Regards pénitentiaires... Un voyage dans notre mémoire ... - Enap
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fois par semaine à l’établissement. Elle était près de la retraite et<br />
il eut bien mieux valu voir arriver sa remplaçante plutôt que moi.<br />
L’accueil n’était pas hostile mais plutôt embarrassé.<br />
Je fus remise entre les mains d’un adjoint qui m’emmena, à travers<br />
un dédale de couloirs et d’escaliers, jusqu’à une porte sur laquelle<br />
était mentionné : « Docteur ». On venait en effet de m’expliquer que<br />
je partagerais le bureau du médecin.<br />
À l’intérieur, un seul bureau, un fauteuil en bois d’un côté, une<br />
chaise en bois de l’autre, une table de consultation archaïque, un placard<br />
fermé à clefs et un lavabo. Je n’osais pas poser mon cartable<br />
et à peine m’asseoir. Je n’étais même pas sûre que le médecin en<br />
question avait été tenu au courant de mon arrivée. Nous avons dû<br />
partager ce petit espace pendant des années.<br />
Lorsque je venais à l’établissement, j’étais totalement isolée <strong>dans</strong> ce<br />
coin de couloir, seule au dernier étage, puisque l’immense chapelle,<br />
toujours vide en semaine, occupait le reste de l’espace.<br />
C’est le préfet de l’époque qui, lors d’une visite à l’occasion de la<br />
commission de surveillance, a exigé que je déménage <strong>dans</strong> l’heure à<br />
l’étage en-dessous, afin d’être à portée de vue des surveillants.<br />
Le soir du premier jour, les surveillants m’avaient réservé une surprise.<br />
L’un d’eux m’expliqua qu’il devait, avant d’ouvrir la porte,<br />
vérifier que rien ne sortait de l’établissement et que je ne pouvais pas<br />
échapper à la règle. Il me présentait alors un miroir, posé sur des<br />
roulettes, doté d’un manche, en me demandant de passer au-dessus,<br />
jambes écartées, pour vérifier sous ma jupe. Sidérée mais habitée de<br />
ce qu’on m’avait dit de la sécurité, j’allais obtempérer, lorsque, <strong>dans</strong><br />
un grand éclat de rire, il m’arrêta juste à temps et m’expliqua que<br />
le miroir en question servait en fait à vérifier le dessous des véhicules<br />
amenés à sortir de l’enceinte. Cette histoire a fait le tour de la<br />
maison.<br />
Chantal<br />
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