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<strong>SAINTE</strong> <strong>AGNÈS</strong>,<br />
VIERGE ET MARTYRE<br />
fêtée le 21 janvier<br />
304. — Pape saint Marcellin. — Empereurs : Dioclétien et Maximien Hercule.<br />
Texte extrait des Petits Bollandistes<br />
Mgr Guérin<br />
<strong>Saint</strong>e Agnès, la bien-aimée des Romains.<br />
Les trois Rome, t. II, p. 129, éd. de 1864.<br />
<strong>Saint</strong>e Agnès est populaire et chérie.<br />
Parfum de Rome, t. II, p. 206, éd. de 1867<br />
Son nom seul est une louange.<br />
<strong>Saint</strong> Ambroise, Livre des vierges, I.<br />
Bienheureuse Agnès, vous étiez belle de visage ;<br />
mais combien vous êtes plus belle par la foi.<br />
Vous avez méprisé le siècle, vous vous réjouirez<br />
avec les anges. Intercédez pour nous.<br />
Liturgie dominicaine.<br />
Éditions <strong>Saint</strong>-<strong>Remi</strong><br />
– 2013 –
Éditions <strong>Saint</strong>-<strong>Remi</strong><br />
BP 80 – 33410 CADILLAC<br />
05 56 76 73 38<br />
www.saint-remi.fr
C<br />
ette sainte fille naquit à Rome de parents<br />
riches et craignant Dieu, qui prirent grand<br />
soin de l’élever selon sa qualité et sa<br />
naissance, mais principalement de la former aux<br />
lois du Christianisme dont ils faisaient profession.<br />
Dès ses plus tendres années, elle conçut un trèsardent<br />
amour pour Jésus-Christ et elle s’y avança<br />
tellement, que la méditation des souffrances et de<br />
la mort de son Époux étaient son aliment le plus<br />
ordinaire. Dès lors Dieu l’avait comblée d’une telle<br />
grâce, qu’elle attirait par son exemple beaucoup de<br />
personnes à la vertu ; en effet, elle en convertit<br />
plusieurs de son sexe à la vraie foi et à la religion<br />
chrétienne, si bien qu’on lui peut légitimement<br />
donner cet éloge que le <strong>Saint</strong>-Esprit donne à la<br />
Reine épouse du grand Roi : « Plusieurs vierges<br />
seront conduites au Roi après elle, et ses<br />
compagnes lui seront présentées avec joie et<br />
allégresse 1 ». Cependant les démons tâchèrent, par<br />
toutes sortes de moyens, d’arrêter le cours de ces<br />
heureux progrès ; car Agnès, approchant de la<br />
douzième ou treizième année de son âge, cet<br />
ennemi voulut se servir de la beauté de son corps<br />
pour lui faire perdre celle de son âme. Dans ce<br />
dessein, il excita un violent amour dans le cœur de<br />
Procope, fils du gouverneur de Rome ; ce jeune<br />
chevalier s’étant informé de toutes les qualités<br />
d’Agnès, et voyant qu’il ne se mésallierait point en<br />
l’épousant, se servit de tous les artifices possibles<br />
pour l’obtenir. Mais comme les parents de la sainte<br />
fille y pensaient à loisir et non avec la précipitation<br />
qu’il eût désirée, impatient de voir<br />
l’accomplissement de ses désirs, il chercha<br />
1 PS XLIV, 15.
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<strong>SAINTE</strong> <strong>AGNÈS</strong>, VIERGE ET MARTYRE<br />
l’occasion de la voir et de lui parler, espérant que ce<br />
serait le plus court chemin pour parvenir au but de<br />
ses prétentions. Comme il avait du crédit et dès lors<br />
de grandes relations dans la ville, il trouva bientôt<br />
le moyen de faire connaître sa passion à Agnès ;<br />
mais Dieu, qui avait en sa protection cette sainte<br />
fille, avait aussi rempli son âme d’une vertu si<br />
relevée, qu’elle pouvait aisément confondre toute la<br />
sagesse du monde. Cette première démarche<br />
n’ayant donc pas réussi au gré de Procope, après<br />
plusieurs autres expédients qu’il tenta en vain, il<br />
résolut d’être lui-même le médiateur de son affaire<br />
et fit en sorte de rencontrer Agnès pour lui<br />
découvrir sa pensée. Il la vit donc, et après lui avoir<br />
dit tout ce que sa passion lui mit à la bouche et<br />
l’avoir conjurée de ne pas refuser son alliance si elle<br />
ne voulait être ennemie de son propre bien, il lui<br />
offrit les présents qu’il avait apportés pour cet effet,<br />
afin que leur grand prix achevât de la persuader.<br />
Mais la sainte fille, rejetant toutes ses propositions,<br />
lui dit d’une façon résolue et pleine de modestie<br />
chrétienne : « Retire-toi, tison d’enfer, aiguillon de<br />
péché, pierre de scandale et appât de mort ! Ne<br />
pense pas que je sois jamais infidèle à mon Époux à<br />
qui je me suis tellement unie, que mon âme ne vit<br />
que de son amour. Ne flatte pas non plus ta pensée<br />
qu’il y ait quelque mérite en toi qui te puisse<br />
