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N° 129 (PDF) - La Contre-Réforme catholique au XXIe siècle

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<strong>La</strong> <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> Catholique <strong>au</strong> XXI e <strong>siècle</strong><br />

IL EST RESSUSCITÉ !<br />

N o <strong>129</strong> - Juin 2013 Rédaction : frère Bruno Bonnet-Eymard Mensuel. Abonnement : 30 e<br />

Il reviendra avec son cœur immense, avec son cœur de flamme, son âme de<br />

p<strong>au</strong>vre et son sourire. Il reviendra ! Et le Cœur Immaculé de Marie triomphera !<br />

LE 13 MAI 2013<br />

À ROME ET À FATIMA<br />

LUNDI 13 mai 2013, pour le quatre-vingt-seizième<br />

anniversaire de la première apparition de Notre-<br />

Dame à Lucie, François et Jacinthe, le pape François a<br />

adressé un message <strong>au</strong> sanctuaire de Notre-Dame de<br />

Fatima : « Le Saint-Père exprime sa gratitude pour<br />

l’initiative et sa profonde reconnaissance pour la satisfaction<br />

de son désir, en union de prières avec tous les<br />

pèlerins de Fatima, et il accorde de tout cœur sa<br />

bénédiction apostolique. »<br />

« <strong>La</strong> satisfaction de son désir » : c’était celui qu’il<br />

avait exprimé « à deux reprises » <strong>au</strong> cardinal José da<br />

Cruz Policarpo, président de la Conférence épiscopale<br />

portugaise, de consacrer son ministère pétrinien à<br />

Notre-Dame de Fatima.<br />

« L’initiative » : c’était la décision de Policarpo de<br />

faire cette consécration “ collégialement ”, avec tous<br />

les évêques du Portugal.<br />

<strong>La</strong> prière de consécration a donc été écrite par le<br />

cardinal Policarpo et prononcée à la fin de la Messe<br />

internationale, près de l’<strong>au</strong>tel de l’esplanade. C’est un<br />

texte d’une rare insolence. Le cardinal prie la Vierge<br />

d’accorder à François « le don du discernement pour<br />

© POOL OR/ CPP/ CIRIC<br />

Mercredi 15 mai 2013, lors de l’<strong>au</strong>dience générale, place Saint-Pierre,<br />

« Noé lâcha d’<strong>au</strong>près de lui la colombe pour voir si les e<strong>au</strong>x avaient diminué à la surface du sol.» (Gn 8,8)


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 2<br />

savoir identifier les chemins du renouve<strong>au</strong> de l’Église »,<br />

sans <strong>au</strong>cune allusion à ceux que la Sainte Vierge a ellemême<br />

indiqués, où la récitation du chapelet tient la<br />

première place. Mais il y a “ renouve<strong>au</strong> ” et “ renouve<strong>au</strong> ”.<br />

Celui dont parle Policarpo, c’est le renouve<strong>au</strong> conciliaire<br />

! Et ce n’est pas ce “ chemin-là ” que suit François !<br />

Non seulement Notre-Dame ne reçoit même pas,<br />

dans ce texte, son titre de Mère de Dieu mais, loin<br />

de recommander la dévotion <strong>au</strong> Cœur Immaculé de<br />

Marie que Dieu veut établir dans le monde, ni la<br />

récitation du chapelet demandée par Notre-Dame et<br />

recommandée par le pape François, Policarpo préconise<br />

« la prière en silence en communion avec le<br />

précédent pape, Sa Sainteté Benoît XVI, lui qui, en<br />

choisissant le chemin de la prière silencieuse, défie<br />

l’Église (sic ! ) à prendre le même chemin ».<br />

Alors que le pape François a explicitement souligné,<br />

lors de l’<strong>au</strong>dience générale du mercredi 1er mai,<br />

« l’importance et la be<strong>au</strong>té de la prière du chapelet » :<br />

« Lorsque nous récitons le “ JE VOUS SALUE, MARIE ”,<br />

nous sommes amenés à contempler les mystères de<br />

Jésus, c’est-à-dire à réfléchir sur les moments importants<br />

de sa vie, pour que, comme pour Marie et pour<br />

saint Joseph, il soit <strong>au</strong> centre de nos pensées, de nos<br />

attentions et de nos actions. » C’est précisément le but<br />

de la méditation du premier samedi du mois, dont<br />

Notre-Dame a demandé l’institution.<br />

C’est vous dire le m<strong>au</strong>vais esprit de ce Policarpo,<br />

grand ami de Schönborn, le cardinal <strong>au</strong>trichien qui<br />

déclarait l’<strong>au</strong>tre jour que le pape François <strong>au</strong>rait intérêt<br />

à s’inspirer de la « sagesse de Benoît XVI » ! Les<br />

nostalgiques de Benoît XVI ne désarment pas !<br />

Pendant ce temps, à Rome, le Pape célébrait la<br />

Messe de 7 heures à la chapelle de la maison Sainte-<br />

Marthe. Il portait les ornements liturgiques des fêtes<br />

de la Sainte Vierge, mais il n’a pas soufflé mot de<br />

l’anniversaire du jour, du 13 mai ! S’inspirant de la<br />

première lecture de la Messe, où l’apôtre P<strong>au</strong>l demande<br />

<strong>au</strong>x Éphésiens : « “ Quand vous êtes devenus<br />

croyants, avez-vous reçu le Saint-Esprit ? » et ils lui répondent<br />

: “ Nous n’avons même pas appris qu’il y a le<br />

Saint-Esprit ” (Ac 19, 1-8), encore <strong>au</strong>jourd’hui, l’Esprit-<br />

Saint est toujours un peu l’inconnu de la foi », a-t-il<br />

dit en illustrant cette constatation par une anecdote<br />

personnelle : « Une fois, lorsque j’étais curé de paroisse,<br />

durant la messe pour les enfants, le jour de la<br />

Pentecôte, j’ai demandé : “ Qui sait qui est l’Esprit-<br />

Saint ? ” Et tous les enfants ont levé la main... L’un<br />

d’eux a répondu : “ Le paralytique ( il paralitico) ! ” Il<br />

avait entendu “ paraclet (paraclito) ”, et avait compris<br />

“ paralytique (paralitico) ” ! »<br />

Le Pape a poursuivi en mettant en lumière le rôle<br />

de l’Esprit-Saint annoncé par Jésus : « “ Il vous enseignera<br />

tout et vous rappellera tout ce que je vous ai dit. ”<br />

(Jn 14, 26). » Par conséquent, « l’Esprit-Saint c’est<br />

Dieu actif en nous... Dieu qui fait se réveiller la<br />

mémoire. L’Esprit-Saint nous aide à faire mémoire ”,<br />

a-t-il expliqué.<br />

Pour le Pape, il est « important, de faire mémoire<br />

” », car « un chrétien sans mémoire n’est pas<br />

un vrai chrétien : c’est un homme ou une femme prisonnier<br />

du moment ». Au moment où il semble, luimême,<br />

oublier le 13 mai !<br />

Sans mémoire, le chrétien « a une histoire » mais<br />

« il ne sait pas comment mettre à profit son histoire »,<br />

a insisté le Pape, soulignant le rôle de l’Esprit-Saint<br />

dans ce contexte : « <strong>La</strong> mémoire qui vient du cœur est<br />

une grâce de l’Esprit-Saint. » Par exemple celle que<br />

Jacinthe exprimait lorsqu’elle disait : « Ah ! si je pouvais<br />

mettre dans tous les cœurs le feu que j’ai là, dans<br />

ma poitrine, et qui me brûle et me fait tant aimer le<br />

Cœur de Jésus et le Cœur de Marie ! »<br />

Cette mémoire, a-t-il précisé, c’est notamment la<br />

mémoire « de ses misères, de ses péchés », la mémoire<br />

« de son esclavage du péché », mais <strong>au</strong>ssi la mémoire<br />

« du salut » de Dieu... par le Cœur Immaculé de Marie<br />

qui nous a enseigné cette prière le 13 juillet 1917 :<br />

« Ô MON JÉSUS, PARDONNEZ- NOUS NOS PÉCHÉS, PRÉ-<br />

SERVEZ- NOUS DU FEU DE L’ ENFER, ET CONDUISEZ AU CIEL<br />

TOUTES LES ÂMES, SURTOUT CELLES QUI ONT LE PLUS<br />

BESOIN DE VOTRE MISÉRICORDE. »<br />

<strong>La</strong> mémoire est bénéfique également à celui qui est<br />

tenté par la vanité « et croit être un peu le “ prix<br />

Nobel ” de la sainteté », a fait observer le pape<br />

François. Il s’agit dans ce cas de se rappeler de ces<br />

moments où il était « tout derrière, dans le troupe<strong>au</strong> ».<br />

« Je voudrais <strong>au</strong>jourd’hui demander la grâce de cette<br />

mémoire, pour nous tous », demander « à l’Esprit-Saint<br />

qu’il nous rende tous hommes et femmes “ de mémoire ”,<br />

comme la Vierge Marie, “ femme de la mémoire ” », a<br />

conclu le Pape. Allusion à l’Évangile où saint Luc<br />

écrit que la Vierge Marie « conservait avec soin toutes ces<br />

choses dans son cœur » pour les méditer (Lc 2, 19 et 51).<br />

Mais alors, le silence sur le 13 mai 1917 n’est pas<br />

un “ oubli ”...! Comment le comprendre ?<br />

C’est très simple. Depuis la publication du “ troisième<br />

secret ” en 2000, le commentaire qu’en a fait le<br />

cardinal Sodano s’est imposé à toute l’Église comme<br />

un jugement définitif : « Les situations <strong>au</strong>xquelles fait<br />

référence la troisième partie du “ secret ” de Fatima<br />

semblent désormais appartenir <strong>au</strong> passé. » Sentence<br />

confirmée par le cardinal Ratzinger, y ajoutant de son<br />

cru que « la parole-clef du “ secret ” [ les guillemets<br />

sont de lui ] “ Mon Cœur immaculé triomphera ” signifie<br />

« le triomphe de quiconque s’en remet à Dieu comme<br />

Marie, à la suite de Marie ».<br />

Ça n’est donc pas la victoire de Marie elle-même,<br />

mais « un appel à la liberté de tout chrétien d’entrer<br />

dans le dessein d’amour <strong>au</strong> quotidien de Dieu ». Dans<br />

son intention manifeste de prendre sans hiatus la suite


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 3<br />

de son prédécesseur, le pape François a préféré se<br />

cantonner dans un silence prudent.<br />

Quant à nous, afin de respecter son silence, adressons<br />

notre supplique à Notre-Dame, nous serons plus<br />

sûrs d’être ex<strong>au</strong>cés. Au moment où l’incendie syrien<br />

menace d’embraser le monde, il est urgent de se rappeler<br />

la recommandation instante que fit Jacinthe à<br />

Lucie avant de partir pour l’hôpital pour y mourir :<br />

« Il ne me reste plus be<strong>au</strong>coup de temps pour<br />

aller <strong>au</strong> Ciel. Toi, tu resteras ici afin de dire que<br />

Dieu veut établir dans le monde la dévotion <strong>au</strong> Cœur<br />

Immaculé de Marie. Le moment venu de le dire, ne te<br />

cache pas. Dis à tout le monde que Dieu nous accorde<br />

ses grâces par le moyen du Cœur Immaculé de Marie ;<br />

que c’est à elle qu’il f<strong>au</strong>t les demander ; que le Cœur de<br />

Jésus veut qu’on vénère avec lui le Cœur Immaculé de<br />

Marie ; que l’on demande la paix <strong>au</strong> Cœur Immaculé de<br />

Marie, car c’est à elle que Dieu l’a confiée. »<br />

SUPPLIQUE À NOTRE - DAME DU SAINT ROSAIRE<br />

Doux Cœur de Marie, soyez le salut de notre Saint-<br />

Père, le pape François ! Cœur Immaculé de Marie,<br />

convertissez les pécheurs par son ministère ! À sa<br />

prière, s<strong>au</strong>vez les âmes de l’enfer !<br />

Ô Marie, nouvelle Ève “ séduite ” comme l’ancienne,<br />

mais par Dieu à la voix de l’Ange vous disant :<br />

« Réjouissez-vous, comblée de grâce ! Le Seigneur est<br />

avec vous, Voici que vous concevrez et enfanterez un<br />

Fils et vous lui donnerez le nom de Jésus », faites la<br />

grâce à notre pape François de s<strong>au</strong>ver l’humanité en<br />

répondant à vos demandes : « Qu’il me soit fait, Mère,<br />

selon votre parole. »<br />

Votre seule présence, ô Marie, attire les grâces qui<br />

convertissent et sanctifient les âmes, puisque la grâce<br />

jaillit du Divin Cœur de Jésus sur nous tous en passant<br />

par vos mains maternelles. Demeurez <strong>au</strong>près du pape<br />

François, Vicaire de votre Divin Fils, afin que la grâce<br />

et la miséricorde qui coulent de votre Cœur Immaculé<br />

atteignent par son ministère toutes les âmes qui accourent<br />

à Rome <strong>au</strong> seul son de sa voix et se rassemblent<br />

<strong>au</strong>tour de lui comme un immense et unique troupe<strong>au</strong><br />

dans un unique bercail.<br />

Aujourd’hui à Rome, comme jadis à Bethléem pour<br />

les bergers et les mages, c’est Noël pour tous, p<strong>au</strong>vres<br />

et riches, juifs et païens : « Dieu avec nous ! » Enfant<br />

Jésus né de votre sein virginal, ô Marie, Verbe de Dieu<br />

poursuivant par Vous, en Vous, avec Vous et pour Vous,<br />

une existence humaine, fraternelle, <strong>au</strong>près de nous,<br />

comme un frère, un compagnon de route, un Maître et,<br />

à la fin, un S<strong>au</strong>veur... si toutefois nous recevons de<br />

votre sein votre Fils à aimer, et si nous reconnaissons<br />

sa Face reflétée par son Vicaire, le pape François,<br />

« comme se voient les personnes dans un miroir quand elles<br />

passent devant », comme dit votre mystérieux secret.<br />

Ce Pape « p<strong>au</strong>vre pour les p<strong>au</strong>vres » nous révèle<br />

que notre Dieu tout-puissant aime la petitesse, la p<strong>au</strong>vreté,<br />

la fragilité.<br />

Saint Joseph, votre époux véritable et chaste,<br />

homme juste et mystérieusement père de Jésus, fut<br />

<strong>au</strong>près de vous, ô Marie, la parfaite figure de notre très<br />

chéri Père Céleste. Que le pape François soit, à sa<br />

ressemblance, le gardien et le père nourricier de notre<br />

foi <strong>catholique</strong> retrouvée, comme Joseph fut le gardien<br />

de votre virginité, ô Marie ! Et quand il <strong>au</strong>ra rest<strong>au</strong>ré<br />

le dogme de la foi dans toute sa pureté par son<br />

enseignement quotidien, enflammez son cœur de pasteur<br />

du désir de consoler votre Cœur Immaculé en lui<br />

consacrant la part de votre troupe<strong>au</strong> dispersé dans<br />

l’immense Russie, afin que, tels les bergers de Bethléem,<br />

ravis d’admiration devant la be<strong>au</strong>té indicible de<br />

votre doux visage empreint de grâce et de tendresse,<br />

ils naissent de nouve<strong>au</strong> de votre sein virginal et fassent<br />

acte d’allégeance à l’Église <strong>catholique</strong> romaine.<br />

Donnez <strong>au</strong> Saint-Père, votre « évêque vêtu de blanc »,<br />

de pénétrer le “ secret ” d’une connaissance pleine<br />

d’amour des mystères de votre saint Rosaire, ô Immaculée<br />

Conception, fille du Dieu Très-H<strong>au</strong>t, en qui le Fils,<br />

votre Époux divin, se fit une chair d’enfant, un Corps et<br />

un Cœur qu’il immola un jour pour opérer le salut du<br />

monde. Afin que le Pape recommande à tous ses enfants<br />

la méditation de vos mystères joyeux, douloureux et<br />

glorieux par la pratique des premiers samedis du mois,<br />

selon votre parole à Lucie, la voyante de Fatima.<br />

Vierge Mère de Dieu et notre Mère, nous, vos<br />

phalangistes, anciens d’hier et nouve<strong>au</strong>x d’<strong>au</strong>jourd’hui,<br />

nous consacrons entièrement à votre Cœur Immaculé<br />

tout ce que nous sommes et tout ce que nous possédons,<br />

sous la houlette du Saint-Père, le pape François<br />

que Dieu a donné à son Église pour la reconstruire.<br />

Prenez-le sous votre maternelle protection, et nous<br />

avec lui. Défendez-nous des périls, aidez-nous à vaincre<br />

les tentations qui nous sollicitent <strong>au</strong> mal, et à<br />

conserver la pureté de l’âme et du corps, en nous<br />

faisant une âme de p<strong>au</strong>vre. Que votre Cœur Immaculé<br />

soit son refuge et le chemin qui le conduise à Dieu, et<br />

nous avec lui, marchant à sa suite, comme des brebis<br />

confiantes et dociles.<br />

Accordez-nous la grâce de prier avec lui et de nous<br />

sacrifier par amour pour Jésus, pour la conversion des<br />

pécheurs et en réparation des péchés commis contre<br />

votre Cœur Immaculé.<br />

Par votre médiation et en union avec le Cœur de<br />

votre Divin Fils, nous voulons vivre pour la Très<br />

Sainte Trinité, en qui nous croyons et espérons, que<br />

nous adorons et que nous aimons. Ainsi soit-il !<br />

frère Bruno de Jésus-Marie.


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 4<br />

MISÉRICORDE<br />

C’est le premier mot de ce Pape, dès son avènement<br />

: « miserando », élu en vertu de la divine miséricorde<br />

qui nous a enfin pris en pitié, nous, les brebis de<br />

son troupe<strong>au</strong>, après cinquante ans d’errance sans pasteur<br />

: « atque eligendo »...<br />

Dans son premier ANGÉLUS, il a raconté un dialogue<br />

digne de celui de Jésus avec la Samaritaine :<br />

« Une dame âgée est venue vers moi, humble, très<br />

humble, à plus de quatre-vingts ans. Je l’ai regardée<br />

et je lui ai dit : Grand-mère, parce que chez nous on<br />

s’adresse ainsi <strong>au</strong>x personnes âgées, grand-mère, vous<br />

voulez vous confesser ?<br />

– Oui, m’a-t-elle dit.<br />

– Mais si vous n’avez pas péché... Et elle m’a dit :<br />

– Nous faisons tous des péchés.<br />

– Mais peut-être que le Seigneur ne les pardonne pas...<br />

– Le Seigneur pardonne tout, m’a-t-elle dit avec<br />

assurance.<br />

– Mais comment le savez-vous, madame ?<br />

– Si le Seigneur ne pardonnait pas tout, le monde<br />

n’existerait pas. ”<br />

« J’ai eu envie, a ajouté le Pape, de lui demander :<br />

“ Mais dites-moi, madame, vous avez étudié à la Grégorienne<br />

? ” Parce que c’est la sagesse que donne<br />

l’Esprit-Saint, la sagesse intérieure sur la miséricorde<br />

de Dieu. »<br />

C’est <strong>au</strong>ssi son secret à lui, Souverain Pontife.<br />

<strong>La</strong> miséricorde ! Georges-Mario Bergoglio l’a pour<br />

ainsi dire rencontrée à l’âge de dix-sept ans lors d’une<br />

confession, le 21 septembre 1953, jour de la fête de<br />

saint Matthieu. Avant de retrouver des amis avec lesquels<br />

il avait rendez-vous, il voulut s’arrêter dans une<br />

église, y rencontra un prêtre, se confessa... et entendit<br />

l’appel à la vie religieuse. « Il se passa quelque<br />

chose » : miserando atque eligendo, l’expérience de la<br />

miséricorde, en vertu de laquelle il comprit que « Dieu<br />

nous attend le premier ». Il ne rejoignit pas ses amis.<br />

Décida qu’il serait religieux. Pourquoi dans la Compagnie<br />

de Jésus ? Attiré par sa force conquérante <strong>au</strong><br />

sein de l’Église, par le vœu d’obéissance qui donne<br />

pleine efficacité à cet élan missionnaire. Il <strong>au</strong>rait voulu<br />

aller <strong>au</strong> Japon, mais sa faible santé le lui interdit.<br />

Aujourd’hui, le voilà en position d’<strong>au</strong>torité sur toute<br />

l’Église pour y rest<strong>au</strong>rer la vie religieuse et relancer la<br />

mission sur les cinq continents.<br />

LE NOVICIAT DE LA SOUFFRANCE.<br />

CONFESSEUR ET PONTIFE<br />

Quelques années après avoir entendu cet appel, il se<br />

débattit pendant trois jours entre la vie et la mort<br />

jusqu’à ce que les médecins découvrent trois kystes qui<br />

nécessitèrent l’ablation d’une partie du poumon droit.<br />

Ce furent des heures de souffrance indicible : tous les<br />

jours, il fallait injecter du sérum pour nettoyer la plèvre<br />

et les cicatrices, par des sondes reliées à un aspirateur...!<br />

Brûlant de fièvre, il étreignait sa mère : « Maman !<br />

explique-moi ce qui m’arrive... » Un jour, une religieuse<br />

du nom de sœur Dolores, qu’il n’avait jamais<br />

oubliée depuis quelle l’avait préparé à la première<br />

communion, répondit à la question d’une manière qui<br />

demeura gravée dans son cœur et l’établit dans une<br />

inaltérable paix : « Tu es en train d’imiter Jésus ! »<br />

Depuis, il n’a plus cessé de souffrir de ce poumon<br />

infirme, et donc d’imiter Jésus, comprenant que « la<br />

p<strong>au</strong>vreté s’apprend en touchant la chair du Christ p<strong>au</strong>vre,<br />

dans les humbles, dans les malades, dans les enfants<br />

», comme il l’a dit le 8 mai <strong>au</strong>x membres de l’UNION<br />

INTERNATIONALE DES SUPÉRIEURES GÉNÉRALES réunies à<br />

Rome pour un colloque sur le thème du “ SERVICE DE<br />

L’AUTORITÉ SELON L’ÉVANGILE ”.<br />

MISERANDO ATQUE ELIGENDO.<br />

Telle était sa devise épiscopale, qu’il a conservée<br />

sur le trône pontifical où il siège pour notre joie par<br />

une incommensurable miséricorde de notre très chéri<br />

Père Céleste. Le cardinal Barbarin a expliqué ce que<br />

ça veut dire, dans la préface du livre signé Jorge Mario<br />

Bergoglio, pape François : “ AMOUR, SERVICE ET HUMI-<br />

LITÉ ”, qui rappelle “ HUMBLEMENT VÔTRE ” de Jean-<br />

P<strong>au</strong>l I er . Paru le Vendredi saint :<br />

“ Miserando atque eligendo ” : « L’expression est empruntée<br />

à Bède le Vénérable dans son commentaire de<br />

l’appel de saint Matthieu » :<br />

« Étant sorti, Jésus vit, en passant, un homme assis<br />

<strong>au</strong> bure<strong>au</strong> de la douane, appelé Matthieu (appelé Lévi<br />

par saint Marc et saint Luc), et il lui dit : “ Suis-moi ! ”<br />

Et se levant, il le suivit. » (Mt 9, 9)<br />

Le regard de Jésus sur Matthieu ! Le jeune Georges-<br />

Mario l’a vu se tourner vers lui :<br />

« Au moment même où le Seigneur fait miséricorde,<br />

miserando, à quelqu’un, il le choisit, eligendo, il<br />

l’inonde de sa grâce, et ce cade<strong>au</strong> de Dieu devient sa<br />

mission », écrit le cardinal Barbarin.<br />

« C’est l’histoire de François, le Poverello d’Assise,<br />

qui, retourné par la miséricorde de Dieu dans sa prison,<br />

à Spoleto, partira sur les routes comme un pèlerin,<br />

un p<strong>au</strong>vre troubadour, annonçant l’Évangile à toute la<br />

création. C’est <strong>au</strong>ssi le chemin spirituel d’Ignace de<br />

Loyola. Il rêvait de gloire et de faits d’armes mais,<br />

blessé dans son corps [<strong>au</strong> siège de Pampelune], puis<br />

bouleversé par la lecture des vies de saints, à Loyola,<br />

il devint un compagnon de Jésus, brûlant de communiquer<br />

à tous la joie de la miséricorde. »<br />

C’est <strong>au</strong>jourd’hui l’histoire du pape François, brûlant<br />

de communiquer à la ville de Rome et <strong>au</strong> monde<br />

entier le feu qui le brûle à son tour.


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 5<br />

LA CHARTE D’UN PONTIFICAT<br />

Élu le 13 mars, par une « miséricorde » toute particulière,<br />

miserando, de notre très chéri Père Céleste, le<br />

nouve<strong>au</strong> Pape a commencé par faire prier son peuple,<br />

avec les prières qu’un chacun apprend <strong>au</strong> berce<strong>au</strong>, puis<br />

il s’est rendu en pèlerinage à la basilique Sainte-Marie-<br />

Majeure, pour que la Vierge Marie « protège Rome<br />

tout entière ». Visite hors protocole, <strong>au</strong> petit matin !<br />

Et <strong>au</strong>ssitôt, dès ce même 14 mars, il a annoncé son<br />

“ programme ” <strong>au</strong>x cardin<strong>au</strong>x qui l’avaient élu, dans sa<br />

première homélie pontificale prononcée <strong>au</strong> cours de la<br />

Messe qu’il a célébrée en la chapelle Sixtine, à<br />

17 heures. Il a parlé debout, sans papier, en italien,<br />

d’abondance du cœur :<br />

« Dans ces trois lectures (Is 2, 2-5 ; 1 P 2, 1-9 ;<br />

Mt 16, 13-19), je vois qu’il y a quelque chose de<br />

commun : c’est le mouvement. Dans la première lecture<br />

le mouvement sur le chemin ; dans la deuxième, le<br />

mouvement dans l’édification de l’Église ; dans la troisième,<br />

dans l’Évangile, le mouvement dans la confession.<br />

Marcher, édifier, confesser. »<br />

MARCHER.<br />

« Il arrivera dans la suite des temps que la montagne<br />

de la maison de Yahweh sera établie en tête des<br />

montagnes et s’élèvera <strong>au</strong>-dessus des collines. Alors<br />

toutes les nations afflueront vers elle, alors viendront<br />

des peuples nombreux qui diront : “ Venez, montons à la<br />

montagne de Yahweh, à la maison du Dieu de Jacob, qu’il<br />

nous enseigne ses voies et que nous suivions ses sentiers. ”<br />

Car de Sion vient la Loi et de Jérusalem la parole de<br />

Yahweh. Il jugera entre les nations, il sera l’arbitre de<br />

peuples nombreux. Ils briseront leurs épées pour en<br />

faire des socs et leurs lances pour en faire des serpes.<br />

On ne lèvera plus l’épée nation contre nation, on<br />

n’apprendra plus à faire la guerre. Maison de Jacob,<br />

allons, marchons à la lumière de Yahweh. L’éclat de la<br />

majesté de Yahweh. » (Is 2, 2-5)<br />

« MARCHER. “ Maison de Jacob, allons, marchons à la<br />

lumière du Seigneur. ” (Is 2, 5) C’est la première chose<br />

que Dieu a dite à Abraham : Marche en ma présence et<br />

sois irrépréhensible.<br />

« Marcher : notre vie est une marche et quand nous<br />

nous arrêtons, cela ne va plus. Marcher toujours, en<br />

présence du Seigneur, à la lumière du Seigneur, cherchant<br />

à vivre avec cette irréprochabilité que Dieu demandait<br />

à Abraham, dans sa promesse. »<br />

Marcher : remettre en marche une Église condamnée<br />

à l’immobilisme conciliaire depuis cinquante ans,<br />

et qui est devenue tellement répréhensible qu’elle est<br />

c<strong>au</strong>se d’un épouvantable scandale...<br />

ÉDIFIER.<br />

<strong>La</strong> deuxième lecture était un passage de la première<br />

Épître de saint Pierre :<br />

« Comme des enfants nouve<strong>au</strong>-nés, désirez le lait<br />

non frelaté de la parole, afin que, par lui, vous crois-<br />

siez pour le salut, si du moins vous avez goûté combien<br />

le Seigneur est excellent. Approchez-vous de lui,<br />

la pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie,<br />

précieuse <strong>au</strong>près de Dieu. Vous-mêmes, comme pierres<br />

vivantes, prêtez-vous à l’édification d’un édifice spirituel,<br />

pour un sacerdoce saint, en vue d’offrir des<br />

sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus-<br />

Christ. Car il y a dans l’Écriture : Voici que je pose en<br />

Sion une pierre angulaire, choisie, précieuse, et celui qui<br />

se confie en elle ne sera pas confondu. À vous donc, les<br />

croyants, l’honneur, mais pour les incrédules, la pierre<br />

qu’ont rejetée les constructeurs, celle-là est devenue la<br />

tête de l’angle, une pierre d’achoppement et un rocher<br />

qui fait tomber. Ils s’y heurtent parce qu’ils ne croient<br />

pas à la Parole ; c’est bien à cela qu’ils ont été<br />

destinés. Mais vous, vous êtes une race élue, un sacerdoce<br />

royal, une nation sainte, un peuple acquis, pour<br />

proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés<br />

des ténèbres à son admirable lumière. » (1 P 2, 4-9)<br />

« ÉDIFIER l’Église. On parle de pierres : les pierres<br />

ont une consistance ; mais des pierres vivantes, des<br />

pierres ointes par l’Esprit-Saint. Édifier l’Église,<br />

l’Épouse du Christ, sur cette pierre angulaire qui est<br />

le Seigneur lui-même. Voilà un <strong>au</strong>tre mouvement de<br />

notre vie : édifier. »<br />

Afin de reconstruire une Église « à moitié en ruine », à<br />

moitié seulement puisqu’elle a retrouvé la « pierre angulaire<br />

» rejetée par les réformateurs du concile Vatican II,<br />

en la personne de François, successeur de Pierre.<br />

CONFESSER.<br />

À la question de Jésus, « Simon-Pierre répondit :<br />

“ Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. ” En réponse,<br />

Jésus lui dit : “ Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car<br />

cette révélation t’est venue, non de la chair et du sang,<br />

mais de mon Père qui est dans les cieux. Eh bien ! moi<br />

je te dis : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon<br />

Église, et les Portes de l’Hadès ne tiendront pas contre<br />

elle. Je te donnerai les clefs du Roy<strong>au</strong>me des Cieux :<br />

quoi que tu lies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux<br />

pour lié, et quoi que tu délies sur la terre, ce sera tenu<br />

dans les cieux pour délié. ” (Mt 16, 13-19)<br />

« Troisièmement, CONFESSER [ non pas <strong>au</strong> sens de confesser<br />

ses péchés, mais <strong>au</strong> sens de proclamer sa foi ].<br />

Nous pouvons marcher comme nous voulons, nous<br />

pouvons édifier de nombreuses choses, mais si nous ne<br />

confessons pas Jésus-Christ, cela ne va pas. Nous deviendrons<br />

une ONG compatissante, mais non l’Église,<br />

Épouse du Seigneur. Quand on ne marche pas, on s’arrête.<br />

Quand on n’édifie pas sur les pierres, qu’est-ce qui<br />

arrive ? Il arrive ce qui arrive <strong>au</strong>x enfants sur la plage<br />

quand ils font des châte<strong>au</strong>x de sable, tout s’écroule,<br />

c’est sans consistance [ tout le Concile est résumé dans<br />

cette image : des châte<strong>au</strong>x de sable ! ]. Quand on ne confesse<br />

pas Jésus-Christ, me vient la phrase de Léon<br />

Bloy : “ Celui qui ne prie pas le Seigneur, prie le diable. ”<br />

Quand on ne confesse pas Jésus-Christ, on confesse la<br />

mondanité du diable, la mondanité du démon. »


