06.07.2013 Views

Les mots de la Société (Eric Cobast) - INSEEC Business School

Les mots de la Société (Eric Cobast) - INSEEC Business School

Les mots de la Société (Eric Cobast) - INSEEC Business School

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

COLLECTION LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

CAHIERS MÉTHODOLOGIQUES POUR LES CLASSES PRÉPARATOIRES AUX GRANDES ÉCOLES DE COMMERCE<br />

<strong>Les</strong> <strong>mots</strong><br />

<strong>de</strong>… <strong>la</strong> <strong>Société</strong><br />

par <strong>Eric</strong> <strong>Cobast</strong><br />

LEXIQUE N° 14<br />

COLLECTION DIRIGÉE PAR<br />

ERIC COBAST


<strong>Les</strong> Lexiques <strong>de</strong> l’<strong>INSEEC</strong><br />

Consultables au quotidien, ces lexiques pourront accompagner utilement l’année<br />

sco<strong>la</strong>ire : ce sont en effet <strong>de</strong>s <strong>mots</strong>, <strong>de</strong>s notions, qui structurent le programme <strong>de</strong><br />

l’année mais c’est aussi le plus souvent sur un terme précis que se joue <strong>la</strong> réussite<br />

d’un p<strong>la</strong>n <strong>de</strong> dissertation… L’idée <strong>de</strong>s Lexiques s’impose dès lors que l’on prend<br />

en compte ces révisions répétées auxquelles les « DS » et les « Concours B<strong>la</strong>ncs »<br />

soumettent les préparationnaires. Éric <strong>Cobast</strong>, qui dirige ce projet à l’<strong>INSEEC</strong><br />

<strong>de</strong>puis <strong>de</strong> très nombreuses années, a donc retrouvé l’équipe <strong>de</strong>s professeurs <strong>de</strong><br />

prépa qui avaient déjà travaillé aux « Mémentos », une équipe é<strong>la</strong>rgie à <strong>de</strong> nouveaux<br />

venus, tous professeurs confi rmés et reconnus, qui ont mis leur expérience<br />

au service <strong>de</strong> cette collection.<br />

L’<strong>INSEEC</strong> souhaite ainsi contribuer activement à votre succès et, en mobilisant<br />

toutes ses compétences, mieux vous faire connaître son attachement à <strong>la</strong> méthodologie<br />

et à <strong>la</strong> culture générale.<br />

Avec tous nos encouragements pour cette année déterminante et passionnante<br />

à <strong>la</strong> fois.<br />

Catherine <strong>Les</strong>pine<br />

Directrice Générale du Groupe <strong>INSEEC</strong>


<strong>Les</strong> <strong>mots</strong> <strong>de</strong>…<br />

<strong>la</strong> <strong>Société</strong><br />

Par <strong>Eric</strong> <strong>Cobast</strong><br />

Professeur agrégé <strong>de</strong> l’Université<br />

Professeur <strong>de</strong> Littérature dans les C<strong>la</strong>sses<br />

<strong>de</strong> Première Supérieure du lycée Ma<strong>de</strong>leine Daniélou<br />

Professeur <strong>de</strong> Culture Générale à l’Ecole Nationale<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> Magistrature<br />

1


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Sommaire<br />

Du bon usage d’un lexique ....................................................... 3<br />

Introduction : La <strong>Société</strong>… d’un mot ....................................... 4<br />

Première Partie : Anthropologie .............................................. 6<br />

Deuxième partie : Politique .................................................... 13<br />

Troisième Partie : Sociologie .................................................. 21<br />

2


Du bon usage d’un lexique<br />

« Définir », c’est toujours ce par quoi commence le Socrate que P<strong>la</strong>ton met en<br />

scène dans ses dialogues.<br />

Sans délimiter avec précision le sens <strong>de</strong>s <strong>mots</strong>, comment s’entendre ? Sans<br />

débuter par cet accord contractuel sur le <strong>la</strong>ngage, comment parvenir à penser<br />

ensemble ? A dialoguer enfi n ?<br />

Or, rien n’est moins simple. Circonscrire <strong>la</strong> surface sémantique d’une notion<br />

réc<strong>la</strong>me souvent bien davantage qu’un simple dictionnaire. Il faut aller, certes<br />

à l’usage, mais aussi à <strong>la</strong> source même <strong>de</strong> <strong>la</strong> formation du terme. Or si l’étymologie<br />

ne dit pas nécessairement – et contrairement à ce qu’elle annonce – <strong>la</strong><br />

vérité d’un mot, elle en indique <strong>la</strong> pente, elle en découvre « l’arrière-goût »<br />

souvent indispensable à l’appréciation connotative.<br />

Bref, il est utile <strong>de</strong> maîtriser le sens <strong>de</strong>s <strong>mots</strong> du champ notionnel dans lequel<br />

on travaille, ne serait-ce que pour analyser correctement les énoncés <strong>de</strong>s<br />

sujets proposés, cerner avec justesse les enjeux <strong>de</strong>s textes dont <strong>la</strong> lecture et<br />

l’étu<strong>de</strong> sont conseillées, pour argumenter enfi n sans craindre l’imprécision.<br />

Ce<strong>la</strong> passe nécessairement par une étu<strong>de</strong> lexicale et notionnelle à l’occasion<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong>quelle on peut déjà suggérer une mise-en-problème, un début <strong>de</strong> questionnement,<br />

un commencement <strong>de</strong> réfl exion.<br />

C’est dire que chacune <strong>de</strong>s entrées proposées est conçue à <strong>la</strong> fois comme une<br />

défi nition précise <strong>de</strong> <strong>la</strong> notion citée et comme un premier exercice <strong>de</strong> problématisation.<br />

On trouvera souvent également en appui une citation qui amorce<br />

une première argumentation.<br />

L’ambition <strong>de</strong> ce petit lexique est donc <strong>de</strong> fournir <strong>de</strong>s informations nécessaires<br />

mais aussi d’inciter déjà à <strong>la</strong> réfl exion, d’apporter les défi nitions attendues<br />

mais également <strong>de</strong> surprendre parfois à l’occasion d’une entrée plus originale.<br />

3


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Introduction :<br />

La <strong>Société</strong>… d’un mot<br />

La notion, pour évi<strong>de</strong>nte qu’elle puisse paraître, offre toutefois <strong>de</strong>s nuances <strong>de</strong><br />

signifi cation qui <strong>de</strong>vront être bien sûr exploitées dans le cadre <strong>de</strong>s concours.<br />

Si, étymologiquement, <strong>la</strong> « société » désigne en effet ceux qui ont fait alliance,<br />

qui ont passé un accord pour vivre ensemble, on doit par exemple d’emblée<br />

distinguer un sens abstrait – rapports, re<strong>la</strong>tion, commerce existant entre <strong>de</strong>s<br />

personnes : il aime <strong>la</strong> société <strong>de</strong>s artistes et <strong>de</strong>s gens <strong>de</strong> lettres – d’un sens<br />

concret – ensemble d’individus entre lesquels existent <strong>de</strong>s rapports organisés,<br />

milieu humain dans lequel est intégré un individu en tant qu’ensemble <strong>de</strong><br />

forces hiérarchisées et organisées qui agissent sur lui.<br />

<strong>Les</strong> jeux d’oppositions sémantiques conduisent à distinguer société et communauté,<br />

<strong>la</strong> première résultant d’une volonté, quand <strong>la</strong> secon<strong>de</strong> est imposée par<br />

<strong>la</strong> nature. Dire que nous vivons dans une société, c’est affi rmer que celle-ci<br />

résulte d’un choix, qu’il est possible <strong>de</strong> <strong>la</strong> réformer, d’en changer, <strong>de</strong> <strong>la</strong> quitter<br />

alors que l’on appartient littéralement à une communauté. En fonction <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

nature <strong>de</strong> l’appréciation idéologique portée sur l’idée <strong>de</strong> liberté, on appréciera<br />

ou dépréciera l’une ou l’autre.<br />

Le sociologue et philosophe allemand Ferdinand Tönnies, en 1922, dans un<br />

ouvrage intitulé précisément Communauté et société explique :<br />

Tout ce qui est confi ant, intime, vivant exclusivement ensemble est compris<br />

comme <strong>la</strong> vie en communauté. La société est ce qui est public ; elle est le mon<strong>de</strong> ;<br />

on se trouve au contraire en communauté avec les siens <strong>de</strong>puis <strong>la</strong> naissance, lié<br />

à eux dans le Bien comme dans le Mal. On met l’adolescent en gar<strong>de</strong> contre « <strong>la</strong><br />

mauvaise société » mais l’expression « mauvaise communauté » sonne comme<br />

une contradiction.<br />

La secon<strong>de</strong> opposition intéressante confronte société et politique, principalement<br />

par le biais <strong>de</strong>s adjectifs dérivés. L’adjectif social s’entend certes au<br />

sens <strong>la</strong>rge comme ce qui concerne <strong>la</strong> société (on parle ainsi par exemple <strong>de</strong><br />

« contrat social ») mais aussi par opposition au mot « politique ». La justice<br />

sociale, le progrès social et tant d’autres expressions qui rappellent que <strong>la</strong><br />

question sociale interroge les inégalités, ou mieux les asymétries, alors que <strong>la</strong><br />

question politique, surtout quand elle est posée dans le cadre d’une démocratie,<br />

s’adresse à <strong>de</strong>s égaux, <strong>de</strong>s concitoyens.<br />

Le plus souvent, les connotations attachées au mot société sont positives, ce<br />

qui n’est évi<strong>de</strong>mment pas le cas pour le mot politique. Pourtant, <strong>la</strong> notion est<br />

4


sans doute moins lisse qu’on pourrait le croire. C’est ce qui résulte notamment<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> lecture précise du second discours <strong>de</strong> Rousseau, Discours sur l’origine<br />

et les fon<strong>de</strong>ments <strong>de</strong> l’inégalité parmi les hommes (1755), par quoi il serait<br />

vraiment pru<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> commencer le travail <strong>de</strong> l’année. On y découvre en effet<br />

que <strong>la</strong> société s’est sans doute imposée par le besoin. Si les hommes entrent<br />

en société c’est pour <strong>de</strong> bonnes raisons mais pas <strong>de</strong> bons sentiments. La vie<br />

en société témoigne par sa seule réalité du manque, <strong>de</strong> l’absence, <strong>de</strong> ce creux<br />

qui habitent les hommes. Je suis par nature incapable <strong>de</strong> vivre seul dans <strong>la</strong><br />

Nature et partant je cherche à m’associer à d’autres qui m’ai<strong>de</strong>nt et me complètent.<br />

