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en partenariat avec<br />
ClAIRe dITeRzI<br />
Le Salon des refusées<br />
Naïve / Asterios<br />
Le premier morceau démarre rock un peu sa<strong>le</strong>, rappelant<br />
<strong>le</strong>s envolées é<strong>le</strong>ctriques de son précédent<br />
opus, <strong>le</strong> sublime Rosa la rouge. Mais très vite,<br />
l’incursion mesurée d’un violon laisse présager une<br />
suite d’une cou<strong>le</strong>ur différente. Pour son nouveau<br />
disque, Claire Diterzi a choisi l’épure. Pas d’emphase,<br />
pas d’effets, sa voix claire est délicatement<br />
mise en va<strong>le</strong>ur par une guitare acoustique,<br />
quelques percussions et une vio<strong>le</strong> de gambe.<br />
Le phrasé se fait intime, <strong>le</strong>s mélodies prennent un<br />
tour presque désuet, voire baroque. L’artiste a composé<br />
ces douze titres à la Villa Médicis, à Rome, où<br />
el<strong>le</strong> a obtenu une résidence, non sans déc<strong>le</strong>ncher<br />
<strong>le</strong>s foudres de ceux qui estiment que la vénérab<strong>le</strong><br />
maison ne devrait réserver ses murs qu’aux artistes<br />
classiques. D’abord peinée, la musicienne a<br />
vite fait fi de la polémique, tout en y puisant la matière<br />
de ses textes pour évoquer l’exil, l’amour qui<br />
finit mal, celui qui renaît. Riche, délicat, lyrique et<br />
romantique.<br />
AENA LÉO<br />
CATheRIne GRAIndoRGe<br />
The secret of us all<br />
dEPOT 214<br />
Lorsqu’une violoniste de formation classique rencontre<br />
<strong>le</strong>s musiques actuel<strong>le</strong>s, cela donne ce genre<br />
de disque. D‘abord, des interprétations musica<strong>le</strong>s<br />
pour imposer l’ambiance, puis soudain, la voix sombre<br />
et majestueuse d’Hugo Race apparaît. Le titre<br />
Extreme <strong>le</strong>ngths est d’une rare beauté. On a envie<br />
d’en entendre plus, mais <strong>le</strong> reste de cet album est<br />
essentiel<strong>le</strong>ment instrumental. Cela permet de<br />
découvrir une bel<strong>le</strong> utilisation de la péda<strong>le</strong> d’effets<br />
d’habitude réservée à la guitare. El<strong>le</strong> est ici appliquée<br />
au violon et à l’alto. L’apparition miracu<strong>le</strong>use<br />
de Marc Huyghens redonne à la voix toute sa place.<br />
Dans Le do, il la fait résonner avec enchantement<br />
comme pour rappe<strong>le</strong>r combien Venus manque à la<br />
scène belge. C’est Hugo Race qui clôture d’une<br />
manière assez fantomatique, façon Bad Seeds, ce<br />
disque surprenant. La musique est certes magnifique,<br />
mais davantage de morceaux chantés<br />
auraient sans doute donné plus de retentissements<br />
à ce side-project de la violoniste de Nox.<br />
PATRICK AUFFRET<br />
40 LONGUEUR D’ONDES N°66<br />
doCToR l<br />
We got lost<br />
Comet Records<br />
“Nous nous sommes égarés”, nous dit Liam Farrell,<br />
alias Doctor L. À en croire <strong>le</strong> visuel de la pochette,<br />
on comprend <strong>le</strong> lien tissé par <strong>le</strong> producteur entre<br />
la crise économique actuel<strong>le</strong> et cel<strong>le</strong> de ces<br />
fermiers américains des années 30. Le blues y a<br />
survécu, lui, alors quel<strong>le</strong> meil<strong>le</strong>ure musique pour<br />
réunir deux générations trompées par l’appât du<br />
gain ? Le décor n’a rien de gai, mais <strong>le</strong> long de ce<br />
travelling de 16 titres, dans un décor a priori désincarné,<br />
Doctor L provoque des rencontres aussi<br />
magnifiques que fortuites comme ce slam incroyab<strong>le</strong><br />
