N° 129 (PDF) - La Contre-Réforme catholique au XXIe siècle
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<strong>La</strong> <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> Catholique <strong>au</strong> XXI e <strong>siècle</strong><br />
IL EST RESSUSCITÉ !<br />
N o <strong>129</strong> - Juin 2013 Rédaction : frère Bruno Bonnet-Eymard Mensuel. Abonnement : 30 e<br />
Il reviendra avec son cœur immense, avec son cœur de flamme, son âme de<br />
p<strong>au</strong>vre et son sourire. Il reviendra ! Et le Cœur Immaculé de Marie triomphera !<br />
LE 13 MAI 2013<br />
À ROME ET À FATIMA<br />
LUNDI 13 mai 2013, pour le quatre-vingt-seizième<br />
anniversaire de la première apparition de Notre-<br />
Dame à Lucie, François et Jacinthe, le pape François a<br />
adressé un message <strong>au</strong> sanctuaire de Notre-Dame de<br />
Fatima : « Le Saint-Père exprime sa gratitude pour<br />
l’initiative et sa profonde reconnaissance pour la satisfaction<br />
de son désir, en union de prières avec tous les<br />
pèlerins de Fatima, et il accorde de tout cœur sa<br />
bénédiction apostolique. »<br />
« <strong>La</strong> satisfaction de son désir » : c’était celui qu’il<br />
avait exprimé « à deux reprises » <strong>au</strong> cardinal José da<br />
Cruz Policarpo, président de la Conférence épiscopale<br />
portugaise, de consacrer son ministère pétrinien à<br />
Notre-Dame de Fatima.<br />
« L’initiative » : c’était la décision de Policarpo de<br />
faire cette consécration “ collégialement ”, avec tous<br />
les évêques du Portugal.<br />
<strong>La</strong> prière de consécration a donc été écrite par le<br />
cardinal Policarpo et prononcée à la fin de la Messe<br />
internationale, près de l’<strong>au</strong>tel de l’esplanade. C’est un<br />
texte d’une rare insolence. Le cardinal prie la Vierge<br />
d’accorder à François « le don du discernement pour<br />
© POOL OR/ CPP/ CIRIC<br />
Mercredi 15 mai 2013, lors de l’<strong>au</strong>dience générale, place Saint-Pierre,<br />
« Noé lâcha d’<strong>au</strong>près de lui la colombe pour voir si les e<strong>au</strong>x avaient diminué à la surface du sol.» (Gn 8,8)
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 2<br />
savoir identifier les chemins du renouve<strong>au</strong> de l’Église »,<br />
sans <strong>au</strong>cune allusion à ceux que la Sainte Vierge a ellemême<br />
indiqués, où la récitation du chapelet tient la<br />
première place. Mais il y a “ renouve<strong>au</strong> ” et “ renouve<strong>au</strong> ”.<br />
Celui dont parle Policarpo, c’est le renouve<strong>au</strong> conciliaire<br />
! Et ce n’est pas ce “ chemin-là ” que suit François !<br />
Non seulement Notre-Dame ne reçoit même pas,<br />
dans ce texte, son titre de Mère de Dieu mais, loin<br />
de recommander la dévotion <strong>au</strong> Cœur Immaculé de<br />
Marie que Dieu veut établir dans le monde, ni la<br />
récitation du chapelet demandée par Notre-Dame et<br />
recommandée par le pape François, Policarpo préconise<br />
« la prière en silence en communion avec le<br />
précédent pape, Sa Sainteté Benoît XVI, lui qui, en<br />
choisissant le chemin de la prière silencieuse, défie<br />
l’Église (sic ! ) à prendre le même chemin ».<br />
Alors que le pape François a explicitement souligné,<br />
lors de l’<strong>au</strong>dience générale du mercredi 1er mai,<br />
« l’importance et la be<strong>au</strong>té de la prière du chapelet » :<br />
« Lorsque nous récitons le “ JE VOUS SALUE, MARIE ”,<br />
nous sommes amenés à contempler les mystères de<br />
Jésus, c’est-à-dire à réfléchir sur les moments importants<br />
de sa vie, pour que, comme pour Marie et pour<br />
saint Joseph, il soit <strong>au</strong> centre de nos pensées, de nos<br />
attentions et de nos actions. » C’est précisément le but<br />
de la méditation du premier samedi du mois, dont<br />
Notre-Dame a demandé l’institution.<br />
C’est vous dire le m<strong>au</strong>vais esprit de ce Policarpo,<br />
grand ami de Schönborn, le cardinal <strong>au</strong>trichien qui<br />
déclarait l’<strong>au</strong>tre jour que le pape François <strong>au</strong>rait intérêt<br />
à s’inspirer de la « sagesse de Benoît XVI » ! Les<br />
nostalgiques de Benoît XVI ne désarment pas !<br />
Pendant ce temps, à Rome, le Pape célébrait la<br />
Messe de 7 heures à la chapelle de la maison Sainte-<br />
Marthe. Il portait les ornements liturgiques des fêtes<br />
de la Sainte Vierge, mais il n’a pas soufflé mot de<br />
l’anniversaire du jour, du 13 mai ! S’inspirant de la<br />
première lecture de la Messe, où l’apôtre P<strong>au</strong>l demande<br />
<strong>au</strong>x Éphésiens : « “ Quand vous êtes devenus<br />
croyants, avez-vous reçu le Saint-Esprit ? » et ils lui répondent<br />
: “ Nous n’avons même pas appris qu’il y a le<br />
Saint-Esprit ” (Ac 19, 1-8), encore <strong>au</strong>jourd’hui, l’Esprit-<br />
Saint est toujours un peu l’inconnu de la foi », a-t-il<br />
dit en illustrant cette constatation par une anecdote<br />
personnelle : « Une fois, lorsque j’étais curé de paroisse,<br />
durant la messe pour les enfants, le jour de la<br />
Pentecôte, j’ai demandé : “ Qui sait qui est l’Esprit-<br />
Saint ? ” Et tous les enfants ont levé la main... L’un<br />
d’eux a répondu : “ Le paralytique ( il paralitico) ! ” Il<br />
avait entendu “ paraclet (paraclito) ”, et avait compris<br />
“ paralytique (paralitico) ” ! »<br />
Le Pape a poursuivi en mettant en lumière le rôle<br />
de l’Esprit-Saint annoncé par Jésus : « “ Il vous enseignera<br />
tout et vous rappellera tout ce que je vous ai dit. ”<br />
(Jn 14, 26). » Par conséquent, « l’Esprit-Saint c’est<br />
Dieu actif en nous... Dieu qui fait se réveiller la<br />
mémoire. L’Esprit-Saint nous aide à faire mémoire ”,<br />
a-t-il expliqué.<br />
Pour le Pape, il est « important, de faire mémoire<br />
” », car « un chrétien sans mémoire n’est pas<br />
un vrai chrétien : c’est un homme ou une femme prisonnier<br />
du moment ». Au moment où il semble, luimême,<br />
oublier le 13 mai !<br />
Sans mémoire, le chrétien « a une histoire » mais<br />
« il ne sait pas comment mettre à profit son histoire »,<br />
a insisté le Pape, soulignant le rôle de l’Esprit-Saint<br />
dans ce contexte : « <strong>La</strong> mémoire qui vient du cœur est<br />
une grâce de l’Esprit-Saint. » Par exemple celle que<br />
Jacinthe exprimait lorsqu’elle disait : « Ah ! si je pouvais<br />
mettre dans tous les cœurs le feu que j’ai là, dans<br />
ma poitrine, et qui me brûle et me fait tant aimer le<br />
Cœur de Jésus et le Cœur de Marie ! »<br />
Cette mémoire, a-t-il précisé, c’est notamment la<br />
mémoire « de ses misères, de ses péchés », la mémoire<br />
« de son esclavage du péché », mais <strong>au</strong>ssi la mémoire<br />
« du salut » de Dieu... par le Cœur Immaculé de Marie<br />
qui nous a enseigné cette prière le 13 juillet 1917 :<br />
« Ô MON JÉSUS, PARDONNEZ- NOUS NOS PÉCHÉS, PRÉ-<br />
SERVEZ- NOUS DU FEU DE L’ ENFER, ET CONDUISEZ AU CIEL<br />
TOUTES LES ÂMES, SURTOUT CELLES QUI ONT LE PLUS<br />
BESOIN DE VOTRE MISÉRICORDE. »<br />
<strong>La</strong> mémoire est bénéfique également à celui qui est<br />
tenté par la vanité « et croit être un peu le “ prix<br />
Nobel ” de la sainteté », a fait observer le pape<br />
François. Il s’agit dans ce cas de se rappeler de ces<br />
moments où il était « tout derrière, dans le troupe<strong>au</strong> ».<br />
« Je voudrais <strong>au</strong>jourd’hui demander la grâce de cette<br />
mémoire, pour nous tous », demander « à l’Esprit-Saint<br />
qu’il nous rende tous hommes et femmes “ de mémoire ”,<br />
comme la Vierge Marie, “ femme de la mémoire ” », a<br />
conclu le Pape. Allusion à l’Évangile où saint Luc<br />
écrit que la Vierge Marie « conservait avec soin toutes ces<br />
choses dans son cœur » pour les méditer (Lc 2, 19 et 51).<br />
Mais alors, le silence sur le 13 mai 1917 n’est pas<br />
un “ oubli ”...! Comment le comprendre ?<br />
C’est très simple. Depuis la publication du “ troisième<br />
secret ” en 2000, le commentaire qu’en a fait le<br />
cardinal Sodano s’est imposé à toute l’Église comme<br />
un jugement définitif : « Les situations <strong>au</strong>xquelles fait<br />
référence la troisième partie du “ secret ” de Fatima<br />
semblent désormais appartenir <strong>au</strong> passé. » Sentence<br />
confirmée par le cardinal Ratzinger, y ajoutant de son<br />
cru que « la parole-clef du “ secret ” [ les guillemets<br />
sont de lui ] “ Mon Cœur immaculé triomphera ” signifie<br />
« le triomphe de quiconque s’en remet à Dieu comme<br />
Marie, à la suite de Marie ».<br />
Ça n’est donc pas la victoire de Marie elle-même,<br />
mais « un appel à la liberté de tout chrétien d’entrer<br />
dans le dessein d’amour <strong>au</strong> quotidien de Dieu ». Dans<br />
son intention manifeste de prendre sans hiatus la suite
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 3<br />
de son prédécesseur, le pape François a préféré se<br />
cantonner dans un silence prudent.<br />
Quant à nous, afin de respecter son silence, adressons<br />
notre supplique à Notre-Dame, nous serons plus<br />
sûrs d’être ex<strong>au</strong>cés. Au moment où l’incendie syrien<br />
menace d’embraser le monde, il est urgent de se rappeler<br />
la recommandation instante que fit Jacinthe à<br />
Lucie avant de partir pour l’hôpital pour y mourir :<br />
« Il ne me reste plus be<strong>au</strong>coup de temps pour<br />
aller <strong>au</strong> Ciel. Toi, tu resteras ici afin de dire que<br />
Dieu veut établir dans le monde la dévotion <strong>au</strong> Cœur<br />
Immaculé de Marie. Le moment venu de le dire, ne te<br />
cache pas. Dis à tout le monde que Dieu nous accorde<br />
ses grâces par le moyen du Cœur Immaculé de Marie ;<br />
que c’est à elle qu’il f<strong>au</strong>t les demander ; que le Cœur de<br />
Jésus veut qu’on vénère avec lui le Cœur Immaculé de<br />
Marie ; que l’on demande la paix <strong>au</strong> Cœur Immaculé de<br />
Marie, car c’est à elle que Dieu l’a confiée. »<br />
SUPPLIQUE À NOTRE - DAME DU SAINT ROSAIRE<br />
Doux Cœur de Marie, soyez le salut de notre Saint-<br />
Père, le pape François ! Cœur Immaculé de Marie,<br />
convertissez les pécheurs par son ministère ! À sa<br />
prière, s<strong>au</strong>vez les âmes de l’enfer !<br />
Ô Marie, nouvelle Ève “ séduite ” comme l’ancienne,<br />
mais par Dieu à la voix de l’Ange vous disant :<br />
« Réjouissez-vous, comblée de grâce ! Le Seigneur est<br />
avec vous, Voici que vous concevrez et enfanterez un<br />
Fils et vous lui donnerez le nom de Jésus », faites la<br />
grâce à notre pape François de s<strong>au</strong>ver l’humanité en<br />
répondant à vos demandes : « Qu’il me soit fait, Mère,<br />
selon votre parole. »<br />
Votre seule présence, ô Marie, attire les grâces qui<br />
convertissent et sanctifient les âmes, puisque la grâce<br />
jaillit du Divin Cœur de Jésus sur nous tous en passant<br />
par vos mains maternelles. Demeurez <strong>au</strong>près du pape<br />
François, Vicaire de votre Divin Fils, afin que la grâce<br />
et la miséricorde qui coulent de votre Cœur Immaculé<br />
atteignent par son ministère toutes les âmes qui accourent<br />
à Rome <strong>au</strong> seul son de sa voix et se rassemblent<br />
<strong>au</strong>tour de lui comme un immense et unique troupe<strong>au</strong><br />
dans un unique bercail.<br />
Aujourd’hui à Rome, comme jadis à Bethléem pour<br />
les bergers et les mages, c’est Noël pour tous, p<strong>au</strong>vres<br />
et riches, juifs et païens : « Dieu avec nous ! » Enfant<br />
Jésus né de votre sein virginal, ô Marie, Verbe de Dieu<br />
poursuivant par Vous, en Vous, avec Vous et pour Vous,<br />
une existence humaine, fraternelle, <strong>au</strong>près de nous,<br />
comme un frère, un compagnon de route, un Maître et,<br />
à la fin, un S<strong>au</strong>veur... si toutefois nous recevons de<br />
votre sein votre Fils à aimer, et si nous reconnaissons<br />
sa Face reflétée par son Vicaire, le pape François,<br />
« comme se voient les personnes dans un miroir quand elles<br />
passent devant », comme dit votre mystérieux secret.<br />
Ce Pape « p<strong>au</strong>vre pour les p<strong>au</strong>vres » nous révèle<br />
que notre Dieu tout-puissant aime la petitesse, la p<strong>au</strong>vreté,<br />
la fragilité.<br />
Saint Joseph, votre époux véritable et chaste,<br />
homme juste et mystérieusement père de Jésus, fut<br />
<strong>au</strong>près de vous, ô Marie, la parfaite figure de notre très<br />
chéri Père Céleste. Que le pape François soit, à sa<br />
ressemblance, le gardien et le père nourricier de notre<br />
foi <strong>catholique</strong> retrouvée, comme Joseph fut le gardien<br />
de votre virginité, ô Marie ! Et quand il <strong>au</strong>ra rest<strong>au</strong>ré<br />
le dogme de la foi dans toute sa pureté par son<br />
enseignement quotidien, enflammez son cœur de pasteur<br />
du désir de consoler votre Cœur Immaculé en lui<br />
consacrant la part de votre troupe<strong>au</strong> dispersé dans<br />
l’immense Russie, afin que, tels les bergers de Bethléem,<br />
ravis d’admiration devant la be<strong>au</strong>té indicible de<br />
votre doux visage empreint de grâce et de tendresse,<br />
ils naissent de nouve<strong>au</strong> de votre sein virginal et fassent<br />
acte d’allégeance à l’Église <strong>catholique</strong> romaine.<br />
Donnez <strong>au</strong> Saint-Père, votre « évêque vêtu de blanc »,<br />
de pénétrer le “ secret ” d’une connaissance pleine<br />
d’amour des mystères de votre saint Rosaire, ô Immaculée<br />
Conception, fille du Dieu Très-H<strong>au</strong>t, en qui le Fils,<br />
votre Époux divin, se fit une chair d’enfant, un Corps et<br />
un Cœur qu’il immola un jour pour opérer le salut du<br />
monde. Afin que le Pape recommande à tous ses enfants<br />
la méditation de vos mystères joyeux, douloureux et<br />
glorieux par la pratique des premiers samedis du mois,<br />
selon votre parole à Lucie, la voyante de Fatima.<br />
Vierge Mère de Dieu et notre Mère, nous, vos<br />
phalangistes, anciens d’hier et nouve<strong>au</strong>x d’<strong>au</strong>jourd’hui,<br />
nous consacrons entièrement à votre Cœur Immaculé<br />
tout ce que nous sommes et tout ce que nous possédons,<br />
sous la houlette du Saint-Père, le pape François<br />
que Dieu a donné à son Église pour la reconstruire.<br />
Prenez-le sous votre maternelle protection, et nous<br />
avec lui. Défendez-nous des périls, aidez-nous à vaincre<br />
les tentations qui nous sollicitent <strong>au</strong> mal, et à<br />
conserver la pureté de l’âme et du corps, en nous<br />
faisant une âme de p<strong>au</strong>vre. Que votre Cœur Immaculé<br />
soit son refuge et le chemin qui le conduise à Dieu, et<br />
nous avec lui, marchant à sa suite, comme des brebis<br />
confiantes et dociles.<br />
Accordez-nous la grâce de prier avec lui et de nous<br />
sacrifier par amour pour Jésus, pour la conversion des<br />
pécheurs et en réparation des péchés commis contre<br />
votre Cœur Immaculé.<br />
Par votre médiation et en union avec le Cœur de<br />
votre Divin Fils, nous voulons vivre pour la Très<br />
Sainte Trinité, en qui nous croyons et espérons, que<br />
nous adorons et que nous aimons. Ainsi soit-il !<br />
frère Bruno de Jésus-Marie.
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 4<br />
MISÉRICORDE<br />
C’est le premier mot de ce Pape, dès son avènement<br />
: « miserando », élu en vertu de la divine miséricorde<br />
qui nous a enfin pris en pitié, nous, les brebis de<br />
son troupe<strong>au</strong>, après cinquante ans d’errance sans pasteur<br />
: « atque eligendo »...<br />
Dans son premier ANGÉLUS, il a raconté un dialogue<br />
digne de celui de Jésus avec la Samaritaine :<br />
« Une dame âgée est venue vers moi, humble, très<br />
humble, à plus de quatre-vingts ans. Je l’ai regardée<br />
et je lui ai dit : Grand-mère, parce que chez nous on<br />
s’adresse ainsi <strong>au</strong>x personnes âgées, grand-mère, vous<br />
voulez vous confesser ?<br />
– Oui, m’a-t-elle dit.<br />
– Mais si vous n’avez pas péché... Et elle m’a dit :<br />
– Nous faisons tous des péchés.<br />
– Mais peut-être que le Seigneur ne les pardonne pas...<br />
– Le Seigneur pardonne tout, m’a-t-elle dit avec<br />
assurance.<br />
– Mais comment le savez-vous, madame ?<br />
– Si le Seigneur ne pardonnait pas tout, le monde<br />
n’existerait pas. ”<br />
« J’ai eu envie, a ajouté le Pape, de lui demander :<br />
“ Mais dites-moi, madame, vous avez étudié à la Grégorienne<br />
? ” Parce que c’est la sagesse que donne<br />
l’Esprit-Saint, la sagesse intérieure sur la miséricorde<br />
de Dieu. »<br />
C’est <strong>au</strong>ssi son secret à lui, Souverain Pontife.<br />
<strong>La</strong> miséricorde ! Georges-Mario Bergoglio l’a pour<br />
ainsi dire rencontrée à l’âge de dix-sept ans lors d’une<br />
confession, le 21 septembre 1953, jour de la fête de<br />
saint Matthieu. Avant de retrouver des amis avec lesquels<br />
il avait rendez-vous, il voulut s’arrêter dans une<br />
église, y rencontra un prêtre, se confessa... et entendit<br />
l’appel à la vie religieuse. « Il se passa quelque<br />
chose » : miserando atque eligendo, l’expérience de la<br />
miséricorde, en vertu de laquelle il comprit que « Dieu<br />
nous attend le premier ». Il ne rejoignit pas ses amis.<br />
Décida qu’il serait religieux. Pourquoi dans la Compagnie<br />
de Jésus ? Attiré par sa force conquérante <strong>au</strong><br />
sein de l’Église, par le vœu d’obéissance qui donne<br />
pleine efficacité à cet élan missionnaire. Il <strong>au</strong>rait voulu<br />
aller <strong>au</strong> Japon, mais sa faible santé le lui interdit.<br />
Aujourd’hui, le voilà en position d’<strong>au</strong>torité sur toute<br />
l’Église pour y rest<strong>au</strong>rer la vie religieuse et relancer la<br />
mission sur les cinq continents.<br />
LE NOVICIAT DE LA SOUFFRANCE.<br />
CONFESSEUR ET PONTIFE<br />
Quelques années après avoir entendu cet appel, il se<br />
débattit pendant trois jours entre la vie et la mort<br />
jusqu’à ce que les médecins découvrent trois kystes qui<br />
nécessitèrent l’ablation d’une partie du poumon droit.<br />
Ce furent des heures de souffrance indicible : tous les<br />
jours, il fallait injecter du sérum pour nettoyer la plèvre<br />
et les cicatrices, par des sondes reliées à un aspirateur...!<br />
Brûlant de fièvre, il étreignait sa mère : « Maman !<br />
explique-moi ce qui m’arrive... » Un jour, une religieuse<br />
du nom de sœur Dolores, qu’il n’avait jamais<br />
oubliée depuis quelle l’avait préparé à la première<br />
communion, répondit à la question d’une manière qui<br />
demeura gravée dans son cœur et l’établit dans une<br />
inaltérable paix : « Tu es en train d’imiter Jésus ! »<br />
Depuis, il n’a plus cessé de souffrir de ce poumon<br />
infirme, et donc d’imiter Jésus, comprenant que « la<br />
p<strong>au</strong>vreté s’apprend en touchant la chair du Christ p<strong>au</strong>vre,<br />
dans les humbles, dans les malades, dans les enfants<br />
», comme il l’a dit le 8 mai <strong>au</strong>x membres de l’UNION<br />
INTERNATIONALE DES SUPÉRIEURES GÉNÉRALES réunies à<br />
Rome pour un colloque sur le thème du “ SERVICE DE<br />
L’AUTORITÉ SELON L’ÉVANGILE ”.<br />
MISERANDO ATQUE ELIGENDO.<br />
Telle était sa devise épiscopale, qu’il a conservée<br />
sur le trône pontifical où il siège pour notre joie par<br />
une incommensurable miséricorde de notre très chéri<br />
Père Céleste. Le cardinal Barbarin a expliqué ce que<br />
ça veut dire, dans la préface du livre signé Jorge Mario<br />
Bergoglio, pape François : “ AMOUR, SERVICE ET HUMI-<br />
LITÉ ”, qui rappelle “ HUMBLEMENT VÔTRE ” de Jean-<br />
P<strong>au</strong>l I er . Paru le Vendredi saint :<br />
“ Miserando atque eligendo ” : « L’expression est empruntée<br />
à Bède le Vénérable dans son commentaire de<br />
l’appel de saint Matthieu » :<br />
« Étant sorti, Jésus vit, en passant, un homme assis<br />
<strong>au</strong> bure<strong>au</strong> de la douane, appelé Matthieu (appelé Lévi<br />
par saint Marc et saint Luc), et il lui dit : “ Suis-moi ! ”<br />
Et se levant, il le suivit. » (Mt 9, 9)<br />
Le regard de Jésus sur Matthieu ! Le jeune Georges-<br />
Mario l’a vu se tourner vers lui :<br />
« Au moment même où le Seigneur fait miséricorde,<br />
miserando, à quelqu’un, il le choisit, eligendo, il<br />
l’inonde de sa grâce, et ce cade<strong>au</strong> de Dieu devient sa<br />
mission », écrit le cardinal Barbarin.<br />
« C’est l’histoire de François, le Poverello d’Assise,<br />
qui, retourné par la miséricorde de Dieu dans sa prison,<br />
à Spoleto, partira sur les routes comme un pèlerin,<br />
un p<strong>au</strong>vre troubadour, annonçant l’Évangile à toute la<br />
création. C’est <strong>au</strong>ssi le chemin spirituel d’Ignace de<br />
Loyola. Il rêvait de gloire et de faits d’armes mais,<br />
blessé dans son corps [<strong>au</strong> siège de Pampelune], puis<br />
bouleversé par la lecture des vies de saints, à Loyola,<br />
il devint un compagnon de Jésus, brûlant de communiquer<br />
à tous la joie de la miséricorde. »<br />
C’est <strong>au</strong>jourd’hui l’histoire du pape François, brûlant<br />
de communiquer à la ville de Rome et <strong>au</strong> monde<br />
entier le feu qui le brûle à son tour.