L’imperfection <strong>de</strong>s hommes est <strong>la</strong> condition nécessaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie en<br />

société. Frappée du sceau, dès l’origine, du négatif, comment <strong>la</strong> société pourrait-elle<br />

être heureuse ?<br />

La notion « mord » trois champs d’étu<strong>de</strong> distincts : l’anthropologie et l’ethnologie,<br />

<strong>la</strong> politique et enfi n <strong>la</strong> sociologie. D’où nos trois parties. Certaines entrées<br />

auraient pu toutefois glisser d’une partie dans l’autre et mes choix sont essentiellement<br />

<strong>de</strong> composition.<br />

5


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Première Partie :<br />

Anthropologie<br />

Agressivité :<br />

Le rappel <strong>de</strong> cette disposition à l’attaque dont tous les êtres vivants sont dotés,<br />

à un <strong>de</strong>gré plus ou moins important il est vrai, vaut surtout ici pour rappeler<br />

le travail <strong>de</strong> Konrad Lorenz (qui reçut en 1973 avec Karl Von Frisch le prix<br />

Nobel <strong>de</strong> Physiologie pour récompenser ses travaux sur « l’organisation et <strong>la</strong><br />

mise en évi<strong>de</strong>nce <strong>de</strong>s mo<strong>de</strong>s <strong>de</strong> comportement individuel »). Dans son ouvrage,<br />

publié en Allemagne en 1963, L’agression, une histoire naturelle du Mal, il<br />

établit que les hommes à l’instar <strong>de</strong>s animaux sont sujets à cet instinct. Mais<br />

l’agressivité ne doit pas être comprise comme une priorité donnée à <strong>la</strong> violence<br />

ni même aux tensions <strong>la</strong>tentes <strong>de</strong>s rapports <strong>de</strong> force. Il s’agit davantage d’une<br />

énergie dont les diverses cultures optimisent les formes d’expression sociale.<br />

En société, les hommes vivent <strong>de</strong> façon « agressive », comme les animaux sur<br />

leur territoire ou dans leur milieu. Est-ce à dire que pour comprendre le comportement<br />

<strong>de</strong>s hommes il suffi t d’étudier celui <strong>de</strong>s bêtes ?<br />

Banc :<br />

Assemb<strong>la</strong>ge, amas <strong>de</strong> différentes matières selon une surface p<strong>la</strong>ne. Un banc<br />

<strong>de</strong> poissons, c’est une gran<strong>de</strong> quantité <strong>de</strong> poissons.<br />

Ban<strong>de</strong> :<br />

Du germanique « bandwa », l’étendard. Il s’agit dès lors d’un groupe d’hommes<br />

qui combattent ensemble sous <strong>la</strong> même bannière, <strong>de</strong>rrière un même chef. Plus<br />

<strong>la</strong>rgement : groupe <strong>de</strong> personnes ayant un point commun.<br />

C<strong>la</strong>n :<br />

Du gaélique « c<strong>la</strong>nn » qui signifie <strong>la</strong> famille. Tribu <strong>de</strong> familles écossaises ayant<br />

un ancêtre commun.<br />

6


Commerce :<br />

Derrière le sens premier <strong>de</strong> « marché commun » se loge l’idée <strong>de</strong> sociabilité,<br />

d’échanges pas seulement matériels mais aussi spirituels. Une personne d’un<br />

commerce agréable, c’est quelqu’un dont <strong>la</strong> société est p<strong>la</strong>isante.<br />

Communauté :<br />

La communauté, c’est ce qui est commun, ce que l’on partage et partant ceux<br />

avec lesquels je partage. De fait, communis s’oppose en <strong>la</strong>tin à proprius, ce qui<br />

est en propre, c’est-à-dire ce qui n’appartient qu’à un seul. Vivre en communauté,<br />

c’est renoncer à toute forme <strong>de</strong> propriété privée, d’appropriation personnelle.<br />

La vie en communauté à <strong>la</strong>quelle P<strong>la</strong>ton <strong>de</strong>stine ses gardiens dans<br />

La République élimine toute dimension privée <strong>de</strong> l’existence, toute re<strong>la</strong>tion en<br />

propre entre ces mêmes gardiens, interdits <strong>de</strong> famille et <strong>de</strong> conjugalité.<br />

Ethnie :<br />

Le mot appartient au registre <strong>de</strong> <strong>la</strong> sociologie. C’est l’ensemble <strong>de</strong>s individus<br />

appartenant peut-être à <strong>de</strong>s nations différentes mais qui sont unis par une<br />

civilisation et une <strong>la</strong>ngue commune. L’ethnie française, par exemple, englobe<br />

<strong>la</strong> Belgique wallonne et <strong>la</strong> Suisse roman<strong>de</strong>.<br />

Ethnocentrisme :<br />

Si le mot a été vulgarisé par C<strong>la</strong>u<strong>de</strong> Lévi Strauss pour lui donner d’ailleurs<br />

une portée universelle, c’est l’anthropologue W.G. Summer qui en 1907 le forge<br />

pour désigner <strong>la</strong> tendance, plus ou moins consciente, à privilégier les valeurs et<br />

les formes culturelles du groupe ethnique auquel on appartient.<br />

Ethologie :<br />

C’est l’étu<strong>de</strong> du comportement animal. Le mot a été inventé par Geoffroy<br />

Saint-Hi<strong>la</strong>ire en 1854. La question qui se pose aujourd’hui.<br />

7


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Exogamie :<br />

L’exogamie est une règle matrimoniale imposant <strong>de</strong> chercher son conjoint à<br />

l’extérieur <strong>de</strong> son groupe social (c<strong>la</strong>n, groupe territorial, caste, société, milieu<br />

social).<br />

Har<strong>de</strong> :<br />

Troupe <strong>de</strong> bêtes sauvages qui vivent ensemble. Ne s’emploie que par métaphore<br />

s’il s’agit <strong>de</strong> désigner <strong>de</strong>s humains.<br />

Hor<strong>de</strong> :<br />

Groupe composé <strong>de</strong> douze à quinze individus.<br />

Inceste :<br />

Du <strong>la</strong>tin incestus qui signifi e « impur ». L’inceste caractérise une re<strong>la</strong>tion<br />

sexuelle entre membres d’une même famille. Sauf exceptions, souvent hiérogamiques<br />

comme dans l’Egypte pharaonique, l’inceste est prohibé. Cette prohibition<br />

est une condition du passage <strong>de</strong> <strong>la</strong> hor<strong>de</strong> primitive à <strong>la</strong> tribu puis à<br />

<strong>la</strong> société puisqu’elle contraint les mâles à chercher une femelle à l’extérieur<br />

du groupe.<br />

Insociable (sociabilité) :<br />

L’expression appartient à Emmanuel Kant, elle apparaît dans Idée d’une<br />

Histoire Universelle au point <strong>de</strong> vue cosmopolitique. Il s’agit <strong>de</strong> comprendre<br />

l’origine <strong>de</strong>s confl its qui déchirent l’humanité. De fait, selon le philosophe les<br />

hommes ont une inclination à entrer en société, inclination qui est cependant<br />

doublée d’une répulsion générale à le faire, menaçant constamment <strong>de</strong> désagréger<br />

cette société.<br />

Et il ajoute :<br />

Remercions donc <strong>la</strong> nature pour cette humeur peu conciliante, pour <strong>la</strong> vanité<br />

rivalisant dans l’envie, pour l’appétit insatiable <strong>de</strong> possession ou même <strong>de</strong><br />

domination. Sans ce<strong>la</strong> toutes les dispositions excellentes <strong>de</strong> l’humanité seraient<br />

étouffées dans un éternel sommeil.<br />

8


Matriarcat :<br />

Ce mot, qui à l’origine désigne un système <strong>de</strong> parenté matrilinéaire, fut rapi<strong>de</strong>ment<br />

compris comme le pendant du patriarcat, c’est-à-dire un système<br />

social dominé par les hommes. Le matriarcat renverrait ainsi à <strong>de</strong>s organisations<br />

<strong>de</strong> société où ce sont les femmes qui détiennent le pouvoir. Or, <strong>de</strong> telles<br />

sociétés n’ont jamais existé.<br />

Il y a matriarcat au sens propre si <strong>la</strong> société est matrilocale (l’époux va habiter<br />

dans le vil<strong>la</strong>ge <strong>de</strong> l’épouse) et matrilinéaire (<strong>la</strong> transmission du statut social<br />

passe par <strong>la</strong> lignée maternelle, avec le nom et les biens). Un système politique<br />

où les femmes détiennent et exercent le pouvoir porte le nom <strong>de</strong> gynocratie. Ce<br />

type <strong>de</strong> société relève <strong>de</strong> l’utopie.<br />

Paraître :<br />

Le paraître, ce n’est pas tout-à-fait l’apparence. En effet, il y a dans l’usage <strong>de</strong><br />

ce verbe substantivé une nuance d’ostentation, <strong>de</strong> démonstration. Le paraître,<br />

c’est <strong>la</strong> valorisation <strong>de</strong> l’apparence. Le terme entre également dans un couple<br />

antonymique, il y a l’Etre et le Paraître comme il y a <strong>la</strong> surface et <strong>la</strong> profon<strong>de</strong>ur,<br />

<strong>la</strong> superfi cie et l’intimité.<br />

La société, très rapi<strong>de</strong>ment dans le discours <strong>de</strong>s moralistes et <strong>de</strong>s satiristes,<br />

impose le paraître sur l’Etre, dès lors l’homme vrai, l’homme naturel, y disparaît.<br />

Perfectibilité :<br />

Disposition naturelle <strong>de</strong> l’homme à se parfaire sans cesse. Parce qu’il est « inachevé<br />

», c’est-à-dire incapable <strong>de</strong> vivre tel qu’il est né dans <strong>la</strong> nature, l’homme,<br />

dit Kant, a besoin d’un maître. Il lui faut apprendre à vivre et à transformer<br />

cette nature à <strong>la</strong>quelle il est inadapté. Elle <strong>de</strong>vient alors culture. Et cette<br />

culture se manifeste notamment à travers <strong>la</strong> constitution <strong>de</strong>s sociétés. Cette<br />

aptitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’homme à se « parfaire », c’est-à-dire à développer ses aptitu<strong>de</strong>s,<br />

est <strong>la</strong> condition <strong>de</strong>s progrès que réalise l’espèce humaine au nombre <strong>de</strong>squels<br />

on peut raisonnablement compter le perfectionnement <strong>de</strong> ces mêmes sociétés<br />

visant le « bien vivre ensemble », le bonheur.<br />

Phratrie :<br />

Division à l’intérieur d’une tribu. <strong>Les</strong> phratries sont généralement exogames.<br />

