’imposaient pas de changement
dans la prise en charge médicale habituelle
des patients. Aucun dosage biologique,
ni exploration complémentaire
n’étaient requis par ces protocoles
et les cliniciens voyaient leurs patients
dans le cadre habituel de leur suivi.
Première mise en œuvre
du questionnaire ACT
Schéma général de l’enquête
ACT
Les patients inclus, âgés de plus de
18 ans, devaient satisfaire aux critères
de la CIM-10 pour les troubles psychotiques,
ne pas être hospitalisés
depuis plus de quinze jours ou être
suivis en CMP, centres hospitaliers ou
autres structures de soins. Ils devaient
avoir présenté une réactivation symptomatique
non liée à la prise récente
de toxiques et avoir, dans ce cadre,
nécessité l’instauration d’un traitement
par la rispéridone depuis moins de 15
jours. Les patients ayant reçu un traitement
neuroleptique conventionnel
à action prolongée dans les trois mois
précédant l’instauration de la rispéridone
ne pouvaient être inclus. Deux
évaluations étaient effectuées, lors de
l’instauration de la rispéridone orale
puis après deux à trois mois de traitement.
Les adaptations posologiques
de la rispéridone, initiée selon les
recommandations des caractéristiques
du produit, étaient laissées à l’appréciation
du médecin selon son habitude
clinique.
Les informations recueillies étaient les
suivantes : données socio-démographiques,
histoire des troubles psychotiques
; critères de diagnostic CIM-
10 ; traitements antipsychotiques
atypiques et/ou neuroleptiques
conventionnels en cours ; traitements
associés (psychotropes, traitements
correcteurs, mais aussi psychothérapie,
ateliers thérapeutiques…) ; observance
de la rispéridone ; impressions
cliniques globales (CGI) gravité et amélioration
; données issues du TIMA
(Texas Implementation of Medication
Algorithms), un algorithme conçu pour
rendre plus performante la gestion
des traitements médicamenteux prescrits
aux patients souffrant de schizophrénie
; données de l’auto-questionnaire
ACT.
Les outils d’évaluation
Avec les échelles CGI, donnant une
idée générale de l’état du patient et de
son amélioration, les paramètres analysés
étaient les suivants :
- CGI sévérité à la seconde consultation
(C2) et évolution entre la première
consultation (C1) et la seconde (C2),
- CGI amélioration à C2 et description
des répondeurs CGI (très fortement
ou fortement améliorés).
L’échelle TIMA est un outil d’évaluation
clinique, simple et de passation rapide,
proposé aux cliniciens dans le but
de se faire une opinion sur l’état clinique
du patient. Il permet d’évaluer la
réponse au traitement nouvellement
instauré et peut être utile pour ajuster
la dose du médicament en fonction de
la réponse observée. Cet outil est
constitué de 8 items reconnus sensibles
aux changements sous traitement médicamenteux.
Quatre critères positifs,
notés de 1 à 7, sont empruntés à la
Brief Psychiatric Rating Scale (BPRS).
Les quatre autres, notés de 1 à 6, sont
issus de la Negative Symptom Assessment
Scale et de la Scale for the Assessment
of Negative Symptoms (SANS) et
évaluent les symptômes négatifs. Les
scores positif et négatif sont tous deux
définis par la somme des quatre critères
respectifs.
Le TIMA intéressant le traitement de la
schizophrénie a été validé en accordant
une place de première intention
aux nouveaux antipsychotiques (15).
La réponse au traitement à l’aide des
scores TIMA est définie de la façon
suivante :
- si le score positif est inférieur ou égal
à 6 et le score négatif est inférieur ou
égal à 12 à C2, le patient est classé
comme « Répondeur » ;
- si le score positif est supérieur à 6 ou
le score négatif est supérieur à 12 à
C2 et que les % d’amélioration du
score positif et/ou du score négatif sont
supérieurs ou égaux à 20%, le patient
est classé comme « Partiellement Répondeur
» ;
- si le score positif est supérieur à 6 à
C2 ou le score négatif est supérieur à
12 à C2 et que les % d’amélioration du
score positif et du score négatif sont
inférieurs à 20%, le patient est classé
comme « Non Répondeur ».
Les patients lors de l’inclusion devaient
présenter un score au TIMA : > 12
points aux symptômes positifs et > 8
points aux symptômes négatifs. Les
paramètres analysés avec cet outil
étaient les suivants :
- score positif et négatif TIMA à C2 et
leur évolution entre C1 et C2,
- réponse au traitement à l’aide des
scores TIMA à C1 et C2.
L’Activités Cognitives Test (ACT), est
un auto-questionnaire centré sur les
fonctions cognitives et destiné au
patient. Cet outil a été élaboré par un
comité scientifique* pour l’enquête. Il
comporte 16 échelles visuelles analogiques
(EVA) regroupées en 8 situations
et une question à réponse fermée.
Les EVA explorent au travers de
situations habituelles de vie, l’intensité
de l’altération des fonctions cognitives
suivantes : attention (item 1 à 5),
mémoire (item 7), fonctions exécutives
(item 6 et 8) ainsi que, pour chaque
item, l’intensité du handicap dans la
vie quotidienne.
THÉRAPEUTIQUE ■ 15
LIVRES ET REVUES
Trop de gestion tue le social
Michel Chauvière
La Découverte, 21,50 €
Michel Chauvière est directeur de recherche
au CNRS, membre du CERSA,
CNRS/université Paris-II. Ses travaux
portent sur les politiques du social et
du familial et il est l’auteur de plusieurs
ouvrages, dont notamment Le
Travail social dans l’action publique.
Sociologie d’une qualification controversée
(Dunod, 2004), et il a codirigé
avec Jean-Michel Belorgey et Jacques
Ladsous Reconstruire l’action sociale
(Dunod, 2006).
A travers l’analyse du nouveau lexique
largement inspiré de l’entreprise qui
s’est imposé dans le secteur social
(services à la personne, accès aux
droits, démarche qualité, privilège de
l’usager, etc.), il montre que celui-ci
est aujourd’hui profondément dénaturé
par un processus de « chalandisation
» qui formate les consciences,
sape les fondamentaux de l’action et
prépare à plus de privatisation des
services et d’autonomie de la gestion.
Mais pour Michel Chauvière rien n’est
définitivement joué.
Les affections de longue
durée
Actualité et dossier en santé
publique 2007 n°59,
La Documentation Française,
13,80 €
Ce dossier spécial sur les ALD montre
que le dispositif ALD est un dispositif
complexe qui a évolué au fil des
aménagements réglementaires successifs.
Un historique des différentes
évolutions donne les clés pour comprendre
comment le dispositif a tenté
de s’adapter aux évolutions scientifiques
et sociétales. La réforme de
l’assurance maladie de 2004 représente
la dernière étape de ces transformations,
et la Cnamts et la Haute
Autorité de santé, principaux acteurs
de cette réforme, expliquent leur rôle
respectif et font le point sur les premiers
résultats.
Aujourd’hui, le poids épidémiologique
et économique des ALD est devenu
très important et il convient, dans une
logique de rationalisation des dépenses,
de l’appréhender au regard
de l’ensemble des dépenses de santé.
Le développement de la prise en
charge à 100% comme garant d’une
prise en charge de qualité, doit amener
à rapprocher le dispositif ALD des
autres outils d’amélioration de la qualité
des soins et à s’interroger sur leur
efficacité réciproque.