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 5<br />
LA CHARTE D’UN PONTIFICAT<br />
Élu le 13 mars, par une « miséricorde » toute particulière,<br />
miserando, de notre très chéri Père Céleste, le<br />
nouve<strong>au</strong> Pape a commencé par faire prier son peuple,<br />
avec les prières qu’un chacun apprend <strong>au</strong> berce<strong>au</strong>, puis<br />
il s’est rendu en pèlerinage à la basilique Sainte-Marie-<br />
Majeure, pour que la Vierge Marie « protège Rome<br />
tout entière ». Visite hors protocole, <strong>au</strong> petit matin !<br />
Et <strong>au</strong>ssitôt, dès ce même 14 mars, il a annoncé son<br />
“ programme ” <strong>au</strong>x cardin<strong>au</strong>x qui l’avaient élu, dans sa<br />
première homélie pontificale prononcée <strong>au</strong> cours de la<br />
Messe qu’il a célébrée en la chapelle Sixtine, à<br />
17 heures. Il a parlé debout, sans papier, en italien,<br />
d’abondance du cœur :<br />
« Dans ces trois lectures (Is 2, 2-5 ; 1 P 2, 1-9 ;<br />
Mt 16, 13-19), je vois qu’il y a quelque chose de<br />
commun : c’est le mouvement. Dans la première lecture<br />
le mouvement sur le chemin ; dans la deuxième, le<br />
mouvement dans l’édification de l’Église ; dans la troisième,<br />
dans l’Évangile, le mouvement dans la confession.<br />
Marcher, édifier, confesser. »<br />
MARCHER.<br />
« Il arrivera dans la suite des temps que la montagne<br />
de la maison de Yahweh sera établie en tête des<br />
montagnes et s’élèvera <strong>au</strong>-dessus des collines. Alors<br />
toutes les nations afflueront vers elle, alors viendront<br />
des peuples nombreux qui diront : “ Venez, montons à la<br />
montagne de Yahweh, à la maison du Dieu de Jacob, qu’il<br />
nous enseigne ses voies et que nous suivions ses sentiers. ”<br />
Car de Sion vient la Loi et de Jérusalem la parole de<br />
Yahweh. Il jugera entre les nations, il sera l’arbitre de<br />
peuples nombreux. Ils briseront leurs épées pour en<br />
faire des socs et leurs lances pour en faire des serpes.<br />
On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on<br />
n’apprendra plus à faire la guerre. Maison de Jacob,<br />
allons, marchons à la lumière de Yahweh. L’éclat de la<br />
majesté de Yahweh. » (Is 2, 2-5)<br />
« MARCHER. “ Maison de Jacob, allons, marchons à la<br />
lumière du Seigneur. ” (Is 2, 5) C’est la première chose<br />
que Dieu a dite à Abraham : Marche en ma présence et<br />
sois irrépréhensible.<br />
« Marcher : notre vie est une marche et quand nous<br />
nous arrêtons, cela ne va plus. Marcher toujours, en<br />
présence du Seigneur, à la lumière du Seigneur, cherchant<br />
à vivre avec cette irréprochabilité que Dieu demandait<br />
à Abraham, dans sa promesse. »<br />
Marcher : remettre en marche une Église condamnée<br />
à l’immobilisme conciliaire depuis cinquante ans,<br />
et qui est devenue tellement répréhensible qu’elle est<br />
c<strong>au</strong>se d’un épouvantable scandale...<br />
ÉDIFIER.<br />
<strong>La</strong> deuxième lecture était un passage de la première<br />
Épître de saint Pierre :<br />
« Comme des enfants nouve<strong>au</strong>-nés, désirez le lait<br />
non frelaté de la parole, afin que, par lui, vous crois-<br />
siez pour le salut, si du moins vous avez goûté combien<br />
le Seigneur est excellent. Approchez-vous de lui,<br />
la pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie,<br />
précieuse <strong>au</strong>près de Dieu. Vous-mêmes, comme pierres<br />
vivantes, prêtez-vous à l’édification d’un édifice spirituel,<br />
pour un sacerdoce saint, en vue d’offrir des<br />
sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus-<br />
Christ. Car il y a dans l’Écriture : Voici que je pose en<br />
Sion une pierre angulaire, choisie, précieuse, et celui qui<br />
se confie en elle ne sera pas confondu. À vous donc, les<br />
croyants, l’honneur, mais pour les incrédules, la pierre<br />
qu’ont rejetée les constructeurs, celle-là est devenue la<br />
tête de l’angle, une pierre d’achoppement et un rocher<br />
qui fait tomber. Ils s’y heurtent parce qu’ils ne croient<br />
pas à la Parole ; c’est bien à cela qu’ils ont été<br />
destinés. Mais vous, vous êtes une race élue, un sacerdoce<br />
royal, une nation sainte, un peuple acquis, pour<br />
proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés<br />
des ténèbres à son admirable lumière. » (1 P 2, 4-9)<br />
« ÉDIFIER l’Église. On parle de pierres : les pierres<br />
ont une consistance ; mais des pierres vivantes, des<br />
pierres ointes par l’Esprit-Saint. Édifier l’Église,<br />
l’Épouse du Christ, sur cette pierre angulaire qui est<br />
le Seigneur lui-même. Voilà un <strong>au</strong>tre mouvement de<br />
notre vie : édifier. »<br />
Afin de reconstruire une Église « à moitié en ruine », à<br />
moitié seulement puisqu’elle a retrouvé la « pierre angulaire<br />
» rejetée par les réformateurs du concile Vatican II,<br />
en la personne de François, successeur de Pierre.<br />
CONFESSER.<br />
À la question de Jésus, « Simon-Pierre répondit :<br />
“ Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. ” En réponse,<br />
Jésus lui dit : “ Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car<br />
cette révélation t’est venue, non de la chair et du sang,<br />
mais de mon Père qui est dans les cieux. Eh bien ! moi<br />
je te dis : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon<br />
Église, et les Portes de l’Hadès ne tiendront pas contre<br />
elle. Je te donnerai les clefs du Roy<strong>au</strong>me des Cieux :<br />
quoi que tu lies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux<br />
pour lié, et quoi que tu délies sur la terre, ce sera tenu<br />
dans les cieux pour délié. ” (Mt 16, 13-19)<br />
« Troisièmement, CONFESSER [ non pas <strong>au</strong> sens de confesser<br />
ses péchés, mais <strong>au</strong> sens de proclamer sa foi ].<br />
Nous pouvons marcher comme nous voulons, nous<br />
pouvons édifier de nombreuses choses, mais si nous ne<br />
confessons pas Jésus-Christ, cela ne va pas. Nous deviendrons<br />
une ONG compatissante, mais non l’Église,<br />
Épouse du Seigneur. Quand on ne marche pas, on s’arrête.<br />
Quand on n’édifie pas sur les pierres, qu’est-ce qui<br />
arrive ? Il arrive ce qui arrive <strong>au</strong>x enfants sur la plage<br />
quand ils font des châte<strong>au</strong>x de sable, tout s’écroule,<br />
c’est sans consistance [ tout le Concile est résumé dans<br />
cette image : des châte<strong>au</strong>x de sable ! ]. Quand on ne confesse<br />
pas Jésus-Christ, me vient la phrase de Léon<br />
Bloy : “ Celui qui ne prie pas le Seigneur, prie le diable. ”<br />
Quand on ne confesse pas Jésus-Christ, on confesse la<br />
mondanité du diable, la mondanité du démon. »
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 6<br />
Ou le Seigneur ou le diable. Il n’y a pas de milieu.<br />
Mais tous sont appelés à « confesser le Seigneur » : les<br />
juifs, les musulmans, les bouddhistes, les confucianistes,<br />
les athées...<br />
Léon Bloy ne fait que transcrire l’algarade qui a<br />
suivi la “ confession ” de Pierre, lorsque celui-ci voulut<br />
faire « obstacle » (skandalon) à la marche du Christ<br />
vers la Croix, se faisant ainsi le suppôt de Satan luimême<br />
: « Passe dernière moi, Satan, tu me fais obstacle,<br />
car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celle des<br />
hommes ! » (Mt 16, 23) C’est d’ailleurs ce que va évoquer<br />
le Pape en continuant :<br />
« Marcher, édifier - construire, confesser. Mais la chose<br />
n’est pas si facile, parce que dans le fait de marcher,<br />
de construire, de confesser, bien des fois il y a des<br />
secousses, il y a des mouvements qui ne sont pas<br />
exactement des mouvements de la marche : ce sont des<br />
mouvements qui nous tirent en arrière.<br />
« Cet Évangile poursuit avec une situation spéciale.<br />
Le même Pierre qui a confessé Jésus-Christ lui dit : Tu<br />
es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Je te suis, mais ne<br />
parlons pas de Croix. Cela n’a rien à voir. Je te suis<br />
avec d’<strong>au</strong>tres possibilités, sans la Croix.<br />
« Quand nous marchons sans la Croix, quand nous<br />
édifions sans la Croix et quand nous confessons un<br />
Christ sans Croix, nous ne sommes pas disciples du<br />
Seigneur : nous sommes mondains, nous sommes des<br />
évêques, des prêtres, des cardin<strong>au</strong>x, des Papes, mais<br />
pas des disciples du Seigneur. »<br />
« Des Papes »... trois Papes ! et même quatre :<br />
Jean XXIII, P<strong>au</strong>l VI, Jean-P<strong>au</strong>l II, Benoît XVI. François<br />
ne dit pas cela. Mais il ne fait rien pour nous<br />
dissuader de le penser. De toute façon, il ne regarde<br />
pas en arrière :<br />
« Je voudrais que tous, après ces jours de grâce,<br />
nous ayons le courage, vraiment le courage, de<br />
marcher en présence du Seigneur, avec la Croix du<br />
Seigneur ; d’édifier l’Église sur le sang du Seigneur,<br />
qui est versé sur la Croix ; et de confesser l’unique<br />
gloire : le Christ crucifié. Et ainsi l’Église ira de<br />
l’avant. Je souhaite à nous tous que l’Esprit-Saint,<br />
par la prière de la Vierge, notre Mère, nous accorde<br />
cette grâce : marcher, édifier, confesser Jésus-Christ<br />
crucifié. Qu’il en soit ainsi ! »<br />
RETOUR SUR LE CONCLAVE<br />
Le lendemain vendredi 15 mars, le pape François<br />
prononce un discours très, très surprenant :<br />
Après avoir adressé « une pensée pleine d’affection<br />
et de profonde gratitude » à son « vénéré prédécesseur<br />
Benoît XVI qui, dans les années de son pontificat, a<br />
enrichi et fortifié l’Église par son magistère et par la<br />
manière dont il l’a guidée, par sa bonté, sa foi, son<br />
humilité, sa douceur », le pape François a eu cette<br />
parole surprenante, qui lève peut-être le voile sur les<br />
“ secrets ” du Conclave :<br />
« Chers frères cardin<strong>au</strong>x, notre rencontre de ce jour<br />
veut être une sorte de prolongement de l’intense communion<br />
ecclésiale que nous avons expérimentée pendant<br />
cette période. Animés d’un profond sens de notre<br />
responsabilité et soutenus par un grand amour pour le<br />
Christ et pour l’Église, nous avons prié ensemble,<br />
partageant fraternellement nos sentiments, nos expériences<br />
et nos réflexions. Dans ce climat de grande<br />
cordialité, la connaissance réciproque et l’ouverture<br />
mutuelle ont grandi et c’est une bonne chose parce<br />
que nous sommes frères. Quelqu’un m’a dit : Les cardin<strong>au</strong>x<br />
sont les prêtres du Saint-Père. Cette commun<strong>au</strong>té,<br />
cette amitié, cette proximité nous fera du bien à tous.<br />
Et cette connaissance et cette ouverture mutuelle nous<br />
ont aidés à être dociles à l’action de l’Esprit-Saint.<br />
C’est lui, le Paraclet, l’acteur principal et suprême<br />
de toute initiative et de toute manifestation de la foi.<br />
C’est curieux : moi, ça me fait réfléchir. Le Paraclet<br />
LE PAPE FRANÇOIS ALLUME UN INCENDIE DANS LA CHAPELLE SIXTINE<br />
I<br />
« L y a eu un visage, des gestes<br />
et quelques mots, du nouve<strong>au</strong><br />
pape François. Mais sa première<br />
homélie – improvisée – dans la chapelle<br />
Sixtine, a quelque chose d’une flamme.<br />
C’est même du feu. Jamais un Pape,<br />
même Jean-P<strong>au</strong>l II, n’a osé parler<br />
<strong>au</strong>ssi crûment en public. Benoît XVI<br />
avait eu ce type de discours, le<br />
Vendredi saint, mais c’était juste avant<br />
son élection.<br />
« Ce qui impose déjà un style<br />
radicalement neuf et décapant. Une<br />
grande liberté intérieure <strong>au</strong>ssi. Le<br />
pape François n’a pas voulu du texte<br />
que ses services lui avaient préparé.<br />
Il s’est lancé et a improvisé une<br />
homélie de sept minutes pile qui a<br />
laissé les cardin<strong>au</strong>x bouches bées.<br />
Comme des enfants devant un maître<br />
spirituel.<br />
« Car c’est la grande tradition jésuite<br />
qu’il incarne. Celle de ces religieux à<br />
la fois aiguisés intellectuellement mais<br />
“ fous ” du Christ. C’est-à-dire vivant,<br />
en profondeur, avec “ le Seigneur ”,<br />
comme il l’a dit, centre et source de<br />
leur vie. Mais dont ils sont animés<br />
comme un feu.<br />
« Cette homélie radicale n’a rien<br />
d’intégriste mais elle va plaire <strong>au</strong>x<br />
milieux traditionalistes. Cette homélie<br />
dérangeante n’a rien de progressiste<br />
mais elle va provoquer les milieux de<br />
g<strong>au</strong>che. Cette homélie est bigrement<br />
<strong>catholique</strong> !<br />
« Du coup, il découvre d’un trait les<br />
comportements lourds de la machine<br />
vaticane et certaines dérives cléricales.<br />
Il lance une sorte de “ J’accuse ” à<br />
des témoins du Christ qui n’en sont<br />
plus. Et introduit son pontificat par un<br />
examen de conscience qui interroge<br />
tout le monde.<br />
« Ne pas se tromper, donc, sur<br />
l’identité de ce jésuite devenu Pape.<br />
Ce n’est pas une victoire de la<br />
g<strong>au</strong>che de l’Église sur sa droite. C’est<br />
l’avènement d’un religieux, évêque<br />
et cardinal vivant de façon évangélique,<br />
mais animé par une foi<br />
profonde, <strong>catholique</strong>, qui le rend<br />
inclassable. »<br />
( Jean-Marie Guénois, 14 mars 2013)
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 7<br />
est l’<strong>au</strong>teur de toutes les différences dans les Églises<br />
et il semble être un apôtre de Babel. »<br />
Avouez que c’est une surprise ! Ce dévoilement<br />
des confrontations du Conclave, présenté comme une<br />
tour de Babel ! Car c’est cela. Autant dire qu’il a<br />
entrevu le Masdu postconciliaire... Et qu’en est-il<br />
sorti ? L’élection du pape François ! En vertu de cette<br />
affirmation par laquelle le Pape continue : « Mais<br />
d’<strong>au</strong>tre part, c’est lui qui fait l’unité de ces différences,<br />
non dans l’ “ égalité ”, mais dans l’harmonie. »<br />
Certes ! mais alors ce ne doit pas être l’œuvre du<br />
même “ Esprit ” que celui de « l’Apôtre de Babel » !<br />
Cependant, deuxième surprise, le pape François ne<br />
voit pas l’opposition de deux Esprits, Esprit de Babel,<br />
Esprit du Masdu d’une part, contre Esprit-Saint d’<strong>au</strong>tre<br />
part ; il ne voit que « l’harmonie » dont le Saint-Esprit<br />
est effectivement l’artisan depuis le 13 mars 2013 :<br />
« Je me souviens de ce Père de l’Église qui le définissait<br />
ainsi [ le Paraclet ] : “ Ipse harmonia est ”. »<br />
C’est précisément pourquoi il est impossible d’admettre<br />
qu’il était présent et agissant <strong>au</strong> Concile ! Car<br />
“ l’Esprit du Concile ” est un esprit de division, tandis<br />
que « le Paraclet, qui donne des charismes différents à<br />
chacun de nous, continue le Pape, nous unit dans cette<br />
commun<strong>au</strong>té d’Église qui adore le Père, le Fils et lui,<br />
l’Esprit-Saint ». Et non pas “ l’homme ” !<br />
En proclamant dans l’<strong>au</strong>la de Saint-Pierre, le 7 décembre<br />
1965, « le culte de l’homme » P<strong>au</strong>l VI a bien<br />
montré qu’il n’était pas de ce Saint-Esprit-là.<br />
Mais voici comment le pape François nous libère<br />
de l’Esprit conciliaire :<br />
« C’est précisément en partant de cette <strong>au</strong>thentique<br />
affection collégiale, qui unit le collège cardinalice, que<br />
j’exprime ma volonté de servir l’Évangile avec un<br />
amour renouvelé, en aidant l’Église à devenir de plus<br />
en plus, dans le Christ et avec le Christ, la vigne<br />
féconde du Seigneur. Stimulés <strong>au</strong>ssi par la célébration<br />
de l’Année de la foi, tous ensemble, pasteurs et fidèles,<br />
nous nous efforcerons de répondre fidèlement à la<br />
mission de toujours : apporter Jésus-Christ à l’homme<br />
et conduire l’homme à la rencontre avec Jésus-Christ,<br />
qui est le chemin, la vérité et la vie, réellement présent<br />
dans l’Église et contemporain de tout homme [et non<br />
pas “ uni à tout homme ” ]. Une telle rencontre fait de<br />
nous des hommes nouve<strong>au</strong>x dans le mystère de la<br />
grâce, suscitant dans notre esprit cette joie chrétienne<br />
qui constitue le centuple donné par le Christ à celui<br />
qui l’accueille dans sa propre existence. »<br />
Encore f<strong>au</strong>t-il l’accueillir ! Mais je suis en train de<br />
faire valoir des oppositions que lui, le Pape, cherche à<br />
effacer. En effet, pour être plus sûr de ne pas introduire<br />
une nouvelle division qui serait un retour à “ Babel<br />
”, le pape François ajoute cet hommage senti à<br />
Benoît XVI :<br />
« Comme nous l’a rappelé si souvent le pape<br />
Benoît XVI dans ses enseignements et, enfin, à travers<br />
son geste humble et courageux, c’est le Christ qui<br />
guide l’Église par son Esprit. »<br />
Certes ! surtout par « son geste humble et courageux<br />
»... sa très opportune démission !<br />
« L’Esprit-Saint est l’âme de l’Église par sa force<br />
vivifiante et unifiante : d’une multitude il fait un seul<br />
corps, le Corps mystique du Christ. Ne cédons jamais<br />
<strong>au</strong> pessimisme, à cette amertume que le diable nous<br />
offre tous les jours ; ne cédons pas <strong>au</strong> pessimisme et<br />
<strong>au</strong> découragement : nous avons la ferme certitude<br />
que l’Esprit-Saint donne à l’Église, par son souffle<br />
puissant, le courage de persévérer et <strong>au</strong>ssi de chercher<br />
de nouvelles méthodes d’évangélisation, pour porter<br />
l’Évangile jusqu’<strong>au</strong>x extrémités de la terre (cf. Ac 1, 8).<br />
« <strong>La</strong> vérité chrétienne est attirante et persuasive<br />
parce qu’elle répond <strong>au</strong> besoin profond de l’existence<br />
humaine, en annonçant de manière convaincante que<br />
le Christ est l’unique S<strong>au</strong>veur de tout l’homme et de<br />
tous les hommes. Cette annonce demeure valide <strong>au</strong>jourd’hui,<br />
comme elle l’était <strong>au</strong> début du christianisme,<br />
<strong>au</strong> temps de la première grande expansion missionnaire<br />
de l’Évangile.<br />
« Chers frères, courage ! Pour la moitié d’entre<br />
nous, nous sommes déjà d’un âge avancé : j’aime bien<br />
dire que la vieillesse est le siège de la sagesse de la<br />
vie. Les personnes âgées ont la sagesse de ceux qui<br />
ont cheminé dans la vie, comme le vieillard Siméon et<br />
la vieille Anne <strong>au</strong> Temple. C’est justement cette<br />
vieillesse qui leur a permis de reconnaître Jésus.<br />
Donnons cette sagesse <strong>au</strong>x jeunes : comme le bon vin,<br />
qui se bonifie avec les années, donnons <strong>au</strong>x jeunes la<br />
sagesse de la vie. Il me vient à l’esprit ce qu’un poète<br />
allemand disait de la vieillesse : “ Es ist ruhig, das<br />
Alter, und fromm ” : c’est le temps de la tranquillité et<br />
de la prière. Et c’est <strong>au</strong>ssi le temps de donner cette<br />
sagesse <strong>au</strong>x jeunes.<br />
« Vous allez maintenant rentrer dans vos sièges respectifs<br />
pour poursuivre votre ministère, enrichis de l’expérience<br />
de ces derniers jours, si empreints de foi et<br />
de communion ecclésiale. Cette expérience tellement<br />
unique et incomparable, nous a permis de saisir en<br />
profondeur toute la be<strong>au</strong>té de la réalité ecclésiale qui est<br />
un reflet de la splendeur du Christ ressuscité : un jour,<br />
nous regarderons ce visage si be<strong>au</strong> du Christ ressuscité !<br />
« Je confie à la puissante intercession de Marie,<br />
notre Mère, Mère de l’Église, mon ministère et le vôtre.<br />
Sous son regard maternel, que chacun de nous puisse<br />
avancer joyeux et docile à la voix de son Divin Fils en<br />
renforçant l’unité, en persévérant d’un seul cœur dans<br />
la prière et en témoignant de la véritable foi en la<br />
présence continuelle du Seigneur. Avec ces sentiments,<br />
– qui sont véritables ! – avec ces sentiments, je vous<br />
donne de tout cœur la bénédiction apostolique. »<br />
Dès le lendemain, 16 mars, il a “ confessé ” devant<br />
des milliers de journalistes du monde entier :
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 8<br />
« Le Christ est le Pasteur de l’Église, mais sa présence<br />
dans l’histoire passe par la liberté des hommes :<br />
parmi eux l’un est choisi pour servir comme son Vicaire,<br />
Successeur de l’Apôtre Pierre, mais le Christ est<br />
le centre, non le Successeur de Pierre : le Christ. Le<br />
Christ est le centre. Le Christ est la référence fondamentale,<br />
le cœur de l’Église. Sans lui, Pierre et<br />
l’Église n’existeraient pas et n’<strong>au</strong>raient pas de raison<br />
d’être. Comme l’a répété plusieurs fois Benoît XVI, le<br />
Christ est présent et guide son Église. Dans tout ce<br />
qui est arrivé, le protagoniste est, en dernière analyse,<br />
l’Esprit-Saint. Il a inspiré la décision de Benoît XVI<br />
pour le bien de l’Église ; il a orienté les cardin<strong>au</strong>x<br />
dans la prière et dans l’élection.<br />
« Chers amis, il est important de tenir compte de cet<br />
horizon interprétatif, de cette herméneutique, pour mettre<br />
<strong>au</strong> point le cœur des événements de ces jours-ci. »<br />
LA BONNE ODEUR DU CHRIST<br />
« DIALOGUE D’AMOUR ».<br />
Le pape François nous explique gentiment qu’il ne<br />
veut pas des « potins assassins » entre nous parce que<br />
le dialogue de Jésus avec ses disciples est toujours<br />
« un dialogue d’amour », y compris après la trahison<br />
de Pierre. Suivez mon regard ! Tous les sous-entendus<br />
de ces sages recommandations sont d’un merveilleux<br />
à-propos ! Faisant allusion à la question de Pierre <strong>au</strong><br />
sujet de Jean, après la pêche miraculeuse ponctuée par<br />
l’appel de Jésus à Pierre : « “ Suis-moi. ” Se retournant,<br />
Pierre aperçoit, marchant à leur suite, le disciple<br />
que Jésus aimait », il demande : « Seigneur, et lui ? »<br />
(Jn 21, 20-21)<br />
« Se mêler de la vie de l’<strong>au</strong>tre a tant de modalités<br />
», dit le Pape, dressant la liste de cinq façons de<br />
communiquer qui sont « destructrices » dans l’Église :<br />
la comparaison, le “ potin ”, la désinformation, la diffamation<br />
et la calomnie.<br />
<strong>La</strong> “ comparaison ” évoque Pierre demandant à Jésus<br />
en désignant Jean :<br />
« Et lui, Seigneur, que lui arrivera-t-il ?<br />
– Si je veux qu’il reste jusqu’à ce que je vienne, est-ce<br />
ton affaire ? »<br />
Vous me suivez ? Benoît XVI est toujours là. Jusqu’à<br />
quand ? Ce n’est pas notre affaire.<br />
Le Pape a poursuivi en soulignant la duplicité du<br />
“ potin ”. « On commence par une expression de personne<br />
bien éduquée : “ Je ne veux dire de mal de personne<br />
mais il me semble que... ” et ça se termine en<br />
“ écorchant ” le prochain. » Comme disait naguère un<br />
vicaire général du diocèse de Troyes : « Je n’ai de<br />
haine pour personne, mais si j’en avais pour quelqu’un<br />
ce serait pour le curé de Villem<strong>au</strong>r, l’abbé de Nantes. »<br />
Il y a be<strong>au</strong>coup de “ potins ” qui circulent contre nous<br />
et nous font grand tort, mais si le pape François y met<br />
fin, quelle douceur, quelle aménité, quelle charité fraternelle<br />
va renaître dans l’Église !<br />
<strong>La</strong> “ désinformation ” revient à « dire seulement la<br />
moitié de la vérité ». <strong>La</strong> “ diffamation ” consiste à<br />
« faire le journaliste » lorsqu’ « une personne a fait une<br />
grosse f<strong>au</strong>te », et « détruire sa renommée ». Et la “ calomnie<br />
” : « dire des choses qui ne sont pas vraies »,<br />
c’est finalement « tuer le frère ».<br />
Autant de péchés mortels...<br />
Au reste, a ajouté le Pape, <strong>au</strong>cun discours portant<br />
atteinte à une personne n’est nécessaire : « Le Seigneur<br />
le sait, car il connaît ce qu’il y a dans l’homme. »<br />
« “ Suis-moi ! ” Cette réponse de Jésus à Pierre est<br />
belle. Elle est si claire, elle est pleine d’amour », s’est<br />
exclamé le Pape. « Ne rêvassez pas en pensant que le<br />
salut est dans la comparaison avec les <strong>au</strong>tres ou dans<br />
le commérage. Demandons <strong>au</strong> Seigneur qu’il nous<br />
donne cette grâce de ne pas nous mêler de la vie des<br />
<strong>au</strong>tres, de ne pas devenir des chrétiens de bonne manière<br />
et de m<strong>au</strong>vaises habitudes. » Je ne connais pas<br />
de meilleur commentaire à l’article 28 de notre Règle :<br />
« Les Petits frères du Sacré-Cœur s’aimeront tous comme<br />
les membres d’une même famille, l’Église. Ils ne compareront<br />
ni n’opposeront jamais leur Ordre à quelque commun<strong>au</strong>té<br />
que ce soit. Une seule existe pour leur cœur, celle qui<br />
les contient toutes : l’Église <strong>catholique</strong>. »<br />
JÉSUS SEUL !<br />
Combien étaient-ils ? Deux cent mille ? membres de<br />
“ mouvements ecclési<strong>au</strong>x ” des cinq continents, rassemblés<br />
pour la vigile de la fête de la Pentecôte, le 18<br />
mai, place Saint-Pierre, envahissant <strong>au</strong>ssi la via de la<br />
Conciliazione, sur le thème : “ Je crois ! Augmente en<br />
nous la foi ! ”<br />
Après l’intronisation de l’image de la Vierge SALUS<br />
POPULI ROMANI, vénérée à Sainte-Marie-Majeure, le<br />
chant du Veni Creator et l’office des vigiles, le Pape a<br />
écouté patiemment deux “ témoignages ”, dont celui du<br />
Pakistanais P<strong>au</strong>l Bhatti, frère du ministre Shahbaz<br />
Bhatti, assassiné en 2011 en haine de sa foi <strong>catholique</strong>.<br />
Puis le pape François a voulu répondre spontanément<br />
<strong>au</strong>x “ questions ” qui lui étaient posées ; parlant d’abondance<br />
du cœur, il s’est livré sans détour avec toute<br />
l’ardeur de son cœur de be<strong>au</strong> et bon pasteur. Comme on<br />
a raison de l’aimer !<br />
Première question : « COMMENT AVEZ-VOUS PU TROU-<br />
VER LA CERTITUDE DE LA FOI DANS VOTRE VIE, ET QUELLE<br />
ROUTE POUVEZ-VOUS NOUS INDIQUER POUR VAINCRE LA<br />
FRAGILITÉ DE LA FOI ? »<br />
Très bonne question qui souligne la certitude dont<br />
rayonne le Pape pour « confirmer » ses frères. Il a<br />
répondu en racontant comment il avait reçu « la première<br />
annonce de la foi » de sa grand-mère, comme<br />
Timothée à qui saint P<strong>au</strong>l rappelle « le souvenir de la<br />
foi sans détour qui, d’abord, résida dans le cœur de ta<br />
grand-mère Loïs et de ta mère Eunice et qui, j’en suis<br />
convaincu, réside également en toi. » (2 Tm 1, 5)
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 9<br />
« J’ai eu la grâce de grandir dans une famille où<br />
la foi se vivait de manière très simple et concrète ;<br />
mais c’est surtout ma grand-mère, la maman de mon<br />
père, qui a marqué mon chemin de foi. C’était une<br />
femme qui nous expliquait, qui nous parlait de Jésus,<br />
elle nous enseignait le catéchisme. Je me souviens que,<br />
le Vendredi saint, elle nous emmenait toujours, le soir,<br />
à la procession <strong>au</strong>x flambe<strong>au</strong>x, et à la fin de cette<br />
procession, quand arrivait le “ Christ gisant ”, ma<br />
grand-mère nous faisait agenouiller, nous les enfants,<br />
et nous disait : “ Regardez, il est mort, mais demain il<br />
ressuscitera. ”<br />
« C’est précisément de cette femme, de ma grandmère<br />
que j’ai reçu la première annonce de la foi !<br />
C’est très be<strong>au</strong>, cela ! <strong>La</strong> première annonce, à la<br />
maison, en famille ! Et cela me fait penser à l’amour<br />
de tant de mamans et de tant de grands-mères dans la<br />
transmission de la foi. C’est elles qui transmettent la<br />
foi. C’est ce qui se passait <strong>au</strong>ssi dans les premiers<br />
temps, parce que saint P<strong>au</strong>l disait à Timothée : “ J’évoque<br />
le souvenir de ta mère et de ta grand-mère. ” (cf.<br />
2 Tm 1, 5) Toutes les mamans qui sont ici, toutes les<br />
grands-mères, pensez à cela ! »<br />
Autrement dit : la “ nouvelle évangélisation ”, selon<br />
le pape François, n’est rien d’<strong>au</strong>tre que l’ancienne !<br />
que la réforme conciliaire a seulement éclipsé pendant<br />
cinquante ans.<br />
<strong>La</strong> “ théologie totale ” de l’abbé de Nantes, notre<br />
Père, est là, dans ces paroles du pape François : le<br />
baptême est un engendrement qui nous communique la<br />
foi et la vie de la grâce en nous faisant enfants de<br />
l’Église, car « nul n’a Dieu pour Père qui n’ait l’Église<br />
pour mère » (saint Cyprien).<br />
Puis il raconte sa confession du 21 septembre 1953<br />
que j’ai mentionnée en commençant, la grâce qui a<br />
décidé de toute sa vie. Il ajoute :<br />
« Nous disons que nous devons chercher Dieu, aller<br />
vers lui pour lui demander pardon, mais quand nous y<br />
allons, il nous attend. Lui le premier ! Chez nous, en<br />
espagnol, nous avons un mot qui explique bien cela :<br />
“ Le Seigneur nous primerea toujours ”, il est premier,<br />
il nous attend ! Et c’est vraiment une très grande<br />
grâce : trouver quelqu’un qui t’attend. Tu y vas, en<br />
pécheur, mais lui t’attendait pour te pardonner. C’est<br />
l’expérience que les prophètes d’Israël décrivaient<br />
quand ils disaient que le Seigneur est comme la<br />
fleur d’amandier, la première fleur du printemps<br />
(cf. Jr 1, 11-12). Avant que les <strong>au</strong>tres fleurs ne viennent,<br />
il est là : c’est lui, il t’attend. Le Seigneur nous attend.<br />
Et quand nous le cherchons, nous trouvons cette réalité<br />
: c’est lui qui nous attend pour nous accueillir,<br />
pour nous donner son amour. Et c’est une telle stupeur<br />
dans ton cœur que tu as du mal à y croire, et c’est<br />
comme cela que la foi grandit ! Par la rencontre avec<br />
une personne, par une rencontre avec le Seigneur [...].<br />
« Vous parliez <strong>au</strong>ssi de la fragilité de la foi, comment<br />
faire pour la vaincre. Le plus grand ennemi de la<br />
foi, – c’est curieux, hein ! – c’est la peur. Mais n’ayez<br />
pas peur ! Nous sommes fragiles, et nous le savons.<br />
Mais lui, il est plus fort ! Si tu vas avec lui, il n’y a<br />
pas de problème ! Un enfant est très fragile, j’en ai vu<br />
be<strong>au</strong>coup <strong>au</strong>jourd’hui, mais il était avec son papa,<br />
avec sa maman : il est en sécurité ! Avec le Seigneur,<br />
nous sommes sûrs. <strong>La</strong> foi grandit avec le Seigneur,<br />
justement de la main du Seigneur ; cela nous fait<br />
grandir et nous rend forts. Mais si nous croyons<br />
pouvoir nous débrouiller tout seuls... Pensons à ce<br />
qui est arrivé à Pierre : “ Seigneur, je ne te renierai<br />
jamais ! ” (cf. Mt 26, 33-35) ; et ensuite, le coq a chanté<br />
et il l’avait renié trois fois ! (cf. v. 69-75)<br />
« Réfléchissons : quand nous avons trop confiance<br />
en nous-mêmes, nous sommes plus fragiles.<br />
« Toujours avec le Seigneur ! Et quand on dit :<br />
“ avec le Seigneur ”, cela signifie avec l’Eucharistie,<br />
avec la Bible, avec la prière... mais <strong>au</strong>ssi en famille,<br />
