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22-08-0360 - Ordre des ingénieurs du Québec

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CANADA<br />

PROVINCE DE QUÉBEC<br />

CONSEIL DE DISCIPLINE<br />

ORDRE DES INGÉNIEURS DU QUÉBEC<br />

N° : <strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong><br />

DATE : Le 20 avril 2009<br />

______________________________________________________________________<br />

LE CONSEIL : Me Jean-Guy Légaré, avocat<br />

Président<br />

Me Suzanne Lamarre, ing.<br />

Membre<br />

Mme Françoise Poliquin, ing.<br />

Membre<br />

______________________________________________________________________<br />

JEAN-PIERRE RAYMOND, ing., ès qualités de syndic adjoint de l’<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong><br />

<strong>ingénieurs</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong><br />

Partie plaignante<br />

c.<br />

DOMINIQUE FORTIER, ing.<br />

Partie intimée<br />

______________________________________________________________________<br />

DÉCISION SUR CULPABILITÉ ET SUR SANCTION<br />

______________________________________________________________________<br />

[1] Le Conseil de discipline de l’<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong>, (ci-après « Le<br />

Conseil ») s’est réuni à Montréal le 3 février 2009, pour entendre et disposer d’une<br />

plainte disciplinaire ainsi libellée :<br />

PLAINTE RÉ-AMENDÉE<br />

«Je, soussigné, Jean-Pierre Raymond, ingénieur, régulièrement inscrit au tableau de l'<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong><br />

<strong>ingénieurs</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong>, en ma qualité de syndic adjoint <strong>du</strong>dit ordre professionnel, déclare ce qui suit :<br />

Madame Dominique Fortier, ingénieure, régulièrement inscrite au tableau de l'<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> <strong>du</strong><br />

<strong>Québec</strong> (037050), a refusé ou négligé de satisfaire à certaines obligations imposées par le Code de<br />

déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> (R.R.Q., c. I-9, r.3) plus particulièrement :


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 2<br />

1. À Montréal, le ou vers le 29 août 2000, dans le cadre d’un mandat pour la conception et la<br />

préparation de plans et devis pour un mur de soutènement pour la propriété située au 685, rue<br />

Rémillard, Auteuil, en émettant le plan CS-1, l’ingénieure Dominique Fortier a exprimé et émis<br />

<strong>des</strong> avis qui étaient incomplets ambigües et qui n’étaient pas basés sur <strong>des</strong> connaissances<br />

factuelles suffisantes, contrevenant ainsi aux articles 3.02.04 et 2.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong><br />

<strong>ingénieurs</strong> (R.R.Q., c. I-9, r.3).<br />

2. À Montréal, le ou vers le 25 septembre 2000, dans le cadre d’un mandat pour la conception et la<br />

préparation de plans et devis pour un mur de soutènement pour la propriété situé au 685, rue<br />

Rémillard, Auteuil, en émettant la « Révision générale » <strong>du</strong> plan CS-1, l’ingénieure Dominique<br />

Fortier a exprimé et émis <strong>des</strong> avis qui étaient incomplets ambigües et qui n’étaient pas basés sur<br />

<strong>des</strong> connaissances factuelles suffisantes, contrevenant ainsi aux articles 3.02.04 et 2.04 <strong>du</strong> Code<br />

de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> (R.R.Q., c. I-9, r.3).<br />

3. À Montréal, le ou vers le 24 octobre 2000, dans le cadre d’un mandat pour la conception d’un<br />

mur de soutènement pour la propriété situé au 685, rue Rémillard, Auteuil, en émettant une lettre<br />

d’« Attestation-Mur de soutènement, Rue Rémillard, Auteuil », l’ingénieure Dominique Fortier a<br />

exprimé et émis <strong>des</strong> avis qui étaient incomplets ambigües et qui n’étaient pas basés sur <strong>des</strong><br />

connaissances factuelles suffisantes, contrevenant ainsi aux articles 3.02.04 et 2.04 <strong>du</strong> Code de<br />

déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> (R.R.Q., c. I-9, r.3).<br />

4. À Montréal, le ou vers le 24 octobre 2000, dans le cadre d’un mandat pour la conception d’un<br />

mur de soutènement pour la propriété situé au 685, rue Rémillard, Auteuil, en émettant une lettre<br />

d’« Attestation-Mur de soutènement, Rue Rémillard, Auteuil », sans avoir vérifié la conformité<br />

<strong>du</strong>dit mur, l’ingénieure Dominique Fortier a recouru ou s’est prêtée à <strong>des</strong> procédés malhonnêtes<br />

ou douteux et/ou a toléré de tels procédés dans l’exercice de ses activités professionnelles et, en<br />

attestant la conformité de travaux qui ne respectaient pas la réglementation applicable,<br />

l’ingénieure a omis de tenir compte <strong>des</strong> conséquences de l’exécution de ses travaux sur<br />

l’environnement et sur la vie, la santé et la propriété de toute personne, contrevenant ainsi aux<br />

articles 3.02.<strong>08</strong> et 2.01 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> (R.R.Q., c. I-9, r.3).<br />