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 6<br />

Ou le Seigneur ou le diable. Il n’y a pas de milieu.<br />

Mais tous sont appelés à « confesser le Seigneur » : les<br />

juifs, les musulmans, les bouddhistes, les confucianistes,<br />

les athées...<br />

Léon Bloy ne fait que transcrire l’algarade qui a<br />

suivi la “ confession ” de Pierre, lorsque celui-ci voulut<br />

faire « obstacle » (skandalon) à la marche du Christ<br />

vers la Croix, se faisant ainsi le suppôt de Satan luimême<br />

: « Passe dernière moi, Satan, tu me fais obstacle,<br />

car tes pensées ne sont pas celles de Dieu, mais celle des<br />

hommes ! » (Mt 16, 23) C’est d’ailleurs ce que va évoquer<br />

le Pape en continuant :<br />

« Marcher, édifier - construire, confesser. Mais la chose<br />

n’est pas si facile, parce que dans le fait de marcher,<br />

de construire, de confesser, bien des fois il y a des<br />

secousses, il y a des mouvements qui ne sont pas<br />

exactement des mouvements de la marche : ce sont des<br />

mouvements qui nous tirent en arrière.<br />

« Cet Évangile poursuit avec une situation spéciale.<br />

Le même Pierre qui a confessé Jésus-Christ lui dit : Tu<br />

es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Je te suis, mais ne<br />

parlons pas de Croix. Cela n’a rien à voir. Je te suis<br />

avec d’<strong>au</strong>tres possibilités, sans la Croix.<br />

« Quand nous marchons sans la Croix, quand nous<br />

édifions sans la Croix et quand nous confessons un<br />

Christ sans Croix, nous ne sommes pas disciples du<br />

Seigneur : nous sommes mondains, nous sommes des<br />

évêques, des prêtres, des cardin<strong>au</strong>x, des Papes, mais<br />

pas des disciples du Seigneur. »<br />

« Des Papes »... trois Papes ! et même quatre :<br />

Jean XXIII, P<strong>au</strong>l VI, Jean-P<strong>au</strong>l II, Benoît XVI. François<br />

ne dit pas cela. Mais il ne fait rien pour nous<br />

dissuader de le penser. De toute façon, il ne regarde<br />

pas en arrière :<br />

« Je voudrais que tous, après ces jours de grâce,<br />

nous ayons le courage, vraiment le courage, de<br />

marcher en présence du Seigneur, avec la Croix du<br />

Seigneur ; d’édifier l’Église sur le sang du Seigneur,<br />

qui est versé sur la Croix ; et de confesser l’unique<br />

gloire : le Christ crucifié. Et ainsi l’Église ira de<br />

l’avant. Je souhaite à nous tous que l’Esprit-Saint,<br />

par la prière de la Vierge, notre Mère, nous accorde<br />

cette grâce : marcher, édifier, confesser Jésus-Christ<br />

crucifié. Qu’il en soit ainsi ! »<br />

RETOUR SUR LE CONCLAVE<br />

Le lendemain vendredi 15 mars, le pape François<br />

prononce un discours très, très surprenant :<br />

Après avoir adressé « une pensée pleine d’affection<br />

et de profonde gratitude » à son « vénéré prédécesseur<br />

Benoît XVI qui, dans les années de son pontificat, a<br />

enrichi et fortifié l’Église par son magistère et par la<br />

manière dont il l’a guidée, par sa bonté, sa foi, son<br />

humilité, sa douceur », le pape François a eu cette<br />

parole surprenante, qui lève peut-être le voile sur les<br />

“ secrets ” du Conclave :<br />

« Chers frères cardin<strong>au</strong>x, notre rencontre de ce jour<br />

veut être une sorte de prolongement de l’intense communion<br />

ecclésiale que nous avons expérimentée pendant<br />

cette période. Animés d’un profond sens de notre<br />

responsabilité et soutenus par un grand amour pour le<br />

Christ et pour l’Église, nous avons prié ensemble,<br />

partageant fraternellement nos sentiments, nos expériences<br />

et nos réflexions. Dans ce climat de grande<br />

cordialité, la connaissance réciproque et l’ouverture<br />

mutuelle ont grandi et c’est une bonne chose parce<br />

que nous sommes frères. Quelqu’un m’a dit : Les cardin<strong>au</strong>x<br />

sont les prêtres du Saint-Père. Cette commun<strong>au</strong>té,<br />

cette amitié, cette proximité nous fera du bien à tous.<br />

Et cette connaissance et cette ouverture mutuelle nous<br />

ont aidés à être dociles à l’action de l’Esprit-Saint.<br />

C’est lui, le Paraclet, l’acteur principal et suprême<br />

de toute initiative et de toute manifestation de la foi.<br />

C’est curieux : moi, ça me fait réfléchir. Le Paraclet<br />

LE PAPE FRANÇOIS ALLUME UN INCENDIE DANS LA CHAPELLE SIXTINE<br />

I<br />

« L y a eu un visage, des gestes<br />

et quelques mots, du nouve<strong>au</strong><br />

pape François. Mais sa première<br />

homélie – improvisée – dans la chapelle<br />

Sixtine, a quelque chose d’une flamme.<br />

C’est même du feu. Jamais un Pape,<br />

même Jean-P<strong>au</strong>l II, n’a osé parler<br />

<strong>au</strong>ssi crûment en public. Benoît XVI<br />

avait eu ce type de discours, le<br />

Vendredi saint, mais c’était juste avant<br />

son élection.<br />

« Ce qui impose déjà un style<br />

radicalement neuf et décapant. Une<br />

grande liberté intérieure <strong>au</strong>ssi. Le<br />

pape François n’a pas voulu du texte<br />

que ses services lui avaient préparé.<br />

Il s’est lancé et a improvisé une<br />

homélie de sept minutes pile qui a<br />

laissé les cardin<strong>au</strong>x bouches bées.<br />

Comme des enfants devant un maître<br />

spirituel.<br />

« Car c’est la grande tradition jésuite<br />

qu’il incarne. Celle de ces religieux à<br />

la fois aiguisés intellectuellement mais<br />

“ fous ” du Christ. C’est-à-dire vivant,<br />

en profondeur, avec “ le Seigneur ”,<br />

comme il l’a dit, centre et source de<br />

leur vie. Mais dont ils sont animés<br />

comme un feu.<br />

« Cette homélie radicale n’a rien<br />

d’intégriste mais elle va plaire <strong>au</strong>x<br />

milieux traditionalistes. Cette homélie<br />

dérangeante n’a rien de progressiste<br />

mais elle va provoquer les milieux de<br />

g<strong>au</strong>che. Cette homélie est bigrement<br />

<strong>catholique</strong> !<br />

« Du coup, il découvre d’un trait les<br />

comportements lourds de la machine<br />

vaticane et certaines dérives cléricales.<br />

Il lance une sorte de “ J’accuse ” à<br />

des témoins du Christ qui n’en sont<br />

plus. Et introduit son pontificat par un<br />

examen de conscience qui interroge<br />

tout le monde.<br />

« Ne pas se tromper, donc, sur<br />

l’identité de ce jésuite devenu Pape.<br />

Ce n’est pas une victoire de la<br />

g<strong>au</strong>che de l’Église sur sa droite. C’est<br />

l’avènement d’un religieux, évêque<br />

et cardinal vivant de façon évangélique,<br />

mais animé par une foi<br />

profonde, <strong>catholique</strong>, qui le rend<br />

inclassable. »<br />

( Jean-Marie Guénois, 14 mars 2013)


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 7<br />

est l’<strong>au</strong>teur de toutes les différences dans les Églises<br />

et il semble être un apôtre de Babel. »<br />

Avouez que c’est une surprise ! Ce dévoilement<br />

des confrontations du Conclave, présenté comme une<br />

tour de Babel ! Car c’est cela. Autant dire qu’il a<br />

entrevu le Masdu postconciliaire... Et qu’en est-il<br />

sorti ? L’élection du pape François ! En vertu de cette<br />

affirmation par laquelle le Pape continue : « Mais<br />

d’<strong>au</strong>tre part, c’est lui qui fait l’unité de ces différences,<br />

non dans l’ “ égalité ”, mais dans l’harmonie. »<br />

Certes ! mais alors ce ne doit pas être l’œuvre du<br />

même “ Esprit ” que celui de « l’Apôtre de Babel » !<br />

Cependant, deuxième surprise, le pape François ne<br />

voit pas l’opposition de deux Esprits, Esprit de Babel,<br />

Esprit du Masdu d’une part, contre Esprit-Saint d’<strong>au</strong>tre<br />

part ; il ne voit que « l’harmonie » dont le Saint-Esprit<br />

est effectivement l’artisan depuis le 13 mars 2013 :<br />

« Je me souviens de ce Père de l’Église qui le définissait<br />

ainsi [ le Paraclet ] : “ Ipse harmonia est ”. »<br />

C’est précisément pourquoi il est impossible d’admettre<br />

qu’il était présent et agissant <strong>au</strong> Concile ! Car<br />

“ l’Esprit du Concile ” est un esprit de division, tandis<br />

que « le Paraclet, qui donne des charismes différents à<br />

chacun de nous, continue le Pape, nous unit dans cette<br />

commun<strong>au</strong>té d’Église qui adore le Père, le Fils et lui,<br />

l’Esprit-Saint ». Et non pas “ l’homme ” !<br />

En proclamant dans l’<strong>au</strong>la de Saint-Pierre, le 7 décembre<br />

1965, « le culte de l’homme » P<strong>au</strong>l VI a bien<br />

montré qu’il n’était pas de ce Saint-Esprit-là.<br />

Mais voici comment le pape François nous libère<br />

de l’Esprit conciliaire :<br />

« C’est précisément en partant de cette <strong>au</strong>thentique<br />

affection collégiale, qui unit le collège cardinalice, que<br />

j’exprime ma volonté de servir l’Évangile avec un<br />

amour renouvelé, en aidant l’Église à devenir de plus<br />

en plus, dans le Christ et avec le Christ, la vigne<br />

féconde du Seigneur. Stimulés <strong>au</strong>ssi par la célébration<br />

de l’Année de la foi, tous ensemble, pasteurs et fidèles,<br />

nous nous efforcerons de répondre fidèlement à la<br />

mission de toujours : apporter Jésus-Christ à l’homme<br />

et conduire l’homme à la rencontre avec Jésus-Christ,<br />

qui est le chemin, la vérité et la vie, réellement présent<br />

dans l’Église et contemporain de tout homme [et non<br />

pas “ uni à tout homme ” ]. Une telle rencontre fait de<br />

nous des hommes nouve<strong>au</strong>x dans le mystère de la<br />

grâce, suscitant dans notre esprit cette joie chrétienne<br />

qui constitue le centuple donné par le Christ à celui<br />

qui l’accueille dans sa propre existence. »<br />

Encore f<strong>au</strong>t-il l’accueillir ! Mais je suis en train de<br />

faire valoir des oppositions que lui, le Pape, cherche à<br />

effacer. En effet, pour être plus sûr de ne pas introduire<br />

une nouvelle division qui serait un retour à “ Babel<br />

”, le pape François ajoute cet hommage senti à<br />

Benoît XVI :<br />

« Comme nous l’a rappelé si souvent le pape<br />

Benoît XVI dans ses enseignements et, enfin, à travers<br />

son geste humble et courageux, c’est le Christ qui<br />

guide l’Église par son Esprit. »<br />

Certes ! surtout par « son geste humble et courageux<br />

»... sa très opportune démission !<br />

« L’Esprit-Saint est l’âme de l’Église par sa force<br />

vivifiante et unifiante : d’une multitude il fait un seul<br />

corps, le Corps mystique du Christ. Ne cédons jamais<br />

<strong>au</strong> pessimisme, à cette amertume que le diable nous<br />

offre tous les jours ; ne cédons pas <strong>au</strong> pessimisme et<br />

<strong>au</strong> découragement : nous avons la ferme certitude<br />

que l’Esprit-Saint donne à l’Église, par son souffle<br />

puissant, le courage de persévérer et <strong>au</strong>ssi de chercher<br />

de nouvelles méthodes d’évangélisation, pour porter<br />

l’Évangile jusqu’<strong>au</strong>x extrémités de la terre (cf. Ac 1, 8).<br />

« <strong>La</strong> vérité chrétienne est attirante et persuasive<br />

parce qu’elle répond <strong>au</strong> besoin profond de l’existence<br />

humaine, en annonçant de manière convaincante que<br />

le Christ est l’unique S<strong>au</strong>veur de tout l’homme et de<br />

tous les hommes. Cette annonce demeure valide <strong>au</strong>jourd’hui,<br />

comme elle l’était <strong>au</strong> début du christianisme,<br />

<strong>au</strong> temps de la première grande expansion missionnaire<br />

de l’Évangile.<br />

« Chers frères, courage ! Pour la moitié d’entre<br />

nous, nous sommes déjà d’un âge avancé : j’aime bien<br />

dire que la vieillesse est le siège de la sagesse de la<br />

vie. Les personnes âgées ont la sagesse de ceux qui<br />

ont cheminé dans la vie, comme le vieillard Siméon et<br />

la vieille Anne <strong>au</strong> Temple. C’est justement cette<br />

vieillesse qui leur a permis de reconnaître Jésus.<br />

Donnons cette sagesse <strong>au</strong>x jeunes : comme le bon vin,<br />

qui se bonifie avec les années, donnons <strong>au</strong>x jeunes la<br />

sagesse de la vie. Il me vient à l’esprit ce qu’un poète<br />

allemand disait de la vieillesse : “ Es ist ruhig, das<br />

Alter, und fromm ” : c’est le temps de la tranquillité et<br />

de la prière. Et c’est <strong>au</strong>ssi le temps de donner cette<br />

sagesse <strong>au</strong>x jeunes.<br />

« Vous allez maintenant rentrer dans vos sièges respectifs<br />

pour poursuivre votre ministère, enrichis de l’expérience<br />

de ces derniers jours, si empreints de foi et<br />

de communion ecclésiale. Cette expérience tellement<br />

unique et incomparable, nous a permis de saisir en<br />

profondeur toute la be<strong>au</strong>té de la réalité ecclésiale qui est<br />

un reflet de la splendeur du Christ ressuscité : un jour,<br />

nous regarderons ce visage si be<strong>au</strong> du Christ ressuscité !<br />

« Je confie à la puissante intercession de Marie,<br />

notre Mère, Mère de l’Église, mon ministère et le vôtre.<br />

Sous son regard maternel, que chacun de nous puisse<br />

avancer joyeux et docile à la voix de son Divin Fils en<br />

renforçant l’unité, en persévérant d’un seul cœur dans<br />

la prière et en témoignant de la véritable foi en la<br />

présence continuelle du Seigneur. Avec ces sentiments,<br />

– qui sont véritables ! – avec ces sentiments, je vous<br />

donne de tout cœur la bénédiction apostolique. »<br />

Dès le lendemain, 16 mars, il a “ confessé ” devant<br />

des milliers de journalistes du monde entier :


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 8<br />

« Le Christ est le Pasteur de l’Église, mais sa présence<br />

dans l’histoire passe par la liberté des hommes :<br />

parmi eux l’un est choisi pour servir comme son Vicaire,<br />

Successeur de l’Apôtre Pierre, mais le Christ est<br />

le centre, non le Successeur de Pierre : le Christ. Le<br />

Christ est le centre. Le Christ est la référence fondamentale,<br />

le cœur de l’Église. Sans lui, Pierre et<br />

l’Église n’existeraient pas et n’<strong>au</strong>raient pas de raison<br />

d’être. Comme l’a répété plusieurs fois Benoît XVI, le<br />

Christ est présent et guide son Église. Dans tout ce<br />

qui est arrivé, le protagoniste est, en dernière analyse,<br />

l’Esprit-Saint. Il a inspiré la décision de Benoît XVI<br />

pour le bien de l’Église ; il a orienté les cardin<strong>au</strong>x<br />

dans la prière et dans l’élection.<br />

« Chers amis, il est important de tenir compte de cet<br />

horizon interprétatif, de cette herméneutique, pour mettre<br />

<strong>au</strong> point le cœur des événements de ces jours-ci. »<br />

LA BONNE ODEUR DU CHRIST<br />

« DIALOGUE D’AMOUR ».<br />

Le pape François nous explique gentiment qu’il ne<br />

veut pas des « potins assassins » entre nous parce que<br />

le dialogue de Jésus avec ses disciples est toujours<br />

« un dialogue d’amour », y compris après la trahison<br />

de Pierre. Suivez mon regard ! Tous les sous-entendus<br />

de ces sages recommandations sont d’un merveilleux<br />

à-propos ! Faisant allusion à la question de Pierre <strong>au</strong><br />

sujet de Jean, après la pêche miraculeuse ponctuée par<br />

l’appel de Jésus à Pierre : « “ Suis-moi. ” Se retournant,<br />

Pierre aperçoit, marchant à leur suite, le disciple<br />

que Jésus aimait », il demande : « Seigneur, et lui ? »<br />

(Jn 21, 20-21)<br />

« Se mêler de la vie de l’<strong>au</strong>tre a tant de modalités<br />

», dit le Pape, dressant la liste de cinq façons de<br />

communiquer qui sont « destructrices » dans l’Église :<br />

la comparaison, le “ potin ”, la désinformation, la diffamation<br />

et la calomnie.<br />

<strong>La</strong> “ comparaison ” évoque Pierre demandant à Jésus<br />

en désignant Jean :<br />

« Et lui, Seigneur, que lui arrivera-t-il ?<br />

– Si je veux qu’il reste jusqu’à ce que je vienne, est-ce<br />

ton affaire ? »<br />

Vous me suivez ? Benoît XVI est toujours là. Jusqu’à<br />

quand ? Ce n’est pas notre affaire.<br />

Le Pape a poursuivi en soulignant la duplicité du<br />

“ potin ”. « On commence par une expression de personne<br />

bien éduquée : “ Je ne veux dire de mal de personne<br />

mais il me semble que... ” et ça se termine en<br />

“ écorchant ” le prochain. » Comme disait naguère un<br />

vicaire général du diocèse de Troyes : « Je n’ai de<br />

haine pour personne, mais si j’en avais pour quelqu’un<br />

ce serait pour le curé de Villem<strong>au</strong>r, l’abbé de Nantes. »<br />

Il y a be<strong>au</strong>coup de “ potins ” qui circulent contre nous<br />

et nous font grand tort, mais si le pape François y met<br />

fin, quelle douceur, quelle aménité, quelle charité fraternelle<br />

va renaître dans l’Église !<br />

<strong>La</strong> “ désinformation ” revient à « dire seulement la<br />

moitié de la vérité ». <strong>La</strong> “ diffamation ” consiste à<br />

« faire le journaliste » lorsqu’ « une personne a fait une<br />

grosse f<strong>au</strong>te », et « détruire sa renommée ». Et la “ calomnie<br />

” : « dire des choses qui ne sont pas vraies »,<br />

c’est finalement « tuer le frère ».<br />

Autant de péchés mortels...<br />

Au reste, a ajouté le Pape, <strong>au</strong>cun discours portant<br />

atteinte à une personne n’est nécessaire : « Le Seigneur<br />

le sait, car il connaît ce qu’il y a dans l’homme. »<br />

« “ Suis-moi ! ” Cette réponse de Jésus à Pierre est<br />

belle. Elle est si claire, elle est pleine d’amour », s’est<br />

exclamé le Pape. « Ne rêvassez pas en pensant que le<br />

salut est dans la comparaison avec les <strong>au</strong>tres ou dans<br />

le commérage. Demandons <strong>au</strong> Seigneur qu’il nous<br />

donne cette grâce de ne pas nous mêler de la vie des<br />

<strong>au</strong>tres, de ne pas devenir des chrétiens de bonne manière<br />

et de m<strong>au</strong>vaises habitudes. » Je ne connais pas<br />

de meilleur commentaire à l’article 28 de notre Règle :<br />

« Les Petits frères du Sacré-Cœur s’aimeront tous comme<br />

les membres d’une même famille, l’Église. Ils ne compareront<br />

ni n’opposeront jamais leur Ordre à quelque commun<strong>au</strong>té<br />

que ce soit. Une seule existe pour leur cœur, celle qui<br />

les contient toutes : l’Église <strong>catholique</strong>. »<br />

JÉSUS SEUL !<br />

Combien étaient-ils ? Deux cent mille ? membres de<br />

“ mouvements ecclési<strong>au</strong>x ” des cinq continents, rassemblés<br />

pour la vigile de la fête de la Pentecôte, le 18<br />

mai, place Saint-Pierre, envahissant <strong>au</strong>ssi la via de la<br />

Conciliazione, sur le thème : “ Je crois ! Augmente en<br />

nous la foi ! ”<br />

Après l’intronisation de l’image de la Vierge SALUS<br />

POPULI ROMANI, vénérée à Sainte-Marie-Majeure, le<br />

chant du Veni Creator et l’office des vigiles, le Pape a<br />

écouté patiemment deux “ témoignages ”, dont celui du<br />

Pakistanais P<strong>au</strong>l Bhatti, frère du ministre Shahbaz<br />

Bhatti, assassiné en 2011 en haine de sa foi <strong>catholique</strong>.<br />

Puis le pape François a voulu répondre spontanément<br />

<strong>au</strong>x “ questions ” qui lui étaient posées ; parlant d’abondance<br />

du cœur, il s’est livré sans détour avec toute<br />

l’ardeur de son cœur de be<strong>au</strong> et bon pasteur. Comme on<br />

a raison de l’aimer !<br />

Première question : « COMMENT AVEZ-VOUS PU TROU-<br />

VER LA CERTITUDE DE LA FOI DANS VOTRE VIE, ET QUELLE<br />

ROUTE POUVEZ-VOUS NOUS INDIQUER POUR VAINCRE LA<br />

FRAGILITÉ DE LA FOI ? »<br />

Très bonne question qui souligne la certitude dont<br />

rayonne le Pape pour « confirmer » ses frères. Il a<br />

répondu en racontant comment il avait reçu « la première<br />

annonce de la foi » de sa grand-mère, comme<br />

Timothée à qui saint P<strong>au</strong>l rappelle « le souvenir de la<br />

foi sans détour qui, d’abord, résida dans le cœur de ta<br />

grand-mère Loïs et de ta mère Eunice et qui, j’en suis<br />

convaincu, réside également en toi. » (2 Tm 1, 5)


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 9<br />

« J’ai eu la grâce de grandir dans une famille où<br />

la foi se vivait de manière très simple et concrète ;<br />

mais c’est surtout ma grand-mère, la maman de mon<br />

père, qui a marqué mon chemin de foi. C’était une<br />

femme qui nous expliquait, qui nous parlait de Jésus,<br />

elle nous enseignait le catéchisme. Je me souviens que,<br />

le Vendredi saint, elle nous emmenait toujours, le soir,<br />

à la procession <strong>au</strong>x flambe<strong>au</strong>x, et à la fin de cette<br />

procession, quand arrivait le “ Christ gisant ”, ma<br />

grand-mère nous faisait agenouiller, nous les enfants,<br />

et nous disait : “ Regardez, il est mort, mais demain il<br />

ressuscitera. ”<br />

« C’est précisément de cette femme, de ma grandmère<br />

que j’ai reçu la première annonce de la foi !<br />

C’est très be<strong>au</strong>, cela ! <strong>La</strong> première annonce, à la<br />

maison, en famille ! Et cela me fait penser à l’amour<br />

de tant de mamans et de tant de grands-mères dans la<br />

transmission de la foi. C’est elles qui transmettent la<br />

foi. C’est ce qui se passait <strong>au</strong>ssi dans les premiers<br />

temps, parce que saint P<strong>au</strong>l disait à Timothée : “ J’évoque<br />

le souvenir de ta mère et de ta grand-mère. ” (cf.<br />

2 Tm 1, 5) Toutes les mamans qui sont ici, toutes les<br />

grands-mères, pensez à cela ! »<br />

Autrement dit : la “ nouvelle évangélisation ”, selon<br />

le pape François, n’est rien d’<strong>au</strong>tre que l’ancienne !<br />

que la réforme conciliaire a seulement éclipsé pendant<br />

cinquante ans.<br />

<strong>La</strong> “ théologie totale ” de l’abbé de Nantes, notre<br />

Père, est là, dans ces paroles du pape François : le<br />

baptême est un engendrement qui nous communique la<br />

foi et la vie de la grâce en nous faisant enfants de<br />

l’Église, car « nul n’a Dieu pour Père qui n’ait l’Église<br />

pour mère » (saint Cyprien).<br />

Puis il raconte sa confession du 21 septembre 1953<br />

que j’ai mentionnée en commençant, la grâce qui a<br />

décidé de toute sa vie. Il ajoute :<br />

« Nous disons que nous devons chercher Dieu, aller<br />

vers lui pour lui demander pardon, mais quand nous y<br />

allons, il nous attend. Lui le premier ! Chez nous, en<br />

espagnol, nous avons un mot qui explique bien cela :<br />

“ Le Seigneur nous primerea toujours ”, il est premier,<br />

il nous attend ! Et c’est vraiment une très grande<br />

grâce : trouver quelqu’un qui t’attend. Tu y vas, en<br />

pécheur, mais lui t’attendait pour te pardonner. C’est<br />

l’expérience que les prophètes d’Israël décrivaient<br />

quand ils disaient que le Seigneur est comme la<br />

fleur d’amandier, la première fleur du printemps<br />

(cf. Jr 1, 11-12). Avant que les <strong>au</strong>tres fleurs ne viennent,<br />

il est là : c’est lui, il t’attend. Le Seigneur nous attend.<br />

Et quand nous le cherchons, nous trouvons cette réalité<br />

: c’est lui qui nous attend pour nous accueillir,<br />

pour nous donner son amour. Et c’est une telle stupeur<br />

dans ton cœur que tu as du mal à y croire, et c’est<br />

comme cela que la foi grandit ! Par la rencontre avec<br />

une personne, par une rencontre avec le Seigneur [...].<br />

« Vous parliez <strong>au</strong>ssi de la fragilité de la foi, comment<br />

faire pour la vaincre. Le plus grand ennemi de la<br />

foi, – c’est curieux, hein ! – c’est la peur. Mais n’ayez<br />

pas peur ! Nous sommes fragiles, et nous le savons.<br />

Mais lui, il est plus fort ! Si tu vas avec lui, il n’y a<br />

pas de problème ! Un enfant est très fragile, j’en ai vu<br />

be<strong>au</strong>coup <strong>au</strong>jourd’hui, mais il était avec son papa,<br />

avec sa maman : il est en sécurité ! Avec le Seigneur,<br />

nous sommes sûrs. <strong>La</strong> foi grandit avec le Seigneur,<br />

justement de la main du Seigneur ; cela nous fait<br />

grandir et nous rend forts. Mais si nous croyons<br />

pouvoir nous débrouiller tout seuls... Pensons à ce<br />

qui est arrivé à Pierre : “ Seigneur, je ne te renierai<br />

jamais ! ” (cf. Mt 26, 33-35) ; et ensuite, le coq a chanté<br />

et il l’avait renié trois fois ! (cf. v. 69-75)<br />

« Réfléchissons : quand nous avons trop confiance<br />

en nous-mêmes, nous sommes plus fragiles.<br />

« Toujours avec le Seigneur ! Et quand on dit :<br />

“ avec le Seigneur ”, cela signifie avec l’Eucharistie,<br />

avec la Bible, avec la prière... mais <strong>au</strong>ssi en famille,<br />

avec notre maman, avec elle <strong>au</strong>ssi, parce c’est elle qui<br />

nous amène <strong>au</strong> Seigneur : elle est notre mère, elle sait<br />

tout. Et donc prier <strong>au</strong>ssi la Vierge Marie et lui<br />

demander, comme à une maman, qu’elle me rende fort.<br />

Voilà ce que je pense de la fragilité, c’est en tout cas<br />

mon expérience. Ce qui me rend fort, chaque jour,<br />

c’est de prier le chapelet avec la Vierge Marie. Je<br />

sens une force très grande parce que je vais à elle et<br />

je me sens fort. »<br />

LE TÉMOIGNAGE.<br />

Deuxième question : « COMMENT COMMUNIQUER DE<br />

FAÇON EFFICACE LA FOI D’AUJOURD’HUI ? »<br />

« Je dirai seulement trois mots.<br />

« Le premier, c’est JÉSUS. Quel est le plus important<br />

? C’est Jésus. Si nous nous appuyons sur l’organisation,<br />

sur d’<strong>au</strong>tres choses, de belles choses, mais sans<br />

Jésus, nous n’avançons pas, ça ne va pas. Jésus est<br />

plus important. Maintenant, je voudrais vous adresser<br />

un petit reproche, mais fraternellement, entre nous.<br />

Vous avez tous crié sur la place : “ François, François !<br />

pape François ! ” Mais Jésus, où était-il ? J’<strong>au</strong>rais<br />

voulu que vous criiez : “ Jésus, Jésus est le Seigneur, et<br />

il est vraiment <strong>au</strong> milieu de nous. ” Dorénavant, pas de<br />

“ François ”, mais “ Jésus ! ”<br />

« Le second mot est : la PRIÈRE. Regarder le visage<br />

de Dieu, mais surtout, et c’est lié à ce que j’ai dit<br />

avant, se sentir regardé. Le Seigneur nous regarde, il<br />

nous regarde le premier. C’est ce que j’expérimente<br />

devant le sagrario [ le tabernacle] quand je vais prier,<br />

le soir, devant le Seigneur. Quelquefois, je m’endors un<br />

peu, c’est vrai, parce qu’avec la fatigue de la journée,<br />

tu t’endors un peu. Mais lui, il me comprend. Et<br />

je ressens un tel réconfort quand je pense qu’il<br />

me regarde. Nous pensions que nous devons prier,<br />

parler, parler, parler... Non ! <strong>La</strong>isse-toi regarder par le<br />

Seigneur. Lorsqu’il nous regarde, il nous donne la<br />

force et nous aide à témoigner de lui – parce que la<br />

question était sur le témoignage de la foi, non ? Avant,


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“ Jésus ”, puis “ la prière ” – nous sentons que Dieu<br />

nous tient par la main. Je souligne alors l’importance<br />

de ceci : se laisser guider par lui. C’est plus important<br />

que n’importe quel calcul. Nous sommes de vrais<br />

évangélisateurs en nous laissant guider par lui. Pensons<br />

à Pierre ; peut-être faisait-il la sieste, après le<br />

repas, et il a eu une vision, la vision de la nappe avec<br />

tous les anim<strong>au</strong>x, et il a entendu que Jésus lui disait<br />

quelque chose, mais il n’a pas compris. À ce momentlà,<br />

plusieurs non-juifs sont venus le chercher pour<br />

aller dans une maison, et il a vu que l’Esprit-Saint<br />

était là. Pierre s’est laissé guider par Jésus pour<br />

arriver à cette première évangélisation des Gentils, qui<br />

n’étaient pas juifs : c’était quelque chose d’inimaginable<br />

à cette époque (cf. Ac 10, 9-33). Et ainsi toute l’histoire,<br />

toute l’histoire ! Se laisser guider par Jésus. Il<br />

est vraiment le leader, notre leader, c’est Jésus.<br />

« Et troisièmement, le TÉMOIGNAGE. Jésus, la prière<br />

– la prière : se laisser guider par lui – et ensuite<br />

le témoignage. Mais je voudrais ajouter quelque<br />

chose. Se laisser guider par Jésus te conduit <strong>au</strong>x<br />

surprises de Jésus. On peut penser que l’évangélisation,<br />

nous devons la programmer <strong>au</strong>tour d’une table, en<br />

pensant à des stratégies, en faisant des projets. Mais ce<br />

sont des instruments, de petits instruments. L’important,<br />

c’est Jésus et de se laisser guider par lui. Ensuite, nous<br />

pouvons faire des stratégies, mais c’est secondaire.<br />

« Enfin, le TÉMOIGNAGE : la communication de la foi<br />

ne peut se faire que par le témoignage et c’est<br />

l’amour. Non pas avec nos idées, mais avec l’Évangile<br />

vécu dans notre existence et que l’Esprit-Saint fait<br />

vivre <strong>au</strong>-dedans de nous. C’est comme une synergie<br />

entre nous et l’Esprit-Saint, et cela conduit <strong>au</strong> témoignage.<br />