Les interrogations paraissent nombreuses
: le système actuel répond-il
toujours aux attentes des patients,
des professionnels, de la collectivité ?
Et, faut-il réfléchir à des voies d’aménagement
? Ces questions touchent
l’ensemble des acteurs de la santé.
Des représentants des patients et des
assurances maladies complémentaires,
directement concernés par
toute évolution du dispositif ALD,
donnent leur avis.
Un éclairage complémentaire venu
d’exemples étrangers aide à imaginer
d’autres dispositifs et à avoir une
approche plus large que celle des
seules ALD. Nous sommes, en effet,
passés, en soixante ans, de 4 pathologies
longues et coûteuses, qui étaient
soignées, à plus de 20 millions de
personnes atteintes d’une maladie
chronique.
Le plan « Améliorer la qualité de vie
des personnes atteintes de maladies
chroniques », récemment présenté par
le ministre de la Santé et des Solidarités,
constitue la première étape de
cette évolution.

16
LIVRES
■ THÉRAPEUTIQUE
Expertise psychiatrique
pénale
Pour la Recherche 2007 n°53
Bulletin de la Fédération Française
de Psychiatrie
Eclairant classiquement le juge sur la
responsabilité pénale la punissabilité
et la dangerosité psychiatrique des
personnes dans le cadre des procédures
judiciaires, l’expert a vu, dans
les conditions d’exercice difficiles qui
sont les siennes, un élargissement de
ses missions à l’évaluation de la dangerosité
criminologique et à l’examen
des victimes.
Une audition publique s’est tenue les
25 et 26 janvier à Paris centrée sur
l’abord des problématiques concernant
la formation, le recrutement, les
conditions et perspectives d’exercice
qui relèvent d’une implication partagée
de la santé et de la justice. La
question portant sur la responsabilité
pénale des personnes présentant
des troubles psychiatriques a été au
centre des préoccupations.
La commission qui s’est réunie, à l’issue
de cette Audition Publique, a
publié un rapport et a établi des
recommandations autour de cinq
questions majeures qui sont présentées
dans ce numéro.
http://psydoc-fr.broca.inserm.fr
Comment peut-on être
sourd ?
Numéro coordonné par Cyril
Courtin
Presses Universitaires de France,
22 €
Il y a de nombreux exemples de plasticité
cérébrale compensatoire.
L’un, particulièrement spectaculaire,
concerne le cortex auditif de nouveaux
sourds qui se met à répondre
aux mouvements des lèvres, et, dans
le cas de langage signé, aux mouvements
des doigts. De même pour
le cortex visuel d’aveugles qui, faute
de traiter des stimuli visuels, se met
à traiter le toucher en Braille.
Dans les cas des enfants sourds, il ne
s’agit pas que s’opère la plasticité cérébrale
et les compensations, mais
au contraire que soit encouragé le
développement d’une fonction. Si l’on
prend l’exemple de l’implantation cochléaire
précoce, elle s’accompagne
chez certains spécialistes d’un choix
pour un entraînement exclusivement
auditif, tandis que d’autres privilégient
une approche intermodale du
langage. Les uns cherchent à préserver
une place au cortex auditif ;
les autres, aux connections audiovisuelles
qui permettent d’associer l’oral
et l’écrit. Hors solution d’implants,
quand on n’a que les yeux et le toucher
pour parler, quelle est la meilleure
voie ? Il n’y a pas, actuellement, de
bonne réponse unanime à cette question.
Le message de ce numéro thématique
est qu’il faut favoriser les connections
intermodales. Les enfants sourds
sont souvent confrontés dans leur
enseignement à un problème de bilinguisme,
représenté par la confrontation
entre la langue française des
signes et la langue française. Le problème
est souvent mal identifié. Et,
lorsqu’il l’est, il s’accompagne rarement
d’un intérêt pour la question
du biculturalisme. Ce numéro contribue
à identifier les problèmes de développement
cognitif qui en découlent
et les solutions accessibles. Un
autre message concerne le rôle d’un
accès continu à un langage natif pour
développer la cognition sociale et la
métareprésentation.
L’utilisation des EVA permet l’attribution
d’un score de 1 à 10 pour
chaque item exploré et offre la possibilité
de calculer des sous-scores par
item ainsi qu’un score total (moyenne
des items 1 à 8 à condition que 4 items
sur 8 soient renseignés). La dernière
question permet d’identifier la situation
handicapant principalement le
patient de son point de vue.
Les paramètres analysés avec cet outil
étaient les suivants :
- auto questionnaire ACT à C2 et évolution
entre C1 et C2 (item par item et
scores calculés).
Le critère principal d’évaluation était
l’évolution des scores à l’échelle ACT.
Les critères secondaires étaient l’évolution
du score sévérité de la CGI ainsi
que le score amélioration et l’évolution
des scores du TIMA.
Analyse statistique
La description de la population a été
faite grâce aux données socio-démographiques,
et l’histoire des troubles
psychotiques. Ont été également analysés
les motifs de la consultation, la
prise en charge hors chimiothérapie,
les modalités d’instauration de la rispéridone,
les sorties prématurées et
arrêt de la rispéridone à la visite 2, la
posologie de la rispéridone et l’observance,
et les traitements associés.
Ont été calculés pour les variables
quantitatives : effectif, médiane,
moyenne, écart-type, minimum et
maximum. Pour les variables qualitatives,
l’effectif et le pourcentage de
chacune des modalités ont été considérés.
L’évolution des paramètres
quantitatifs a été testée par le test de
Student sur séries appariées ou le test
de Wilcoxon sur séries non appariées.
Le lien entre la réponse CGI (deux
classes) et l’évolution des paramètres
est testé par le test du Chi-2 pour les
variables qualitatives et le test de Student
pour les variables quantitatives.
Le seuil de significativité des tests est
fixé à 5%.
Résultats de l’enquête
ACT
Population analysée
Les informations recueillies concernent
un total de 1024 patients. Parmi
ces patients, l’analyse statistique porte
sur 763 patients qui ont effectué les
deux visites, étaient toujours sous rispéridone
lors de la seconde visite et
pour lesquels le délai entre les deux
visites était au moins égal à 8
semaines de traitement.
Les patients sont âgés de 36,8 ± 13,7
ans. Ce sont majoritairement des
hommes (58,7%). Ils n’ont pas de
conjoint pour plus des trois quarts
d’entre eux.
Un tiers (34,6%) vivent seuls de
manière autonome, et un tiers
(30,5%) sont hébergés par la famille.
Alors que 63,8% ne travaillent pas,
20,6% ont une activité professionnelle
hors milieu protégé.
En moyenne, la maladie est diagnostiquée
depuis moins de 10 ans (9,4
ans). L’ancienneté est en adéquation
avec la première hospitalisation (9
ans). Parmi ces patients, 29,7% ont
des antécédents de tentative de suicide,
ce qui témoigne de la gravité de
la maladie. Le diagnostic le plus fréquent
est la schizophrénie (diagnostic
retrouvé chez 67,3% des sujets),
avec une prédominance de schizophrénie
paranoïde.
Les patients inclus dans l’enquête sont
principalement des patients vus au
CMP (70,8%), 12% étant suivis en
hôpital de jour. Les patients consultent
régulièrement pour 83,9% d’entre
eux, ce chiffre reflétant la population
de secteur ; les psychothérapies associées
concernant un peu plus d’un
tiers des patients (Tableau 1).