ET LE PLAIGNANT DEMANDE JUSTICE.»<br />

[2] À l’origine, la plainte dans ce dossier avait été déposée le 31 mars 20<strong>08</strong>. Elle fut<br />

suivie d’une plainte amendée en date <strong>du</strong> 25 avril 20<strong>08</strong> et enfin d’une plainte réamendée<br />

est en date <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>. Les trois (3) plaintes sont accompagnées<br />

d’affirmations solennelles <strong>du</strong> plaignant.<br />

[3] Le plaignant était présent et représenté par son procureur, Me Charles Dupuis.<br />

L’intimée était présente et représentée par sa procureure, Me Anne-Marie Williams.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 3<br />

[4] Dès le début de l’audition, le procureur <strong>du</strong> plaignant a informé le Conseil<br />

qu’après de nombreuses discussions avec la procureure de l’intimée, une entente était<br />

intervenue entre les parties.<br />

[5] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a assuré le Conseil que la suggestion commune que<br />

les procureurs entendaient soumettre au Conseil était conforme à l’esprit de l’article 23<br />

<strong>du</strong> Code <strong>des</strong> professions, de même qu’à la mission de l’<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> qui<br />

consiste à protéger le public.<br />

[6] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a affirmé que les procureurs <strong>des</strong> parties avaient eu de<br />

longues discussions qu’ils avaient tenu compte de l’ensemble <strong>des</strong> circonstances<br />

particulières de ce dossier.<br />

[7] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a souligné que son client avait fait une analyse<br />

détaillée de la preuve et qu’il s’était assuré que la protection <strong>du</strong> public était atteinte par<br />

les sanctions qu’il entendait proposer au Conseil.<br />

[8] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a assuré le Conseil qu’il n’y avait pas eu de copinage<br />

entre les parties et que les suggestions communes qu’il présenterait respecteraient les<br />

règles établies.<br />

[9] Quant au paragraphe 1 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>, le procureur <strong>du</strong><br />

plaignant a expliqué que l’intimée plaiderait coupable sur chacun <strong>des</strong> deux (2) chefs<br />

mais, compte tenu de l’arrêt Kineapple 1 , qui empêche les condamnations multiples pour<br />

un même comportement fautif, les parties demandaient l’arrêt <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res<br />

concernant l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>. Ainsi, les parties<br />

1<br />

Kineapple c. R. [1975] 1 R.C.S. 729, AZ-75111060


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 4<br />

recommandaient une amende de 1 000,00$ quant au chef n o 2 fondé sur l’article 2.04<br />

<strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[10] Quant au paragraphe 2, l’intimée avait l’intention de plaider coupable sur les<br />

deux (2) chefs contenus à l’intérieur de ce paragraphe mais, compte tenu de l’arrêt<br />

Kineapple 2 , les parties demandaient l’arrêt <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res concernant l’article 3.02.04<br />

<strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>. Les parties recommandaient au Conseil que<br />

l’intimée soit condamnée à payer une amende de 1 000,00$ quant au chef n o 4 fondé<br />

sur l’article 2.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[11] Quant au paragraphe 3, l’intimée plaiderait coupable aux deux (2) chefs<br />

d’infraction contenus à l’intérieur de ce paragraphe. Toutefois, compte tenu de l’arrêt<br />

Kineapple 3 , les parties recommanderaient l’arrêt <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res quant au chef fondé<br />

sur l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>. Les parties<br />

recommanderaient donc l’imposition à l’intimée d’une amende de 1 000,00$ quant au<br />

chef n o 6 fondé sur l’article 2.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[12] Quant au paragraphe 4 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>, l’intimée<br />

plaiderait coupable quant aux deux (2) chefs d’infraction contenus à l’intérieur de ce<br />

paragraphe. Quant au chef n o 7 fondé sur l’article 3.02.<strong>08</strong> <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong><br />

<strong>ingénieurs</strong>, l’intimée se verrait imposer une amende de 1 000,00$. Elle se verrait<br />

également imposer une amende de 2 000,00$ sur le chef n o 8 fondé sur l’article 2.01<br />

<strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

2<br />

3<br />

Précité note 1<br />

Ibid.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 5<br />

[13] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a souligné que l’intimée s’était également engagée à<br />

assumer l’ensemble <strong>des</strong> déboursés <strong>du</strong> dossier.<br />

[14] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a également rappelé que le Conseil devait, dans le<br />

cadre de ces suggestions communes, tenir compte de l’aspect de la globalité <strong>des</strong><br />

sanctions qui étaient imposées à l’intimée.<br />

[15] La procureure de l’intimée a ensuite corroboré les propos <strong>du</strong> procureur <strong>du</strong><br />

plaignant.<br />

Preuve <strong>du</strong> plaignant<br />

[16] De consentement avec la partie intimée, le procureur <strong>du</strong> plaignant a déposé une<br />

preuve documentaire au soutien <strong>des</strong> reproches formulés dans la plainte :<br />