L’Église, ce sont les saints qui la font avancer,<br />

ce sont eux qui donnent ce témoignage. Comme l’ont<br />

dit Jean-P<strong>au</strong>l II et Benoît XVI, le monde d’<strong>au</strong>jourd’hui<br />

a un grand besoin de témoins. Pas tellement de<br />

maîtres, mais de témoins. Ne parlez pas trop, mais<br />

parlez par toute votre vie : la cohérence de vie, précisément,<br />

la cohérence de vie ! Une cohérence de vie qui<br />

consiste à vivre le christianisme comme une rencontre<br />

avec Jésus qui m’amène <strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres, et non comme un<br />

fait social. Socialement, nous sommes comme ça, nous<br />

sommes des chrétiens, renfermés sur nous-mêmes. Non,<br />

pas cela ! Le témoignage ! »<br />

LE PAPE FRANÇOIS FAIT DES MIRACLES.<br />

Troisième question : « COMMENT VIVRE UNE ÉGLISE<br />

“ PAUVRE POUR LES PAUVRES ” ? »<br />

« Je repars du témoignage. Avant tout, la principale<br />

contribution que nous puissions apporter est de vivre<br />

l’Évangile. L’Église n’est pas un mouvement politique,<br />

ni une structure bien organisée : ce n’est pas cela.<br />

Nous ne sommes pas une ONG, et quand l’Église devient<br />

une ONG, elle perd son sel, elle n’a plus de goût,<br />

elle n’est qu’une organisation vide. Et sur ce plan,<br />

soyez malins, car le diable nous trompe avec le danger<br />

de l’efficacité. Prêcher Jésus est une chose, l’efficacité,<br />

être efficaces, en est une <strong>au</strong>tre. Non, il s’agit<br />

d’une <strong>au</strong>tre valeur. <strong>La</strong> valeur de l’Église, fondamentalement,<br />

est de vivre l’Évangile et de témoigner de<br />

notre foi. L’Église est le sel de la terre, la lumière du<br />

monde, elle est appelée à rendre présent dans la société<br />

le levain du Roy<strong>au</strong>me de Dieu et elle le fait<br />

avant tout par son témoignage, le témoignage de<br />

l’amour fraternel, de la solidarité, du partage.<br />

« Quand on entend dire que la solidarité n’est pas<br />

une valeur, mais un “ comportement primaire ” qui doit<br />

disparaître... cela ne va pas ! On pense à une efficacité<br />

purement mondaine. Les temps de crise, comme<br />

ceux que nous vivons actuellement – mais tu as dit<br />

avant que nous étions “ dans un monde de mensonges ”,<br />

– ce temps de crise, attention, ne consiste pas en une<br />

crise uniquement économique ; non, c’est une crise<br />

culturelle. C’est une crise de l’homme : ce qui est en<br />

crise, c’est l’homme ! Et ce qui peut être détruit, c’est<br />

l’homme ! Mais l’homme est l’image de Dieu ! C’est<br />

pourquoi c’est une crise profonde ! En ce temps de<br />

crise, nous ne pouvons pas ne nous préoccuper que<br />

de nous-mêmes, nous enfermer dans la solitude, dans<br />

le découragement, dans un sentiment d’impuissance<br />

devant les problèmes. Ne vous enfermez pas, je vous<br />

en prie ! C’est un danger : nous nous enfermons dans<br />

nos paroisses, entre amis, dans nos mouvements, avec<br />

ceux qui pensent comme nous...<br />

« Mais vous savez ce qui se passe ? Quand l’Église<br />

reste fermée, elle tombe malade.<br />

« Imaginez une pièce fermée pendant un an : quand<br />

on y rentre, il y a une odeur d’humidité, il y a be<strong>au</strong>coup<br />

de choses qui sont en m<strong>au</strong>vais état. Une Église<br />

fermée, c’est la même chose : c’est une Église<br />

malade. L’Église doit sortir d’elle-même. Où ça ? Vers<br />

les périphéries existentielles, quelles qu’elles soient,<br />

mais sortir. Jésus nous dit : “ Allez dans le monde<br />

entier ! Allez ! Prêchez ! Rendez témoignage à l’Évangile<br />

! ” (cf. Mc 16, 15) Mais que se passe-t-il si l’on<br />

sort de soi-même ? Il peut arriver ce qui peut arriver<br />

à toute personne qui sort de chez elle et qui va dans<br />

la rue : un accident. Mais je vous dis : je préfère mille<br />

fois une Église accidentée, exposée <strong>au</strong>x accidents, à<br />

une Église malade parce qu’elle ne sort pas ! Allez<br />

dehors, sortez !<br />

« Pensez <strong>au</strong>ssi à ce que dit l’Apocalypse. Elle dit<br />

quelque chose de be<strong>au</strong> : Jésus est à la porte et il<br />

appelle pour entrer dans notre cœur (cf. Ap 3, 20).<br />

C’est le sens de l’Apocalypse. Mais posez-vous cette<br />

question : combien de fois Jésus est-il à l’intérieur, et<br />

il frappe à la porte pour sortir, et nous ne le laissons<br />

pas sortir, à c<strong>au</strong>se de nos sécurités, parce que nous<br />

sommes si souvent enfermés dans des structures caduques<br />

qui ne servent qu’à nous rendre esclaves, et non<br />

à faire de nous des enfants libres de Dieu ? Dans cette<br />

“ sortie ”, il est important d’aller à la rencontre ; pour<br />

moi, ce mot est très important : la rencontre avec les


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<strong>au</strong>tres. Pourquoi ? Parce que la foi est une rencontre<br />

avec Jésus, et nous devons faire nous <strong>au</strong>ssi ce que fait<br />

Jésus : rencontrer les <strong>au</strong>tres. Nous vivons une culture<br />

de l’affrontement, une culture de la fragmentation, une<br />

culture dans laquelle je jette ce qui ne me sert pas, la<br />

culture de l’élimination. Mais sur ce point, je vous<br />

invite à penser – et c’est un aspect de la crise – <strong>au</strong>x<br />

personnes âgées qui sont la sagesse d’un peuple, <strong>au</strong>x<br />

petits enfants... la culture de l’élimination ! Mais nous<br />

devons aller à la rencontre et nous devons créer, avec<br />

notre foi, une “ culture de la rencontre ”, une culture<br />

de l’amitié, une culture où nous trouvons des frères,<br />

où nous pouvons parler <strong>au</strong>ssi avec ceux qui ne pensent<br />

pas comme nous, avec ceux qui ont une <strong>au</strong>tre foi, qui<br />

n’ont pas la même foi. Ils ont tous quelque chose en<br />

commun avec nous : ils sont l’image de Dieu, ils sont<br />

enfants de Dieu. Aller à la rencontre de tous, sans<br />

négocier notre appartenance. Et un <strong>au</strong>tre aspect important<br />

: avec les p<strong>au</strong>vres. Si nous sortons de nousmêmes,<br />

nous trouvons la p<strong>au</strong>vreté.<br />

« Aujourd’hui, et cela fait mal <strong>au</strong> cœur de le dire,<br />

<strong>au</strong>jourd’hui, trouver un clochard mort de froid n’est<br />

pas une nouvelle. Aujourd’hui, la nouvelle, c’est, peutêtre,<br />

le scandale. Un scandale : ah ! ça, c’est une<br />

nouvelle ! Aujourd’hui, penser que tant d’enfants n’ont<br />

pas à manger n’est pas une nouvelle. C’est grave,<br />

c’est très grave ! Nous ne pouvons pas rester à ne rien<br />

faire ! Mais, c’est comme ça. Nous ne pouvons pas<br />

devenir des chrétiens amidonnés, ces chrétiens trop<br />

bien élevés qui discutent de théologie en prenant le<br />

thé, tranquillement. Non ! Nous devons devenir des<br />

chrétiens courageux et aller à la recherche de ceux<br />

qui sont justement la chair du Christ, ceux qui sont la<br />

chair du Christ !.<br />

« Lorsque je vais confesser – pour le moment je ne<br />

peux pas, parce que pour sortir confesser... d’ici, on<br />

ne peut pas sortir, mais ça, c’est<br />

un <strong>au</strong>tre problème – quand j’allais confesser dans<br />

mon diocèse précédent, il y avait des personnes qui<br />

venaient et je leur posais toujours la même question :<br />

“ Mais vous faites l’<strong>au</strong>mône ? ” – “ Oui, père ! ” – “ Ah,<br />

bien, bien. ” Et je posais deux <strong>au</strong>tres questions : “ Ditesmoi,<br />

quand vous faites l’<strong>au</strong>mône, vous regardez dans les<br />

yeux celui ou celle à qui vous donnez votre <strong>au</strong>mône ? ”<br />

– “ Ah, je ne sais pas, je ne m’en suis pas aperçu. ”<br />

Deuxième question : “ Et quand vous faites l’<strong>au</strong>mône,<br />

vous touchez la main de celui à qui vous donnez votre<br />

<strong>au</strong>mône, ou vous lui jetez la pièce ? ”<br />

« C’est cela le problème : la chair du Christ, toucher<br />

la chair du Christ, prendre sur nous cette douleur<br />

pour les p<strong>au</strong>vres. <strong>La</strong> p<strong>au</strong>vreté, pour nous, chrétiens,<br />

n’est pas une catégorie sociologique ou philosophique<br />

ou culturelle ; non, c’est une catégorie théologique. Je<br />

dirais même que c’est peut-être la première catégorie,<br />

parce que ce Dieu, le Fils de Dieu, s’est abaissé, s’est<br />

fait p<strong>au</strong>vre pour marcher avec nous sur notre route. Et<br />

ceci est notre p<strong>au</strong>vreté : la p<strong>au</strong>vreté de la chair du<br />

Christ, la p<strong>au</strong>vreté que nous a apportée le Fils de<br />

Dieu par son incarnation. Une Église p<strong>au</strong>vre pour les<br />

p<strong>au</strong>vres commence par aller vers la chair du Christ. »<br />

Et il l’a fait le jour de la Pentecôte, dimanche<br />

matin, 19 mai, place Saint-Pierre, près de l’Arc des<br />

cloches, après la Messe, en imposant les mains à un<br />

jeune homme en f<strong>au</strong>teuil roulant, accompagné d’un<br />

prêtre, le Père Juan Rivas, qui prononça le mot « exorcisme<br />

» en s’adressant <strong>au</strong> Pape.<br />

Celui-ci a posé une main, puis les deux sur la tête<br />

du jeune homme, en priant avec un profond recueillement.<br />

Le jeune s’est alors détendu en se laissant aller<br />

contre le dossier du f<strong>au</strong>teuil, <strong>au</strong> lieu d’être tendu en<br />

avant, comme le montrent les images et le son diffusés<br />

par la télévision <strong>catholique</strong> italienne.<br />

Une controverse confuse s’en est suivie. Non le<br />

Saint-Père n’a pas prononcé d’exorcisme, a déclaré le<br />

Père Federico Lombardi, directeur de la salle de presse<br />

du Saint-Siège. « Mais, comme il le fait souvent pour<br />

les personnes malades et souffrantes qu’on lui présente,<br />

il a simplement eu l’intention de prier pour une<br />

personne souffrante qui lui avait été présentée. »<br />

Et il a été ex<strong>au</strong>cé. Nous verrons le pape François<br />

faire des miracles.<br />

Le lundi de Pentecôte, 20 mai, dans son homélie, le<br />

Pape a médité sur l’Évangile du jour, où Jésus se<br />

lamente de l’incrédulité des disciples, qui ne parviennent<br />

pas à guérir un enfant possédé : « Tout est possible<br />

pour celui qui croit », dit-il (Mc 9, 14-29).<br />

Pour le pape François, cette « incrédulité », c’est<br />

« le cœur qui ne s’ouvre pas, le cœur fermé, le cœur<br />

qui veut tout avoir sous contrôle », c’est-à-dire le cœur<br />

qui ne « donne pas le contrôle des choses à Jésus ».<br />

Tout croyant a « une part d’incrédulité en lui », a-t-il<br />

fait observer.<br />

« Rien ne peut faire sortir cette espèce-là, s<strong>au</strong>f la<br />

prière », explique <strong>au</strong>ssi Jésus dans l’Évangile. C’est<br />

donc « par une prière forte, une prière humble et forte,<br />

que Jésus peut faire le miracle ». En d’<strong>au</strong>tres termes, a<br />

précisé le Pape, « la prière pour demander un miracle,<br />

pour demander une action extraordinaire, doit être une<br />

prière impliquée », qui « implique » celui qui intercède.<br />

Cette prière « courageuse », a expliqué le pape<br />

François, n’est pas « une prière de politesse », comme<br />

lorsqu’on dit : « Je prierai pour toi » et qui se réduit<br />

finalement à « un NOTRE PÈRE, un JE VOUS SALUE<br />

MARIE » et puis « on oublie ».<br />

« Non, a-t-il poursuivi, il f<strong>au</strong>t une prière courageuse,<br />

comme celle d’Abraham qui luttait avec le<br />

Seigneur pour s<strong>au</strong>ver la cité, comme celle de Moïse<br />

qui avait les mains levées et se fatiguait, en priant<br />

le Seigneur ; comme celle de tant de personnes, de<br />

tant de personnes qui ont la foi et qui prient avec<br />

la foi. »<br />

Le pape a raconté qu’en Argentine, une enfant de


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 12<br />

sept ans était condamnée par les médecins qui ne lui<br />

donnaient plus que quelques heures à vivre. Le père,<br />

« homme de foi », est « devenu comme fou et, dans cette<br />

folie », a pris un <strong>au</strong>tobus pour le sanctuaire marial de<br />

Lujan, à 70 km de là.<br />

« Arrivé à 9 heures du soir, tout était fermé. Et il a<br />

commencé à prier la Vierge, les mains sur la grille en<br />

fer. Et il priait, il priait, il pleurait, il priait... et il<br />

resté là toute la nuit. Mais cet homme luttait : il luttait<br />

avec Dieu, pour la guérison de son enfant. À 6 heures<br />

du matin, il a repris le bus et est arrivé à l’hôpital à<br />

9 heures. Il a trouvé sa femme en larmes. Et il a pensé<br />

<strong>au</strong> pire : “ Mais que s’est-il passé ? ” – “ Les docteurs<br />

m’ont dit que la fièvre était tombée, qu’elle respire bien,<br />

qu’il n’y a rien ! Elle sortira dans deux jours, mais ils ne<br />

savent pas ce qui s’est passé ! ”<br />

« Cela arrive encore, non ? Les miracles existent<br />

encore ! » a poursuivi le Pape. Mais pour obtenir des<br />

miracles, il f<strong>au</strong>t prier « avec le cœur » : « une prière<br />

courageuse, qui lutte pour arriver à ce miracle ».<br />

En résumé, « la prière fait des miracles, mais nous<br />

devons croire ! » a insisté le pape François, invitant à<br />

« prier avec le cœur » à l’intention de ceux « qui souffrent<br />

dans les guerres, pour tous les réfugiés, tous les<br />

drames actuels », mais <strong>au</strong>ssi à réciter cette prière : « Je<br />

crois, Seigneur, aide mon incrédulité. »<br />

LA PENSÉE DU MARTYRE.<br />

Revenons <strong>au</strong>x questions du 18 mai. Quatrième<br />

question :<br />

« COMMENT AIDER NOS FRÈRES MARTYRS ? CEUX QUI<br />

RISQUENT LEUR VIE POUR ALLER À LA MESSE ? »<br />

« Pour annoncer l’Évangile, il f<strong>au</strong>t deux vertus : le<br />

courage et la patience. Les chrétiens qui souffrent sont<br />

dans l’Église de la patience. Ils souffrent et il y a plus<br />

de martyrs <strong>au</strong>jourd’hui que dans les premiers <strong>siècle</strong>s<br />

de l’Église : plus de martyrs ! Ce sont nos frères et<br />

sœurs. Ils souffrent ! Eux, ils portent leur foi jusqu’<strong>au</strong><br />

martyre. Mais le martyre n’est jamais un échec ; le<br />

martyr est le degré le plus élevé du témoignage que<br />

nous avons à rendre. Nous sommes en chemin vers le<br />

martyre, vers de petits martyres : renoncer à ceci, faire<br />

cela... mais nous sommes en chemin. Et eux, les<br />

p<strong>au</strong>vres, ils donnent leur vie, mais ils la donnent,<br />

comme nous l’avons entendu à propos de la situation<br />

<strong>au</strong> Pakistan, par amour pour Jésus, en témoignant de<br />

Jésus. Un chrétien doit toujours avoir cette attitude de<br />

douceur, d’humilité, c’est précisément l’attitude qui est<br />

la leur, faisant confiance à Jésus et s’abandonnant à<br />

lui. Il f<strong>au</strong>t préciser que bien souvent ces conflits n’ont<br />

pas une origine religieuse ; souvent il y a d’<strong>au</strong>tres<br />

c<strong>au</strong>ses, de type social ou politique et malheureusement,<br />

les appartenances religieuses sont utilisées<br />

comme de l’huile qu’on met sur le feu. Un chrétien<br />

doit toujours savoir répondre <strong>au</strong> mal par le bien,<br />

même si c’est souvent difficile. »<br />

Même si c’est par les armes : comme les gardes<br />

suisses sont prêts à le faire <strong>au</strong> prix de leur propre vie,<br />

ou comme nos soldats le font héroïquement <strong>au</strong> Mali.<br />

Les uns et les <strong>au</strong>tres <strong>au</strong> service de « la liberté religieuse<br />

pour tous » <strong>au</strong> sens... constantinien de la chose,<br />

célébrée par le pape François à l’occasion du mille<br />

sept centième anniversaire de l’édit de Milan par lequel<br />

l’empereur romain Constantin a mis fin à trois<br />

<strong>siècle</strong>s de persécution et a fondé la civilisation chrétienne,<br />

n’en déplaise <strong>au</strong> concile Vatican II !<br />

Le Pape nous a ensuite invités à un examen de<br />

conscience en avertissant : « Je ne vais pas vous<br />

demander, là, de lever la main : “ Est-ce que vous<br />

priez tous les jours pour nos frères persécutés ? Tous<br />

les jours ! ” » Ils sont « l’Église de la patience »,<br />

entrée « en patience ».<br />

« N’oubliez pas » : l’Église ne doit « rien avoir d’une<br />

Église fermée » mais doit être « une Église qui va <strong>au</strong>x<br />

périphéries de l’existence », « dehors », et « en avant »,<br />

a-t-il conclu à l’adresse de cette foule réunie à l’invitation<br />

de Benoît XVI il y a plusieurs mois, précisons-le,<br />

et représentant une « galaxie » bigarrée de tous les<br />

« nouve<strong>au</strong>x mouvements » nés de l’échec du Concile à<br />

faire descendre le Saint-Esprit dans une « nouvelle Pentecôte<br />

», selon la promesse de Jean XXIII.<br />

Le lendemain, dimanche de la Pentecôte, 19 mai, le<br />

pape François les a invités à un examen de conscience<br />

: « Demandons-nous, a-t-il lancé, si nous avons<br />

tendance à nous enfermer en nous-mêmes, dans notre<br />

groupe. » Et il a précisé : « L’Esprit-Saint nous fait<br />

entrer dans le mystère du Dieu vivant et nous s<strong>au</strong>ve du<br />

danger d’une Église gnostique. »<br />

L’ŒUVRE DE GEORGES DE NANTES<br />

AU SERVICE DU PAPE FRANÇOIS, BON PASTEUR UNIVERSEL<br />

Dans son bilan du pontificat de Jean-P<strong>au</strong>l I er , en<br />

octobre 1978 (CRC n o 134), notre Père écrivait : « Nous<br />

n’avons <strong>au</strong>cunement l’intention de faire les hypocrites<br />

en donnant pour réglées par le Pape défunt, et en notre<br />

faveur ! des questions toujours pendantes où il nous<br />

était formellement opposé. Plutôt que de le tirer à<br />

nous, en vérité c’est nous qui nous sommes trouvés<br />

tirés à lui et changés. Nous l’avouons. » Il n’en reste<br />

pas moins vrai que « Jean-P<strong>au</strong>l I er , <strong>au</strong>x appl<strong>au</strong>dissements<br />

de toute l’Église, a rest<strong>au</strong>ré cette religion de<br />

toujours que nous défendions à contre-courant depuis<br />

vingt ans, et ouvertement ! contre la toute-puissante<br />

révolution dite conciliaire et postconciliaire ».<br />

Nous pouvons évidemment dire la même chose,<br />

trente-cinq ans plus tard, du pape François qui ne<br />

craint pas de nous encourager à marcher « à contre-


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 13<br />

courant » ! comme il y exhortait les jeunes confirmands<br />

le dimanche 28 avril :<br />

« Demeurez solides sur le chemin de la foi avec une<br />

ferme espérance dans le Seigneur. Là se trouve le<br />

secret de notre chemin ! Lui, le Saint-Esprit, nous<br />

donne le courage d’aller à contre-courant. Écoutez bien,<br />

les jeunes : aller à contre-courant, cela fait du bien <strong>au</strong><br />

cœur, mais il nous f<strong>au</strong>t du courage pour aller à contrecourant<br />

et Lui nous donne ce courage ! Il n’y a pas de<br />

difficultés, d’épreuves, d’incompréhensions qui doivent<br />

nous faire peur si nous demeurons unis à Dieu comme<br />

les sarments sont unis à la vigne, si nous ne perdons<br />

pas l’amitié avec lui, si nous lui faisons toujours plus<br />

de place dans notre vie. Cela <strong>au</strong>ssi et surtout si nous<br />

nous sentons p<strong>au</strong>vres, faibles, pécheurs, parce que<br />

Dieu donne force à notre faiblesse, richesse à notre<br />

p<strong>au</strong>vreté, conversion et pardon à notre péché. Il est si<br />

miséricordieux le Seigneur : si nous allons à lui, il<br />

nous pardonne toujours. Ayons confiance dans l’action<br />

de Dieu ! »<br />

“ <strong>Contre</strong>-courant ”, <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong>... même combat !<br />

« C’est un fait, continuait notre Père, la pratique de<br />

Jean-P<strong>au</strong>l I er allait en ce sens d’une renaissance<br />

purement <strong>catholique</strong> et, toute l’Église suivant, notre<br />

parfaite communion fraternelle serait rétablie sur ce<br />

terrain de l’essentielle Vie, Voie et Vérité qui ne change<br />

pas, qui ne peut changer et qui nous est commune à<br />

tous. Était-ce une simple résurgence de la Tradition,<br />

était-ce déjà une contre-réforme ? Les théologiens peuvent<br />

en débattre et l’avenir le dira. Mais enfin, l’Église<br />

ressuscitait, l’intégrisme allait se résorber de lui-même<br />

et le progressisme déjà perdait sa masse de manœuvre,<br />

réduit à une caste d’intellectuels et de trublions<br />

misérables.<br />

« Reste cependant qu’entre Lui et nous, entre l’héritage<br />

de Jean et P<strong>au</strong>l qu’il déclarait assumer et notre<br />

ligue de <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> demeurait une contradiction<br />

irréductible sur des points de foi, précis, importants.<br />

Nous ne pourrons jamais accepter le prétendu droit<br />

social de l’homme à la liberté religieuse, pas plus que<br />

le culte de l’Homme proclamé par P<strong>au</strong>l VI à la face de<br />

toute l’Église le 7 décembre 1965, pour la clôture du<br />

Concile. »<br />

Nous sommes <strong>au</strong>jourd’hui dans une situation similaire.<br />

Il est indubitable que le pape François suscite<br />

une renaissance purement <strong>catholique</strong>, il est indubitable<br />

que les progressistes sont réduits à une caste d’intellectuels<br />

et de trublions misérables. Et s’il est moins<br />

évident que l’intégrisme se résorbe de lui-même, il est<br />

er indéniable que, comme sous Jean-P<strong>au</strong>l I , une contradiction<br />

irréductible demeure sur des points précis et<br />

importants, notamment sur la liberté religieuse, même<br />

si nous ne pouvons qu’adhérer à l’élan apostolique que<br />

le Saint-Père veut imprimer à l’Église.<br />

Son homélie de sa messe à Sainte-Marthe, le<br />

22 mai, en offre un bon exemple. Le pape François y<br />

explique la nécessité de créer une « culture de la rencontre<br />

qui est à la base de la paix ».<br />

Cette formule, qu’il a employée déjà plusieurs fois,<br />

semble caractériser sa praxis. Il ne veut pas que<br />

l’Église s’enferme sur elle-même, que le Pasteur ferme<br />

sa porte. Il f<strong>au</strong>t non seulement être ouvert à tous, mais<br />

<strong>au</strong>ssi aller <strong>au</strong>-devant de tous, à la « périphérie existentielle<br />

» de l’Église.<br />

Cela nous rappelle évidemment le “ dialogue ” dont<br />

P<strong>au</strong>l VI fit le maître mot de son pontificat avec l’encyclique<br />

ECCLESIAM SUAM du 6 août 1964, et surtout la<br />

“ rencontre ” préconisée dans son discours de clôture<br />

du Concile : « <strong>La</strong> religion du Dieu qui s’est fait<br />

homme s’est rencontrée avec la religion (car c’en est<br />

une) de l’homme qui se fait Dieu. Qu’est-il arrivé ?<br />

Un choc, une lutte, un anathème ? Cela pouvait<br />

arriver ; mais cela n’a pas eu lieu. <strong>La</strong> vieille histoire<br />

du Samaritain a été le modèle de la spiritualité du<br />

Concile. Une sympathie sans bornes l’a envahi tout<br />

entier. <strong>La</strong> découverte des besoins humains – et ils sont<br />

d’<strong>au</strong>tant plus grands que le fils de la terre se fait plus<br />

grand – a absorbé l’attention de ce Synode. Reconnaissez-lui<br />

<strong>au</strong> moins ce mérite, vous, humanistes<br />

modernes, qui renoncez à la transcendance des choses<br />

suprêmes, et sachez reconnaître notre nouvel humanisme<br />

: nous <strong>au</strong>ssi, nous plus que quiconque, nous<br />

avons le culte de l’Homme. »<br />

À la réflexion, la continuité entre P<strong>au</strong>l VI et<br />

François n’est que superficielle. En effet, il est évident<br />

que, pour le pape François, « la vieille histoire du<br />

Samaritain » n’offre pas une « spiritualité », mais une<br />

figure de Notre-Seigneur, « modèle unique » qu’il f<strong>au</strong>t<br />

imiter. Ce n’est pas « la rencontre » de « deux religions<br />

», c’est l’évêque, le prêtre, le chrétien qui doivent<br />

aller <strong>au</strong>-devant, non pas des hommes qui se dressent<br />

contre Dieu, mais des blessés de la vie. Pas de<br />

“ culte de l’homme ” chez le pape François, mais une<br />

immense compassion pour les hommes malheureux<br />

<strong>au</strong>xquels il f<strong>au</strong>t annoncer la bonne nouvelle d’une libération<br />

du poids de leurs péchés.<br />

Pour le Saint-Père, cette culture de la rencontre est<br />

donc imitation du Christ allant à la rencontre des pécheurs<br />

pour les s<strong>au</strong>ver.<br />

Mais pour les s<strong>au</strong>ver de quoi ? Le pape François<br />

ne le dit jamais. Est-ce une influence d’Urs von<br />

Balthasar ou du Père de Lubac ? Est-ce un souci de<br />

ne pas brusquer ses <strong>au</strong>diteurs ? Toujours est-il qu’il<br />

n’a encore jamais employé le mot « enfer ». Il a parlé<br />

du Ciel, peu il est vrai, mais il n’a jamais parlé de<br />

l’enfer. À cette carence, universelle depuis le concile<br />

Vatican II, Notre-Dame de Fatima a remédié par<br />

avance, l’ayant montré <strong>au</strong>x pastoure<strong>au</strong>x. Maintenant<br />

que le pontificat lui a été consacré, le 13 mai dernier,<br />

elle le montrera <strong>au</strong> pape François en temps opportun<br />

pour achever d’en faire un vrai imitateur de son


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 14<br />

Divin Fils, obsédé par l’horreur de l’enfer <strong>au</strong>quel il<br />

veut arracher les p<strong>au</strong>vres pécheurs.<br />

Comme notre Père l’expliquait à l’encontre d’Urs<br />

von Balthasar : « Ce que nous savons de notre Dieu,<br />

Créateur de l’enfer, c’est qu’il n’y veut personne et<br />

qu’il a supplié son Fils, <strong>au</strong> temps de l’agonie, de<br />

s’exposer fidèlement à sa cruelle Passion pour en s<strong>au</strong>ver<br />

tous les hommes. Tel est notre be<strong>au</strong> Dieu, notre<br />

Bon Dieu (...). Nous avons bien dit : Dieu veut s<strong>au</strong>ver<br />

tous les hommes. Dieu n’aime pas condamner. Il ne<br />

trouve <strong>au</strong>cune be<strong>au</strong>té à l’enfer ! <strong>La</strong> pente glissante de<br />

cette théologie péguyste de l’espérance, la tentation de<br />

facilité serait d’en venir à oublier la foi exacte, précise,<br />

tragique qui la fonde. D’en arriver à conclure que<br />

Dieu, mettant toute sa Sagesse et sa Puissance <strong>au</strong><br />

service de son Amour, donc à notre service, il n’y a<br />

plus de Loi ni de Justice qui subsiste à l’encontre. Et<br />

donc plus d’enfer (...). Le tragique de la vie présente<br />

<strong>au</strong>rait disparu avec le tragique de la Vie éternelle. Les<br />

bons et les méchants confondus dans une même<br />

récompense et une même béatitude, ce seraient la vérité<br />

et l’erreur, le bien et le mal qui dès maintenant<br />

perdraient leur différence. <strong>La</strong> lutte n’<strong>au</strong>rait plus d’objet<br />

et la Croix de Notre Seigneur Jésus-Christ serait un<br />

épisode absurde de la comédie humaine. » (LA MISÈRE<br />

DE DIEU in CRC n o 128, avril 1978, p. 14)<br />

Mais revenons à l’homélie du 22 mai :<br />

« Selon Radio-Vatican, rapporte l’agence Zenit, le<br />

Pape s’est arrêté sur l’Évangile du jour, où les Apôtres<br />

veulent empêcher quelqu’un qui ne suit pas Jésus de<br />

faire du bien : Ils disent, a rappelé le Pape, “ S’il n’est<br />

pas des nôtres, il ne peut pas faire le bien. S’il n’est<br />

pas de notre parti, il ne peut faire le bien. ” Et Jésus<br />

les corrige : “ Ne l’empêchez pas – <strong>La</strong>issez-le faire le<br />

bien. ” » (Mc 9, 38-40)<br />

« “ Les disciples étaient un peu intolérants ”, a-t-il<br />

fait observer, et étant persuadés “ d’avoir la vérité ”,<br />

ils pensaient que “ tous ceux qui n’ont pas la vérité, ne<br />

peuvent faire le bien ”. Mais “ c’était f<strong>au</strong>x ” et Jésus<br />

“ élargit l’horizon ”, a-t-il poursuivi. »<br />

Quand le Pape parle ici de “ faire le bien ”, il ne<br />

pense certainement pas <strong>au</strong>x “ bonnes œuvres ”, <strong>au</strong>x<br />