Tableau 1 : Prise en charge hors
chimiothérapie (n= 1024)
Consultation régulière 83,9%
Psychothérapie individuelle
Activités ou
19,1%
groupes thérapeutiques
Hospitalisation de jour
14,5%
régulière 9,3%
Hospitalisation temps plein 8,4%
Psychothérapie familiale 3,5%
CAT 2,3%
Autres 0,4%
Pour presque la moitié des patients,
une réactivation délirante ou hallucinatoire
a été le motif de la consultation
(48,1%) (Tableau 2). La mauvaise
tolérance du traitement en cours n’est
un motif de consultation que pour
3,7% des patients.
Tableau 2 : Motif de la consultation
(n=945)
Réactivation délirante
ou hallucinatoire 48,1%
Recrudescence de troubles
du comportement 27,8%
Augmentation de
symptômes positifs 21,8%
Manifestations dépressives 18,5%
Sur le plan chimiothérapeutique, seuls
14,1% des patients ont déjà été traités
antérieurement par rispéridone. La
rispéridone a été instaurée en remplacement
d’un traitement chez plus des
trois cinquièmes des patients (65,9%),
ce qui reflète la population de patients
suivis depuis longtemps et pour lesquels
se pose l’indication d’un changement
thérapeutique. Les traitements
remplacés sont principalement l’halopéridol
(31,7%), l’olanzapine (21,5%)
et l’amisulpride (19,2%). Pour 657
patients, la rispéridone substitue un traitement,
pour 17 patients 2 traitements,
et pour un patient 1 traitement. La
monothérapie antipsychotique devient
donc davantage la règle selon les
recommandations en vigueur.
Dans 44,5% des cas, le traitement est
substitué par la rispéridone en raison
d’un manque d’efficacité du traitement
précédent. Dans 22,2% des cas, il s’agit
d’une mauvaise observance. Les raisons
de la mauvaise observance ne
sont pas détaillées (liées à la maladie ou
aux effets secondaires des traitements
?). La mauvaise observance responsable
d’un nombre important de
rechutes est un des défis majeurs pour
le psychiatre clinicien qui opte donc
souvent comme on le voit dans cette
étude, pour un changement de molécule
plutôt que pour la reconduction
ou l’augmentation du traitement antérieurement
prescrit.
A C2 (la deuxième visite), 90,9% des
patients ont toujours leur traitement
en cours par la rispéridone. La posologie
moyenne, de 5,5 mg/j, varie peu
entre les deux visites. L’observance est
bonne pour 88,4% des patients.
Parmi les 11,1% des patients sortis prématurément,
87,7% ont été perdus de
vue mais ont reçu le traitement pendant
5 semaines environ. Lors de l’arrêt
prématuré de la rispéridone, c’est
essentiellement l’halopéridol (31%),
l’olanzapine (24,1%) et l’amisulpride
(19,3%) qui ont été prescrits en relais.
Les neuroleptiques à visée sédative
prescrits concernent essentiellement la
cyamémazine (fig. 1). Leurs posologies
diminuent après deux à trois mois de
traitement par la rispéridone. Les coprescriptions
de psychotropes (hors
neuroleptiques) sont détaillées dans la
figure suivante (fig. 2) et concernent
75,3% des patients à C1 et 68,8% des
patients à C2.
On peut constater que les benzodiazépines
diminuent considérablement
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Figure 1 : Principaux traitements neuroleptiques à visée sédative co-prescrits
Théralène
Nozinan
Tercian
Effectifs
Divers
Hypnotiques
Antiparkinsoniens
Thymorégulateurs
Antidépresseurs
Benzodiazépines
Patients
Nb de
patients
Score
négatif
Score
positif
% de patients
15
0 50 100 150 200
Figure 2 : principaux traitements psychotropes co-prescrits
2,1%
2,7%
27
33
7,4%
8,2%
11,6%
11,0%
11,9%
12,5%
26,6%
27,3%
0% 10% 20% 30% 40% 50%
Figure 3 : Scores CGI à C1 et C2
0 1 2 3 4 5 6
80
70
60
50
40
30
20
10
0
Figure 4 : Scores TIMA
9,36
37,3%
14,10
0 5 10 15 20
130
Figure 5 : Réponse au traitement TIMA
13,30%
après 2 à 3 mois de traitement par la
rispéridone.
Description de l’évolution clinique et
des troubles cognitifs des patients
Lors de l’instauration de la rispéridone,
79,1% des patients ont un score
68,70%
18,00%
C2
C1
157
C2
C1
Non répondeur Partiellement Répondeur
répondeur
C2
C1
C2
C1
48,7%
CGI supérieur ou égal à 4 (« pas de
changement » à « très fortement aggravé
»). Après 2 à 3 mois de traitement
seuls 32,3% des patients ont ce même
score (fig. 3). Selon les cliniciens, 55,3
% des patients sont fortement à très
fortement améliorés (scores 1 à 2).
De même, les scores à l’échelle TIMA

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Total
Fonctions
exécutives
Mémoire
Attention
Figure 6 : Scores ACT
3,84
3,83
3,76
4,06
4,42
5,00
4,99
5,13
0 1 2 3 4 5 6
Non répondeurs
Répondeurs
-9,20
Figure 7 : Evolution des scores TIMA/CGI
-6,20
-4,30
-3,10
-10,00 -8,00 -6,00 -4,00 -2,00 0,00
Evolution des scores entre C1 et C2
Non répondeurs
Répondeurs
-1,80
Score
négatif
Score
positif
-2,00 -1,50 -1,00 -0,50 0,00 Scores
Divers
Hypnotiques
Antiparkinsoniens
Thymorégulateurs
Antidépresseurs
Benzodiazépines
Patients
Nb de
patients
200
100
-1,50
Figure 8 : Evolution des scores ACT/CGI
-1,20
-0,70
-0,60
Figure 9 : Traitements psychotropes co-prescrits
7,3%
5,5%
6,1%
9,2%
11,0%
11,3%
11,5%
10,9%
-0,80
-0,70
-0,40
23,5%
C2
C1
29,4%
Total
C2
C1
Fonctions
exécutives
Mémoire
Attention
se sont améliorés de manière très significative
(p

18
LIVRES
■ THÉRAPEUTIQUE
Ruralité et Précarité
Rhizome 2007 n°28
Bulletin national santé mentale et
précarité
Ce dossier fait prendre conscience
des bouleversements économiques
et culturels advenus aux paysans, surtout
aux petits exploitants devenus
minoritaires sur leur terre, tandis que
les femmes semblent avoir plus de
plasticité pour le changement. En réalité,
la ruralité n’est plus identifiable
au monde agricole : on parle désormais,
d’une « néo-ruralité » qui a transformé
la donne par l’arrivée de nouveaux
habitants d’origine citadine,
aux sociologies très diverses ; on parle
également des « rurbains », à l’interstice
des villes et des campagnes.
Comme les paysans, nombre de néoruraux
sont touchés par un mal communément
réparti, l’isolement en
contexte de précarité, mais avec les
particularités propres du rural : non
pas un retrait malgré la proximité,
comme en ville, mais un isolement
exacerbé par les distances.
Le moyen de locomotion privé y apparaît
aussi important qu’un logement,
sinon c’est l’impossibilité d’accéder
aux services publics et privés.
En matière de relation d’aide sociale
et psychique, on lira l’importance cruciale
des visites à domicile, des équipes
mobiles, pour des pathologies qui ne
sont pas si différentes qu’en ville, mais
là encore avec des particularités.