SYN-01<br />

SYN-02<br />

SYN-03<br />

SYN-04<br />

SYN-05<br />

SYN-06<br />

SYN-07<br />

SYN-<strong>08</strong><br />

SYN-09<br />

SYN-10<br />

Attestation <strong>du</strong> statut <strong>du</strong> membre par le Secrétaire de l’OIQ.<br />

Avis d’infraction de la Ville de Laval à L. Dubord Entrepreneur inc., pour avoir<br />

construit un mur de soutènement de grande hauteur.<br />

Résolution de la Ville de Laval pour intenter procé<strong>du</strong>res en cour contre L. Dubord<br />

Entrepreneur inc. pour contravention.<br />

Constat d’infraction de la Ville de Laval à L. Dubord Entrepreneur inc. pour avoir<br />

construit un mur de soutènement de grande hauteur.<br />

Rapport d’infraction de la Ville de Laval concernant L. Dubord Entrepreneur inc.<br />

pour avoir construit un mur de soutènement de grande hauteur.<br />

Deux photos reçues de M. Frankow montrant le mur vu de chez le voisin.<br />

Rapport d’inspection de M. Frankow concernant L. Dubord Entrepreneur inc. pour<br />

avoir construit un mur de soutènement de grande hauteur.<br />

Dessin de M. L. Dubord montrant le mur de soutènement pour le 685, rue<br />

Rémillard à Laval avec projet d’implantation annoté par L. Dubord (non daté).<br />

Extraits <strong>du</strong> règlement de construction dans la Ville de Laval, No. L-9501.<br />

Plan, vue en coupe/mur de soutènement signé et scellé par Dominique Fortier.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 6<br />

SYN-11<br />

SYN-12<br />

SYN-13<br />

SYN-14<br />

SYN-15<br />

SYN-16<br />

SYN-17<br />

SYN-18<br />

SYN-19<br />

SYN-20<br />

SYN-21<br />

SYN-<strong>22</strong><br />

SYN-23<br />

SYN-24<br />

Facture No 13 696 de Génivar pour L. Dubord Entrepreneur inc.<br />

Notes de É. Guénette pour le projet.<br />

Dessin <strong>du</strong> 29 août (P-02) annoté par Mme Fortier.<br />

Plan, vue en coupe/mur de soutènement signé et scellé par Dominique Fortier.<br />

Lettre de E. Guénette à G. Beaulieu, avis de conformité mur de soutènement <strong>du</strong><br />

685, rue Rémillard, Ville de Laval avec plan.<br />

Lettre de E. Guénette à G. Beaulieu, plan d’implantation <strong>du</strong> 685, rue Rémillard,<br />

Ville de Laval.<br />

Demande de permis pour la construction d’un mur de soutènement au 685, rue<br />

Rémillard à Laval.<br />

Certificat d’autorisation pour la construction d’un mur de soutènement au 685, rue<br />

Rémillard à Laval.<br />

Lettre de A. Fortin à L. Dubord, mise en demeure contre Dubord.<br />

Lettre de A. Fortin à Génivar, copie de la mise en demeure contre L. Dubord.<br />

Lettre de A. Fortin à Y. Fallu, règlement L-2000.<br />

Rapport d’expertise de Y. Fallu, pour le 685, rue Rémillard, Ville de Laval.<br />

Jugement de l’honorable Richard Landry, J.C.S. dans Pigeon c. L. Dubord<br />

Entrepreneur inc.<br />

Jugement de l’honorable Monique Fradette, J.C.Q. dans Pigeon c. L. Dubord<br />

Entrepreneur inc.<br />

Extrait <strong>du</strong> règlement de construction No L-9501 de la Ville de Laval définissant les<br />

murs de soutènement de grande hauteur (1,8 m ou plus).<br />

Témoignage <strong>du</strong> plaignant<br />

[17] Le plaignant a d’abord référé le Conseil à l’attestation <strong>du</strong> statut de membre en<br />

règle de l’intimée qui a été émis par le secrétaire de l’<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong><br />

(pièce SYN-01).<br />

[18] Le plaignant a expliqué au Conseil qu’il était syndic adjoint et que, dans le cadre<br />

de son travail, il effectuait <strong>des</strong> enquêtes en matière déontologique concernant le<br />

comportement fautif de certains <strong>ingénieurs</strong>.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 7<br />

[19] Le plaignant a expliqué qu’il avait eu vent <strong>des</strong> agissements de l’intimée après<br />

avoir pris connaissance <strong>du</strong> jugement ren<strong>du</strong> par l’honorable Richard Landry, J.C.Q., le<br />

11 février 2004, dans l’affaire Pigeon contre L. Dubord Entrepreneur inc. (ci-après<br />

«Dubord») (pièce SYN-<strong>22</strong>).<br />

[20] Il a expliqué que l’origine de cette procé<strong>du</strong>re remontait en 1999, lorsque Dubord<br />

a reçu un avis d’infraction <strong>du</strong> Service d’urbanisme de Ville de Laval (pièce SYN-02).<br />

Dans cet avis, la Ville reprochait à l’entrepreneur d’avoir érigé un mur de soutènement<br />

de grande hauteur sans avoir obtenu, au préalable, un certificat d’autorisation.<br />