avec notre maman, avec elle <strong>au</strong>ssi, parce c’est elle qui<br />
nous amène <strong>au</strong> Seigneur : elle est notre mère, elle sait<br />
tout. Et donc prier <strong>au</strong>ssi la Vierge Marie et lui<br />
demander, comme à une maman, qu’elle me rende fort.<br />
Voilà ce que je pense de la fragilité, c’est en tout cas<br />
mon expérience. Ce qui me rend fort, chaque jour,<br />
c’est de prier le chapelet avec la Vierge Marie. Je<br />
sens une force très grande parce que je vais à elle et<br />
je me sens fort. »<br />
LE TÉMOIGNAGE.<br />
Deuxième question : « COMMENT COMMUNIQUER DE<br />
FAÇON EFFICACE LA FOI D’AUJOURD’HUI ? »<br />
« Je dirai seulement trois mots.<br />
« Le premier, c’est JÉSUS. Quel est le plus important<br />
? C’est Jésus. Si nous nous appuyons sur l’organisation,<br />
sur d’<strong>au</strong>tres choses, de belles choses, mais sans<br />
Jésus, nous n’avançons pas, ça ne va pas. Jésus est<br />
plus important. Maintenant, je voudrais vous adresser<br />
un petit reproche, mais fraternellement, entre nous.<br />
Vous avez tous crié sur la place : “ François, François !<br />
pape François ! ” Mais Jésus, où était-il ? J’<strong>au</strong>rais<br />
voulu que vous criiez : “ Jésus, Jésus est le Seigneur, et<br />
il est vraiment <strong>au</strong> milieu de nous. ” Dorénavant, pas de<br />
“ François ”, mais “ Jésus ! ”<br />
« Le second mot est : la PRIÈRE. Regarder le visage<br />
de Dieu, mais surtout, et c’est lié à ce que j’ai dit<br />
avant, se sentir regardé. Le Seigneur nous regarde, il<br />
nous regarde le premier. C’est ce que j’expérimente<br />
devant le sagrario [ le tabernacle] quand je vais prier,<br />
le soir, devant le Seigneur. Quelquefois, je m’endors un<br />
peu, c’est vrai, parce qu’avec la fatigue de la journée,<br />
tu t’endors un peu. Mais lui, il me comprend. Et<br />
je ressens un tel réconfort quand je pense qu’il<br />
me regarde. Nous pensions que nous devons prier,<br />
parler, parler, parler... Non ! <strong>La</strong>isse-toi regarder par le<br />
Seigneur. Lorsqu’il nous regarde, il nous donne la<br />
force et nous aide à témoigner de lui – parce que la<br />
question était sur le témoignage de la foi, non ? Avant,
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“ Jésus ”, puis “ la prière ” – nous sentons que Dieu<br />
nous tient par la main. Je souligne alors l’importance<br />
de ceci : se laisser guider par lui. C’est plus important<br />
que n’importe quel calcul. Nous sommes de vrais<br />
évangélisateurs en nous laissant guider par lui. Pensons<br />
à Pierre ; peut-être faisait-il la sieste, après le<br />
repas, et il a eu une vision, la vision de la nappe avec<br />
tous les anim<strong>au</strong>x, et il a entendu que Jésus lui disait<br />
quelque chose, mais il n’a pas compris. À ce momentlà,<br />
plusieurs non-juifs sont venus le chercher pour<br />
aller dans une maison, et il a vu que l’Esprit-Saint<br />
était là. Pierre s’est laissé guider par Jésus pour<br />
arriver à cette première évangélisation des Gentils, qui<br />
n’étaient pas juifs : c’était quelque chose d’inimaginable<br />
à cette époque (cf. Ac 10, 9-33). Et ainsi toute l’histoire,<br />
toute l’histoire ! Se laisser guider par Jésus. Il<br />
est vraiment le leader, notre leader, c’est Jésus.<br />
« Et troisièmement, le TÉMOIGNAGE. Jésus, la prière<br />
– la prière : se laisser guider par lui – et ensuite<br />
le témoignage. Mais je voudrais ajouter quelque<br />
chose. Se laisser guider par Jésus te conduit <strong>au</strong>x<br />
surprises de Jésus. On peut penser que l’évangélisation,<br />
nous devons la programmer <strong>au</strong>tour d’une table, en<br />
pensant à des stratégies, en faisant des projets. Mais ce<br />
sont des instruments, de petits instruments. L’important,<br />
c’est Jésus et de se laisser guider par lui. Ensuite, nous<br />
pouvons faire des stratégies, mais c’est secondaire.<br />
« Enfin, le TÉMOIGNAGE : la communication de la foi<br />
ne peut se faire que par le témoignage et c’est<br />
l’amour. Non pas avec nos idées, mais avec l’Évangile<br />
vécu dans notre existence et que l’Esprit-Saint fait<br />
vivre <strong>au</strong>-dedans de nous. C’est comme une synergie<br />
entre nous et l’Esprit-Saint, et cela conduit <strong>au</strong> témoignage.<br />
L’Église, ce sont les saints qui la font avancer,<br />
ce sont eux qui donnent ce témoignage. Comme l’ont<br />
dit Jean-P<strong>au</strong>l II et Benoît XVI, le monde d’<strong>au</strong>jourd’hui<br />
a un grand besoin de témoins. Pas tellement de<br />
maîtres, mais de témoins. Ne parlez pas trop, mais<br />
parlez par toute votre vie : la cohérence de vie, précisément,<br />
la cohérence de vie ! Une cohérence de vie qui<br />
consiste à vivre le christianisme comme une rencontre<br />
avec Jésus qui m’amène <strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres, et non comme un<br />
fait social. Socialement, nous sommes comme ça, nous<br />
sommes des chrétiens, renfermés sur nous-mêmes. Non,<br />
pas cela ! Le témoignage ! »<br />
LE PAPE FRANÇOIS FAIT DES MIRACLES.<br />
Troisième question : « COMMENT VIVRE UNE ÉGLISE<br />
“ PAUVRE POUR LES PAUVRES ” ? »<br />
« Je repars du témoignage. Avant tout, la principale<br />
contribution que nous puissions apporter est de vivre<br />
l’Évangile. L’Église n’est pas un mouvement politique,<br />
ni une structure bien organisée : ce n’est pas cela.<br />
Nous ne sommes pas une ONG, et quand l’Église devient<br />
une ONG, elle perd son sel, elle n’a plus de goût,<br />
elle n’est qu’une organisation vide. Et sur ce plan,<br />
soyez malins, car le diable nous trompe avec le danger<br />
de l’efficacité. Prêcher Jésus est une chose, l’efficacité,<br />
être efficaces, en est une <strong>au</strong>tre. Non, il s’agit<br />
d’une <strong>au</strong>tre valeur. <strong>La</strong> valeur de l’Église, fondamentalement,<br />
est de vivre l’Évangile et de témoigner de<br />
notre foi. L’Église est le sel de la terre, la lumière du<br />
monde, elle est appelée à rendre présent dans la société<br />
le levain du Roy<strong>au</strong>me de Dieu et elle le fait<br />
avant tout par son témoignage, le témoignage de<br />
l’amour fraternel, de la solidarité, du partage.<br />
« Quand on entend dire que la solidarité n’est pas<br />
une valeur, mais un “ comportement primaire ” qui doit<br />
disparaître... cela ne va pas ! On pense à une efficacité<br />
purement mondaine. Les temps de crise, comme<br />
ceux que nous vivons actuellement – mais tu as dit<br />
avant que nous étions “ dans un monde de mensonges ”,<br />
– ce temps de crise, attention, ne consiste pas en une<br />
crise uniquement économique ; non, c’est une crise<br />
culturelle. C’est une crise de l’homme : ce qui est en<br />
crise, c’est l’homme ! Et ce qui peut être détruit, c’est<br />
l’homme ! Mais l’homme est l’image de Dieu ! C’est<br />
pourquoi c’est une crise profonde ! En ce temps de<br />
crise, nous ne pouvons pas ne nous préoccuper que<br />
de nous-mêmes, nous enfermer dans la solitude, dans<br />
le découragement, dans un sentiment d’impuissance<br />
devant les problèmes. Ne vous enfermez pas, je vous<br />
en prie ! C’est un danger : nous nous enfermons dans<br />
nos paroisses, entre amis, dans nos mouvements, avec<br />
ceux qui pensent comme nous...<br />
« Mais vous savez ce qui se passe ? Quand l’Église<br />
reste fermée, elle tombe malade.<br />
« Imaginez une pièce fermée pendant un an : quand<br />
on y rentre, il y a une odeur d’humidité, il y a be<strong>au</strong>coup<br />
de choses qui sont en m<strong>au</strong>vais état. Une Église<br />
fermée, c’est la même chose : c’est une Église<br />
malade. L’Église doit sortir d’elle-même. Où ça ? Vers<br />
les périphéries existentielles, quelles qu’elles soient,<br />
mais sortir. Jésus nous dit : “ Allez dans le monde<br />
entier ! Allez ! Prêchez ! Rendez témoignage à l’Évangile<br />
! ” (cf. Mc 16, 15) Mais que se passe-t-il si l’on<br />
sort de soi-même ? Il peut arriver ce qui peut arriver<br />
à toute personne qui sort de chez elle et qui va dans<br />
la rue : un accident. Mais je vous dis : je préfère mille<br />
fois une Église accidentée, exposée <strong>au</strong>x accidents, à<br />
une Église malade parce qu’elle ne sort pas ! Allez<br />
dehors, sortez !<br />
« Pensez <strong>au</strong>ssi à ce que dit l’Apocalypse. Elle dit<br />
quelque chose de be<strong>au</strong> : Jésus est à la porte et il<br />
appelle pour entrer dans notre cœur (cf. Ap 3, 20).<br />
C’est le sens de l’Apocalypse. Mais posez-vous cette<br />
question : combien de fois Jésus est-il à l’intérieur, et<br />
il frappe à la porte pour sortir, et nous ne le laissons<br />
pas sortir, à c<strong>au</strong>se de nos sécurités, parce que nous<br />
sommes si souvent enfermés dans des structures caduques<br />
qui ne servent qu’à nous rendre esclaves, et non<br />
à faire de nous des enfants libres de Dieu ? Dans cette<br />
“ sortie ”, il est important d’aller à la rencontre ; pour<br />
moi, ce mot est très important : la rencontre avec les
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<strong>au</strong>tres. Pourquoi ? Parce que la foi est une rencontre<br />
avec Jésus, et nous devons faire nous <strong>au</strong>ssi ce que fait<br />
Jésus : rencontrer les <strong>au</strong>tres. Nous vivons une culture<br />
de l’affrontement, une culture de la fragmentation, une<br />
culture dans laquelle je jette ce qui ne me sert pas, la<br />
culture de l’élimination. Mais sur ce point, je vous<br />
invite à penser – et c’est un aspect de la crise – <strong>au</strong>x<br />
personnes âgées qui sont la sagesse d’un peuple, <strong>au</strong>x<br />
petits enfants... la culture de l’élimination ! Mais nous<br />
devons aller à la rencontre et nous devons créer, avec<br />
notre foi, une “ culture de la rencontre ”, une culture<br />
de l’amitié, une culture où nous trouvons des frères,<br />
où nous pouvons parler <strong>au</strong>ssi avec ceux qui ne pensent<br />
pas comme nous, avec ceux qui ont une <strong>au</strong>tre foi, qui<br />
n’ont pas la même foi. Ils ont tous quelque chose en<br />
commun avec nous : ils sont l’image de Dieu, ils sont<br />
enfants de Dieu. Aller à la rencontre de tous, sans<br />
négocier notre appartenance. Et un <strong>au</strong>tre aspect important<br />
: avec les p<strong>au</strong>vres. Si nous sortons de nousmêmes,<br />
nous trouvons la p<strong>au</strong>vreté.<br />
« Aujourd’hui, et cela fait mal <strong>au</strong> cœur de le dire,<br />
<strong>au</strong>jourd’hui, trouver un clochard mort de froid n’est<br />
pas une nouvelle. Aujourd’hui, la nouvelle, c’est, peutêtre,<br />
le scandale. Un scandale : ah ! ça, c’est une<br />
nouvelle ! Aujourd’hui, penser que tant d’enfants n’ont<br />
pas à manger n’est pas une nouvelle. C’est grave,<br />
c’est très grave ! Nous ne pouvons pas rester à ne rien<br />
faire ! Mais, c’est comme ça. Nous ne pouvons pas<br />
devenir des chrétiens amidonnés, ces chrétiens trop<br />
bien élevés qui discutent de théologie en prenant le<br />
thé, tranquillement. Non ! Nous devons devenir des<br />
chrétiens courageux et aller à la recherche de ceux<br />
qui sont justement la chair du Christ, ceux qui sont la<br />
chair du Christ !.<br />
« Lorsque je vais confesser – pour le moment je ne<br />
peux pas, parce que pour sortir confesser... d’ici, on<br />
ne peut pas sortir, mais ça, c’est<br />
un <strong>au</strong>tre problème – quand j’allais confesser dans<br />
mon diocèse précédent, il y avait des personnes qui<br />
venaient et je leur posais toujours la même question :<br />
“ Mais vous faites l’<strong>au</strong>mône ? ” – “ Oui, père ! ” – “ Ah,<br />
bien, bien. ” Et je posais deux <strong>au</strong>tres questions : “ Ditesmoi,<br />
quand vous faites l’<strong>au</strong>mône, vous regardez dans les<br />
yeux celui ou celle à qui vous donnez votre <strong>au</strong>mône ? ”<br />
– “ Ah, je ne sais pas, je ne m’en suis pas aperçu. ”<br />
Deuxième question : “ Et quand vous faites l’<strong>au</strong>mône,<br />
vous touchez la main de celui à qui vous donnez votre<br />
<strong>au</strong>mône, ou vous lui jetez la pièce ? ”<br />
« C’est cela le problème : la chair du Christ, toucher<br />
la chair du Christ, prendre sur nous cette douleur<br />
pour les p<strong>au</strong>vres. <strong>La</strong> p<strong>au</strong>vreté, pour nous, chrétiens,<br />
n’est pas une catégorie sociologique ou philosophique<br />
ou culturelle ; non, c’est une catégorie théologique. Je<br />
dirais même que c’est peut-être la première catégorie,<br />
parce que ce Dieu, le Fils de Dieu, s’est abaissé, s’est<br />
fait p<strong>au</strong>vre pour marcher avec nous sur notre route. Et<br />
ceci est notre p<strong>au</strong>vreté : la p<strong>au</strong>vreté de la chair du<br />
Christ, la p<strong>au</strong>vreté que nous a apportée le Fils de<br />
Dieu par son incarnation. Une Église p<strong>au</strong>vre pour les<br />
p<strong>au</strong>vres commence par aller vers la chair du Christ. »<br />
Et il l’a fait le jour de la Pentecôte, dimanche<br />
matin, 19 mai, place Saint-Pierre, près de l’Arc des<br />
cloches, après la Messe, en imposant les mains à un<br />
jeune homme en f<strong>au</strong>teuil roulant, accompagné d’un<br />
prêtre, le Père Juan Rivas, qui prononça le mot « exorcisme<br />
» en s’adressant <strong>au</strong> Pape.<br />
Celui-ci a posé une main, puis les deux sur la tête<br />
du jeune homme, en priant avec un profond recueillement.<br />
Le jeune s’est alors détendu en se laissant aller<br />
contre le dossier du f<strong>au</strong>teuil, <strong>au</strong> lieu d’être tendu en<br />
avant, comme le montrent les images et le son diffusés<br />
par la télévision <strong>catholique</strong> italienne.<br />
Une controverse confuse s’en est suivie. Non le<br />
Saint-Père n’a pas prononcé d’exorcisme, a déclaré le<br />
Père Federico Lombardi, directeur de la salle de presse<br />
du Saint-Siège. « Mais, comme il le fait souvent pour<br />
les personnes malades et souffrantes qu’on lui présente,<br />
il a simplement eu l’intention de prier pour une<br />
personne souffrante qui lui avait été présentée. »<br />
Et il a été ex<strong>au</strong>cé. Nous verrons le pape François<br />
faire des miracles.<br />
Le lundi de Pentecôte, 20 mai, dans son homélie, le<br />
Pape a médité sur l’Évangile du jour, où Jésus se<br />
lamente de l’incrédulité des disciples, qui ne parviennent<br />
pas à guérir un enfant possédé : « Tout est possible<br />
pour celui qui croit », dit-il (Mc 9, 14-29).<br />
Pour le pape François, cette « incrédulité », c’est<br />
« le cœur qui ne s’ouvre pas, le cœur fermé, le cœur<br />
qui veut tout avoir sous contrôle », c’est-à-dire le cœur<br />
qui ne « donne pas le contrôle des choses à Jésus ».<br />
Tout croyant a « une part d’incrédulité en lui », a-t-il<br />
fait observer.<br />
« Rien ne peut faire sortir cette espèce-là, s<strong>au</strong>f la<br />
prière », explique <strong>au</strong>ssi Jésus dans l’Évangile. C’est<br />
donc « par une prière forte, une prière humble et forte,<br />
que Jésus peut faire le miracle ». En d’<strong>au</strong>tres termes, a<br />
précisé le Pape, « la prière pour demander un miracle,<br />
pour demander une action extraordinaire, doit être une<br />
prière impliquée », qui « implique » celui qui intercède.<br />
Cette prière « courageuse », a expliqué le pape<br />
François, n’est pas « une prière de politesse », comme<br />
lorsqu’on dit : « Je prierai pour toi » et qui se réduit<br />
finalement à « un NOTRE PÈRE, un JE VOUS SALUE<br />
MARIE » et puis « on oublie ».<br />
« Non, a-t-il poursuivi, il f<strong>au</strong>t une prière courageuse,<br />
comme celle d’Abraham qui luttait avec le<br />
Seigneur pour s<strong>au</strong>ver la cité, comme celle de Moïse<br />
qui avait les mains levées et se fatiguait, en priant<br />
le Seigneur ; comme celle de tant de personnes, de<br />
tant de personnes qui ont la foi et qui prient avec<br />
la foi. »<br />
Le pape a raconté qu’en Argentine, une enfant de
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 12<br />
sept ans était condamnée par les médecins qui ne lui<br />
donnaient plus que quelques heures à vivre. Le père,<br />
« homme de foi », est « devenu comme fou et, dans cette<br />
folie », a pris un <strong>au</strong>tobus pour le sanctuaire marial de<br />
Lujan, à 70 km de là.<br />
« Arrivé à 9 heures du soir, tout était fermé. Et il a<br />
commencé à prier la Vierge, les mains sur la grille en<br />
fer. Et il priait, il priait, il pleurait, il priait... et il<br />
resté là toute la nuit. Mais cet homme luttait : il luttait<br />
avec Dieu, pour la guérison de son enfant. À 6 heures<br />
du matin, il a repris le bus et est arrivé à l’hôpital à<br />
9 heures. Il a trouvé sa femme en larmes. Et il a pensé<br />
<strong>au</strong> pire : “ Mais que s’est-il passé ? ” – “ Les docteurs<br />
m’ont dit que la fièvre était tombée, qu’elle respire bien,<br />
qu’il n’y a rien ! Elle sortira dans deux jours, mais ils ne<br />
savent pas ce qui s’est passé ! ”<br />
« Cela arrive encore, non ? Les miracles existent<br />
encore ! » a poursuivi le Pape. Mais pour obtenir des<br />
miracles, il f<strong>au</strong>t prier « avec le cœur » : « une prière<br />
courageuse, qui lutte pour arriver à ce miracle ».<br />
En résumé, « la prière fait des miracles, mais nous<br />
devons croire ! » a insisté le pape François, invitant à<br />
« prier avec le cœur » à l’intention de ceux « qui souffrent<br />
dans les guerres, pour tous les réfugiés, tous les<br />
drames actuels », mais <strong>au</strong>ssi à réciter cette prière : « Je<br />
crois, Seigneur, aide mon incrédulité. »<br />
LA PENSÉE DU MARTYRE.<br />
Revenons <strong>au</strong>x questions du 18 mai. Quatrième<br />
question :<br />
« COMMENT AIDER NOS FRÈRES MARTYRS ? CEUX QUI<br />
RISQUENT LEUR VIE POUR ALLER À LA MESSE ? »<br />
« Pour annoncer l’Évangile, il f<strong>au</strong>t deux vertus : le<br />
courage et la patience. Les chrétiens qui souffrent sont<br />
dans l’Église de la patience. Ils souffrent et il y a plus<br />
de martyrs <strong>au</strong>jourd’hui que dans les premiers <strong>siècle</strong>s<br />
de l’Église : plus de martyrs ! Ce sont nos frères et<br />
sœurs. Ils souffrent ! Eux, ils portent leur foi jusqu’<strong>au</strong><br />
martyre. Mais le martyre n’est jamais un échec ; le<br />
martyr est le degré le plus élevé du témoignage que<br />
nous avons à rendre. Nous sommes en chemin vers le<br />
martyre, vers de petits martyres : renoncer à ceci, faire<br />
cela... mais nous sommes en chemin. Et eux, les<br />
p<strong>au</strong>vres, ils donnent leur vie, mais ils la donnent,<br />
comme nous l’avons entendu à propos de la situation<br />
<strong>au</strong> Pakistan, par amour pour Jésus, en témoignant de<br />
Jésus. Un chrétien doit toujours avoir cette attitude de<br />
douceur, d’humilité, c’est précisément l’attitude qui est<br />
la leur, faisant confiance à Jésus et s’abandonnant à<br />
lui. Il f<strong>au</strong>t préciser que bien souvent ces conflits n’ont<br />
pas une origine religieuse ; souvent il y a d’<strong>au</strong>tres<br />
c<strong>au</strong>ses, de type social ou politique et malheureusement,<br />
les appartenances religieuses sont utilisées<br />
comme de l’huile qu’on met sur le feu. Un chrétien<br />
doit toujours savoir répondre <strong>au</strong> mal par le bien,<br />
même si c’est souvent difficile. »<br />
Même si c’est par les armes : comme les gardes<br />
suisses sont prêts à le faire <strong>au</strong> prix de leur propre vie,<br />
ou comme nos soldats le font héroïquement <strong>au</strong> Mali.<br />
Les uns et les <strong>au</strong>tres <strong>au</strong> service de « la liberté religieuse<br />
pour tous » <strong>au</strong> sens... constantinien de la chose,<br />
célébrée par le pape François à l’occasion du mille<br />
sept centième anniversaire de l’édit de Milan par lequel<br />
l’empereur romain Constantin a mis fin à trois<br />
<strong>siècle</strong>s de persécution et a fondé la civilisation chrétienne,<br />
n’en déplaise <strong>au</strong> concile Vatican II !<br />
Le Pape nous a ensuite invités à un examen de<br />
conscience en avertissant : « Je ne vais pas vous<br />
demander, là, de lever la main : “ Est-ce que vous<br />
priez tous les jours pour nos frères persécutés ? Tous<br />
les jours ! ” » Ils sont « l’Église de la patience »,<br />
entrée « en patience ».<br />
« N’oubliez pas » : l’Église ne doit « rien avoir d’une<br />
Église fermée » mais doit être « une Église qui va <strong>au</strong>x<br />
périphéries de l’existence », « dehors », et « en avant »,<br />
a-t-il conclu à l’adresse de cette foule réunie à l’invitation<br />
de Benoît XVI il y a plusieurs mois, précisons-le,<br />
et représentant une « galaxie » bigarrée de tous les<br />
« nouve<strong>au</strong>x mouvements » nés de l’échec du Concile à<br />
faire descendre le Saint-Esprit dans une « nouvelle Pentecôte<br />
», selon la promesse de Jean XXIII.<br />
Le lendemain, dimanche de la Pentecôte, 19 mai, le<br />
pape François les a invités à un examen de conscience<br />
: « Demandons-nous, a-t-il lancé, si nous avons<br />
tendance à nous enfermer en nous-mêmes, dans notre<br />
groupe. » Et il a précisé : « L’Esprit-Saint nous fait<br />
entrer dans le mystère du Dieu vivant et nous s<strong>au</strong>ve du<br />
danger d’une Église gnostique. »<br />
L’ŒUVRE DE GEORGES DE NANTES<br />
AU SERVICE DU PAPE FRANÇOIS, BON PASTEUR UNIVERSEL<br />
Dans son bilan du pontificat de Jean-P<strong>au</strong>l I er , en<br />
octobre 1978 (CRC n o 134), notre Père écrivait : « Nous<br />
n’avons <strong>au</strong>cunement l’intention de faire les hypocrites<br />
en donnant pour réglées par le Pape défunt, et en notre<br />
faveur ! des questions toujours pendantes où il nous<br />
était formellement opposé. Plutôt que de le tirer à<br />
nous, en vérité c’est nous qui nous sommes trouvés<br />
tirés à lui et changés. Nous l’avouons. » Il n’en reste<br />
pas moins vrai que « Jean-P<strong>au</strong>l I er , <strong>au</strong>x appl<strong>au</strong>dissements<br />
de toute l’Église, a rest<strong>au</strong>ré cette religion de<br />
toujours que nous défendions à contre-courant depuis<br />
vingt ans, et ouvertement ! contre la toute-puissante<br />
révolution dite conciliaire et postconciliaire ».<br />
Nous pouvons évidemment dire la même chose,<br />
trente-cinq ans plus tard, du pape François qui ne<br />
craint pas de nous encourager à marcher « à contre-
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 13<br />
courant » ! comme il y exhortait les jeunes confirmands<br />
le dimanche 28 avril :<br />
« Demeurez solides sur le chemin de la foi avec une<br />
ferme espérance dans le Seigneur. Là se trouve le<br />
secret de notre chemin ! Lui, le Saint-Esprit, nous<br />
donne le courage d’aller à contre-courant. Écoutez bien,<br />
les jeunes : aller à contre-courant, cela fait du bien <strong>au</strong><br />
cœur, mais il nous f<strong>au</strong>t du courage pour aller à contrecourant<br />
et Lui nous donne ce courage ! Il n’y a pas de<br />
difficultés, d’épreuves, d’incompréhensions qui doivent<br />
nous faire peur si nous demeurons unis à Dieu comme<br />
les sarments sont unis à la vigne, si nous ne perdons<br />
pas l’amitié avec lui, si nous lui faisons toujours plus<br />
de place dans notre vie. Cela <strong>au</strong>ssi et surtout si nous<br />
nous sentons p<strong>au</strong>vres, faibles, pécheurs, parce que<br />
Dieu donne force à notre faiblesse, richesse à notre<br />
p<strong>au</strong>vreté, conversion et pardon à notre péché. Il est si<br />
miséricordieux le Seigneur : si nous allons à lui, il<br />
nous pardonne toujours. Ayons confiance dans l’action<br />
de Dieu ! »<br />
“ <strong>Contre</strong>-courant ”, <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong>... même combat !<br />
« C’est un fait, continuait notre Père, la pratique de<br />
Jean-P<strong>au</strong>l I er allait en ce sens d’une renaissance<br />
purement <strong>catholique</strong> et, toute l’Église suivant, notre<br />
parfaite communion fraternelle serait rétablie sur ce<br />
terrain de l’essentielle Vie, Voie et Vérité qui ne change<br />
pas, qui ne peut changer et qui nous est commune à<br />
tous. Était-ce une simple résurgence de la Tradition,<br />
était-ce déjà une contre-réforme ? Les théologiens peuvent<br />
en débattre et l’avenir le dira. Mais enfin, l’Église<br />
ressuscitait, l’intégrisme allait se résorber de lui-même<br />
et le progressisme déjà perdait sa masse de manœuvre,<br />
réduit à une caste d’intellectuels et de trublions<br />
misérables.<br />
« Reste cependant qu’entre Lui et nous, entre l’héritage<br />
de Jean et P<strong>au</strong>l qu’il déclarait assumer et notre<br />
ligue de <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> demeurait une contradiction<br />
irréductible sur des points de foi, précis, importants.<br />
Nous ne pourrons jamais accepter le prétendu droit<br />
social de l’homme à la liberté religieuse, pas plus que<br />
le culte de l’Homme proclamé par P<strong>au</strong>l VI à la face de<br />
toute l’Église le 7 décembre 1965, pour la clôture du<br />
Concile. »<br />
Nous sommes <strong>au</strong>jourd’hui dans une situation similaire.<br />
Il est indubitable que le pape François suscite<br />
une renaissance purement <strong>catholique</strong>, il est indubitable<br />
que les progressistes sont réduits à une caste d’intellectuels<br />
et de trublions misérables. Et s’il est moins<br />
évident que l’intégrisme se résorbe de lui-même, il est<br />
er indéniable que, comme sous Jean-P<strong>au</strong>l I , une contradiction<br />
irréductible demeure sur des points précis et<br />
importants, notamment sur la liberté religieuse, même<br />
si nous ne pouvons qu’adhérer à l’élan apostolique que<br />
le Saint-Père veut imprimer à l’Église.<br />
Son homélie de sa messe à Sainte-Marthe, le<br />
22 mai, en offre un bon exemple. Le pape François y<br />
explique la nécessité de créer une « culture de la rencontre<br />
qui est à la base de la paix ».<br />
Cette formule, qu’il a employée déjà plusieurs fois,<br />
semble caractériser sa praxis. Il ne veut pas que<br />
l’Église s’enferme sur elle-même, que le Pasteur ferme<br />
sa porte. Il f<strong>au</strong>t non seulement être ouvert à tous, mais<br />
<strong>au</strong>ssi aller <strong>au</strong>-devant de tous, à la « périphérie existentielle<br />
» de l’Église.<br />
Cela nous rappelle évidemment le “ dialogue ” dont<br />
P<strong>au</strong>l VI fit le maître mot de son pontificat avec l’encyclique<br />
ECCLESIAM SUAM du 6 août 1964, et surtout la<br />
“ rencontre ” préconisée dans son discours de clôture<br />
du Concile : « <strong>La</strong> religion du Dieu qui s’est fait<br />
homme s’est rencontrée avec la religion (car c’en est<br />
une) de l’homme qui se fait Dieu. Qu’est-il arrivé ?<br />
Un choc, une lutte, un anathème ? Cela pouvait<br />
arriver ; mais cela n’a pas eu lieu. <strong>La</strong> vieille histoire<br />
du Samaritain a été le modèle de la spiritualité du<br />
Concile. Une sympathie sans bornes l’a envahi tout<br />
entier. <strong>La</strong> découverte des besoins humains – et ils sont<br />
d’<strong>au</strong>tant plus grands que le fils de la terre se fait plus<br />
grand – a absorbé l’attention de ce Synode. Reconnaissez-lui<br />
<strong>au</strong> moins ce mérite, vous, humanistes<br />
modernes, qui renoncez à la transcendance des choses<br />
suprêmes, et sachez reconnaître notre nouvel humanisme<br />
: nous <strong>au</strong>ssi, nous plus que quiconque, nous<br />
avons le culte de l’Homme. »<br />
À la réflexion, la continuité entre P<strong>au</strong>l VI et<br />
François n’est que superficielle. En effet, il est évident<br />
que, pour le pape François, « la vieille histoire du<br />
Samaritain » n’offre pas une « spiritualité », mais une<br />
figure de Notre-Seigneur, « modèle unique » qu’il f<strong>au</strong>t<br />
imiter. Ce n’est pas « la rencontre » de « deux religions<br />
», c’est l’évêque, le prêtre, le chrétien qui doivent<br />
aller <strong>au</strong>-devant, non pas des hommes qui se dressent<br />
contre Dieu, mais des blessés de la vie. Pas de<br />
“ culte de l’homme ” chez le pape François, mais une<br />
immense compassion pour les hommes malheureux<br />
<strong>au</strong>xquels il f<strong>au</strong>t annoncer la bonne nouvelle d’une libération<br />
du poids de leurs péchés.<br />
Pour le Saint-Père, cette culture de la rencontre est<br />
donc imitation du Christ allant à la rencontre des pécheurs<br />
pour les s<strong>au</strong>ver.<br />
Mais pour les s<strong>au</strong>ver de quoi ? Le pape François<br />
ne le dit jamais. Est-ce une influence d’Urs von<br />
Balthasar ou du Père de Lubac ? Est-ce un souci de<br />
ne pas brusquer ses <strong>au</strong>diteurs ? Toujours est-il qu’il<br />
n’a encore jamais employé le mot « enfer ». Il a parlé<br />
du Ciel, peu il est vrai, mais il n’a jamais parlé de<br />
l’enfer. À cette carence, universelle depuis le concile<br />
Vatican II, Notre-Dame de Fatima a remédié par<br />
avance, l’ayant montré <strong>au</strong>x pastoure<strong>au</strong>x. Maintenant<br />
que le pontificat lui a été consacré, le 13 mai dernier,<br />
elle le montrera <strong>au</strong> pape François en temps opportun<br />
pour achever d’en faire un vrai imitateur de son
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 14<br />
Divin Fils, obsédé par l’horreur de l’enfer <strong>au</strong>quel il<br />
veut arracher les p<strong>au</strong>vres pécheurs.<br />
Comme notre Père l’expliquait à l’encontre d’Urs<br />
von Balthasar : « Ce que nous savons de notre Dieu,<br />
Créateur de l’enfer, c’est qu’il n’y veut personne et<br />
qu’il a supplié son Fils, <strong>au</strong> temps de l’agonie, de<br />
s’exposer fidèlement à sa cruelle Passion pour en s<strong>au</strong>ver<br />
tous les hommes. Tel est notre be<strong>au</strong> Dieu, notre<br />
Bon Dieu (...). Nous avons bien dit : Dieu veut s<strong>au</strong>ver<br />
tous les hommes. Dieu n’aime pas condamner. Il ne<br />
trouve <strong>au</strong>cune be<strong>au</strong>té à l’enfer ! <strong>La</strong> pente glissante de<br />
cette théologie péguyste de l’espérance, la tentation de<br />
facilité serait d’en venir à oublier la foi exacte, précise,<br />
tragique qui la fonde. D’en arriver à conclure que<br />
Dieu, mettant toute sa Sagesse et sa Puissance <strong>au</strong><br />
service de son Amour, donc à notre service, il n’y a<br />
plus de Loi ni de Justice qui subsiste à l’encontre. Et<br />
donc plus d’enfer (...). Le tragique de la vie présente<br />
<strong>au</strong>rait disparu avec le tragique de la Vie éternelle. Les<br />
bons et les méchants confondus dans une même<br />
récompense et une même béatitude, ce seraient la vérité<br />
et l’erreur, le bien et le mal qui dès maintenant<br />
perdraient leur différence. <strong>La</strong> lutte n’<strong>au</strong>rait plus d’objet<br />
et la Croix de Notre Seigneur Jésus-Christ serait un<br />