Selon tous les témoignages, les troubles
du couple et de la conjugalité apparaissent
particulièrement graves, car
la précarisation et le grand isolement
en sont la suite logique.
On verra que ce numéro n’est pas directement
clinique, car il fallait d’abord
situer le cadre où une problématique
de santé mentale se pose ; d’ailleurs,
même les textes émanant de cliniciens
sont contextualisés.
RHIZOME est téléchargeable sur le Web :
www.orspere.fr
Les nouvelles solitudes
Marie-France Hirigoyen
La Découverte, 17 €
Psychiatre, psychanalyste et victimologue,
Marie-France Hirigoyen s’est
spécialisée dans l’étude de toutes les
formes de violences. Elle est l’auteur
de plusieurs livres : Le Harcèlement
moral (Syros, 1998), Malaise dans le
travail (Syros, 2001) et Femmes sous
emprise. Les ressorts de la violence
dans le couple (Oh! Editions, 2005).
Alors que les interactions entre individus
sont permanentes, voire envahissantes,
de nombreuses personnes
éprouvent un sentiment douloureux
d’isolement. En même temps, beaucoup
d’autres font le choix de vivre
seules. Marie-France Hirigoyen montre
que cette réalité est le fruit d’une mutation
profonde des rapports hommes/
femmes, encore inaboutie.
Si les femmes ont obtenu une autonomie
nouvelle, dans le travail comme
dans la sexualité, cette indépendance
n’a pas été pleinement intégrée dans
les mentalités. D’où une crise des
rôles masculins et féminins et une
précarisation des liens : un mariage
sur deux se termine par une rupture,
surtout à l’initiative des femmes. On
constate un durcissement des relations
dans le couple, reflet aussi du
durcissement du monde du travail.
Les périodes de solitude et d’abstinence
sexuelle, souvent durables,
conduisent à un recours accru aux
sites de rencontres sur Internet ou
aux « nouvelles thérapies », qui se révèlent
le plus souvent illusoires. Alors
que la solitude peut apporter énergie
et inspiration : à tout âge, la solitude
choisie, tout en restant disponible
à l’autre, est une source de
plénitude, un moyen de sortir de la
superficialité d’une société dominée
par le narcissisme et le culte de la
performance.
vers de l’enquête ACT auprès de
1000 patients. Ce premier travail a
conduit à une nouvelle formulation de
certains items du questionnaire. Le
questionnaire comporte toujours 16
échelles analogiques regroupées en 8
situations et une question à réponse
fermée. Les EVA évaluent, notamment
au travers de situations habituelles de
vie, l’intensité de l’altération des fonctions
cognitives suivantes :
- attention : items 1, 2, 8 ;
- mémoire : items 4, 6 ;
- fonctions exécutives : items 3, 5, 7.
L’évaluation de l’intensité des différentes
dimensions cognitives est mesurée
au moyen de l’EVA.
L’échelle d’Autonomie Sociale (EAS)
Elle a été conçue pour mesurer un
niveau d’autonomie effectif, proposer
une définition concrète de l’autonomie
et explorer des domaines précis à
travers 17 items. Ces items cotés de 0
à 6, apprécient comment un sujet placé
devant une situation concrète de la vie
quotidienne, parvient à y faire face seul,
à rentrer en contact avec autrui, à tenir
un rôle social. Ils sont regroupés en 5
sous-ensembles : soins personnels, gestion
de la vie quotidienne, gestion des
ressources, relations avec l’extérieur,
vie affective et relations sociales (24).
Les sous-scores des items cognitifs de
l’échelle PANSS
La PANSS (Positive And Negative Syndrom
Scale) est une échelle d’hétéro
évaluation, largement utilisée pour étudier
le profil psychopathologique des
patients schizophrènes en phase aiguë
et chronique (25). Elle permet de calculer
les scores de trois dimensions syndromiques
: positive, négative et de
psychopathologie générale. Elle est particulièrement
indiquée pour déterminer
le profil psychopathologique,
rechercher des éléments pronostiques
d’une évolution, notamment cognitifs,
et évaluer les efficacités respectives de
diverses stratégies thérapeutiques. Pour
cette étude, trois items principaux de la
PANSS explorant essentiellement les
troubles cognitifs ont été retenus : difficulté
d’abstraction (N5), désorientation
(G10) et manque d’attention
(G11).
Les critères principaux d’évaluation
étaient l’évolution des items cognitifs
de la PANSS et du score de l’échelle
EAS.
Les critères secondaires étaient l’évolution
du score à l’EVA du questionnaire
ACT, l’évolution du score sévérité
de la CGI, le score amélioration de la
CGI, et l’évolution des scores du TIMA.
L’analyse statistique
Le principe de l’analyse statistique a
été décrit précédemment pour l’enquête
ACT.
Résultats
Parmi les 334 patients retenus, 219
patients ont été inclus dans l’analyse
statistique
Les patients sont âgés en moyenne de
37 ± 12,5 ans, sont majoritairement
des hommes (55%) et n’ont pas de
conjoint pour plus de trois quarts
d’entre eux comme dans l’étude ACT.
Une majorité vit de manière autonome,
soit seule (39,5%), soit en famille
ou en couple (24,7%). Parmi les
patients rencontrés, 17,8% ont une
activité professionnelle hors milieu protégé
alors que 69,6% ne travaillent pas.
En moyenne, les troubles psychotiques
ont été diagnostiqués depuis moins de
10 ans, l’ancienneté est en adéquation
avec la première hospitalisation. Le premier
traitement antipsychotique a donc
été débuté d’après les résultats de l’enquête,
peu de temps après les premiers
symptômes.
Sur le plan clinique, 65,6% des patients
sont schizophrènes et parmi eux 65%
des patients présentent une forme paranoïde
de la schizophrénie. Ces pourcentages
reflètent la population habituelle
de patients de secteur.
La plupart des patients ont été inclus
au cours d’une consultation au CMP
(70,8%) et pour 96,1% un rythme
régulier de consultation est instauré. Il
est donc intéressant de noter que la
consultation d’inclusion est la consultation
habituelle du patient dans
24,2% des cas. Pour près de 40% des
patients, c’est une réactivation délirante
ou hallucinatoire qui est le motif
de la consultation (tableau 4).
Tableau 4 : circonstances de la
consultation (N=331)
Plusieurs réponses possibles
Réactivation
délirante ou
hallucinatoire
Troubles du
132 39,9%
comportement
Augmentation de
33 10%
symptômes positifs
Manifestions
56 16,9%
dépressives
Autres motifs de
46 13,9%
consultation
Evénements de vie
80 24,2%
traumatisants 12 3,6%
Les patients bénéficient fréquemment
d’autres prises en charge non chimiothérapiques
(tableau 5). Près de la moitié
sont pris en charge soit en hôpital de
jour, soit en CATTP, ce qui est à mettre
en relation avec le pourcentage important
de patients qui ne travaillent pas
(69,6%).