[21] En effet, tel que l’a expliqué le plaignant, les règlements municipaux de la Ville<br />

de Laval nécessitaient un certificat d’autorisation pour <strong>des</strong> travaux impliquant un mur de<br />

soutènement de grande hauteur (pièce SYN-09). Un mur de soutènement de grande<br />

hauteur est un mur dont la hauteur verticale hors sol est de 1,8 mètres ou plus (pièce<br />

SYN-24).<br />

[<strong>22</strong>] Le plaignant a expliqué que, pour ce genre de travaux, la Ville de Laval exigeait<br />

un rapport d’inspection préparé, signé et scellé par un ingénieur, attestant que l’ouvrage<br />

était réalisé conformément aux plans et devis approuvés lors de l’émission <strong>du</strong> certificat<br />

d’autorisation (pièce SYN-09).<br />

[23] Or, en l’espèce, l’avis d’infraction a été émis le 1 er février 1999 (pièce SYN-02).<br />

Par la suite, la Ville de Laval a autorisé le dépôt <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res devant la Cour<br />

municipale le 28 avril 1999 (pièce SYN-03). Un constat d’infraction a été émis contre<br />

Dubord le 6 octobre 1999 (pièce SYN-04).


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 8<br />

[24] Le plaignant a référé au Conseil le rapport d’infraction générale (pièce SYN-05),<br />

qui était annexé au constat d’infraction. Dans ce rapport, un préposé de la Ville de Laval<br />

a constaté que Dubord avait entrepris <strong>des</strong> travaux d’aménagement d’un mur de<br />

soutènement de grande hauteur, sans avoir au préalable obtenu un certificat<br />

d’autorisation. À l’époque, le mur en question avait six pieds trois pouces (6' 3") (pièce<br />

SYN-05).<br />

[25] Le plaignant a également référé le Conseil à deux (2) photographies <strong>du</strong> mur en<br />

question (pièce SYN-06).<br />

[26] Le plaignant a, par la suite, référé le Conseil à un nouveau rapport d’inspection<br />

<strong>du</strong> Service de l’urbanisme de la Ville de Laval, en date <strong>du</strong> 3 juillet 2000 (pièce SYN-07).<br />

Dans ce rapport, il est fait état que le mur avait été abaissé et qu’il mesurait de 54 à 56<br />

pouces de hauteur.<br />

[27] Selon le plaignant, Dubord aurait tenté de corriger la pente <strong>du</strong> terrain sur lequel<br />

était situé le mur en question, en ajoutant <strong>des</strong> madriers de bois sur le <strong>des</strong>sus <strong>du</strong> mur de<br />

béton.<br />

[28] Le plaignant a ensuite référé le Conseil à deux (2) plans <strong>du</strong> mur de remblais, qui<br />

n’ont toutefois pas été préparés par un ingénieur (pièce SYN-<strong>08</strong>). Le plaignant a<br />

toutefois expliqué que ces plans avaient été refusés par la Ville de Laval.<br />

[29] Dans le cadre de son enquête, le plaignant a, par la suite, appris que Dubord<br />

avait demandé l’intervention <strong>du</strong> Groupe conseil Génivar (ci-après «Génivar»)<br />

par<br />

l’entremise de l’architecte Yves Bilodeau.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 9<br />

[30] Selon le plaignant, c’est d’ailleurs monsieur Bilodeau qui aurait contacté<br />

directement monsieur Éric Guénette, <strong>des</strong>sinateur chez Génivar, afin de les impliquer<br />

dans le dossier. C’est d’ailleurs le <strong>des</strong>sinateur Éric Guénette qui aurait rencontré un<br />

représentant de Dubord.<br />

[31] Toujours selon le plaignant, la capacité portante <strong>des</strong> sols n’aurait jamais été<br />

vérifiée. Or, les premiers plans, qui ont été signés et scellés par l’intimée le 29 août<br />

2000, font état qu’un laboratoire devait vérifier la qualité <strong>du</strong> sol, transférant par<br />

conséquent ce devoir à l’entrepreneur.<br />

[32] La première vue en coupe <strong>du</strong> mur de soutènement signée et scellée par l’intimée<br />

le 29 août 2000 (pièce SYN-10) a été refusée. Par la suite, une autre vue en coupe <strong>du</strong><br />

même mur de soutènement <strong>des</strong>sinée par monsieur Éric Guénette a été signée, vérifiée<br />

et scellée par l’intimée le 25 septembre 2009 (pièce SYN-14).<br />

[33] Le plaignant a ensuite référé le Conseil à une lettre de l’intimée <strong>du</strong> 24 octobre<br />

2000 (pièce SYN-15), confirmant : «(…) que nous avons inspecté le mur de<br />

soutènement (…)» de la rue Rémillard.<br />

[34] Le plaignant a, par la suite, référé le Conseil à la facture pour honoraires<br />

professionnels qui a été émise par Génivar, le 5 septembre 2002, pour le projet <strong>du</strong> mur<br />

de soutènement (pièce SYN-11). Il a également référé aux notes manuscrites prises par<br />

le <strong>des</strong>sinateur Éric Guénette le 12 septembre 2000 (pièce SYN-12).<br />