“ œuvres salutaires ” que la grâce parfait et rend agréables<br />

à Dieu. Le Pape pense tout simplement à l’application<br />

de la loi morale.<br />

Il est remarquable que le Saint-Père donne, non pas<br />

la raison humaine, ni le droit naturel, comme fondement<br />

à cette possibilité et à cette obligation pour tout<br />

homme de faire le bien, mais sa relation à Dieu. Il<br />

affirme que tous les hommes peuvent et donc doivent<br />

faire le bien parce qu’ils sont créatures de Dieu et<br />

qu’ils sont aimés de Lui <strong>au</strong> point que Jésus est mort<br />

sur la Croix pour les s<strong>au</strong>ver tous :<br />

« En réalité, a-t-il expliqué, “ la racine de cette<br />

possibilité de faire le bien, que nous avons tous ” est<br />

“ dans la création ” : “ Le Seigneur nous a créés à son<br />

image et ressemblance, et nous sommes images du<br />

Seigneur, et Lui fait le bien et nous avons tous dans le<br />

cœur ce commandement : fais le bien et ne fais pas le<br />

mal. Tous. ”<br />

« Y compris, a ajouté le Pape, “ les non-<strong>catholique</strong>s<br />

” : tous “ peuvent faire le bien ” et non seulement<br />

le peuvent mais <strong>au</strong>ssi “ doivent ” le faire, car tous ont<br />

“ ce commandement en eux-mêmes ”.<br />

« Très Saint Père, même les athées ?<br />

– Oui, eux <strong>au</strong>ssi. Tous ! Le Seigneur a s<strong>au</strong>vé “ tous<br />

les hommes ” par le sang du Christ, et ils deviennent<br />

“ enfants de Dieu de première catégorie ”. »<br />

Le Pape veut dire que tous sont enfants de Dieu en<br />

droit, car c’est le baptême qui nous fait enfants de<br />

Dieu, mais par sa mort sur la croix, tous les hommes<br />

sont appelés à cet état, il y a donc dans le cœur de<br />

Dieu, avant même que nous soyons baptisés, un amour<br />

pour les hommes. « Dieu nous a aimés alors que nous<br />

étions encore pécheurs », dit saint P<strong>au</strong>l. Le Saint-Père<br />

parle de la primavera : la miséricorde est la fleur<br />

d’amandier de Jérémie qui annonce le printemps.<br />

« Créés à l’image de Dieu et s<strong>au</strong>vés par le Christ,<br />

les hommes ont “ tous le devoir de faire le bien ”,<br />

devoir qui est <strong>au</strong>ssi “ un be<strong>au</strong> chemin vers la paix ”,<br />

a-t-il déclaré : si chacun en effet “ fait du bien <strong>au</strong>x<br />

<strong>au</strong>tres ”, les hommes peuvent “ se rencontrer là, en<br />

faisant le bien ”.<br />

« Le bien devient terrain de rencontre et permet<br />

“ lentement, peu à peu ”, de construire “ cette culture<br />

de la rencontre ”.<br />

« Le Pape ajoute à l’attention des athées : “ Fais le<br />

bien : nous nous rencontrerons là ! ” “ Faire le bien<br />

n’est pas une question de foi, c’est un devoir, une<br />

carte d’identité que notre Père a donnée à tous, car il<br />

a fait l’homme à son image et ressemblance. Et Il fait<br />

le bien, toujours. ” »<br />

Cette manière, un peu déroutante pour notre traditionalisme,<br />

rejoint pourtant l’enseignement de notre<br />

Père dans son cours de MORALE TOTALE donné à la<br />

Mutualité en 1985-1986.<br />

Dans les quatre premières conférences de cette série,<br />

notre Père montrait que la morale était fondée non<br />

pas sur une vue abstraite de la nature humaine, mais<br />

sur notre relation avec Dieu créateur, plus exactement<br />

sur ce qu’il appelle la relation d’origine ou constituante<br />

de Dieu à nous. Ce Dieu qui nous pose dans<br />

l’existence fait alliance avec nous, multiplie ses bienfaits,<br />

et attend de nous une réponse.<br />

Un “ théologien ” objecta : seuls les mystiques peuvent<br />

entrer dans une telle morale. Mais comment<br />

l’enseigner dans les écoles à tous les enfants, si on<br />

ne commence pas par leur faire la démonstration de<br />

ce qu’est le bien et de ce qu’est le mal ? Autrement<br />

dit, la morale “ totale ” néglige totalement la morale


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 15<br />

“ naturelle ”, universelle et nécessaire, fruit d’une définition<br />

rationnelle de la nature humaine. Quand bien<br />

même l’homme ne croirait plus en Dieu, il n’empêche<br />

que sa conscience lui indique où est le bien et<br />

où est le mal et l’obligation qu’il a de s’y conformer<br />

: « Il f<strong>au</strong>t faire le bien et éviter le mal. »<br />

Où est le bien, où est le mal ? Il n’y a pas de<br />

“ morale naturelle ” universelle pour répondre à la<br />

question. Notre Père doit bien constater que « cette<br />

morale naturelle, dont on nous dit<br />

qu’elle est tellement solide, nécessaire<br />

et universelle, qu’elle s’impose<br />

à tout homme même s’il n’est<br />

ni chrétien, ni juif, ni déiste, la<br />

vérité est qu’elle s’impose à condition<br />

que l’homme veuille bien<br />

l’accepter. » L’homme n’obéit à sa<br />

conscience que s’il le veut bien.<br />

Autrement dit, il en adapte les<br />

règles <strong>au</strong> bien qu’il poursuit !<br />

Commencer par fonder la morale<br />

sur une morale naturelle sans<br />

Dieu, laissant à chacun la liberté<br />

de s’y soumettre ou non, selon les<br />

règles qu’il s’est fixées, est précisément<br />

l’erreur qui conduit notre<br />

société actuelle à la licence absolue<br />

et à l’invasion de tous les<br />

vices, sans remède !<br />

« Le vice constitutif de cette<br />

morale naturelle, explique notre<br />

Père, consiste à déclarer l’homme<br />

objet premier de la morale qui est<br />

non seulement pour lui, mais par<br />

lui. » Selon cette présentation, c’est ma liberté qui est<br />

ma “ nature ” et c’est la loi de Dieu qui est son<br />

ennemie.<br />

Il est donc urgent d’opposer à cette morale naturelle<br />

athée une “ morale totale ”... fondée sur l’intuition<br />

de l’être :<br />

« Je n’ai pas besoin de la Bible, je n’ai pas encore<br />

fait intervenir l’Évangile de Jésus-Christ, et n’importe<br />

quel homme m’écoutant peut entrer dans cette intuition<br />

qui est une découverte de Dieu qui me crée.<br />

« Dieu est à la source de mon être et à la source de<br />

mon élan. Cet élan, je n’ai pas à le contredire, ma<br />

liberté y adhère. Il f<strong>au</strong>dra vraiment la révolte du péché,<br />

un désordre extérieur ; c’est le péché, la révolte, qui<br />

viennent après et qui sont contraires à ma “nature ”.<br />

« <strong>La</strong> morale fondamentale a pour berce<strong>au</strong> le don<br />

de la vie par Dieu. C’est ce mouvement par lequel<br />

Dieu donne l’être et avec l’être tous les biens, cette<br />

alliance première qui est fondamentale. Tout homme,<br />

ayant quelque réflexion, et éveillé par l’enseignement<br />

d’un maître, peut se sentir le fruit d’un don divin qui<br />

le pose dans sa substance même. »<br />

Giovanni, un enfant sarde de huit ans, devenu<br />

aveugle à la suite d’une tumeur <strong>au</strong><br />

cerve<strong>au</strong>, revenant d’un pèlerinage à Lourdes,<br />

offre <strong>au</strong> Pape un petit table<strong>au</strong> en braille de la<br />

grotte, exécuté sur les indications des assistants.<br />

Il se réfugie dans le giron du Pape.<br />

Notre Père ouvre la voie <strong>au</strong> pape François :<br />

« Oublions tous les désordres de l’œcuménisme, du<br />

syncrétisme moderne. Purifions nos esprits de toutes<br />

les tentations modernes, et nous comprendrons ce<br />

grand principe selon lequel Dieu veut s<strong>au</strong>ver tous les<br />

hommes, c’est-à-dire qu’un homme qui n’a jamais<br />

connu le Christ, qui n’a jamais connu la Bible, qui n’a<br />

eu <strong>au</strong>cune révélation particulière de Dieu peut, dans<br />

cette seule intuition de l’être, avoir ce contact avec<br />

Dieu par lequel il sait que Dieu lui<br />

donne l’être par amour et que son<br />

amour de lui-même est encore une<br />

étincelle de l’amour de Dieu pour<br />

lui, et entrer dans l’alliance avec<br />

Dieu.<br />

« Quand saint P<strong>au</strong>l nous dit<br />

que, pour être justifié, c’est-à-dire<br />

pour être introduit dans la grâce<br />

de Dieu, être invisiblement membre<br />

de l’Église et donc mériter d’aller<br />

<strong>au</strong> Ciel, il suffit que l’homme croie<br />

que Dieu existe et qu’il est rétributeur,<br />

saint P<strong>au</strong>l va par-dessus<br />

toutes les barricades du christianisme,<br />

du judaïsme, il atteint tous<br />

les hommes. Il dit : ces hommes,<br />

faisant réflexion sur la liberté de<br />

leur conscience, se trouvent un<br />

jour ou l’<strong>au</strong>tre pressés de choisir<br />

pour ce Dieu qui les crée, qui se<br />

révèle à eux comme leur Créateur,<br />

comme leur Bienfaiteur souverain,<br />

choisir de l’aimer ou choisir de<br />

s’émanciper et de se perdre.<br />

« Tous les hommes peuvent ainsi être s<strong>au</strong>vés, et<br />

plutôt que “ naturelle ”, ou “ surnaturelle ”, ma morale<br />

est religieuse. <strong>La</strong> première morale vraiment fondamentale,<br />

c’est un lien religieux qui l’établit. C’est Dieu<br />

qui a choisi, c’est Dieu qui m’a fait et c’est Dieu qui<br />

m’a posé ce choix entre les mains : accepte d’être<br />

mon fils, accepte d’être reconnaissant et de continuer<br />

à coopérer à mon dessein, et tu seras dans l’ordre<br />

du salut. »<br />

Dieu est premier : en espagnol argentin primerea !<br />

Et que l’on n’objecte pas que dans ces conditions,<br />

il n’est pas besoin d’être chrétien.<br />

<strong>La</strong> réponse est facile : « Ce qui était éclatant avant<br />

le péché originel, est obscur à nos intelligences, atténué,<br />

obscurci par le péché originel. Et cela est rendu<br />

plus difficile encore par toutes les f<strong>au</strong>sses philosophies<br />

et tous les désordres mor<strong>au</strong>x et intellectuels qui se<br />

sont répandus dans l’humanité. C’est pour venir en<br />

remède, en salut à cet homme qui se perdait dans le<br />

péché que Dieu lui parle, par Noé d’abord, par Abraham,<br />

par Moïse et enfin par Jésus-Christ, mais c’est<br />

toujours la même Alliance. »


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 16<br />

<strong>La</strong> morale totale enseignée par notre Père, théologien<br />

de la <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> <strong>catholique</strong> en nos temps<br />

d’apostasie, explique et justifie magistralement, <strong>au</strong> regard<br />

de la foi et de la science théologique, l’ouverture<br />

que le Saint-Père prône avec tant de zèle apostolique.<br />

Recevant la responsabilité du troupe<strong>au</strong> anémié par<br />

cinquante ans de “ culte de l’homme ”, il est en effet<br />

de première nécessité pour notre be<strong>au</strong> et bon Pasteur<br />

de le ramener à l’essentiel : l’Alliance divine. Ce qui<br />

ne peut se faire qu’en rappelant l’Amour miséricordieux<br />

de Dieu, en le lui montrant, pour ainsi dire<br />

en le lui mimant, et en l’ouvrant à tous les hommes<br />

appelés à en jouir par une adhésion sincère à l’Alliance<br />

divine. C’est à quoi le Saint-Père s’emploie<br />

avec une ardeur communicative, <strong>au</strong> risque d’ébranler<br />

le confort spirituel de certains fidèles.<br />

Toutefois, la “ morale totale ” ne fait pas moins<br />

comprendre que le droit social à la liberté religieuse,<br />

proclamé <strong>au</strong> concile Vatican II, est inacceptable.<br />

En effet, si Dieu a un tel amour passionné de<br />

tous les hommes <strong>au</strong> point d’offrir le salut à tous,<br />

moyennant une adhésion libre de leur part, il ne veut<br />

certes pas qu’on les force à pratiquer la vraie religion,<br />

mais il ne veut pas davantage que l’erreur<br />

jouisse des mêmes droits absolus et imprescriptibles<br />

que la vérité. Dieu ne peut vouloir la pratique publique<br />

et la propagation de f<strong>au</strong>sses religions alors<br />

qu’elles entravent l’adhésion des hommes à son dessein<br />

d’amour, même si des circonstances particulières,<br />

comme il s’en trouve <strong>au</strong>jourd’hui en grand<br />

nombre, peuvent justifier leur tolérance et leur protection<br />

par la législation des États pour le bien de<br />

la paix.<br />

Le Saint-Père peut donc bien réclamer la “ liberté<br />

religieuse ” pour tous <strong>au</strong> Proche-Orient et la fin des<br />

affrontements sanglants entre chiites, sunnites, salafistes<br />

et chrétiens, en les dénonçant comme absolument<br />

contraires <strong>au</strong> dessein d’amour divin ; mais ce<br />

serait renouveler l’erreur du Concile d’en conclure que<br />

toutes les religions et leurs cultes doivent être mis sur<br />

un pied d’égalité et jouir des mêmes droits, en toutes<br />

circonstances, partout et toujours.<br />

De la même manière, ce serait une erreur de conclure<br />

que c’est toujours « un blasphème de tuer <strong>au</strong><br />

nom de Dieu » (22 mai 2013). Il est des cas où notre<br />

Dieu miséricordieux fait obligation de protéger la<br />

veuve et l’orphelin, ou encore de défendre la patrie<br />

pour le bien commun contre les méchants qui, eux,<br />

n’hésitent pas à tuer. L’usage de la force publique, que<br />

l’Église peut réglementer, est tout à fait légitime et<br />

peut alors s’exercer <strong>au</strong> nom de Dieu lorsque le bien<br />

commun des nations chrétiennes et de la foi <strong>catholique</strong><br />

le réclame. <strong>La</strong> geste de sainte Jeanne d’Arc, guidée<br />

par ses Voix, est exemplaire de fermeté, mais <strong>au</strong>ssi de<br />

charité, soucieuse d’employer la force avec mesure,<br />

appelant à la conversion, priant pour le salut éternel<br />

des victimes sur lesquelles elle pleurait. Combien<br />

d’<strong>au</strong>tres saints, donnés en exemple par l’Église, ont<br />

dû ainsi utiliser la force armée par charité !<br />

Saint Pie V à Lépante...<br />

Enfin, la “ morale totale ” vient tout <strong>au</strong>ssi naturellement<br />

en renfort d’un <strong>au</strong>tre thème de l’action actuelle<br />

du Saint-Père : ses appels à « repenser la solidarité<br />

qui ne doit plus être conçue comme une simple assistance<br />

à l’égard des plus p<strong>au</strong>vres, mais comme la<br />

reconsidération globale d’un système » (24 mai ), conduisant<br />

à « créer une nouvelle mentalité politique et<br />

économique » émancipée de la tyrannie de l’argent<br />

(16 mai ).<br />

Toutefois, contrairement à ce qu’il recommande par<br />

fidélité à la prétendue “ doctrine sociale de l’Église ”,<br />

qui est seulement celle de ses prédécesseurs libér<strong>au</strong>x,<br />

la “ morale totale ” introduit une “ nouvelle mentalité ”,<br />

non plus fondée sur l’épanouissement de la personne<br />

humaine, mais sur celui de la famille, unique cellule<br />

fondamentale de la société.<br />

Car il est contradictoire de vouloir fonder une<br />

morale sociale sur les “ droits de l’homme ” comme<br />

revendications contre la société ; c’est envenimer le<br />

conflit entre exigences personnelles et nécessités du<br />

bien commun, que les plus forts résoudront toujours<br />

à leur avantage malgré tous les appels à la charité.<br />

L’inégalité demeure en réalité le principe de la vie<br />

sociale, et elle est protectrice lorsqu’elle est aménagée<br />

par des dispositions de la justice et les initiatives<br />

d’une libre charité.<br />

En effet, fonder la morale sur la personne définie<br />

par ses relations, à commencer par son cadre familial,<br />

c’est la disposer à la recherche du bien commun qui<br />

dépasse ses propres intérêts immédiats, mais pour lui<br />

faire atteindre un intérêt plus grand, plus h<strong>au</strong>t. C’est<br />

introduire la charité comme principe de vie sociale,<br />

capable d’inspirer quantité d’institutions vouées à la<br />

justice sociale avec un souci d’efficacité sans cesse<br />

renouvelé par la volonté de répondre <strong>au</strong>x nécessités<br />

d’une immense « réciprocité de services ».<br />

Notre Père nous a laissé la doctrine nécessaire pour<br />

soutenir les volontés et l’action du Saint-Père, véritable<br />

« homme de Dieu », à condition d’oser le prévenir des<br />

erreurs d’un Concile imprégné d’une f<strong>au</strong>sse métaphysique.<br />

Par sa piété, ses vertus, son <strong>au</strong>thentique souci<br />

du bien des âmes et des humbles, le pape François<br />

finira par reconnaître les funestes conséquences des<br />

principes répandus jusqu’en Amérique du Sud par le<br />

Concile. Guidé par le Cœur Immaculé de Marie, en qui<br />

Dieu veut renouveler son alliance par pure miséricorde,<br />

il pourra alors trouver dans l’œuvre de l’abbé de<br />

Nantes, notre Père, guidé lui <strong>au</strong>ssi par la même main<br />

immaculée, les remèdes dogmatiques et doctrin<strong>au</strong>x<br />

nécessaires à la renaissance de l’Église.<br />

frère Bruno de Jésus-Marie.


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 17<br />

« Le baptême de Jean, d’où était-il ? Du Ciel ou des<br />

hommes ? » (Mt 21, 25) <strong>La</strong> réponse s’impose : il était du<br />

Ciel ! Donc, la tradition de l’Ancien Testament, la tradition<br />

juive, deutéronomique, passe par le “ Moyen Testament<br />

”, par la commun<strong>au</strong>té du Baptiste. C’est pourquoi<br />

ses disciples, après l’avoir enterré, « allèrent informer<br />

Jésus » (Mt 14, 12), tellement il est clair que c’est lui<br />

qui prend la suite.<br />

« En vérité, en vérité, je vous le dis, parmi les enfants<br />

des femmes, il n’en a pas surgi de plus grand que Jean-<br />

Baptiste ; et cependant le plus petit dans le roy<strong>au</strong>me des<br />

Cieux est plus grand que lui. » (Mt 11, 11)<br />

« Le plus petit »... c’est lui, Jésus ! « né d’une<br />

femme » (Ga 4, 4).<br />

<strong>La</strong> tradition deutéronomique reçoit donc sa forme<br />

neuve et plénière dans une rénovation radicale apportée<br />

par Jésus. Elle se continue sans rupture, sous un mode<br />

humain et normal – tel que de Moïse à Josué – par le<br />

pouvoir donné à PIERRE : « Tu es Pierre, et sur cette<br />

pierre je bâtirai mon Église. » (Mt 16, 18)<br />

Jésus peut mourir selon son dessein rédempteur,<br />

l’œuvre survit telle que les ACTES nous la font connaître<br />

: nouve<strong>au</strong> peuple <strong>au</strong> sein d’Israël, proche du Temple,<br />

mais déjà centré sur un culte nouve<strong>au</strong>, celui du Christ,<br />

mort et ressuscité, qui est « plus que le Temple ».<br />

Le grand drame de la Croix a rendu définitive la<br />

scission entre le judaïsme de l’ancienne Alliance et la<br />

nouvelle commun<strong>au</strong>té de l’Évangile. Un fossé infranchissable<br />

oblige les croyants à opter entre les deux<br />

appartenances et à se dégager d’un peuple déicide pour<br />

embrasser la foi nouvelle en un Messie crucifié.<br />

On pouvait croire qu’un tel drame suffisait, qu’il<br />

rendait la situation parfaitement claire et qu’après la<br />

suite progressive des commun<strong>au</strong>tés “ pieuses ” qui aboutissent<br />

à celle du Baptiste, enfin apparaît comme nouvelle<br />

et distincte, l’Église du Christ.<br />

De fait, les cinq premiers chapitres des ACTES DES<br />

APÔTRES nous font assister à la croissance merveilleuse<br />

de la commun<strong>au</strong>té selon l’Esprit de Jésus, et à l’épanouissement<br />

des institutions établies par lui : les premiers<br />

chrétiens « se montraient assidus à l’enseignement<br />

des Apôtres, fidèles à la communion, à la fraction<br />

du pain et <strong>au</strong>x prières » (Ac 2, 42). <strong>La</strong> « fraction du<br />

pain » désigne la Sainte Eucharistie instituée par Jésus<br />

lors de la dernière Cène.<br />

Cette commun<strong>au</strong>té se distingue du peuple ancien et<br />

s’affirme dans la supériorité, la perfection de sa vie,<br />

sans hésitation ni division. D’un cœur unanime, elle se<br />

prépare à souffrir les inévitables persécutions que son<br />

succès attire sur elle.<br />

Car Jésus l’avait bien dit :<br />

« Le disciple n’est pas plus grand que son maître. S’ils<br />

m’ont persécuté, ils vous persécuteront <strong>au</strong>ssi. S’ils ont gardé<br />

CAMP NOTRE-DAME DE FATIMA 2012<br />

VIII. L’ ÉGLISE DES APÔTRES<br />

ma parole, ils garderont <strong>au</strong>ssi la vôtre. Mais ils feront tout<br />

cela contre vous, à c<strong>au</strong>se de mon nom. » (Jn 15, 20)<br />

Or, nous pouvons revivre le drame douloureux que<br />

l’Église nouvelle eut à traverser et qui devait coûter la<br />

vie à toute une génération de chrétiens, dont les<br />

“ colonnes de l’Église ”. Nous pouvons revivre ce<br />

nouve<strong>au</strong> Calvaire en lisant attentivement les Actes. Car<br />

la pudeur sacrée des premiers chrétiens <strong>au</strong>rait préféré le<br />

voir oublié.<br />

Hélas ! la haine allait venir d’un côté où on ne<br />

l’attendait guère...<br />

LES RAISONS DU DRAME<br />

L’Évangile prêché par saint Pierre était simple et<br />

d’une éclatante nouve<strong>au</strong>té. Il était adressé à tous et le<br />

troupe<strong>au</strong> qu’il avait reçu la charge de paître devait<br />

réunir en son unité toutes les brebis perdues, tel était le<br />

désir du Seigneur, souvent exprimé et que Luc aimera<br />

rappeler dans ses écrits.<br />

Alors Pierre prit la parole et dit : « Je constate en<br />

vérité que Dieu ne fait pas acception des personnes,<br />

mais qu’en toute nation celui qui le craint et pratique<br />

la justice lui est agréable. » (Ac 10, 34-35)<br />

Et pourquoi cet universalisme sans condition ? Parce<br />

que la source du salut est la Croix rédemptrice, le<br />

sacrifice du serviteur de Dieu, de l’Agne<strong>au</strong> Jésus, vrai<br />

Christ :<br />

« Il a envoyé sa parole <strong>au</strong>x Israélites, leur annonçant<br />

la bonne nouvelle de la paix par Jésus-Christ :<br />

c’est lui le Seigneur de tous. Vous savez ce qui s’est<br />

passé dans toute la Judée : Jésus de Nazareth, ses<br />

débuts en Galilée, après le baptême proclamé par<br />

Jean ; comment Dieu l’a oint de l’Esprit-Saint et de<br />

puissance, lui qui a passé en faisant le bien et en<br />

guérissant tous ceux qui étaient tombés <strong>au</strong> pouvoir du<br />

diable ; car Dieu était avec lui.<br />

« Et nous, nous sommes témoins de tout ce qu’il a<br />

fait dans le pays des juifs et à Jérusalem. Lui qu’ils sont<br />

allés jusqu’à faire mourir en le suspendant <strong>au</strong> gibet,<br />

Dieu l’a ressuscité le troisième jour et lui a donné de se<br />

manifester, non à tout le peuple, mais <strong>au</strong>x témoins que<br />

Dieu avait choisis d’avance, à nous qui avons mangé et<br />

bu avec lui après sa résurrection d’entre les morts ; et il<br />

nous a enjoint de proclamer <strong>au</strong> Peuple et d’attester qu’il<br />

est, lui, le juge établi par Dieu pour les vivants et les<br />

morts. C’est de lui que tous les prophètes rendent ce<br />

témoignage que quiconque croit en lui recevra, par son<br />

nom, la rémission de ses péchés. » (Ac 10, 36-43)<br />

L’Évangile de Marc, disciple et secrétaire - rédacteur<br />

de Pierre, illustre cette vérité. Tel est l’enseignement de<br />

Pierre dès les premiers jours. Avant le drame du Calvaire,<br />

Pierre refusait (Mt 16, 22) d’envisager une telle<br />

vocation pour Jésus et pour son Église. Ce qu’il a vu


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 18<br />

l’a instruit et il a reçu mission « d’affermir ses frères »<br />

dans cette foi (Lc 22, 32).<br />

Il va le faire, à sa manière, timide, par des alternatives<br />

de passivité et des coups de boutoir. Il le fera<br />

jusqu’<strong>au</strong> martyre, sans jamais démentir sa mission.<br />

Répondant à l’appel des Apôtres, une admirable<br />

commun<strong>au</strong>té s’est formée qui se sait le “ reste ” d’Israël,<br />

le véritable et définitif peuple de Dieu, héritier des<br />

promesses, en attente du retour du Seigneur. Comme <strong>au</strong><br />

temps du “ Maître de justice ” des esséniens, on accepte<br />

dans la foi <strong>au</strong> Christ, de rompre avec son peuple, car<br />

l’Église est l’Israël nouve<strong>au</strong>.<br />

Mais on ne peut se considérer comme le petit<br />

nombre des élus, les s<strong>au</strong>vés du peuple, les fidèles tenants<br />

de l’Alliance, les vrais interprètes des prophéties,<br />

sans vouloir conserver cet ordre ancien, cette Loi, cette<br />

liturgie qui ont si merveilleusement prouvé leur sainteté<br />

en donnant naissance à l’Église nouvelle. Impies les<br />

juifs déicides, oui, certes, mais excellente et divine la<br />

loi éternelle de Moïse et les liturgies du Temple !<br />

Ainsi l’Église naissante, dont la croissance est décrite<br />

dans les quinze premiers chapitres des ACTES DES<br />

APÔTRES, avait, à ses débuts, deux lieux de culte : sur la<br />

colline du Temple, elle continuait de pratiquer tout ce<br />

que prescrit la Loi, y compris la liturgie des sacrifices,<br />

à l’exemple de Jacques ; sur le mont Sion, elle inst<strong>au</strong>rait<br />

la religion du Christ, dans « la grande salle à<br />

l’étage » (Mc 14, 15) où Jésus avait institué les sacrements<br />

de l’Ordre et de l’Eucharistie avant de souffrir.<br />

Jésus lui-même ne s’était-il pas soumis à la circoncision<br />

et à tout cet ordre sacré ?<br />

Qui <strong>au</strong>rait pu dire <strong>au</strong> moment où Matthieu écrivait<br />

son Évangile que tout ce passé vénérable devait être<br />

abandonné irrévocablement ?<br />

L’Esprit seul donné à l’Église allait le lui apprendre.<br />

LES PRODROMES DU DRAME<br />

<strong>La</strong> persécution ne frappa pas indistinctement mais se<br />

porta d’abord sur les “ hellénistes ”, soit juifs de la<br />

diaspora et même habitants des villes gréco-romaines du<br />

bord du lac de Tibériade, soit païens “ craignants-Dieu ”,<br />

attirés à Jérusalem par la religion juive, et convertis le<br />

jour de la Pentecôte. Jusqu’alors, une merveilleuse unanimité<br />

avait fait oublier ces différences.<br />

Cependant : « En ces jours-là, comme le nombre des<br />

disciples <strong>au</strong>gmentait, il y eut des murmures chez les<br />

Hellénistes contre les Hébreux. Dans le service quotidien,<br />

disaient-ils, on négligeait leurs veuves. Les Douze<br />

convoquèrent alors l’assemblée des disciples et leur<br />

dirent : “ Il ne sied pas que nous délaissions la parole de<br />

Dieu pour servir <strong>au</strong>x tables. Cherchez plutôt parmi vous,<br />

frères, sept hommes de bonne réputation, remplis de l’Esprit<br />

et de sagesse, et nous les préposerons à cet office ; quant à<br />

nous, nous resterons assidus à la prière et <strong>au</strong> service de la<br />

parole. ” <strong>La</strong> proposition plut à toute l’assemblée, et l’on<br />

choisit Étienne, homme rempli de foi et de l’Esprit-Saint,<br />

Philippe, Porchère, Nicanor, Timon, Parménas et Ni-<br />

colas, prosélyte d’Antioche. On les présenta <strong>au</strong>x Apôtres<br />

et, après avoir prié, ils leur imposèrent les mains. Et la<br />

parole du Seigneur croissait ; le nombre des disciples<br />

<strong>au</strong>gmentait considérablement à Jérusalem, et une multitude<br />

de prêtres obéissaient à la foi. » (Ac 6, 1-7)<br />

Étienne dénonce la rébellion continuelle des Hébreux,<br />

depuis les origines. Son discours est implacable (Ac 7).<br />

Et la preuve qu’il dit vrai, la confirmation de son<br />

discours ne tarde pas : son martyre met fin à la mission<br />

chrétienne à Jérusalem. Désormais, il ne sera plus<br />

question d’évangélisation qu’en dehors de Jérusalem.<br />

Les “ hellénistes ”, chassés de Jérusalem, se répandent<br />

en Samarie, retournent dans leurs villes et partout<br />

suscitent un grand intérêt et des conversions de païens !<br />

Pierre et Jean se précipitent sur les lieux et donnent<br />

à tous ces nouve<strong>au</strong>x venus le Saint-Esprit. Livré à luimême,<br />

Pierre demeurerait-il perplexe (Ac 10, 17) que<br />

des signes convaincants le pousseraient dans cette voie.<br />

Venu chez le centurion Corneille sur l’ordre du Saint-<br />

Esprit, il y prononce un discours ponctué par une seconde<br />

“ Pentecôte ” :<br />

« Pierre parlait encore quand l’Esprit-Saint tomba sur<br />

tous ceux qui écoutaient la parole. Et tous les croyants<br />

circoncis qui étaient venus avec Pierre furent stupéfaits<br />

de voir que le don du Saint-Esprit avait été répandu <strong>au</strong>ssi<br />

sur les païens. Ils les entendaient en effet parler en<br />

langues et magnifier Dieu. Alors Pierre déclara :<br />

« “ Peut-on refuser l’e<strong>au</strong> du baptême à ceux qui ont reçu<br />

l’Esprit Saint <strong>au</strong>ssi bien que nous ? ” Et il ordonna de les<br />

baptiser <strong>au</strong> nom de Jésus-Christ. Alors ils le prièrent<br />

de rester quelques jours avec eux. » (Ac 10, 44-48)<br />

Cependant, tandis que les missionnaires assistaient<br />

avec une certaine exaltation à l’irrésistible poussée de<br />

l’Évangile sanctionnée par la présence visible de l’Esprit-<br />

Saint, à Jérusalem on réfléchit, on demeure prudent, on<br />

craint l’infidélité à la loi mosaïque. Cet universalisme a<br />

quelque chose de trop déroutant et, ne voyant pas les<br />

miracles, on s’en inquiète et demande des explications.<br />

On envoie des délégations et celles-ci, une fois sur place,<br />

voient disparaître les préventions, naître l’enthousiasme.<br />

Jérusalem manifeste alors un peu plus de confiance<br />

(Ac 11, 18), après le discours de Pierre, mais on craint<br />

un péril obscur.<br />

Ainsi s’écoulent les années 31 à 35, où nous voyons<br />

PAUL monter à Jérusalem après sa conversion, pour y<br />

voir Pierre et Jacques « le Petit » (Mc 15, 40), « frère du<br />

Seigneur » (Ga 1, 19), personnage important à Jérusalem<br />

! P<strong>au</strong>l est reçu dans leur communion.<br />

Puis vint un temps où Pierre trop souvent en<br />

mission lointaine, bientôt chassé de Jérusalem par la<br />

persécution, certainement après son évasion de la prison<br />

d’Hérode, en 44, dut laisser l’<strong>au</strong>torité à JACQUES. Il<br />

l’estimait comme « frère du Seigneur », et peut-être le<br />

sentait-il plus populaire, plus convenable que lui à ce<br />

rôle de chef d’une commun<strong>au</strong>té très jalouse de ses<br />

privilèges. Cet effacement allait avoir d’immenses<br />

conséquences.