Tableau 5 : prises en charge hors
chimiothérapie (N=332)
Plusieurs réponses possibles
Consultation
régulière
Psychothérapie
319 96,1%
individuelle
Activités ou groupes
122 36,7%
thérapeutiques
Hospitalisation de
96 28,9%
jour régulière 55 16,6%
Autre prise en charge
Psychothérapie
50 15,1%
familiale 10 3%
CAT 5 1,5%
Concernant le traitement prescrit
Le nouveau traitement antipsychotique
instauré est la rispéridone pour
91,8% des patients. Il vient remplacer
un autre traitement antipsychotique
dans 69,1% des cas ; ce qui est
logique lorsqu’on considère la population
de patients inclus : suivis depuis
une dizaine d’années, actuellement
pris en charge en ambulatoire, soit en
CMP soit en hôpital de jour. Les traitements
substitués sont analogues à
ceux de l’étude ACT : l’halopéridol
(28,1%), l’olanzapine (25,2%) ou
l’amisulpride (16,7%). Dans 49% des
cas, le traitement est substitué par
manque d’efficacité du traitement précédent,
dans 28,1% des cas du fait
d’une mauvaise tolérance, et dans
20,9% des cas du fait d’une mauvaise
observance. Dans la majorité des cas,
la rispéridone substitue un seul traitement.
Quatre vingt cinq pour cent des
patients ont le même traitement en
cours lors de la seconde visite soit 5 à
7 mois après. Parmi les patients sortis
prématurément, plus de la moitié ont
été perdus de vue. Lors de l’arrêt prématuré
de la rispéridone, là encore
comme dans l’étude précédente, ce
sont essentiellement l’amisulpride, l’halopéridol
ou l’olanzapine qui sont prescrits
en relais. La posologie moyenne
de la rispéridone est de 5,2 ± 2,9
mg/j, posologie peu modifiée après 5
à 7 mois de traitement (augmentation
% de patients
60
50
40
30
20
10
0
Difficulté
d’abstraction
Manque
d’attention
Désorientation
Scores
Total
Fonctions Fonction
exécutives s
exécutive
s
Mémoire
Mémoire
Attention
Attention
Scores
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
Figure 11 : Réponse au traitement TIMA
18,8%
50,2%
30,9%
Non répondeur Partiellement Répondeur
répondeur
Figure 12 : Scores PANSS
1,4
2,1
0 1 2 3 4 5
2,7
Figure 13 : Scores ACT
3,3
3,7
4,42
0 1 2 3 4 5 6
Total
Vie affective et relations
sociales
Relations avec l’extérieur
Gestion des ressources
Gestion de la vie
quotidienne
Soins personnels
Scores
Figure 14 : Scores EAS
8,2
10,2
7,2
9,5
8,9
10,4
7,3
8,7
4,4
5,6
moyenne de 0,3 mg/j). L’observance
est jugée bonne à excellente chez
83,4% des patients.
Parmi les traitements neuroleptiques
associés à visée sédative, la cyamémazine
est majoritairement représentée
(68,8%), souvent pour des troubles
du sommeil récurrents, ce qui est un
bon reflet de la pratique usuelle. Ce
traitement est maintenu pour près de
la moitié des patients à la seconde
visite, mais avec une diminution de
la posologie.
Les co-prescriptions de psychotropes
hors neuroleptiques concernent
62,9% des patients à la première visite
et 58,6% des patients à la seconde
visite (fig. 9). Parmi ces co-prescriptions,
seule celle des antidépresseurs
augmente, mais de façon modérée.
3,8
4,8
4,7
36,0
4,8
5,0
5,0
4,2
5,4
5,3
44,4
0 10 20 30 40 50
C2
C1
C2
C1
C2
C1
Concernant l’évolution globale des
patients, 49,5% des patients sont fortement
à très fortement améliorés
comme en témoigne les scores CGI.
Ainsi, 70,3% des patients avaient un
score supérieur ou égal à 4 lors de la
première visite, contre 38,7% lors de
la seconde évaluation (fig. 10).
Les scores à l ‘échelle TIMA sont améliorés
de façon très significative
(p< 0,0001) entre les deux visites.
Pour 81,1% des patients, le traitement
devrait être poursuivi ; sans réévaluation
de la posologie pour 38,1%
d’entre eux (fig. 11).
Evolution des troubles cognitifs, de
l’insertion sociale et de l’autonomie
Les symptômes cognitifs s’améliorent
après 5 à 7 mois de traitement comme

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
en témoignent les scores PANSS et les
scores ACT (fig. 12 et 13).
A l’auto questionnaire ACT, les scores
« attention » et « fonctions exécutives »
s’améliorent de manière significative
(p

20
ANNONCES EN BREF
6 et 7 décembre 2007. Dax. 10 èmes
Journées de Psychiatrie de Dax organisées
par l’Association pour la Recherche
et l’Etude en Psychiatrie Publique,
le Centre Hospitalier de Dax-Côte
d’Argent avec la collaboration de la Société
Portugaise pour l’Etude de la Santé
Mentale, l’Association SOFOR et les Editions
Erès sur le thème : Autour de la notion
de politique en psychiatrie. Renseignements
et inscriptions : Centre de
Santé Mentale, 1 rue Labadie, BP 323,
40107 Dax. Tél. : 05 58 91 48 38 /46 26.
Fax : 05 58 91 46 84. E-mail : CRIA-
DOC@ch-dax.fr. E-mail : DARTIGUE-
LONGUEC@ch-dax.fr
7 décembre 2007. Lille. 2 ème Journée
nationale organisée par l’Association
Nationale pour la Promotion des Soins
Somatiques en Santé Mentale sur le
thème : Douleur et Santé Mentale. Douleur
morale, douleur psyhique : quelle(s)
évaluation(s) ? Renseignements et inscriptions
: COMM Santé, BP 33, 33360
latresne-Bordeaux. Tél. : 05 57 97 19 19.
Fax : 05 57 97 19 15. Audrey Morisset.
audrey.morisset@comm-sante.com
7 et 8 décembre 2007. Paris. Colloque
organisé par le Centre d’Etude de la
Famille (CEFA) sur le thème : Le psy et le
social : quelle place pour le psy dans les
problématiques à dominante sociale ?
Inscriptions : CEFA, 95 bd Saint-Michel,
75005 Paris. www.cefa.asso.fr
7 et 8 décembre 2007. Paris. Colloque
GYPSY VII sur le thème : Familles bousculées,
inventées, magnifiées... Inscriptions
: JS Congrès, 39-41 rue Louis Blanc,
92038 Paris La Défense. Tél. :
01 43 34 76 71. Fax : 01 47 17 68 60.
E-mail : jscongres@wanadoo.fr. Site :
www.jpecho.com
8 décembre 2007. Lyon. Journée d’étude
clinique organisée par l’Association Européenne
Nicolas Abraham et Maria
Torok sur le thème : La souffrance psychique
dans le deuil. Transmission des traumatismes
et du risque de suicide dans la
famille. Renseignements : Association
Transition. Tél. : 01 43 59 18 34. E-mail :
assoc.abraham.torok@orange.fr
8 décembre 2007. Paris. Colloque organisé
par l’Association Française de
Psychiatrie sur le thème : Handicaps -
scolarisation - intégration - égalité des
chances. De la Roche Tarpéienne à la loi
de 2005, les Maisons du Handicap, etc.