9


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Ruche :<br />

Une ruche est une structure qui abrite une colonie d’abeilles. L’essaim rassemble<br />

un nombre important <strong>de</strong> ces insectes. La ruche et l’essaim sont souvent<br />

utilisés comme métaphores <strong>de</strong>stinées à représenter une société où <strong>la</strong><br />

popu<strong>la</strong>tion est très active. C’est le bourdonnement <strong>la</strong>borieux <strong>de</strong>s abeilles qui<br />

est alors mis en valeur. Le célèbre romancier espagnol Camilo José Ce<strong>la</strong> fi le<br />

<strong>la</strong> métaphore dès le titre <strong>de</strong> son roman le plus connu : La Colmena (1953),<br />

littéralement « La ruche ». Plus <strong>de</strong> trois cents personnages se croisent dans le<br />

Madrid <strong>de</strong>s années quarante, le texte restitue bien cette impression <strong>de</strong> bourdonnement,<br />

<strong>de</strong> grouillement insensé.<br />

Sauvage (enfant) :<br />

Victor <strong>de</strong> l’Aveyron, étudié par le Docteur Jean Itard en 1798, donne à l’Enfant<br />

sauvage sinon un nom du moins un prénom ainsi qu’une existence « scientifi<br />

que », lui permettant <strong>de</strong> sortir du registre <strong>de</strong> <strong>la</strong> fi ction (Tarzan) ou <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

légen<strong>de</strong> (Romulus et Remus). Pourtant, l’imposture du pseudo texte autobiographique<br />

<strong>de</strong> Misha Defonseca, publié en français en 1997 sous le titre Survivre<br />

avec les loups qui racontait comment une petite fi lle avait vécu parmi<br />

les loups pendant <strong>la</strong> secon<strong>de</strong> guerre mondiale pourrait calmer les ar<strong>de</strong>urs<br />

<strong>de</strong> tous ceux qui cherchent à prouver – grâce aux enfants sauvages – que<br />

<strong>la</strong> société n’est pas pour les hommes une nécessité vitale. Diffi cile en effet<br />

<strong>de</strong> faire disparaître le soupçon d’escroquerie. <strong>Les</strong> corps examinés <strong>de</strong>s enfants<br />

prétendus sauvages – c’est-à-dire ayant vécu strictement dans <strong>la</strong> nature sans<br />

autre assistance que celle <strong>de</strong>s bêtes – n’ont jamais révélé rien d’autre que <strong>de</strong>s<br />

signes <strong>de</strong> maltraitance humaine en guise <strong>de</strong> cicatrices <strong>de</strong>stinées à prouver <strong>la</strong><br />

vie sauvage. La liste est pourtant très longue <strong>de</strong> ces enfants exhibés dans les<br />

foires ou dans les cours d’Europe : <strong>de</strong> l’enfant-mouton d’Ir<strong>la</strong>n<strong>de</strong> (1640) à Natacha,<br />

<strong>la</strong> fi llette <strong>de</strong> cinq élevée par <strong>de</strong>s chiens en Sibérie (2009), en passant par<br />

les fi llettes-louves, Ama<strong>la</strong> et Kama<strong>la</strong>, découvertes en In<strong>de</strong> (1920) ou <strong>la</strong> petite<br />

Slovaque vivant parmi les ours (1762). Aucun <strong>de</strong> ces cas n’est aujourd’hui<br />

reconnu.<br />

Sé<strong>de</strong>ntarisation :<br />

Phénomène par lequel une popu<strong>la</strong>tion se fi xe sur un territoire et cesse d’être<br />

noma<strong>de</strong>. Le développement <strong>de</strong> <strong>la</strong> société passe en effet par le renoncement au<br />

mouvement. On évoque ainsi aisément une tribu noma<strong>de</strong>, moins une « société<br />

10


noma<strong>de</strong> ». L’idée <strong>de</strong> société impose celle <strong>de</strong> stabilité. La société suppose un<br />

rapport à l’avoir qui serait fi xé. D’où <strong>la</strong> formule <strong>de</strong> Rousseau qui fait du premier<br />

homme qui « enclot un terrain » le véritable fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> société civile.<br />

La société permet d’immobiliser les biens qui <strong>de</strong>viennent alors « immobilier ».<br />

Structure :<br />

Généralement, <strong>la</strong> structure, c’est l’agencement <strong>de</strong>s éléments constitutifs d’un<br />

système. Il y a structure parce qu’il y a construction d’un réseau fonctionnel<br />

d’interactions entre ces éléments. Privilégier <strong>la</strong> structure, c’est privilégier<br />

<strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion invariante entre <strong>de</strong>s éléments qui eux sont variables. La société<br />

obéit-elle à une structure commune alors à toutes les formes <strong>de</strong> société ? C’est<br />

ce que pense C<strong>la</strong>u<strong>de</strong> Lévi Strauss, pour qui ce qui importe c’est l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong><br />

cette structure (qui rendrait évi<strong>de</strong>mment intelligible le phénomène étudié) et<br />

non celle <strong>de</strong>s hommes qui vivent dans cette société. Selon l’hypothèse vieille<br />

comme Darwin qui fut le premier à <strong>la</strong> formuler : <strong>la</strong> prohibition <strong>de</strong> l’inceste et<br />

l’obligation <strong>de</strong> donner sépulture aux morts constituent <strong>de</strong>ux invariants qui<br />

« structurent » <strong>la</strong> société.<br />

Tabou :<br />

Il s’agit d’un mot d’origine polynésienne qui signifi e “interdit”.<br />

C’est Freud qui en vulgarise l’usage en Occi<strong>de</strong>nt et pour qui : Le tabou est un<br />

acte prohibé, vers lequel l’inconscient est poussé par une tendance très forte…<br />

Totem et tabou.<br />

Le tabou entre tous, c’est celui <strong>de</strong> l’inceste, sans lequel il n’y aurait pas <strong>de</strong><br />

société possible.<br />

Tribu :<br />

Subdivision d’hommes prétendant <strong>de</strong>scendre d’un même ancêtre. Il s’agit à<br />

l’origine <strong>de</strong>s 12 tribus d’Israël formées <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>de</strong>scendance <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s 12 fi ls<br />

<strong>de</strong> Jacob. Au sens <strong>la</strong>rge, il faut entendre par tribu un groupe d’individus unis<br />

par un style <strong>de</strong> vie, un <strong>la</strong>ngage, une mo<strong>de</strong>.<br />

11


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Totem :<br />

Le mot est emprunté aux Indiens d’Amérique du Nord et il désigne l’animal<br />

(ce<strong>la</strong> peut-être parfois, mais plus rarement un végétal) qui représente l’ancêtre<br />

fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> tribu. Il protège le groupe mais il est aussi <strong>la</strong> source<br />

d’interdits, <strong>de</strong> proscriptions <strong>de</strong> tabous. Le totem symbolise <strong>la</strong> fi gure du père<br />

disparu et dont les fi ls ont désiré et/ou organisé le meurtre.<br />

Violence :<br />

La société semble se fon<strong>de</strong>r sur un principe d’éviction <strong>de</strong> <strong>la</strong> violence, c’est-àdire<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> puissance <strong>de</strong>structrice <strong>de</strong> <strong>la</strong> nature. Elle est pourtant travaillée <strong>de</strong><br />

l’intérieur par une violence humaine que même l’invention <strong>de</strong> l’Etat ne parvient<br />

pas à résorber, celle par exemple <strong>de</strong>s passions.<br />

12


Deuxième partie : Politique<br />

Amitié :<br />

Sentiment d’attachement qui lie <strong>de</strong>s individus, enclins à se retrouver, à partager<br />

<strong>la</strong> même compagnie. L’amitié est un premier principe <strong>de</strong> rassemblement<br />

fondé sur une similitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> goûts, <strong>de</strong> valeurs, d’intérêts : qui se ressemble<br />

dans l’amitié s’assemble.<br />

Anachorète :<br />

Contemp<strong>la</strong>tif qui se retire du mon<strong>de</strong> et <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. Telle est <strong>la</strong> stricte traduction<br />

du mot grec. Au quatrième siècle après Jésus-Christ, quelques religieux déci<strong>de</strong>nt<br />

<strong>de</strong> se retirer et <strong>de</strong> vivre dans <strong>la</strong> solitu<strong>de</strong> et le dénuement du désert égyptien. Le<br />

prince perse Onuphre qui vécut soixante-dix ans sous un palmier (jusqu’à ce que<br />

ses vêtements tombassent en poussière ! L’iconographie pieuse le représente souvent<br />

totalement nu, recouvert <strong>de</strong> sa longue barbe b<strong>la</strong>nche) en est l’un <strong>de</strong>s représentants<br />

les plus fameux. Siméon qui vécut au sommet d’une colonne et qu’on<br />

appelle pour ce<strong>la</strong> « le stylite »; Antoine… L’anachorète est un ermite, d’ailleurs ce<br />

<strong>de</strong>rnier terme est formé sur le mot grec erêmos qui signifi e désert. Il s’oppose au<br />

religieux qui fait le choix <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie en communauté, le cénobite.<br />

Si <strong>la</strong> démarche <strong>de</strong>s anachorètes du désert est sans équivoque – fuir les hommes<br />

et leurs petitesses pour vivre dans <strong>la</strong> solitu<strong>de</strong> un face-à-face avec Dieu – en<br />

revanche, le phénomène qu’ils ont fi ni par constituer est ambigu : <strong>la</strong> plupart<br />

d’entre eux <strong>de</strong>vinrent <strong>de</strong> véritables curiosités et on organisait ainsi <strong>de</strong>s<br />

pèlerinages pour les observer, dans certains cas les rencontrer. La fuite « au<br />

désert », si elle apparaît autant comme un acte <strong>de</strong> foi qu’un rejet du mon<strong>de</strong>, fut<br />

aussi un « phénomène <strong>de</strong> société ».<br />

Association :<br />

Du <strong>la</strong>tin socius, l’allié. L’association réunit dans un but commun <strong>de</strong>s alliés,<br />

c’est-à-dire <strong>de</strong>s individus qui déci<strong>de</strong>nt <strong>de</strong> se lier les uns aux autres dans le cadre<br />

strictement défi ni d’un projet ou d’une activité particulière fi xé à l’avance.<br />