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 19<br />

Auparavant, Pierre, à Jérusalem, était très fidèle à la<br />

loi juive et, ailleurs, très conciliant vis-à-vis des convertis<br />

du paganisme. Son éloignement de Jérusalem va<br />

déclencher une sorte de défiance et de surveillance de<br />

la part des judéo-chrétiens sur son activité <strong>au</strong>-dehors.<br />

On voit une différence apparaître entre Jérusalem et<br />

les commun<strong>au</strong>tés judéo-chrétiennes qui s’y rattachent,<br />

d’une part, et les commun<strong>au</strong>tés lointaines de païens<br />

convertis, disons les “ hellénistes ”, d’<strong>au</strong>tre part.<br />

Dans leurs revendications, ceux de Jérusalem entendent<br />

bien que Pierre reste leur partisan tandis que les<br />

pagano-chrétiens ne conçoivent même pas qu’il puisse<br />

être contre eux. Entre ceux qui se réclament du « frère<br />

du Seigneur », qui ont connu Jésus « des yeux de<br />

la chair », et P<strong>au</strong>l, cet Apôtre de raccroc avec ses<br />

chrétiens venus du paganisme, Pierre sera-t-il contraint<br />

de choisir ?<br />

LE CONCILE DE JÉRUSALEM<br />

Il s’agit de savoir si la Loi ne sert plus à rien, avec<br />

ses œuvres et ses multiples prescriptions, ou si, pour<br />

être chrétien, il f<strong>au</strong>t <strong>au</strong>ssi adopter le judaïsme et ses<br />

institutions. Concrètement : f<strong>au</strong>t-il être baptisé et <strong>au</strong>ssi<br />

circoncis ? Dans les repas, f<strong>au</strong>t-il oublier qu’un païen,<br />

même converti, est encore « impur », et refuser de manger<br />

avec lui ? Petits détails où se joue toute une<br />

théologie.<br />

Pierre, responsable angoissé de l’unité, pasteur de<br />

l’unique troupe<strong>au</strong>, temporise et gagne du temps grâce<br />

<strong>au</strong> partage géographique et ethnique des deux partis ! À<br />

Antioche, il vit « à la grecque », mais il n’en laisse rien<br />

paraître à Jérusalem !<br />

Un jour, des judaïsants venus à Antioche dévoileront<br />

l’innocente ruse comme une trahison et Pierre tremblera<br />

devant eux. L’intervention véhémente de P<strong>au</strong>l, dont<br />

l’écho vibrant nous est conservé dans l’Épître <strong>au</strong>x<br />

GALATES, persuadera Pierre de mettre fin à l’équivoque :<br />

inutiles sont maintenant la Loi et ses prescriptions pour<br />

les païens venus <strong>au</strong> baptême.<br />

« Mais quand Céphas vint à Antioche, je lui résistai<br />

en face, parce qu’il s’était donné tort. En effet, avant<br />

l’arrivée de certaines gens de l’entourage de Jacques, il<br />

prenait ses repas avec les païens ; mais quand ces gens<br />

arrivèrent, on le vit se dérober et se tenir à l’écart, par<br />

peur des circoncis. Et les <strong>au</strong>tres juifs l’imitèrent dans sa<br />

dissimulation, <strong>au</strong> point d’entraîner Barnabé lui-même à<br />

dissimuler avec eux. Mais quand je vis qu’ils ne marchaient<br />

pas droit selon la vérité de l’Évangile, je dis à<br />

Céphas devant tout le monde : “ Si toi qui es juif, tu vis<br />

comme les païens, et non à la juive, comment peux-tu<br />

contraindre les païens à judaïser ? ” » (Ga 2, 11-14)<br />

Fort de l’approbation de Pierre, P<strong>au</strong>l s’élance à la<br />

conquête du monde païen. C’est là que les judaïsants<br />

le poursuivront.<br />

CONTROVERSE À JÉRUSALEM.<br />

Malgré la difficulté d’établir une chronologie de ces<br />

débats, il apparaît que Pierre assura d’abord une grande<br />

liberté à la mission de P<strong>au</strong>l <strong>au</strong> cours de son premier<br />

voyage et, par son attitude conciliante, valut à P<strong>au</strong>l<br />

d’être considéré comme un frère par les <strong>au</strong>tres Apôtres.<br />

Pierre était engagé dans l’apostolat <strong>au</strong>près des juifs,<br />

hors de Jérusalem. C’était lui qui s’occupait des nouvelles<br />

commun<strong>au</strong>tés de la diaspora, et il pouvait ainsi<br />

jouer un rôle de tampon entre judaïsme et p<strong>au</strong>linisme.<br />

Prenons bien garde de ne pas être p<strong>au</strong>liniens sans<br />

réflexion ! avertissait l’abbé de Nantes, notre Père. Les<br />

“ judaïsants ” avaient be<strong>au</strong>coup de raisons d’être inquiets<br />

et d’imposer le respect de la loi mosaïque et<br />

même la prim<strong>au</strong>té de leur Église de Jérusalem. Sans<br />

doute ne comprirent-ils qu’imparfaitement que la Nouvelle<br />

Alliance se suffisait à elle-même, mais tout de<br />

même l’Église gardera finalement be<strong>au</strong>coup de l’Ancien<br />

Testament. Ce ne sera, certes, qu’un appoint secondaire,<br />

mais qu’on ne peut négliger sans périr ! « N’allez pas<br />

croire que je suis venu abolir la Loi ou les prophètes ; je<br />

ne suis pas venu abolir mais accomplir. » (Mt 5, 17)<br />

D’<strong>au</strong>tre part, pour des gens qui avaient connu et<br />

peut-être vécu dans les commun<strong>au</strong>tés des “ fils de<br />

Lumière ” ou du Baptiste, qui suivaient à la perfection<br />

la loi de Moïse – non pas des pharisiens comme saint<br />

P<strong>au</strong>l, mais des esséniens pieux et sincères –, quel<br />

bouleversement ! P<strong>au</strong>l condamne la Loi. Eux la bénissent<br />

! C’est que, chose étonnante, mais bien avérée du<br />

commencement (Ac 2, 46) à la fin (Ac 21, 17-26) : Notre-<br />

Seigneur avait laissé pendante la double appartenance<br />

de ceux qui embrasseraient la foi tout en demeurant<br />

« de zélés partisans de la Loi » (Ac 21, 20).<br />

Soyons modestes, recommandait notre Père. Qui<br />

<strong>au</strong>rait pu alors comprendre que les deux partis s’accordaient<br />

en une vérité plus h<strong>au</strong>te que l’Église a apprise<br />

du Saint-Esprit !<br />

En fait, l’agitation des esprits ne cessa de croître.<br />

Une première fois calmée par les récits de Pierre... mais<br />

une certaine défiance se marque alors à son égard et<br />

nous voyons grandir l’étoile de Jacques. Une seconde<br />

fois après l’incident d’Antioche, Pierre et P<strong>au</strong>l s’étant<br />

montrés d’accord, les judaïsants sont apaisés... Nous les<br />

verrons cependant étendre et aggraver leur m<strong>au</strong>vais zèle<br />

à l’extérieur de Jérusalem.<br />

L’ASSEMBLÉE DE JÉRUSALEM (49 après Jésus-Christ ).<br />

À la suite d’incidents graves à Antioche (et ailleurs),<br />

un premier “ Concile ” met en présence les tenants des<br />

deux tendances, les chefs 1 o des missions païennes,<br />

P<strong>au</strong>l et Barnabé, 2 o des missions juives, Pierre, 3 o de<br />

l’Église de Jérusalem, Église-mère, Jacques.<br />

Après discussion, Pierre expose sa théologie, qu’il<br />

donne comme reconnue de tous et il conclut en faveur<br />

de la thèse p<strong>au</strong>linienne :<br />

« Après une longue discussion, Pierre se leva et dit :<br />

“ Frères, vous le savez : dès les premiers jours, Dieu m’a<br />

choisi parmi vous pour que les païens entendent de ma<br />

bouche la parole de la Bonne Nouvelle et embrassent la foi.<br />

Et Dieu, qui connaît les cœurs, a témoigné en leur faveur, en<br />

leur donnant l’Esprit-Saint tout comme à nous. Et il n’a fait


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 20<br />

<strong>au</strong>cune distinction entre eux et nous, puisqu’il a purifié leur<br />

cœur par la foi. Pourquoi donc maintenant tentez-vous Dieu<br />

en voulant imposer <strong>au</strong>x disciples un joug que ni nos pères ni<br />

nous-mêmes n’avons eu la force de porter ? D’ailleurs, c’est<br />

par la grâce du Seigneur Jésus que nous croyons être s<strong>au</strong>vés,<br />

exactement comme eux. ” » (Ac 15, 7-11)<br />

P<strong>au</strong>l et Barnabé exposent alors leur œuvre apostolique<br />

(Ac 15, 12). Jacques se lève enfin pour imposer<br />

<strong>au</strong>x fidèles judaïsants son avis, qui est celui de la<br />

concorde. Contrairement à ce que disent certains, ce<br />

n’est pas la preuve de son <strong>au</strong>torité souveraine sur les<br />

<strong>au</strong>tres Apôtres, mais sur les judaïsants qui se réclament<br />

facilement de lui. C’est lui qui les désarme, non sans<br />

leur faire quelques concessions :<br />

« Frères, écoutez-moi. Syméon a exposé comment, dès le<br />

début, Dieu a pris soin de tirer d’entre les païens un peuple<br />

réservé à son Nom. Ce qui concorde avec les paroles des<br />

Prophètes, puisqu’il est écrit : Après cela je reviendrai et je<br />

relèverai la tente de David qui était tombée ; je relèverai ses<br />

ruines et je la redresserai, afin que le reste des hommes cherchent<br />

le Seigneur, ainsi que toutes les nations qui ont été<br />

consacrées à mon Nom, dit le Seigneur qui fait connaître ces<br />

choses depuis des <strong>siècle</strong>s. C’est pourquoi je juge, moi, qu’il<br />

ne f<strong>au</strong>t pas tracasser ceux des païens qui se convertissent à<br />

Dieu. Qu’on leur mande seulement de s’abstenir de ce qui a<br />

été souillé par les idoles, des unions illégitimes, des chairs<br />

étouffées et du sang. ” » (Ac 15, 13-21)<br />

Ainsi, grâce à Jacques, la paix a été s<strong>au</strong>vée, et grâce<br />

surtout à Pierre qui s’est fait solennellement le garant<br />

de P<strong>au</strong>l.<br />

Un rescrit est envoyé <strong>au</strong>x <strong>au</strong>tres Églises et nous<br />

savons ainsi qu’à Antioche, <strong>au</strong>ssi laborieusement qu’à<br />

Jérusalem, l’entente est réalisée sur la théologie de P<strong>au</strong>l<br />

et de Pierre. En gardant quelques recommandations<br />

d’esprit très mosaïque visant l’indispensable souci de la<br />

moralité des mœurs en même temps que la pureté rituelle...<br />

Où l’on voit que « tout ne fut pas loyal ni<br />

décisif dans ce Concile où les judéo-chrétiens se réclamèrent<br />

de Jacques contre Pierre, jugé trop modéré, et<br />

contre P<strong>au</strong>l leur principal adversaire, explique l’abbé de<br />

Nantes, notre Père. On reprit en coulisses postconciliaires,<br />

déjà ! ce qu’on n’avait pu obtenir dans l’assemblée<br />

régulière, pour aboutir à jeter dehors ou à<br />

maintenir en état humilié les <strong>au</strong>tres, les païens convertis,<br />

et demeurer seuls vrais chrétiens, glorieux fils<br />

d’Abraham et sectateurs de Moïse, ah là ! »<br />

Car la commun<strong>au</strong>té de Jérusalem est malade. Ligotée<br />

dans son mosaïsme, trop engagée sans doute dans l’utopique<br />

discipline essénienne, <strong>au</strong> centre même d’un judaïsme<br />

qui devient frénétique, peut-être pleine d’amertume<br />

de voir sa tradition délaissée par les Églises du<br />

monde entier, Jérusalem survit sans gloire. Il semble que<br />

Jacques et d’<strong>au</strong>tres ont épuisé toute leur énergie à lutter<br />

contre l’animosité et la rancœur de certains fidèles et à<br />

garder l’unité scellée en 49, malgré l’œuvre des agitateurs<br />

qui reviennent de loin chaque saison raconter les<br />

crimes énormes de P<strong>au</strong>l le f<strong>au</strong>x Apôtre, comme on les<br />

voit faire lorsque P<strong>au</strong>l entre dans le Temple (Ac 21).<br />

Finalement, après le coup terrible que nous allons<br />

voir, Jérusalem court à la ruine. <strong>La</strong> commun<strong>au</strong>té chrétienne,<br />

qui a échappé <strong>au</strong> désastre miraculeusement,<br />

n’<strong>au</strong>ra plus <strong>au</strong>cune raison ni <strong>au</strong>torité pour se dresser<br />

contre l’Église universelle.<br />

LE DRAME<br />

Il ressort de l’ombre où la mémoire des chrétiens<br />

l’avait enseveli. <strong>La</strong> controverse protestante en avait<br />

brouillé les éléments, en prétendant que Pierre n’était<br />

jamais allé à Rome. Voilà le drame cependant restitué<br />

dans toute sa vérité, en grande partie grâce à Culmann,<br />

un protestant ! dont l’étude sur le martyre de Pierre a<br />

été le point de départ d’une recherche qui a abouti à<br />

une merveilleuse découverte. : celle de ses ossements...<br />

à Rome !<br />

À force d’exalter P<strong>au</strong>l contre Pierre et, plus encore,<br />

contre Jacques, on s’interdisait toute compréhension<br />

profonde des Écritures où sont les documents indubitables<br />

de la grande “ campagne ”, il n’y a pas d’<strong>au</strong>tre<br />

mot, des judéo-chrétiens contre les pagano-chrétiens.<br />

Réglée à Jérusalem de manière pacifique, la querelle<br />

va rebondir dans les commun<strong>au</strong>tés lointaines, moins bien<br />

renseignées et, en l’absence des Apôtres, prêtant l’oreille<br />

<strong>au</strong>x campagnes de plus en plus mensongères des soidisant<br />

partisans de Jacques et des <strong>au</strong>tres “ colonnes ”.<br />

Au fil des Épîtres p<strong>au</strong>liniennes, on perçoit les temps<br />

forts de cette lutte où les querelles doctrinales, si complexes,<br />

se mêlent <strong>au</strong>x rivalités des personnes. Il s’agit<br />

de savoir si la foi <strong>au</strong> Christ crucifié remplace les<br />

œuvres de la Loi, en particulier les règles de pureté<br />

rituelles. Trois positions :<br />

1o Celle de saint P<strong>au</strong>l, radicale, conserve la morale<br />

du Décalogue, et abolit les rites juifs.<br />

2o Celle des judaïsants, <strong>au</strong> contraire, superpose loi<br />

juive et loi chrétienne.<br />

3o Celle des Apôtres, à Jérusalem, associe <strong>au</strong> radicalisme<br />

p<strong>au</strong>linien l’observation des rites juifs dans les<br />

commun<strong>au</strong>tés judaïsantes.<br />

Qui tranchera ?<br />

Les judaïsants contestent à P<strong>au</strong>l le droit de décider<br />

souverainement <strong>au</strong> nom de ses révélations personnelles,<br />

lui qui n’a même pas connu le Christ ! <strong>Contre</strong> P<strong>au</strong>l, ils<br />

se réclament des <strong>au</strong>tres Apôtres.<br />

Le concile de Jérusalem leur donne tort. Réduits <strong>au</strong><br />

silence dans la ville-mère et dans les commun<strong>au</strong>tés de<br />

Pierre, ils s’en vont répandre la zizanie dans les Églises<br />

fondées par P<strong>au</strong>l et qui ne relèvent que de lui, en vertu<br />

de l’accord “ conciliaire ” !<br />

En effet, souligne notre Père, les Apôtres sont d’accord<br />

en 49. Non seulement le décret publié en leur nom<br />

distingue les deux observances : judaïsante et helléniste,<br />

mais il est visible, dans le récit des Actes, qu’il donne<br />

tort <strong>au</strong>x judaïsants obstinés et indociles. Jacques et P<strong>au</strong>l<br />

sont donc en communion et la preuve, c’est la doctrine<br />

qu’ils exposent dans leurs deux Épîtres contemporaines :<br />

<strong>au</strong>x Galates, P<strong>au</strong>l expose son Évangile et s’en prend <strong>au</strong>x


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 21<br />

judaïsants avec véhémence, tandis que Jacques expose sa<br />

doctrine de la foi et des œuvres, et s’en prend lui <strong>au</strong>ssi<br />

<strong>au</strong>x judaïsants, non pas comme à des adversaires mais<br />

comme à des partisans extrémistes qu’il désapprouve<br />

sans équivoque :<br />

« Est-il quelqu’un de sage et d’expérimenté parmi<br />

vous ? Qu’il fasse voir par une bonne conduite des<br />

actes empreints de douceur et de sagesse. Si vous avez<br />

<strong>au</strong> cœur, <strong>au</strong> contraire, une amère jalousie et un esprit<br />

de chicane, ne vous vantez pas, ne mentez pas contre la<br />

vérité. Pareille sagesse ne descend pas d’en h<strong>au</strong>t : elle<br />

est terrestre, animale, démoniaque. Car, où il y a<br />

jalousie et chicane, il y a désordre et toutes sortes de<br />

m<strong>au</strong>vaises actions. » (Jc 3, 13-16)<br />

Le parallèle entre les deux Épîtres est instructif :<br />

« D’où viennent les guerres, d’où viennent les batailles<br />

parmi vous ? N’est-ce pas précisément de vos<br />

passions, qui combattent dans vos membres ? » (Jc 4, 1)<br />

« Car la chair convoite contre l’esprit, et l’esprit<br />

contre la chair ; il y a entre eux antagonisme, si bien<br />

que vous ne faites pas ce que vous voudriez. »<br />

(Ga 5, 17)<br />

L’accord fondamental des deux Apôtres est patent.<br />

En tout cas, GALATES et ACTES 15 s’accordent à mettre<br />

Jacques en avant dans la controverse, et à manifester<br />

ainsi devant toutes les Églises qu’on ne pouvait se<br />

réclamer de lui pour combattre Pierre ou P<strong>au</strong>l.<br />

<strong>La</strong> lutte va devenir de plus en plus sévère. Et cela se<br />

comprend. Dans chacune des villes où passe P<strong>au</strong>l, des<br />

Juifs et des Grecs se convertissent. Certains, comme<br />

Apollos à Éphèse, sont déjà venus à la « Voie » sans<br />

pour <strong>au</strong>tant renier le judaïsme. On comprend qu’ils<br />

hésitent à tout rejeter de leurs rites alors que P<strong>au</strong>l<br />

s’efforce de ne pas ergoter sur ces sujets délicats :<br />

« Je veux donc que les jeunes veuves se remarient,<br />

qu’elles aient des enfants, gouvernent leur maison et<br />

ne donnent à l’adversaire <strong>au</strong>cune occasion d’insulte. »<br />

(1 Tm 5, 14)<br />

Mais dès qu’arrivent les « f<strong>au</strong>x frères », la crise éclate,<br />

dissensions, rivalités, défiance à l’égard de P<strong>au</strong>l, pressions<br />

exercées sur les païens pour les circoncire, etc.<br />

C’est alors que P<strong>au</strong>l écrit pour expliquer l’Évangile<br />

du salut et le rôle périmé de la Loi. Enfin, pour se<br />

justifier, il s’inquiète, à juste titre :<br />

« Mais si vous vous mordez et vous vous dévorez<br />

les uns les <strong>au</strong>tres, prenez garde que vous allez vous<br />

entre-détruire. » (Ga 5, 15)<br />

Ces gens, ces « f<strong>au</strong>x frères », profitent du manque<br />

d’unité disciplinaire de l’Église. Jusqu’où iront-ils ?<br />

LE MARTYRE DES APÔTRES<br />

Saint Luc n’a pas voulu raconter ces intrigues... et<br />

cependant, à la lumière des Épîtres de saint P<strong>au</strong>l, nous<br />

les découvrons dans les Actes mêmes.<br />

Le point culminant est le retour de P<strong>au</strong>l à Jérusalem<br />

(Ac 21). On voit Jacques et les anciens le recevoir et<br />

chercher à le protéger de la haine des judaïsants. Eux-<br />

mêmes ne paraissent pas se rendre bien compte de la<br />

théologie radicale de P<strong>au</strong>l. Les ennemis, eux, sont plus<br />

lucides ! Aussi, on songe invinciblement à un complot<br />

où les judaïsants ont dirigé la haine des juifs sur la<br />

personne de P<strong>au</strong>l en formulant leurs propres griefs :<br />

« Hommes d’Israël, <strong>au</strong> secours ! Le voici, l’individu<br />

qui prêche à tous et partout contre notre peuple, contre<br />

la Loi et contre ce Lieu ! Et voilà encore qu’il a<br />

introduit des Grecs dans le Temple et profané ce saint<br />

Lieu. » (Ac 21, 28)<br />

Il est patent qu’à la haine des juifs pour les<br />

chrétiens, s’en ajoute une <strong>au</strong>tre plus précise contre ceux<br />

qui s’affranchissent davantage de la loi et de la tradition,<br />

et contre leur chef : P<strong>au</strong>l.<br />

Certainement, pendant sa captivité, l’effort des f<strong>au</strong>x<br />

frères s’intensifie. On en trouve la preuve dans la terrible<br />

colère de P<strong>au</strong>l à leur endroit :<br />

« Prenez garde <strong>au</strong>x chiens ! Prenez garde <strong>au</strong>x m<strong>au</strong>vais<br />

ouvriers ! Prenez garde <strong>au</strong>x f<strong>au</strong>x circoncis ! » (Ph 3, 2)<br />

Mais c’est qu’à Rome même, narguant ses chaînes,<br />

les judaïsants se démènent :<br />

« Je désire que vous le sachiez, frères, mon affaire a<br />

tourné plutôt <strong>au</strong> profit de l’Évangile : en effet, dans tout<br />

le prétoire et partout ailleurs, mes chaînes ont acquis,<br />

dans le Christ, une vraie notoriété, et la plupart des<br />

frères, enhardis dans le Seigneur du fait même de ces<br />

chaînes, redoublent d’une belle <strong>au</strong>dace à proclamer sans<br />

crainte la Parole. Certains, il est vrai, le font par envie,<br />

en esprit de rivalité, mais pour les <strong>au</strong>tres, c’est vraiment<br />

dans de bons sentiments qu’ils prêchent le Christ. Ces<br />

derniers agissent par charité, sachant bien que je suis<br />

voué à défendre ainsi l’Évangile ; quant <strong>au</strong>x premiers,<br />

c’est par esprit d’intrigue qu’ils annoncent le Christ ;<br />

leurs intentions ne sont pas pures : ils s’imaginent ainsi<br />

aggraver le poids de mes chaînes. Mais qu’importe ?<br />

Après tout, d’une manière comme de l’<strong>au</strong>tre, hypocrite<br />

ou sincère, le Christ est annoncé, et je m’en réjouis.<br />

Je persisterai même à m’en réjouir. » (Ph 1, 12-18)<br />

Rome était en effet le siège d’une commun<strong>au</strong>té chrétienne<br />

lorsque saint P<strong>au</strong>l y arriva pour sa première<br />

captivité. Cette commun<strong>au</strong>té était judaïsante. Aussi,<br />

P<strong>au</strong>l prit-il mille préc<strong>au</strong>tions :<br />

« Et d’abord je remercie mon Dieu par Jésus-Christ<br />

à votre sujet à tous, de ce qu’on publie votre foi dans<br />

le monde entier. » (Rm 1, 8)<br />

« Car j’ai un vif désir de vous voir, afin de vous<br />

communiquer quelque don spirituel, pour vous affermir,<br />

ou plutôt éprouver le réconfort parmi vous de notre foi<br />

commune à vous et à moi. » (Rm 1, 11-12).<br />

Malgré cela, la venue de P<strong>au</strong>l allait ici plus<br />

qu’ailleurs déchaîner la haine. Déjà, en effet, l’Apôtre<br />

avait courageusement pris position pour assurer dans<br />

leur foi ses propres fidèles venus s’établir à Rome :<br />

« Je vous en prie, frères, gardez-vous de ces f<strong>au</strong>teurs<br />

de dissensions et de scandales contre l’enseignement<br />

que vous avez reçu ; évitez-les. Car ces sortes de<br />

gens ne servent pas notre Seigneur le Christ, mais leur


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 22<br />

ventre, et par des discours doucereux et flatteurs séduisent<br />

les cœurs simples. En effet, le renom de votre<br />

obéissance s’est répandu partout et vous faites ma<br />

joie ; mais je veux que vous soyez avisés pour le bien<br />

et malhabiles pour le mal. Le Dieu de la paix écrasera<br />

bien vite Satan sous vos pieds. Que la grâce de Notre-<br />

Seigneur Jésus-Christ soit avec vous ! » (Rm 16, 17-20)<br />

« Pas de querelles, pas de jalousie » (Rm 13, 13), on<br />

comprend pourquoi cette parole devint le leitmotiv des<br />

Apôtres, de tous les Apôtres !<br />

En 62, Jacques est mort martyr à Jérusalem, peu de<br />

temps après le passage de P<strong>au</strong>l, peut-être à c<strong>au</strong>se de sa<br />

démonstration publique d’amitié envers P<strong>au</strong>l. Pierre a<br />

jugé. Son Épître, la première, sûrement <strong>au</strong>thentique,<br />

date de ce temps. Pierre en a fait un appel à la charité ;<br />

il prévoit les épreuves et considère comme probable le<br />

sacrifice qui vient.<br />

Il vint en effet, pour lui : le 13 octobre 64. Et pour<br />

P<strong>au</strong>l, en 67. Un document extraordinaire, une lettre de<br />

saint Clément qui sera, à la fin du <strong>siècle</strong>, le troisième<br />

successeur de saint Pierre, adressée <strong>au</strong>x chrétiens de<br />

Corinthe, nous apprend que Pierre et P<strong>au</strong>l ont été martyrisés,<br />

victimes de la haine des f<strong>au</strong>x frères, de leur<br />

envie et de leur jalousie.<br />

Dans son éditorial de juillet 1977, notre Père écrit :<br />

« Je médite l’exemple de nos bienheureux Apôtres et je<br />

suis saisi par les circonstances effrayantes de leur martyre.<br />

J’ai l’impression invincible que nous allons être<br />

emportés dans une catastrophe semblable. » Allusion<br />

<strong>au</strong>x dissensions des traditionalistes, qui rappellent par<br />

bien des aspects celles qui déchiraient la commun<strong>au</strong>té<br />

primitive entre les judaïsants et les <strong>au</strong>tres...<br />

Puis l’abbé de Nantes cite longuement la LETTRE DE<br />

CLÉMENT <strong>au</strong>x chrétiens de Corinthe : « En la relisant,<br />

comment ne pas frémir ? Il les conjurait de cesser de se<br />

nuire à eux-mêmes et de mettre en péril l’Église par<br />

leurs discordes [...]. <strong>La</strong> jalousie, la haine entre frères,<br />

seront toujours fatales à l’Église. Saint Clément pour le<br />

dire invoque l’<strong>au</strong>torité du livre de la Sagesse : “ C’est<br />

par la jalousie injuste et impie que la mort est entrée dans<br />

le monde. ” (2, 24) Et de citer sept exemples de l’Ancien<br />

Testament : Caïn et Abel qu’il tue par jalousie, Ésaü<br />

dressé contre Jacob, Joseph vendu par ses frères, Moïse<br />

dénoncé par un homme de sa race à Pharaon, Aaron et<br />

Myriam, sa sœur, jaloux de Moïse, Dathan et Abiron<br />

révoltés contre lui, Saül saisi d’une fureur homicide<br />

contre David...<br />

« Oui, la jalousie entre frères est une folie meurtrière.<br />

Clément en vient à des exemples plus proches,<br />

tirés d’un passé tout ch<strong>au</strong>d encore de jalousie entre<br />

chrétiens, honte suprême ! »<br />

PIERRE ET PAUL TRAHIS PAR DES FRÈRES.<br />

« Mais pour laisser de côté les exemples anciens, venonsen<br />

<strong>au</strong>x athlètes tout récents, prenons les généreux exemples<br />

de notre génération. C’est par l’effet de la jalousie et de<br />

l’envie que furent persécutés ceux qui étaient les colonnes<br />

les plus élevées et les plus justes, et qui combattirent jusqu’à<br />

la mort.<br />

« Jetons les yeux sur les excellents Apôtres : PIERRE, qui<br />

par l’effet d’une injuste jalousie, souffrit non pas un ou<br />

deux, mais de nombreux tourments, et qui, après avoir<br />

rendu son témoignage, s’en est allé <strong>au</strong> séjour de gloire qui<br />

lui était dû.<br />

« C’est par l’effet de la jalousie et de la discorde que<br />

PAUL a montré le prix de la patience. Chargé sept fois de<br />

chaînes, banni, lapidé, devenu un hér<strong>au</strong>t en Orient et en<br />

Occident, il a reçu pour sa foi une gloire éclatante. Après<br />

avoir enseigné la justice <strong>au</strong> monde entier, atteint les bornes<br />

de l’Occident, rendu son témoignage devant ceux qui gouvernent,<br />

il a ainsi quitté le monde et s’en est allé <strong>au</strong> saint<br />

lieu, illustre modèle de patience.<br />

« À ces hommes dont la vie a été sainte, vint s’adjoindre<br />

une grande foule d’élus qui, par suite de la jalousie, endurèrent<br />

be<strong>au</strong>coup d’outrages et de tortures et qui laissèrent<br />

parmi nous un magnifique exemple.<br />

« C’est par l’effet de la jalousie que des femmes, des<br />

jeunes filles et fillettes, après avoir subi de terribles et<br />

monstrueux outrages, ont touché le but dans leur course<br />

de la foi et ont reçu la noble récompense, toutes fragiles de<br />

corps qu’elles étaient.<br />

« <strong>La</strong> jalousie a aliéné des épouses à leurs maris ; elle a<br />

violé la parole d’Adam, notre père : Voici l’os de mes os<br />

et la chair de ma chair.<br />

« Jalousie et discorde ont détruit de grandes villes et<br />

anéanti de puissantes nations. » (1 CLÉMENT 5-6)<br />

Robinson a montré que l’on devait dater cette lettre<br />

d’avant la ruine du Temple de Jérusalem, donc de 69-<br />

70, car Clément invoque, exactement comme saint P<strong>au</strong>l<br />

dans l’Épître <strong>au</strong>x Hébreux, la pratique de la liturgie<br />

juive encore en usage <strong>au</strong> Temple, à titre de comparaison,<br />

pour la bonne ordonnance de la liturgie chrétienne<br />

(Robinson, RE-DATER LE NOUVEAU TESTAMENT,<br />

Lethielleux 1987, p. 426-435 ; cf. BIBLE, ARCHÉOLOGIE,<br />

HISTOIRE, t. 3, p. 108)<br />

Ainsi, sous Néron, la dénonciation dirigea la persécution<br />

et manifesta du même coup à toute l’Église que<br />

la vérité était liée à Pierre.<br />

Un dernier Apôtre demeurait pour le proclamer clairement<br />

: saint Jean. Il montre, dans l’Apocalypse, chapitre<br />

11, les « deux témoins, flambe<strong>au</strong>x qui se tiennent<br />

devant le maître de la terre », Pierre et P<strong>au</strong>l, munis des<br />

pouvoirs de Moïse le législateur, et d’Élie le prophète,<br />

martyrs, mais glorifiés par la puissance de Dieu « <strong>au</strong>x<br />

yeux de leurs ennemis ».<br />

Jean compare leur sacrifice à celui de leur Maître.<br />

Née dans son Sang précieux, l’Église du Christ a mérité<br />

sa pleine fidélité surnaturelle à l’Évangile de la Croix,<br />

sa liberté dans le sang des Apôtres, les “ colonnes ”.<br />

Désormais puissante, elle peut affronter le monde païen.<br />

Elle s’est libérée des liens où la synagogue la retenait<br />

encore prisonnière.<br />

Jérusalem n’est plus. L’Église romaine croît, ensemencée<br />

dans un terrain vague, <strong>au</strong> Vatican.<br />

frère Bruno de Jésus-Marie.