Renseignements et inscriptions : AFP, 6
passage Abel Leblanc, 75012 Paris. Tél. :
01 42 71 41 11. Fax : 01 42 71 36 60.
www.psychiatrie-francaise.com
8 et 9 décembre 2007. Lille. Rencontres
organisées par le SIPE (Société Internationale
de Psychopathologie, de l’Expression
et d’art-thérapie) et Puzzle
(association régionale d’art-thérapie
Nord/Pas de Calais sur le thème : La violence
en art-thérapie. Formes, expressions
et enjeux. Inscriptions : Puzzle, 37 rue
du Dr Dewyn, BP 50215, 59334 Tourcoing
Cedex. E-mail : art-therapiepuzzle@wanadoo.fr
11 décembre 2007. Paris. Séminaire du
CTNERHI sur le thème : Les diverses forme
d’habitat regroupé avec ou sans statutmédico-social
pour personnes handicapées
ou âgées. Inscriptions : CTNERHI, Régine
Martinez, 236 bis rue de Tolbiac, 75013
Paris. Tél. : 01 45 65 59 40. Fax :
01 45 65 44 94. E-mail : r.martinez@
ctnerhi.com. Site : www.ctnerhi.com.fr
13 au 15 décembre 2007. Strasbourg.
Second Meeting of West European Societies
of Biological Psychiatry. Secrétariat
: Medicongress, Kloosterstraat 5,
B-9960 Assenede. Contact person : Mrs
Els Vertriest. E-mail : els@medicongress.com.
Site : www.medicongress.com.
Tél. : +32 (0)9 344 39 59. Fax :
+32 (0)9 344 40 10.
14 et 15 décembre 2007. Paris. 35 èmes
Journées Nationales Scientifiques de
Thérapie Comportementale et Cognitive.
Renseignements et isncriptions :
AFTCC, 100 r. de la Santé, 75674 Paris
Cedex 14. Tél. : 01 45 88 35 28. E-mail :
aftcc@wanadoo.fr. Site : www.aftcc.org
15 décembre 2007. Paris. Matinée de
la Société de Gynécologie et Obstétrique
Psychosomatique sur le thème : Où en
est la psychosomatique aujourd’hui ? Inscriptions
: Tél. : 01 46 42 11 30. E-mail :
helene.jacquemin@santesurf.com
15 décembre 2007. Boulogne Billancourt.
Colloque International organisé
par le Collège International de l’Adolescence
et le Laboratoire de Psychologie
Clinique et de Psychopathologie
(Paris Descartes) sur le thème : Délinquance
à l’adolescence : état des lieux.
Renseignements et inscriptions. Tél. :
01 55 20 58 22 (mardi, mercredi, jeudi
après-midi). Site : www.colloquecila.org
26 décembre 2007. Lyon. Colloque Enfances
& Psy sur le thème : L’animal et
l’enfant. Rencontre, médiation ou thérapie.
Renseignements et inscriptions. Tél. :
08 71 57 99 94 (boîte vocale). E-mail :
colloques@enfancesetpsy.net (en précisant
Lyn).
12 janvier 2008. Saint-Etienne du Rouvray.
Journée de la SEPEA sur le thème :
Psychothérapie de l’adolescent. Renseignements
: Yves Le Guellec, 8 rue Emie-
Duployé, 76000 Rouen.
19 janvier 2008. Paris. Colloque du
Groupe d’Etudes C.G. Jung sur le thème :
Carl Gustav Jung et l’imaginaire. Renseignements
: Tél. : 06 85 29 35 45. Email
: groupe-jung@jung.asso.fr
19 et 20 janvier 2008. Paris. Colloque
de la Société de Thérapie Familiale
Psychanalytique d’Ile-de-France sur le
thème : Violences conjugales, violences
familiales. Renseignements et inscriptions
: Société de Thérapie Familiale
Psychanalytique d’Ile-de-France, 7
rue Ernest Cresson, 75014 Paris. Tél. :
01 74 71 71 66. E-mail : stfp.if@laposte.ney
20 janvier 2008. Paris. Journée d’Etude
organisée par le GIREP sur le thème :
Ces peurs qui nous habitent. Imaginaire de
la peur et peurs imaginaires. Renseignements
: GIREP. Tél. : 01 42 22 75 14.
25 janvier 2008. Paris. XXV èmes Journées
Nationales de l’Association Française
de Psychiatrie et 5 e Colloque International
de Psychodynamique et
Psychopathologie du Travail sur le
thème : Clinique du Travail et psychiatrie,
organisé conjointement par la Chaire
Psychanalyse-Santé-Travail du CNAM
(Christophe Dejours) et l’Association
Française de Psychiatrie (Yves Manela).
Renseignements et inscriptions : AFP, 6
passage Abel Leblanc, 75012 Paris. Tél. :
01 42 71 41 11. Fax : 01 42 71 36 60.
www.psychiatrie-francaise.com
26 janvier 2008. Paris. Entretiens de
l’Association Psychanalytique de France
(AFP) sur le thème : Maladie et guérison
en psychanalyse. Renseignements : Tél. :
01 43 29 85 11. E-mail : lapf@wanadoo.fr
26 janvier 2008. Neuilly. Association
Edouard Claparède. 1 ère Journée d’Etude
du Séminaire Clinique de l’Autisme, Evaluations,
Recherche sur le thème : De l’imitation
aux identifications dans l’autisme :
nouvelles perspectives. Renseignements
et inscriptions : Sylvia Sanches, Unité
de Formation et d’Enseignement
Simone Decobert, 5 rue du Général
Cordonnier, 92200 Neuilly-sur-Seine.
Tél. : 01 47 45 97 04. E-mail : institutclaparede@wanadoo.fr
26 janvier 2008. Tours. XXXVI e Journées
Annuelles de Thérapie Psychomotrice
sur le thème : S’attacher pour
mieux se détacher de l’étayage corporel en
thérapie psychomotrice. Renseignements :
SNUP - XXXVI e J.A., 24 bd Paul Vaillant
Couturier, 94200 Ivry-sur-Seine. Tél. :
01 56 20 02 91. Fax : 01 56 20 14 70.
Site : www.snup.fr. E-mail : info@snup.fr
26 janvier 2008. Paris. Les Entetiens de
l’Association Psychanalytique de France
sur le thème : Maladie et guérison en psychanalyse.
Renseignements : APF, 24
place Dauphine, 75001 Paris. Tél. :
01 43 29 85 11. E-mail : lapf@wana-
doo.fr - www.associationpsychanalytiquedefrance.org
6 au 9 février 2008. Paris. Congrès européen
de l’Association Mondiale de
Psychiatrie (AMP) organisé par l’Association
des sociétés françaises membres
de l’AMP et les représentants des zones
européennes de l’AMP sur le thème :
Ethique, Science et Psychiatrie de la personne.
Renseignements : www.wpa2008
paris.com
9 février 2008. Paris. Colloque organisé
par l’Institut Français d’Analyse de
Groupe de Psychodrame sur le thème :
Parole, corps et pensée en analyse de groupe
et psychodrame. Renseignements : IFAGP.
Tél. : 01 45 88 23 22. E-mail : ifagp@clubinternet.fr
9 février 2008. Paris. Journée Scientifique
organisée par Daniel Widlöcher
et la revue Carnet Psy sur le thème : Psychanalyse
et psychothérapie : continuons
le débat. Inscriptions : Estelle Georges-
Chassot, Carnet Psy, 8 avenue Jean-
Baptiste Clément, 92100 Boulogne. Tél. :
01 46 04 74 35. Fax : 01 46 04 74 00.
13 et 14 mars 2008. Versailles. Les 5 èmes
Rencontres de Réh@b’ sur le thème :
La réhabilitation, c’est maintenant ! Renseignements
: www.rehabilite.fr. E-mail :
contact@rehabilite.fr. Inscriptions et propositions
de communication : Dr Gilles
Vidon, CFRP, Hôpital Esquirol, 57 rue
du Maréchal Leclerc, 94413 Saint
Maurice Cedex. E-mail : g.vidon@hopital-esquirol.fr.