sur Old woman. Surtout, un rhythm’n’blues des<br />
plus purs parcourt <strong>le</strong> disque, dont la mélancolie résonne<br />
étrangement contemporaine. Morceaux pour<br />
cowboy moderne désabusé, <strong>le</strong>s magnifiques You<br />
better fly et No more prison bascu<strong>le</strong>nt soudain sur<br />
<strong>le</strong> groove afrobeat de Naligiyo, comme l’humeur<br />
changeante d’un marché d’actions. Frissonnant…<br />
L’ambiance sur <strong>le</strong> disque est tel<strong>le</strong>ment réaliste que<br />
Doctor L nous livre ici un véritab<strong>le</strong> témoignage.<br />
DAMIEN BAUMAL<br />
GRATUIT<br />
Délivrance<br />
Ego Twister Records / Khytibong<br />
Intense, bestia<strong>le</strong>, la noise du Lyonnais Antoine Bellanger,<br />
alias Gratuit, jaillit de bricolages sonores.<br />
Délivrance, son second album, a été enregistré<br />
dans une cabane de chasseurs des Pyrénées. L’atmosphère<br />
est obscure, énigmatique, parfois<br />
angoissante, comme perdu de nuit en forêt.<br />
Sur certains titres comme L’oméga, on entend <strong>le</strong>s<br />
feuil<strong>le</strong>s tremb<strong>le</strong>r, <strong>le</strong> bois craquer, <strong>le</strong>s cailloux rou<strong>le</strong>r,<br />
<strong>le</strong> feu crépiter. Le clip de Feu traduit l’univers<br />
d’Antoine : dans une clairière, entouré de loups.<br />
Déjà auteur de performances sonores à base de<br />
solénoïdes, sur un bateau ou dans un container<br />
modulab<strong>le</strong>, Gratuit est un artisan de la musique<br />
réfugié dans la nature. Pour ceux qui se souviennent<br />
de Rien, son premier opus sorti en 2010,<br />
on retrouve des textes crus, sombres, comme ceux<br />
du Si<strong>le</strong>nce des chiens ou L’odeur de la chair. Avec<br />
Délivrance, Gratuit hulu<strong>le</strong>, entouré d’une nature<br />
frémissante et d’une minima<strong>le</strong> anima<strong>le</strong>.<br />
MARIO BOMPART<br />
doMIno_e<br />
Domino_e<br />
Wooden Home Records<br />
Derrière ce nom de groupe un peu énigmatique se<br />
cache David Rayot et son acolyte Audrey. Le postulat<br />
de base était visib<strong>le</strong>ment de faire un disque à<br />
la forme simp<strong>le</strong>, ce qui est très réussi, car <strong>le</strong>s onze<br />
chansons bénéficient d’une écriture en parfaite<br />
corrélation avec l’atmosphère et la production du<br />
disque. Cette apparente simplicité n’est pas pour<br />
autant synonyme de facilité, car <strong>le</strong>s artistes évoqués<br />
par ces chansons (Pavement, Sonic Youth) ne<br />
souffrent pas de la médiocrité. Et chaque chanson<br />
a été travaillée, aiguisée pour être efficace, que la<br />
forme retenue soit rock (A friend, Moon Val<strong>le</strong>y, Brother<br />
ou Whsy et ses guitares cathartiques) ou cel<strong>le</strong><br />
d’une bel<strong>le</strong> ballade (Sitting on a ballbearing), voire<br />
même un numéro d’équilibriste à l’instar de She’s<br />
riding horses. Sans jamais se perdre, Domino_e<br />
signe un disque varié, percutant quand il faut, s’effaçant<br />
au besoin : de la bel<strong>le</strong> ouvrage en somme.<br />
MICKAËL CHOISI<br />
GRos MenÉ<br />
Agnus dei<br />
Grosse Boîte<br />
Dans la rubrique du retour que l’on attendait plus,<br />
voici Gros Mené ! Voilà maintenant treize ans que<br />
Fred Fortin, Olivier Langevin et Michel Dufour sortaient<br />
comme on se rac<strong>le</strong> la gorge Tue ce drum<br />
Pierre Bouchard, véritab<strong>le</strong> pavé dans la marre de<br />
boue du rock, avec éclaboussures assurées et qui<br />
a ouvert la voie à toute une génération de jeunes<br />
chevelus québécois énervés. Plus d’une décennie<br />
