Apollo # 4

un perpétuel malentendu.
Le vin n’est jamais
blanc comme il peut
être rouge ou rosé. S’il
C’est
était blanc, le vin n’aurait
pas de couleur. Le blanc n’est-il pas la noncouleur,
la perception de la synthèse parfaite
des trois couleurs primaires ? Qui aurait
envie de boire un vin plus immaculé que le
lait d’une vache ? La couleur est la première
émotion qui prend le buveur par le regard.
Le vin a-t-il l’œil étincelant ou le visage triste
des âmes sans promesses ? Rien n’est jamais
perdu. La couleur ne dévoile qu’un coin
des coulisses du voyage. Le vin blanc est le
IN THE MOOD FOR WINE
DANS LE BLANC DU VIN
Photographe Alban Couturier
fruit d’un jus de grains de raisin, presque
incolore, dont la peau est souvent vert
tendre ou jaune pâle et parfois d’une teinte
rouge très variable. C’est l’épiderme du raisin
qui détient les clés de la couleur du vin. Les
futurs blancs sont vinifiés sans la peau. Le
jus transparent du raisin se colore plus ou
plus moins en fonction, de son lieu de naissance,
du cépage, du taux de sucre et de son
passage éventuel en fût de bois, de son âge
et de l’humeur et de la magie du vigneron.
Voilà pour la leçon de choses. Les vins sont
comme le monde. Ils ne sont pas manichéens
comme cette glaçante alternative,
maintes fois entendue, à l’heure du service
de la pitance à trente mille pieds dans les
airs, "red or white ?" Les vins blancs sont
pluriels, innombrables, infinis qu’ils soient
tranquilles, secs, pétillants, moelleux, frais,
capiteux, boisés, fruités, minéraux, floraux,
gras, anguleux… Nous en resterons là. La
cartographie des arômes et des saveurs est
inepte et ne flatte que l’orgueil du dégustateur
académique. Le vin ne procure que des
émotions. Nous les recevons tel que nous
sommes au moment ou nous les ressentons.
Fugaces ou pétulantes, chancelantes ou
volcaniques, elles s'accrochent à un lieu, un
souvenir, une rencontre, une humeur, une
mélancolie, une joie, une espérance, en un