justement faire prétendre à être son rival ; car il<br />
possède six qualités qui le rendent incomparable et<br />
uniquement digne d’amour : il est noble, il est<br />
beau, il est sage, il est riche, il est bon, il est<br />
puissant. Si tu veux savoir son extraction, il<br />
reconnaît un Dieu pour son père qui l’a produit<br />
sans mère, et la mère qui l’a mis au monde n’a pas<br />
moins été vierge pour avoir eu ce fils. Il est si beau,
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que sa splendeur surpasse la clarté du soleil et de<br />
tous les astres, et que les cieux mêmes sont ravis<br />
dans l’admiration de sa beauté et disent, dans leur<br />
langage, qu’ils ne sont que des ténèbres à son<br />
égard. Il est si sage et m’a tellement captivée de son<br />
amour, que je ne puis penser à d’autre qu’à lui ; et<br />
maintenant que je parle de son excellence, je sens<br />
un si grand plaisir que, quoique je t’aie en horreur,<br />
je suis bien aise de te voir pour te le pouvoir dire. Il<br />
est si riche, qu’il m’a donné un trésor qui vaut<br />
mieux que tout l’empire romain, et que personne ne<br />
le sert qui ne soit comblé de richesses. Que te dirai<br />
je de sa bonté, qui n’a point de mesure ? Pour la<br />
faire paraître avec plus d’éclat, il m’a marquée de<br />
son sang. Il m’a donné sa foi et sa parole qu’il ne<br />
m’abandonnera jamais. Il m’a prise pour son<br />
épouse, il m’a donné de belles robes et de beaux<br />
joyaux d’un prix inestimable. Il est si puissant, qu’il<br />
ne peut être vaincu par toutes les forces du ciel et<br />
de la terre ; les malades sont guéris par le parfum<br />
céleste qui s’échappe de sa personne, et les morts<br />
reviennent en vie par l’éclat de sa voix : c’est<br />
pourquoi je suis toute à lui, je l’aime mieux que<br />
mon âme et que ma vie même, et je serais très-aise<br />
de pouvoir mourir pour lui. Quand je l’aime, je suis<br />
chaste ; quand je m’approche de lui, je suis pure, et<br />
quand je l’embrasse je suis vierge. Cela étant ainsi,<br />
vois si je dois l’abandonner dans l’espoir de quelque<br />
récompense ou par la crainte de quelque peine ».<br />
Que les jeunes filles suivent cet exemple de<br />
sainte Agnès et qu’elles se gardent bien, s’écrie<br />
saint Maxime, de prendre des présents de la main<br />
ou de la part des hommes, quoique sous couleur de<br />
piété. « Car toutes les fois que quelqu’un ne vous
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<strong>SAINTE</strong> <strong>AGNÈS</strong>, VIERGE ET MARTYRE<br />
donne pas de quoi craindre Dieu davantage », dit le<br />
<strong>Saint</strong>, « ne recevez rien de lui qui vous fasse plus<br />
aimer le monde ».<br />
Le fils du préfet, entendant ces discours d’Agnès,<br />
crut qu’elle était éprise d’amour pour quelque autre<br />
grand seigneur, et, qu’étant enivrée de cette<br />
passion, elle parlait en frénétique, appelant celui<br />
qu’elle aimait son Dieu, son idole, sa vie et son âme<br />
(ce sont les noms dont les amants qualifient<br />
quelquefois ce qu’ils aiment) ; mais il en ressentit<br />
une telle jalousie, qu’il en demeura au lit malade.<br />
Son père appelé Symphrone, en sachant la cause,<br />
fit venir la sainte fille et s’efforça de lui persuader,<br />
par tous les artifices possibles, d’épouser son fils<br />
qui était le meilleur parti qu’elle pût souhaiter ;<br />
mais il la trouva inébranlable dans sa résolution et<br />
elle lui dit que, pour tous les biens du monde, elle<br />
ne changerait jamais l’Époux qu’elle avait déjà pris.<br />
Il voulut savoir qui pouvait être celui pour qui<br />
Agnès avait un si grand amour, et alors quelqu’un<br />
lui dit : « Seigneur, cette fille est chrétienne ; elle a<br />
été nourrie, dès le berceau, en l’art magique auquel<br />
les chrétiens s’appliquent fort, comme l’on voit par<br />
ce qu’ils font tous les jours ; ainsi, soyez certain<br />
que cet Époux dont elle parle n’est autre que le<br />
Dieu des chrétiens ». Le préfet fut bien joyeux de<br />
savoir cela, pour avoir sujet de maltraiter Agnès et<br />
de se venger d’elle sous une si belle apparence ; car<br />
il ne pouvait pas la maltraiter de ce qu’elle ne<br />
voulait pas épouser son fils ; comme elle était de<br />
grande condition, il n’avait que ce prétexte pour se<br />
venger de son refus. Il résolut donc de faire tous ses<br />
efforts pour gagner la sainte fille, premièrement,<br />
par de douces et de belles promesses, puis, si cela