[35] Le plaignant a référé le Conseil aux plans déposés comme pièce SYN-13, qui<br />

sont, comme le souligne l’honorable juge Richard Landry, <strong>des</strong> faux documents, puisque<br />

<strong>des</strong> plans doivent en principe servir à planifier <strong>des</strong> travaux. Or, en l’espèce, les


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 10<br />

documents pro<strong>du</strong>its ne sont pas <strong>des</strong> plans, mais sont plutôt <strong>des</strong> <strong>des</strong>sins faits après les<br />

travaux et auraient dû porter la mention «tel que construit». De l’avis <strong>du</strong> plaignant,<br />

l’intimée a collaboré au mandat qui lui avait été donné par Dubord, c’est-à-dire de<br />

«compléter la paperasse» afin que la Ville de Laval le laisse tranquille.<br />

[36] Le plaignant a référé le Conseil au projet <strong>du</strong> plan d’implantation <strong>du</strong> mur de<br />

soutènement préparé par les arpenteurs-géomètres Poulin & Jodoin (pièce SYN-16).<br />

[37] Il a expliqué qu’une demande de permis post facto avait été soumise à la Ville de<br />

Laval le 1 er novembre 2000 (pièce SYN-17), qui a con<strong>du</strong>it à l’émission <strong>du</strong> certificat<br />

d’autorisation <strong>du</strong> 7 décembre 2000 (pièce SYN-18).<br />

[38] Le plaignant a souligné que l’attitude de la Ville de Laval à l’égard de ce dossier<br />

était relativement surprenante, ce qui constitue, selon lui, un facteur atténuant à l’égard<br />

de l’intimée.<br />

[39] Le plaignant a ensuite référé le Conseil à la mise en demeure <strong>du</strong> 14 juin 2001<br />

<strong>des</strong> procureurs de Ville de Laval à Dubord (pièce SYN-19). Dans cette lettre, il est fait<br />

état que les travaux n’avaient pas été exécutés conformément aux plans préparés par<br />

Génivar, en ce que trois (3) dormants de bois ont été installés, faisant craindre pour la<br />

stabilité <strong>du</strong> mur et <strong>du</strong> sol et pour la sécurité de toute personne pouvant s’en approcher.<br />

[40] Le plaignant a, par la suite, indiqué que le terrain avait été ven<strong>du</strong> par Dubord à<br />

madame Doris Pigeon et à monsieur Gaétan Léger, le 21 juin 2000. Par la suite, le<br />

couple Pigeon-Léger a poursuivi en dommage leur constructeur-vendeur Dubord.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 11<br />

[41] Aux termes de plusieurs journées d’audition devant le juge Landry, celui-ci a<br />

ordonné la tenue d’une expertise conformément aux dispositions de l’article 414 <strong>du</strong><br />

Code de procé<strong>du</strong>re civile. Le mandat a donc été confié par la Cour à l’ingénieur Yves<br />

Fallu. Celui-ci a déposé son rapport le 3 juillet 2003 (pièce SYN-21).<br />

[42] Le plaignant a expliqué que l’ingénieur Fallu avait eu recours à l’utilisation d’une<br />

petite excavatrice afin de vérifier si le mur de soutènement avait été construit selon les<br />

plans <strong>du</strong> 29 août 2000, préparés par Génivar.<br />

[43] Le rapport de l’ingénieur Fallu révélait ce qui suit :<br />

«1. Les dormants de bois de 6" X 6" ne sont pas attachés comme il est demandé au plan, c’està-dire<br />

à l’aide d’une cornière de 4" X 6" X 3/8". Ils sont plutôt ancrés avec <strong>des</strong> attaches de 1"<br />

de largeur (photographie no. 2/7, Annexe I).<br />

2. Le géotextile a été posé uniquement sur le <strong>des</strong>sus et à l’arrière <strong>du</strong> premier bloc <strong>du</strong> haut et<br />

non tel que montré au plan, c’est-à-dire sur le <strong>des</strong>sus, à l’arrière, sur toute la hauteur et en<br />

<strong>des</strong>sous <strong>des</strong> blocs de béton (photographie no. 3/7, Annexe I).<br />

3. Il n’y a pas de pierre qui a été posée à l’arrière <strong>du</strong> mur de bloc, tel que montré au plan<br />

(photographie no. 4/7, Annexe I).<br />

4. Il n’y a pas de con<strong>du</strong>ite de drainage dans le bas <strong>du</strong> mur, tel que demandé au plan<br />

(photographie no. 5/7, Annexe I).<br />

5. Il n’y a pas de pierre nette 3/4" comme assise sous le mur, tel que demandé au plan<br />

(photographie no. 6/7, Annexe I).»<br />

[44] Le plaignant a, par la suite, référé au jugement de l’honorable Richard Landry,<br />

<strong>du</strong> 11 février 2004 (pièce SYN-<strong>22</strong>). Dans son jugement, le juge Landry souligne que<br />

