You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
Du bois écologique gabonnais?<br />
Publication d’un rapport sur la<br />
concession Leroy<br />
Par Roger Graf<br />
Dans les discussions sur l’existence de bois<br />
tropicaux écologiques, l’industrie du bois se<br />
réfère fréquemment au «cas spécial du Gabon».<br />
On justifie le statut particulier du Gabon<br />
par la très faible densité de sa population,<br />
comparée à celle d’autres Etats<br />
africains: sauf autour des grandes villes, la<br />
pression exercée sur les forêts peut donc y<br />
être qualifiée de négligeable. Dans beaucoup<br />
de pays tropicaux, l’ouverture de voies de pénétration<br />
pour l’abattage du bois est la cause<br />
de l’envahissement progressif, par des gens<br />
venus d’ailleurs, de zones forestières jusque<br />
là préservées. Une étude de la «World Society<br />
for the Protection of Animals» (WSPA),<br />
publiée en mai 1996, montre que des problèmes<br />
existent même au sein du «sylvobusiness»<br />
gabonnais.<br />
Cercopithèque<br />
(Cercopithecus<br />
solatus) sur<br />
un marché de<br />
Libreville<br />
Photo: Jonathan<br />
Pearce<br />
(WSPA)<br />
En 1990, le Gabon a produit env. 1,7<br />
million de m 3 de bois, dont 90% ont été exportés.<br />
Cet Etat ne dispose que de 5 zones<br />
de protection, dont la superficie totale correspond<br />
à 6,9% de celle du pays, mais d’aucun<br />
parc national. Les propositions de l’International<br />
Union for Conservation of<br />
Nature (IUCN), visant à la création de 15<br />
nouvelles réserves, n’ont pour l’instant pas<br />
été concrétisées. Dans les 5 réserves existantes,<br />
du bois a été ou est exploité, spécialement<br />
dans la réserve de Lopé, où la firme<br />
française Leroy possède une concession de<br />
plus de 88 000 hectares. Le bois d’okoumé<br />
est exporté en Europe – notamment en<br />
Suisse – par la société Isoroy, qui appartient<br />
à 95% au groupe allemand Glunz. Le bois<br />
est commercialisé sous le label «Euro-<br />
koumé». Pour le BMF, vendre sous un label<br />
«écologique» du bois abattu dans une réserve<br />
n’est pas sérieux. Le fait que Leroy ait<br />
une concession «légale» pour couper du<br />
bois dans la réserve de Lopé ne rend pas le<br />
«label» plus crédible.<br />
Un autre problème réside dans la durée de<br />
la concession (17 ans) dont Leroy dispose<br />
pour exploiter 380 000 hectares au total. Des<br />
ingénieurs forestiers reconnus estiment qu’il<br />
faut un répit de 50 ans, après une coupe,<br />
pour que la forêt puisse plus ou moins se rétablir.<br />
Le rapport de la WSPA n’est pas en mesure<br />
de juger de manière définitive si Leroy<br />
(ou une autre société active au Gabon) peut<br />
avoir intérêt à une gestion durable et un travail<br />
soigneux dans le cadre d’un contrat de si<br />
courte durée.<br />
Mais le problème le plus important dans<br />
les concessions Leroy – comme dans de larges<br />
secteurs de l’ensemble de l’Afrique centrale –<br />
reste le braconnage. Au Gabon, la viande<br />
sauvage se paie moins cher que la viande<br />
d’élevage, et les Gabonnais la préfèrent. Les<br />
camions des entreprises de bûcheronnage<br />
constituent un important moyen de transport<br />
des animaux braconnés vers les marchés citadins.<br />
Dans le village ouvrier des concessions<br />
Leroy (1200 âmes), une étude a fait apparaître<br />
que 4543 kg de viande sauvage ont été<br />
consommés en 2 mois (1993). Des 1037 animaux<br />
sauvages concernés, 41% étaient des<br />
singes (dont 3 gorilles et 35 chimpanzés). Leroy<br />
affirme maintenant que la chasse commerciale<br />
est interdite sur ses concessions depuis<br />
avril 1995, que ses camions ne sont plus autorisés<br />
à transporter des animaux sauvages et<br />
qu’un poste de contrôle a été installé en limite<br />
de concessions. Mais sur un marché de la capitale,<br />
Libreville, l’équipe d’enquête WSPA a<br />
vu un cercopithèque en vente en avril 1996.<br />
Il s’agit d’une espèce récemment découverte<br />
(Cercopithecus solatus) et menacée d’extinction.<br />
L’aire de distribution de ce singe est très<br />
limitée et couvre partiellement les concessions<br />
Leroy. Il n’est pas possible de savoir si ce cercopithèque<br />
vient des concessions, mais des<br />
présomptions existent.<br />
Le rapport WSPA de 18 pages (en anglais)<br />
peut être obtenu au BMF au prix de 5 francs.