épisode absurde de la comédie humaine. » (LA MISÈRE<br />
DE DIEU in CRC n o 128, avril 1978, p. 14)<br />
Mais revenons à l’homélie du 22 mai :<br />
« Selon Radio-Vatican, rapporte l’agence Zenit, le<br />
Pape s’est arrêté sur l’Évangile du jour, où les Apôtres<br />
veulent empêcher quelqu’un qui ne suit pas Jésus de<br />
faire du bien : Ils disent, a rappelé le Pape, “ S’il n’est<br />
pas des nôtres, il ne peut pas faire le bien. S’il n’est<br />
pas de notre parti, il ne peut faire le bien. ” Et Jésus<br />
les corrige : “ Ne l’empêchez pas – <strong>La</strong>issez-le faire le<br />
bien. ” » (Mc 9, 38-40)<br />
« “ Les disciples étaient un peu intolérants ”, a-t-il<br />
fait observer, et étant persuadés “ d’avoir la vérité ”,<br />
ils pensaient que “ tous ceux qui n’ont pas la vérité, ne<br />
peuvent faire le bien ”. Mais “ c’était f<strong>au</strong>x ” et Jésus<br />
“ élargit l’horizon ”, a-t-il poursuivi. »<br />
Quand le Pape parle ici de “ faire le bien ”, il ne<br />
pense certainement pas <strong>au</strong>x “ bonnes œuvres ”, <strong>au</strong>x<br />
“ œuvres salutaires ” que la grâce parfait et rend agréables<br />
à Dieu. Le Pape pense tout simplement à l’application<br />
de la loi morale.<br />
Il est remarquable que le Saint-Père donne, non pas<br />
la raison humaine, ni le droit naturel, comme fondement<br />
à cette possibilité et à cette obligation pour tout<br />
homme de faire le bien, mais sa relation à Dieu. Il<br />
affirme que tous les hommes peuvent et donc doivent<br />
faire le bien parce qu’ils sont créatures de Dieu et<br />
qu’ils sont aimés de Lui <strong>au</strong> point que Jésus est mort<br />
sur la Croix pour les s<strong>au</strong>ver tous :<br />
« En réalité, a-t-il expliqué, “ la racine de cette<br />
possibilité de faire le bien, que nous avons tous ” est<br />
“ dans la création ” : “ Le Seigneur nous a créés à son<br />
image et ressemblance, et nous sommes images du<br />
Seigneur, et Lui fait le bien et nous avons tous dans le<br />
cœur ce commandement : fais le bien et ne fais pas le<br />
mal. Tous. ”<br />
« Y compris, a ajouté le Pape, “ les non-<strong>catholique</strong>s<br />
” : tous “ peuvent faire le bien ” et non seulement<br />
le peuvent mais <strong>au</strong>ssi “ doivent ” le faire, car tous ont<br />
“ ce commandement en eux-mêmes ”.<br />
« Très Saint Père, même les athées ?<br />
– Oui, eux <strong>au</strong>ssi. Tous ! Le Seigneur a s<strong>au</strong>vé “ tous<br />
les hommes ” par le sang du Christ, et ils deviennent<br />
“ enfants de Dieu de première catégorie ”. »<br />
Le Pape veut dire que tous sont enfants de Dieu en<br />
droit, car c’est le baptême qui nous fait enfants de<br />
Dieu, mais par sa mort sur la croix, tous les hommes<br />
sont appelés à cet état, il y a donc dans le cœur de<br />
Dieu, avant même que nous soyons baptisés, un amour<br />
pour les hommes. « Dieu nous a aimés alors que nous<br />
étions encore pécheurs », dit saint P<strong>au</strong>l. Le Saint-Père<br />
parle de la primavera : la miséricorde est la fleur<br />
d’amandier de Jérémie qui annonce le printemps.<br />
« Créés à l’image de Dieu et s<strong>au</strong>vés par le Christ,<br />
les hommes ont “ tous le devoir de faire le bien ”,<br />
devoir qui est <strong>au</strong>ssi “ un be<strong>au</strong> chemin vers la paix ”,<br />
a-t-il déclaré : si chacun en effet “ fait du bien <strong>au</strong>x<br />
<strong>au</strong>tres ”, les hommes peuvent “ se rencontrer là, en<br />
faisant le bien ”.<br />
« Le bien devient terrain de rencontre et permet<br />
“ lentement, peu à peu ”, de construire “ cette culture<br />
de la rencontre ”.<br />
« Le Pape ajoute à l’attention des athées : “ Fais le<br />
bien : nous nous rencontrerons là ! ” “ Faire le bien<br />
n’est pas une question de foi, c’est un devoir, une<br />
carte d’identité que notre Père a donnée à tous, car il<br />
a fait l’homme à son image et ressemblance. Et Il fait<br />
le bien, toujours. ” »<br />
Cette manière, un peu déroutante pour notre traditionalisme,<br />
rejoint pourtant l’enseignement de notre<br />
Père dans son cours de MORALE TOTALE donné à la<br />
Mutualité en 1985-1986.<br />
Dans les quatre premières conférences de cette série,<br />
notre Père montrait que la morale était fondée non<br />
pas sur une vue abstraite de la nature humaine, mais<br />
sur notre relation avec Dieu créateur, plus exactement<br />
sur ce qu’il appelle la relation d’origine ou constituante<br />
de Dieu à nous. Ce Dieu qui nous pose dans<br />
l’existence fait alliance avec nous, multiplie ses bienfaits,<br />
et attend de nous une réponse.<br />
Un “ théologien ” objecta : seuls les mystiques peuvent<br />
entrer dans une telle morale. Mais comment<br />
l’enseigner dans les écoles à tous les enfants, si on<br />
ne commence pas par leur faire la démonstration de<br />
ce qu’est le bien et de ce qu’est le mal ? Autrement<br />
dit, la morale “ totale ” néglige totalement la morale
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 15<br />
“ naturelle ”, universelle et nécessaire, fruit d’une définition<br />
rationnelle de la nature humaine. Quand bien<br />
même l’homme ne croirait plus en Dieu, il n’empêche<br />
que sa conscience lui indique où est le bien et<br />
où est le mal et l’obligation qu’il a de s’y conformer<br />
: « Il f<strong>au</strong>t faire le bien et éviter le mal. »<br />
Où est le bien, où est le mal ? Il n’y a pas de<br />
“ morale naturelle ” universelle pour répondre à la<br />
question. Notre Père doit bien constater que « cette<br />
morale naturelle, dont on nous dit<br />
qu’elle est tellement solide, nécessaire<br />
et universelle, qu’elle s’impose<br />
à tout homme même s’il n’est<br />
ni chrétien, ni juif, ni déiste, la<br />
vérité est qu’elle s’impose à condition<br />
que l’homme veuille bien<br />
l’accepter. » L’homme n’obéit à sa<br />
conscience que s’il le veut bien.<br />
Autrement dit, il en adapte les<br />
règles <strong>au</strong> bien qu’il poursuit !<br />
Commencer par fonder la morale<br />
sur une morale naturelle sans<br />
Dieu, laissant à chacun la liberté<br />
de s’y soumettre ou non, selon les<br />
règles qu’il s’est fixées, est précisément<br />
l’erreur qui conduit notre<br />
société actuelle à la licence absolue<br />
et à l’invasion de tous les<br />
vices, sans remède !<br />
« Le vice constitutif de cette<br />
morale naturelle, explique notre<br />
Père, consiste à déclarer l’homme<br />
objet premier de la morale qui est<br />
non seulement pour lui, mais par<br />
lui. » Selon cette présentation, c’est ma liberté qui est<br />
ma “ nature ” et c’est la loi de Dieu qui est son<br />
ennemie.<br />
Il est donc urgent d’opposer à cette morale naturelle<br />
athée une “ morale totale ”... fondée sur l’intuition<br />
de l’être :<br />
« Je n’ai pas besoin de la Bible, je n’ai pas encore<br />
fait intervenir l’Évangile de Jésus-Christ, et n’importe<br />
quel homme m’écoutant peut entrer dans cette intuition<br />
qui est une découverte de Dieu qui me crée.<br />
« Dieu est à la source de mon être et à la source de<br />
mon élan. Cet élan, je n’ai pas à le contredire, ma<br />
liberté y adhère. Il f<strong>au</strong>dra vraiment la révolte du péché,<br />
un désordre extérieur ; c’est le péché, la révolte, qui<br />
viennent après et qui sont contraires à ma “nature ”.<br />
« <strong>La</strong> morale fondamentale a pour berce<strong>au</strong> le don<br />
de la vie par Dieu. C’est ce mouvement par lequel<br />
Dieu donne l’être et avec l’être tous les biens, cette<br />
alliance première qui est fondamentale. Tout homme,<br />
ayant quelque réflexion, et éveillé par l’enseignement<br />
d’un maître, peut se sentir le fruit d’un don divin qui<br />
le pose dans sa substance même. »<br />
Giovanni, un enfant sarde de huit ans, devenu<br />
aveugle à la suite d’une tumeur <strong>au</strong><br />
cerve<strong>au</strong>, revenant d’un pèlerinage à Lourdes,<br />
offre <strong>au</strong> Pape un petit table<strong>au</strong> en braille de la<br />
grotte, exécuté sur les indications des assistants.<br />
Il se réfugie dans le giron du Pape.<br />
Notre Père ouvre la voie <strong>au</strong> pape François :<br />
« Oublions tous les désordres de l’œcuménisme, du<br />
syncrétisme moderne. Purifions nos esprits de toutes<br />
les tentations modernes, et nous comprendrons ce<br />
grand principe selon lequel Dieu veut s<strong>au</strong>ver tous les<br />
hommes, c’est-à-dire qu’un homme qui n’a jamais<br />
connu le Christ, qui n’a jamais connu la Bible, qui n’a<br />
eu <strong>au</strong>cune révélation particulière de Dieu peut, dans<br />
cette seule intuition de l’être, avoir ce contact avec<br />
Dieu par lequel il sait que Dieu lui<br />
donne l’être par amour et que son<br />
amour de lui-même est encore une<br />
étincelle de l’amour de Dieu pour<br />
lui, et entrer dans l’alliance avec<br />
Dieu.<br />
« Quand saint P<strong>au</strong>l nous dit<br />
que, pour être justifié, c’est-à-dire<br />
pour être introduit dans la grâce<br />
de Dieu, être invisiblement membre<br />
de l’Église et donc mériter d’aller<br />
<strong>au</strong> Ciel, il suffit que l’homme croie<br />
que Dieu existe et qu’il est rétributeur,<br />
saint P<strong>au</strong>l va par-dessus<br />
toutes les barricades du christianisme,<br />
du judaïsme, il atteint tous<br />
les hommes. Il dit : ces hommes,<br />
faisant réflexion sur la liberté de<br />
leur conscience, se trouvent un<br />
jour ou l’<strong>au</strong>tre pressés de choisir<br />
pour ce Dieu qui les crée, qui se<br />
révèle à eux comme leur Créateur,<br />
comme leur Bienfaiteur souverain,<br />
choisir de l’aimer ou choisir de<br />
s’émanciper et de se perdre.<br />
« Tous les hommes peuvent ainsi être s<strong>au</strong>vés, et<br />
plutôt que “ naturelle ”, ou “ surnaturelle ”, ma morale<br />
est religieuse. <strong>La</strong> première morale vraiment fondamentale,<br />
c’est un lien religieux qui l’établit. C’est Dieu<br />
qui a choisi, c’est Dieu qui m’a fait et c’est Dieu qui<br />
m’a posé ce choix entre les mains : accepte d’être<br />
mon fils, accepte d’être reconnaissant et de continuer<br />
à coopérer à mon dessein, et tu seras dans l’ordre<br />
du salut. »<br />
Dieu est premier : en espagnol argentin primerea !<br />
Et que l’on n’objecte pas que dans ces conditions,<br />
il n’est pas besoin d’être chrétien.<br />
<strong>La</strong> réponse est facile : « Ce qui était éclatant avant<br />
le péché originel, est obscur à nos intelligences, atténué,<br />
obscurci par le péché originel. Et cela est rendu<br />
plus difficile encore par toutes les f<strong>au</strong>sses philosophies<br />
et tous les désordres mor<strong>au</strong>x et intellectuels qui se<br />
sont répandus dans l’humanité. C’est pour venir en<br />
remède, en salut à cet homme qui se perdait dans le<br />
péché que Dieu lui parle, par Noé d’abord, par Abraham,<br />
par Moïse et enfin par Jésus-Christ, mais c’est<br />
toujours la même Alliance. »
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 16<br />
<strong>La</strong> morale totale enseignée par notre Père, théologien<br />
de la <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> <strong>catholique</strong> en nos temps<br />
d’apostasie, explique et justifie magistralement, <strong>au</strong> regard<br />
de la foi et de la science théologique, l’ouverture<br />
que le Saint-Père prône avec tant de zèle apostolique.<br />
Recevant la responsabilité du troupe<strong>au</strong> anémié par<br />
cinquante ans de “ culte de l’homme ”, il est en effet<br />
de première nécessité pour notre be<strong>au</strong> et bon Pasteur<br />
de le ramener à l’essentiel : l’Alliance divine. Ce qui<br />
ne peut se faire qu’en rappelant l’Amour miséricordieux<br />
de Dieu, en le lui montrant, pour ainsi dire<br />
en le lui mimant, et en l’ouvrant à tous les hommes<br />
appelés à en jouir par une adhésion sincère à l’Alliance<br />
divine. C’est à quoi le Saint-Père s’emploie<br />
avec une ardeur communicative, <strong>au</strong> risque d’ébranler<br />
le confort spirituel de certains fidèles.<br />
Toutefois, la “ morale totale ” ne fait pas moins<br />
comprendre que le droit social à la liberté religieuse,<br />
proclamé <strong>au</strong> concile Vatican II, est inacceptable.<br />
En effet, si Dieu a un tel amour passionné de<br />
tous les hommes <strong>au</strong> point d’offrir le salut à tous,<br />
moyennant une adhésion libre de leur part, il ne veut<br />
certes pas qu’on les force à pratiquer la vraie religion,<br />
mais il ne veut pas davantage que l’erreur<br />
jouisse des mêmes droits absolus et imprescriptibles<br />
que la vérité. Dieu ne peut vouloir la pratique publique<br />
et la propagation de f<strong>au</strong>sses religions alors<br />
qu’elles entravent l’adhésion des hommes à son dessein<br />
d’amour, même si des circonstances particulières,<br />
comme il s’en trouve <strong>au</strong>jourd’hui en grand<br />
nombre, peuvent justifier leur tolérance et leur protection<br />
par la législation des États pour le bien de<br />
la paix.<br />
Le Saint-Père peut donc bien réclamer la “ liberté<br />
religieuse ” pour tous <strong>au</strong> Proche-Orient et la fin des<br />
affrontements sanglants entre chiites, sunnites, salafistes<br />
et chrétiens, en les dénonçant comme absolument<br />
contraires <strong>au</strong> dessein d’amour divin ; mais ce<br />
serait renouveler l’erreur du Concile d’en conclure que<br />
toutes les religions et leurs cultes doivent être mis sur<br />
un pied d’égalité et jouir des mêmes droits, en toutes<br />
circonstances, partout et toujours.<br />
De la même manière, ce serait une erreur de conclure<br />
que c’est toujours « un blasphème de tuer <strong>au</strong><br />
nom de Dieu » (22 mai 2013). Il est des cas où notre<br />
Dieu miséricordieux fait obligation de protéger la<br />
veuve et l’orphelin, ou encore de défendre la patrie<br />
pour le bien commun contre les méchants qui, eux,<br />
n’hésitent pas à tuer. L’usage de la force publique, que<br />
l’Église peut réglementer, est tout à fait légitime et<br />
peut alors s’exercer <strong>au</strong> nom de Dieu lorsque le bien<br />
commun des nations chrétiennes et de la foi <strong>catholique</strong><br />
le réclame. <strong>La</strong> geste de sainte Jeanne d’Arc, guidée<br />
par ses Voix, est exemplaire de fermeté, mais <strong>au</strong>ssi de<br />
charité, soucieuse d’employer la force avec mesure,<br />
appelant à la conversion, priant pour le salut éternel<br />
des victimes sur lesquelles elle pleurait. Combien<br />
d’<strong>au</strong>tres saints, donnés en exemple par l’Église, ont<br />
dû ainsi utiliser la force armée par charité !<br />
Saint Pie V à Lépante...<br />
Enfin, la “ morale totale ” vient tout <strong>au</strong>ssi naturellement<br />
en renfort d’un <strong>au</strong>tre thème de l’action actuelle<br />
du Saint-Père : ses appels à « repenser la solidarité<br />
qui ne doit plus être conçue comme une simple assistance<br />
à l’égard des plus p<strong>au</strong>vres, mais comme la<br />
reconsidération globale d’un système » (24 mai ), conduisant<br />
à « créer une nouvelle mentalité politique et<br />
économique » émancipée de la tyrannie de l’argent<br />
(16 mai ).<br />
Toutefois, contrairement à ce qu’il recommande par<br />
fidélité à la prétendue “ doctrine sociale de l’Église ”,<br />
qui est seulement celle de ses prédécesseurs libér<strong>au</strong>x,<br />
la “ morale totale ” introduit une “ nouvelle mentalité ”,<br />
non plus fondée sur l’épanouissement de la personne<br />
humaine, mais sur celui de la famille, unique cellule<br />
fondamentale de la société.<br />
Car il est contradictoire de vouloir fonder une<br />
morale sociale sur les “ droits de l’homme ” comme<br />
revendications contre la société ; c’est envenimer le<br />
conflit entre exigences personnelles et nécessités du<br />
bien commun, que les plus forts résoudront toujours<br />
à leur avantage malgré tous les appels à la charité.<br />
L’inégalité demeure en réalité le principe de la vie<br />
sociale, et elle est protectrice lorsqu’elle est aménagée<br />
par des dispositions de la justice et les initiatives<br />
d’une libre charité.<br />
En effet, fonder la morale sur la personne définie<br />
par ses relations, à commencer par son cadre familial,<br />
c’est la disposer à la recherche du bien commun qui<br />
dépasse ses propres intérêts immédiats, mais pour lui<br />
faire atteindre un intérêt plus grand, plus h<strong>au</strong>t. C’est<br />
introduire la charité comme principe de vie sociale,<br />
capable d’inspirer quantité d’institutions vouées à la<br />
justice sociale avec un souci d’efficacité sans cesse<br />
renouvelé par la volonté de répondre <strong>au</strong>x nécessités<br />
d’une immense « réciprocité de services ».<br />
Notre Père nous a laissé la doctrine nécessaire pour<br />
soutenir les volontés et l’action du Saint-Père, véritable<br />
« homme de Dieu », à condition d’oser le prévenir des<br />
erreurs d’un Concile imprégné d’une f<strong>au</strong>sse métaphysique.<br />
Par sa piété, ses vertus, son <strong>au</strong>thentique souci<br />
du bien des âmes et des humbles, le pape François<br />
finira par reconnaître les funestes conséquences des<br />
principes répandus jusqu’en Amérique du Sud par le<br />
Concile. Guidé par le Cœur Immaculé de Marie, en qui<br />
Dieu veut renouveler son alliance par pure miséricorde,<br />
il pourra alors trouver dans l’œuvre de l’abbé de<br />
Nantes, notre Père, guidé lui <strong>au</strong>ssi par la même main<br />
immaculée, les remèdes dogmatiques et doctrin<strong>au</strong>x<br />
nécessaires à la renaissance de l’Église.<br />
frère Bruno de Jésus-Marie.
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 17<br />
« Le baptême de Jean, d’où était-il ? Du Ciel ou des<br />
hommes ? » (Mt 21, 25) <strong>La</strong> réponse s’impose : il était du<br />
Ciel ! Donc, la tradition de l’Ancien Testament, la tradition<br />
juive, deutéronomique, passe par le “ Moyen Testament<br />
”, par la commun<strong>au</strong>té du Baptiste. C’est pourquoi<br />
ses disciples, après l’avoir enterré, « allèrent informer<br />
Jésus » (Mt 14, 12), tellement il est clair que c’est lui<br />
qui prend la suite.<br />
« En vérité, en vérité, je vous le dis, parmi les enfants<br />
des femmes, il n’en a pas surgi de plus grand que Jean-<br />
Baptiste ; et cependant le plus petit dans le roy<strong>au</strong>me des<br />
Cieux est plus grand que lui. » (Mt 11, 11)<br />
« Le plus petit »... c’est lui, Jésus ! « né d’une<br />
femme » (Ga 4, 4).<br />
<strong>La</strong> tradition deutéronomique reçoit donc sa forme<br />
neuve et plénière dans une rénovation radicale apportée<br />
par Jésus. Elle se continue sans rupture, sous un mode<br />
humain et normal – tel que de Moïse à Josué – par le<br />
pouvoir donné à PIERRE : « Tu es Pierre, et sur cette<br />
pierre je bâtirai mon Église. » (Mt 16, 18)<br />
Jésus peut mourir selon son dessein rédempteur,<br />
l’œuvre survit telle que les ACTES nous la font connaître<br />
: nouve<strong>au</strong> peuple <strong>au</strong> sein d’Israël, proche du Temple,<br />
mais déjà centré sur un culte nouve<strong>au</strong>, celui du Christ,<br />
mort et ressuscité, qui est « plus que le Temple ».<br />
Le grand drame de la Croix a rendu définitive la<br />
scission entre le judaïsme de l’ancienne Alliance et la<br />
nouvelle commun<strong>au</strong>té de l’Évangile. Un fossé infranchissable<br />
oblige les croyants à opter entre les deux<br />
appartenances et à se dégager d’un peuple déicide pour<br />
embrasser la foi nouvelle en un Messie crucifié.<br />
On pouvait croire qu’un tel drame suffisait, qu’il<br />
rendait la situation parfaitement claire et qu’après la<br />
suite progressive des commun<strong>au</strong>tés “ pieuses ” qui aboutissent<br />
à celle du Baptiste, enfin apparaît comme nouvelle<br />
et distincte, l’Église du Christ.<br />
De fait, les cinq premiers chapitres des ACTES DES<br />
APÔTRES nous font assister à la croissance merveilleuse<br />
de la commun<strong>au</strong>té selon l’Esprit de Jésus, et à l’épanouissement<br />
des institutions établies par lui : les premiers<br />
chrétiens « se montraient assidus à l’enseignement<br />
des Apôtres, fidèles à la communion, à la fraction<br />
du pain et <strong>au</strong>x prières » (Ac 2, 42). <strong>La</strong> « fraction du<br />
pain » désigne la Sainte Eucharistie instituée par Jésus<br />
lors de la dernière Cène.<br />
Cette commun<strong>au</strong>té se distingue du peuple ancien et<br />
s’affirme dans la supériorité, la perfection de sa vie,<br />
sans hésitation ni division. D’un cœur unanime, elle se<br />
prépare à souffrir les inévitables persécutions que son<br />
succès attire sur elle.<br />
Car Jésus l’avait bien dit :<br />
« Le disciple n’est pas plus grand que son maître. S’ils<br />
m’ont persécuté, ils vous persécuteront <strong>au</strong>ssi. S’ils ont gardé<br />
CAMP NOTRE-DAME DE FATIMA 2012<br />
VIII. L’ ÉGLISE DES APÔTRES<br />
ma parole, ils garderont <strong>au</strong>ssi la vôtre. Mais ils feront tout<br />
cela contre vous, à c<strong>au</strong>se de mon nom. » (Jn 15, 20)<br />
Or, nous pouvons revivre le drame douloureux que<br />
l’Église nouvelle eut à traverser et qui devait coûter la<br />
vie à toute une génération de chrétiens, dont les<br />
“ colonnes de l’Église ”. Nous pouvons revivre ce<br />
nouve<strong>au</strong> Calvaire en lisant attentivement les Actes. Car<br />
la pudeur sacrée des premiers chrétiens <strong>au</strong>rait préféré le<br />
voir oublié.<br />
Hélas ! la haine allait venir d’un côté où on ne<br />
l’attendait guère...<br />
LES RAISONS DU DRAME<br />
L’Évangile prêché par saint Pierre était simple et<br />
d’une éclatante nouve<strong>au</strong>té. Il était adressé à tous et le<br />
troupe<strong>au</strong> qu’il avait reçu la charge de paître devait<br />
réunir en son unité toutes les brebis perdues, tel était le<br />
désir du Seigneur, souvent exprimé et que Luc aimera<br />
rappeler dans ses écrits.<br />
Alors Pierre prit la parole et dit : « Je constate en<br />
vérité que Dieu ne fait pas acception des personnes,<br />
mais qu’en toute nation celui qui le craint et pratique<br />
la justice lui est agréable. » (Ac 10, 34-35)<br />
Et pourquoi cet universalisme sans condition ? Parce<br />
que la source du salut est la Croix rédemptrice, le<br />
sacrifice du serviteur de Dieu, de l’Agne<strong>au</strong> Jésus, vrai<br />
Christ :<br />
« Il a envoyé sa parole <strong>au</strong>x Israélites, leur annonçant<br />
la bonne nouvelle de la paix par Jésus-Christ :<br />
c’est lui le Seigneur de tous. Vous savez ce qui s’est<br />
passé dans toute la Judée : Jésus de Nazareth, ses<br />
débuts en Galilée, après le baptême proclamé par<br />
Jean ; comment Dieu l’a oint de l’Esprit-Saint et de<br />
puissance, lui qui a passé en faisant le bien et en<br />
guérissant tous ceux qui étaient tombés <strong>au</strong> pouvoir du<br />
diable ; car Dieu était avec lui.<br />
« Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu’il a<br />
fait dans le pays des juifs et à Jérusalem. Lui qu’ils sont<br />
allés jusqu’à faire mourir en le suspendant <strong>au</strong> gibet,<br />
Dieu l’a ressuscité le troisième jour et lui a donné de se<br />
manifester, non à tout le peuple, mais <strong>au</strong>x témoins que<br />
Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et<br />
bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts ; et il<br />
nous a enjoint de proclamer <strong>au</strong> Peuple et d’attester qu’il<br />
est, lui, le juge établi par Dieu pour les vivants et les<br />
morts. C’est de lui que tous les prophètes rendent ce<br />
témoignage que quiconque croit en lui recevra, par son<br />
nom, la rémission de ses péchés. » (Ac 10, 36-43)<br />
L’Évangile de Marc, disciple et secrétaire - rédacteur<br />
de Pierre, illustre cette vérité. Tel est l’enseignement de<br />
Pierre dès les premiers jours. Avant le drame du Calvaire,<br />
Pierre refusait (Mt 16, 22) d’envisager une telle<br />
vocation pour Jésus et pour son Église. Ce qu’il a vu
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 18<br />
l’a instruit et il a reçu mission « d’affermir ses frères »<br />
dans cette foi (Lc 22, 32).<br />
Il va le faire, à sa manière, timide, par des alternatives<br />
de passivité et des coups de boutoir. Il le fera<br />
jusqu’<strong>au</strong> martyre, sans jamais démentir sa mission.<br />
Répondant à l’appel des Apôtres, une admirable<br />
commun<strong>au</strong>té s’est formée qui se sait le “ reste ” d’Israël,<br />
le véritable et définitif peuple de Dieu, héritier des<br />
promesses, en attente du retour du Seigneur. Comme <strong>au</strong><br />
temps du “ Maître de justice ” des esséniens, on accepte<br />
dans la foi <strong>au</strong> Christ, de rompre avec son peuple, car<br />
l’Église est l’Israël nouve<strong>au</strong>.<br />
Mais on ne peut se considérer comme le petit<br />
nombre des élus, les s<strong>au</strong>vés du peuple, les fidèles tenants<br />
de l’Alliance, les vrais interprètes des prophéties,<br />
sans vouloir conserver cet ordre ancien, cette Loi, cette<br />
liturgie qui ont si merveilleusement prouvé leur sainteté<br />
en donnant naissance à l’Église nouvelle. Impies les<br />
juifs déicides, oui, certes, mais excellente et divine la<br />
loi éternelle de Moïse et les liturgies du Temple !<br />
Ainsi l’Église naissante, dont la croissance est décrite<br />
dans les quinze premiers chapitres des ACTES DES<br />
APÔTRES, avait, à ses débuts, deux lieux de culte : sur la<br />
colline du Temple, elle continuait de pratiquer tout ce<br />
que prescrit la Loi, y compris la liturgie des sacrifices,<br />
à l’exemple de Jacques ; sur le mont Sion, elle inst<strong>au</strong>rait<br />
la religion du Christ, dans « la grande salle à<br />
l’étage » (Mc 14, 15) où Jésus avait institué les sacrements<br />
de l’Ordre et de l’Eucharistie avant de souffrir.<br />
Jésus lui-même ne s’était-il pas soumis à la circoncision<br />
et à tout cet ordre sacré ?<br />
Qui <strong>au</strong>rait pu dire <strong>au</strong> moment où Matthieu écrivait<br />
son Évangile que tout ce passé vénérable devait être<br />
abandonné irrévocablement ?<br />
L’Esprit seul donné à l’Église allait le lui apprendre.<br />
LES PRODROMES DU DRAME<br />
<strong>La</strong> persécution ne frappa pas indistinctement mais se<br />
porta d’abord sur les “ hellénistes ”, soit juifs de la<br />
diaspora et même habitants des villes gréco-romaines du<br />
bord du lac de Tibériade, soit païens “ craignants-Dieu ”,<br />
attirés à Jérusalem par la religion juive, et convertis le<br />
jour de la Pentecôte. Jusqu’alors, une merveilleuse unanimité<br />
avait fait oublier ces différences.<br />
Cependant : « En ces jours-là, comme le nombre des<br />
disciples <strong>au</strong>gmentait, il y eut des murmures chez les<br />
Hellénistes contre les Hébreux. Dans le service quotidien,<br />
disaient-ils, on négligeait leurs veuves. Les Douze<br />
convoquèrent alors l’assemblée des disciples et leur<br />
dirent : “ Il ne sied pas que nous délaissions la parole de<br />
Dieu pour servir <strong>au</strong>x tables. Cherchez plutôt parmi vous,<br />
frères, sept hommes de bonne réputation, remplis de l’Esprit<br />
et de sagesse, et nous les préposerons à cet office ; quant à<br />
nous, nous resterons assidus à la prière et <strong>au</strong> service de la<br />
parole. ” <strong>La</strong> proposition plut à toute l’assemblée, et l’on<br />
choisit Étienne, homme rempli de foi et de l’Esprit-Saint,<br />
Philippe, Porchère, Nicanor, Timon, Parménas et Ni-<br />
colas, prosélyte d’Antioche. On les présenta <strong>au</strong>x Apôtres<br />
et, après avoir prié, ils leur imposèrent les mains. Et la<br />
parole du Seigneur croissait ; le nombre des disciples<br />
<strong>au</strong>gmentait considérablement à Jérusalem, et une multitude<br />
de prêtres obéissaient à la foi. » (Ac 6, 1-7)<br />
Étienne dénonce la rébellion continuelle des Hébreux,<br />
depuis les origines. Son discours est implacable (Ac 7).<br />
Et la preuve qu’il dit vrai, la confirmation de son<br />
discours ne tarde pas : son martyre met fin à la mission<br />
chrétienne à Jérusalem. Désormais, il ne sera plus<br />
question d’évangélisation qu’en dehors de Jérusalem.<br />
Les “ hellénistes ”, chassés de Jérusalem, se répandent<br />
en Samarie, retournent dans leurs villes et partout<br />
suscitent un grand intérêt et des conversions de païens !<br />
Pierre et Jean se précipitent sur les lieux et donnent<br />
à tous ces nouve<strong>au</strong>x venus le Saint-Esprit. Livré à luimême,<br />
Pierre demeurerait-il perplexe (Ac 10, 17) que<br />
des signes convaincants le pousseraient dans cette voie.<br />
Venu chez le centurion Corneille sur l’ordre du Saint-<br />
Esprit, il y prononce un discours ponctué par une seconde<br />
“ Pentecôte ” :<br />
« Pierre parlait encore quand l’Esprit-Saint tomba sur<br />
tous ceux qui écoutaient la parole. Et tous les croyants<br />
circoncis qui étaient venus avec Pierre furent stupéfaits<br />
de voir que le don du Saint-Esprit avait été répandu <strong>au</strong>ssi<br />
sur les païens. Ils les entendaient en effet parler en<br />
langues et magnifier Dieu. Alors Pierre déclara :<br />
« “ Peut-on refuser l’e<strong>au</strong> du baptême à ceux qui ont reçu<br />
l’Esprit Saint <strong>au</strong>ssi bien que nous ? ” Et il ordonna de les<br />
baptiser <strong>au</strong> nom de Jésus-Christ. Alors ils le prièrent<br />
de rester quelques jours avec eux. » (Ac 10, 44-48)<br />
Cependant, tandis que les missionnaires assistaient<br />
avec une certaine exaltation à l’irrésistible poussée de<br />
l’Évangile sanctionnée par la présence visible de l’Esprit-<br />
Saint, à Jérusalem on réfléchit, on demeure prudent, on<br />
craint l’infidélité à la loi mosaïque. Cet universalisme a<br />
quelque chose de trop déroutant et, ne voyant pas les<br />
miracles, on s’en inquiète et demande des explications.<br />
On envoie des délégations et celles-ci, une fois sur place,<br />
voient disparaître les préventions, naître l’enthousiasme.<br />
Jérusalem manifeste alors un peu plus de confiance<br />
(Ac 11, 18), après le discours de Pierre, mais on craint<br />
un péril obscur.<br />
Ainsi s’écoulent les années 31 à 35, où nous voyons<br />
PAUL monter à Jérusalem après sa conversion, pour y<br />
voir Pierre et Jacques « le Petit » (Mc 15, 40), « frère du<br />
Seigneur » (Ga 1, 19), personnage important à Jérusalem<br />
! P<strong>au</strong>l est reçu dans leur communion.<br />
Puis vint un temps où Pierre trop souvent en<br />
mission lointaine, bientôt chassé de Jérusalem par la<br />
persécution, certainement après son évasion de la prison<br />
d’Hérode, en 44, dut laisser l’<strong>au</strong>torité à JACQUES. Il<br />
l’estimait comme « frère du Seigneur », et peut-être le<br />
sentait-il plus populaire, plus convenable que lui à ce<br />
rôle de chef d’une commun<strong>au</strong>té très jalouse de ses<br />
privilèges. Cet effacement allait avoir d’immenses<br />
conséquences.