Dubord a tenté de «berner» la Ville de Laval avec <strong>des</strong> «plans bidons». Il souligne<br />

également que Dubord a obtenu <strong>des</strong> plans de complaisance de Génivar, qui étaient non<br />

conformes à l’ouvrage existant.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 12<br />

[45] Le plaignant a, par la suite, indiqué que le jugement de l’honorable juge Landry<br />

avait été porté en appel par Dubord. Toutefois, une entente hors-cour est intervenue<br />

entre Dubord et les propriétaires, selon laquelle Dubord devait effectuer les travaux<br />

correctifs.<br />

[46] Or, il appert que Dubord a négligé d’effectuer lesdits travaux, ce qui a donné lieu<br />

à de nouvelles procé<strong>du</strong>res judiciaires intentées par les propriétaires en 2006.<br />

L’ensemble <strong>des</strong> travaux n’a finalement été complété qu’en 20<strong>08</strong>.<br />

[47] Le plaignant a souligné que, tout au cours de son enquête, l’intimée avait fait<br />

preuve d’une très bonne collaboration et qu’elle avait exprimé <strong>des</strong> regrets sincères,<br />

admettant qu’elle n’avait pas bien agi dans ce dossier.<br />

[48] Le plaignant a souligné que l’intimée lui avait certifié qu’elle n’avait pas l’intention<br />

de recommencer, puisqu’elle occupait depuis plusieurs années un poste de direction.<br />

Elle aurait également affirmé au plaignant qu’elle s’assurerait que les <strong>ingénieurs</strong> qui<br />

allaient travailler sous ses ordres respectent rigoureusement leur Code de déontologie,<br />

afin d’éviter que ce genre de situation se repro<strong>du</strong>ise.<br />

[49] Le plaignant a souligné qu’au départ l’intimée n’avait pas pris le processus au<br />

sérieux et voulait se défendre seule mais, après réflexion, reconnaissant sa culpabilité,<br />

elle avait mandaté sa procureure pour la représenter.<br />

[50] Selon le plaignant, il n’y a aucun doute que l’intimée ne représente aucune<br />

crainte de récidive et il est convaincu que l’intimée ne reviendra pas devant le Conseil<br />

de discipline. Le plaignant croit que les remords de l’intimée sont sincères et il est d’avis


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 13<br />

que les suggestions communes, qui ont été présentées par son procureur au début de<br />

l’audition, font en sorte que la protection <strong>du</strong> public est parfaitement assurée.<br />

Témoignage de l’intimée<br />

[51] L’intimée a expliqué qu’elle travaillait pour la firme Dessau. Depuis 2003, elle a<br />

occupé les postes de vice-présidente au développement, puis de vice-présidente<br />

marketing et était, depuis 20<strong>08</strong>, vice-présidente aux opérations. Dans ses fonctions,<br />

elle s’occupe de l’embauche, <strong>du</strong> budget et de la facturation.<br />

[52] Elle a expliqué qu’elle avait, au début de sa pratique, travaillé pour Hydro-<br />

<strong>Québec</strong>, avant d’ouvrir sa propre firme d’<strong>ingénieurs</strong> en pratique privée, qu’elle a<br />

exploitée de 1983 à 1997.<br />

[53] Elle a, par la suite, expliqué que son bureau avait été ven<strong>du</strong> à Génivar en 1997.<br />

Elle est restée à l’emploi de Génivar de 1997 à 2001, dans un poste de vice-présidente<br />

bâtiment. Pendant cette période, elle ne conservait que quelques petits dossiers, qu’elle<br />

faisait en collaboration avec son technicien, monsieur Éric Guénette, avec qui elle<br />

travaillait depuis plus de 12 ans.<br />

[54] Au mois de juin 2007, après 17 ans en pratique privée, elle a quitté Génivar et a<br />

pris six (6) mois d’arrêt complet, s’impliquant dans différents organismes et fondations.<br />

[55] Elle a ensuite expliqué au Conseil qu’elle n’avait pas reparlé <strong>du</strong> dossier <strong>du</strong> mur<br />

de soutènement avec monsieur Éric Guénette depuis le dépôt de la plainte disciplinaire.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 14<br />

[56] Elle a expliqué au Conseil qu’elle ne s’était pas ren<strong>du</strong>e sur le terrain afin de voir<br />

le mur de soutènement. Cependant, elle a précisé que monsieur Guénette y était allé et<br />

qu’il avait rencontré le propriétaire.<br />

[57] À son avis, le mur de soutènement en question n’était pas un ouvrage de grande<br />

hauteur, mais plutôt un ouvrage paysager composé de blocs de béton empilés les uns<br />

sur les autres, qui ne représentaient à son avis aucun danger. Elle a toutefois admis<br />

qu’elle n’avait pas été suffisamment prudente pour ce dossier et qu’elle n’aurait pas dû<br />

accepter de revoir et de sceller les plans <strong>du</strong> mur en question.<br />

