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8 - TIGRE-S-PRESSE - Le journal du Lycée Clemenceau - NUMÉRO 6 - JUIN 20<strong>06</strong><br />

Un Traducteur à la fenêtre: interview de M. Magnani.<br />

Sortie ce mois-ci aux éditions des Presses de la Renaissance de « Totto-chan, la petite<br />

fille à la fenêtre » écrit par Tetsuko Kuroyanagi dont le traducteur, M. Magnani, est enseignant<br />

dans notre lycée. Le Tigre profite donc de l’occasion pour donner un coup de<br />

projecteur sur ce récit et sur le travail spécifique de traducteur.<br />

Ce mois-ci sort « Totto-chan, la petite fille à la fenêtre ». Que diriez-vous pour<br />

nous présenter cet ouvrage ?<br />

O. Magnani : Publié en 1981, ce récit autobiographique est aujourd’hui encore le livre le<br />

plus vendu de toute l’histoire de l’édition au Japon. Il a été traduit en plus de 33 langues<br />

et sert même de support de cours dans certains pays d’Asie du Sud-Est. L’histoire se<br />

déroule à Tôkyô, pendant la Seconde Guerre Mondiale. Tetsuko, alias « Tottochan<br />

» (prononcer Tot’to-tchann), une petite fille pleine de vie mais incapable de se<br />

concentrer en classe, est renvoyée du CP peu de temps après y être entrée ! Ses parents<br />

la placent alors à Tomoé, une petite école sans réel statut officiel mais dont le directeur,<br />

formé aux techniques éducatives européennes, fait en sorte de laisser les élèves<br />

s’épanouir à leur rythme. Dans cette école où de vieux wagons désaffectés font office<br />

de salles de classe, Totto-chan va apprendre à vivre avec les autres, et surtout,<br />

« apprendre à apprendre ».<br />

L’auteur en est-il célèbre ?<br />

O. Magnani : Tetsuko Kuroyanagi, qui est née en 1933, est une personnalité incontournable du petit écran. Elle s’est<br />

d’abord illustrée comme actrice à la NHK, aux débuts de la télévision au Japon. Son énergie incroyable et sa rapidité<br />

d’élocution (qui lui a valu le surnom de « Moulin à paroles ») l’ont très vite rendue célèbre. Depuis 30 ans, elle anime un<br />

talk-show quotidien, « Le Salon de Testuko ». En 1984, elle devient ambassadrice itinérante de l’UNICEF pour se<br />

consacrer aux enfants du monde (les droits d’auteur de « Totto-chan » lui ont d’ailleurs permis de créer sa propre fondation).<br />

Elle s’investit beaucoup également pour les personnes handicapées et la défense de l’environnement. Pour un<br />

Japonais, Tetsuko Kuroyanagi, c’est avant tout : 1/ « Totto-chan », 2/<br />

ses kimono à manches longues (furisode) qu’elle porte aujourd’hui encore,<br />

n’étant pas mariée (cette tenue est réservée d’ordinaire aux jeunes<br />

filles célibataires), et... 3/ son amour des pandas (qui vivent en Chine et<br />

non au Japon, soit dit en passant) !<br />

Tetsuko Kuroyanagi.<br />

Ce livre a-t-il encore une grande portée aujourd’hui ?<br />

O. Magnani : Un peu moins peut-être que dans les années 80, mais<br />

tous les Japonais, sans exception, ont déjà lu « Totto-chan » ou, du<br />

moins, en ont entendu parler. Au-delà de l’histoire elle-même, drôle et<br />

émouvante à la fois, « Totto-chan » donne à réfléchir sur la manière de<br />

concevoir l’éducation. Dans la postface de l’édition originale, l’auteur<br />

souligne aussi qu’au moment même où elle termine son récit, on vient<br />

d’annoncer que des policiers assisteraient désormais aux cérémonies de<br />

remise des diplômes dans les écoles primaires du pays, suite à l’agression d’un enseignant par un jeune élève. De fait,<br />

de plus en plus de problèmes graves se posent dans les écoles japonaises, alors que l’on a longtemps considéré le système<br />

éducatif du Japon comme un modèle. « Totto-chan » a permis également de jeter un autre regard sur les handicapés,<br />

souvent rejetés par la société nipponne – ce texte a d’ailleurs beaucoup influencé Hirotada Ototaké, l’auteur de<br />

« Personne n’est parfait » (disponible au CDI), deuxième plus grand best-seller au Japon après « Totto-chan ». Enfin,<br />

cette oeuvre donne un message d’espoir aux jeunes Japonais qui ne « rentrent pas dans le moule », puisque de cette<br />

petite école non officielle sont sortis de très grands noms du monde des arts ou des sciences.<br />

Comment avez-vous découvert ce récit ?<br />

O. Magnani : J’ai vécu au Japon de 1996 à 1998. Au cours de ce séjour, j’avais déjà entendu parler de « Totto-chan » à<br />

de nombreuses reprises quand une amie a fini par m’offrir le livre. Je l’ai dévoré en quelques heures, avant de me jurer<br />

de le faire connaître un jour au public français. C’est ce qui s’appelle avoir de la suite dans les idées...<br />

Quelles sont les différentes étapes de la traduction ?<br />

O. Magnani : D’abord, il faut lire et relire le texte pour assimiler tous les détails de l’histoire et s’imprégner du style de<br />

l’auteur. Ensuite, on peut commencer à traduire, mais il est important de prendre son temps, voire de « laisser reposer »<br />

son travail de temps à autre : il est alors plus facile de prendre du recul et de voir ce qui ne va pas. Il ne faut pas hésiter<br />

aussi à confronter sa traduction avec celles qui existent déjà dans d’autres langues. C’est ainsi que j’ai remarqué que la<br />

traductrice anglaise avait purement et simplement « omis » certains passages jugés sans doute trop difficiles... Lorsqu’on<br />

n’est pas sûr du sens d’une phrase, il faut même demander des explications à l’auteur. Tout au bout de la chaîne,<br />

la relecture est aussi un travail important. Mais dans mon cas, je demande souvent l’aide de personnes qui ne connaissent<br />

pas l’oeuvre, car plus je relis mes traductions, moins je vois mes erreurs.<br />

Combien de temps faut-il pour traduire un tel ouvrage ?<br />

O. Magnani : C’est difficile à dire. En tout et pour tout, j’ai mis six ans à traduire « Totto-chan », mais j’ai travaillé par à-coups,

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