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 23<br />

CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ<br />

QUI est Dieu ? Qui est l’Immaculée ? Comment<br />

s’épanche du Ciel sur la terre l’amour dont ils<br />

nous aiment, et comment leur rendrons-nous amour<br />

pour amour ? C’est par une grâce infuse émanée de la<br />

lumière qui rayonnait d’un ange du Ciel et de la Très<br />

Sainte Vierge en personne que les petits voyants de<br />

Fatima reçurent, de 1916 à 1917, la réponse à ces<br />

questions capitales.<br />

L’ange qui nous communiqua une grâce semblable,<br />

c’est notre bien-aimé Père tout <strong>au</strong> long de ses retraites<br />

sur la “ CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ ”, en docteur mystique<br />

de la pure foi <strong>catholique</strong>, confident du « secret le<br />

plus intime de notre Dieu », qui est <strong>au</strong>ssi le « secret le<br />

plus intime de notre histoire ».<br />

C’est une synthèse d’une ampleur sans précédent, à<br />

vous couper le souffle... C’était <strong>au</strong> temps de la grande<br />

apostasie. De prétendus savants avaient tout enténébré,<br />

tout désorienté, tout figé dans la froideur de leur rationalisme,<br />

<strong>au</strong> nom même de la parole de Dieu ! C’est<br />

du sein de cette génération perverse que notre bienheureux<br />

Père a été mis à part, afin de préparer la<br />

renaissance de l’Église par sa manière très particulière<br />

de nous faire connaître, aimer et servir notre grand<br />

Dieu, en ses trois Personnes, comme en Celle qu’ils<br />

chérissent plus que tout, car elle est plus du Ciel que<br />

de la terre : Marie Immaculée...<br />

Une première fois en 1993, puis lors des deux dernières<br />

grandes retraites qu’il nous a prêchées, en 1997<br />

et en 1998, il nous livra les fruits du colloque intime de<br />

toute sa vie avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit.<br />

1993 : CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ<br />

Avec un “ c ”, le mot exprime le mouvement perpétuel<br />

d’une affection et d’un dévouement mutuels si<br />

agissants qu’il entraîne toute âme désireuse d’y prendre<br />

part, amour débordant de la vie trinitaire dans le Cœur<br />

Immaculé de Marie et y portant son fruit : la moisson,<br />

la vendange, si c’était possible, de toute la famille<br />

humaine, du moins de tous ceux que Dieu notre Père a<br />

élus pour enfants de Marie, et qui seront s<strong>au</strong>vés par sa<br />

médiation universelle.<br />

Ouvrant sa Bible, Georges de Nantes va tout de suite<br />

rencontrer le Bon Dieu et nous faire admirer la bonté de<br />

ce créateur tout-puissant, le Père si bon de ses enfants<br />

Adam et Ève qu’il a créés à son image et ressemblance.<br />

Mais il passera vite pour aller <strong>au</strong> drame, qui va se nouer<br />

sous l’instigation du diable, et nous faire admirer « la<br />

Femme » qui obtint de Dieu le pardon de nos premiers<br />

parents, salvatrice du genre humain, à l’œuvre dès les<br />

anciens jours jusqu’à notre <strong>au</strong>jourd’hui d’Apocalypse,<br />

où Reine du Rosaire elle lutte plus que jamais pour<br />

notre salut, dans les douleurs du combat des derniers<br />

temps (cf. Ap 12). <strong>La</strong> Bible le révélait, la vie des saints<br />

l’illustrait, les apparitions de Notre-Dame, celles de<br />

Fatima surtout, nous en conjuraient tant et si bien, qu’<strong>au</strong><br />

terme de cette première partie de la retraite, il fallait<br />

nous engager à aller à Jésus par Marie. Cette expression<br />

chère à la dévotion populaire raillée par les “ savants ”,<br />

notre Père nous démontra qu’elle était <strong>au</strong> contraire l’absolu<br />

d’une vérité révélée. Au point de lui appliquer ces<br />

vers du ROMANCERO de saint Jean de la Croix :<br />

Une épouse qui t’aime, mon Fils,<br />

j’aimerais te donner,<br />

qui, grâce à toi, vivre avec nous<br />

puisse mériter,<br />

et manger à la même table<br />

du même pain dont je me nourris,<br />

pour qu’elle connaisse les biens<br />

que j’ai en un tel Fils,<br />

et que, de ta grâce et de ta vigueur,<br />

Avec moi elle se réjouisse.<br />

Ces poèmes trinitaires du ROMANCERO sont un véritable<br />

dévoilement de l’orthodromie divine. Notre Père<br />

y trouvait « absolument toute notre doctrine relationnelle,<br />

toute notre circumincessante charité ; ces épousailles<br />

sont le mystère des mystères qui fera notre<br />

bonheur inépuisable dans l’éternité, si Dieu veut bien<br />

nous y accueillir. Mais dès ici-bas, cela donne à notre<br />

religion une sorte de vivacité, d’alacrité, d’enthousiasme<br />

perpétuel. Ce sont de vives flammes d’amour chargées<br />

d’une doctrine totale. »<br />

L’ÉPOUSE DU FILS.<br />

Cependant cette merveilleuse doctrine, toute à la<br />

gloire de l’Immaculée, ne fut pas bien comprise... de<br />

saint Jean de la Croix lui-même ! Pour lui, la Vierge<br />

Marie est cette « gracieuse Mère » qui donne à Dieu sa<br />

chair. Mais Elle n’est pas l’épouse, ni elle, ni <strong>au</strong>cun<br />

être vivant. L’épouse, dans la pensée de saint Jean de la<br />

Croix, selon les Pères et les théologiens scolastiques,<br />

n’est pas une réalité de chair et de sang, mais une idée<br />

platonicienne, l’idée d’ “ Homme ”, c’est une abstraction<br />

aristotélicienne, la “ nature humaine ”, désignant le<br />

genre humain tout entier <strong>au</strong>quel Marie elle-même appartient<br />

comme une enfant d’Ève, ni plus ni moins.<br />

Mais la “ nature humaine ”, en bonne philosophie,<br />

n’est qu’une manière d’être, prise par le Verbe pour<br />

devenir l’Époux de chair et de sang, et d’âme et d’esprit<br />

d’une épouse de chair et de sang, et pour entreprendre<br />

avec Elle de s<strong>au</strong>ver le monde. Ces épousailles,<br />

Il les a célébrées le jour de l’Annonciation. Alors la<br />

chair de la Vierge Marie ne fait qu’un avec la chair du<br />

Fils de Dieu, produite en Elle comme une fleur sur<br />

cette tige virginale.<br />

Muni de cette clef de lecture, l’enfant de Marie,<br />

consacré à son Cœur Immaculé, découvre dans le RO-<br />

MANCERO que l’amour est tout. Son symbole est celui


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 24<br />

des épousailles, mais la réalité toute divine se trouve en<br />

Jésus et Marie.<br />

L’abbé de Nantes, notre Père, est le théologien de la<br />

grande intuition de saint Maximilien-Marie Kolbe méditant<br />

sur le dogme proclamé par Pie IX en 1854 et les<br />

apparitions de Notre-Dame de Lourdes en 1858, comprenant<br />

que l’Immaculée Conception est plus du Ciel<br />

que de la terre, plus divine qu’humaine, objet d’un<br />

amour particulier. Car c’est avec Elle, par Elle et pour<br />

Elle, nous le savons maintenant, que Dieu a tout créé,<br />

tout racheté, et que pour finir il sanctifiera le genre<br />

humain tout entier lors du triomphe final du Cœur Immaculé<br />

de Marie, inconditionnellement promis à Fatima.<br />

Cette retraite fut donc un monument de doctrine mariale<br />

que nous avons retranscrit dans les CRC no 297 de<br />

décembre 1993 ; nos 299 et 302 de février et mai 1994.<br />

1997 :<br />

CIRCUMINCESSANTE CHARITÉ TRINITAIRE<br />

En 1993, notre bien-aimé Père avait conscience<br />

d’avoir suivi un chemin original : « J’allais dire que ce<br />

n’est pas orthodoxe ! Si, c’est orthodoxe mais ce n’est<br />

pas classique. Dans les livres, on commence par Dieu,<br />

la Trinité, l’Incarnation... mais dans la vie, lorsque le<br />

diable veut nous ravir notre âme et que l’on cherche<br />

une aide pour ne pas périr, on trouve la main secourable<br />

de la Vierge Marie notre Mère, on la tient et on ne<br />

la lâche plus. »<br />

En 1997, il reprit sa méditation de la “ circumincessante<br />

charité ” d’une manière plus “ classique ” afin d’y<br />

intégrer le bénéfice de sa métaphysique relationnelle et<br />

de sa “ théologie totale ”.<br />

L’AMOUR DU PROCHAIN À L’ ÉCOLE DE NOTRE PÈRE.<br />

Nous sommes tous frères, pourquoi ? Comment ?<br />

Par la circumincessante charité divine issue de l’unique<br />

sacrifice des deux Cœurs transpercés de Jésus et Marie<br />

crucifiés. <strong>La</strong> vision de Tuy nous révèle ce mystère de<br />

grâce et de miséricorde, par lequel la tendresse des<br />

divines Personnes ne demande qu’à s’épancher sur la<br />

terre afin d’y susciter en retour notre dévotion... Tendresse<br />

divine, mariale, et dévotion humaine découlant<br />

du rése<strong>au</strong> serré des relations de paternité, filiation,<br />

conjugalité, procréation, en lesquelles Dieu nous a créés<br />

à son image et ressemblance (cf. Gn 1, 26-27).<br />

En cet admirable échange, et à proportion de notre<br />

familiarité avec le Bon Dieu, avec la Très Sainte<br />

Vierge, avec les saints et les anges, ce sont des flots de<br />

lumières et de charité célestes qui nous seront communiqués<br />

afin de nous aider à mieux être père, fils, époux,<br />

épouse, amis.<br />

C’est ainsi, nous enseigne notre Père, que « la douce<br />

paternité divine doit remplir les pères humains, comme<br />

déjà saint Joseph, et la maternité de Marie donner une<br />

impulsion merveilleuse <strong>au</strong>x épouses fidèles et <strong>au</strong>x<br />

mères chrétiennes ». C’est ainsi que les prêtres, les reli-<br />

gieux, religieuses, comme <strong>au</strong>ssi les époux chrétiens<br />

consacrés à la Vierge Marie ou à saint Joseph depuis<br />

leur enfance, en amitié avec tel saint, voués à telle<br />

confrérie de piété, entreront de plain-pied dans la vie<br />

sacerdotale et religieuse, ou bien encore aborderont le<br />

mariage humain avec grande sagesse. Ils ne seront pas<br />

seuls, ni livrés à leurs instincts charnels, ni troublés par<br />

diverses psychanalyses en vogue dans l’Église depuis<br />

Vatican II. Mais ils seront forts de leurs intimes relations<br />

<strong>au</strong>x personnes divines et <strong>au</strong>x saints protecteurs,<br />

pris pour modèles, sources de grâce et objets de leur<br />

dilection, cultivée, alimentée par les dix minutes d’oraison<br />

quotidienne prescrite <strong>au</strong>x phalangistes.<br />

NOVA ET VETERA.<br />

Notre Père voulut conclure cette retraite en la récapitulant<br />

en vingt-trois petits chapitres, dans une merveilleuse<br />

vision unitive de paradis retrouvé, où la<br />

grande obsession sexuelle qui empoisonne l’humanité<br />

depuis le péché des origines peut être exorcisée. Certes<br />

le démon est toujours là pour tenter l’homme et la<br />

femme, mais s’ils suivent l’enseignement libérateur de<br />

notre Père, l’émerveillement du plan de Dieu qui est<br />

Amour, et la “ pureté positive ” qui en résulte l’emporteront<br />

sur le trouble et les débordements désordonnés<br />

de la chair.<br />

Car enfin cette différence des sexes fut voulue par<br />

Dieu, d’une part comme la représentation charnelle des<br />

processions trinitaires du Fils et du Saint-Esprit, d’<strong>au</strong>tre<br />

part comme la raison ultime de l’incarnation du Verbe.<br />

En effet, si Adam et Ève ont été créés mâle et femelle<br />

avant le péché originel, c’est en vue de l’union de<br />

son Fils et de Celle qu’il aimait plus que toutes les<br />

<strong>au</strong>tres créatures, l’Immaculée, temple du Saint-Esprit, la<br />

Femme par excellence, épouse de cet époux, qui accueillerait<br />

en son sein cet homme parfait dans une<br />

union, une unité sans équivalent.<br />

Distinguer ainsi l’homme et la femme, par le h<strong>au</strong>t,<br />

explique notre Père, les appelle à trouver l’un et l’<strong>au</strong>tre<br />

leur épanouissement dans une pureté parfaite, mystique,<br />

chacun selon sa condition, chacun selon sa vocation. Le<br />

couple humain dans cette lumière de charité trinitaire est<br />

non seulement délivré des prestiges de Satan, mais il<br />

participe à la lutte contre cet ennemi du genre humain, à<br />

la ressemblance des Saints Cœurs de Jésus et de Marie<br />

Immaculée, dans l’offrande bienheureuse, éminemment<br />

féconde d’un sacrifice rédempteur, qu’il s’agisse du<br />

saint Sacrifice de la Messe ou de son figuratif, celui de<br />

l’amour humain. Admirables harmoniques, correspondances<br />

que les poètes et les liturgistes du troisième<br />

millénaire ne cesseront decélébrer.<br />

Mais il f<strong>au</strong>t tout d’abord que se consomme le mystère<br />

d’iniquité que nous voyons se dérouler sous nos<br />

yeux. Si le démon des origines revient à l’avant-scène,<br />

il est depuis 1830 marqué de près par l’Immaculée, qui<br />

annonce à Elle seule l’illusion caduque de son règne et<br />

sa chute finale.<br />

En attendant, c’est la totalité de son mystère trini-


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taire que Dieu veut nous donner à adorer en Elle. Notre<br />

Père adhère absolument à cette volonté, et d’emblée sa<br />

contemplation nous montre la Vierge Marie préexistante<br />

: Fille du Père, elle assiste à la création de l’univers.<br />

Épouse du Verbe, elle est Corédemptrice dès le<br />

péché des origines. « Femme » de l’Apocalypse et Reine<br />

des Cieux, Temple du Saint-Esprit et Mère universelle<br />

Médiatrice de toutes grâces, c’est elle qui doit mettre <strong>au</strong><br />

monde une nouvelle génération d’enfants de Dieu.<br />

Exit la “ génération du concile ”, l’avenir de l’Église<br />

est uniquement dans la “ génération de l’Immaculée ”,<br />

celle des « apôtres des derniers temps » que saint<br />

Louis-Marie Grignion de Montfort appelait de ses<br />

vœux, comme notre Père nous le rappellera en conclusion.<br />

Grâce à lui, quelle joie sans cesse jaillissante<br />

d’être nés sous ce signe ou de le préparer !<br />

1998. TENDRESSE ET DÉVOTION DIVINE,<br />

EUCHARISTIQUE ET MARIALE<br />

L’année suivante, il reprit donc le même dessein :<br />

« Nous ne cherchons pas à faire de la théologie, nous<br />

cherchons à émouvoir notre cœur de tendresse pour tout<br />

ce que Dieu nous donne à aimer. » Plus encore que<br />

dans les retraites précédentes, cette bonté et tendresse<br />

divines vont nous être communiquées par notre Père,<br />

par le ton de sa voix, l’expression de son visage, <strong>au</strong> fur<br />

et à mesure qu’il tourne les pages de sa Bible et que<br />

l’on entre à sa suite dans la bienveillante-bienfaisante<br />

familiarité des personnes rencontrées.<br />

<strong>La</strong> première, Dieu notre bon Père du Ciel, qui se<br />

réjouit d’avoir créé son fils Adam. Il lui apprend à parler<br />

et fait son éducation de fils de roi pour ainsi dire, car<br />

Adam exerce sa régence en sous-traitance de la roy<strong>au</strong>té<br />

de Dieu sur toute la création. Merveilleuse relation de ce<br />

Père et de ce fils qui s’entretiennent à la brise du jour.<br />

LA NAISSANCE D’ ÈVE DU CÔTÉ D’ADAM.<br />

Mais voilà qu’à ce Père qui est Dieu, et à ce fils qui<br />

est homme, manque cependant une troisième personne<br />

qui soit le complément heureux d’Adam. Yahweh va<br />

tirer de la côte d’Adam son fils, une épouse, Ève, par<br />

une merveilleuse « opération chirurgicale » qui ravit<br />

notre Père et constitue le couple humain à l’image et<br />

ressemblance de la Trinité divine (cf. Gn 1, 27).<br />

C’est unique et fondateur car, dans l’inégalité de ces<br />

relations constituantes, c’est toute la joie de Dieu et du<br />

genre humain, hiérarchiquement ordonné, qui n’<strong>au</strong>ra pas<br />

trop de l’éternité pour s’exprimer. Notre Père en exulte<br />

d’enthousiasme : « Joie pour Dieu à la création<br />

d’Adam, <strong>au</strong>ssitôt devenu le bien-aimé de Yahweh ! Joie<br />

d’Adam à la vue d’Ève, encore étendue contre son<br />

corps <strong>au</strong> jour de sa naissance ! et joie de Yahweh, de<br />

cette joie d’Adam et d’Ève. Joie d’Ève en retour, d’être<br />

ainsi adoptée par l’un et par l’<strong>au</strong>tre dans une paix<br />

profonde ! Joie d’Adam et Ève s’unissant dans le plus<br />

sublime des mariages qui se puisse rêver, sous le regard<br />

de Dieu créant et bénissant son œuvre. »<br />

LA VIE AU PARADIS.<br />

Mais pour le quotidien, comment imaginer ce bonheur<br />

mutuel de « papa le Bon Dieu » (sainte Thérèse) et<br />

de ses deux premiers enfants. C’est facile, dira notre<br />

Père, il suffit de penser <strong>au</strong>x enfants de Fatima qui ont<br />

vécu une semblable intimité, dans cette grande lumière<br />

qui leur est apparue et qui était Dieu. Présence quelque<br />

peu écrasante dont l’Ange fut le médiateur et qui fit<br />

dire <strong>au</strong> petit François : « Je sentais que Dieu était en<br />

moi, mais je ne savais pas comment cela s’était fait. »<br />

Cependant, le 13 mai 1917, nous explique sœur Lucie<br />

« l’apparition de Notre-Dame vint de nouve<strong>au</strong> nous<br />

plonger dans le surnaturel, mais d’une manière be<strong>au</strong>coup<br />

plus suave. Au lieu de cet anéantissement en la<br />

divine présence, qui nous prostrait, même physiquement,<br />

celle-ci nous laissa une paix, une joie expansive<br />

qui ne nous empêchait pas de parler ensuite de ce qui<br />

s’était passé. » Ces enfants ont donc été fortifiés dans<br />

la grâce, assez pour vivre en présence de Dieu ! Et<br />

Adam ? Et Ève ? Pareillement.<br />

Cette considération de la situation avant le péché<br />

originel est capitale. Elle est pour ainsi dire la clef de<br />

voûte de tout l’édifice de la circumincessante charité,<br />

mystère dont la connaissance apporte un remède à tant<br />

de désordres nés de deux erreurs dont notre bienheureux<br />

Père veut à tout prix nous préserver : d’une part le<br />

mépris platonicien de la sexualité, malencontreusement<br />

passé dans la tradition <strong>catholique</strong>, et d’<strong>au</strong>tre part le<br />

diabolique soupçon freudien qui empoisonne l’humanité<br />

à l’époque moderne. Car ces deux désorientations, apparemment<br />

opposées, se prêtent en réalité un mutuel<br />

appui, la première faisant le lit de la seconde, toutes<br />

deux travaillant à l’affolement de nos adolescents.<br />

Dramatique « problème pastoral » ignoré avant, pendant<br />

et après Vatican II !<br />

AMOUR HUMAIN AMOUR DIVIN.<br />

Notre Père, lui, veille sur son petit troupe<strong>au</strong>, et veut<br />

le maintenir sur les voies de la justice et de la “ pureté<br />

positive ” :<br />

« Tout le monde pense <strong>au</strong> problème de la sexualité.<br />

Tout le monde est appelé à connaître, d’une manière ou<br />

d’une <strong>au</strong>tre, ce que sont les choses du sexe, de la<br />

reproduction, les choses de l’amour sensuel ou spirituel.<br />

Dieu l’a voulu, et donc il ne f<strong>au</strong>t pas cacher ces choses<br />

<strong>au</strong>x chrétiens, la Bible elle-même en parle en de nombreuses<br />

occasions. On a trop élevé nos enfants à se<br />

boucher les yeux pour ne pas voir. J’en ferais un diaporama,<br />

ou j’imaginerais bien une enfilade de salles<br />

comme <strong>au</strong> Louvre. Dans chaque salle serait représenté<br />

le contenu d’un chapitre de notre retraite.<br />

« Je voudrais que le monde entier défile, les religieuses,<br />

les dominicains, les jésuites, les prêtres séculiers,<br />

les docteurs, les sages-femmes. Que tout le monde<br />

comprenne en voyant Adam et Ève si bien mariés ce<br />

que c’est que la création par Dieu de l’homme et de la<br />

femme, du sexe et de l’instinct sexuel, et de tout ce que


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cela suppose de mouvement, de passion, de vertu, de<br />

désir, de don mutuel, toute cette merveille que l’on<br />

appelle le mariage institué par Dieu <strong>au</strong>x premiers temps<br />

de la création. Il f<strong>au</strong>t qu’<strong>au</strong>cun être n’y échappe, il f<strong>au</strong>t<br />

que tous sachent comment ils sont venus à l’existence<br />

et comment ils ont un père et une mère. »<br />

Devant ce couple associé dans l’amour, notre Père<br />

imagine les enfants de l’Église, bien éduqués par elle,<br />

moduler sans complexe leur réponse, chacun selon la<br />

vocation à laquelle Dieu ne manquera pas de les attirer de<br />

la plus aimable manière. Épouser un homme ou une<br />

femme sous le regard de notre très chéri Père Céleste,<br />

devenir épouse du Christ, fils du Père tout dévoué <strong>au</strong><br />

service de son Église, tous tireront profit de cette parole<br />

de Jésus : « <strong>La</strong> chair ne sert de rien. » Car l’organe qui<br />

doit polariser toute notre attention depuis l’incarnation du<br />

Verbe, mais encore f<strong>au</strong>t-il que l’Église le prêche, ce n’est<br />

plus le sexe mais son correspondant spirituel – de cet<br />

« Esprit qui donne la vie » – c’est LE CŒUR. C’est la<br />

charité dont la source vive jaillit du cœur à cœur eucharistique<br />

dans la communion, et répand sa bienfaisance, de<br />

proche en proche, jusqu’<strong>au</strong>x plus « lointaines périphéries<br />

», comme le souhaite notre pape François. C’est cette<br />

circumincessante charité, toute de tendresse eucharistique<br />

et mariale, que nous voyons et admirons dans la vie des<br />

saints, c’est cette « cordialité » puisée <strong>au</strong>x sources vives<br />

du Cœur à Cœur de Jésus et Marie dont notre bienheureux<br />

Père n’a cessé d’être l’apôtre enthousiaste.<br />

L’ ŒUVRE DU DIABLE.<br />

Il y en avait un qui, lui, avait compris toute l’ampleur<br />

du dessein divin, et qui savait pourquoi le Bon<br />

Dieu avait voulu créer les êtres humains homme et<br />

femme. C’était le diable. Il savait bien que cette distinction<br />

des sexes était faite pour que les hommes et les<br />

femmes sachent d’instinct de quel amour Dieu nous<br />

aimera et voudra être aimé de nous lorsqu’il s’incarnera.<br />

C’est avec une haine irrépressible de ce merveilleux<br />

projet d’incarnation, prodigieux prolongement de l’amour<br />

trinitaire, que le serpent s’avance dans le jardin et se<br />

dirige vers ces premiers jeunes mariés. Il va s’en prendre<br />

à Ève d’abord puis à Adam, les souiller et polluer en<br />

eux “ les sources de la vie ”... Épouvantable péché qui<br />

ruinait de fond en comble le projet matrimonial du Bon<br />

Dieu, car c’est pour le voir se reproduire naturellement<br />

à des milliards d’exemplaires, qu’il avait lancé la grande<br />

affaire de la création.<br />

Mais cette intervention de Satan et le péché de nos<br />

premiers parents vont faire jaillir du Cœur de notre<br />

grand Dieu un amour encore plus prodigieux, qu’il<br />

tenait d’ailleurs en réserve, celui de l’Immaculée Conception.<br />

Si l’ordre naturel s’est édifié sous l’égide de<br />

l’homme, de son fils Adam, c’est sous l’égide de la<br />

femme que le surnaturel va se déployer désormais pour<br />

la rest<strong>au</strong>ration de toute chose. Et alors que le premier<br />

couple gît dans la fange et que Satan semble triompher,<br />

la rédemption et la sanctification du genre humain sont<br />

mises en œuvre, annonçant la chute finale de Satan. Ce<br />

sera l’œuvre de l’Immaculée et de sa lignée : « <strong>La</strong><br />

Femme t’écrasera la tête. » (Gn 3, 15)<br />

LA ROMANCE D’ ISRAËL, PEUPLE ÉLU DE DIEU.<br />

L’histoire sainte peut commencer ; elle nous apparaît<br />

comme une suite d’alliances entre Dieu et ses médiateurs<br />

de prédilection, que notre Père a appelée la romance<br />

du peuple hébreu, où il nous fait entrer dans la<br />

familiarité des amis de Dieu : Abraham, Isaac, Jacob,<br />

Joseph, David et Abigayil, Ruth et Booz.<br />

Au prophète Osée, Dieu demande d’épouser une<br />

prostituée du nom de Gomer. Pourquoi ? Parce que<br />

c’est une parabole vécue de l’alliance tumultueuse qu’il<br />

a nouée avec son peuple. Notre Père nous l’explique :<br />

« Gomer tellement habituée à ses adultères, une fois<br />

qu’elle <strong>au</strong>ra bien connu son Osée, elle l’abandonnera et<br />

reprendra ses mœurs étranges. C’est alors que Dieu<br />

apparaîtra à son prophète pour lui dire : “ Tu vois ce<br />

qu’elle est, ta prostituée. Eh bien ! vous, le peuple de<br />

Jérusalem, vous le peuple de Samarie, vous, le peuple<br />

d’Israël, vous êtes infidèles de la même manière. Vous<br />

recourez à vos idoles chaque fois que vous le pouvez !<br />

Vous êtes vraiment vicieux jusqu’à l’os ! Voilà ce que<br />

je vous dis maintenant : vous allez être ruinés ! »<br />

Cependant, le châtiment ne sera pas le dernier mot<br />

de Dieu, mais la miséricorde. C’est ainsi que Dieu demande<br />

finalement à Osée de racheter sa femme prostituée<br />

« comme Yahweh aime les enfants d’Israël, bien<br />

qu’ils se tournent vers d’<strong>au</strong>tres dieux » (Os 3, 1). Le<br />

prophète va donc va reprendre chez lui son épouse,<br />

mais non sans lui imposer de sévères conditions.<br />

« C’est ainsi que l’on voit apparaître dans le monothéisme<br />

juif et jusqu’<strong>au</strong> sein de la divinité elle-même,<br />

une dualité. Ce peuple va maintenant vivre avec la<br />

crainte de Yahweh Sabaoth, le Dieu de la puissance<br />

créatrice, mais en même temps il va être instinctivement<br />

porté dans sa prière, dans ses ps<strong>au</strong>mes à avoir une<br />

conception <strong>au</strong>tre de Dieu, non seulement comme d’un<br />

mari amoureux de sa femme, mais encore d’un mari qui<br />

pardonne à sa femme infidèle, afin de recommencer<br />

avec elle quelque chose qui soit digne d’elle et de lui.<br />

C’est prodigieux ! »<br />

Ce sera l’œuvre du Messie, « Fils d’homme » sorti<br />

de Dieu sur les nuées du Ciel, selon les visions du<br />

prophète Daniel, et né d’une Vierge selon Isaïe.<br />

VOICI L’ÉPOUX : JÉSUS, NOTRE RÉDEMPTEUR !<br />

Jésus didascale, maître de sagesse ne prononce pas<br />

d’anathème, mais il réapprend <strong>au</strong>x braves gens de Galilée<br />

à prier Dieu, à le considérer comme leur Père très<br />

bon et miséricordieux. Si Jésus guérit les p<strong>au</strong>vres et les<br />

malades, il veut surtout leur annoncer la bonne nouvelle<br />

des béatitudes.<br />

Cependant cet apprentissage de la miséricorde divine<br />

va peu à peu se heurter à l’incompréhension de tous.<br />

Et lorsque dans la passion de sa circumincessante cha-


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rité, Jésus ne se contentera pas de les enseigner, de les<br />

guérir, de les purifier de leurs péchés, mais ira jusqu’à<br />

se faire leur nourriture, tous l’abandonneront : ce sont<br />

des paroles trop dures à entendre... Seul Simon Pierre,<br />

inspiré par le Père, proclame sa foi : Jésus est « le Fils<br />

du Dieu vivant », mais il est loin de comprendre ce qu’il<br />

dit puisqu’il veut <strong>au</strong>ssitôt faire obstacle à la volonté de<br />

Jésus de souffrir et de mourir, en quoi consiste précisément<br />

l’obéissance d’un tel Fils à un tel Père.<br />

Au commencement de cette première campagne de<br />

prédication en Galilée, Notre-Seigneur semblait parti<br />

pour inst<strong>au</strong>rer le Roy<strong>au</strong>me, pourquoi a-t-il finalement<br />

échoué ? <strong>La</strong> raison des persécutions et de l’échec du<br />

Christ est celle-là même qui a toujours accompagné le<br />

juste, comme le livre de la SAGESSE l’enseigne en nous<br />

dévoilant la psychologie torve de ses adversaires, cellelà<br />

même des ennemis de Jésus. Mais pourquoi ces<br />

persécutions, pourquoi cette mise à mort du juste, pourquoi<br />

ce triomphe apparent du mal ? <strong>La</strong> réponse se<br />

trouve dans les magnifiques poèmes du serviteur de<br />

Yahweh du second Isaïe, “ l’Inconnu de l’Exil ”, annonce<br />

et description des souffrances du juste comme un<br />

rachat, une rédemption suivie d’une résurrection.<br />

Jésus accomplit les Écritures !<br />

« <strong>La</strong> Croix est l’expiation sacrificielle, mais elle doit<br />

être suivie, d’après Isaïe et le ps<strong>au</strong>me 21, de la communion.<br />

» Jésus en cela se coule dans la liturgie des sacrifices<br />

de l’Ancien Testament où, après avoir achevé le<br />

sacrifice d’expiation par la mise à mort de la victime,<br />

on pratiquait la communion fraternelle en mangeant<br />

cette même victime.<br />

JÉSUS DE NAZARETH, DIEU NÉ DE DIEU.<br />

« Qui ouvrira les yeux et les cœurs des fidèles à<br />

cette grande vérité que Jésus est Dieu, Dieu né de<br />

Dieu, Lumière née de la Lumière ? » C’est, nous<br />

explique notre Père, saint Jean le disciple véritable et<br />

bien-aimé du Seigneur ; plus qu’<strong>au</strong>cun <strong>au</strong>tre il a su<br />

écouter, retenir, prêcher et écrire ce mystère. <strong>La</strong> grâce<br />

d’une telle vocation lui a été infusée lors de la dernière<br />

Cène alors que, selon le rite en usage à Qumrân, sa tête<br />

reposait sur le cœur du Maître (cf. Jn 13, 23) et que lui<br />

étaient ainsi communiquées l’onction et l’<strong>au</strong>torité pour<br />

devenir son interprète.<br />

Voilà pourquoi « les discours de Jésus dans saint Jean,<br />

aboutissent à ces deux buts qui lui restaient à atteindre<br />

avant de remonter <strong>au</strong>x Cieux : se proclamer Fils de Dieu<br />

et Dieu lui-même, ne faisant qu’Un avec Dieu son Père<br />

et le Saint-Esprit. Puis, <strong>au</strong> cœur de cette immense révélation,<br />

manifester <strong>au</strong>x hommes que Dieu veut avoir avec<br />

chacune de ses créatures une unité d’amour semblable<br />

à celle qui anime les trois Personnes divines. »<br />

Mais comment un tel mariage pourra-t-il se consommer<br />

de génération en génération ?<br />

Saint Jean nous le révèle en nous rapportant le<br />

discours de Jésus à Capharnaüm :<br />

« Les juifs alors se mirent à discuter fort entre eux ;<br />

ils disaient : “ Comment celui-là peut-il nous donner sa<br />

chair à manger ? ” Alors Jésus leur dit : “ En vérité, en<br />

vérité, je vous le dis, si vous ne mangez la chair du Fils<br />

de l’homme et ne buvez son sang, vous n’<strong>au</strong>rez pas la vie<br />

en vous. Qui mange ma chair et boit mon sang a la vie<br />

éternelle et je le ressusciterai <strong>au</strong> dernier jour. Car ma chair<br />

est vraiment une nourriture et mon sang vraiment une<br />

boisson. Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en<br />

moi et moi en lui. De même que le Père, qui est vivant, m’a<br />

envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me<br />

mange, lui <strong>au</strong>ssi vivra par moi. Voici le pain descendu<br />

du ciel ; il n’est pas comme celui qu’ont mangé les pères<br />

et ils sont morts ; qui mange ce pain vivra à jamais. ”<br />

Tel fut l’enseignement qu’il donna dans une synagogue<br />

à Capharnaüm. » (Jn 6, 52-59)<br />

Cet enseignement est la clef d’interprétation du dernier<br />

discours de Jésus, bien connu sous le nom de<br />

“ PRIÈRE SACERDOTALE ” (Jn 17). « Quand Jésus les quitte,<br />

il leur dit : “ Mes petits enfants, avec l’Eucharistie vous<br />

avez un ciment d’union des uns avec les <strong>au</strong>tres, car<br />

l’Eucharistie c’est mon Corps et mon Sang pour y<br />

communier dans union conjugale de vous à moi, et une<br />

union fraternelle entre vous s’il vous plaît, et dans le<br />

Cœur de Dieu, comme je suis uni à mon Père de toute<br />

éternité. Au revoir ! ” »<br />

« JÉSUS, C’EST L’AMOUR ! »<br />

Notre Père nous fit tout d’abord remarquer que<br />

Jésus se devait de proclamer l’intime secret de sa divinité,<br />

à la face même de ses ennemis, dans de grands<br />

discours polémiques (Jn 7 - 10), afin de faire échec par<br />

avance <strong>au</strong> modernisme prétendant que ce sont des<br />

« discours théologiques postérieurs »...<br />

Dans cette controverse à Jérusalem, un Dieu d’amour<br />

se révèle dans sa volonté de puissance, terrible pour<br />

supplanter ses riv<strong>au</strong>x, mais très douce pour reconquérir<br />

le cœur de son épouse pécheresse par un seul de ses<br />

regards, car « le regard parle du secret du cœur » :<br />

« Je fais mes lectures spirituelles avec mes yeux, mon<br />

imagination, mon cœur parce que je voudrais que vous<br />

les fassiez de manière semblable. » Merci mon Père...<br />

Il y a le regard de Jésus sur la Samaritaine (cf.<br />

Jn 4, 7-30) : « Moi, je suis amoureux de la Samaritaine !<br />

Je la vois, p<strong>au</strong>vre fille ! P<strong>au</strong>vre dégradée, p<strong>au</strong>vre<br />

souillée, p<strong>au</strong>vre femme ! Mais intelligente et presque<br />

insolente un peu ! Pleine de désir et pleine de piété. Un<br />

peu sorcière, un peu tricheuse, séductrice ! Elle prend<br />

bien son temps, ou plus exactement, elle perd son<br />

temps ! Jésus est là avec son sérieux. Il était très sérieux,<br />

devait avoir un visage très méditatif. Elle, elle<br />

l’excite, elle lui dit des petites plaisanteries. Mais lui<br />

l’amène où il veut. Finalement, pour se débarrasser de<br />

lui, elle lui dit : “ Moi, j’attends le Messie. ” Jésus la<br />

regarde... Si vous ne voyez pas le regard de Jésus, vous<br />

ne pouvez pas comprendre ! Il lui dit : “ Je le suis, moi<br />

qui te parle. ” Elle est renversée ! Elle ne dit plus un


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 28<br />

mot, elle court dans le pays pour dire : “ J’ai rencontré<br />

le Messie ! J’ai rencontré le Messie ! ” Deuxième coup<br />

du cœur ! Elle n’a jamais oublié, ce n’est pas possible. »<br />

Et la femme adultère (Jn 8, 4-10) non plus. Elle allait<br />

être lapidée par tous ces pharisiens hypocrites. Jésus<br />

s’interpose et les défie : « Que celui d’entre vous qui est<br />

sans péché lui jette le premier une pierre ! Et, se baissant<br />

de nouve<strong>au</strong>, il écrivait sur le sol. Mais eux, entendant cela,<br />

s’en allèrent un à un, à commencer par les plus vieux ; et<br />

il fut laissé seul, avec la femme toujours là <strong>au</strong> milieu. »<br />

