KUKAI LYON - Association francophone de haïku

KUKAI LYON, 17 mars 2011
Animation : Patrick Chomier
Présent.es : Robert Gillouin, Danyel Borner, Jacques Beccaria, Annie Reymond,
Jocelyne Serre, Hélène Massip, Armelle Chitrit, Jean Antonini, Anne-Pascale Hinze,
Martine Rigal
LA CESURE (1 ère partie)
Le kireji (littéralement mot qui coupe) est un mot de coupure de nature poétique.
Classiquement, il existait 18 mots césure, les 3 plus courants étant : ya, keri,
kana.
Ya : est généralement traduit par les interjections : oh, ah, mais aussi le ô
emphatique.
Keri : montre que quelque chose est terminé et qu’on en ressent une certaine
admiration ou de l’émotion.
Kana : indique généralement l’étonnement de l’auteur. Il est si courant qu’il en
perd généralement son sens.
Les kirejis n’ont pas de signification précise et ne sont généralement pas traduits
littéralement. La césure est rendue par un éventuel signe de ponctuation, mais le
plus souvent par un simple retour à la ligne.
Propositions d’écriture
1 - Ajouter la 3 ème ligne :
A partir d’un lot de haïkus de maîtres ayant la césure en fin de 2 ème ligne, tirage
au sort à tour de rôle, lecture au groupe des 2 premières lignes puis nous prenons
2 minutes pour proposer une 3 ème ligne. Nous choisissons quelques variantes du
Kukaï Lyonnais avant de découvrir l’original.
indolent
après la sieste je me réveille
indolent indolent
après la sieste je me réveille après la sieste je me réveille
où est le chocolat ? le bleu du ciel
indolent indolent
après la sieste je me réveille après la sieste je me réveille
c’est l’arrivée du Tour pluie de printemps (Bashô)

devant le réfectoire
les oiseaux pépient
devant le réfectoire devant le réfectoire
les oiseaux pépient les oiseaux pépient
les moines mastiquent tremblement de terre
devant le réfectoire devant le réfectoire
les oiseaux pépient les oiseaux pépient
le chat s’avance l’averse du soir (Shiko)
depuis aujourd’hui
je ne porte plus de montre
depuis aujourd’hui depuis aujourd’hui
je ne porte plus de montre je ne porte plus de montre
carnet à spirales un bock en terrasse
depuis aujourd’hui depuis aujourd’hui
je ne porte plus de montre je ne porte plus de montre
eh ! eh ! la pluie du soir (Santoka)
2 - Ajouter les 2 ème et 3 ème lignes :
Même jeu avec des haïkus de maîtres ayant la césure en fin de 1 ère ligne
Temps doublé soit environ 4 minutes
la nuit est sans fin
la nuit est sans fin la nuit est sans fin
plus de maisons, plus rien en mer les marins
on ne pleure pas font des quarts
la nuit est sans fin la nuit est sans fin
le ruban de la route un quatuor de Mozart
dans mes phares berce mon ennui
la nuit est sans fin la nuit est sans fin
un cri dans la nuit je pense
… personne à ce qui viendra dans dix mille ans
(Shiki)

mon corps est froid
mon corps est froid mon corps est froid
je suis restée trop longtemps ces fichues chaussettes
dans mon bain moussant cisaillent les chevilles
mon corps est froid mon corps est froid
les crocus croquent charger, décharger, livrer
la lumière bleue les quartiers de viandes
mon corps est froid mon corps est froid
les esprits s’envolent-ils plus froid que les poissons
comme des papillons ? que je viens d’acheter
(Masajo Suzuki)
3 – Faire entrer dans le haïku des « objets non poétiques » :
La qualité première du haïkiste, c’est d’être disponible au surgissement, de
rester présent à ce qui est. Lors d’un atelier, une personne se retire en me
chuchotant : « je vais aux toilettes ». Banalité du quotidien me direz-vous. Je
réalise que cette remarque présente 3 caractéristiques :
Cinq syllabes, une réalité pour chacun d’entre nous et de plus combien de fois la
vie nous à imposer comme césure d’aller aux toilettes.
N’y en a-t-il pas une qui aurait mérité un haïku ? Et à l’instar de Bashô avec sa
vieille mare, son vieil étang faire entrer nous aussi un objet non poétique dans le
haïku. Ainsi, je propose d’écrire un haïku avec césure en fin de 2 ème ligne et avec
la 3 ème ligne : « je vais aux toilettes ». Temps : 10 minutes.
Très soudaine envie Jean-Pierre Coffe étale
de finir mes mots croisés de la purée chez Drucker
Je vais aux toilettes Je vais aux toilettes
Le kukaï s’achève Mesdames et Messieurs
Elle est bien loin l’heure du thé nous arrivons en gare de Lyon
Je vais aux toilettes Je vais aux toilettes