La société est bien ainsi une forme d’association. Mais ce que l’on appelle<br />

aujourd’hui « association » relève d’un statut juridique. C’est en France <strong>la</strong> loi<br />

du premier juillet 1901, mise en p<strong>la</strong>ce par Wal<strong>de</strong>ck Rousseau qui <strong>la</strong> défi nit :<br />

13


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

L’association est <strong>la</strong> convention par <strong>la</strong>quelle <strong>de</strong>ux ou plusieurs personnes mettent<br />

en commun, d’une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans<br />

un but autre que <strong>de</strong> partager <strong>de</strong>s bénéfi ces. Elle est régie, quant à sa validité,<br />

par les principes généraux du droit applicable aux contrats et obligations.<br />

Bourgeois :<br />

De l’allemand burg, cita<strong>de</strong>lle. Le bourgeois vit ainsi protégé dans l’enceinte<br />

du château.<br />

De cette origine, le mot conserve un lien avec l’idée <strong>de</strong> confort, <strong>de</strong> sécurité matérielle<br />

(appréciation positive) mais il est aussi porteur <strong>de</strong> connotations péjoratives<br />

qui trouvent leur explication dans <strong>la</strong> frilosité et le manque <strong>de</strong> courage que<br />

révèle ce besoin <strong>de</strong> protection. Mais ce que l’on appelle <strong>la</strong> « société bourgeoise »,<br />

c’est, à partir <strong>de</strong> <strong>la</strong> dénomination hégélienne, <strong>la</strong> société dominée, selon Marx,<br />

par une c<strong>la</strong>sse sociale spécifi que appelée « bourgeoisie ». Le Manifeste du Parti<br />

Communiste en <strong>de</strong>ssine l’historique et en analyse les caractéristiques :<br />

L’histoire <strong>de</strong> toute société jusqu’à nos jours n’a été que l’histoire <strong>de</strong> luttes <strong>de</strong><br />

c<strong>la</strong>sses.<br />

(…)<br />

La société bourgeoise mo<strong>de</strong>rne, élevée sur les ruines <strong>de</strong> <strong>la</strong> société féodale, n’a<br />

pas aboli les antagonismes <strong>de</strong> c<strong>la</strong>sses. Elle n’a fait que substituer <strong>de</strong> nouvelles<br />

c<strong>la</strong>sses, <strong>de</strong> nouvelles conditions d’oppression, <strong>de</strong> nouvelles formes <strong>de</strong> lutte à<br />

celles d’autrefois.<br />

(…)<br />

Partout où elle a conquis le pouvoir, elle a détruit les re<strong>la</strong>tions féodales, patriarcales<br />

et idylliques. Tous les liens complexes et variés qui unissent l’homme féodal<br />

à ses « supérieurs naturels », elle les a brisés sans pitié pour ne <strong>la</strong>isser<br />

subsister d’autre lien, entre l’homme et l’homme, que le froid intérêt, les dures<br />

exigences du « paiement au comptant ». Elle a noyé les frissons sacrés <strong>de</strong> l’extase<br />

religieuse, <strong>de</strong> l’enthousiasme chevaleresque, <strong>de</strong> <strong>la</strong> sentimentalité petitebourgeoise<br />

dans les eaux g<strong>la</strong>cées du calcul égoïste. Elle a supprimé <strong>la</strong> dignité<br />

<strong>de</strong> l’individu <strong>de</strong>venu simple valeur d’échange ; aux nombreuses libertés dûment<br />

garanties et si chèrement conquises, elle a substitué l’unique et impitoyable<br />

liberté du commerce. En un mot, à <strong>la</strong> p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong> l’exploitation que masquaient<br />

les illusions religieuses et politiques, elle a substitué une exploitation ouverte,<br />

éhontée, directe, brutale.<br />

14


Civile (société)<br />

La signifi cation <strong>de</strong> l’expression suit l’évolution historique du couple antithétique<br />

dans lequel elle s’inscrit : d’abord défi nie en opposition avec l’état <strong>de</strong><br />

nature, elle est aujourd’hui confrontée à <strong>la</strong> société « politique ».<br />

En effet, ce qui est civil au XVIIe siècle, c’est précisément ce qui n’est plus<br />

« naturel ». De fait, « société civile » peut être alors ressentie comme un véritable<br />

pléonasme. Aujourd’hui, « société civile » désigne le domaine <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie<br />

sociale qui est indépendant <strong>de</strong> l’Etat, autosuffisant et autonome. Mais c’est<br />

aussi le corps social qui s’oppose à <strong>la</strong> « c<strong>la</strong>sse politique ». De fait, lorsqu’au<br />

gouvernement entrent aux côtés <strong>de</strong>s politiciens professionnels <strong>de</strong>s membres<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> « société civile », ce<strong>la</strong> témoigne d’une volonté d’ouverture et d’un souci<br />

d’éviter l’image d’un exercice partisan du pouvoir. <strong>Les</strong> représentants <strong>de</strong> <strong>la</strong><br />

société civile, ce sont alors <strong>de</strong>s professionnels reconnus, <strong>de</strong>s personnalités au<br />

statut moral ou intellectuel établi.<br />

C<strong>la</strong>sses (sociales) :<br />

C’est François Quesnay qui introduit en 1758, dans son Tableau économique,<br />

le concept <strong>de</strong> « c<strong>la</strong>sse », opposant <strong>la</strong> « c<strong>la</strong>sse productive », celle qui fait renaître<br />

par <strong>la</strong> culture du territoire, les richesses annuelles <strong>de</strong> <strong>la</strong> nation, à <strong>la</strong> fois à <strong>la</strong><br />

« c<strong>la</strong>sse <strong>de</strong>s propriétaires » et à <strong>la</strong> « c<strong>la</strong>sse stérile ». Il faut alors entendre par<br />

« c<strong>la</strong>sse » un ensemble d’individus qui ont <strong>de</strong>s caractéristiques communes. On<br />

parle naturellement d’une « c<strong>la</strong>sse d’âge » (ce qui est d’ailleurs conforme à<br />

l’étymologie <strong>la</strong>tine, « c<strong>la</strong>ssis », <strong>la</strong> flotte <strong>de</strong> guerre composée <strong>de</strong> citoyens ayant à<br />

peu près le même âge). Mais le sens se spécialise dans le registre économique,<br />

notamment avec Marx, qui souligne <strong>de</strong>ux critères : un premier critère, objectif:<br />

font partie <strong>de</strong> <strong>la</strong> même c<strong>la</strong>sse sociale ceux qui occupent <strong>la</strong> même position dans<br />

le système économique. Et puis un second critère, subjectif, qui renvoie à <strong>la</strong><br />

conscience collective <strong>de</strong> cette position, conscience qui passe nécessairement<br />

par une interprétation <strong>de</strong>s re<strong>la</strong>tions sociales comme étant nécessairement<br />

confl ictuelles.<br />

Des années soixante à nos jours, le débat s’est structuré autour <strong>de</strong> <strong>la</strong> question<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> disparition (R. Nisbet) puis du retour <strong>de</strong>s « c<strong>la</strong>sses sociales » (L.Chauvel).<br />

15


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Contrat :<br />

Du <strong>la</strong>tin cum (ensemble) trahere (tirer).<br />

Le contrat résulte, dit l’étymologie, d’un effort collectif. Mais c’est aussi comme<br />

le précise le Co<strong>de</strong> Civil : une convention par <strong>la</strong>quelle une ou plusieurs personnes<br />

s’obligent envers une ou plusieurs autres, à donner, à faire ou à ne pas<br />

faire quelque chose.<br />

Dans ces conditions qu’appelle-t-on « Contrat Social » ? L’expression nous est<br />

familière grâce au texte célèbre <strong>de</strong> Rousseau, rédigé en 1762, Du Contrat<br />

Social, texte où se trouve défi nie <strong>la</strong> nécessité d’un Peuple <strong>de</strong>venu souverain<br />

et <strong>de</strong> l’affi rmation <strong>de</strong> l’Intérêt Général que revendique une Volonté Générale<br />

<strong>de</strong>vant <strong>la</strong>quelle doivent plier les volontés particulières. Cette œuvre majeure<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> philosophie politique mo<strong>de</strong>rne s’inscrit dans un courant qu’on appelle<br />

le « contractualisme » qui utilise, avec Hobbes et Locke notamment, <strong>la</strong> métaphore<br />

du « contrat » pour penser <strong>la</strong> nature <strong>de</strong> <strong>la</strong> société. Il s’agissait ainsi <strong>de</strong><br />

rompre avec <strong>la</strong> conception antique <strong>de</strong> <strong>la</strong> société perçue comme obéissant à<br />

un ordre naturel (P<strong>la</strong>ton, Aristote). Avec l’idée <strong>de</strong> « contrat », les mo<strong>de</strong>rnes<br />

mettent en avant le rôle fondateur <strong>de</strong> <strong>la</strong> volonté. La société est bien issue<br />

d’une volonté <strong>de</strong>s hommes – et pas seulement un besoin, ou une nécessité –<br />

elle est aussi ce que les hommes en font, libre à eux par conséquent d’en modifi<br />

er les fon<strong>de</strong>ments ou l’organisation.<br />

Cosmopolite :<br />

Du grec cosmos, le tout organisé et polis, <strong>la</strong> Cité.<br />

Au sens propre, l’adjectif cosmopolite qualifi e ce qui se défi nit comme appartenant<br />

à une Cité bien particulière puisqu’elle a <strong>la</strong> dimension du mon<strong>de</strong>. Mais<br />

une société « cosmopolite », c’est autre chose : il s’agit d’une société composée<br />

– et partant composite – d’individus venus d’ailleurs, <strong>de</strong> voyageurs, d’étrangers,<br />

une société multiculturelle, c’est-à-dire au sein <strong>de</strong> <strong>la</strong>quelle coexistent <strong>de</strong>s<br />

cultures différentes, où l’on parle plusieurs <strong>la</strong>ngues, où différentes nations<br />

vivent ensemble. On peut dire ainsi <strong>de</strong> <strong>la</strong> société romaine qu’elle est cosmopolite<br />

: dans les rues <strong>de</strong> Rome sous l’Empire, on entend plus d’une cinquantaine<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong>ngues.<br />

16


État :<br />

Du verbe stare, se tenir fermement <strong>de</strong>bout. L’État, c’est ce qui dure, ce qui<br />

résiste. Il est <strong>la</strong> forme organisée <strong>de</strong>s sociétés mo<strong>de</strong>rnes. Le philosophe Hegel<br />

voit dans l’Etat <strong>la</strong> forme d’organisation <strong>la</strong> plus é<strong>la</strong>borée. Pour lui, l’Etat met<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> raison dans <strong>la</strong> vie civile, il oblige à transcen<strong>de</strong>r les intérêts particuliers<br />

qui s’affrontent dans <strong>la</strong> société civile, il donne son sens au « vouloir-vivreensemble<br />