« Jésus la regarde alors avec un indéfinissable regard<br />

! Jésus voit son âme, Jésus juge, Jésus pardonne,<br />

Jésus la renvoie en la priant de ne plus recommencer,<br />

telle est la miséricorde. Quelle impression sur cette<br />

femme ! Au lieu de périr sous les pavés qu’on allait lui<br />

lancer, elle a en face d’elle un homme comme elle n’en<br />

a jamais vu ! » Jésus est vraiment le Fils de ce Dieu qui<br />

a parlé <strong>au</strong> prophète Osée...<br />

Et l’aveugle-né ? (Jn 9) « Encore un qui a bénéficié<br />

d’un regard de Jésus inoubliable ! C’est toute une affaire<br />

! Cet aveugle demande à être guéri, il n’a jamais<br />

vu personne depuis sa naissance. Jésus le guérit.<br />

L’aveugle voit Jésus le regarder et lui dire en confidence<br />

qu’il est le Messie. L’aveugle a tout ensemble le<br />

regard, la parole, l’élan du cœur. Moi <strong>au</strong>ssi, je l’aime<br />

bien celui-là. »<br />

Jésus aima les siens jusqu’à la fin, et c’est pourquoi<br />

il se fit leur serviteur, mais le lavement des pieds<br />

(Jn 13) n’était qu’un préambule, « afin de leur montrer<br />

qu’il irait jusqu’à être pire qu’un esclave et mourir sur<br />

une Croix, pour leur salut ». Jésus laissait ainsi à ses<br />

disciples un exemple à suivre, et c’est pourquoi il leur<br />

adresse ensuite un discours bouleversant sur la charité<br />

fraternelle. Ses paroles d’adieux (Jn 14 ; 15 ; 16) sont<br />

des paroles d’amour célestiel qui nous montrent bien<br />

qu’il n’a pas perdu de vue son projet.<br />

« Le Christ explique à ses Apôtres qu’il vient du<br />

Ciel, qu’il y retourne et en reviendra de nouve<strong>au</strong>. Ils<br />

savent maintenant que Jésus est le Fils de Dieu, qu’il a<br />

toujours existé, et qu’il est toujours présent, <strong>au</strong> Ciel<br />

dans le sein du Père, et en même temps sur terre tandis<br />

qu’il leur parle et leur révèle le sidérant mystère d’un<br />

Dieu fait homme. Bref, Jésus a finalement fait passer à<br />

son peuple tout ce qu’il lui était nécessaire de connaître<br />

sur la vie trinitaire et sur les missions extérieures que le<br />

Père donne <strong>au</strong> Fils et <strong>au</strong> Saint-Esprit, pour aller courir<br />

sur la terre chercher les brebis perdues et les ramener<br />

avec lui. »<br />

Les scènes de la Passion sont les plus bouleversantes :<br />

« Imaginez les échanges de regard avec Pilate, leur<br />

cœur à cœur, car enfin, que voulez-vous, moi, j’aime<br />

Pilate ! Parce que Pilate a été gentil, il a été humain<br />

avec Jésus. Bien sûr il a été lâche, mais enfin d’<strong>au</strong>tres<br />

l’ont été plus que lui. »<br />

Au sommet du mont Calvaire, voici Jésus crucifié<br />

qui s’adresse une dernière fois à sa Mère, et c’est une<br />

manière pour lui, sa mission terrestre de circumincessante<br />

charité achevée, de passer la main à l’Immaculée<br />

corédemptrice qui doit la prolonger... Et c’est sous son<br />

égide maternelle que l’Église tr<strong>au</strong>matisée par la Passion<br />

se réunit. Jésus ressuscité peut revenir, ils sont tous là<br />

<strong>au</strong>tour d’Elle, Jean, Marie-Madeleine, Pierre, Thomas et<br />

les <strong>au</strong>tres... Ils n’osent y croire mais ils ne peuvent en<br />

douter, Jésus est vraiment ressuscité ! il va vraiment<br />

monter <strong>au</strong>x Cieux ! et il en redescendra pareillement ! à<br />

l’heure fixée par le Père, <strong>au</strong> plus grand péril des derniers<br />

temps, afin de trouver encore la foi sur la terre...<br />

Et notre Père d’achever cette conférence par un<br />

cri du cœur : « Enfin, nous avons compris ce qu’est<br />

l’Amour ! Il est impossible de lire cet Évangile d’un<br />

bout à l’<strong>au</strong>tre, sans comprendre que Jésus c’est l’Amour.<br />

Jesus, caritas ! »<br />

UNE ÉPOUSE SUR LA TERRE COMME AU CIEL<br />

Le CANTIQUE DES CANTIQUES est un livre inspiré,<br />

rédigé <strong>au</strong> retour de l’Exil, pour présenter en cinq poèmes<br />

l’histoire de l’alliance tumultueuse de Dieu avec<br />

son peuple, sous l’allégorie de l’amour conjugal.<br />

L’époux est le Dieu d’Israël : « Yahweh-Dieu s’est fait<br />

connaître <strong>au</strong>x hommes comme leur Père. Ensuite, il s’est<br />

fait connaître comme leur S<strong>au</strong>veur, leur Roi, leur Rocher,<br />

c’est-à-dire leur assurance dans la vie ; et finalement il a<br />

choisi d’aller jusqu’à se dire l’Époux de son peuple.<br />

« Et l’épouse ? C’est le peuple de Dieu, pécheur, mais<br />

qui, après avoir expié ses péchés durant un exil de<br />

soixante-dix ans à Babylone, retourne sur la terre<br />

d’Israël, bien imparfaite mais avec des velléités d’amour<br />

de Dieu <strong>au</strong> cœur :<br />

« Qu’il me baise des baisers de sa bouche. » (Ct 1, 2)<br />

Il s’ensuit un admirable échange : « Viens donc, ma<br />

bien-aimée, ma belle, viens. Car voilà l’hiver passé. »<br />

« <strong>La</strong> bien-aimée, c’est l’âme, soit de l’homme, soit<br />

de la femme, tout pareillement. Elle va rejoindre le<br />

troupe<strong>au</strong> “ sur notre terre ”, c’est la Terre promise, c’est<br />

le Ciel <strong>au</strong>jourd’hui, pour nous. »<br />

À une telle invite, la bien-aimée a répondu : « Sur ma<br />

couche, la nuit, j’ai cherché celui que mon cœur aime. Je<br />

l’ai cherché, mais je ne l’ai point trouvé ! Je me lèverai donc<br />

et je parcourrai la Ville. » Elle finit par le retrouver et fut<br />

grandement récompensée de son pourchas. Mais voilà<br />

que c’est à notre tour d’avoir de la difficulté à intégrer<br />

toutes les amoureuses paroles du troisième poème.<br />

Soudain, le quatrième poème nous interpelle singulièrement<br />

: « Ouvre-moi, ma sœur, mon amie, ma colombe,<br />

ma parfaite ! Car ma tête est couverte de rosée, mes boucles,<br />

des gouttes de la nuit. » Dans la nuit de l’épreuve,<br />

Jésus se présente avec sa Croix. Les excuses de<br />

l’Épouse semblent bien dérisoires :<br />

« J’ai ôté ma tunique, comment la remettrais-je ? J’ai<br />

lavé mes pieds, comment les salirais-je ? »<br />

« Même quand on ne s’est pas dérobé <strong>au</strong>x instances<br />

de la grâce, il f<strong>au</strong>t bien que nous passions par ce cal-


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 29<br />

vaire pour suivre le Christ dans sa Passion. C’est grandiose<br />

! Mais si on réduit cela à un incident banal d’un<br />

grand amour, on ne comprend plus rien. Ce quatrième<br />

poème est vraiment très angoissant, quand on le prend<br />

ainsi et qu’on se l’applique à soi-même et à l’Église. »<br />

DE LA SŒUR-FIANCÉE DE LA TERRE ...<br />

... À CELLE DU CIEL.<br />

Quand l’épouse se repent de sa lâcheté, il est trop<br />

tard, le Bien-Aimé est parti, mais elle sort <strong>au</strong>ssitôt de<br />

chez elle pour le retrouver. Cette fois, rien ne l’arrête,<br />

rien ne la rebute. Durant ce temps d’épreuve, de solitude,<br />

l’épouse ne pense qu’à son bien-aimé, ne parle<br />

que de lui, ne s’occupe que de ses intérêts. Ce sont<br />

<strong>au</strong>tant de grâces, de bénédictions qu’en réalité il déverse<br />

dans son cœur, et il est ravi de l’effet produit en<br />

elle et <strong>au</strong>tour d’elle : « Unique est ma colombe, unique ma<br />

parfaite. Elle est l’unique de sa mère, la préférée de celle<br />

qui l’enfanta. Les jeunes femmes l’ont vue et glorifiée [ce<br />

sont toutes les reines, les peuplades des environs, les tribus<br />

qui sont ainsi personnifiées], reines et concubines l’ont<br />

célébrée : “ Qui est celle-ci qui surgit comme l’<strong>au</strong>rore,<br />

belle comme la lune, resplendissante comme le soleil,<br />

redoutable comme des bataillons ? ” »<br />

« Évidemment, ce sont des textes que l’Église applique<br />

à la Sainte Vierge, mais ils concernaient précisément<br />

et d’abord la ville de Jérusalem, ce peuple de Jérusalem,<br />

qui avait été longtemps idolâtre et adultère à son Dieu.<br />

Tout cela, maintenant, est oublié. Le CANTIQUE DES CAN-<br />

TIQUES se projette dans l’avenir, voit Jérusalem illuminée<br />

par la gloire de Dieu, comme les deuxième et troisième<br />

rédacteurs du livre d’ISAÏE (chap. 40-55 ; 60-66) le disent<br />

de la Jérusalem qui va venir. »<br />

Le CANTIQUE DES CANTIQUES s’achève par une exclamation<br />

où l’épouse engage son Bien-Aimé à fuir avec<br />

elle « sur les montagnes emb<strong>au</strong>mées », <strong>au</strong>trement dit :<br />

« Allons là où le bonheur est éternel, rejoignons le Ciel<br />

<strong>au</strong>près de Jésus et de Marie. »<br />

Car cette Jérusalem de l’Ancien Testament ne peut<br />

être finalement que Marie seule.<br />

Fille d’Abraham, épouse et Mère de Dieu, seule <strong>au</strong><br />

jour de sa joie à l’Annonciation, de ses douleurs<br />

debout <strong>au</strong> pied de Jésus crucifié, et de sa gloire lors<br />

de son Assomption. Cette fille de Sion règne désormais<br />

<strong>au</strong> plus h<strong>au</strong>t des Cieux, comme les apparitions<br />

de Fatima le montrent à l’envi, réalisant plus que<br />

jamais les Écritures.<br />

SAGESSE, Ô SAGESSE !<br />

Or, le livre des PROVERBEs personnifie la Sagesse<br />

comme cette sœur fiancée :<br />

« Yahweh m’a conçue, commencement de sa Voie,<br />

avant ses œuvres, depuis toujours. Dès l’éternité, je<br />

fus sacrée, dès le commencement, dès les origines de<br />

la terre. Quand les abîmes n’existaient pas, je fus<br />

enfantée.<br />

« Quand il n’y avait point de sources regorgeant<br />

d’e<strong>au</strong>, avant que les montagnes ne fussent implantées,<br />

avant les collines, je fus enfantée ; alors qu’il n’avait<br />

pas encore fait la terre, ni les campagnes, ni le<br />

commencement des poussières du monde. Quand il affermit<br />

les cieux, j’étais là ; quand il traça un cercle à<br />

la surface de l’abîme, quand il condensa les nuées en<br />

h<strong>au</strong>t, quand il rendit puissantes les sources de l’abîme,<br />

quand il assigna sa limite à la mer, pour que les e<strong>au</strong>x<br />

n’en franchissent pas le bord, quand il fortifia les fondements<br />

de la terre ; à ses côtés, JE SUIS, enfant chérie<br />

; JE SUIS, faisant ses délices, jour après jour ;<br />

jouant devant lui tout le temps, jouant sur le sol de sa<br />

terre, et trouvant mes délices avec les fils d’Adam.<br />

« Or, à présent, mes fils, écoutez-moi. Heureux ceux<br />

qui gardent mes voies ! Écoutez la réprimande, soyez<br />

sages, ne la repoussez pas ! Heureux l’homme qui<br />

m’écoute, qui veille, jour après jour, à mes portes, pour<br />

en garder les vant<strong>au</strong>x, car qui me trouve, trouve la vie,<br />

et il obtiendra la faveur du Seigneur.<br />

« Mais qui m’offense blesse son âme, quiconque me<br />

hait chérit la mort. »<br />

(Pr 8, 22-36, traduit de l’hébreu par nos soins.)<br />

« C’est la participation d’une Femme à la vie divine,<br />

à la gloire céleste, qui est mise en pleine lumière par le<br />

rédacteur du livre des PROVERBES. Il la voit, il la contemple<br />

en esprit, comme toute proche de Dieu, dans<br />

l’orbe de Dieu, <strong>au</strong> point que son être même paraît<br />

divin. <strong>La</strong> preuve en est que, Elle et son Époux finalement<br />

sont entrevus comme une même et unique sagesse<br />

issue de Dieu, comme née de sa gloire, de sa lumière,<br />

de son Esprit-Saint. C’est sublime ! Hier, je doutais de<br />

l’efficacité de telles visions.<br />

« Aujourd’hui, je dis que si nous pensons <strong>au</strong> Cœur<br />

très saint et très unique de Jésus et de Marie, nous<br />

voyons que ces traditions méritent d’avoir été reprises<br />

par l’Église dans toutes les liturgies concernant la<br />

Vierge Marie. Ce sont ces textes qui alimentent la<br />

pensée chrétienne la plus mystique et la plus vraie <strong>au</strong><br />

sujet de la Vierge Marie <strong>au</strong> sein de Dieu, dans la gloire.<br />

« Selon la seconde figuration, l’annonce prophétique<br />

d’une nouvelle Alliance de Dieu avec son peuple, sous<br />

la charmante allégorie du CANTIQUE DES CANTIQUES,<br />

conduit à croire qu’une “ Femme ” mystérieuse, présente<br />

invisiblement à toute l’histoire humaine, sera appelée à<br />

régner sur le monde, deviendra par une grâce unique,<br />

inouïe, tout à la fois fille de Dieu, son Épouse <strong>au</strong>ssi, et<br />

la Mère de tous les hommes. »<br />

L’IMMACULÉE SUR LA TERRE COMME AU CIEL.<br />

Au terme de cette étude du Cantique et du courant<br />

sapiential, notre Père nous montrera finalement que le<br />

fondement biblique des gloires de Marie Immaculée<br />

repose sur deux pierres d’assise. D’une part « la tradition<br />

prophétique, historique, tout humaine du CANTIQUE<br />

où l’épouse de Dieu est Israël appelée à devenir la<br />

bien-aimée du Christ qui doit venir » et, d’<strong>au</strong>tre part,


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« la tradition sapientiale, qui sous l’inspiration du Saint-<br />

Esprit, nous montre qu’à la droite du trône de Dieu,<br />

sinon même en son sein, sur son Cœur, se tient une<br />

femme, une jeune fille, une vierge à coup sûr, qu’ils<br />

nomment la Sagesse ».<br />

Marie fille d’Israël est donc <strong>au</strong> terme de l’élan<br />

prophétique, et elle seule correspond <strong>au</strong> profil de gloire<br />

prophétisé par Isaïe et le Cantique des cantiques. Israël,<br />

Jérusalem, c’est Elle. Mais il ne f<strong>au</strong>t pas en rester là si<br />

on veut embrasser le mystère de la Vierge Marie dans<br />

sa plénitude.<br />

<strong>La</strong> deuxième face, toute divine, du mystère de l’Immaculée<br />

nous montre qu’en son âme ou en son esprit,<br />

« Dieu le sait », une jeune fille est bien réellement<br />

<strong>au</strong>près de Dieu depuis le commencement. Elle admire<br />

ses œuvres, y collabore en allant et venant du Ciel sur<br />

la terre, des enfants des hommes <strong>au</strong> Dieu Très H<strong>au</strong>t en<br />

ses trois aimables Personnes.<br />

ET DANS LE NOUVEAU TESTAMENT ?<br />

<strong>La</strong> conciliation de ces deux traditions d’Ancien Testament<br />

se retrouve tout naturellement dans le Nouve<strong>au</strong> :<br />

« Marie de Nazareth, si modeste, si humble, Vierge<br />

pure, toute consacrée à son Dieu, son unique amour, est<br />

dès l’instant de l’Annonciation la Mère de Dieu, la<br />

Lors de sa retraite prêchée <strong>au</strong> Canada, notre bien-aimé<br />

Père embrassa sous ce titre évocateur le mystère total<br />

de la Bienheureuse Vierge Marie, et le rendit accessible<br />

à tous. De l’Ancien Testament et des admirables figures<br />

de femmes dont frère Bruno a fait un portrait saisissant<br />

(cf. LE CANTIQUE DE LA FEMME, Il est ressuscité n o 118, juin<br />

2012, p. 15-20), notre Père ne va retenir pour ainsi dire<br />

que deux noms, deux épouses de David, Abisag et<br />

Abigayil. Abisag la belle et humble vierge choisie pour<br />

devenir la servante du vieux roi, et qui vécut avec lui<br />

dans une pureté parfaite ; Abigayil la très sage <strong>au</strong>xiliatrice<br />

de David en ses combats qui obtint tout de Dieu, et<br />

la mort de sa brute de mari, Nabal, figure du démon,<br />

et épousa David, figure du Messie à venir.<br />

L’HUMBLE SERVANTE DU SEIGNEUR.<br />

<strong>La</strong> Vierge Marie s’inscrit dans une longue tradition<br />

de modestie, comme notre Père s’est plu à le rappeler<br />

à nos amis :<br />

« C’est modestement que le Père Céleste est entré<br />

dans le paradis terrestre, sans éclats ni tremblement de<br />

terre, c’est modestement qu’il a accoutumé ses créatures<br />

à l’aimer et à le respecter. C’est modestement<br />

<strong>au</strong>ssi, que Jésus est venu et a commencé son existence<br />

dans la petitesse de Bethléem puis de Nazareth. C’est<br />

donc modestement que la Vierge Marie déjà avant lui,<br />

mais le temps ne compte pas, avait été une simple<br />

enfant de Nazareth, petit bourg perdu de Galilée. C’est<br />

là qu’elle a appris qu’elle serait la Mère du S<strong>au</strong>veur et<br />

qu’elle a répondu : “ Je suis la servante du Seigneur. ”<br />

Mère du Seigneur, du Christ, du “ Logos ” ou Sagesse<br />

éternelle, la plus parfaite, la plus aimée de toutes les<br />

créatures par son Créateur et Père. Ainsi est-elle <strong>au</strong><br />

terme de l’élan prophétique, ainsi est-elle <strong>au</strong>ssi <strong>au</strong> principe<br />

et fondement de l’Église, car cette petite jeune fille<br />

de rien du tout est l’Épouse de Dieu, la Mère universelle,<br />

Médiatrice de toutes grâces. »<br />

<strong>La</strong> conciliation et complémentarité des deux traditions,<br />

prophétique et sapientiale, se prolonge dans l’histoire<br />

de l’Église.<br />

C’est Elle, la Vierge Marie qui se nomme Notre-<br />

Dame du Rosaire, c’est-à-dire Marie de Nazareth en ses<br />

mystères joyeux, douloureux et glorieux, d’hier et<br />

d’<strong>au</strong>jourd’hui. Elle est plus que jamais engagée dans les<br />

combats de l’Église contre le monde et le démon, et<br />

c’est pourquoi Elle révèle à l’orée des derniers temps,<br />

en gage assuré de la victoire finale, son nom nouve<strong>au</strong> :<br />

« JE SUIS L’IMMACULÉE CONCEPTION. » C’est ainsi que la<br />

Vierge Marie apparaîtra tout <strong>au</strong> long du dix-neuvième<br />

<strong>siècle</strong>. Mais comme certains chefs de l’Église résistaient<br />

à pareille volonté de puissance mariale, Notre-Dame de<br />

Fatima mettra “ les points sur les i ” le 13 mai 1917 :<br />

« JE SUIS DU CIEL. » Prodigieuse révélation prononcée<br />

avec la même tranquille <strong>au</strong>torité que celle de Dieu<br />

révélant son nom à Moïse : « JE SUIS. »<br />

DOUCEUR ET VIGUEUR DE MARIE IMMACULÉE<br />

« C’est une femme qui ne considère pas la grandeur<br />

de sa vocation, mais le service, la générosité qui sont<br />

attendus d’elle [notre bon pape François aimerait be<strong>au</strong>coup<br />

cela]. Marie est l’humble servante du Seigneur, c’est<br />

ainsi qu’il f<strong>au</strong>t entrer dans le Cœur de la Vierge Marie et<br />

y demeurer grâce <strong>au</strong> chapelet récité tous les jours en<br />

famille, ce qu’elle a d’ailleurs demandé si souvent. »<br />

Le service demandé à cette servante, lui a été prédit<br />

par le vieillard Siméon lors de la Présentation de l’Enfant-Jésus<br />

<strong>au</strong> Temple : « Un glaive de douleur te transpercera<br />

le Cœur. » Ce jour-là, dit notre Père, la Vierge<br />

Marie n’a plus connu de bonheur humain. Elle connaissait<br />

les Saintes Écritures et savait que son Fils, comme<br />

jadis le serviteur de Yahweh, allait poser un sacrifice<br />

d’expiation s<strong>au</strong>veur. Elle s’y est associée de tout son<br />

cœur en devenant victime avec Jésus sur la Croix.<br />

« C’est là que victorieuse du démon avec son fils et<br />

époux, elle a acquis la maternité de l’humanité pécheresse.<br />

Refuge des pécheurs, elle est devenue notre<br />

Reine, notre Médiatrice, notre Auxiliatrice. Les bons<br />

<strong>catholique</strong>s aiment lui décerner ces noms qui sont<br />

<strong>au</strong>tant de privilèges qui proclament le mérite, la noblesse,<br />

la générosité héroïque de son Cœur Immaculé. »<br />

NOTRE MÈRE À TOUS À JAMAIS !<br />

Après la glorification de son Assomption, c’est une<br />

maternité universelle qui va donc être le tout de la<br />

Vierge Marie <strong>au</strong> Ciel. Mais comment cela pourra-t-il se<br />

faire ? Par la très mystérieuse « opération du Saint-<br />

Esprit », comme pour son Fils premier-né... Mais avec


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 31<br />

nous, c’est dans le secret du cœur à cœur eucharistique<br />

de la communion que s’opérera ce mysterium fidei.<br />

Lorsque nous recevons Jésus en son corps, son sang<br />

et son âme, la Personne divine qu’il nous laisse à<br />

demeure, c’est le Saint-Esprit. Or, c’est Elle, la Vierge<br />

Marie qui le possède en plénitude et qui préside à son<br />

épanchement. C’est par Elle que nous seront communiquées<br />

toutes les grâces qui nous apprendront à nous<br />

donner à Jésus-Christ comme à un Époux unique.<br />

Celui-ci répandra à son tour dans nos âmes une<br />

charité sans cesse jaillissante, circumincessante...<br />

« <strong>La</strong> vraie dévotion, enseigne notre Père, c’est donc<br />

la méditation du Cœur Eucharistique de Jésus, mais<br />

<strong>au</strong>ssi du Cœur eucharistique de Marie, et parce qu’ils<br />

ne font qu’un, c’est par la médiation, la dévotion du<br />

Cœur eucharistique de Jésus et de Marie que nous,<br />

leurs enfants, nous recevrons la grâce d’une union de<br />

charité avec eux et entre nous. »<br />

LA DIVINE MARIE, MAÎTRESSE DE LA CROISADE.<br />

Encore une perle à sa couronne et pas des moindres<br />

: « Cette Vierge Marie, dont on ne nous dit que<br />

des choses mystiques – elle est merveilleuse, son Cœur<br />

est plein de douceur et d’amour miséricordieux –, tout<br />

à coup se révèle une guerrière. Divine Marie, Reine<br />

des Cieux ? ! Infinie surprise ! Et retour, par inclusion,<br />

<strong>au</strong> Protévangile. C’est elle qui va écraser la tête du<br />

Serpent, maîtriser les puissances infernales, écraser les<br />

hérésies, en un mot, c’est elle qui va s<strong>au</strong>ver l’Église.<br />

<strong>La</strong> Vierge ? Oui, la Vierge Marie ! Quand est-ce que<br />

cela a commencé ? »<br />

EN 1531, alors que les nations chrétiennes sont ravagés<br />

par le protestantisme et les guerres de religion<br />

qu’il suscite, l’Espagne intégralement <strong>catholique</strong> part<br />

en mission dans le monde entier. C’est dans une de ses<br />

colonies, <strong>au</strong> Mexique, que l’Immaculée apparaît en<br />

1531, gage de triomphe final de la <strong>catholique</strong> Espagne<br />

dans tout le continent américain, du sud <strong>au</strong> nord. En<br />

attendant, la Vierge de Guadalupe partira en guerre<br />

contre les Turcs, car c’est sous l’égide de sa bannière<br />

que combattront les marins espagnols tandis qu’à<br />

Rome saint Pie V fait prier le Rosaire et attribue la<br />

victoire de Lépante, qu’il a vue à distance, à Notre-<br />

Dame du Rosaire.<br />

Mais c’est surtout à partir de 1830, l’an I de la<br />

révolution répandue dans le monde par l’idéologie de<br />

la franc-maçonnerie : démocratie, droits de l’homme,<br />

etc., que la Vierge Marie entre en lice. Elle apparaît en<br />

plein centre de Paris, pas seulement pour guérir les<br />

braves <strong>au</strong> moyen de la Médaille miraculeuse, sur<br />

laquelle, en prélude à Fatima, sont gravés les Cœurs<br />

Sacrés et Immaculés de Jésus et de Marie, ni uniquement<br />

pour donner le branle à un immense mouvement<br />

apostolique qui va être magnifiquement prolongé par<br />

les papes Grégoire XVI et Pie IX. Elle vient en régente<br />

de France <strong>au</strong> moment où le dernier Roi Très-<br />

Chrétien est chassé par la Révolution. <strong>La</strong> Vierge Marie<br />

est patronne de la France, et le seul fait de cette<br />

présence royale de l’Immaculée à Paris est un gage de<br />

victoire finale. C’est ainsi que les saints la comprendront<br />

et l’aimeront.<br />

L’Immaculée vient <strong>au</strong>ssi pour l’Église, afin qu’elle<br />

progresse dans la connaissance et l’amour de Dieu.<br />

Elle se présente et veut être représentée tenant un<br />

globe dans les mains. Ce globe, elle le précise, c’est le<br />

monde entier, la France, chaque âme en particulier...<br />

Refus du clergé. Quand enfin la statue est sculptée, on<br />

la met de côté et son mystère restera sous le boisse<strong>au</strong>,<br />

compris de peu de fidèles, même si, <strong>au</strong>jourd’hui, la<br />

statue trône dans la chapelle de la rue du Bac...<br />

EN 1846, elle apparaît à la Salette, Vierge corédemptrice<br />

souffrant pour ses enfants, pleurant même<br />

afin d’exciter leur compassion et les convertir... Émus<br />

les braves gens feront effort, mais qui fera attention à<br />

ce détail sidérant : la Sainte Vierge parle <strong>au</strong> nom de<br />

Dieu, à sa place pour ainsi dire ? « JE vous ai donné six<br />

jours, etc. » Personne, il f<strong>au</strong>dra attendre notre Père<br />

pour le remarquer.<br />

EN 1854, le bienheureux pape Pie IX, lui, comprend<br />

ce qui se passe, il entre parfaitement dans les vues de<br />

Dieu, et pour lutter contre les erreurs modernes, il<br />

proclame le dogme de l’Immaculée Conception. Cela<br />

n’a pas été facile, mais la Sainte Vierge le récompense<br />

et confirme son <strong>au</strong>torité en apparaissant à Lourdes, EN<br />

1858, et en y révélant son nom : « Je suis l’Immaculée<br />

Conception. » Là encore, comme à la rue du Bac, seuls<br />

les saints, tels le curé Peyramale et le Père Marie-<br />

Antoine, ainsi que le bon peuple à leur suite, comprennent<br />

la portée mystique et politique de cette apparition.<br />

Mais d’<strong>au</strong>cuns, acharnés, vont mettre cette lumière<br />

sous le boisse<strong>au</strong>... Prière, pénitence, chapelet chaque<br />

jour, voilà ce que réclame l’Immaculée Conception.<br />

Mais c’est pour qu’on se tourne vers elle et son Jésus !<br />

<strong>La</strong> Sainte Vierge sera négligées par ces gens raisonnables<br />

qui ne pensent qu’à la terre, ne songeant qu’à leur<br />

personnes libres, libérales, soucieuses de progrès, de<br />

démocratie : chacun pour soi, avec cela, l’important<br />

pour le monde de demain : votez pour qui vous voulez,<br />

pensez ce que vous voulez...<br />

EN 1871, Notre-Dame apparaît à Pontmain pour secourir<br />

ses enfants de France. Bonne et tendre Mère,<br />

elle vient les consoler par ces mots qui leur rendront<br />

l’espérance : « Mais priez mes enfants, Dieu vous ex<strong>au</strong>cera<br />

en peu de temps. Mon Fils se laisse toucher. » En<br />

Vierge, maîtresse du Ciel et des étoiles, elle va stopper<br />

l’invasion des troupes de la Prusse protestante ; c’est<br />

une Reine mais douloureuse qui offre son Fils en sacrifice<br />

pour le salut de ses enfants de la terre.<br />

EN 1876, lors d’une apparition plus modeste à<br />

Pellevoisin, la Vierge se dit la « toute miséricordieuse<br />

»... <strong>La</strong> Rome de Léon XIII fronce les sourcils,<br />

cela n’est pas possible...