Tél. : 01 43 96 61 10.
Organisation et logistique : Cap Santé.
E-mail : c.berger@capsante.fr. Tél. :
01 44 24 58 85.
15 mars 2008. Lyon. Rencontre organisée
par les analystes de l’Association
Psychanalytique de France sur le thème :
L’instistance du sexuel. Renseignements :
APF, 24 place Dauphine, 75001 Paris.
Tél. : 01 43 29 85 11. E-mail : lapf@wanadoo.fr
15 et 16 mars 2008. Paris. Journées de
printemps d’Espace Analytique sur le
thème : Subversions de la psychanalyse.
Renseignements : Tél. : 01 47 05 23 09.
E-mail : espace.analytique@wanadoo.fr
26 au 29 mars 2008. Paris. 6 ème Congrès
de l’ARSPG sur le thème : La psychiatrie
dans tous ses états. La psychiatrie ici et
ailleurs. Renseignements : e-mail : arspg@
d-s-o.fr
27 et 28 mars 2008. Paris. Journées
d’étude des Séminaires Psychanalytiques
de Paris sur le thème : L’accueil du toutpetit
avec ses parents. Inscriptions : Tél. :
01 46 47 66 04. Fax : 01 46 47 60 66.
E-mail : sempsy@free.fr
28 et 29 mars 2008. Paris. Colloque
BBADOS sur le thème : Dépression du
bébé, dépression de l’adolescent. Inscriptions
: e-mail : bbados@carnetpsy.com
20 au 22 mai 2008. Québec. Congrès
international organisé par le Groupe interdisciplinaire
freudien de recherche
et d’intervention cliniques et culturelles
sur le thème : Que peut espérer le psychotique
aujourd’hui ? Renseignements :
GIFRIC/Congrès 2008, 342 bd René
Lévesque Ouest, Québec, Canada G1S
1R9. Tél. : 001 418 687 4350. Fax :
001 418 683 1935. Site : www.gifric.com
30 et 31 mai 2008. Reims. XI èmes Rencontres
de la CRIEE sur le thème : Expériences
de la folie. Renseignements et
inscriptions : Patrick Chemla, Gérard Rodriguez,
Centre de Jour A. Artaud, 40
rue de Talleyrand, 51100 Reims. Tél. :
03 26 40 01 23. Fax : 03 26 77 93 14.
E-mail : g.rodriguez@epsdm-marne.fr
7 juin 2008. Paris. XI e Colloque International
du CIPS sur le thème : Psychosomatique
de l’enfant et de l’adolescent.
Renseignements : Tél./Fax :
01 45 20 28 75. E-mail : c.i.psychosoma@wanadoo.fr
24 au 26 juillet 2008. Barcelone. 3 ème
Congrès International de Psychanalyse
de couple et de la famille sur le thème :
Violences dans les couples et les familles
contemporaines. Un défi pour la psychanalyse
familiale. Renseignements : E-mail :
congresoAOPPF@blanquera.url.edu -
Site : www.blanquera.url.edu
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007

22
LIVRES
Le royaume intermédiaire
Psychanalyse, littérature, autour
de J.-B. Pontalis
Avant-propos de François
Gantheret
et Jean-Michel Delacomptée
folio essais n°491
Gallimard, 8,70 €
Ce recueil collecte les interventions du
colloque de Cerisy qui s’est tenu en septembre
2006 et un certain nombre
d’autres textes sollicités auprès de ceux
qui n’avaient pu être présents ou n’avaient
pas eu l’opportunité d’intervenir.
Poètes, romanciers, psychanalystes se
sont rencontrés, une semaine durant,
pour évoquer l’inspiration qu’ils ont puisée,
pour leurs œuvres et recherches
respectives, dans les livres de J.-B. Pontalis.
Le Rituel du serpent
Récit d’un voyage en pays pueblo
Aby Warburg
Introduction par Joseph Leo
Koerner
Textes de Fritz SaxI (1930)
et de Benedetta Cestelli Guidi
Macula, 23 €
Le Rituel du serpent est la meilleure introduction
à l’œuvre d’Aby Warburg.
Entrepris à 29 ans, son voyage chez les
Hopis apparaît comme l’expression d’un
Directeur de la rédaction :
Gérard Massé
Rédacteur en chef : François Caroli
Comité de rédaction : Centre Hospitalier
Sainte-Anne, 1 rue Cabanis, 75014 Paris.
Tél. 01 45 65 83 09.
Botbol M., Carrière Ph., Dalle B., Goutal M.,
Guedj M.-J., Jonas C., Lascar Ph., Martin A.,
Paradas Ch., Sarfati Y., Spadone C.,
Tribolet S., Weill M.
Comité scientifique : Bailly-Salin P.
(Paris), Besançon G. (Nantes), Bourgeois
M. (Bordeaux), Buisson G. (Paris), Caillard
V. (Caen), Chabannes J.-P. (Grenoble),
Chaigneau H. (Paris), Christoforov B.
(Paris), Colonna L. (Rouen), Cornillot P.
(Paris), Dufour H. (Genève), Dugas M.
(Paris), Féline A. (Paris), Ginestet D.
(Paris), Guelfi J.-D. (Paris), Guyotat J.
(Lyon), Hochmann J. (Lyon), Koupernik
C. (Paris), Lambert P. (Chambéry), Loo H.
(Paris), Marcelli D. (Poitiers), Marie-
Cardine M. (Lyon), Mises R. (Paris),
Pequignot H. (Paris), Plantade A. (Paris),
Ropert R. (Paris), Samuel-Lajeunesse B.
(Paris), Scotto J.-C. (Marseille), Sechter D.
(Lille), Singer L. (Strasbourg), Viallard A.
(Paris), Zarifian E. (Caen).
Comité francophone : Anseau M.
(Belgique), Aubut J. (Canada), Bakiri M.-A.
(Algérie), Cassan Ph. (Canada), Douki S.
(Tunis), Held T. (Allemagne), Lalonde P.
(Canada), Moussaoui D. (Maroc), Romila A.
(Roumanie), Simon Y.-F. (Belgique), Stip E.
(Canada), Touari M. (Algérie).
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médical
SUPPORTER
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Renata Laska - Susie Caron,
54, bd Latour-Maubourg, 75007 Paris.
Tél. 01 45 50 23 08.
Télécopie : 01 45 55 60 80
E-mail : info@nervure-psy.com
Edité par Maxmed
S.A. au capital de 40 000 €
54, bd Latour-Maubourg,
75007 Paris
Maquette : Maëval.
Imprimerie Fabrègue
Directeur de la Publication :
G. Massé
www.nervure-psy.com
désir d’échapper aux confinements, aux
conditionnements de son milieu et de
sa discipline académique : « J’étais sincèrement
dégoûté de l’histoire de l’art esthétisante
».
Warburg a passé cinq mois en Amérique.
Il a observé, dessiné, photographié
les rituels indiens.
Rentré à Hambourg, il a organisé trois
projections dans des photo-clubs. Puis
il a repris sa vie de chercheur, publié
des essais qui feront date : Art italien et
astrologie... (1912), La divination païenne
et antique dans les écrits et les images à
l’époque de Luther (1920), etc.
En 1923, vingt-sept ans après son en-
quête chez les Hopis, Warburg, interné
dans la clinique psychiatrique de Ludwig
Binswanger, à Kreuzlingen, pour
des troubles mentaux accentués par la
guerre, a demandé avec insistance à
prononcer une conférence*.