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 19<br />
Auparavant, Pierre, à Jérusalem, était très fidèle à la<br />
loi juive et, ailleurs, très conciliant vis-à-vis des convertis<br />
du paganisme. Son éloignement de Jérusalem va<br />
déclencher une sorte de défiance et de surveillance de<br />
la part des judéo-chrétiens sur son activité <strong>au</strong>-dehors.<br />
On voit une différence apparaître entre Jérusalem et<br />
les commun<strong>au</strong>tés judéo-chrétiennes qui s’y rattachent,<br />
d’une part, et les commun<strong>au</strong>tés lointaines de païens<br />
convertis, disons les “ hellénistes ”, d’<strong>au</strong>tre part.<br />
Dans leurs revendications, ceux de Jérusalem entendent<br />
bien que Pierre reste leur partisan tandis que les<br />
pagano-chrétiens ne conçoivent même pas qu’il puisse<br />
être contre eux. Entre ceux qui se réclament du « frère<br />
du Seigneur », qui ont connu Jésus « des yeux de<br />
la chair », et P<strong>au</strong>l, cet Apôtre de raccroc avec ses<br />
chrétiens venus du paganisme, Pierre sera-t-il contraint<br />
de choisir ?<br />
LE CONCILE DE JÉRUSALEM<br />
Il s’agit de savoir si la Loi ne sert plus à rien, avec<br />
ses œuvres et ses multiples prescriptions, ou si, pour<br />
être chrétien, il f<strong>au</strong>t <strong>au</strong>ssi adopter le judaïsme et ses<br />
institutions. Concrètement : f<strong>au</strong>t-il être baptisé et <strong>au</strong>ssi<br />
circoncis ? Dans les repas, f<strong>au</strong>t-il oublier qu’un païen,<br />
même converti, est encore « impur », et refuser de manger<br />
avec lui ? Petits détails où se joue toute une<br />
théologie.<br />
Pierre, responsable angoissé de l’unité, pasteur de<br />
l’unique troupe<strong>au</strong>, temporise et gagne du temps grâce<br />
<strong>au</strong> partage géographique et ethnique des deux partis ! À<br />
Antioche, il vit « à la grecque », mais il n’en laisse rien<br />
paraître à Jérusalem !<br />
Un jour, des judaïsants venus à Antioche dévoileront<br />
l’innocente ruse comme une trahison et Pierre tremblera<br />
devant eux. L’intervention véhémente de P<strong>au</strong>l, dont<br />
l’écho vibrant nous est conservé dans l’Épître <strong>au</strong>x<br />
GALATES, persuadera Pierre de mettre fin à l’équivoque :<br />
inutiles sont maintenant la Loi et ses prescriptions pour<br />
les païens venus <strong>au</strong> baptême.<br />
« Mais quand Céphas vint à Antioche, je lui résistai<br />
en face, parce qu’il s’était donné tort. En effet, avant<br />
l’arrivée de certaines gens de l’entourage de Jacques, il<br />
prenait ses repas avec les païens ; mais quand ces gens<br />
arrivèrent, on le vit se dérober et se tenir à l’écart, par<br />
peur des circoncis. Et les <strong>au</strong>tres juifs l’imitèrent dans sa<br />
dissimulation, <strong>au</strong> point d’entraîner Barnabé lui-même à<br />
dissimuler avec eux. Mais quand je vis qu’ils ne marchaient<br />
pas droit selon la vérité de l’Évangile, je dis à<br />
Céphas devant tout le monde : “ Si toi qui es juif, tu vis<br />
comme les païens, et non à la juive, comment peux-tu<br />
contraindre les païens à judaïser ? ” » (Ga 2, 11-14)<br />
Fort de l’approbation de Pierre, P<strong>au</strong>l s’élance à la<br />
conquête du monde païen. C’est là que les judaïsants<br />
le poursuivront.<br />
CONTROVERSE À JÉRUSALEM.<br />
Malgré la difficulté d’établir une chronologie de ces<br />
débats, il apparaît que Pierre assura d’abord une grande<br />
liberté à la mission de P<strong>au</strong>l <strong>au</strong> cours de son premier<br />
voyage et, par son attitude conciliante, valut à P<strong>au</strong>l<br />
d’être considéré comme un frère par les <strong>au</strong>tres Apôtres.<br />
Pierre était engagé dans l’apostolat <strong>au</strong>près des juifs,<br />
hors de Jérusalem. C’était lui qui s’occupait des nouvelles<br />
commun<strong>au</strong>tés de la diaspora, et il pouvait ainsi<br />
jouer un rôle de tampon entre judaïsme et p<strong>au</strong>linisme.<br />
Prenons bien garde de ne pas être p<strong>au</strong>liniens sans<br />
réflexion ! avertissait l’abbé de Nantes, notre Père. Les<br />
“ judaïsants ” avaient be<strong>au</strong>coup de raisons d’être inquiets<br />
et d’imposer le respect de la loi mosaïque et<br />
même la prim<strong>au</strong>té de leur Église de Jérusalem. Sans<br />
doute ne comprirent-ils qu’imparfaitement que la Nouvelle<br />
Alliance se suffisait à elle-même, mais tout de<br />
même l’Église gardera finalement be<strong>au</strong>coup de l’Ancien<br />
Testament. Ce ne sera, certes, qu’un appoint secondaire,<br />
mais qu’on ne peut négliger sans périr ! « N’allez pas<br />
croire que je suis venu abolir la Loi ou les prophètes ; je<br />
ne suis pas venu abolir mais accomplir. » (Mt 5, 17)<br />
D’<strong>au</strong>tre part, pour des gens qui avaient connu et<br />
peut-être vécu dans les commun<strong>au</strong>tés des “ fils de<br />
Lumière ” ou du Baptiste, qui suivaient à la perfection<br />
la loi de Moïse – non pas des pharisiens comme saint<br />
P<strong>au</strong>l, mais des esséniens pieux et sincères –, quel<br />
bouleversement ! P<strong>au</strong>l condamne la Loi. Eux la bénissent<br />
! C’est que, chose étonnante, mais bien avérée du<br />
commencement (Ac 2, 46) à la fin (Ac 21, 17-26) : Notre-<br />
Seigneur avait laissé pendante la double appartenance<br />
de ceux qui embrasseraient la foi tout en demeurant<br />
« de zélés partisans de la Loi » (Ac 21, 20).<br />
Soyons modestes, recommandait notre Père. Qui<br />
<strong>au</strong>rait pu alors comprendre que les deux partis s’accordaient<br />
en une vérité plus h<strong>au</strong>te que l’Église a apprise<br />
du Saint-Esprit !<br />
En fait, l’agitation des esprits ne cessa de croître.<br />
Une première fois calmée par les récits de Pierre... mais<br />
une certaine défiance se marque alors à son égard et<br />
nous voyons grandir l’étoile de Jacques. Une seconde<br />
fois après l’incident d’Antioche, Pierre et P<strong>au</strong>l s’étant<br />
montrés d’accord, les judaïsants sont apaisés... Nous les<br />
verrons cependant étendre et aggraver leur m<strong>au</strong>vais zèle<br />
à l’extérieur de Jérusalem.<br />
L’ASSEMBLÉE DE JÉRUSALEM (49 après Jésus-Christ ).<br />
À la suite d’incidents graves à Antioche (et ailleurs),<br />
un premier “ Concile ” met en présence les tenants des<br />
deux tendances, les chefs 1 o des missions païennes,<br />
P<strong>au</strong>l et Barnabé, 2 o des missions juives, Pierre, 3 o de<br />
l’Église de Jérusalem, Église-mère, Jacques.<br />
Après discussion, Pierre expose sa théologie, qu’il<br />
donne comme reconnue de tous et il conclut en faveur<br />
de la thèse p<strong>au</strong>linienne :<br />
« Après une longue discussion, Pierre se leva et dit :<br />
“ Frères, vous le savez : dès les premiers jours, Dieu m’a<br />
choisi parmi vous pour que les païens entendent de ma<br />
bouche la parole de la Bonne Nouvelle et embrassent la foi.<br />
Et Dieu, qui connaît les cœurs, a témoigné en leur faveur, en<br />
leur donnant l’Esprit-Saint tout comme à nous. Et il n’a fait
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 20<br />
<strong>au</strong>cune distinction entre eux et nous, puisqu’il a purifié leur<br />
cœur par la foi. Pourquoi donc maintenant tentez-vous Dieu<br />
en voulant imposer <strong>au</strong>x disciples un joug que ni nos pères ni<br />
nous-mêmes n’avons eu la force de porter ? D’ailleurs, c’est<br />
par la grâce du Seigneur Jésus que nous croyons être s<strong>au</strong>vés,<br />
exactement comme eux. ” » (Ac 15, 7-11)<br />
P<strong>au</strong>l et Barnabé exposent alors leur œuvre apostolique<br />
(Ac 15, 12). Jacques se lève enfin pour imposer<br />
<strong>au</strong>x fidèles judaïsants son avis, qui est celui de la<br />
concorde. Contrairement à ce que disent certains, ce<br />
n’est pas la preuve de son <strong>au</strong>torité souveraine sur les<br />
<strong>au</strong>tres Apôtres, mais sur les judaïsants qui se réclament<br />
facilement de lui. C’est lui qui les désarme, non sans<br />
leur faire quelques concessions :<br />
« Frères, écoutez-moi. Syméon a exposé comment, dès le<br />
début, Dieu a pris soin de tirer d’entre les païens un peuple<br />
réservé à son Nom. Ce qui concorde avec les paroles des<br />
Prophètes, puisqu’il est écrit : Après cela je reviendrai et je<br />
relèverai la tente de David qui était tombée ; je relèverai ses<br />
ruines et je la redresserai, afin que le reste des hommes cherchent<br />
le Seigneur, ainsi que toutes les nations qui ont été<br />
consacrées à mon Nom, dit le Seigneur qui fait connaître ces<br />
choses depuis des <strong>siècle</strong>s. C’est pourquoi je juge, moi, qu’il<br />
ne f<strong>au</strong>t pas tracasser ceux des païens qui se convertissent à<br />
Dieu. Qu’on leur mande seulement de s’abstenir de ce qui a<br />
été souillé par les idoles, des unions illégitimes, des chairs<br />
étouffées et du sang. ” » (Ac 15, 13-21)<br />
Ainsi, grâce à Jacques, la paix a été s<strong>au</strong>vée, et grâce<br />
surtout à Pierre qui s’est fait solennellement le garant<br />
de P<strong>au</strong>l.<br />
Un rescrit est envoyé <strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres Églises et nous<br />
savons ainsi qu’à Antioche, <strong>au</strong>ssi laborieusement qu’à<br />
Jérusalem, l’entente est réalisée sur la théologie de P<strong>au</strong>l<br />
et de Pierre. En gardant quelques recommandations<br />
d’esprit très mosaïque visant l’indispensable souci de la<br />
moralité des mœurs en même temps que la pureté rituelle...<br />
Où l’on voit que « tout ne fut pas loyal ni<br />
décisif dans ce Concile où les judéo-chrétiens se réclamèrent<br />
de Jacques contre Pierre, jugé trop modéré, et<br />
contre P<strong>au</strong>l leur principal adversaire, explique l’abbé de<br />
Nantes, notre Père. On reprit en coulisses postconciliaires,<br />
déjà ! ce qu’on n’avait pu obtenir dans l’assemblée<br />
régulière, pour aboutir à jeter dehors ou à<br />
maintenir en état humilié les <strong>au</strong>tres, les païens convertis,<br />
et demeurer seuls vrais chrétiens, glorieux fils<br />
d’Abraham et sectateurs de Moïse, ah là ! »<br />
Car la commun<strong>au</strong>té de Jérusalem est malade. Ligotée<br />
dans son mosaïsme, trop engagée sans doute dans l’utopique<br />
discipline essénienne, <strong>au</strong> centre même d’un judaïsme<br />
qui devient frénétique, peut-être pleine d’amertume<br />
de voir sa tradition délaissée par les Églises du<br />
monde entier, Jérusalem survit sans gloire. Il semble que<br />
Jacques et d’<strong>au</strong>tres ont épuisé toute leur énergie à lutter<br />
contre l’animosité et la rancœur de certains fidèles et à<br />
garder l’unité scellée en 49, malgré l’œuvre des agitateurs<br />
qui reviennent de loin chaque saison raconter les<br />
crimes énormes de P<strong>au</strong>l le f<strong>au</strong>x Apôtre, comme on les<br />
voit faire lorsque P<strong>au</strong>l entre dans le Temple (Ac 21).<br />
Finalement, après le coup terrible que nous allons<br />
voir, Jérusalem court à la ruine. <strong>La</strong> commun<strong>au</strong>té chrétienne,<br />
qui a échappé <strong>au</strong> désastre miraculeusement,<br />
n’<strong>au</strong>ra plus <strong>au</strong>cune raison ni <strong>au</strong>torité pour se dresser<br />
contre l’Église universelle.<br />
LE DRAME<br />
Il ressort de l’ombre où la mémoire des chrétiens<br />
l’avait enseveli. <strong>La</strong> controverse protestante en avait<br />
brouillé les éléments, en prétendant que Pierre n’était<br />
jamais allé à Rome. Voilà le drame cependant restitué<br />
dans toute sa vérité, en grande partie grâce à Culmann,<br />
un protestant ! dont l’étude sur le martyre de Pierre a<br />
été le point de départ d’une recherche qui a abouti à<br />
une merveilleuse découverte. : celle de ses ossements...<br />
à Rome !<br />
À force d’exalter P<strong>au</strong>l contre Pierre et, plus encore,<br />
contre Jacques, on s’interdisait toute compréhension<br />
profonde des Écritures où sont les documents indubitables<br />
de la grande “ campagne ”, il n’y a pas d’<strong>au</strong>tre<br />
mot, des judéo-chrétiens contre les pagano-chrétiens.<br />
Réglée à Jérusalem de manière pacifique, la querelle<br />
va rebondir dans les commun<strong>au</strong>tés lointaines, moins bien<br />
renseignées et, en l’absence des Apôtres, prêtant l’oreille<br />
<strong>au</strong>x campagnes de plus en plus mensongères des soidisant<br />
partisans de Jacques et des <strong>au</strong>tres “ colonnes ”.<br />
Au fil des Épîtres p<strong>au</strong>liniennes, on perçoit les temps<br />
forts de cette lutte où les querelles doctrinales, si complexes,<br />
se mêlent <strong>au</strong>x rivalités des personnes. Il s’agit<br />
de savoir si la foi <strong>au</strong> Christ crucifié remplace les<br />
œuvres de la Loi, en particulier les règles de pureté<br />
rituelles. Trois positions :<br />
1o Celle de saint P<strong>au</strong>l, radicale, conserve la morale<br />
du Décalogue, et abolit les rites juifs.<br />
2o Celle des judaïsants, <strong>au</strong> contraire, superpose loi<br />
juive et loi chrétienne.<br />
3o Celle des Apôtres, à Jérusalem, associe <strong>au</strong> radicalisme<br />
p<strong>au</strong>linien l’observation des rites juifs dans les<br />
commun<strong>au</strong>tés judaïsantes.<br />
Qui tranchera ?<br />
Les judaïsants contestent à P<strong>au</strong>l le droit de décider<br />
souverainement <strong>au</strong> nom de ses révélations personnelles,<br />
lui qui n’a même pas connu le Christ ! <strong>Contre</strong> P<strong>au</strong>l, ils<br />
se réclament des <strong>au</strong>tres Apôtres.<br />
Le concile de Jérusalem leur donne tort. Réduits <strong>au</strong><br />
silence dans la ville-mère et dans les commun<strong>au</strong>tés de<br />
Pierre, ils s’en vont répandre la zizanie dans les Églises<br />
fondées par P<strong>au</strong>l et qui ne relèvent que de lui, en vertu<br />
de l’accord “ conciliaire ” !<br />
En effet, souligne notre Père, les Apôtres sont d’accord<br />
en 49. Non seulement le décret publié en leur nom<br />
distingue les deux observances : judaïsante et helléniste,<br />
mais il est visible, dans le récit des Actes, qu’il donne<br />
tort <strong>au</strong>x judaïsants obstinés et indociles. Jacques et P<strong>au</strong>l<br />
sont donc en communion et la preuve, c’est la doctrine<br />
qu’ils exposent dans leurs deux Épîtres contemporaines :<br />
<strong>au</strong>x Galates, P<strong>au</strong>l expose son Évangile et s’en prend <strong>au</strong>x
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 21<br />
judaïsants avec véhémence, tandis que Jacques expose sa<br />
doctrine de la foi et des œuvres, et s’en prend lui <strong>au</strong>ssi<br />
<strong>au</strong>x judaïsants, non pas comme à des adversaires mais<br />
comme à des partisans extrémistes qu’il désapprouve<br />
sans équivoque :<br />
« Est-il quelqu’un de sage et d’expérimenté parmi<br />
vous ? Qu’il fasse voir par une bonne conduite des<br />
actes empreints de douceur et de sagesse. Si vous avez<br />
<strong>au</strong> cœur, <strong>au</strong> contraire, une amère jalousie et un esprit<br />
de chicane, ne vous vantez pas, ne mentez pas contre la<br />
vérité. Pareille sagesse ne descend pas d’en h<strong>au</strong>t : elle<br />
est terrestre, animale, démoniaque. Car, où il y a<br />
jalousie et chicane, il y a désordre et toutes sortes de<br />
m<strong>au</strong>vaises actions. » (Jc 3, 13-16)<br />
Le parallèle entre les deux Épîtres est instructif :<br />
« D’où viennent les guerres, d’où viennent les batailles<br />
parmi vous ? N’est-ce pas précisément de vos<br />
passions, qui combattent dans vos membres ? » (Jc 4, 1)<br />
« Car la chair convoite contre l’esprit, et l’esprit<br />
contre la chair ; il y a entre eux antagonisme, si bien<br />
que vous ne faites pas ce que vous voudriez. »<br />
(Ga 5, 17)<br />
L’accord fondamental des deux Apôtres est patent.<br />
En tout cas, GALATES et ACTES 15 s’accordent à mettre<br />
Jacques en avant dans la controverse, et à manifester<br />
ainsi devant toutes les Églises qu’on ne pouvait se<br />
réclamer de lui pour combattre Pierre ou P<strong>au</strong>l.<br />
<strong>La</strong> lutte va devenir de plus en plus sévère. Et cela se<br />
comprend. Dans chacune des villes où passe P<strong>au</strong>l, des<br />
Juifs et des Grecs se convertissent. Certains, comme<br />
Apollos à Éphèse, sont déjà venus à la « Voie » sans<br />
pour <strong>au</strong>tant renier le judaïsme. On comprend qu’ils<br />
hésitent à tout rejeter de leurs rites alors que P<strong>au</strong>l<br />
s’efforce de ne pas ergoter sur ces sujets délicats :<br />
« Je veux donc que les jeunes veuves se remarient,<br />
qu’elles aient des enfants, gouvernent leur maison et<br />
ne donnent à l’adversaire <strong>au</strong>cune occasion d’insulte. »<br />
(1 Tm 5, 14)<br />
Mais dès qu’arrivent les « f<strong>au</strong>x frères », la crise éclate,<br />
dissensions, rivalités, défiance à l’égard de P<strong>au</strong>l, pressions<br />
exercées sur les païens pour les circoncire, etc.<br />
C’est alors que P<strong>au</strong>l écrit pour expliquer l’Évangile<br />
du salut et le rôle périmé de la Loi. Enfin, pour se<br />
justifier, il s’inquiète, à juste titre :<br />
« Mais si vous vous mordez et vous vous dévorez<br />
les uns les <strong>au</strong>tres, prenez garde que vous allez vous<br />
entre-détruire. » (Ga 5, 15)<br />
Ces gens, ces « f<strong>au</strong>x frères », profitent du manque<br />
d’unité disciplinaire de l’Église. Jusqu’où iront-ils ?<br />
LE MARTYRE DES APÔTRES<br />
Saint Luc n’a pas voulu raconter ces intrigues... et<br />
cependant, à la lumière des Épîtres de saint P<strong>au</strong>l, nous<br />
les découvrons dans les Actes mêmes.<br />
Le point culminant est le retour de P<strong>au</strong>l à Jérusalem<br />
(Ac 21). On voit Jacques et les anciens le recevoir et<br />
chercher à le protéger de la haine des judaïsants. Eux-<br />
mêmes ne paraissent pas se rendre bien compte de la<br />
théologie radicale de P<strong>au</strong>l. Les ennemis, eux, sont plus<br />
lucides ! Aussi, on songe invinciblement à un complot<br />
où les judaïsants ont dirigé la haine des juifs sur la<br />
personne de P<strong>au</strong>l en formulant leurs propres griefs :<br />
« Hommes d’Israël, <strong>au</strong> secours ! Le voici, l’individu<br />
qui prêche à tous et partout contre notre peuple, contre<br />
la Loi et contre ce Lieu ! Et voilà encore qu’il a<br />
introduit des Grecs dans le Temple et profané ce saint<br />
Lieu. » (Ac 21, 28)<br />
Il est patent qu’à la haine des juifs pour les<br />
chrétiens, s’en ajoute une <strong>au</strong>tre plus précise contre ceux<br />
qui s’affranchissent davantage de la loi et de la tradition,<br />
et contre leur chef : P<strong>au</strong>l.<br />
Certainement, pendant sa captivité, l’effort des f<strong>au</strong>x<br />
frères s’intensifie. On en trouve la preuve dans la terrible<br />
colère de P<strong>au</strong>l à leur endroit :<br />
« Prenez garde <strong>au</strong>x chiens ! Prenez garde <strong>au</strong>x m<strong>au</strong>vais<br />
ouvriers ! Prenez garde <strong>au</strong>x f<strong>au</strong>x circoncis ! » (Ph 3, 2)<br />
Mais c’est qu’à Rome même, narguant ses chaînes,<br />
les judaïsants se démènent :<br />
« Je désire que vous le sachiez, frères, mon affaire a<br />
tourné plutôt <strong>au</strong> profit de l’Évangile : en effet, dans tout<br />
le prétoire et partout ailleurs, mes chaînes ont acquis,<br />
dans le Christ, une vraie notoriété, et la plupart des<br />
frères, enhardis dans le Seigneur du fait même de ces<br />
chaînes, redoublent d’une belle <strong>au</strong>dace à proclamer sans<br />
crainte la Parole. Certains, il est vrai, le font par envie,<br />
en esprit de rivalité, mais pour les <strong>au</strong>tres, c’est vraiment<br />
dans de bons sentiments qu’ils prêchent le Christ. Ces<br />
derniers agissent par charité, sachant bien que je suis<br />
voué à défendre ainsi l’Évangile ; quant <strong>au</strong>x premiers,<br />
c’est par esprit d’intrigue qu’ils annoncent le Christ ;<br />
leurs intentions ne sont pas pures : ils s’imaginent ainsi<br />
aggraver le poids de mes chaînes. Mais qu’importe ?<br />
Après tout, d’une manière comme de l’<strong>au</strong>tre, hypocrite<br />
ou sincère, le Christ est annoncé, et je m’en réjouis.<br />
Je persisterai même à m’en réjouir. » (Ph 1, 12-18)<br />
Rome était en effet le siège d’une commun<strong>au</strong>té chrétienne<br />
lorsque saint P<strong>au</strong>l y arriva pour sa première<br />
captivité. Cette commun<strong>au</strong>té était judaïsante. Aussi,<br />
P<strong>au</strong>l prit-il mille préc<strong>au</strong>tions :<br />
« Et d’abord je remercie mon Dieu par Jésus-Christ<br />
à votre sujet à tous, de ce qu’on publie votre foi dans<br />
le monde entier. » (Rm 1, 8)<br />
« Car j’ai un vif désir de vous voir, afin de vous<br />
communiquer quelque don spirituel, pour vous affermir,<br />
ou plutôt éprouver le réconfort parmi vous de notre foi<br />
commune à vous et à moi. » (Rm 1, 11-12).<br />
Malgré cela, la venue de P<strong>au</strong>l allait ici plus<br />
qu’ailleurs déchaîner la haine. Déjà, en effet, l’Apôtre<br />
avait courageusement pris position pour assurer dans<br />
leur foi ses propres fidèles venus s’établir à Rome :<br />
« Je vous en prie, frères, gardez-vous de ces f<strong>au</strong>teurs<br />
de dissensions et de scandales contre l’enseignement<br />
que vous avez reçu ; évitez-les. Car ces sortes de<br />
gens ne servent pas notre Seigneur le Christ, mais leur
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 22<br />
ventre, et par des discours doucereux et flatteurs séduisent<br />
les cœurs simples. En effet, le renom de votre<br />
obéissance s’est répandu partout et vous faites ma<br />
joie ; mais je veux que vous soyez avisés pour le bien<br />
et malhabiles pour le mal. Le Dieu de la paix écrasera<br />
bien vite Satan sous vos pieds. Que la grâce de Notre-<br />
Seigneur Jésus-Christ soit avec vous ! » (Rm 16, 17-20)<br />
« Pas de querelles, pas de jalousie » (Rm 13, 13), on<br />
comprend pourquoi cette parole devint le leitmotiv des<br />
Apôtres, de tous les Apôtres !<br />
En 62, Jacques est mort martyr à Jérusalem, peu de<br />
temps après le passage de P<strong>au</strong>l, peut-être à c<strong>au</strong>se de sa<br />
démonstration publique d’amitié envers P<strong>au</strong>l. Pierre a<br />
jugé. Son Épître, la première, sûrement <strong>au</strong>thentique,<br />
date de ce temps. Pierre en a fait un appel à la charité ;<br />
il prévoit les épreuves et considère comme probable le<br />
sacrifice qui vient.<br />
Il vint en effet, pour lui : le 13 octobre 64. Et pour<br />
P<strong>au</strong>l, en 67. Un document extraordinaire, une lettre de<br />
saint Clément qui sera, à la fin du <strong>siècle</strong>, le troisième<br />
successeur de saint Pierre, adressée <strong>au</strong>x chrétiens de<br />
Corinthe, nous apprend que Pierre et P<strong>au</strong>l ont été martyrisés,<br />
victimes de la haine des f<strong>au</strong>x frères, de leur<br />
envie et de leur jalousie.<br />
Dans son éditorial de juillet 1977, notre Père écrit :<br />
« Je médite l’exemple de nos bienheureux Apôtres et je<br />
suis saisi par les circonstances effrayantes de leur martyre.<br />
J’ai l’impression invincible que nous allons être<br />
emportés dans une catastrophe semblable. » Allusion<br />
<strong>au</strong>x dissensions des traditionalistes, qui rappellent par<br />
bien des aspects celles qui déchiraient la commun<strong>au</strong>té<br />
primitive entre les judaïsants et les <strong>au</strong>tres...<br />
Puis l’abbé de Nantes cite longuement la LETTRE DE<br />
CLÉMENT <strong>au</strong>x chrétiens de Corinthe : « En la relisant,<br />
comment ne pas frémir ? Il les conjurait de cesser de se<br />
nuire à eux-mêmes et de mettre en péril l’Église par<br />
leurs discordes [...]. <strong>La</strong> jalousie, la haine entre frères,<br />
seront toujours fatales à l’Église. Saint Clément pour le<br />
dire invoque l’<strong>au</strong>torité du livre de la Sagesse : “ C’est<br />
par la jalousie injuste et impie que la mort est entrée dans<br />
le monde. ” (2, 24) Et de citer sept exemples de l’Ancien<br />
Testament : Caïn et Abel qu’il tue par jalousie, Ésaü<br />
dressé contre Jacob, Joseph vendu par ses frères, Moïse<br />
dénoncé par un homme de sa race à Pharaon, Aaron et<br />
Myriam, sa sœur, jaloux de Moïse, Dathan et Abiron<br />
révoltés contre lui, Saül saisi d’une fureur homicide<br />
contre David...<br />
« Oui, la jalousie entre frères est une folie meurtrière.<br />
Clément en vient à des exemples plus proches,<br />
tirés d’un passé tout ch<strong>au</strong>d encore de jalousie entre<br />
chrétiens, honte suprême ! »<br />
PIERRE ET PAUL TRAHIS PAR DES FRÈRES.<br />
« Mais pour laisser de côté les exemples anciens, venonsen<br />
<strong>au</strong>x athlètes tout récents, prenons les généreux exemples<br />
de notre génération. C’est par l’effet de la jalousie et de<br />
l’envie que furent persécutés ceux qui étaient les colonnes<br />
les plus élevées et les plus justes, et qui combattirent jusqu’à<br />
la mort.<br />
« Jetons les yeux sur les excellents Apôtres : PIERRE, qui<br />
par l’effet d’une injuste jalousie, souffrit non pas un ou<br />
deux, mais de nombreux tourments, et qui, après avoir<br />
rendu son témoignage, s’en est allé <strong>au</strong> séjour de gloire qui<br />
lui était dû.<br />
« C’est par l’effet de la jalousie et de la discorde que<br />
PAUL a montré le prix de la patience. Chargé sept fois de<br />
chaînes, banni, lapidé, devenu un hér<strong>au</strong>t en Orient et en<br />
Occident, il a reçu pour sa foi une gloire éclatante. Après<br />
avoir enseigné la justice <strong>au</strong> monde entier, atteint les bornes<br />
de l’Occident, rendu son témoignage devant ceux qui gouvernent,<br />
il a ainsi quitté le monde et s’en est allé <strong>au</strong> saint<br />
lieu, illustre modèle de patience.<br />
« À ces hommes dont la vie a été sainte, vint s’adjoindre<br />
une grande foule d’élus qui, par suite de la jalousie, endurèrent<br />
be<strong>au</strong>coup d’outrages et de tortures et qui laissèrent<br />
parmi nous un magnifique exemple.<br />
« C’est par l’effet de la jalousie que des femmes, des<br />
jeunes filles et fillettes, après avoir subi de terribles et<br />
monstrueux outrages, ont touché le but dans leur course<br />
de la foi et ont reçu la noble récompense, toutes fragiles de<br />
corps qu’elles étaient.<br />
« <strong>La</strong> jalousie a aliéné des épouses à leurs maris ; elle a<br />
violé la parole d’Adam, notre père : Voici l’os de mes os<br />
et la chair de ma chair.<br />
« Jalousie et discorde ont détruit de grandes villes et<br />
anéanti de puissantes nations. » (1 CLÉMENT 5-6)<br />
Robinson a montré que l’on devait dater cette lettre<br />
d’avant la ruine du Temple de Jérusalem, donc de 69-<br />
70, car Clément invoque, exactement comme saint P<strong>au</strong>l<br />
dans l’Épître <strong>au</strong>x Hébreux, la pratique de la liturgie<br />
juive encore en usage <strong>au</strong> Temple, à titre de comparaison,<br />
pour la bonne ordonnance de la liturgie chrétienne<br />
(Robinson, RE-DATER LE NOUVEAU TESTAMENT,<br />
Lethielleux 1987, p. 426-435 ; cf. BIBLE, ARCHÉOLOGIE,<br />
HISTOIRE, t. 3, p. 108)<br />
Ainsi, sous Néron, la dénonciation dirigea la persécution<br />
et manifesta du même coup à toute l’Église que<br />
la vérité était liée à Pierre.<br />
Un dernier Apôtre demeurait pour le proclamer clairement<br />
: saint Jean. Il montre, dans l’Apocalypse, chapitre<br />
11, les « deux témoins, flambe<strong>au</strong>x qui se tiennent<br />
devant le maître de la terre », Pierre et P<strong>au</strong>l, munis des<br />
pouvoirs de Moïse le législateur, et d’Élie le prophète,<br />
martyrs, mais glorifiés par la puissance de Dieu « <strong>au</strong>x<br />
yeux de leurs ennemis ».<br />
Jean compare leur sacrifice à celui de leur Maître.<br />
Née dans son Sang précieux, l’Église du Christ a mérité<br />
sa pleine fidélité surnaturelle à l’Évangile de la Croix,<br />
sa liberté dans le sang des Apôtres, les “ colonnes ”.<br />
Désormais puissante, elle peut affronter le monde païen.<br />
Elle s’est libérée des liens où la synagogue la retenait<br />
encore prisonnière.<br />
Jérusalem n’est plus. L’Église romaine croît, ensemencée<br />
dans un terrain vague, <strong>au</strong> Vatican.<br />
frère Bruno de Jésus-Marie.