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 32<br />

« Nous avons un puissant et merveilleux figuratif de<br />

ce triomphe à venir dans la guérison miraculeuse de la<br />

petite Thérèse Martin, que notre Père se plaît à appeler<br />

la “ miniature de l’Immaculée ”, LE 13 MAI 1883, dimanche<br />

de la Pentecôte. Au cours d’une neuvaine de<br />

messes demandée à Notre-Dame des Victoires par son<br />

père chéri, l’enfant fut libérée de la puissance démoniaque<br />

qui l’obsédait : “ Il fallait un miracle et ce fut<br />

Notre-Dame des Victoires qui le fit... Tout à coup, la<br />

Sainte Vierge me parut belle, si belle que jamais je<br />

n’avais vu rien de si be<strong>au</strong>, son visage respirait une<br />

bonté et une tendresse ineffable, mais ce qui me pénétra<br />

jusqu’<strong>au</strong> fond de l’âme, ce fut le ravissant sourire de<br />

la Sainte Vierge. ” Notre jeune sainte faisait figure de<br />

prophète des temps à venir et de précurseur, ayant<br />

vécu dans sa propre vie, à l’âge de dix ans, les alarmes<br />

de l’Église et les tourments des martyrs de la grande<br />

apostasie finale. L’Immaculée était intervenue pour<br />

s<strong>au</strong>ver son enfant un 13 mai comme si Elle voulait,<br />

par le choix de cette date, annoncer son apparition de<br />

Fatima. » (sœur Marie-Angélique, L’ABBÉ DES GENETTES,<br />

SERVITEUR ET APÔTRE DE MARIE, p. 347-348)<br />

Lorsque, LE 13 MAI 1917, la Vierge Marie apparaît à<br />

Fatima elle dit : « Je suis du Ciel », c’est-à-dire que je<br />

suis celle-là même qui a été créée avant la terre et le<br />

Ciel d’ici-bas (cf. Pr 8 ; Gn 1, 1-6). Et preuve de sa<br />

puissance, c’est que le soleil lui obéit <strong>au</strong> doigt et à<br />

l’œil ! Ce sont des faits connus, constatés par des<br />

dizaines de milliers de personnes ; des enquêtes canoniques<br />

sérieuses ont été faites, l’Église a reconnu la<br />

vérité de tous ces événements comme du message. Or<br />

si la Sainte Vierge arrive à bouger Ciel, soleil et terre,<br />

elle n’arrive pas à émouvoir et mouvoir le cœur du<br />

Saint-Père, et n’obtient pas de lui l’obéissance à deux<br />

petites demandes qui à elles seules procureraient le<br />

salut du monde et de l’Église.<br />

L’ULTIME COMBAT DES DERNIERS TEMPS<br />

Notre bienheureux Père poursuivit sa réflexion appuyée<br />

sur sa Bien-Aimée Sainte Vierge. C’est pour<br />

Elle, pour la juste interprétation de son ultime secret<br />

de miséricorde qu’il prit une dernière fois la parole en<br />

août 2000 (cf. CRC n o 369, p. 1-16). Jusqu’<strong>au</strong> bout notre<br />

docteur mystique de la foi <strong>catholique</strong> <strong>au</strong>ra combattu<br />

pour Elle, tel un vrai “ chevalier de l’Immaculée ” en<br />

digne émule de saint Georges.<br />

Dans son service de l’Église, si ses dernières<br />

paroles, ses derniers écrits furent pour Notre-Dame,<br />

son dernier regard fut, en 2003, pour le cardinal<br />

Bergoglio en qui il pressentit le cœur droit d’un futur<br />

Saint-Père. Il fut ex<strong>au</strong>cé et voici maintenant que ce<br />

« Pierre » à la différence de ses prédécesseurs semble<br />

« crier » non seulement l’Évangile par toute sa vie,<br />

mais <strong>au</strong>ssi sa dévotion à la Madone. Grande liesse<br />

donc et quel encouragement pour nous, comme frère<br />

Bruno ne cesse de nous le rappeler et de nous en<br />

donner de nouvelles raisons : il f<strong>au</strong>t be<strong>au</strong>coup prier<br />

pour le Saint-Père. Certes, il a consacré son pontificat<br />

à Notre-Dame de Fatima, c’est be<strong>au</strong>coup, d’<strong>au</strong>tant plus<br />

que c’est sans feintise à la différence de ses prédécesseurs,<br />

mais ce n’est pas encore suffisant pour renverser<br />

l’obstacle qui bloque la circumincessante charité divine,<br />

eucharistique et mariale.<br />

« TU L’ATTEINDRAS AU TALON. » (Gn 3, 15)<br />

Posons le problème dans toute son acuité et actualité.<br />

C’est celui d’une désorientation diabolique par<br />

laquelle, sous couvert d’un christocentrisme entendu<br />

à la manière de Luther, nos chefs, nos exégètes font<br />

– depuis Vatican II surtout – obstacle à la volonté de<br />

Dieu, à cette effusion d’amour, à cette nouvelle Pentecôte<br />

par laquelle l’Église « hiérarchique et <strong>catholique</strong> »<br />

doit embraser le monde, sous l’égide du Cœur Immaculé<br />

de Marie. Dieu le veut, mais nos chefs ne le<br />

veulent pas.<br />

L’apostasie, la m<strong>au</strong>vaise volonté ne sont pas les<br />

seules c<strong>au</strong>ses de cette opposition à ce qui n’est rien<br />

de moins qu’un renouvellement de l’Alliance. Nous<br />

l’avons vu, il f<strong>au</strong>t accuser <strong>au</strong>ssi une véritable sclérose<br />

de la pensée philosophique et théologique qui afflige<br />

l’Église depuis fort longtemps.<br />

Cette convergence des <strong>au</strong>teurs inspirés et des<br />

grandes apparitions mariales, l’Église en sa liturgie, en<br />

sa tradition et en ses dogmes – les derniers étant ceux<br />

de l’Immaculée Conception et de l’Assomption – y<br />

adhéra parfaitement jusqu’<strong>au</strong> concile Vatican II exclusivement,<br />

funeste Concile c<strong>au</strong>se d’une régression sans<br />

précédent de la théologie et de la ferveur mariales.<br />

Sans cette rupture, notre Père nous le disait souvent,<br />

les dogmes de la CORÉDEMPTION et de la MÉDIATION<br />

UNIVERSELLE de la Bienheureuse Vierge Marie <strong>au</strong>raient<br />

été acceptés d’enthousiasme par l’Église.<br />

Ils le seront un jour, mais grâce à la doctrine<br />

mystique du théologien de la <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> <strong>catholique</strong>,<br />

il ne sera pas dit que l’Église n’a pas progressé<br />

durant cette tragique apostasie. En reconnaissant le<br />

bien-fondé de la préexistence de la Bienheureuse<br />

Vierge Marie en son esprit, en faisant sienne la métaphysique<br />

relationnelle et la théologie totale de notre<br />

Père, l’Église se donnera les moyens d’un prodigieux<br />

progrès dogmatique, qui fera mieux connaître et donc<br />

mieux aimer la Bienheureuse Vierge Marie. Saint<br />

Maximilien Kolbe a vu et prophétisé ce progrès et les<br />

grâces de salut mondial qui en résulteront.<br />

D’entrevoir ces merveilles donne du courage pour<br />

entrer toujours plus avant dans cette circumincessante<br />

charité divine et trinitaire, eucharistique et mariale,<br />

prodigieuse onction spirituelle toute de tendresse et<br />

dévotion pour les Saints Cœurs Immaculés et Miséricordieux<br />

de Jésus et Marie, dont l’Église oindra ses<br />

enfants tout <strong>au</strong> long du troisième millénaire pour la<br />

plus grande gloire de notre très chéri Père Céleste...<br />

frère Philippe de la Face de Dieu.


LA LIGUE N o <strong>129</strong> - P. 33<br />

ALORS que la franc-maçonnerie<br />

triomphe par la loi<br />

révolutionnaire du “ mariage pour<br />

tous ”, et tandis que cette contre-<br />

Église jubile de voir tous les <strong>catholique</strong>s<br />

conciliaires s’enfermer<br />

d’eux-mêmes dans la caque citoyenne<br />

des “ manifs pour tous ”,<br />

frère Bruno a voulu que nos<br />

jeunes gens voient et entendent l’Église, en la personne<br />

de notre bien-aimé Père et en la personne de notre<br />

pape François, leur dire toute la vérité.<br />

C’est ainsi qu’ils vinrent nombreux à la maison<br />

Saint-Joseph, près de trois cents, les 18, 19 et 20 mai<br />

pour assister à la SESSION DE PENTECÔTE, et tout apprendre<br />

de l’amour chrétien, mais de L’AMOUR CHRÉTIEN<br />

À L’ HEURE DU SIDA, session prêchée par notre Père en<br />

1993 (en <strong>au</strong>dio-vidéo : PC 50).<br />

Lors du sermon de la messe d’ouverture, frère Bruno<br />

donna pour ainsi dire la parole <strong>au</strong> pape François pour<br />

qu’il nous confirme dans une vérité, de doctrine et<br />

d’action, chère à notre Père, à savoir que l’Esprit, le<br />

Saint, le Vrai, c’est celui de Jésus.<br />

« C’est lui, dira le Saint-Père <strong>au</strong>x jeunes, qui nous<br />

donne le courage d’aller à contre-courant... »<br />

LE SIDA, SIGNE D’APOCALYPSE<br />

C’est un “ signe des temps ” que cette lèpre de nos<br />

sociétés décadentes. Le Syndrome d’immunodéficience acquise...<br />

par le vice, dû <strong>au</strong> LAV, lymphadenopathy associated<br />

virus... du Singe vert en Afrique, « mal qui répand la<br />

terreur, mal que le Ciel en sa fureur inventa pour punir<br />

les crimes de la terre. Le SIDA, puisqu’il f<strong>au</strong>t l’appeler<br />

par son nom, déclare <strong>au</strong> genre humain la guerre. »<br />

Ce mal est spécifique, et par là h<strong>au</strong>tement symbolique<br />

: il détruit les défenses de l’organisme qui n’a<br />

plus <strong>au</strong>cune barrière, <strong>au</strong>cune armée à opposer à toutes<br />

les maladies contagieuses, microbiennes ou virales, et<br />

ainsi tue sans rémission. D’où avortements déclarés thérapeutiques,<br />

suicides nommés euthanasie, prophylaxies<br />

sophistiquant le vice, n’osant pas l’interdire, et campagnes<br />

publicitaires pour la protection et l’aide préférentielle<br />

apportées <strong>au</strong>x corrupteurs du monde.<br />

N’est-ce pas l’exact table<strong>au</strong> du pacifisme, du libéralisme<br />

politiques, comme <strong>au</strong>ssi de la liberté religieuse et<br />

de l’œcuménisme devenus le dogme unique de l’Église<br />

conciliaire et papale après avoir été proclamés le fondement<br />

de nos républiques maçonniques ? Sodome de<br />

la luxure spirituelle, et Gomorrhe de la déb<strong>au</strong>che et<br />

de la débandade sociale, qu’en résulte-t-il ? SI - DA...<br />

Signe d’apocalypse, pire que les catastrophes des deux<br />

premières guerres mondiales : l’invasion de l’Église par<br />

toutes sortes d’hérésies et de sectes, d’apostasies, de<br />

dépravations... Et l’invasion de l’Europe, mère de la<br />

civilisation et première terre de Chrétienté, et du monde<br />

ROME A RETROUVÉ LA FOI<br />

entier par les nouve<strong>au</strong>x barbares, athées et cruels !<br />

Invasions faciles de pays en état d’ “ immunodéficience<br />

acquise ”, sans remparts, sans armées, et d’Église sans<br />

tribun<strong>au</strong>x d’inquisition, sans police des âmes, sans plus<br />

de droit ni de justice !<br />

Ah ! oui, le SIDA est le mal du <strong>siècle</strong>, le grand signe<br />

d’alarme des <strong>au</strong>tres m<strong>au</strong>x qui vont tomber sur nous,<br />

appelés de notre propre chef mais justement lancés par<br />

la Colère de Dieu.<br />

Il est temps d’avertir la jeunesse des vrais m<strong>au</strong>x et<br />

de leurs vrais remèdes, et de lui donner encore et mieux<br />

la plénitude de la foi, le goût de la vertu jalousement<br />

défendue et gardée, l’amour des grandes et belles familles<br />

fortement constituées, et des paroisses et des<br />

roy<strong>au</strong>mes qui les s<strong>au</strong>vent et soutiennent pour la renaissance<br />

<strong>catholique</strong>, chrétienne, de nos vieux pays de<br />

Chrétienté appelés encore une fois à s<strong>au</strong>ver tout le<br />

genre humain.<br />

L’AMOUR CHRÉTIEN À L’HEURE DU SIDA<br />

Le premier jour était un samedi, vigile de la Pentecôte.<br />

Après la Messe, première conférence dans une<br />

salle comble. Table<strong>au</strong> du plus bel amour qui soit. On<br />

<strong>au</strong>rait entendu une mouche voler. Tous étaient fascinés<br />

par ce mystère d’Adam et Ève en Paradis. Puis saisis<br />

d’horreur <strong>au</strong> table<strong>au</strong> des malfaçons et contrefaçons de<br />

l’amour inventées par le diable jaloux, pour faire choir<br />

l’homme et la femme dans le crime contre nature. Et<br />

de comprendre que Satan est de retour : contraception,<br />

avortement, homosexualité ont tout envahi, et maintenant<br />

c’est le SIDA : Syndrome d’immunodéficience acquise<br />

capable d’anéantir l’humanité entière.<br />

Pour garder ses enfants à l’abri de l’arche sainte,<br />

notre Père a tout dit des formes de la tentation qu’il<br />

f<strong>au</strong>t “ savoir pour prévoir afin de pourvoir ”... et ne pas<br />

se laisser avoir ! Sans rien celer, avec une liberté, une<br />

crudité égale à la précision scientifique de son langage.<br />

Il passe avec une aisance souveraine, royale, de la


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 34<br />

biogénétique à la description clinique d’un mal qui<br />

répand la terreur parce qu’il n’y a pas de vaccin ni de<br />

remède ; et la lèpre et la tuberculose reviennent sur les<br />

pas du SIDA. Géographie de ce flé<strong>au</strong> socio-économique<br />

planétaire, expression de la colère de Dieu, comme <strong>au</strong><br />

temps de Sodome et Gomorrhe. Horrible.<br />

MANIF POUR TOUS, APOSTASIE POUR TOUS<br />

Notre Père crève alors l’hypocrisie qui avait déjà<br />

cours il y a vingt ans ; frère Bruno prolongera encore<br />

davantage son cri d’indignation et sa mise en garde, le<br />

soir <strong>au</strong> cratère. Pourquoi ne parle-t-on <strong>au</strong>jourd’hui que<br />

d’homosexualité, et encore d’une manière savante, en<br />

intellectuel : c’est la théorie du “ genre ”... et du « mariage<br />

pour tous » : quoi de plus bourgeois et rassurant<br />

que de vouloir “ se marier ” ? ! Pourquoi l’opposition, en<br />

majorité composée de braves gens, bons <strong>catholique</strong>s<br />

pour la plupart, est-elle, sous prétexte de “ MANIF POUR<br />

TOUS ”, noy<strong>au</strong>tée par des homosexuels ?<br />

Pourquoi ? Pour ne pas avoir à dénoncer la c<strong>au</strong>se du<br />

mal qui est un péché. Or, ce péché tire son nom du<br />

châtiment que Dieu a infligé à la ville de Sodome qui<br />

s’y livrait ; de plus, ce péché n’est pas uniquement<br />

pratiqué par les “ homos ” mais <strong>au</strong>ssi par les <strong>au</strong>tres, et à<br />

grande échelle ?! Et nos grandes bourgeoises cathos<br />

défilent main dans la main avec ces gens-là, “ homos ”<br />

ou “ bisexuels ”, hommes et femmes ? Et nos évêques<br />

bêlent en chœur que « le SIDA ne peut pas être un<br />

châtiment de Dieu » ? ! Et tout ce monde-là formaté,<br />

désorienté par Vatican II, est démocrate et républicain ?<br />

Alors, expliquera frère Bruno à la suite de notre<br />

Père, c’est perdu d’avance. Il en sera des “ MANIF POUR<br />

TOUS ” comme il en fut pour celles contre l’avortement<br />

en 1974, ou pour l’École libre en 1985. Elles seront<br />

sans effet pour le bien et aggraveront la désorientation<br />

des <strong>catholique</strong>s. Car, après un moment de surch<strong>au</strong>ffe,<br />

tous nos bourgeois rentreront bien sagement dans leur<br />

niche, mais ils seront plus que jamais démocrates, et<br />

surtout plus que jamais opposés à la <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong><br />

<strong>catholique</strong> et à la <strong>Contre</strong>-Révolution, retardant d’<strong>au</strong>tant<br />

le salut de l’Église et de la nation, en véritables alliés<br />

objectifs de la révolution maçonnique contre laquelle<br />

ces dupes prétendaient pourtant « faire quelque chose ».<br />

Et pour que la catastrophe soit complète, il suffirait<br />

que nos jeunes gens de bonne famille, exaltés par cette<br />

noble c<strong>au</strong>se, mais aveuglés par leur orgueil, soient incités<br />

par quelque indicateur <strong>au</strong>x ordres à commettre des<br />

actes de violence irréparable, « pour être entendus »...<br />

Et voici “ l’extrême-droite ” dénoncée comme le parti<br />

du mal, et ces malheureux finissant leurs jours en<br />

prison, en pure perte. Notre Père avec toute son expérience<br />

et frère Bruno à sa suite nous ont toujours mis<br />

en garde contre ce délire d’activisme.<br />

EXTENSION ET PROMOTION DU SIDA<br />

Les conférences du dimanche firent état des ravages<br />

du SIDA, flé<strong>au</strong> mondial et châtiment de Dieu. Il frappe<br />

dur les p<strong>au</strong>vres gens du tiers monde et d’<strong>au</strong>tant plus<br />

que dans son sillage réapparaissent des maladies comme<br />

la tuberculose et la lèpre. Mais le mal est bien plus<br />

profond dans un « Occident satanisé ».<br />

Pourquoi se flatte-t-il, du moins le pays légal judéomaçonnique,<br />

de ce SIDA qui le frappe de plein fouet ?<br />

Notre Père va nous le révéler et nous ouvrir des<br />

perspectives qu’on ne trouve pas dans les livres scolaires,<br />

ni dans les journ<strong>au</strong>x...<br />

« Quand une minorité scandaleuse ou impie, ou haïe,<br />

possède le pouvoir, l’avoir, le valoir, le savoir et le<br />

croire, l’État et l’administration, l’argent et l’industrie,<br />

les médias : télévision, cinéma, presse, les collèges et les<br />

universités, enfin le monde ecclésiastique ; son groupe<br />

de pression se doit de porter sa tare <strong>au</strong> nive<strong>au</strong> de la<br />

vertu, de la be<strong>au</strong>té, du drame, de la différence, afin de<br />

s’imposer comme victime d’un totalitarisme contraire :<br />

inexistant, mais potentiellement dominant. C’est ainsi<br />

que l’école laïque écrase l’école libre, que la révolution<br />

hurle <strong>au</strong> despotisme, et la liste serait longue... »<br />

C’est ainsi que le lobby homosexuel, judéo-maçon,<br />

s’est imposé en jouant à fond de tous les rouages de la<br />

démocratie. Quant à la réaction anarchique des “ MANIF<br />

POUR TOUS ”, orchestrée, bien encaquée dans le moule<br />

démocratique, elle est l’opposition, dont l’expression<br />

même atteste la légalité de la loi diabolique, et dissimule<br />

le caractère révolutionnaire, totalitaire de la secte qui<br />

gouverne la France.<br />

Mais alors, que proposez-vous, vous de la CRC qui<br />

critiquez toujours sans jamais rien faire ?<br />

<strong>La</strong> dernière conférence a brossé le table<strong>au</strong> enthousiasmant<br />

d’un programme positif, envisageant tous les<br />

aspects médic<strong>au</strong>x et judiciaires, soci<strong>au</strong>x et politiques, du<br />

redressement nécessaire pour le jour du triomphe de<br />

l’Immaculée, quand tout redeviendra possible. En attendant,<br />

désir ardent comme une flamme vive d’amour, de<br />

conserver ou acquérir une angélique pureté, par l’intercession<br />

de l’Immaculée Vierge de Lourdes et de Fatima,<br />

avec l’amour du Rosaire pour passer à travers cette fange<br />

sans s’y tacher le moins du monde ! Be<strong>au</strong> programme !<br />

UN AMOUR DE SAINT-PÈRE<br />

Même si, durant notre session de Pentecôte, notre<br />

Père traita du SIDA avec une très grande h<strong>au</strong>teur de vue<br />

et une parfaite dignité, frère Bruno voulut que les<br />

cratères du soir nous distraient de ce sujet méphitique.<br />

Et de fait, tant de vilaines choses s’évanouirent sans<br />

peine dans le rayonnement de cet “ évêque vêtu de<br />

blanc ”, notre bon Pape François.<br />

Comme il ne fait pas la-une des télévisions officielles,<br />

nos jeunes gens le connaissent finalement fort<br />

peu ou mal ; quant à nous, les frères et les sœurs, nous<br />

sommes devenus des “ accrocs ” de KTO, et nous ne<br />

nous lassons pas de le voir et revoir. Nos frères techniciens<br />

avaient de plus réalisé le tour de force de<br />

remplacer la traduction simultanée, sympathique mais<br />

gênante tout de même, par un sous-titrage qui nous<br />

aida à mieux ressentir le choc de sa personnalité<br />

apostolique, et combien les expressions de son regard


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 35<br />

et l’onction spirituelle de sa voix nous révélaient son<br />

cœur d’homme d’Église, sage, bon, aimable.<br />

Le pape François parle comme saint Pie X, dira<br />

frère Bruno, et pulvérise en quelques minutes, sans en<br />

avoir l’air, l’inaction effective, le verbiage stérile et<br />

mondain de Vatican II. Son premier sermon <strong>au</strong>x cardin<strong>au</strong>x,<br />

radical, mit la cognée à la racine du culte de<br />

l’homme, et depuis lors tous ceux qu’il prononce rectifient,<br />

peu ou prou, une désorientation conciliaire.<br />

<strong>La</strong> miséricorde ? Oui, mais pour pousser le pécheur<br />

<strong>au</strong> cœur à cœur d’une confession loyale et d’une absolution<br />

personnelle ; s’il f<strong>au</strong>t prier l’Esprit-Saint tous les<br />

jours, ce n’est pas un esprit “ aérosol ” et démocratique,<br />

c’est l’Esprit de Jésus qui est le chemin, la vérité, la<br />

charité. <strong>La</strong> transmission de la foi ? Pas de grand plan<br />

sur la comète, de “ chantiers ” toujours inachevés, non.<br />

Il nous parle, avec émotion, sur le ton de la confidence,<br />

de sa grand-mère, de sa “ nona ” et de sa “ mama ”,<br />

c’est concret, vrai, cela touche les cœurs et les pousse<br />

à devenir à leur tour des relais de cette vérité - charité<br />

si aimable... Et tout à l’avenant.<br />

C’est cela, la “ nouvelle évangélisation ” s’exclame<br />

frère Bruno ; “ nouvelle ” en regard du rationalisme desséché,<br />

desséchant, tout en vaine et stérile jactance, dont<br />

l’Église n’en pouvait plus de souffrir depuis Vatican II.<br />

Et même lorsque le pape François évoque la “ liberté<br />

religieuse ”, c’est en passant, <strong>au</strong> terme d’un sermon où<br />

il n’a cessé de pousser les chrétiens à évangéliser, avec<br />

courage, jusqu’<strong>au</strong> martyre... Certes l’expression est ambiguë,<br />

équivoque, mais elle n’a rien à voir avec cet<br />

agenouillement devant le monde judéo-maçonnique pratiqué<br />

par l’Église depuis le voyage de P<strong>au</strong>l VI à l’Onu<br />

en octobre 1965.<br />

« Le Pape semble comprendre la liberté religieuse,<br />

dira frère Bruno, comme un moyen pour l’Église de<br />

se faire entendre de tous. Cependant, il ne f<strong>au</strong>t pas<br />

se fermer les yeux, pour c<strong>au</strong>se d’enthousiasme, nous<br />

devons plus que jamais continuer à dénoncer cette<br />

hérésie. Seulement, il f<strong>au</strong>t bien reconnaître que le pape<br />

François n’a pas la morgue des novateurs, ni le<br />

dogmatisme des réformateurs. Il est dans la suite de<br />

Jean-P<strong>au</strong>l Ier qui, par son humilité et son honnêteté,<br />

reconnaissait que cela posait problème. »<br />

Ces cratères furent des moments merveilleux, qui<br />

donnèrent l’idée à notre frère Bruno de tirer tout le<br />

parti de la technique vidéo et d’offrir cette grâce à nos<br />

amis. Ceux qui n’ont pu assister à la Pentecôte, ni <strong>au</strong>x<br />

premiers samedis du mois de juin, pourront commander<br />

les deux conférences magistrales de notre frère. Ils<br />

le verront visiblement heureux de nous faire aimer<br />

le Saint-Père, et surtout de nous faire comprendre,<br />

exemples à l’appui, combien la doctrine de notre Père<br />

rencontre ses intuitions pastorales, les explicite, ou les<br />

rectifie, mais d’une manière toujours positive en secondant<br />

ainsi l’Esprit-Saint qui œuvre en notre Saint-Père<br />

le pape François pour le service de son Église (cf.<br />

supra, p. 15-16). Notre frère ayant reçu “ l’esprit de<br />

finesse ” pour ce travail de critique constructive, à nous<br />

d’avoir celui, très fin <strong>au</strong>ssi, de docilité...<br />

EN DIRECT DE ROME<br />

Le jeudi 30 mai, nos commun<strong>au</strong>tés de France et du<br />

Canada ont fêté le SAINT-SACREMENT du Corps et du<br />

Sang de Notre-Seigneur en union avec le Saint-Père.<br />

Frère Bruno ayant fait avancer l’heure des vêpres et du<br />

dîner, nous avons pu, grâce à KTO, assister à la Messe<br />

et à la Procession du Saint-Sacrement, unissant nos<br />

prières à celles du Saint-Père et du peuple romain.<br />

Nous étions ravis, et frère Bruno plus que nous tous<br />

réunis : « Voilà qui confirme ce que disait notre Père :<br />

c’est bien l’Église qui se s<strong>au</strong>vera par elle-même ! »<br />

Pour la clôture du MOIS DE MARIE, le 31 mai, nous<br />

avons prié le chapelet place Saint-Pierre. Surprise et<br />

joie d’entendre les paroles que Notre-Dame de Fatima a<br />

demandé de réciter à la fin de chaque dizaine, parfaite<br />

expression de la charité de son Cœur Immaculé :<br />

« Ô mon Jésus, pardonnez-nous nos péchés, préserveznous<br />

du feu de l’Enfer et conduisez <strong>au</strong> Ciel toutes les âmes,<br />

surtout celles qui ont le plus besoin de votre miséricorde. »<br />

Joie de voir le cardinal Angelo Comastri visiblement<br />

ravi de prier le chapelet, demander ensuite <strong>au</strong> pape<br />

François : « Très Saint Père, parlez-nous de Marie, s’il<br />

vous plaît... » Et François de parler de « Marie qui se<br />

hâte ».<br />

PREMIER SAMEDI DU MOIS ROMAIN.<br />

Piété mariale le samedi, eucharistique le dimanche 2<br />

juin en la solennité de la FÊTE-DIEU, l’un et l’<strong>au</strong>tre jour<br />

passés en compagnie du pape François. Mais le dimanche<br />

nous étions pour ainsi dire en service commandé,<br />

puisque le Saint-Père avait demandé, presque<br />

ordonné, <strong>au</strong>x évêques du monde entier de faire en ce<br />

jour à 17 heures, une heure d’adoration eucharistique<br />

en union avec lui, mais tout à la gloire de « l’homme<br />

parfait » Notre-Seigneur Jésus-Christ.<br />

Nos frères prieurs d’Ardèche, du Perche et du Canada<br />

s’inscrivirent eux <strong>au</strong>ssi sur le site de la NOUVELLE<br />

ÉVANGÉLISATION... À 17 heures, nous étions donc dans<br />

la chapelle, devant le grand écran, devant Jésus <strong>au</strong><br />

Saint-Sacrement de Rome et de chez nous, ne faisant<br />

qu’un seul cœur avec l’Église en prière...<br />

Cette prière fut surtout silencieuse, mais notre frère<br />

Bruno par ses conférences et sermons nous avait donné<br />

de quoi alimenter la conversation avec le Cœur eucharistique<br />

de Jésus et Marie. Quant <strong>au</strong>x tout-petits, après<br />

a procession dans le parc, ils avaient embrassé Jésus-<br />

Hostie, comme des anges, et c’est donc sages comme<br />

des anges qu’ils regardèrent “ le Jésus ” de Rome et le<br />

Saint-Père en prière. Quant <strong>au</strong>x adultes, comment ne<br />

pas être dans l’action de grâces après la conférence<br />

d’actualités ?<br />

Frère Bruno nous a, en effet, bien montré que nous<br />

avions un Pape courageux qui n’hésite pas à frapper à<br />

la tête. C’est la mafia qui prend ses coups à l’occasion<br />

de la béatification d’un prêtre qu’elle avait fait assassiner<br />

en 1993. Il cible la franc-maçonnerie en démettant<br />

un prêtre français affilié à cette secte depuis 2001. Il<br />

rappelle les évêques italiens à leurs devoirs d’amour de<br />

Jésus, de leurs prêtres, et donc à sortir de leur “ pa-


JUIN 2013 N o <strong>129</strong> - P. 36<br />

resse ” et mettre fin à leur “ arrogance ”... Cela fait<br />

choc, les Italiens appellent cela la « bomba ».<br />

En politique, notre pape François est un sage ; il a<br />

fait savoir que le conflit syrien devait se régler par des<br />

moyens politiques. C’est précisément ce qui se met en<br />

place avec l’aide de la Russie, la légitime persévérance<br />

de Bachar el-Assad, et malgré les États-Unis.<br />

Notre Pape est un docteur, et qui plus est de<br />

<strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong>. Frère Bruno le prouve en analysant<br />

sa catéchèse sur l’Église, « famille de Dieu », et en<br />

nous montrant <strong>au</strong>ssi son plein accord avec la théologie<br />

kérygmatique de notre Père.<br />

Tant de raisons d’aimer notre pape François nous<br />

font plus que jamais prier pour lui afin qu’il “ valide ”<br />

ses avancées sur le “ chemin ” de la Renaissance, si<br />

fermement et prudemment menées, par une obéissance<br />

<strong>au</strong>x demandes de Notre-Dame de Fatima.<br />

CONTRE-RÉFORME CATHOLIQUE<br />

Si l’Église <strong>catholique</strong> et l’État <strong>catholique</strong> et royal,<br />

heureusement concertés, ont fait jadis le bonheur temporel<br />

et le salut éternel du peuple français, c’est que<br />

le Roi et la Reine de ces deux institutions étaient le<br />

Christ et sa divine Mère. Or, depuis le concile Vatican<br />

II, nous avons assisté <strong>au</strong> ralliement de l’Église<br />

<strong>au</strong> monde moderne, à sa religion, les droits de<br />

l’homme, à son régime politique, la démocratie. <strong>La</strong><br />

révolution triomphe, les francs-maçons eux-mêmes<br />

n’en croient pas leurs yeux.<br />

Qui ne plie pas le genou devant l’idole ? Notre frère<br />

Bruno en digne disciple de notre Père, lors de ses<br />

dernières actualités :<br />

« Le comble de l’aberration, c’est l’appel d’Yves de<br />

Kerdrel, dans VALEURS ACTUELLES du 23 mai 2013, à la<br />

“ DÉSOBÉISSANCE CIVILE ET ESPRIT DE RÉSISTANCE ” Depuis<br />

quand la désobéissance est-elle une vertu ?<br />

« <strong>La</strong> France conservatrice, la France des familles,<br />

des églises et des terroirs, la France bourgeoise traditionnelle,<br />

celle que l’on n’entend jamais, que l’on ne<br />

voit jamais dans la rue, celle qu’on qualifie de “ majorité<br />

silencieuse ”, est en train de faire sa révolution<br />

culturelle »... en devenant démocrate ! C’est un “ progrès<br />

” ! Progrès encore que de passer du culte de « Dieu<br />

premier servi » (Jeanne d’Arc) <strong>au</strong> « culte de l’homme »<br />

(P<strong>au</strong>l VI), et de la « dignité transcendante de la personne<br />

humaine » (Jean-P<strong>au</strong>l II) !<br />

Porte-parole du “ printemps français ”, mouvement informel<br />

né dans le sillage de “ LA MANIF POUR TOUS ”<br />

(LMPT), Béatrice Bourges déclare : « Ce mouvement est<br />

<strong>au</strong>ssi un mouvement de fierté : de quoi se cacherait-on ?<br />

de quoi <strong>au</strong>rait-on honte ? » De la Croix du Christ,<br />

scandale pour les impies, et c’est là tout le problème...<br />

Ludovine de <strong>La</strong> Rochère, présidente de LMPT :<br />

LES NOUVEAUTÉS DU MOIS<br />

1 VIDÉO (2 heures) : achat 12 e, location 4 e .<br />

1 VIDÉO (3 heures) : achat 18 e, location 6 e .<br />

DVD : achat 7.50 e.<br />

AUDIO – CASSETTES : location (uniquement) 1.50 e .<br />

CD : achat 5 e.<br />

Ajouter le prix du port. <strong>La</strong> durée de la location est de deux mois.<br />

CONFÉRENCES MENSUELLES À LA MAISON SAINT-JOSEPH.<br />

MAI 2013<br />

A 122. LE SAINT QUE DIEU NOUS A DONNÉ.<br />

A 123. LE TEMPS DES MARTYRS.<br />

A 122 - A 123 : 1 vidéo, 3 heures.<br />

Directeur de la publication : Frère Gérard Cousin. Commission paritaire 0313 G 80889.<br />

Impression : Association <strong>La</strong> <strong>Contre</strong>-<strong>Réforme</strong> Catholique.<br />

F - 10 260 Saint-Parres-lès-V<strong>au</strong>des. – http://www.site-crc.com<br />

ABONNEMENT 30 E, étudiants 18 E, soutien 60 E.<br />

POUR LES PAYS D’EUROPE 36 E, AUTRES PAYS 60 E, par avion 70 E.<br />

1 DVD – 1 cassette – 1 CD.<br />

1 DVD – 2 cassettes – 2 CD.<br />

« Notre combat devient <strong>au</strong>ssi de plus en plus un<br />

combat pour la démocratie. »<br />

« Rebâtir un avenir qui soit fondé sur la réalité de<br />

l’Homme. »<br />

« Remettre l’homme <strong>au</strong> cœur de la Cité », proclame<br />

cette femme... LMPT, mais c’est comme « le plus grand<br />

Sillon » dont Marc Sangnier disait : « On ne travaille pas<br />

pour l’Église, on travaille pour l’humanité. » C’est pourquoi<br />

saint Pie X condamna ce mouvement : « Une construction<br />

purement verbale et chimérique, où l’on verra<br />

miroiter pêle-mêle et dans une confusion séduisante les<br />

mots de liberté, de justice, de fraternité et d’amour, d’égalité<br />

et d’exaltation humaine, le tout basé sur une dignité<br />

humaine mal comprise. Ce sera une agitation tumultueuse,<br />

stérile pour le but proposé et qui profitera <strong>au</strong>x remueurs<br />

de masses moins utopistes. » (n o 38, in CRC n o 47, p. 11)<br />

À la franc-maçonnerie, pour ne pas la nommer.<br />

frère Philippe de la Face de Dieu.

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