». Mais l’Etat est-il vraiment cet aboutissement, cet achèvement <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> construction sociale ?<br />

Pierre C<strong>la</strong>stres, en 1974, publie La société contre l’Etat, texte qui affi rme que<br />

les sociétés dites primitives, ces « sociétés sans Etat », auraient délibérément<br />

choisi un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> développement leur permettant d’éviter l’Etat. De fait, il<br />

serait naïf <strong>de</strong> croire que l’absence d’Etat est un manque, c’est au contraire<br />

une volonté :<br />

L’histoire <strong>de</strong>s peuples sans histoire, c’est [...] l’histoire <strong>de</strong> leur lutte contre l’État.<br />

C’est que l’Etat se révèle peut-être surtout un moyen d’opprimer <strong>la</strong> société.<br />

D’ailleurs les régimes statolâtres sont le plus souvent <strong>de</strong>s régimes totalitaires,<br />

c’est-à-dire qui visent à contrôler <strong>la</strong> totalité <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie sociale.<br />

On connaît bien sûr l’analyse que partagent libéraux et socialistes : l’Etat<br />

n’est pas une fi n mais un moyen <strong>de</strong> domination (le plus souvent par l’usage et<br />

le développement d’une bureaucratie), ne serait-ce que parce qu’il dispose du<br />

monopole <strong>de</strong> <strong>la</strong> violence légale. Alors pourquoi les sociétés libérales acceptentelles<br />

<strong>de</strong> fi nancer <strong>de</strong>s états ? Pour être protégées. L’historien Marc Bloch voyait<br />

dans <strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion société civile/état une survivance du pacte vassalique. Que<br />

se passe-t-il lorsque, par incompétence, l’Etat ne protège plus et se contente<br />

d’arbitrer ? La société lui échappe et se trouve exposée.<br />

Ou bien l’Etat est fort et il nous écrase, écrit Paul Valéry, ou bien il est faible et<br />

nous périssons.<br />

Fracture sociale :<br />

L’expression apparaît pour <strong>la</strong> première fois dans une note <strong>de</strong> <strong>la</strong> Fondation<br />

Saint-Simon en 1994, Aux origines du ma<strong>la</strong>ise politique français, signée d’Emmanuel<br />

Todd. Elle est reprise ensuite en 1995 par Jacques Chirac en campagne.<br />

La métaphore <strong>de</strong> <strong>la</strong> fracture est intéressante dans <strong>la</strong> mesure où elle<br />

suggère un choc brutal et une société brisée, rompue. Elle permet toutefois <strong>de</strong><br />

préserver l’avenir et <strong>de</strong> ne pas limiter le constat à l’échec défi nitif : une fracture,<br />

ce<strong>la</strong> fi nit par se « réduire ».<br />

17


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Hérisson :<br />

Le besoin <strong>de</strong> se réchauffer pousse les hérissons à se regrouper mais alors le<br />

contact <strong>de</strong> leurs piquants les fait s’écarter les uns <strong>de</strong>s autres : Quand le besoin<br />

<strong>de</strong> se réchauffer les eut rapprochés <strong>de</strong> nouveau, le même inconvénient se renouve<strong>la</strong>,<br />

<strong>de</strong> sorte qu’ils étaient ballotés <strong>de</strong> çà et <strong>de</strong> là entre les <strong>de</strong>ux <strong>mots</strong> jusqu’à<br />

ce qu’ils eussent fi ni par trouver une distance moyenne qui leur rendît <strong>la</strong> situation<br />

supportable. Ainsi le besoin <strong>de</strong> société né du vi<strong>de</strong> et <strong>de</strong> <strong>la</strong> monotonie <strong>de</strong> leur<br />

vie intérieure pousse les hommes les uns vers les autres ; mais leurs nombreuses<br />

manières d’être antipathiques et leurs insupportables défauts les dispersent <strong>de</strong><br />

nouveau. La distance moyenne qu’ils fi nissent par découvrir et à <strong>la</strong>quelle <strong>la</strong> vie en<br />

commun <strong>de</strong>vient possible, c’est <strong>la</strong> politesse et les belles manières. Schopenhauer<br />

Justice (sociale) :<br />

Une société est juste si elle donne aux moins favorisés le maximum <strong>de</strong> bienêtre<br />

possible. C’est l’égalité <strong>de</strong>s chances. Pour le philosophe américain John<br />

Rawls, l’auteur <strong>de</strong> <strong>la</strong> Théorie <strong>de</strong> <strong>la</strong> Justice, les inégalités justes sont celles qui<br />

améliorent <strong>la</strong> situation <strong>de</strong> tous y compris <strong>de</strong> celles <strong>de</strong>s moins favorisés.<br />

Luxe :<br />

Du <strong>la</strong>tin luxus, excès. L’emploi du mot se spécialise pour désigner un mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie.<br />

Le luxe est un excès mais un excès démonstratif, ostentatoire parce qu’il est<br />

signe <strong>de</strong> richesse et <strong>de</strong> supériorité sociale : On ne jouit du luxe qu’en le montrant<br />

écrit Rousseau. Le p<strong>la</strong>isir n’est pas <strong>de</strong> dominer mais <strong>de</strong> montrer cette<br />

domination, d’en faire un spectacle pour <strong>la</strong> société. Le débat sur le luxe qui<br />

agite <strong>la</strong> société <strong>de</strong>s Lumières rappelle celui sur <strong>la</strong> société <strong>de</strong>s apparences, où<br />

le spectacle <strong>de</strong> l’inégalité est partout.<br />

Misère :<br />

La misère, ce n’est pas seulement <strong>la</strong> pauvreté, et <strong>la</strong> pauvreté ce n’est pas<br />

nécessairement l’indigence ou l’absence <strong>de</strong> ressources. Il faut rappeler ainsi<br />

quelques précisions terminologiques.<br />

La misère, c’est au sens propre le malheur. <strong>Les</strong> misérables le sont aussi parce<br />

qu’ils n’ont « pas <strong>de</strong> chance ». Le pauvre, c’est le faible – chez les <strong>la</strong>tins l’antonyme<br />

<strong>de</strong> pauper est potens – un « pauvre vieux » n’est pas nécessairement<br />

18


impécunieux, c’est surtout un homme fragile et vulnérable. Voilà pourquoi<br />

traiter <strong>de</strong> <strong>la</strong> misère dans <strong>la</strong> société c’est avant tout abor<strong>de</strong>r l’inégalité <strong>de</strong>s<br />

« chances », mais celles-ci ne sont pas seulement économiques, elles sont<br />

aussi culturelles, sanitaires… bref, sociales !<br />

Nature (état <strong>de</strong>) :<br />

A propos <strong>de</strong> cette « fi ction normative » dont les contractualistes font l’usage,<br />

Hobbes donne dans Léviathan <strong>la</strong> plus juste défi nition :<br />

Un état qui n’existe plus, qui n’a peut-être point existé, qui probablement<br />

n’existera jamais, et dont il est pourtant nécessaire d’avoir <strong>de</strong>s notions justes<br />

pour bien juger <strong>de</strong> notre état présent.<br />

Hobbes choisit d’imaginer cet état <strong>de</strong> nature, à <strong>la</strong> différence <strong>de</strong> Rousseau,<br />

comme un état <strong>de</strong> violence permanente. <strong>Les</strong> hommes y vivent dans <strong>la</strong> terreur<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> mort brutale :<br />

Ils sont dans cette condition qui se nomme guerre, et cette guerre est guerre <strong>de</strong><br />

chacun contre chacun.<br />

Précarité :<br />

A nouveau, il faut corriger les abus <strong>de</strong> <strong>la</strong>ngage : <strong>la</strong> précarité n’est pas l’indigence,<br />

elle ressemble davantage à <strong>la</strong> pauvreté au sens où nous l’avons précé<strong>de</strong>mment<br />

défi nie. Mais précisément ce qui est précaire, c’est ce qui ne s’obtient<br />

que par <strong>la</strong> prière (prex, en <strong>la</strong>tin). Dès lors, <strong>la</strong> précarité dans <strong>la</strong> société,<br />

ce sera celle d’une « position » obtenue par faveur ou par fortune. Cette précarité<br />

sociale se manifeste dans l’instabilité et dans l’incertitu<strong>de</strong>, <strong>la</strong> crainte<br />

du len<strong>de</strong>main. Aux positions que l’on occupe (et on notera l’importance du<br />

vocabu<strong>la</strong>ire militaire), il faut opposer les « statuts » garantis, soli<strong>de</strong>s.<br />

Propriété :<br />

Est-elle <strong>la</strong> raison d’être <strong>de</strong> <strong>la</strong> société ? Comme le pensent Locke et Rousseau ?<br />

En tous cas, <strong>la</strong> question sociale est le plus souvent formulée en <strong>de</strong>s termes<br />

qui interrogent toujours ce que l’on appelle <strong>la</strong> « propriété », ce qui appartient<br />

« en propre » et non « en commun », ni <strong>de</strong> façon contingente et fugitive comme<br />

<strong>la</strong> possession.<br />

19


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Trifonctionnelle (idéologie)<br />

C’est une représentation sur <strong>la</strong>quelle reposent les sociétés anciennes et qui<br />

justifi ent <strong>la</strong> division sociale par trois fonctions essentielles qui se doivent<br />

d’être occupées et structurées :<br />

Dans toute société, on doit trouver une caste <strong>de</strong> guerriers qui protègent le<br />

groupe, les bel<strong>la</strong>tores que P<strong>la</strong>ton nomme du titre générique <strong>de</strong> gardien, un<br />

ensemble <strong>de</strong> prêtres qui entretiennent <strong>la</strong> dimension spirituelle (sciences et<br />

religion) et éducative, les oratores, clergé ou rois-philosophes et enfi n tous les<br />

autres qui travaillent, les <strong>la</strong>boratores. Ainsi Noblesse, Clergé et Tiers-Etat se<br />

trouvent-ils défi nis en fonction d’une utilité sociale.<br />

Utopie :<br />

Il s’agit d’un modèle <strong>de</strong>stiné à rendre intelligible <strong>la</strong> réalité sociale. Plus ou<br />

moins fantaisiste, elle assume toujours <strong>la</strong> fonction théorique que dissimule<br />

pourtant son aspect ludique. En imaginant <strong>la</strong> société possible, elle permet<br />

d’évaluer <strong>la</strong> société réelle, ne serait-ce que par <strong>la</strong> mesure d’un écart.<br />