Alors ressurgissent devant soignants et
malades tous les détails du voyage américain
: danses, sanctuaires, parures,
gestes, habitats, dessins, rencontres ;
mais aussi la chaîne d’associations qui,
sur le thème ambivalent du serpent -
cruel avec Laocoon, bénéfique avec Asclépios,
séducteur et mortifère avec les
nymphes serpentines de Botticelli ou
de Ghirlandaio - n’a cessé d’entraîner
Warburg d’une Antiquité millénaire
jusqu’aux pratiques cérémonielles des
« primitifs ».
Ce qu’il cherchait, ce qu’il a trouvé chez
les Hopis, il en prend conscience à Kreuzlingen
: c’est le point de distance dont
il avait besoin pour reformuler son travail,
revisiter l’art européen : « Après
mon retour, écrira-t-il en 1927, je me
penchai sur la culture florentine du Quattrocento,
afin d’examiner sur une tout
autre base, plus large cette fois, la structure
psychique de l’homme de la Renaissance
».
Son regard sur l’univers « primitif » des
Indiens a permis à Warburg d’en ter-
N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
miner avec l’idée de l’œuvre comme fin
en soi, réduite à la délectation, de dépasser
l’histoire du goût, l’attributionnisme,
le biographisme, le formalisme
restreint de Wölfflin.
A ses yeux, l’art relève de l’anthropologie
culturelle, et rien ne doit échapper
aux investigations du chercheur:
ethnologie, mais aussi astrologie, mythologie,
théories du geste, psychologie.
Voir le compte-rendu de « La guérison infinie »
Ludwig Binswanger, Aby Warburg, Bibliothèque
Rivages dans le numéro d’avril 2007 du Journal
de Nervure, page 4.

N°8 - TOME XX - NOVEMBRE 2007
CENTRE
HOSPITALIER
DAX-CÔTE
D’ARGENT
Poste de
praticien
hospitalier
à titre provisoire
vacant dans le
service de
psychiatrie de
l’enfant et de
l’adolescent
***
Contact :
F. CLAUS
Tél. 05 58 91 49 40
E-mail :
CLAUSF@ch-dax.fr
Pôle de Psychiatrie
Générale
Recrute
PH temps
plein
Pour Unité
d’Hospitalisation
temps plein
Adolescents
Contacter Mme le
Dr Roche-Rabreau
01 64 30 72 08
Femme
Médecin généraliste
Orientation
psychiatrique
Cherche poste
en vacations
Téléphone
06 67 25 85 58
Association l’Elan Retrouvé
Etablissements spécialisés en santé mentale
PSPH
adhérents à la FEHAP (CCN 31/10/1951)
Recrute
Pour Hôpital de jour pour enfants autistes
à Chevilly-Larue (94)
1 PSYCHIATRE (mi-temps)
Possibilité PH temps partiel
Poste à pourvoir le 1er février 2008
Expérience institutionnelle indispensable
Merci d’adresser votre lettre de candidature et CV à
M. le Président de l’Association l’Elan Retrouvé
23 rue de La Rochefoucauld, 75009 Paris
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Pour précisions sur le poste, appeler le Docteur HABIB,
Médecin directeur au 01 49 70 88 58
LE CENTRE ENTRE HOSPIT OSPITALIER ALIER D’A ’ANTIBES NTIBES JUAN AN-LES LES-P -PINS INS
recherche un assistant spécialiste
pour son service de Psychiatrie Infanto Juvénile
à compter de janvier 2008
Contacter : Monsieur le Directeur
CH Antibes - RN7 - 06606 ANTIBES cedex
Tél. : 04 97 24 77 01
E-mail : secretariat.direction@ch-antibes.fr
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SAINTE MARIE – VALLÉE VALLÉE
D’ASPE
(PYRÉNÉES-ATLANTIQUES)
Associations pour adultes handicapées
RECRUTENT
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CDI immédiat C.C.N.T. du 15/03/66
Fort potentiel clientèle libérale
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Portable : 06.73.34.89.95
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ABRI MONTAGNARD • Maison Nouqué • 64490 BEDOUS
LE CENTRE HOSPITALIER
D’ARRAS (Pas de Calais)
Intersecteur de psychiatrie infanto-juvénile
Ville agréable, proximité de LILLE et 50 mn de PARIS, en TGV
Recherche 2 praticiens en pédopsychiatrie
ou en psychiatrie générale
Possibilités d’exercice diverses (Centre de soins pour
adolescents, CMP-CATTP, liaison en pédiatrie et maternité)
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Candidature et CV à :
Centre hospitalier d’Arras, Direction des affaires médicales
Avenue Winston Churchill - 62000 ARRAS
Renseignements :
Dr Sartor C., Chef de service : 03 21 24 45 87
Direction des affaires médicales : 03 21 21 18 02
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contactez Madame Susie Caron au
01 45 50 23 08
ou par e-mail
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L'association RENOVATION
recherche
Un psychiatre
Responsable médical d'un foyer de postcure pour jeunes
adultes présentant des troubles psychiques graves
CDI
Temps partiel (0.5 ETP) • Etablissement de santé
Convention collective du 1 er mars 1979
(annexée à la CC 66)
Poste à pourvoir à partir du 1er janvier 2008
***
Adresser lettre de motivation et CV au directeur
Association RENOVATION, Centre de Réadaptation
38 rue Pasteur, 33200 BORDEAUX
Avant le 21 décembre 2007
L’Association Hospitalière de Bretagne
Côtes d’Armor (22)
Gérant le Centre Hospitalier de Plouguernevel (22)
Etablissement Privé Participant au Service Public Hospitalier
Recherche
PSYCHIATRES TEMPS PLEIN
• Un poste à pourvoir en janvier 2008 sur le secteur 56G09
« Psychiatrie Adulte » avec activité sur Pontivy (56) : activité de
secteur – hospitalisation plein temps.
• Un poste à pourvoir immédiatement à l’intersecteur de
psychiatrie infanto-juvénile 22I03 (C.M.P.E.A. – H.J.E.A.)
• Un poste à pourvoir pour avril 2008 dans la deuxième unité de
l’U.M.D. dont l’ouverture sera effective en janvier 2008.
C.C.N.51 - Possibilité P.H. détaché Fonction Publique
Logement de fonction (maison individuelle)
Candidature et C.V. à adresser à :
M. le Directeur Général de l’A.H.B.
Centre Hospitalier
22110 PLOUGUERNEVEL
Tél. 02.96.57.10.65 - Fax 02.96.36.03.24
e-mail : a.legarrec@ahbretagne.com
L'ETABLISSEMENT PUBLIC DE SANTE
MAISON BLANCHE
Recrute h/f
PSYCHIATRE
PRATICIEN HOSPITALIER À TEMPS PARTIEL
pour son Service intersectoriel d'accueil
et de soins LA TERRASSE (psychiatrie et toxicomanie)
Missions du poste :
Travail dans un centre d'accueil pluridisciplinaire à la
consultation et à la prescription
• Evaluation,
• Consultation,
• Prescription, prescription spécialisée (substitution),
• Participation aux réunions de synthèse,
• Travail en équipe,
• Enseignement.
Pour nous rejoindre et pour tout renseignement,
contacter : Mr le docteur Jacques JUGMAN
Chef de Service - Tél : 01.42.26.03.12
TRAIT D’UNION