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 23<br />
CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ<br />
QUI est Dieu ? Qui est l’Immaculée ? Comment<br />
s’épanche du Ciel sur la terre l’amour dont ils<br />
nous aiment, et comment leur rendrons-nous amour<br />
pour amour ? C’est par une grâce infuse émanée de la<br />
lumière qui rayonnait d’un ange du Ciel et de la Très<br />
Sainte Vierge en personne que les petits voyants de<br />
Fatima reçurent, de 1916 à 1917, la réponse à ces<br />
questions capitales.<br />
L’ange qui nous communiqua une grâce semblable,<br />
c’est notre bien-aimé Père tout <strong>au</strong> long de ses retraites<br />
sur la “ CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ ”, en docteur mystique<br />
de la pure foi <strong>catholique</strong>, confident du « secret le<br />
plus intime de notre Dieu », qui est <strong>au</strong>ssi le « secret le<br />
plus intime de notre histoire ».<br />
C’est une synthèse d’une ampleur sans précédent, à<br />
vous couper le souffle... C’était <strong>au</strong> temps de la grande<br />
apostasie. De prétendus savants avaient tout enténébré,<br />
tout désorienté, tout figé dans la froideur de leur rationalisme,<br />
<strong>au</strong> nom même de la parole de Dieu ! C’est<br />
du sein de cette génération perverse que notre bienheureux<br />
Père a été mis à part, afin de préparer la<br />
renaissance de l’Église par sa manière très particulière<br />
de nous faire connaître, aimer et servir notre grand<br />
Dieu, en ses trois Personnes, comme en Celle qu’ils<br />
chérissent plus que tout, car elle est plus du Ciel que<br />
de la terre : Marie Immaculée...<br />
Une première fois en 1993, puis lors des deux dernières<br />
grandes retraites qu’il nous a prêchées, en 1997<br />
et en 1998, il nous livra les fruits du colloque intime de<br />
toute sa vie avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit.<br />
1993 : CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ<br />
Avec un “ c ”, le mot exprime le mouvement perpétuel<br />
d’une affection et d’un dévouement mutuels si<br />
agissants qu’il entraîne toute âme désireuse d’y prendre<br />
part, amour débordant de la vie trinitaire dans le Cœur<br />
Immaculé de Marie et y portant son fruit : la moisson,<br />
la vendange, si c’était possible, de toute la famille<br />
humaine, du moins de tous ceux que Dieu notre Père a<br />
élus pour enfants de Marie, et qui seront s<strong>au</strong>vés par sa<br />
médiation universelle.<br />
Ouvrant sa Bible, Georges de Nantes va tout de suite<br />
rencontrer le Bon Dieu et nous faire admirer la bonté de<br />
ce créateur tout-puissant, le Père si bon de ses enfants<br />
Adam et Ève qu’il a créés à son image et ressemblance.<br />
Mais il passera vite pour aller <strong>au</strong> drame, qui va se nouer<br />
sous l’instigation du diable, et nous faire admirer « la<br />
Femme » qui obtint de Dieu le pardon de nos premiers<br />
parents, salvatrice du genre humain, à l’œuvre dès les<br />
anciens jours jusqu’à notre <strong>au</strong>jourd’hui d’Apocalypse,<br />
où Reine du Rosaire elle lutte plus que jamais pour<br />
notre salut, dans les douleurs du combat des derniers<br />
temps (cf. Ap 12). <strong>La</strong> Bible le révélait, la vie des saints<br />
l’illustrait, les apparitions de Notre-Dame, celles de<br />
Fatima surtout, nous en conjuraient tant et si bien, qu’<strong>au</strong><br />
terme de cette première partie de la retraite, il fallait<br />
nous engager à aller à Jésus par Marie. Cette expression<br />
chère à la dévotion populaire raillée par les “ savants ”,<br />
notre Père nous démontra qu’elle était <strong>au</strong> contraire l’absolu<br />
d’une vérité révélée. Au point de lui appliquer ces<br />
vers du ROMANCERO de saint Jean de la Croix :<br />
Une épouse qui t’aime, mon Fils,<br />
j’aimerais te donner,<br />
qui, grâce à toi, vivre avec nous<br />
puisse mériter,<br />
et manger à la même table<br />
du même pain dont je me nourris,<br />
pour qu’elle connaisse les biens<br />
que j’ai en un tel Fils,<br />
et que, de ta grâce et de ta vigueur,<br />
Avec moi elle se réjouisse.<br />
Ces poèmes trinitaires du ROMANCERO sont un véritable<br />
dévoilement de l’orthodromie divine. Notre Père<br />
y trouvait « absolument toute notre doctrine relationnelle,<br />
toute notre circumincessante charité ; ces épousailles<br />
sont le mystère des mystères qui fera notre<br />
bonheur inépuisable dans l’éternité, si Dieu veut bien<br />
nous y accueillir. Mais dès ici-bas, cela donne à notre<br />
religion une sorte de vivacité, d’alacrité, d’enthousiasme<br />
perpétuel. Ce sont de vives flammes d’amour chargées<br />
d’une doctrine totale. »<br />
L’ÉPOUSE DU FILS.<br />
Cependant cette merveilleuse doctrine, toute à la<br />
gloire de l’Immaculée, ne fut pas bien comprise... de<br />
saint Jean de la Croix lui-même ! Pour lui, la Vierge<br />
Marie est cette « gracieuse Mère » qui donne à Dieu sa<br />
chair. Mais Elle n’est pas l’épouse, ni elle, ni <strong>au</strong>cun<br />
être vivant. L’épouse, dans la pensée de saint Jean de la<br />
Croix, selon les Pères et les théologiens scolastiques,<br />
n’est pas une réalité de chair et de sang, mais une idée<br />
platonicienne, l’idée d’ “ Homme ”, c’est une abstraction<br />
aristotélicienne, la “ nature humaine ”, désignant le<br />
genre humain tout entier <strong>au</strong>quel Marie elle-même appartient<br />
comme une enfant d’Ève, ni plus ni moins.<br />
Mais la “ nature humaine ”, en bonne philosophie,<br />
n’est qu’une manière d’être, prise par le Verbe pour<br />
devenir l’Époux de chair et de sang, et d’âme et d’esprit<br />
d’une épouse de chair et de sang, et pour entreprendre<br />
avec Elle de s<strong>au</strong>ver le monde. Ces épousailles,<br />
Il les a célébrées le jour de l’Annonciation. Alors la<br />
chair de la Vierge Marie ne fait qu’un avec la chair du<br />
Fils de Dieu, produite en Elle comme une fleur sur<br />
cette tige virginale.<br />
Muni de cette clef de lecture, l’enfant de Marie,<br />
consacré à son Cœur Immaculé, découvre dans le RO-<br />
MANCERO que l’amour est tout. Son symbole est celui
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 24<br />
des épousailles, mais la réalité toute divine se trouve en<br />
Jésus et Marie.<br />
L’abbé de Nantes, notre Père, est le théologien de la<br />
grande intuition de saint Maximilien-Marie Kolbe méditant<br />
sur le dogme proclamé par Pie IX en 1854 et les<br />
apparitions de Notre-Dame de Lourdes en 1858, comprenant<br />
que l’Immaculée Conception est plus du Ciel<br />
que de la terre, plus divine qu’humaine, objet d’un<br />
amour particulier. Car c’est avec Elle, par Elle et pour<br />
Elle, nous le savons maintenant, que Dieu a tout créé,<br />
tout racheté, et que pour finir il sanctifiera le genre<br />
humain tout entier lors du triomphe final du Cœur Immaculé<br />
de Marie, inconditionnellement promis à Fatima.<br />
Cette retraite fut donc un monument de doctrine mariale<br />
que nous avons retranscrit dans les CRC no 297 de<br />
décembre 1993 ; nos 299 et 302 de février et mai 1994.<br />
1997 :<br />
CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ TRINITAIRE<br />
En 1993, notre bien-aimé Père avait conscience<br />
d’avoir suivi un chemin original : « J’allais dire que ce<br />
n’est pas orthodoxe ! Si, c’est orthodoxe mais ce n’est<br />
pas classique. Dans les livres, on commence par Dieu,<br />
la Trinité, l’Incarnation... mais dans la vie, lorsque le<br />
diable veut nous ravir notre âme et que l’on cherche<br />
une aide pour ne pas périr, on trouve la main secourable<br />
de la Vierge Marie notre Mère, on la tient et on ne<br />
la lâche plus. »<br />
En 1997, il reprit sa méditation de la “ circumincessante<br />
charité ” d’une manière plus “ classique ” afin d’y<br />
intégrer le bénéfice de sa métaphysique relationnelle et<br />
de sa “ théologie totale ”.<br />
L’AMOUR DU PROCHAIN À L’ ÉCOLE DE NOTRE PÈRE.<br />
Nous sommes tous frères, pourquoi ? Comment ?<br />
Par la circumincessante charité divine issue de l’unique<br />
sacrifice des deux Cœurs transpercés de Jésus et Marie<br />
crucifiés. <strong>La</strong> vision de Tuy nous révèle ce mystère de<br />
grâce et de miséricorde, par lequel la tendresse des<br />
divines Personnes ne demande qu’à s’épancher sur la<br />
terre afin d’y susciter en retour notre dévotion... Tendresse<br />
divine, mariale, et dévotion humaine découlant<br />
du rése<strong>au</strong> serré des relations de paternité, filiation,<br />
conjugalité, procréation, en lesquelles Dieu nous a créés<br />
à son image et ressemblance (cf. Gn 1, 26-27).<br />
En cet admirable échange, et à proportion de notre<br />
familiarité avec le Bon Dieu, avec la Très Sainte<br />
Vierge, avec les saints et les anges, ce sont des flots de<br />
lumières et de charité célestes qui nous seront communiqués<br />
afin de nous aider à mieux être père, fils, époux,<br />
épouse, amis.<br />
C’est ainsi, nous enseigne notre Père, que « la douce<br />
paternité divine doit remplir les pères humains, comme<br />
déjà saint Joseph, et la maternité de Marie donner une<br />
impulsion merveilleuse <strong>au</strong>x épouses fidèles et <strong>au</strong>x<br />
mères chrétiennes ». C’est ainsi que les prêtres, les reli-<br />
gieux, religieuses, comme <strong>au</strong>ssi les époux chrétiens<br />
consacrés à la Vierge Marie ou à saint Joseph depuis<br />
leur enfance, en amitié avec tel saint, voués à telle<br />
confrérie de piété, entreront de plain-pied dans la vie<br />
sacerdotale et religieuse, ou bien encore aborderont le<br />
mariage humain avec grande sagesse. Ils ne seront pas<br />
seuls, ni livrés à leurs instincts charnels, ni troublés par<br />
diverses psychanalyses en vogue dans l’Église depuis<br />
Vatican II. Mais ils seront forts de leurs intimes relations<br />
<strong>au</strong>x personnes divines et <strong>au</strong>x saints protecteurs,<br />
pris pour modèles, sources de grâce et objets de leur<br />
dilection, cultivée, alimentée par les dix minutes d’oraison<br />
quotidienne prescrite <strong>au</strong>x phalangistes.<br />
NOVA ET VETERA.<br />
Notre Père voulut conclure cette retraite en la récapitulant<br />
en vingt-trois petits chapitres, dans une merveilleuse<br />
vision unitive de paradis retrouvé, où la<br />
grande obsession sexuelle qui empoisonne l’humanité<br />
depuis le péché des origines peut être exorcisée. Certes<br />
le démon est toujours là pour tenter l’homme et la<br />
femme, mais s’ils suivent l’enseignement libérateur de<br />
notre Père, l’émerveillement du plan de Dieu qui est<br />
Amour, et la “ pureté positive ” qui en résulte l’emporteront<br />
sur le trouble et les débordements désordonnés<br />
de la chair.<br />
Car enfin cette différence des sexes fut voulue par<br />
Dieu, d’une part comme la représentation charnelle des<br />
processions trinitaires du Fils et du Saint-Esprit, d’<strong>au</strong>tre<br />
part comme la raison ultime de l’incarnation du Verbe.<br />
En effet, si Adam et Ève ont été créés mâle et femelle<br />
avant le péché originel, c’est en vue de l’union de<br />
son Fils et de Celle qu’il aimait plus que toutes les<br />
<strong>au</strong>tres créatures, l’Immaculée, temple du Saint-Esprit, la<br />
Femme par excellence, épouse de cet époux, qui accueillerait<br />
en son sein cet homme parfait dans une<br />
union, une unité sans équivalent.<br />
Distinguer ainsi l’homme et la femme, par le h<strong>au</strong>t,<br />
explique notre Père, les appelle à trouver l’un et l’<strong>au</strong>tre<br />
leur épanouissement dans une pureté parfaite, mystique,<br />
chacun selon sa condition, chacun selon sa vocation. Le<br />
couple humain dans cette lumière de charité trinitaire est<br />
non seulement délivré des prestiges de Satan, mais il<br />
participe à la lutte contre cet ennemi du genre humain, à<br />
la ressemblance des Saints Cœurs de Jésus et de Marie<br />
Immaculée, dans l’offrande bienheureuse, éminemment<br />
féconde d’un sacrifice rédempteur, qu’il s’agisse du<br />
saint Sacrifice de la Messe ou de son figuratif, celui de<br />
l’amour humain. Admirables harmoniques, correspondances<br />
que les poètes et les liturgistes du troisième<br />
millénaire ne cesseront decélébrer.<br />
Mais il f<strong>au</strong>t tout d’abord que se consomme le mystère<br />
d’iniquité que nous voyons se dérouler sous nos<br />
yeux. Si le démon des origines revient à l’avant-scène,<br />
il est depuis 1830 marqué de près par l’Immaculée, qui<br />
annonce à Elle seule l’illusion caduque de son règne et<br />
sa chute finale.<br />
En attendant, c’est la totalité de son mystère trini-
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taire que Dieu veut nous donner à adorer en Elle. Notre<br />
Père adhère absolument à cette volonté, et d’emblée sa<br />
contemplation nous montre la Vierge Marie préexistante<br />
: Fille du Père, elle assiste à la création de l’univers.<br />
Épouse du Verbe, elle est Corédemptrice dès le<br />
péché des origines. « Femme » de l’Apocalypse et Reine<br />
des Cieux, Temple du Saint-Esprit et Mère universelle<br />
Médiatrice de toutes grâces, c’est elle qui doit mettre <strong>au</strong><br />
monde une nouvelle génération d’enfants de Dieu.<br />
Exit la “ génération du concile ”, l’avenir de l’Église<br />
est uniquement dans la “ génération de l’Immaculée ”,<br />
celle des « apôtres des derniers temps » que saint<br />
Louis-Marie Grignion de Montfort appelait de ses<br />
vœux, comme notre Père nous le rappellera en conclusion.<br />
Grâce à lui, quelle joie sans cesse jaillissante<br />
d’être nés sous ce signe ou de le préparer !<br />
1998. TENDRESSE ET DÉVOTION DIVINE,<br />
EUCHARISTIQUE ET MARIALE<br />
L’année suivante, il reprit donc le même dessein :<br />
« Nous ne cherchons pas à faire de la théologie, nous<br />
cherchons à émouvoir notre cœur de tendresse pour tout<br />
ce que Dieu nous donne à aimer. » Plus encore que<br />
dans les retraites précédentes, cette bonté et tendresse<br />
divines vont nous être communiquées par notre Père,<br />
par le ton de sa voix, l’expression de son visage, <strong>au</strong> fur<br />
et à mesure qu’il tourne les pages de sa Bible et que<br />
l’on entre à sa suite dans la bienveillante-bienfaisante<br />
familiarité des personnes rencontrées.<br />
<strong>La</strong> première, Dieu notre bon Père du Ciel, qui se<br />
réjouit d’avoir créé son fils Adam. Il lui apprend à parler<br />
et fait son éducation de fils de roi pour ainsi dire, car<br />
Adam exerce sa régence en sous-traitance de la roy<strong>au</strong>té<br />
de Dieu sur toute la création. Merveilleuse relation de ce<br />
Père et de ce fils qui s’entretiennent à la brise du jour.<br />
LA NAISSANCE D’ ÈVE DU CÔTÉ D’ADAM.<br />
Mais voilà qu’à ce Père qui est Dieu, et à ce fils qui<br />
est homme, manque cependant une troisième personne<br />
qui soit le complément heureux d’Adam. Yahweh va<br />
tirer de la côte d’Adam son fils, une épouse, Ève, par<br />
une merveilleuse « opération chirurgicale » qui ravit<br />
notre Père et constitue le couple humain à l’image et<br />
ressemblance de la Trinité divine (cf. Gn 1, 27).<br />
C’est unique et fondateur car, dans l’inégalité de ces<br />
relations constituantes, c’est toute la joie de Dieu et du<br />
genre humain, hiérarchiquement ordonné, qui n’<strong>au</strong>ra pas<br />
trop de l’éternité pour s’exprimer. Notre Père en exulte<br />
d’enthousiasme : « Joie pour Dieu à la création<br />
d’Adam, <strong>au</strong>ssitôt devenu le bien-aimé de Yahweh ! Joie<br />
d’Adam à la vue d’Ève, encore étendue contre son<br />
corps <strong>au</strong> jour de sa naissance ! et joie de Yahweh, de<br />
cette joie d’Adam et d’Ève. Joie d’Ève en retour, d’être<br />
ainsi adoptée par l’un et par l’<strong>au</strong>tre dans une paix<br />
profonde ! Joie d’Adam et Ève s’unissant dans le plus<br />
sublime des mariages qui se puisse rêver, sous le regard<br />
de Dieu créant et bénissant son œuvre. »<br />
LA VIE AU PARADIS.<br />
Mais pour le quotidien, comment imaginer ce bonheur<br />
mutuel de « papa le Bon Dieu » (sainte Thérèse) et<br />
de ses deux premiers enfants. C’est facile, dira notre<br />
Père, il suffit de penser <strong>au</strong>x enfants de Fatima qui ont<br />
vécu une semblable intimité, dans cette grande lumière<br />
qui leur est apparue et qui était Dieu. Présence quelque<br />
peu écrasante dont l’Ange fut le médiateur et qui fit<br />
dire <strong>au</strong> petit François : « Je sentais que Dieu était en<br />
moi, mais je ne savais pas comment cela s’était fait. »<br />
Cependant, le 13 mai 1917, nous explique sœur Lucie<br />
« l’apparition de Notre-Dame vint de nouve<strong>au</strong> nous<br />
plonger dans le surnaturel, mais d’une manière be<strong>au</strong>coup<br />
plus suave. Au lieu de cet anéantissement en la<br />
divine présence, qui nous prostrait, même physiquement,<br />
celle-ci nous laissa une paix, une joie expansive<br />
qui ne nous empêchait pas de parler ensuite de ce qui<br />
s’était passé. » Ces enfants ont donc été fortifiés dans<br />
la grâce, assez pour vivre en présence de Dieu ! Et<br />
Adam ? Et Ève ? Pareillement.<br />
Cette considération de la situation avant le péché<br />
originel est capitale. Elle est pour ainsi dire la clef de<br />
voûte de tout l’édifice de la circumincessante charité,<br />
mystère dont la connaissance apporte un remède à tant<br />
de désordres nés de deux erreurs dont notre bienheureux<br />
Père veut à tout prix nous préserver : d’une part le<br />
mépris platonicien de la sexualité, malencontreusement<br />
passé dans la tradition <strong>catholique</strong>, et d’<strong>au</strong>tre part le<br />
diabolique soupçon freudien qui empoisonne l’humanité<br />
à l’époque moderne. Car ces deux désorientations, apparemment<br />
opposées, se prêtent en réalité un mutuel<br />
appui, la première faisant le lit de la seconde, toutes<br />
deux travaillant à l’affolement de nos adolescents.<br />
Dramatique « problème pastoral » ignoré avant, pendant<br />
et après Vatican II !<br />
AMOUR HUMAIN AMOUR DIVIN.<br />
Notre Père, lui, veille sur son petit troupe<strong>au</strong>, et veut<br />
le maintenir sur les voies de la justice et de la “ pureté<br />
positive ” :<br />
« Tout le monde pense <strong>au</strong> problème de la sexualité.<br />
Tout le monde est appelé à connaître, d’une manière ou<br />
d’une <strong>au</strong>tre, ce que sont les choses du sexe, de la<br />
reproduction, les choses de l’amour sensuel ou spirituel.<br />
Dieu l’a voulu, et donc il ne f<strong>au</strong>t pas cacher ces choses<br />
<strong>au</strong>x chrétiens, la Bible elle-même en parle en de nombreuses<br />
occasions. On a trop élevé nos enfants à se<br />
boucher les yeux pour ne pas voir. J’en ferais un diaporama,<br />
ou j’imaginerais bien une enfilade de salles<br />
comme <strong>au</strong> Louvre. Dans chaque salle serait représenté<br />
le contenu d’un chapitre de notre retraite.<br />
« Je voudrais que le monde entier défile, les religieuses,<br />
les dominicains, les jésuites, les prêtres séculiers,<br />
les docteurs, les sages-femmes. Que tout le monde<br />
comprenne en voyant Adam et Ève si bien mariés ce<br />
que c’est que la création par Dieu de l’homme et de la<br />
femme, du sexe et de l’instinct sexuel, et de tout ce que
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cela suppose de mouvement, de passion, de vertu, de<br />
désir, de don mutuel, toute cette merveille que l’on<br />
appelle le mariage institué par Dieu <strong>au</strong>x premiers temps<br />
de la création. Il f<strong>au</strong>t qu’<strong>au</strong>cun être n’y échappe, il f<strong>au</strong>t<br />
que tous sachent comment ils sont venus à l’existence<br />
et comment ils ont un père et une mère. »<br />
Devant ce couple associé dans l’amour, notre Père<br />
imagine les enfants de l’Église, bien éduqués par elle,<br />
moduler sans complexe leur réponse, chacun selon la<br />
vocation à laquelle Dieu ne manquera pas de les attirer de<br />
la plus aimable manière. Épouser un homme ou une<br />
femme sous le regard de notre très chéri Père Céleste,<br />
devenir épouse du Christ, fils du Père tout dévoué <strong>au</strong><br />
service de son Église, tous tireront profit de cette parole<br />
de Jésus : « <strong>La</strong> chair ne sert de rien. » Car l’organe qui<br />
doit polariser toute notre attention depuis l’incarnation du<br />
Verbe, mais encore f<strong>au</strong>t-il que l’Église le prêche, ce n’est<br />
plus le sexe mais son correspondant spirituel – de cet<br />
« Esprit qui donne la vie » – c’est LE CŒUR. C’est la<br />
charité dont la source vive jaillit du cœur à cœur eucharistique<br />
dans la communion, et répand sa bienfaisance, de<br />
proche en proche, jusqu’<strong>au</strong>x plus « lointaines périphéries<br />
», comme le souhaite notre pape François. C’est cette<br />
circumincessante charité, toute de tendresse eucharistique<br />
et mariale, que nous voyons et admirons dans la vie des<br />
saints, c’est cette « cordialité » puisée <strong>au</strong>x sources vives<br />
du Cœur à Cœur de Jésus et Marie dont notre bienheureux<br />
Père n’a cessé d’être l’apôtre enthousiaste.<br />
L’ ŒUVRE DU DIABLE.<br />
Il y en avait un qui, lui, avait compris toute l’ampleur<br />
du dessein divin, et qui savait pourquoi le Bon<br />
Dieu avait voulu créer les êtres humains homme et<br />
femme. C’était le diable. Il savait bien que cette distinction<br />
des sexes était faite pour que les hommes et les<br />
femmes sachent d’instinct de quel amour Dieu nous<br />
aimera et voudra être aimé de nous lorsqu’il s’incarnera.<br />
C’est avec une haine irrépressible de ce merveilleux<br />
projet d’incarnation, prodigieux prolongement de l’amour<br />
trinitaire, que le serpent s’avance dans le jardin et se<br />
dirige vers ces premiers jeunes mariés. Il va s’en prendre<br />
à Ève d’abord puis à Adam, les souiller et polluer en<br />
eux “ les sources de la vie ”... Épouvantable péché qui<br />
ruinait de fond en comble le projet matrimonial du Bon<br />
Dieu, car c’est pour le voir se reproduire naturellement<br />
à des milliards d’exemplaires, qu’il avait lancé la grande<br />
affaire de la création.<br />
Mais cette intervention de Satan et le péché de nos<br />
premiers parents vont faire jaillir du Cœur de notre<br />
grand Dieu un amour encore plus prodigieux, qu’il<br />
tenait d’ailleurs en réserve, celui de l’Immaculée Conception.<br />
Si l’ordre naturel s’est édifié sous l’égide de<br />
l’homme, de son fils Adam, c’est sous l’égide de la<br />
femme que le surnaturel va se déployer désormais pour<br />
la rest<strong>au</strong>ration de toute chose. Et alors que le premier<br />
couple gît dans la fange et que Satan semble triompher,<br />
la rédemption et la sanctification du genre humain sont<br />
mises en œuvre, annonçant la chute finale de Satan. Ce<br />
sera l’œuvre de l’Immaculée et de sa lignée : « <strong>La</strong><br />
Femme t’écrasera la tête. » (Gn 3, 15)<br />
LA ROMANCE D’ ISRAËL, PEUPLE ÉLU DE DIEU.<br />
L’histoire sainte peut commencer ; elle nous apparaît<br />
comme une suite d’alliances entre Dieu et ses médiateurs<br />
de prédilection, que notre Père a appelée la romance<br />
du peuple hébreu, où il nous fait entrer dans la<br />
familiarité des amis de Dieu : Abraham, Isaac, Jacob,<br />
Joseph, David et Abigayil, Ruth et Booz.<br />
Au prophète Osée, Dieu demande d’épouser une<br />
prostituée du nom de Gomer. Pourquoi ? Parce que<br />
c’est une parabole vécue de l’alliance tumultueuse qu’il<br />
a nouée avec son peuple. Notre Père nous l’explique :<br />
« Gomer tellement habituée à ses adultères, une fois<br />
qu’elle <strong>au</strong>ra bien connu son Osée, elle l’abandonnera et<br />
reprendra ses mœurs étranges. C’est alors que Dieu<br />
apparaîtra à son prophète pour lui dire : “ Tu vois ce<br />
qu’elle est, ta prostituée. Eh bien ! vous, le peuple de<br />
Jérusalem, vous le peuple de Samarie, vous, le peuple<br />
d’Israël, vous êtes infidèles de la même manière. Vous<br />
recourez à vos idoles chaque fois que vous le pouvez !<br />
Vous êtes vraiment vicieux jusqu’à l’os ! Voilà ce que<br />
je vous dis maintenant : vous allez être ruinés ! »<br />
Cependant, le châtiment ne sera pas le dernier mot<br />
de Dieu, mais la miséricorde. C’est ainsi que Dieu demande<br />
finalement à Osée de racheter sa femme prostituée<br />
« comme Yahweh aime les enfants d’Israël, bien<br />
qu’ils se tournent vers d’<strong>au</strong>tres dieux » (Os 3, 1). Le<br />
prophète va donc va reprendre chez lui son épouse,<br />
mais non sans lui imposer de sévères conditions.<br />
« C’est ainsi que l’on voit apparaître dans le monothéisme<br />
juif et jusqu’<strong>au</strong> sein de la divinité elle-même,<br />
une dualité. Ce peuple va maintenant vivre avec la<br />
crainte de Yahweh Sabaoth, le Dieu de la puissance<br />
créatrice, mais en même temps il va être instinctivement<br />
porté dans sa prière, dans ses ps<strong>au</strong>mes à avoir une<br />
conception <strong>au</strong>tre de Dieu, non seulement comme d’un<br />
mari amoureux de sa femme, mais encore d’un mari qui<br />
pardonne à sa femme infidèle, afin de recommencer<br />
avec elle quelque chose qui soit digne d’elle et de lui.<br />
C’est prodigieux ! »<br />
Ce sera l’œuvre du Messie, « Fils d’homme » sorti<br />
de Dieu sur les nuées du Ciel, selon les visions du<br />
prophète Daniel, et né d’une Vierge selon Isaïe.<br />
VOICI L’ÉPOUX : JÉSUS, NOTRE RÉDEMPTEUR !<br />
Jésus didascale, maître de sagesse ne prononce pas<br />
d’anathème, mais il réapprend <strong>au</strong>x braves gens de Galilée<br />
à prier Dieu, à le considérer comme leur Père très<br />
bon et miséricordieux. Si Jésus guérit les p<strong>au</strong>vres et les<br />
malades, il veut surtout leur annoncer la bonne nouvelle<br />
des béatitudes.<br />
Cependant cet apprentissage de la miséricorde divine<br />
va peu à peu se heurter à l’incompréhension de tous.<br />
Et lorsque dans la passion de sa circumincessante cha-
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rité, Jésus ne se contentera pas de les enseigner, de les<br />
guérir, de les purifier de leurs péchés, mais ira jusqu’à<br />
se faire leur nourriture, tous l’abandonneront : ce sont<br />
des paroles trop dures à entendre... Seul Simon Pierre,<br />
inspiré par le Père, proclame sa foi : Jésus est « le Fils<br />
du Dieu vivant », mais il est loin de comprendre ce qu’il<br />
dit puisqu’il veut <strong>au</strong>ssitôt faire obstacle à la volonté de<br />
Jésus de souffrir et de mourir, en quoi consiste précisément<br />
l’obéissance d’un tel Fils à un tel Père.<br />
Au commencement de cette première campagne de<br />
prédication en Galilée, Notre-Seigneur semblait parti<br />
pour inst<strong>au</strong>rer le Roy<strong>au</strong>me, pourquoi a-t-il finalement<br />
échoué ? <strong>La</strong> raison des persécutions et de l’échec du<br />
Christ est celle-là même qui a toujours accompagné le<br />
juste, comme le livre de la SAGESSE l’enseigne en nous<br />
dévoilant la psychologie torve de ses adversaires, cellelà<br />
même des ennemis de Jésus. Mais pourquoi ces<br />
persécutions, pourquoi cette mise à mort du juste, pourquoi<br />
ce triomphe apparent du mal ? <strong>La</strong> réponse se<br />
trouve dans les magnifiques poèmes du serviteur de<br />
Yahweh du second Isaïe, “ l’Inconnu de l’Exil ”, annonce<br />
et description des souffrances du juste comme un<br />
rachat, une rédemption suivie d’une résurrection.<br />
Jésus accomplit les Écritures !<br />
« <strong>La</strong> Croix est l’expiation sacrificielle, mais elle doit<br />
être suivie, d’après Isaïe et le ps<strong>au</strong>me 21, de la communion.<br />
» Jésus en cela se coule dans la liturgie des sacrifices<br />
de l’Ancien Testament où, après avoir achevé le<br />
sacrifice d’expiation par la mise à mort de la victime,<br />
on pratiquait la communion fraternelle en mangeant<br />
cette même victime.<br />
JÉSUS DE NAZARETH, DIEU NÉ DE DIEU.<br />
« Qui ouvrira les yeux et les cœurs des fidèles à<br />
cette grande vérité que Jésus est Dieu, Dieu né de<br />
Dieu, Lumière née de la Lumière ? » C’est, nous<br />
explique notre Père, saint Jean le disciple véritable et<br />
bien-aimé du Seigneur ; plus qu’<strong>au</strong>cun <strong>au</strong>tre il a su<br />
écouter, retenir, prêcher et écrire ce mystère. <strong>La</strong> grâce<br />
d’une telle vocation lui a été infusée lors de la dernière<br />
Cène alors que, selon le rite en usage à Qumrân, sa tête<br />
reposait sur le cœur du Maître (cf. Jn 13, 23) et que lui<br />
étaient ainsi communiquées l’onction et l’<strong>au</strong>torité pour<br />
devenir son interprète.<br />
Voilà pourquoi « les discours de Jésus dans saint Jean,<br />
aboutissent à ces deux buts qui lui restaient à atteindre<br />
avant de remonter <strong>au</strong>x Cieux : se proclamer Fils de Dieu<br />
et Dieu lui-même, ne faisant qu’Un avec Dieu son Père<br />
et le Saint-Esprit. Puis, <strong>au</strong> cœur de cette immense révélation,<br />
manifester <strong>au</strong>x hommes que Dieu veut avoir avec<br />
chacune de ses créatures une unité d’amour semblable<br />
à celle qui anime les trois Personnes divines. »<br />
Mais comment un tel mariage pourra-t-il se consommer<br />
de génération en génération ?<br />
Saint Jean nous le révèle en nous rapportant le<br />
discours de Jésus à Capharnaüm :<br />
« Les juifs alors se mirent à discuter fort entre eux ;<br />
ils disaient : “ Comment celui-là peut-il nous donner sa<br />
chair à manger ? ” Alors Jésus leur dit : “ En vérité, en<br />
vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils<br />
de l’homme et ne buvez son sang, vous n’<strong>au</strong>rez pas la vie<br />
en vous. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie<br />