C’est en 1515 que Thomas More forge le néologisme pour intitulé un texte<br />

qui <strong>de</strong>viendra emblématique : L’Utopie ou le traité <strong>de</strong> <strong>la</strong> meilleure forme <strong>de</strong><br />

gouvernement.<br />

20


Troisième Partie : Sociologie<br />

Altruisme :<br />

Le mot appartient à Auguste Comte, comme d’ailleurs celui <strong>de</strong> « sociologie ».<br />

Il est employé pour <strong>la</strong> première fois en 1854, dans le Catéchisme positiviste<br />

pour désigner une attitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> vénération quasi instinctive envers autrui. Il<br />

s’agit alors d’imaginer un antonyme effi cace au mot « individualisme » et une<br />

alternative à ce qu’il signifi e.<br />

Caste :<br />

Groupe social hiérarchisé, endogame et héréditaire.<br />

Civilité :<br />

La civilité désigne l’ensemble <strong>de</strong>s liens unissant le citoyen à <strong>la</strong> Cité. Elle est à<br />

distinguer <strong>de</strong> <strong>la</strong> « sociabilité » qui est faite <strong>de</strong>s liens interindividuels.<br />

Consommation :<br />

Quel point commun entre une « consommation » commandée à <strong>la</strong> terrasse d’un<br />

café, un « mariage consommé » et « Cinquante millions <strong>de</strong> consommateurs » ?<br />

Cum Summa : faire <strong>la</strong> somme <strong>de</strong> <strong>la</strong> totalité <strong>de</strong> ce que l’on a pu obtenir.<br />

« Consommer », c’est donc en fi nir. La « consommation » est un aboutissement,<br />

un achèvement et partant un terme.<br />

Mais le sens bouge au dix-neuvième siècle et se “spécialise” en quelque sorte<br />

dans le registre <strong>de</strong> l’économie. Ainsi Jean-Baptiste Say affirme-t-il en 1841 :<br />

La consommation n’est pas une <strong>de</strong>struction <strong>de</strong> matière mais une <strong>de</strong>struction<br />

d’utilité.<br />

Le propos introduit <strong>de</strong>ux nuances d’importance. D’une part, <strong>la</strong> consommation<br />

n’est plus perçue comme une addition et d’une certaine façon une plénitu<strong>de</strong>.<br />

Quelque chose s’achève (et l’on retrouve ici le double sens du verbe achever,<br />

parfaire et terminer) parce que quelque chose disparaît. Say emploie le mot<br />

<strong>de</strong>struction. C’est un usage qui se trouve consommé, un service. Ainsi <strong>la</strong> société<br />

<strong>de</strong> consommation n’est-elle pas simple lieu d’échange <strong>de</strong>s besoins premiers,<br />

21


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

elle suppose que se négocient <strong>de</strong>s usages, elle se révèle par conséquent complexe<br />

et “développée”. La société <strong>de</strong> consommation, d’une certaine façon, porte<br />

à un niveau d’accomplissement une société <strong>de</strong> l’échange <strong>de</strong>s besoins <strong>de</strong>venus<br />

complexes.<br />

Délinquance :<br />

Il s’agit <strong>de</strong> l’ensemble <strong>de</strong>s infractions commises, et par infraction il faut<br />

entendre au sens <strong>la</strong>rge « vio<strong>la</strong>tion d’un interdit légal ». Un acte <strong>de</strong> délinquance<br />

postule donc un texte légal ou réglementaire qui prévoit et réprime un comportement.<br />

La délinquance est donc à l’image exacte <strong>de</strong> <strong>la</strong> société où elle se<br />

manifeste. Etudier ainsi, non pas tant <strong>la</strong> manière dont on punit mais ce que<br />

l’on punit, est extrêmement révé<strong>la</strong>teur.<br />

Démocratie :<br />

La gran<strong>de</strong> intuition <strong>de</strong> Tocqueville fut <strong>de</strong> comprendre qu’un certain type <strong>de</strong><br />

régime politique sécrète un certain type <strong>de</strong> société. Il est évi<strong>de</strong>nt que si, à présent,<br />

on évoque <strong>la</strong> démocratie, ce sera davantage pour parler du mo<strong>de</strong> <strong>de</strong> vie<br />

spécifi que que produisent <strong>de</strong>s institutions démocratiques et qui conduit à une<br />

société libérale, égalitaire et individualiste.<br />

Distinction :<br />

Action <strong>de</strong> distinguer, c’est-à-dire i<strong>de</strong>ntifi er, remarquer et partant estimer. Mais<br />

il s’agit aussi du titre que le sociologue Pierre Bourdieu donne à l’ouvrage qu’il<br />

consacre en 1979 à l’étu<strong>de</strong> sociologique du goût. Le goût est un critère <strong>de</strong> distinction<br />

social subtil et effi cace, puisqu’il prétend exprimer l’intime quand il<br />

s’agit en fi n <strong>de</strong> compte d’appartenance collective.<br />

Division (sociale) :<br />

Considérons d’abord <strong>de</strong> quelle manière vont vivre les gens ainsi organisés. Ne<br />

vont-ils pas produire du blé, du vin, faire <strong>de</strong>s habits, <strong>de</strong>s chaussures se bâtir <strong>de</strong>s<br />

maisons ? Pendant l’été ne travailleront-ils pas ordinairement à <strong>de</strong>mi vêtus et<br />

sans chaussures, et pendant l’hiver vêtus et chaussés comme il convient ? Pour<br />

se nourrir ils fabriqueront sans doute soit avec <strong>de</strong> l’orge soit avec du froment <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> farine qu’ils feront griller ou qu’ils pétriront (…) ils se régaleront eux et leurs<br />

22


enfants, buvant du vin, <strong>la</strong> tête couronnée <strong>de</strong> fl eurs et chantant les louanges <strong>de</strong>s<br />

dieux ; ils vivront ensemble joyeusement rég<strong>la</strong>nt sur leurs ressources le nombre<br />

<strong>de</strong> leurs enfants, dans <strong>la</strong> crainte <strong>de</strong> <strong>la</strong> pauvreté et <strong>de</strong> <strong>la</strong> guerre.<br />

République,livre II. P<strong>la</strong>ton.<br />

Socrate imagine pour ses interlocuteurs <strong>la</strong> naissance et le développement<br />

d’une Cité : P<strong>la</strong>ton propose ainsi le premier « modèle » politique, au sens quasi<br />

scientifi que du terme.<br />

La diversité <strong>de</strong>s besoins humains conduit les hommes à se répartir les tâches :<br />

tout commence bien par <strong>la</strong> « division du travail ». Le lien social est donc imposé<br />

par cette nécessité. En soi, <strong>la</strong> division n’est pas mauvaise si elle résulte d’une<br />

spécialisation qui aboutit à une véritable harmonie. Mais à mesure qu’elle<br />

se développe, <strong>la</strong> société verra naître <strong>de</strong>s divisions préjudiciables, celles qui<br />

opposent et conduisent à l’exclusion et à l’injustice. Ces divisions se nourrissent<br />

<strong>de</strong> l’inégalité <strong>de</strong>s conditions, du désir <strong>de</strong> domination et d’une tendance peut-être<br />

naturelle à rejeter l’autre, celui dont pourtant <strong>la</strong> présence est une nécessité.<br />

Elites :<br />

Ceux qui dans un groupe sont reconnus comme les meilleurs.<br />

Il s’agit dès lors d’une minorité qui occupe une p<strong>la</strong>ce privilégiée dans un<br />

groupe. Ceux qui <strong>la</strong> composent détiennent l’autorité, jouissent du prestige<br />

et exercent le pouvoir. Plus les élites se constituent par héritage, plus cette<br />

société est fermée. Or le <strong>de</strong>stin <strong>de</strong>s élites est <strong>de</strong> se renouveler, écrit V. Pareto<br />

qui théorise <strong>la</strong> nécessité pour une société <strong>de</strong> développer ses élites. De fait, c’est<br />

moins l’existence <strong>de</strong>s élites que leur reproduction qui est mal ressentie.<br />

Exclusion :<br />

Le mot a été <strong>la</strong>rgement employé <strong>de</strong>puis René Lenoir (<strong>Les</strong> exclus, un Français<br />

sur dix, 1974) pour désigner le mécanisme par lequel certains se trouvent rejetés<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> société. L’exclusion n’est pas un phénomène neuf : expulsion, déportation,<br />

exil, etc. ont marqué l’histoire <strong>de</strong>s sociétés <strong>de</strong>puis l’Antiquité. Mais ce<br />

furent <strong>de</strong>s « décisions », impliquant volonté et responsabilité. Il y a au contraire<br />

dans l’exclusion, telle que nous l’entendons aujourd’hui, une dimension « mécanique<br />

» : elle ne serait voulue par personne, personne n’en serait alors responsable.<br />

Involontaire, l’exclusion révèle l’irresponsabilité <strong>de</strong> notre société.<br />

23


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Famille :<br />

Du <strong>la</strong>tin famulus, le serviteur.<br />

À Rome, familia, avant même <strong>la</strong> parentèle, désigne l’ensemble <strong>de</strong>s individus<br />

qui dépen<strong>de</strong>nt d’un même pater familias, chef <strong>de</strong> famille. Ce<strong>la</strong> recouvre<br />

femmes, enfants, serviteurs et clients.<br />

Le discours philosophique trouve dans <strong>la</strong> famille une intéressante forme <strong>de</strong><br />

communauté humaine qui parvient à faire cohabiter <strong>de</strong>s individus <strong>de</strong> manière<br />

en apparence non confl ictuelle. À ce titre, <strong>la</strong> famille incarne à <strong>la</strong> fois <strong>la</strong> promesse<br />

<strong>de</strong> re<strong>la</strong>tions pacifi ques entre les hommes et un modèle effi cacement<br />

comparable aux autres formes d’association.<br />

Folie :<br />

C’est <strong>la</strong> société qui fait exister <strong>la</strong> folie, en défi nit les délinéaments et à travers<br />

elle se constitue et s’affi rme. C’est ce que montre le philosophe Michel Foucault,<br />

lorsqu’il étudie l’invention <strong>de</strong> l’Hôpital Général en 1656 :<br />

La folie ne peut se trouver à l’état sauvage. La folie n’existe que dans une société,<br />

elle n’existe pas en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong>s formes <strong>de</strong> <strong>la</strong> sensibilité qui l’isolent et <strong>de</strong>s formes<br />

