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375 DOLLARS - Jean-Paul Tapie, Ecrivain Français

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prétextant que j’étais fatigué, j’étais allé faire un tour<br />

du côté du phare, là où des garçons et des hommes<br />

simples et directs se donnent mutuellement un plaisir<br />

brut mais concret.<br />

Je remarquai bien vite un attroupement dans un<br />

coin un peu moins sombre, ce qui était surprenant, la<br />

lumière ne favorisant pas les ébats impromptus. Je<br />

m’approchai. Entre deux têtes, j’aperçus un garçon,<br />

torse nu, appuyé contre un mur blanc, sur lequel son<br />

superbe corps bronzé se détachait avec une violence<br />

crue. C’était Wyn.<br />

J’en eus le souffle coupé. Je vacillai et je dus<br />

prendre appui sur l’épaule de mon voisin qui, tout à son<br />

émerveillement, ne sembla même pas s’en rendre<br />

compte. Je repris ma respiration et m’écartai un<br />

instant. Je n’avais qu’une envie, fendre la foule et me<br />

précipiter sur Wyn, le convaincre de me suivre, le<br />

supplier si nécessaire, accéder à toutes ses demandes, à<br />

tous ses caprices, même les plus déraisonnables. Je le<br />

voulais comme j’avais rarement voulu un garçon dans<br />

ma vie. Il y avait dans son corps magnifique quelque<br />

chose qui était devenu indispensable à ma survie,<br />

quelque chose dont je mourais si je ne l’obtenais pas. Je<br />

dus faire un violent effort pour me contrôler, ne pas<br />

crier, ne pas bousculer la foule électrisée.<br />

J’attendis.<br />

Un peu plus tard, Wyn traversa la foule avec<br />

autorité et s’éloigna tout en renfilant sa chemise.<br />

Quelques hommes le suivirent un instant, puis se<br />

découragèrent. Il ne resta bientôt plus que moi dans le<br />

sillage du sublime garçon.<br />

Je l’abordai un peu plus loin, au cœur des ruelles du<br />

port, sur une petite place qu’éclairait un lampadaire<br />

niché dans le feuillage d’un acacia. Je le hélai.<br />

« Wyn ! »<br />

Il se retourna.<br />

Il n’avait pas boutonné sa chemise et<br />

l’entrebâillement laissait voir des abdominaux sculptés<br />

à la perfection, un nombril plein d’ombre, l’échancrure<br />

de ses pectoraux et l’amorce violette d’un téton.<br />

Je faillis tomber à genoux. Je me contrôlai. Je<br />

m’approchai de lui. Je compris aussitôt qu’il ne me<br />

reconnaissait pas.<br />

Il me dévisagea sans que l’expression de son visage<br />

trahît le moindre sentiment. Il ne semblait même pas<br />

surpris que je connaisse son prénom. Il me demanda<br />

simplement ce que je lui voulais.<br />

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