éternelle et je le ressusciterai <strong>au</strong> dernier jour. Car ma chair<br />
est vraiment une nourriture et mon sang vraiment une<br />
boisson. Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en<br />
moi et moi en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a<br />
envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me<br />
mange, lui <strong>au</strong>ssi vivra par moi. Voici le pain descendu<br />
du ciel ; il n’est pas comme celui qu’ont mangé les pères<br />
et ils sont morts ; qui mange ce pain vivra à jamais. ”<br />
Tel fut l’enseignement qu’il donna dans une synagogue<br />
à Capharnaüm. » (Jn 6, 52-59)<br />
Cet enseignement est la clef d’interprétation du dernier<br />
discours de Jésus, bien connu sous le nom de<br />
“ PRIÈRE SACERDOTALE ” (Jn 17). « Quand Jésus les quitte,<br />
il leur dit : “ Mes petits enfants, avec l’Eucharistie vous<br />
avez un ciment d’union des uns avec les <strong>au</strong>tres, car<br />
l’Eucharistie c’est mon Corps et mon Sang pour y<br />
communier dans union conjugale de vous à moi, et une<br />
union fraternelle entre vous s’il vous plaît, et dans le<br />
Cœur de Dieu, comme je suis uni à mon Père de toute<br />
éternité. Au revoir ! ” »<br />
« JÉSUS, C’EST L’AMOUR ! »<br />
Notre Père nous fit tout d’abord remarquer que<br />
Jésus se devait de proclamer l’intime secret de sa divinité,<br />
à la face même de ses ennemis, dans de grands<br />
discours polémiques (Jn 7 - 10), afin de faire échec par<br />
avance <strong>au</strong> modernisme prétendant que ce sont des<br />
« discours théologiques postérieurs »...<br />
Dans cette controverse à Jérusalem, un Dieu d’amour<br />
se révèle dans sa volonté de puissance, terrible pour<br />
supplanter ses riv<strong>au</strong>x, mais très douce pour reconquérir<br />
le cœur de son épouse pécheresse par un seul de ses<br />
regards, car « le regard parle du secret du cœur » :<br />
« Je fais mes lectures spirituelles avec mes yeux, mon<br />
imagination, mon cœur parce que je voudrais que vous<br />
les fassiez de manière semblable. » Merci mon Père...<br />
Il y a le regard de Jésus sur la Samaritaine (cf.<br />
Jn 4, 7-30) : « Moi, je suis amoureux de la Samaritaine !<br />
Je la vois, p<strong>au</strong>vre fille ! P<strong>au</strong>vre dégradée, p<strong>au</strong>vre<br />
souillée, p<strong>au</strong>vre femme ! Mais intelligente et presque<br />
insolente un peu ! Pleine de désir et pleine de piété. Un<br />
peu sorcière, un peu tricheuse, séductrice ! Elle prend<br />
bien son temps, ou plus exactement, elle perd son<br />
temps ! Jésus est là avec son sérieux. Il était très sérieux,<br />
devait avoir un visage très méditatif. Elle, elle<br />
l’excite, elle lui dit des petites plaisanteries. Mais lui<br />
l’amène où il veut. Finalement, pour se débarrasser de<br />
lui, elle lui dit : “ Moi, j’attends le Messie. ” Jésus la<br />
regarde... Si vous ne voyez pas le regard de Jésus, vous<br />
ne pouvez pas comprendre ! Il lui dit : “ Je le suis, moi<br />
qui te parle. ” Elle est renversée ! Elle ne dit plus un
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mot, elle court dans le pays pour dire : “ J’ai rencontré<br />
le Messie ! J’ai rencontré le Messie ! ” Deuxième coup<br />
du cœur ! Elle n’a jamais oublié, ce n’est pas possible. »<br />
Et la femme adultère (Jn 8, 4-10) non plus. Elle allait<br />
être lapidée par tous ces pharisiens hypocrites. Jésus<br />
s’interpose et les défie : « Que celui d’entre vous qui est<br />
sans péché lui jette le premier une pierre ! Et, se baissant<br />
de nouve<strong>au</strong>, il écrivait sur le sol. Mais eux, entendant cela,<br />
s’en allèrent un à un, à commencer par les plus vieux ; et<br />
il fut laissé seul, avec la femme toujours là <strong>au</strong> milieu. »<br />
« Jésus la regarde alors avec un indéfinissable regard<br />
! Jésus voit son âme, Jésus juge, Jésus pardonne,<br />
Jésus la renvoie en la priant de ne plus recommencer,<br />
telle est la miséricorde. Quelle impression sur cette<br />
femme ! Au lieu de périr sous les pavés qu’on allait lui<br />
lancer, elle a en face d’elle un homme comme elle n’en<br />
a jamais vu ! » Jésus est vraiment le Fils de ce Dieu qui<br />
a parlé <strong>au</strong> prophète Osée...<br />
Et l’aveugle-né ? (Jn 9) « Encore un qui a bénéficié<br />
d’un regard de Jésus inoubliable ! C’est toute une affaire<br />
! Cet aveugle demande à être guéri, il n’a jamais<br />
vu personne depuis sa naissance. Jésus le guérit.<br />
L’aveugle voit Jésus le regarder et lui dire en confidence<br />
qu’il est le Messie. L’aveugle a tout ensemble le<br />
regard, la parole, l’élan du cœur. Moi <strong>au</strong>ssi, je l’aime<br />
bien celui-là. »<br />
Jésus aima les siens jusqu’à la fin, et c’est pourquoi<br />
il se fit leur serviteur, mais le lavement des pieds<br />
(Jn 13) n’était qu’un préambule, « afin de leur montrer<br />
qu’il irait jusqu’à être pire qu’un esclave et mourir sur<br />
une Croix, pour leur salut ». Jésus laissait ainsi à ses<br />
disciples un exemple à suivre, et c’est pourquoi il leur<br />
adresse ensuite un discours bouleversant sur la charité<br />
fraternelle. Ses paroles d’adieux (Jn 14 ; 15 ; 16) sont<br />
des paroles d’amour célestiel qui nous montrent bien<br />
qu’il n’a pas perdu de vue son projet.<br />
« Le Christ explique à ses Apôtres qu’il vient du<br />
Ciel, qu’il y retourne et en reviendra de nouve<strong>au</strong>. Ils<br />
savent maintenant que Jésus est le Fils de Dieu, qu’il a<br />
toujours existé, et qu’il est toujours présent, <strong>au</strong> Ciel<br />
dans le sein du Père, et en même temps sur terre tandis<br />
qu’il leur parle et leur révèle le sidérant mystère d’un<br />
Dieu fait homme. Bref, Jésus a finalement fait passer à<br />
son peuple tout ce qu’il lui était nécessaire de connaître<br />
sur la vie trinitaire et sur les missions extérieures que le<br />
Père donne <strong>au</strong> Fils et <strong>au</strong> Saint-Esprit, pour aller courir<br />
sur la terre chercher les brebis perdues et les ramener<br />
avec lui. »<br />
Les scènes de la Passion sont les plus bouleversantes :<br />
« Imaginez les échanges de regard avec Pilate, leur<br />
cœur à cœur, car enfin, que voulez-vous, moi, j’aime<br />
Pilate ! Parce que Pilate a été gentil, il a été humain<br />
avec Jésus. Bien sûr il a été lâche, mais enfin d’<strong>au</strong>tres<br />
l’ont été plus que lui. »<br />
Au sommet du mont Calvaire, voici Jésus crucifié<br />
qui s’adresse une dernière fois à sa Mère, et c’est une<br />
manière pour lui, sa mission terrestre de circumincessante<br />
charité achevée, de passer la main à l’Immaculée<br />
corédemptrice qui doit la prolonger... Et c’est sous son<br />
égide maternelle que l’Église tr<strong>au</strong>matisée par la Passion<br />
se réunit. Jésus ressuscité peut revenir, ils sont tous là<br />
<strong>au</strong>tour d’Elle, Jean, Marie-Madeleine, Pierre, Thomas et<br />
les <strong>au</strong>tres... Ils n’osent y croire mais ils ne peuvent en<br />
douter, Jésus est vraiment ressuscité ! il va vraiment<br />
monter <strong>au</strong>x Cieux ! et il en redescendra pareillement ! à<br />
l’heure fixée par le Père, <strong>au</strong> plus grand péril des derniers<br />
temps, afin de trouver encore la foi sur la terre...<br />
Et notre Père d’achever cette conférence par un<br />
cri du cœur : « Enfin, nous avons compris ce qu’est<br />
l’Amour ! Il est impossible de lire cet Évangile d’un<br />
bout à l’<strong>au</strong>tre, sans comprendre que Jésus c’est l’Amour.<br />
Jesus, caritas ! »<br />
UNE ÉPOUSE SUR LA TERRE COMME AU CIEL<br />
Le CANTIQUE DES CANTIQUES est un livre inspiré,<br />
rédigé <strong>au</strong> retour de l’Exil, pour présenter en cinq poèmes<br />
l’histoire de l’alliance tumultueuse de Dieu avec<br />
son peuple, sous l’allégorie de l’amour conjugal.<br />
L’époux est le Dieu d’Israël : « Yahweh-Dieu s’est fait<br />
connaître <strong>au</strong>x hommes comme leur Père. Ensuite, il s’est<br />
fait connaître comme leur S<strong>au</strong>veur, leur Roi, leur Rocher,<br />
c’est-à-dire leur assurance dans la vie ; et finalement il a<br />
choisi d’aller jusqu’à se dire l’Époux de son peuple.<br />
« Et l’épouse ? C’est le peuple de Dieu, pécheur, mais<br />
qui, après avoir expié ses péchés durant un exil de<br />
soixante-dix ans à Babylone, retourne sur la terre<br />
d’Israël, bien imparfaite mais avec des velléités d’amour<br />
de Dieu <strong>au</strong> cœur :<br />
« Qu’il me baise des baisers de sa bouche. » (Ct 1, 2)<br />
Il s’ensuit un admirable échange : « Viens donc, ma<br />
bien-aimée, ma belle, viens. Car voilà l’hiver passé. »<br />
« <strong>La</strong> bien-aimée, c’est l’âme, soit de l’homme, soit<br />
de la femme, tout pareillement. Elle va rejoindre le<br />
troupe<strong>au</strong> “ sur notre terre ”, c’est la Terre promise, c’est<br />
le Ciel <strong>au</strong>jourd’hui, pour nous. »<br />
À une telle invite, la bien-aimée a répondu : « Sur ma<br />
couche, la nuit, j’ai cherché celui que mon cœur aime. Je<br />
l’ai cherché, mais je ne l’ai point trouvé ! Je me lèverai donc<br />
et je parcourrai la Ville. » Elle finit par le retrouver et fut<br />
grandement récompensée de son pourchas. Mais voilà<br />
que c’est à notre tour d’avoir de la difficulté à intégrer<br />
toutes les amoureuses paroles du troisième poème.<br />
Soudain, le quatrième poème nous interpelle singulièrement<br />
: « Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe,<br />
ma parfaite ! Car ma tête est couverte de rosée, mes boucles,<br />
des gouttes de la nuit. » Dans la nuit de l’épreuve,<br />
Jésus se présente avec sa Croix. Les excuses de<br />
l’Épouse semblent bien dérisoires :<br />
« J’ai ôté ma tunique, comment la remettrais-je ? J’ai<br />
lavé mes pieds, comment les salirais-je ? »<br />
« Même quand on ne s’est pas dérobé <strong>au</strong>x instances<br />
de la grâce, il f<strong>au</strong>t bien que nous passions par ce cal-
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 29<br />
vaire pour suivre le Christ dans sa Passion. C’est grandiose<br />
! Mais si on réduit cela à un incident banal d’un<br />
grand amour, on ne comprend plus rien. Ce quatrième<br />
poème est vraiment très angoissant, quand on le prend<br />
ainsi et qu’on se l’applique à soi-même et à l’Église. »<br />
DE LA SŒUR-FIANCÉE DE LA TERRE ...<br />
... À CELLE DU CIEL.<br />
Quand l’épouse se repent de sa lâcheté, il est trop<br />
tard, le Bien-Aimé est parti, mais elle sort <strong>au</strong>ssitôt de<br />
chez elle pour le retrouver. Cette fois, rien ne l’arrête,<br />
rien ne la rebute. Durant ce temps d’épreuve, de solitude,<br />
l’épouse ne pense qu’à son bien-aimé, ne parle<br />
que de lui, ne s’occupe que de ses intérêts. Ce sont<br />
<strong>au</strong>tant de grâces, de bénédictions qu’en réalité il déverse<br />
dans son cœur, et il est ravi de l’effet produit en<br />
elle et <strong>au</strong>tour d’elle : « Unique est ma colombe, unique ma<br />
parfaite. Elle est l’unique de sa mère, la préférée de celle<br />
qui l’enfanta. Les jeunes femmes l’ont vue et glorifiée [ce<br />
sont toutes les reines, les peuplades des environs, les tribus<br />
qui sont ainsi personnifiées], reines et concubines l’ont<br />
célébrée : “ Qui est celle-ci qui surgit comme l’<strong>au</strong>rore,<br />
belle comme la lune, resplendissante comme le soleil,<br />
redoutable comme des bataillons ? ” »<br />
« Évidemment, ce sont des textes que l’Église applique<br />
à la Sainte Vierge, mais ils concernaient précisément<br />
et d’abord la ville de Jérusalem, ce peuple de Jérusalem,<br />
qui avait été longtemps idolâtre et adultère à son Dieu.<br />
Tout cela, maintenant, est oublié. Le CANTIQUE DES CAN-<br />
TIQUES se projette dans l’avenir, voit Jérusalem illuminée<br />
par la gloire de Dieu, comme les deuxième et troisième<br />
rédacteurs du livre d’ISAÏE (chap. 40-55 ; 60-66) le disent<br />
de la Jérusalem qui va venir. »<br />
Le CANTIQUE DES CANTIQUES s’achève par une exclamation<br />
où l’épouse engage son Bien-Aimé à fuir avec<br />
elle « sur les montagnes emb<strong>au</strong>mées », <strong>au</strong>trement dit :<br />
« Allons là où le bonheur est éternel, rejoignons le Ciel<br />
<strong>au</strong>près de Jésus et de Marie. »<br />
Car cette Jérusalem de l’Ancien Testament ne peut<br />
être finalement que Marie seule.<br />
Fille d’Abraham, épouse et Mère de Dieu, seule <strong>au</strong><br />
jour de sa joie à l’Annonciation, de ses douleurs<br />
debout <strong>au</strong> pied de Jésus crucifié, et de sa gloire lors<br />
de son Assomption. Cette fille de Sion règne désormais<br />
<strong>au</strong> plus h<strong>au</strong>t des Cieux, comme les apparitions<br />
de Fatima le montrent à l’envi, réalisant plus que<br />
jamais les Écritures.<br />
SAGESSE, Ô SAGESSE !<br />
Or, le livre des PROVERBEs personnifie la Sagesse<br />
comme cette sœur fiancée :<br />
« Yahweh m’a conçue, commencement de sa Voie,<br />
avant ses œuvres, depuis toujours. Dès l’éternité, je<br />
fus sacrée, dès le commencement, dès les origines de<br />
la terre. Quand les abîmes n’existaient pas, je fus<br />
enfantée.<br />
« Quand il n’y avait point de sources regorgeant<br />
d’e<strong>au</strong>, avant que les montagnes ne fussent implantées,<br />
avant les collines, je fus enfantée ; alors qu’il n’avait<br />
pas encore fait la terre, ni les campagnes, ni le<br />
commencement des poussières du monde. Quand il affermit<br />
les cieux, j’étais là ; quand il traça un cercle à<br />
la surface de l’abîme, quand il condensa les nuées en<br />
h<strong>au</strong>t, quand il rendit puissantes les sources de l’abîme,<br />
quand il assigna sa limite à la mer, pour que les e<strong>au</strong>x<br />
n’en franchissent pas le bord, quand il fortifia les fondements<br />
de la terre ; à ses côtés, JE SUIS, enfant chérie<br />
; JE SUIS, faisant ses délices, jour après jour ;<br />
jouant devant lui tout le temps, jouant sur le sol de sa<br />
terre, et trouvant mes délices avec les fils d’Adam.<br />
« Or, à présent, mes fils, écoutez-moi. Heureux ceux<br />
qui gardent mes voies ! Écoutez la réprimande, soyez<br />
sages, ne la repoussez pas ! Heureux l’homme qui<br />
m’écoute, qui veille, jour après jour, à mes portes, pour<br />
en garder les vant<strong>au</strong>x, car qui me trouve, trouve la vie,<br />
et il obtiendra la faveur du Seigneur.<br />
« Mais qui m’offense blesse son âme, quiconque me<br />
hait chérit la mort. »<br />
(Pr 8, 22-36, traduit de l’hébreu par nos soins.)<br />
« C’est la participation d’une Femme à la vie divine,<br />
à la gloire céleste, qui est mise en pleine lumière par le<br />
rédacteur du livre des PROVERBES. Il la voit, il la contemple<br />
en esprit, comme toute proche de Dieu, dans<br />
l’orbe de Dieu, <strong>au</strong> point que son être même paraît<br />
divin. <strong>La</strong> preuve en est que, Elle et son Époux finalement<br />
sont entrevus comme une même et unique sagesse<br />
issue de Dieu, comme née de sa gloire, de sa lumière,<br />
de son Esprit-Saint. C’est sublime ! Hier, je doutais de<br />
l’efficacité de telles visions.<br />
« Aujourd’hui, je dis que si nous pensons <strong>au</strong> Cœur<br />
très saint et très unique de Jésus et de Marie, nous<br />
voyons que ces traditions méritent d’avoir été reprises<br />
par l’Église dans toutes les liturgies concernant la<br />
Vierge Marie. Ce sont ces textes qui alimentent la<br />
pensée chrétienne la plus mystique et la plus vraie <strong>au</strong><br />
sujet de la Vierge Marie <strong>au</strong> sein de Dieu, dans la gloire.<br />
« Selon la seconde figuration, l’annonce prophétique<br />
d’une nouvelle Alliance de Dieu avec son peuple, sous<br />
la charmante allégorie du CANTIQUE DES CANTIQUES,<br />
conduit à croire qu’une “ Femme ” mystérieuse, présente<br />
invisiblement à toute l’histoire humaine, sera appelée à<br />
régner sur le monde, deviendra par une grâce unique,<br />
inouïe, tout à la fois fille de Dieu, son Épouse <strong>au</strong>ssi, et<br />
la Mère de tous les hommes. »<br />
L’IMMACULÉE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.<br />
Au terme de cette étude du Cantique et du courant<br />
sapiential, notre Père nous montrera finalement que le<br />
fondement biblique des gloires de Marie Immaculée<br />
repose sur deux pierres d’assise. D’une part « la tradition<br />
prophétique, historique, tout humaine du CANTIQUE<br />
où l’épouse de Dieu est Israël appelée à devenir la<br />
bien-aimée du Christ qui doit venir » et, d’<strong>au</strong>tre part,
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 30<br />
« la tradition sapientiale, qui sous l’inspiration du Saint-<br />
Esprit, nous montre qu’à la droite du trône de Dieu,<br />
sinon même en son sein, sur son Cœur, se tient une<br />
femme, une jeune fille, une vierge à coup sûr, qu’ils<br />
nomment la Sagesse ».<br />
Marie fille d’Israël est donc <strong>au</strong> terme de l’élan<br />
prophétique, et elle seule correspond <strong>au</strong> profil de gloire<br />
prophétisé par Isaïe et le Cantique des cantiques. Israël,<br />
Jérusalem, c’est Elle. Mais il ne f<strong>au</strong>t pas en rester là si<br />
on veut embrasser le mystère de la Vierge Marie dans<br />
sa plénitude.<br />
<strong>La</strong> deuxième face, toute divine, du mystère de l’Immaculée<br />
nous montre qu’en son âme ou en son esprit,<br />
« Dieu le sait », une jeune fille est bien réellement<br />
<strong>au</strong>près de Dieu depuis le commencement. Elle admire<br />
ses œuvres, y collabore en allant et venant du Ciel sur<br />
la terre, des enfants des hommes <strong>au</strong> Dieu Très H<strong>au</strong>t en<br />
ses trois aimables Personnes.<br />
ET DANS LE NOUVEAU TESTAMENT ?<br />
<strong>La</strong> conciliation de ces deux traditions d’Ancien Testament<br />
se retrouve tout naturellement dans le Nouve<strong>au</strong> :<br />
« Marie de Nazareth, si modeste, si humble, Vierge<br />
pure, toute consacrée à son Dieu, son unique amour, est<br />
dès l’instant de l’Annonciation la Mère de Dieu, la<br />
Lors de sa retraite prêchée <strong>au</strong> Canada, notre bien-aimé<br />
Père embrassa sous ce titre évocateur le mystère total<br />
de la Bienheureuse Vierge Marie, et le rendit accessible<br />
à tous. De l’Ancien Testament et des admirables figures<br />
de femmes dont frère Bruno a fait un portrait saisissant<br />
(cf. LE CANTIQUE DE LA FEMME, Il est ressuscité n o 118, juin<br />
2012, p. 15-20), notre Père ne va retenir pour ainsi dire<br />
que deux noms, deux épouses de David, Abisag et<br />
Abigayil. Abisag la belle et humble vierge choisie pour<br />
devenir la servante du vieux roi, et qui vécut avec lui<br />
dans une pureté parfaite ; Abigayil la très sage <strong>au</strong>xiliatrice<br />
de David en ses combats qui obtint tout de Dieu, et<br />
la mort de sa brute de mari, Nabal, figure du démon,<br />
et épousa David, figure du Messie à venir.<br />
L’HUMBLE SERVANTE DU SEIGNEUR.<br />
<strong>La</strong> Vierge Marie s’inscrit dans une longue tradition<br />
de modestie, comme notre Père s’est plu à le rappeler<br />
à nos amis :<br />
« C’est modestement que le Père Céleste est entré<br />
dans le paradis terrestre, sans éclats ni tremblement de<br />
terre, c’est modestement qu’il a accoutumé ses créatures<br />
à l’aimer et à le respecter. C’est modestement<br />
<strong>au</strong>ssi, que Jésus est venu et a commencé son existence<br />
dans la petitesse de Bethléem puis de Nazareth. C’est<br />
donc modestement que la Vierge Marie déjà avant lui,<br />
mais le temps ne compte pas, avait été une simple<br />
enfant de Nazareth, petit bourg perdu de Galilée. C’est<br />
là qu’elle a appris qu’elle serait la Mère du S<strong>au</strong>veur et<br />
qu’elle a répondu : “ Je suis la servante du Seigneur. ”<br />
Mère du Seigneur, du Christ, du “ Logos ” ou Sagesse<br />
éternelle, la plus parfaite, la plus aimée de toutes les<br />
créatures par son Créateur et Père. Ainsi est-elle <strong>au</strong><br />
terme de l’élan prophétique, ainsi est-elle <strong>au</strong>ssi <strong>au</strong> principe<br />
et fondement de l’Église, car cette petite jeune fille<br />
de rien du tout est l’Épouse de Dieu, la Mère universelle,<br />
Médiatrice de toutes grâces. »<br />
<strong>La</strong> conciliation et complémentarité des deux traditions,<br />
prophétique et sapientiale, se prolonge dans l’histoire<br />
de l’Église.<br />
C’est Elle, la Vierge Marie qui se nomme Notre-<br />
Dame du Rosaire, c’est-à-dire Marie de Nazareth en ses<br />
mystères joyeux, douloureux et glorieux, d’hier et<br />
d’<strong>au</strong>jourd’hui. Elle est plus que jamais engagée dans les<br />
combats de l’Église contre le monde et le démon, et<br />
c’est pourquoi Elle révèle à l’orée des derniers temps,<br />
en gage assuré de la victoire finale, son nom nouve<strong>au</strong> :<br />
« JE SUIS L’IMMACULÉE CONCEPTION. » C’est ainsi que la<br />
Vierge Marie apparaîtra tout <strong>au</strong> long du dix-neuvième<br />
<strong>siècle</strong>. Mais comme certains chefs de l’Église résistaient<br />
à pareille volonté de puissance mariale, Notre-Dame de<br />
Fatima mettra “ les points sur les i ” le 13 mai 1917 :<br />
« JE SUIS DU CIEL. » Prodigieuse révélation prononcée<br />
avec la même tranquille <strong>au</strong>torité que celle de Dieu<br />
révélant son nom à Moïse : « JE SUIS. »<br />
DOUCEUR ET VIGUEUR DE MARIE IMMACULÉE<br />
« C’est une femme qui ne considère pas la grandeur<br />
de sa vocation, mais le service, la générosité qui sont<br />
attendus d’elle [notre bon pape François aimerait be<strong>au</strong>coup<br />
cela]. Marie est l’humble servante du Seigneur, c’est<br />
ainsi qu’il f<strong>au</strong>t entrer dans le Cœur de la Vierge Marie et<br />
y demeurer grâce <strong>au</strong> chapelet récité tous les jours en<br />
famille, ce qu’elle a d’ailleurs demandé si souvent. »<br />
Le service demandé à cette servante, lui a été prédit<br />
par le vieillard Siméon lors de la Présentation de l’Enfant-Jésus<br />
<strong>au</strong> Temple : « Un glaive de douleur te transpercera<br />
le Cœur. » Ce jour-là, dit notre Père, la Vierge<br />
Marie n’a plus connu de bonheur humain. Elle connaissait<br />
les Saintes Écritures et savait que son Fils, comme<br />
jadis le serviteur de Yahweh, allait poser un sacrifice<br />
d’expiation s<strong>au</strong>veur. Elle s’y est associée de tout son<br />
cœur en devenant victime avec Jésus sur la Croix.<br />
« C’est là que victorieuse du démon avec son fils et<br />
époux, elle a acquis la maternité de l’humanité pécheresse.<br />
Refuge des pécheurs, elle est devenue notre<br />
Reine, notre Médiatrice, notre Auxiliatrice. Les bons<br />
<strong>catholique</strong>s aiment lui décerner ces noms qui sont<br />
<strong>au</strong>tant de privilèges qui proclament le mérite, la noblesse,<br />
la générosité héroïque de son Cœur Immaculé. »<br />
NOTRE MÈRE À TOUS À JAMAIS !<br />
Après la glorification de son Assomption, c’est une<br />
maternité universelle qui va donc être le tout de la<br />
Vierge Marie <strong>au</strong> Ciel. Mais comment cela pourra-t-il se<br />
faire ? Par la très mystérieuse « opération du Saint-<br />
Esprit », comme pour son Fils premier-né... Mais avec
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 31<br />
nous, c’est dans le secret du cœur à cœur eucharistique<br />
de la communion que s’opérera ce mysterium fidei.<br />
Lorsque nous recevons Jésus en son corps, son sang<br />
et son âme, la Personne divine qu’il nous laisse à<br />
demeure, c’est le Saint-Esprit. Or, c’est Elle, la Vierge<br />
Marie qui le possède en plénitude et qui préside à son<br />
épanchement. C’est par Elle que nous seront communiquées<br />
toutes les grâces qui nous apprendront à nous<br />
donner à Jésus-Christ comme à un Époux unique.<br />
Celui-ci répandra à son tour dans nos âmes une<br />
charité sans cesse jaillissante, circumincessante...<br />
« <strong>La</strong> vraie dévotion, enseigne notre Père, c’est donc<br />
la méditation du Cœur Eucharistique de Jésus, mais<br />
<strong>au</strong>ssi du Cœur eucharistique de Marie, et parce qu’ils<br />
ne font qu’un, c’est par la médiation, la dévotion du<br />
Cœur eucharistique de Jésus et de Marie que nous,<br />
leurs enfants, nous recevrons la grâce d’une union de<br />
charité avec eux et entre nous. »<br />
LA DIVINE MARIE, MAÎTRESSE DE LA CROISADE.<br />
Encore une perle à sa couronne et pas des moindres<br />
: « Cette Vierge Marie, dont on ne nous dit que<br />
des choses mystiques – elle est merveilleuse, son Cœur<br />
est plein de douceur et d’amour miséricordieux –, tout<br />
à coup se révèle une guerrière. Divine Marie, Reine<br />
des Cieux ? ! Infinie surprise ! Et retour, par inclusion,<br />
<strong>au</strong> Protévangile. C’est elle qui va écraser la tête du<br />
Serpent, maîtriser les puissances infernales, écraser les<br />
hérésies, en un mot, c’est elle qui va s<strong>au</strong>ver l’Église.<br />
<strong>La</strong> Vierge ? Oui, la Vierge Marie ! Quand est-ce que<br />
cela a commencé ? »<br />
EN 1531, alors que les nations chrétiennes sont ravagés<br />
par le protestantisme et les guerres de religion<br />
qu’il suscite, l’Espagne intégralement <strong>catholique</strong> part<br />
en mission dans le monde entier. C’est dans une de ses<br />
colonies, <strong>au</strong> Mexique, que l’Immaculée apparaît en<br />
1531, gage de triomphe final de la <strong>catholique</strong> Espagne<br />
dans tout le continent américain, du sud <strong>au</strong> nord. En<br />
attendant, la Vierge de Guadalupe partira en guerre<br />
contre les Turcs, car c’est sous l’égide de sa bannière<br />
que combattront les marins espagnols tandis qu’à<br />
Rome saint Pie V fait prier le Rosaire et attribue la<br />
victoire de Lépante, qu’il a vue à distance, à Notre-<br />
Dame du Rosaire.<br />
Mais c’est surtout à partir de 1830, l’an I de la<br />
révolution répandue dans le monde par l’idéologie de<br />
la franc-maçonnerie : démocratie, droits de l’homme,<br />
etc., que la Vierge Marie entre en lice. Elle apparaît en<br />
plein centre de Paris, pas seulement pour guérir les<br />
braves <strong>au</strong> moyen de la Médaille miraculeuse, sur<br />
laquelle, en prélude à Fatima, sont gravés les Cœurs<br />
Sacrés et Immaculés de Jésus et de Marie, ni uniquement<br />
pour donner le branle à un immense mouvement<br />
apostolique qui va être magnifiquement prolongé par<br />
les papes Grégoire XVI et Pie IX. Elle vient en régente<br />
de France <strong>au</strong> moment où le dernier Roi Très-<br />
Chrétien est chassé par la Révolution. <strong>La</strong> Vierge Marie<br />
est patronne de la France, et le seul fait de cette<br />
présence royale de l’Immaculée à Paris est un gage de<br />
victoire finale. C’est ainsi que les saints la comprendront<br />
et l’aimeront.<br />
L’Immaculée vient <strong>au</strong>ssi pour l’Église, afin qu’elle<br />
progresse dans la connaissance et l’amour de Dieu.<br />
Elle se présente et veut être représentée tenant un<br />
globe dans les mains. Ce globe, elle le précise, c’est le<br />
monde entier, la France, chaque âme en particulier...<br />
Refus du clergé. Quand enfin la statue est sculptée, on<br />
la met de côté et son mystère restera sous le boisse<strong>au</strong>,<br />
compris de peu de fidèles, même si, <strong>au</strong>jourd’hui, la<br />
statue trône dans la chapelle de la rue du Bac...<br />
EN 1846, elle apparaît à la Salette, Vierge corédemptrice<br />
souffrant pour ses enfants, pleurant même<br />
afin d’exciter leur compassion et les convertir... Émus<br />
les braves gens feront effort, mais qui fera attention à<br />
ce détail sidérant : la Sainte Vierge parle <strong>au</strong> nom de<br />
Dieu, à sa place pour ainsi dire ? « JE vous ai donné six<br />
jours, etc. » Personne, il f<strong>au</strong>dra attendre notre Père<br />
pour le remarquer.<br />
EN 1854, le bienheureux pape Pie IX, lui, comprend<br />
ce qui se passe, il entre parfaitement dans les vues de<br />
Dieu, et pour lutter contre les erreurs modernes, il<br />
proclame le dogme de l’Immaculée Conception. Cela<br />
n’a pas été facile, mais la Sainte Vierge le récompense<br />
et confirme son <strong>au</strong>torité en apparaissant à Lourdes, EN<br />
1858, et en y révélant son nom : « Je suis l’Immaculée<br />
Conception. » Là encore, comme à la rue du Bac, seuls<br />
les saints, tels le curé Peyramale et le Père Marie-<br />
Antoine, ainsi que le bon peuple à leur suite, comprennent<br />
la portée mystique et politique de cette apparition.<br />
Mais d’<strong>au</strong>cuns, acharnés, vont mettre cette lumière<br />
sous le boisse<strong>au</strong>... Prière, pénitence, chapelet chaque<br />
jour, voilà ce que réclame l’Immaculée Conception.<br />
Mais c’est pour qu’on se tourne vers elle et son Jésus !<br />
<strong>La</strong> Sainte Vierge sera négligées par ces gens raisonnables<br />
qui ne pensent qu’à la terre, ne songeant qu’à leur<br />
personnes libres, libérales, soucieuses de progrès, de<br />
démocratie : chacun pour soi, avec cela, l’important<br />
pour le monde de demain : votez pour qui vous voulez,<br />
pensez ce que vous voulez...<br />
EN 1871, Notre-Dame apparaît à Pontmain pour secourir<br />
ses enfants de France. Bonne et tendre Mère,<br />
elle vient les consoler par ces mots qui leur rendront<br />
l’espérance : « Mais priez mes enfants, Dieu vous ex<strong>au</strong>cera<br />
en peu de temps. Mon Fils se laisse toucher. » En<br />
Vierge, maîtresse du Ciel et des étoiles, elle va stopper<br />
l’invasion des troupes de la Prusse protestante ; c’est<br />
une Reine mais douloureuse qui offre son Fils en sacrifice<br />
pour le salut de ses enfants de la terre.<br />
EN 1876, lors d’une apparition plus modeste à<br />
Pellevoisin, la Vierge se dit la « toute miséricordieuse<br />
»... <strong>La</strong> Rome de Léon XIII fronce les sourcils,<br />
cela n’est pas possible...