[58] Elle a également témoigné qu’elle ne connaissait pas la réglementation<br />

municipale de la Ville de Laval et qu’elle n’avait pas non plus ladite réglementation en<br />

sa possession.<br />

[59] Elle a expliqué que, lorsqu’elle a accepté le mandat à l’été 2000, elle ne savait<br />

pas que le propriétaire avait commis <strong>des</strong> infractions municipales. Tout ce qu’elle savait,<br />

c’est qu’il avait <strong>des</strong> problèmes à faire accepter le plan pour un mur de soutènement.<br />

[60] Elle a précisé qu’elle ne reconnaissait pas son écriture sur le premier plan <strong>du</strong><br />

mur de soutènement, pro<strong>du</strong>it comme pièce SYN-13, ni les <strong>des</strong>sins faisant état de la<br />

pierre 3/4" figurant sur le plan (pièce SYN-14). Elle a toutefois indiqué qu’elle avait<br />

discuté <strong>du</strong> contenu de ces plans avec monsieur Guénette.<br />

[61] L’intimée a reconnu qu’elle avait pris pour acquis les dires de monsieur Dubord<br />

et que, dans le contexte, le mur de soutènement en question ne l’inquiétait pas.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 15<br />

[62] Quant au plan pro<strong>du</strong>it comme pièce SYN-16, elle a souligné qu’elle reconnaissait<br />

l’écriture de monsieur Éric Guénette.<br />

[63] De l’avis de l’intimée, le mur de soutènement en question ne représentait aucun<br />

danger, puisque les blocs de béton restaient bien en place. Elle a toutefois admis que<br />

les attaches <strong>des</strong> dormants étaient peut-être un peu faibles.<br />

[64] Cependant, l’intimée a reconnu son erreur et a souligné qu’il s’agissait d’un <strong>des</strong><br />

derniers dossiers à caractère technique qu’elle avait traités.<br />

[65] À son avis, l’erreur qu’elle a commise était grave, mais elle a expliqué qu’elle<br />

n’avait pas traité de dossiers pratiques depuis. Par conséquent, elle ne représentait pas<br />

de risques de récidive, puisqu’elle avait per<strong>du</strong> «son instinct d’ingénieure»,<br />

<strong>du</strong> fait<br />

qu’elle travaillait surtout en administration depuis plusieurs années.<br />

[66] Elle a expliqué qu’en 2000, elle était très fatiguée, après 17 ans de pratique, tout<br />

en élevant trois (3) enfants. Elle a reconnu qu’elle n’avait pas été assez attentive et<br />

qu’elle ne s’était pas été suffisamment inquiétée pour le projet <strong>du</strong> mur de soutènement.<br />

[67] Contre-interrogée par le procureur <strong>du</strong> plaignant, elle a indiqué qu’elle était<br />

d’accord à plaider coupable à l’ensemble <strong>des</strong> chefs d’infraction et avec les<br />

recommandations de sanctions communes qui avaient été formulées.<br />

[68] Elle a également confirmé qu’elle n’avait pas pris connaissance de la<br />

réglementation municipale concernant les murs de soutènement.<br />

[69] Quant à la lettre <strong>du</strong> 24 octobre 2000 (pièce SYN-15), elle a souligné qu’elle avait<br />

employé le «nous» en faisant référence à Génivar, tout en précisant que monsieur Éric


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 16<br />

Guénette était bel et bien allé voir le mur de soutènement et que celui-ci n’était pas<br />

dangereux.<br />

Représentations sur sanction <strong>du</strong> procureur <strong>du</strong> plaignant<br />

[70] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a expliqué que le Conseil devrait tenir compte de la<br />

globalité <strong>des</strong> peines qui pourraient être imposées à l’intimée, pour <strong>des</strong> actes qu’il a luimême<br />

qualifié d’isolés.<br />

[71] De l’avis <strong>du</strong> procureur <strong>du</strong> plaignant, les sanctions proposées correspondent aux<br />

critères qui ont été établis par la jurisprudence dans ce genre de circonstances.<br />

[72] Il a d’abord référé le Conseil aux ouvrages de doctrine La discipline<br />

professionnelle au <strong>Québec</strong> de Me Sylvie Poirier 4 , de même qu’au Précis de droit<br />

professionnel au <strong>Québec</strong>, publié en 2007 5 .<br />

[73] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a rappelé que l’objectif <strong>du</strong> droit disciplinaire n’était pas<br />

de punir le professionnel, mais de corriger le comportement fautif.<br />

[74] À son avis, l’intimée a réalisé elle-même qu’elle avait commis une erreur dans ce<br />

dossier et comme elle l’a d’ailleurs précisé dans le cadre de son témoignage, elle avait<br />

per<strong>du</strong> «l’instinct d’ingénieure».<br />

[75] Ce faisant, selon lui, elle s’est éloignée elle-même de cet aspect de la pratique,<br />

puisqu’elle a elle-même réalisé qu’elle avait per<strong>du</strong> l’habitude de traiter <strong>des</strong> dossiers<br />

techniques. À son avis, l’intimée s’est donc auto-règlementée en ne prenant plus ce<br />