<strong>de</strong> répulsion qui l’excluent ou <strong>la</strong> capturent.<br />

Histoire <strong>de</strong> <strong>la</strong> Folie à l’âge c<strong>la</strong>ssique. (1961)<br />

Gang :<br />

Etudié très tôt par l’Ecole <strong>de</strong> Chicago, le phénomène <strong>de</strong>s gangs reste diffi cile à<br />

cerner. C’est le sociologue américain Fre<strong>de</strong>ric Thrasher qui en 1927 les étudie<br />

à Chicago où il en dénombre plus <strong>de</strong> 1 300 regroupant plus <strong>de</strong> 25 000 adolescents<br />

et jeunes hommes. Il les défi nit ainsi :<br />

Un gang <strong>de</strong> rue est n’importe quelle organisation qui possè<strong>de</strong> une i<strong>de</strong>ntité « <strong>de</strong><br />

<strong>la</strong> rue » incluant une participation dans <strong>de</strong>s activités illégales.<br />

La guerre <strong>de</strong>s gangs qui sévit à partir <strong>de</strong> 1924 pousse les pouvoirs publics<br />

à encourager ces étu<strong>de</strong>s sociologiques pour comprendre un phénomène totalement<br />

nouveau. Le rapport Lan<strong>de</strong>sco jette alors les bases d’une approche<br />

sociologique <strong>de</strong> <strong>la</strong> criminalité :<br />

24


De <strong>la</strong> même manière que le bon citoyen, le gangster est un produit <strong>de</strong> son environnement.<br />

Le bon citoyen a été élevé dans une atmosphère <strong>de</strong> respect et d’obéissance<br />

à <strong>la</strong> loi. Le gangster a fréquenté un quartier où <strong>la</strong> loi est au contraire<br />

enfreinte constamment.<br />

Organized crime in Chicago<br />

Hédoniste (société) :<br />

<strong>Société</strong> fondée sur <strong>la</strong> recherche du p<strong>la</strong>isir. Cette société est matérialiste et<br />

valorise le corps.<br />

Holiste (société) :<br />

<strong>Société</strong> organisée <strong>de</strong> telle sorte que le Tout prévaut toujours sur les parties<br />

qui le composent. Ainsi y repère-t-on davantage <strong>de</strong> <strong>de</strong>voirs que <strong>de</strong> droits. Elle<br />

s’oppose à <strong>la</strong> société individualiste dans <strong>la</strong>quelle au contraire chacune <strong>de</strong>s<br />

parties a plus <strong>de</strong> prix que <strong>la</strong> société dans son ensemble.<br />

Incivilité :<br />

Manque <strong>de</strong> civilité, c’est-à-dire <strong>de</strong> politesse. La théorie dite <strong>de</strong> « <strong>la</strong> vitre brisée<br />

» postule que <strong>la</strong> plus petite incivilité peut entraîner, si elle n’est pas réprimée,<br />

une augmentation <strong>de</strong> <strong>la</strong> délinquance : quand une vitre est brisée, il faut<br />

immédiatement <strong>la</strong> remp<strong>la</strong>cer. C’est prendre sinon le risque d’une dégradation<br />

rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong> tout l’immeuble. Tolérance zéro.<br />

Industrielle (société) :<br />

Le confort, l’effi cacité, <strong>la</strong> raison, le manque <strong>de</strong> liberté dans un cadre démocratique,<br />

voilà ce qui caractérise <strong>la</strong> civilisation industrielle avancée et témoigne<br />

pour le progrès technique.<br />

L’Homme unidimensionnel Herbert Marcuse<br />

25


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Intérêt :<br />

L’intérêt est, en effet, ce qu’il y a <strong>de</strong> moins constant au mon<strong>de</strong>. Aujourd’hui il<br />

m’est utile <strong>de</strong> m’unir à vous ; <strong>de</strong>main <strong>la</strong> même raison fera <strong>de</strong> moi votre ennemi.<br />

Une telle cause ne peut donc donner naissance qu’à <strong>de</strong>s rapprochements passagers<br />

et à <strong>de</strong>s associations d’un jour.<br />

De <strong>la</strong> division du travail social Durkheim.<br />

Pour le sociologue français, on ne « fait pas société » seulement par intérêt.<br />

Loisirs (société <strong>de</strong>s) :<br />

En 1962, le sociologue français Joffre Dumazedier publie Vers une civilisation<br />

du loisir ? Un ouvrage qui annonce une société nouvelle toute entière consacrée<br />

aux loisirs, centrée sur les loisirs :<br />

Le loisir, bien que conditionné par <strong>la</strong> consommation <strong>de</strong> masse et <strong>la</strong> structure <strong>de</strong><br />

c<strong>la</strong>sse est <strong>de</strong> plus en plus le centre d’é<strong>la</strong>boration <strong>de</strong> valeurs nouvelles, surtout<br />

chez les jeunes.<br />

Mafi a :<br />

L’origine du mot est mystérieuse : mafi a dériverait <strong>de</strong> l’arabe muâfat, protection.<br />

Il semble s’être imposé dans les documents offi ciels dans les années 1860.<br />

Et son étymologie révèle <strong>la</strong> structure féodale <strong>de</strong> ce type <strong>de</strong> société parallèle.<br />

Marge :<br />

Du <strong>la</strong>tin margo, le bord. La marge, c’est donc « ce qui est en <strong>de</strong>hors <strong>de</strong> » mais<br />

c’est aussi ce qui simultanément « se rapporte à ». En marge <strong>de</strong> ce récit… ce<strong>la</strong><br />

annonce une digression qui en tant que telle se situe par rapport au récit en<br />

question. La marginalité est donc solidaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> normalité sociale, l’une et<br />

l’autre se défi nissent mutuellement.<br />

Mais ce qui est en marge, ce n’est pas seulement ce qui est décentré, c’est aussi<br />

ce qui n’est pas central…<br />

Mépris :<br />

Dans le prolongement <strong>de</strong> <strong>la</strong> théorie hégélienne <strong>de</strong> <strong>la</strong> reconnaissance, le philosophe<br />

contemporain Axel Honneth parle <strong>de</strong> société du Mépris pour évoquer <strong>la</strong> nature <strong>de</strong>s<br />

re<strong>la</strong>tions sociales fondées sur une requête insistante <strong>de</strong> reconnaissance.<br />

26


Mondaine (société) :<br />

<strong>Société</strong> qui rassemble <strong>de</strong>s familles qui appartiennent aux c<strong>la</strong>sses les plus favorisées<br />

et aux yeux <strong>de</strong> qui le respect d’un certain nombre d’usages est un élément<br />

fondamental <strong>de</strong> reconnaissance. En 1903, <strong>la</strong> société Didot-Bottin publie le premier<br />

Bottin Mondain, imitant le très sélectif High Life britannique. Il s’agit d’un<br />

annuaire mondain qui répertoriait, à l’origine, 12 000 noms et adresses à Paris ou<br />

dans certaines communes proches (Neuilly, Saint-Germain-en-Laye, Versailles).<br />

Ordre :<br />

Organisation <strong>de</strong> personnes qui se caractérise par <strong>de</strong>s règles <strong>de</strong> vie (ordre<br />

monacal), une déontologie (<strong>la</strong> transmission d’un savoir théorique et le contrôle<br />

<strong>de</strong> sa pratique) ou un statut politique (les ordres <strong>de</strong> l’ancien Régime).<br />

Post-industrielle (société) :<br />

<strong>Société</strong> dans <strong>la</strong>quelle, selon le sociologue américain Daniel Bell récemment<br />

disparu, ce n’est plus <strong>la</strong> production <strong>de</strong>s biens qui apporte <strong>la</strong> richesse mais leur<br />

conception. La société post-industrielle est une société dans <strong>la</strong>quelle le capital<br />

intellectuel et culturel est fondamental. Elle encourage notamment le développement<br />

<strong>de</strong> <strong>la</strong> recherche et <strong>de</strong> toutes les formes <strong>de</strong> créativité.<br />

Religion :<br />

Toute société a besoin <strong>de</strong> croyances communes. C’est ce que montre dans <strong>Les</strong><br />

formes élémentaires <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie religieuse en 1912 le sociologue Emile Durkheim.<br />

Risque :<br />

Dans <strong>la</strong> mo<strong>de</strong>rnité avancée, <strong>la</strong> production sociale <strong>de</strong> richesses est systématiquement<br />

corrélée à <strong>la</strong> production sociale <strong>de</strong> risques. Voilà pourquoi le sociologue<br />

allemand Ulrich Beck parle <strong>de</strong> <strong>la</strong> société du risque dans un ouvrage <strong>de</strong> 1986.<br />

Le risque correspond à <strong>la</strong> probabilité qu’un évènement malheureux arrive à<br />

une popu<strong>la</strong>tion.<br />

Désormais, le risque caractérise le groupe : par exemple, si le risque d’être ma<strong>la</strong><strong>de</strong><br />

était naguère une affaire d’ordre individuel, il est <strong>de</strong>venu à présent une affaire <strong>de</strong><br />

société, quand ce n’est pas franchement même une « affaire d’Etat », puisque 30 %<br />

du revenu national est aujourd’hui consacré à <strong>la</strong> gestion collective <strong>de</strong>s risques.<br />

27


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

On pourrait donc lire l’histoire du développement <strong>de</strong> l’organisation sociale<br />

comme <strong>la</strong> somme <strong>de</strong>s efforts entrepris pour assurer les citoyens contre les<br />

risques successifs auxquels ils se sont progressivement découverts exposés :<br />

contre l’insécurité immédiate et physique, l’Etat mo<strong>de</strong>rne développe police et<br />

armée, contre l’insécurité sociale c’est tout un dispositif juridico-administratif<br />

qui s’est constitué dès <strong>la</strong> fi n du dix-neuvième siècle pour conduire à l’organisation<br />

<strong>de</strong> l’assurance et <strong>de</strong> <strong>la</strong> solidarité par l’Etat-Provi<strong>de</strong>nce. Dans une certaine<br />

mesure, « <strong>la</strong> société du risque », c’est d’abord le retour <strong>de</strong> <strong>la</strong> précarité généralisée<br />

et <strong>la</strong> faillite <strong>de</strong> l’Etat dans ses fonctions <strong>de</strong> tutelle héritées du contrat<br />

vassalique.<br />

Sociologie :<br />

Par sociologie, il faut entendre l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s sociétés. Dans ces conditions, <strong>la</strong><br />

sociologie existe <strong>de</strong>puis longtemps : d’Hérodote à Montesquieu en passant<br />

par tous les moralistes du Grand Siècle, nombreux sont ceux, historiens, satiristes,<br />

essayistes ou romanciers, qui ont cherché à décrire le fonctionnement<br />

<strong>de</strong>s sociétés, à en pointer les travers. Mais c’est Saint Simon qui au début du<br />