plus tard, Fortin et Langevin ont fait du chemin chacun<br />
de <strong>le</strong>ur côté, mais reste que l’envie de remettre<br />
<strong>le</strong> couvert <strong>le</strong>s titillait. Point de nostalgie ici, juste<br />
un retour aux sources, avec quelques touches é<strong>le</strong>ctro<br />
(inspirées de Galaxie, groupe où officie Langevin),<br />
un petit plongeon légèrement 70’s pour un<br />
résultat toujours aussi convaincant, quoiqu’un peu<br />
plus sage que <strong>le</strong>ur premier opus. Ici, on ne fait pas<br />
dans la dentel<strong>le</strong>, mais plutôt dans <strong>le</strong> gros cuir, avec<br />
toujours la même volonté de brasser <strong>le</strong>s choses et<br />
<strong>le</strong> monde. Un album permettant d’hur<strong>le</strong>r bien fort<br />
sans s’en rendre compte !<br />
YOLAINE MAUDET<br />
sTephAn eICheR<br />
L’envolée<br />
Barclay / Universal<br />
Le Suisse, ex-chanteur du groupe cold-wave Grauzone,<br />
est de retour avec un onzième album dont la<br />
presse ne tarit d’éloges. Cowboy solitaire, Eicher<br />
s’est pourtant entouré d’une joyeuse bande :<br />
Cocoon et Miossec pour <strong>le</strong>s textes (ce dernier signe<br />
un magnifique Disparaître), Ca<strong>le</strong>xico aux instruments,<br />
l’écrivain Philippe Djian à la voix… Beau<br />
casting pour un disque sensib<strong>le</strong> et fragi<strong>le</strong>, doux.<br />
Peu calibré pour la radio. Comme une histoire au<br />
charme discret qui recommence éternel<strong>le</strong>ment et<br />
trouve d’autres formes d’expression à chaque<br />
nouvel album. Les titres sont courts, simp<strong>le</strong>s, visités<br />
par <strong>le</strong> jazz, la folk, la pop country ou <strong>le</strong> rock.<br />
Épurés. Le temps n’est plus au clinquant ou au positivisme<br />
forcené. Ici, la discrétion et la modestie<br />
triomphent. Preuve que <strong>le</strong> peu fait un tout et que<br />
<strong>le</strong>s démonstrations de force sont inuti<strong>le</strong>s pour faire<br />
naître l’émotion. Tant mieux ! Si cette envolée est<br />
douce et sobre, el<strong>le</strong> n’est pour autant pas près de<br />
retomber.<br />
SAMUEL DEGASNE<br />
AlICe GUeRloT-koURoUlIs<br />
334 Distance<br />
Cézame<br />
Subti<strong>le</strong>s, inventives, <strong>le</strong>s mélodies d’Alice sont poétiques.<br />
Après un 4 titres, Micky, sorti en 2011, el<strong>le</strong><br />
sort aujourd’hui son premier album. Dans cette<br />
œuvre riche de 18 ballades, el<strong>le</strong> alterne <strong>le</strong>s titres<br />
chantés en français et en anglais - comme l’excel<strong>le</strong>nt<br />
Washing machine - et d’autres purement<br />
instrumentaux. Sa voix onctueuse se fond dans<br />
des sonorités planantes, empreintes d’é<strong>le</strong>ctro minima<strong>le</strong>.<br />
334 Distance n’est jamais monotone, des<br />
accords viennent toujours (r)éveil<strong>le</strong>r l’ouïe. Artiste<br />
complète, el<strong>le</strong> joue tous <strong>le</strong>s instruments présents<br />
sur l’album : accordéon, violoncel<strong>le</strong>, piano, guitare,<br />
sanza, percussions. El<strong>le</strong> avoue s’être référée à Yann<br />
Tiersen, auquel on la compare désormais : “En réalisant<br />
des albums où il jouait tous <strong>le</strong>s instruments,<br />
il m’a convaincu de me lancer.” Mais la Nantaise ne<br />
se sent pas encore prête pour la scène : “Je suis<br />
trop timide. Je préfère attendre de présenter un<br />
beau spectac<strong>le</strong>.” Le public pourrait alors découvrir<br />
de près son univers truffé de merveil<strong>le</strong>s.<br />
MARIO BOMPART