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 32<br />
« Nous avons un puissant et merveilleux figuratif de<br />
ce triomphe à venir dans la guérison miraculeuse de la<br />
petite Thérèse Martin, que notre Père se plaît à appeler<br />
la “ miniature de l’Immaculée ”, LE 13 MAI 1883, dimanche<br />
de la Pentecôte. Au cours d’une neuvaine de<br />
messes demandée à Notre-Dame des Victoires par son<br />
père chéri, l’enfant fut libérée de la puissance démoniaque<br />
qui l’obsédait : “ Il fallait un miracle et ce fut<br />
Notre-Dame des Victoires qui le fit... Tout à coup, la<br />
Sainte Vierge me parut belle, si belle que jamais je<br />
n’avais vu rien de si be<strong>au</strong>, son visage respirait une<br />
bonté et une tendresse ineffable, mais ce qui me pénétra<br />
jusqu’<strong>au</strong> fond de l’âme, ce fut le ravissant sourire de<br />
la Sainte Vierge. ” Notre jeune sainte faisait figure de<br />
prophète des temps à venir et de précurseur, ayant<br />
vécu dans sa propre vie, à l’âge de dix ans, les alarmes<br />
de l’Église et les tourments des martyrs de la grande<br />
apostasie finale. L’Immaculée était intervenue pour<br />
s<strong>au</strong>ver son enfant un 13 mai comme si Elle voulait,<br />
par le choix de cette date, annoncer son apparition de<br />
Fatima. » (sœur Marie-Angélique, L’ABBÉ DES GENETTES,<br />
SERVITEUR ET APÔTRE DE MARIE, p. 347-348)<br />
Lorsque, LE 13 MAI 1917, la Vierge Marie apparaît à<br />
Fatima elle dit : « Je suis du Ciel », c’est-à-dire que je<br />
suis celle-là même qui a été créée avant la terre et le<br />
Ciel d’ici-bas (cf. Pr 8 ; Gn 1, 1-6). Et preuve de sa<br />
puissance, c’est que le soleil lui obéit <strong>au</strong> doigt et à<br />
l’œil ! Ce sont des faits connus, constatés par des<br />
dizaines de milliers de personnes ; des enquêtes canoniques<br />
sérieuses ont été faites, l’Église a reconnu la<br />
vérité de tous ces événements comme du message. Or<br />
si la Sainte Vierge arrive à bouger Ciel, soleil et terre,<br />
elle n’arrive pas à émouvoir et mouvoir le cœur du<br />
Saint-Père, et n’obtient pas de lui l’obéissance à deux<br />
petites demandes qui à elles seules procureraient le<br />
salut du monde et de l’Église.<br />
L’ULTIME COMBAT DES DERNIERS TEMPS<br />
Notre bienheureux Père poursuivit sa réflexion appuyée<br />
sur sa Bien-Aimée Sainte Vierge. C’est pour<br />
Elle, pour la juste interprétation de son ultime secret<br />
de miséricorde qu’il prit une dernière fois la parole en<br />
août 2000 (cf. CRC n o 369, p. 1-16). Jusqu’<strong>au</strong> bout notre<br />
docteur mystique de la foi <strong>catholique</strong> <strong>au</strong>ra combattu<br />
pour Elle, tel un vrai “ chevalier de l’Immaculée ” en<br />
digne émule de saint Georges.<br />
Dans son service de l’Église, si ses dernières<br />
paroles, ses derniers écrits furent pour Notre-Dame,<br />
son dernier regard fut, en 2003, pour le cardinal<br />
Bergoglio en qui il pressentit le cœur droit d’un futur<br />
Saint-Père. Il fut ex<strong>au</strong>cé et voici maintenant que ce<br />
« Pierre » à la différence de ses prédécesseurs semble<br />
« crier » non seulement l’Évangile par toute sa vie,<br />
mais <strong>au</strong>ssi sa dévotion à la Madone. Grande liesse<br />
donc et quel encouragement pour nous, comme frère<br />
Bruno ne cesse de nous le rappeler et de nous en<br />
donner de nouvelles raisons : il f<strong>au</strong>t be<strong>au</strong>coup prier<br />
pour le Saint-Père. Certes, il a consacré son pontificat<br />
à Notre-Dame de Fatima, c’est be<strong>au</strong>coup, d’<strong>au</strong>tant plus<br />
que c’est sans feintise à la différence de ses prédécesseurs,<br />
mais ce n’est pas encore suffisant pour renverser<br />
l’obstacle qui bloque la circumincessante charité divine,<br />
eucharistique et mariale.<br />
« TU L’ATTEINDRAS AU TALON. » (Gn 3, 15)<br />
Posons le problème dans toute son acuité et actualité.<br />
C’est celui d’une désorientation diabolique par<br />
laquelle, sous couvert d’un christocentrisme entendu<br />
à la manière de Luther, nos chefs, nos exégètes font<br />
– depuis Vatican II surtout – obstacle à la volonté de<br />
Dieu, à cette effusion d’amour, à cette nouvelle Pentecôte<br />
par laquelle l’Église « hiérarchique et <strong>catholique</strong> »<br />
doit embraser le monde, sous l’égide du Cœur Immaculé<br />
de Marie. Dieu le veut, mais nos chefs ne le<br />
veulent pas.<br />
L’apostasie, la m<strong>au</strong>vaise volonté ne sont pas les<br />
seules c<strong>au</strong>ses de cette opposition à ce qui n’est rien<br />
de moins qu’un renouvellement de l’Alliance. Nous<br />
l’avons vu, il f<strong>au</strong>t accuser <strong>au</strong>ssi une véritable sclérose<br />
de la pensée philosophique et théologique qui afflige<br />
l’Église depuis fort longtemps.<br />
Cette convergence des <strong>au</strong>teurs inspirés et des<br />
grandes apparitions mariales, l’Église en sa liturgie, en<br />
sa tradition et en ses dogmes – les derniers étant ceux<br />
de l’Immaculée Conception et de l’Assomption – y<br />
adhéra parfaitement jusqu’<strong>au</strong> concile Vatican II exclusivement,<br />
funeste Concile c<strong>au</strong>se d’une régression sans<br />
précédent de la théologie et de la ferveur mariales.<br />
Sans cette rupture, notre Père nous le disait souvent,<br />
les dogmes de la CORÉDEMPTION et de la MÉDIATION<br />
UNIVERSELLE de la Bienheureuse Vierge Marie <strong>au</strong>raient<br />
été acceptés d’enthousiasme par l’Église.<br />
Ils le seront un jour, mais grâce à la doctrine<br />
mystique du théologien de la <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> <strong>catholique</strong>,<br />
il ne sera pas dit que l’Église n’a pas progressé<br />
durant cette tragique apostasie. En reconnaissant le<br />
bien-fondé de la préexistence de la Bienheureuse<br />
Vierge Marie en son esprit, en faisant sienne la métaphysique<br />
relationnelle et la théologie totale de notre<br />
Père, l’Église se donnera les moyens d’un prodigieux<br />
progrès dogmatique, qui fera mieux connaître et donc<br />
mieux aimer la Bienheureuse Vierge Marie. Saint<br />
Maximilien Kolbe a vu et prophétisé ce progrès et les<br />
grâces de salut mondial qui en résulteront.<br />
D’entrevoir ces merveilles donne du courage pour<br />
entrer toujours plus avant dans cette circumincessante<br />
charité divine et trinitaire, eucharistique et mariale,<br />
prodigieuse onction spirituelle toute de tendresse et<br />
dévotion pour les Saints Cœurs Immaculés et Miséricordieux<br />
de Jésus et Marie, dont l’Église oindra ses<br />
enfants tout <strong>au</strong> long du troisième millénaire pour la<br />
plus grande gloire de notre très chéri Père Céleste...<br />
frère Philippe de la Face de Dieu.
LA LIGUE N o <strong>129</strong> - P. 33<br />
ALORS que la franc-maçonnerie<br />
triomphe par la loi<br />
révolutionnaire du “ mariage pour<br />
tous ”, et tandis que cette contre-<br />
Église jubile de voir tous les <strong>catholique</strong>s<br />
conciliaires s’enfermer<br />
d’eux-mêmes dans la caque citoyenne<br />
des “ manifs pour tous ”,<br />
frère Bruno a voulu que nos<br />
jeunes gens voient et entendent l’Église, en la personne<br />
de notre bien-aimé Père et en la personne de notre<br />
pape François, leur dire toute la vérité.<br />
C’est ainsi qu’ils vinrent nombreux à la maison<br />
Saint-Joseph, près de trois cents, les 18, 19 et 20 mai<br />
pour assister à la SESSION DE PENTECÔTE, et tout apprendre<br />
de l’amour chrétien, mais de L’AMOUR CHRÉTIEN<br />
À L’ HEURE DU SIDA, session prêchée par notre Père en<br />
1993 (en <strong>au</strong>dio-vidéo : PC 50).<br />
Lors du sermon de la messe d’ouverture, frère Bruno<br />
donna pour ainsi dire la parole <strong>au</strong> pape François pour<br />
qu’il nous confirme dans une vérité, de doctrine et<br />
d’action, chère à notre Père, à savoir que l’Esprit, le<br />
Saint, le Vrai, c’est celui de Jésus.<br />
« C’est lui, dira le Saint-Père <strong>au</strong>x jeunes, qui nous<br />
donne le courage d’aller à contre-courant... »<br />
LE SIDA, SIGNE D’APOCALYPSE<br />
C’est un “ signe des temps ” que cette lèpre de nos<br />
sociétés décadentes. Le Syndrome d’immunodéficience acquise...<br />
par le vice, dû <strong>au</strong> LAV, lymphadenopathy associated<br />
virus... du Singe vert en Afrique, « mal qui répand la<br />
terreur, mal que le Ciel en sa fureur inventa pour punir<br />
les crimes de la terre. Le SIDA, puisqu’il f<strong>au</strong>t l’appeler<br />
par son nom, déclare <strong>au</strong> genre humain la guerre. »<br />
Ce mal est spécifique, et par là h<strong>au</strong>tement symbolique<br />
: il détruit les défenses de l’organisme qui n’a<br />
plus <strong>au</strong>cune barrière, <strong>au</strong>cune armée à opposer à toutes<br />
les maladies contagieuses, microbiennes ou virales, et<br />
ainsi tue sans rémission. D’où avortements déclarés thérapeutiques,<br />
suicides nommés euthanasie, prophylaxies<br />
sophistiquant le vice, n’osant pas l’interdire, et campagnes<br />
publicitaires pour la protection et l’aide préférentielle<br />
apportées <strong>au</strong>x corrupteurs du monde.<br />
N’est-ce pas l’exact table<strong>au</strong> du pacifisme, du libéralisme<br />
politiques, comme <strong>au</strong>ssi de la liberté religieuse et<br />
de l’œcuménisme devenus le dogme unique de l’Église<br />
conciliaire et papale après avoir été proclamés le fondement<br />
de nos républiques maçonniques ? Sodome de<br />
la luxure spirituelle, et Gomorrhe de la déb<strong>au</strong>che et<br />
de la débandade sociale, qu’en résulte-t-il ? SI - DA...<br />
Signe d’apocalypse, pire que les catastrophes des deux<br />
premières guerres mondiales : l’invasion de l’Église par<br />
toutes sortes d’hérésies et de sectes, d’apostasies, de<br />
dépravations... Et l’invasion de l’Europe, mère de la<br />
civilisation et première terre de Chrétienté, et du monde<br />
ROME A RETROUVÉ LA FOI<br />
entier par les nouve<strong>au</strong>x barbares, athées et cruels !<br />
Invasions faciles de pays en état d’ “ immunodéficience<br />
acquise ”, sans remparts, sans armées, et d’Église sans<br />
tribun<strong>au</strong>x d’inquisition, sans police des âmes, sans plus<br />
de droit ni de justice !<br />
Ah ! oui, le SIDA est le mal du <strong>siècle</strong>, le grand signe<br />
d’alarme des <strong>au</strong>tres m<strong>au</strong>x qui vont tomber sur nous,<br />
appelés de notre propre chef mais justement lancés par<br />
la Colère de Dieu.<br />
Il est temps d’avertir la jeunesse des vrais m<strong>au</strong>x et<br />
de leurs vrais remèdes, et de lui donner encore et mieux<br />
la plénitude de la foi, le goût de la vertu jalousement<br />
défendue et gardée, l’amour des grandes et belles familles<br />
fortement constituées, et des paroisses et des<br />
roy<strong>au</strong>mes qui les s<strong>au</strong>vent et soutiennent pour la renaissance<br />
<strong>catholique</strong>, chrétienne, de nos vieux pays de<br />
Chrétienté appelés encore une fois à s<strong>au</strong>ver tout le<br />
genre humain.<br />
L’AMOUR CHRÉTIEN À L’HEURE DU SIDA<br />
Le premier jour était un samedi, vigile de la Pentecôte.<br />
Après la Messe, première conférence dans une<br />
salle comble. Table<strong>au</strong> du plus bel amour qui soit. On<br />
<strong>au</strong>rait entendu une mouche voler. Tous étaient fascinés<br />
par ce mystère d’Adam et Ève en Paradis. Puis saisis<br />
d’horreur <strong>au</strong> table<strong>au</strong> des malfaçons et contrefaçons de<br />
l’amour inventées par le diable jaloux, pour faire choir<br />
l’homme et la femme dans le crime contre nature. Et<br />
de comprendre que Satan est de retour : contraception,<br />
avortement, homosexualité ont tout envahi, et maintenant<br />
c’est le SIDA : Syndrome d’immunodéficience acquise<br />
capable d’anéantir l’humanité entière.<br />
Pour garder ses enfants à l’abri de l’arche sainte,<br />
notre Père a tout dit des formes de la tentation qu’il<br />
f<strong>au</strong>t “ savoir pour prévoir afin de pourvoir ”... et ne pas<br />
se laisser avoir ! Sans rien celer, avec une liberté, une<br />
crudité égale à la précision scientifique de son langage.<br />
Il passe avec une aisance souveraine, royale, de la
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 34<br />
biogénétique à la description clinique d’un mal qui<br />
répand la terreur parce qu’il n’y a pas de vaccin ni de<br />
remède ; et la lèpre et la tuberculose reviennent sur les<br />
pas du SIDA. Géographie de ce flé<strong>au</strong> socio-économique<br />
planétaire, expression de la colère de Dieu, comme <strong>au</strong><br />
temps de Sodome et Gomorrhe. Horrible.<br />
MANIF POUR TOUS, APOSTASIE POUR TOUS<br />
Notre Père crève alors l’hypocrisie qui avait déjà<br />
cours il y a vingt ans ; frère Bruno prolongera encore<br />
davantage son cri d’indignation et sa mise en garde, le<br />
soir <strong>au</strong> cratère. Pourquoi ne parle-t-on <strong>au</strong>jourd’hui que<br />
d’homosexualité, et encore d’une manière savante, en<br />
intellectuel : c’est la théorie du “ genre ”... et du « mariage<br />
pour tous » : quoi de plus bourgeois et rassurant<br />
que de vouloir “ se marier ” ? ! Pourquoi l’opposition, en<br />
majorité composée de braves gens, bons <strong>catholique</strong>s<br />
pour la plupart, est-elle, sous prétexte de “ MANIF POUR<br />
TOUS ”, noy<strong>au</strong>tée par des homosexuels ?<br />
Pourquoi ? Pour ne pas avoir à dénoncer la c<strong>au</strong>se du<br />
mal qui est un péché. Or, ce péché tire son nom du<br />
châtiment que Dieu a infligé à la ville de Sodome qui<br />
s’y livrait ; de plus, ce péché n’est pas uniquement<br />
pratiqué par les “ homos ” mais <strong>au</strong>ssi par les <strong>au</strong>tres, et à<br />
grande échelle ?! Et nos grandes bourgeoises cathos<br />
défilent main dans la main avec ces gens-là, “ homos ”<br />
ou “ bisexuels ”, hommes et femmes ? Et nos évêques<br />
bêlent en chœur que « le SIDA ne peut pas être un<br />
châtiment de Dieu » ? ! Et tout ce monde-là formaté,<br />
désorienté par Vatican II, est démocrate et républicain ?<br />
Alors, expliquera frère Bruno à la suite de notre<br />
Père, c’est perdu d’avance. Il en sera des “ MANIF POUR<br />
TOUS ” comme il en fut pour celles contre l’avortement<br />
en 1974, ou pour l’École libre en 1985. Elles seront<br />
sans effet pour le bien et aggraveront la désorientation<br />
des <strong>catholique</strong>s. Car, après un moment de surch<strong>au</strong>ffe,<br />
tous nos bourgeois rentreront bien sagement dans leur<br />
niche, mais ils seront plus que jamais démocrates, et<br />
surtout plus que jamais opposés à la <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong><br />
<strong>catholique</strong> et à la <strong>Contre</strong>-Révolution, retardant d’<strong>au</strong>tant<br />
le salut de l’Église et de la nation, en véritables alliés<br />
objectifs de la révolution maçonnique contre laquelle<br />
ces dupes prétendaient pourtant « faire quelque chose ».<br />
Et pour que la catastrophe soit complète, il suffirait<br />
que nos jeunes gens de bonne famille, exaltés par cette<br />
noble c<strong>au</strong>se, mais aveuglés par leur orgueil, soient incités<br />
par quelque indicateur <strong>au</strong>x ordres à commettre des<br />
actes de violence irréparable, « pour être entendus »...<br />
Et voici “ l’extrême-droite ” dénoncée comme le parti<br />
du mal, et ces malheureux finissant leurs jours en<br />
prison, en pure perte. Notre Père avec toute son expérience<br />
et frère Bruno à sa suite nous ont toujours mis<br />
en garde contre ce délire d’activisme.<br />
EXTENSION ET PROMOTION DU SIDA<br />
Les conférences du dimanche firent état des ravages<br />
du SIDA, flé<strong>au</strong> mondial et châtiment de Dieu. Il frappe<br />
dur les p<strong>au</strong>vres gens du tiers monde et d’<strong>au</strong>tant plus<br />
que dans son sillage réapparaissent des maladies comme<br />
la tuberculose et la lèpre. Mais le mal est bien plus<br />
profond dans un « Occident satanisé ».<br />
Pourquoi se flatte-t-il, du moins le pays légal judéomaçonnique,<br />
de ce SIDA qui le frappe de plein fouet ?<br />
Notre Père va nous le révéler et nous ouvrir des<br />
perspectives qu’on ne trouve pas dans les livres scolaires,<br />
ni dans les journ<strong>au</strong>x...<br />
« Quand une minorité scandaleuse ou impie, ou haïe,<br />
possède le pouvoir, l’avoir, le valoir, le savoir et le<br />
croire, l’État et l’administration, l’argent et l’industrie,<br />
les médias : télévision, cinéma, presse, les collèges et les<br />
universités, enfin le monde ecclésiastique ; son groupe<br />
de pression se doit de porter sa tare <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> de la<br />
vertu, de la be<strong>au</strong>té, du drame, de la différence, afin de<br />
s’imposer comme victime d’un totalitarisme contraire :<br />
inexistant, mais potentiellement dominant. C’est ainsi<br />
que l’école laïque écrase l’école libre, que la révolution<br />
hurle <strong>au</strong> despotisme, et la liste serait longue... »<br />
C’est ainsi que le lobby homosexuel, judéo-maçon,<br />
s’est imposé en jouant à fond de tous les rouages de la<br />
démocratie. Quant à la réaction anarchique des “ MANIF<br />
POUR TOUS ”, orchestrée, bien encaquée dans le moule<br />
démocratique, elle est l’opposition, dont l’expression<br />
même atteste la légalité de la loi diabolique, et dissimule<br />
le caractère révolutionnaire, totalitaire de la secte qui<br />
gouverne la France.<br />
Mais alors, que proposez-vous, vous de la CRC qui<br />
critiquez toujours sans jamais rien faire ?<br />
<strong>La</strong> dernière conférence a brossé le table<strong>au</strong> enthousiasmant<br />
d’un programme positif, envisageant tous les<br />
aspects médic<strong>au</strong>x et judiciaires, soci<strong>au</strong>x et politiques, du<br />
redressement nécessaire pour le jour du triomphe de<br />
l’Immaculée, quand tout redeviendra possible. En attendant,<br />
désir ardent comme une flamme vive d’amour, de<br />
conserver ou acquérir une angélique pureté, par l’intercession<br />
de l’Immaculée Vierge de Lourdes et de Fatima,<br />
avec l’amour du Rosaire pour passer à travers cette fange<br />
sans s’y tacher le moins du monde ! Be<strong>au</strong> programme !<br />
UN AMOUR DE SAINT-PÈRE<br />
Même si, durant notre session de Pentecôte, notre<br />
Père traita du SIDA avec une très grande h<strong>au</strong>teur de vue<br />
et une parfaite dignité, frère Bruno voulut que les<br />
cratères du soir nous distraient de ce sujet méphitique.<br />
Et de fait, tant de vilaines choses s’évanouirent sans<br />
peine dans le rayonnement de cet “ évêque vêtu de<br />
blanc ”, notre bon Pape François.<br />
Comme il ne fait pas la-une des télévisions officielles,<br />
nos jeunes gens le connaissent finalement fort<br />
peu ou mal ; quant à nous, les frères et les sœurs, nous<br />
sommes devenus des “ accrocs ” de KTO, et nous ne<br />
nous lassons pas de le voir et revoir. Nos frères techniciens<br />
avaient de plus réalisé le tour de force de<br />
remplacer la traduction simultanée, sympathique mais<br />
gênante tout de même, par un sous-titrage qui nous<br />
aida à mieux ressentir le choc de sa personnalité<br />
apostolique, et combien les expressions de son regard
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 35<br />
et l’onction spirituelle de sa voix nous révélaient son<br />
cœur d’homme d’Église, sage, bon, aimable.<br />
Le pape François parle comme saint Pie X, dira<br />
frère Bruno, et pulvérise en quelques minutes, sans en<br />
avoir l’air, l’inaction effective, le verbiage stérile et<br />
mondain de Vatican II. Son premier sermon <strong>au</strong>x cardin<strong>au</strong>x,<br />
radical, mit la cognée à la racine du culte de<br />
l’homme, et depuis lors tous ceux qu’il prononce rectifient,<br />
peu ou prou, une désorientation conciliaire.<br />
<strong>La</strong> miséricorde ? Oui, mais pour pousser le pécheur<br />
<strong>au</strong> cœur à cœur d’une confession loyale et d’une absolution<br />
personnelle ; s’il f<strong>au</strong>t prier l’Esprit-Saint tous les<br />
jours, ce n’est pas un esprit “ aérosol ” et démocratique,<br />
c’est l’Esprit de Jésus qui est le chemin, la vérité, la<br />
charité. <strong>La</strong> transmission de la foi ? Pas de grand plan<br />
sur la comète, de “ chantiers ” toujours inachevés, non.<br />
Il nous parle, avec émotion, sur le ton de la confidence,<br />
de sa grand-mère, de sa “ nona ” et de sa “ mama ”,<br />
c’est concret, vrai, cela touche les cœurs et les pousse<br />
à devenir à leur tour des relais de cette vérité - charité<br />
si aimable... Et tout à l’avenant.<br />
C’est cela, la “ nouvelle évangélisation ” s’exclame<br />
frère Bruno ; “ nouvelle ” en regard du rationalisme desséché,<br />
desséchant, tout en vaine et stérile jactance, dont<br />
l’Église n’en pouvait plus de souffrir depuis Vatican II.<br />
Et même lorsque le pape François évoque la “ liberté<br />
religieuse ”, c’est en passant, <strong>au</strong> terme d’un sermon où<br />
il n’a cessé de pousser les chrétiens à évangéliser, avec<br />
courage, jusqu’<strong>au</strong> martyre... Certes l’expression est ambiguë,<br />
équivoque, mais elle n’a rien à voir avec cet<br />
agenouillement devant le monde judéo-maçonnique pratiqué<br />
par l’Église depuis le voyage de P<strong>au</strong>l VI à l’Onu<br />
en octobre 1965.<br />
« Le Pape semble comprendre la liberté religieuse,<br />
dira frère Bruno, comme un moyen pour l’Église de<br />
se faire entendre de tous. Cependant, il ne f<strong>au</strong>t pas<br />
se fermer les yeux, pour c<strong>au</strong>se d’enthousiasme, nous<br />
devons plus que jamais continuer à dénoncer cette<br />
hérésie. Seulement, il f<strong>au</strong>t bien reconnaître que le pape<br />
François n’a pas la morgue des novateurs, ni le<br />
dogmatisme des réformateurs. Il est dans la suite de<br />
Jean-P<strong>au</strong>l Ier qui, par son humilité et son honnêteté,<br />
reconnaissait que cela posait problème. »<br />
Ces cratères furent des moments merveilleux, qui<br />
donnèrent l’idée à notre frère Bruno de tirer tout le<br />
parti de la technique vidéo et d’offrir cette grâce à nos<br />
amis. Ceux qui n’ont pu assister à la Pentecôte, ni <strong>au</strong>x<br />
premiers samedis du mois de juin, pourront commander<br />
les deux conférences magistrales de notre frère. Ils<br />
le verront visiblement heureux de nous faire aimer<br />
le Saint-Père, et surtout de nous faire comprendre,<br />
exemples à l’appui, combien la doctrine de notre Père<br />
rencontre ses intuitions pastorales, les explicite, ou les<br />
rectifie, mais d’une manière toujours positive en secondant<br />
ainsi l’Esprit-Saint qui œuvre en notre Saint-Père<br />
le pape François pour le service de son Église (cf.<br />
supra, p. 15-16). Notre frère ayant reçu “ l’esprit de<br />
finesse ” pour ce travail de critique constructive, à nous<br />
d’avoir celui, très fin <strong>au</strong>ssi, de docilité...<br />
EN DIRECT DE ROME<br />
Le jeudi 30 mai, nos commun<strong>au</strong>tés de France et du<br />
Canada ont fêté le SAINT-SACREMENT du Corps et du<br />
Sang de Notre-Seigneur en union avec le Saint-Père.<br />
Frère Bruno ayant fait avancer l’heure des vêpres et du<br />
dîner, nous avons pu, grâce à KTO, assister à la Messe<br />
et à la Procession du Saint-Sacrement, unissant nos<br />
prières à celles du Saint-Père et du peuple romain.<br />
Nous étions ravis, et frère Bruno plus que nous tous<br />
réunis : « Voilà qui confirme ce que disait notre Père :<br />
c’est bien l’Église qui se s<strong>au</strong>vera par elle-même ! »<br />
Pour la clôture du MOIS DE MARIE, le 31 mai, nous<br />
avons prié le chapelet place Saint-Pierre. Surprise et<br />
joie d’entendre les paroles que Notre-Dame de Fatima a<br />
demandé de réciter à la fin de chaque dizaine, parfaite<br />
expression de la charité de son Cœur Immaculé :<br />
« Ô mon Jésus, pardonnez-nous nos péchés, préserveznous<br />
du feu de l’Enfer et conduisez <strong>au</strong> Ciel toutes les âmes,<br />
surtout celles qui ont le plus besoin de votre miséricorde. »<br />
Joie de voir le cardinal Angelo Comastri visiblement<br />
ravi de prier le chapelet, demander ensuite <strong>au</strong> pape<br />
François : « Très Saint Père, parlez-nous de Marie, s’il<br />
vous plaît... » Et François de parler de « Marie qui se<br />
hâte ».<br />
PREMIER SAMEDI DU MOIS ROMAIN.<br />
Piété mariale le samedi, eucharistique le dimanche 2<br />
juin en la solennité de la FÊTE-DIEU, l’un et l’<strong>au</strong>tre jour<br />
passés en compagnie du pape François. Mais le dimanche<br />
nous étions pour ainsi dire en service commandé,<br />
puisque le Saint-Père avait demandé, presque<br />
ordonné, <strong>au</strong>x évêques du monde entier de faire en ce<br />
jour à 17 heures, une heure d’adoration eucharistique<br />
en union avec lui, mais tout à la gloire de « l’homme<br />
parfait » Notre-Seigneur Jésus-Christ.<br />
Nos frères prieurs d’Ardèche, du Perche et du Canada<br />
s’inscrivirent eux <strong>au</strong>ssi sur le site de la NOUVELLE<br />
ÉVANGÉLISATION... À 17 heures, nous étions donc dans<br />
la chapelle, devant le grand écran, devant Jésus <strong>au</strong><br />
Saint-Sacrement de Rome et de chez nous, ne faisant<br />
qu’un seul cœur avec l’Église en prière...<br />
Cette prière fut surtout silencieuse, mais notre frère<br />
Bruno par ses conférences et sermons nous avait donné<br />
de quoi alimenter la conversation avec le Cœur eucharistique<br />
de Jésus et Marie. Quant <strong>au</strong>x tout-petits, après<br />
a procession dans le parc, ils avaient embrassé Jésus-<br />
Hostie, comme des anges, et c’est donc sages comme<br />
des anges qu’ils regardèrent “ le Jésus ” de Rome et le<br />
Saint-Père en prière. Quant <strong>au</strong>x adultes, comment ne<br />
pas être dans l’action de grâces après la conférence<br />
d’actualités ?<br />
Frère Bruno nous a, en effet, bien montré que nous<br />
avions un Pape courageux qui n’hésite pas à frapper à<br />
la tête. C’est la mafia qui prend ses coups à l’occasion<br />
de la béatification d’un prêtre qu’elle avait fait assassiner<br />
en 1993. Il cible la franc-maçonnerie en démettant<br />
un prêtre français affilié à cette secte depuis 2001. Il<br />
rappelle les évêques italiens à leurs devoirs d’amour de<br />
Jésus, de leurs prêtres, et donc à sortir de leur “ pa-
JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 36<br />
resse ” et mettre fin à leur “ arrogance ”... Cela fait<br />
choc, les Italiens appellent cela la « bomba ».<br />
En politique, notre pape François est un sage ; il a<br />
fait savoir que le conflit syrien devait se régler par des<br />
moyens politiques. C’est précisément ce qui se met en<br />
place avec l’aide de la Russie, la légitime persévérance<br />
de Bachar el-Assad, et malgré les États-Unis.<br />
Notre Pape est un docteur, et qui plus est de<br />
<strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong>. Frère Bruno le prouve en analysant<br />
sa catéchèse sur l’Église, « famille de Dieu », et en<br />
nous montrant <strong>au</strong>ssi son plein accord avec la théologie<br />
kérygmatique de notre Père.<br />
Tant de raisons d’aimer notre pape François nous<br />
font plus que jamais prier pour lui afin qu’il “ valide ”<br />
ses avancées sur le “ chemin ” de la Renaissance, si<br />
fermement et prudemment menées, par une obéissance<br />
<strong>au</strong>x demandes de Notre-Dame de Fatima.<br />
CONTRE-RÉFORME CATHOLIQUE<br />
Si l’Église <strong>catholique</strong> et l’État <strong>catholique</strong> et royal,<br />
heureusement concertés, ont fait jadis le bonheur temporel<br />
et le salut éternel du peuple français, c’est que<br />
le Roi et la Reine de ces deux institutions étaient le<br />
Christ et sa divine Mère. Or, depuis le concile Vatican<br />
II, nous avons assisté <strong>au</strong> ralliement de l’Église<br />
<strong>au</strong> monde moderne, à sa religion, les droits de<br />
l’homme, à son régime politique, la démocratie. <strong>La</strong><br />
révolution triomphe, les francs-maçons eux-mêmes<br />
n’en croient pas leurs yeux.<br />
Qui ne plie pas le genou devant l’idole ? Notre frère<br />
Bruno en digne disciple de notre Père, lors de ses<br />
dernières actualités :<br />
« Le comble de l’aberration, c’est l’appel d’Yves de<br />
Kerdrel, dans VALEURS ACTUELLES du 23 mai 2013, à la<br />
“ DÉSOBÉISSANCE CIVILE ET ESPRIT DE RÉSISTANCE ” Depuis<br />
quand la désobéissance est-elle une vertu ?<br />
« <strong>La</strong> France conservatrice, la France des familles,<br />
des églises et des terroirs, la France bourgeoise traditionnelle,<br />
celle que l’on n’entend jamais, que l’on ne<br />
voit jamais dans la rue, celle qu’on qualifie de “ majorité<br />
silencieuse ”, est en train de faire sa révolution<br />
culturelle »... en devenant démocrate ! C’est un “ progrès<br />
” ! Progrès encore que de passer du culte de « Dieu<br />
premier servi » (Jeanne d’Arc) <strong>au</strong> « culte de l’homme »<br />
(P<strong>au</strong>l VI), et de la « dignité transcendante de la personne<br />
humaine » (Jean-P<strong>au</strong>l II) !<br />
Porte-parole du “ printemps français ”, mouvement informel<br />
né dans le sillage de “ LA MANIF POUR TOUS ”<br />
(LMPT), Béatrice Bourges déclare : « Ce mouvement est<br />
<strong>au</strong>ssi un mouvement de fierté : de quoi se cacherait-on ?<br />
de quoi <strong>au</strong>rait-on honte ? » De la Croix du Christ,<br />
scandale pour les impies, et c’est là tout le problème...<br />
Ludovine de <strong>La</strong> Rochère, présidente de LMPT :<br />
LES NOUVEAUTÉS DU MOIS<br />
1 VIDÉO (2 heures) : achat 12 e, location 4 e .<br />
1 VIDÉO (3 heures) : achat 18 e, location 6 e .<br />
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AUDIO – CASSETTES : location (uniquement) 1.50 e .<br />
CD : achat 5 e.<br />
Ajouter le prix du port. <strong>La</strong> durée de la location est de deux mois.<br />
CONFÉRENCES MENSUELLES À LA MAISON SAINT-JOSEPH.<br />
MAI 2013<br />
A 122. LE SAINT QUE DIEU NOUS A DONNÉ.<br />
A 123. LE TEMPS DES MARTYRS.<br />
A 122 - A 123 : 1 vidéo, 3 heures.<br />
Directeur de la publication : Frère Gérard Cousin. Commission paritaire 0313 G 80889.<br />
Impression : Association <strong>La</strong> <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> Catholique.<br />
F - 10 260 Saint-Parres-lès-V<strong>au</strong>des. – http://www.site-crc.com<br />
ABONNEMENT 30 E, étudiants 18 E, soutien 60 E.<br />
POUR LES PAYS D’EUROPE 36 E, AUTRES PAYS 60 E, par avion 70 E.<br />
1 DVD – 1 cassette – 1 CD.<br />
1 DVD – 2 cassettes – 2 CD.<br />
« Notre combat devient <strong>au</strong>ssi de plus en plus un<br />
combat pour la démocratie. »<br />
« Rebâtir un avenir qui soit fondé sur la réalité de<br />
l’Homme. »<br />
« Remettre l’homme <strong>au</strong> cœur de la Cité », proclame<br />
cette femme... LMPT, mais c’est comme « le plus grand<br />
Sillon » dont Marc Sangnier disait : « On ne travaille pas<br />
pour l’Église, on travaille pour l’humanité. » C’est pourquoi<br />
saint Pie X condamna ce mouvement : « Une construction<br />
purement verbale et chimérique, où l’on verra<br />
miroiter pêle-mêle et dans une confusion séduisante les<br />
mots de liberté, de justice, de fraternité et d’amour, d’égalité<br />
et d’exaltation humaine, le tout basé sur une dignité<br />
humaine mal comprise. Ce sera une agitation tumultueuse,<br />
stérile pour le but proposé et qui profitera <strong>au</strong>x remueurs<br />
de masses moins utopistes. » (n o 38, in CRC n o 47, p. 11)<br />
À la franc-maçonnerie, pour ne pas la nommer.<br />
frère Philippe de la Face de Dieu.