XIX e siècle crut en une approche scientifi que <strong>de</strong>s phénomènes sociaux et il<br />

donna à cette discipline nouvelle le nom <strong>de</strong> Physiologie sociale (physiologie<br />

au sens que Balzac donne aussi à ce mot quand il parle d’une Physiologie du<br />

mariage). Mais c’est son secrétaire, Auguste Comte, qui crée le mot sociologie,<br />

<strong>la</strong> science qui étudie les sociétés, comme <strong>la</strong> biologie étudie les organismes<br />

vivants, en 1854 dans son Système <strong>de</strong> politique positive.<br />

Solidarité :<br />

Du <strong>la</strong>tin solidus, consistant, soli<strong>de</strong>. La solidarité, c’est ce qui rend un groupe<br />

soli<strong>de</strong>. <strong>Les</strong> parties d’un tout sont solidaires lorsqu’elles sont interdépendantes.<br />

Durkheim distingue alors les solidarités mécaniques (elles s’effectuent d’ellesmêmes)<br />

<strong>de</strong>s solidarités organiques (il faut les susciter et les organiser). Dans<br />

une société individualiste, les individus ne sont pas naturellement enclins à <strong>la</strong><br />

solidarité, l’Etat se doit <strong>de</strong> les y contraindre.<br />

28


Spectacle (société du) :<br />

Et sans doute notre temps… préfère l’image à <strong>la</strong> chose, <strong>la</strong> copie à l’original, <strong>la</strong><br />

représentation à <strong>la</strong> réalité, l’apparence à l’être… Ce qui est sacré pour lui, ce<br />

n’est que l’illusion, mais ce qui est profane, c’est <strong>la</strong> vérité. Mieux, le sacré grandit<br />

à ses yeux à mesure que décroît <strong>la</strong> vérité et que l’illusion croît, si bien que le<br />

comble <strong>de</strong> l’illusion est aussi pour lui le comble du sacré.<br />

Feuerbach (Préface à <strong>la</strong> <strong>de</strong>uxième édition, L’Essence du christianisme)<br />

C’est par cette citation que débute le texte <strong>de</strong> Guy Debord, La société du spectacle,<br />

publié en 1967 qui développe <strong>la</strong> critique mo<strong>de</strong>rne <strong>de</strong> <strong>la</strong> représentation.<br />

Nous vivons ainsi le temps <strong>de</strong> l’Illusion et du Mensonge parce que notre<br />

société sacralise l’image.<br />

Tout est désormais spectacle ou plutôt : le réel a besoin aujourd’hui plus que<br />

jamais d’être mis-en-scène pour être simplement « reconnu ». Tout commence<br />

par les marchandises qui pour être consommées doivent être désirées. Or, le<br />

procédé a contaminé toutes les dimensions <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie en société ou <strong>de</strong> <strong>la</strong> vie<br />

privée, au point qu’il n’y a plus <strong>de</strong> lien social qui ne doive être tissé par le spectacu<strong>la</strong>ire.<br />

Debord définit d’ailleurs le spectacle comme un rapport social entre<br />

<strong>de</strong>s personnes, médiatisé par <strong>de</strong>s images (La société du spectacle, §4).<br />

Suici<strong>de</strong> :<br />

Le suici<strong>de</strong> varie en fonction inverse du <strong>de</strong>gré d’intégration <strong>de</strong>s groupes sociaux<br />

dont fait partie l’individu. Le Suici<strong>de</strong> Emile Durkheim, 1897.<br />

S’agit-il vraiment d’un choix individuel ? Trois types <strong>de</strong> suici<strong>de</strong>s sont i<strong>de</strong>ntifi<br />

és par le sociologue français : le suici<strong>de</strong> « altruiste », le suici<strong>de</strong> « égoïste » et<br />

enfi n le suici<strong>de</strong> « anomique ». Le premier ne supporte plus <strong>de</strong> faillir aux règles<br />

du groupe, le second est provoqué par un défaut d’intégration et le troisième<br />

enfi n apparaît dans <strong>de</strong>s sociétés qui conduisent les individus à trop espérer et<br />

à ne plus être capables <strong>de</strong> contenir leurs désirs.<br />

29


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Notes<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

30


Notes<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

31


LES LEXIQUES DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

Notes<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

..................................................................................................................................................................................................................................<br />

32


BCE - CONCOURS 2012<br />

<strong>Les</strong> épreuves écrites<br />

Coef.<br />

L’<strong>INSEEC</strong> utilise les épreuves <strong>de</strong> <strong>la</strong> BCE selon <strong>la</strong> grille ci-<strong>de</strong>ssous.<br />

Choix <strong>de</strong>s<br />

épreuves écrites<br />

Option<br />

Scientifique<br />

Option Économique<br />

À l’issue <strong>de</strong>s épreuves écrites, le jury d’admissibilité <strong>de</strong> l’<strong>INSEEC</strong> se réunit et arrête <strong>la</strong> liste <strong>de</strong>s candidats admissibles.<br />

Ceux-ci sont convoqués soit à Paris soit à Bor<strong>de</strong>aux en fonction <strong>de</strong> l’académie d’appartenance <strong>de</strong> leur c<strong>la</strong>sse préparatoire<br />

et d’une décision arrêtée par le jury d’admissibilité, dans le but d’équilibrer au mieux les calendriers <strong>de</strong> passage. Des<br />

dérogations sont possibles sur <strong>de</strong>man<strong>de</strong> expresse du candidat. <strong>Les</strong> résultats d’admissibilité sont transmis aux candidats<br />

dès <strong>la</strong> mi-juin.<br />

<strong>Les</strong> épreuves orales<br />

<strong>Les</strong> épreuves orales se déroulent sur une journée, soit à Paris soit à Bor<strong>de</strong>aux. <strong>Les</strong> jurys sont composés <strong>de</strong> manière<br />

équilibrée <strong>de</strong> professeurs <strong>de</strong> c<strong>la</strong>sses préparatoires, <strong>de</strong> cadres d’entreprises, d’enseignants ou d’Anciens Élèves <strong>de</strong> l’<strong>INSEEC</strong>.<br />

<strong>Les</strong> épreuves orales <strong>de</strong> l’<strong>INSEEC</strong> ont un double objectif :<br />

• discerner l’aptitu<strong>de</strong> du candidat à réussir et bénéfi cier pleinement <strong>de</strong>s projets et programmes qui lui seront proposés :<br />

ouverture internationale, goût pour <strong>la</strong> communication et l’argumentaire, esprit d’entreprendre, sens <strong>de</strong> l’équipe…<br />

• susciter une première rencontre entre le candidat et l’École.<br />

Entretien<br />

individuel<br />

Entretien<br />

collectif<br />

Langues<br />

Vivantes 1<br />

Langues<br />

Vivantes 2<br />

Coefficients <strong>INSEEC</strong> - Paris - Bor<strong>de</strong>aux 12 6 7 5 30<br />

L’admission et l’inscription<br />

L’inscription se fait par <strong>la</strong> procédure centralisée SIGEM 2012.<br />

Quel que soit votre rang <strong>de</strong> c<strong>la</strong>ssement (liste principale + liste complémentaire),<br />

c’est vous qui déci<strong>de</strong>rez d’intégrer soit PARIS, soit BORDEAUX.<br />

Coef.<br />

Option<br />

Technologique Coef.<br />

Contraction <strong>de</strong> texte Épreuve HEC 2 Épreuve HEC 2 Épreuve HEC 2<br />

Première <strong>la</strong>ngue IENA 6 IENA 6 IENA 4<br />

Deuxième <strong>la</strong>ngue IENA 5 IENA 5 IENA 3<br />

Dissertation <strong>de</strong> culture générale Épreuve ESCP Europe 5 Épreuve ESCP Europe 5 Épreuve ESC 4<br />

Dissertation littéraire - - -<br />

Dissertation philosophique - - -<br />

Mathématiques Épreuve<br />

EM-Lyon<br />

6 Épreuve<br />

EM-Lyon<br />

5 Épreuve ESC 4<br />

Histoire, Géographie<br />

et Géopolitique<br />

Épreuve EM-Lyon 6 - -<br />

Analyse économique<br />

et historique<br />

- Épreuve EM-Lyon 7 -<br />

Économie-Droit - - Épreuve ESC 5<br />

Histoire - - -<br />

Gestion-Management - - Épreuve ESC 8<br />

Épreuve à option<br />

Total coefficients 30 30 30<br />

TOTAL


LES LEXIQUES<br />

DE L’<strong>INSEEC</strong><br />

COLLECTION DIRIGÉE PAR<br />

ERIC COBAST<br />

<strong>Les</strong> « Lexiques <strong>de</strong> l’<strong>INSEEC</strong> » viennent compléter le dispositif<br />

conçu au service <strong>de</strong>s étudiants initié par « <strong>Les</strong> Mémentos<br />

». Ils ont été rédigés par une équipe <strong>de</strong> professeurs <strong>de</strong>s<br />

C<strong>la</strong>sses Préparatoires et <strong>de</strong>s Gran<strong>de</strong>s Écoles, particulièrement<br />

sensibles aux diffi cultés rencontrées par les candidats.<br />

L’ambition <strong>de</strong> ces « Lexiques » n’est pas évi<strong>de</strong>mment <strong>de</strong> se<br />

substituer d’une manière ou d’une autre aux cours annuels<br />

mais <strong>de</strong> proposer tout simplement <strong>de</strong>s instruments effi -<br />

caces pour réussir les concours.<br />

Collection <strong>Les</strong> Lexiques <strong>de</strong> l’<strong>INSEEC</strong> 2012<br />

N° 14 : <strong>Les</strong> <strong>mots</strong> <strong>de</strong>… <strong>la</strong> <strong>Société</strong><br />

N° 15 : Lexique <strong>de</strong> Géopolitique<br />

N° 16 : Lexique d’Ang<strong>la</strong>is<br />

N° 17 : Formu<strong>la</strong>ire <strong>de</strong> Mathématique (voie S)<br />

<strong>INSEEC</strong><br />

Secrétariat <strong>de</strong> <strong>la</strong> Collection <strong>Les</strong> Lexiques<br />

H16 – quai <strong>de</strong> Baca<strong>la</strong>n – CS 9104<br />

33 300 Bor<strong>de</strong>aux<br />

Tél. : 05 56 01 77 26

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!