4<br />

5<br />

Poirier, Sylvie, La discipline professionnelle au <strong>Québec</strong>, Cowansville, Éditions Yvon Blais inc., 1998,<br />

pp. 169 à 177<br />

Villeneuve, J.G., Précis de droit professionnel au <strong>Québec</strong>, Cowansville, Éditions Yvon Blais inc. 2007,<br />

pp. 242 à 258


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 17<br />

genre de dossiers et en admettant qu’elle n’avait plus l’aptitude et les capacités de les<br />

faire.<br />

[76] Le procureur a rappelé que la jurisprudence avait identifié les facteurs objectifs<br />

et subjectifs dont le Conseil devait tenir compte dans la détermination de la sanction<br />

appropriée.<br />

[77] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a rappelé que la protection <strong>du</strong> public était l’élément<br />

essentiel que lui et son client avaient considéré afin de déterminer la sanction<br />

appropriée. Il a rappelé que la protection <strong>du</strong> public était définie à l’article 23 <strong>du</strong> Code<br />

<strong>des</strong> professions et représentait la grande mission de tous les ordres professionnels et,<br />

en particulier, l’<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[78] Il a également souligné que l’intimée jouissait de la qualité de «spécialiste en<br />

génie», puisqu’à la lettre qui a été déposée comme pièce SYN-15, elle signe la viceprésidente<br />

– bâtiment. Or, pour lui, dans les yeux <strong>du</strong> public, cette dénomination est<br />

significative, puisque la personne qui reçoit alors cette information croit qu’elle a affaire<br />

à une spécialiste en matière de bâtiment. D’ailleurs, le procureur a souligné que cette<br />

seule information a sans doute été suffisante puisque, avant l’envoi de cette lettre,<br />

l’émission <strong>du</strong> permis n’avait pas été autorisée.<br />

[79] Par la suite, le certificat approprié avait été émis par la Ville de Laval, en référant<br />

spécifiquement à l’attestation préparée par l’intimée pour le compte de Génivar (pièce<br />

SYN-18).<br />

[80] Le procureur a ensuite souligné qu’à son avis, les infractions commises par<br />

l’intimée étaient <strong>des</strong> actes isolés. Cependant, les agissements de l’intimée ont entraîné


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 18<br />

<strong>des</strong> conséquences considérables pour les propriétaires de l’immeuble, qui ont dû, à<br />

deux reprises à partir de 2001, intenter <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res judiciaires contre Dubord; le tout<br />

ne se réglant finalement qu’en 20<strong>08</strong>.<br />

[81] Selon lui, les propriétaires de l’immeuble ont donc eu beaucoup de problèmes<br />

résultant directement de la signature de complaisance de l’intimée.<br />

[82] À titre de facteur subjectif, le procureur <strong>du</strong> plaignant a rappelé que l’intimée<br />

n’avait pas d’antécédents, qu’elle était une ingénieure d’expérience, qui avait plusieurs<br />

années de pratique et qui jouissait d’une bonne réputation. Il a précisé qu’il était<br />

convaincu que les risques de récidive de l’intimée étaient nuls et qu’elle ne reviendrait<br />

pas devant le Conseil de discipline.<br />

[83] À son avis, la protection <strong>du</strong> public était par conséquent assurée et permettait<br />

même à l’intimée de continuer à travailler.<br />

[84] Il a souligné que l’intimée avait fait preuve d’insouciance, car elle avait admis ne<br />

pas avoir pris connaissance de la réglementation municipale. Il a souligné que les<br />

conséquences pour son client avaient toutefois été importantes, puisque celui-ci avait<br />

été impliqué dans un long processus judiciaire.<br />

[85] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a souligné que l’intimée avait fait preuve de repentir et<br />

qu’elle avait bien collaboré avec le plaignant. De même, le fait qu’elle avait plaidé<br />

coupable lors de la première occasion a empêché la tenue d’une audition longue et a<br />

évité la nécessité de déplacer plusieurs témoins.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 19<br />

[86] Compte tenu de l’admission <strong>des</strong> faits, de l’attitude de l’intimée et de la volonté de<br />

l’intimée de ne plus s’impliquer dans ce genre de dossier, le procureur <strong>du</strong> plaignant<br />

croit, par conséquent, que l’imposition de sanctions monétaires doit être fortement<br />

considérée compte tenu <strong>des</strong> circonstances particulières <strong>du</strong> présent dossier.<br />

[87] Le procureur a référé le Conseil à l’affaire Brosseau 6 . Dans cette affaire, le<br />

Conseil de discipline avait imposé une réprimande et une amende de 1 000,00$ sur les<br />

chefs fondés sur l’article 2.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>. L’ingénieur<br />

Brosseau avait alors plaidé coupable et offert sa collaboration au syndic.<br />

[88] De même, dans les affaires Chartrand 7 , Néron 8 et Moffatt 9 , le Comité de<br />

discipline a imposé à ces <strong>ingénieurs</strong> <strong>des</strong> amen<strong>des</strong> de 1 000,00$ sur les chefs fondés<br />

sur l’article 2.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[89] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a ensuite référé le Conseil à l’affaire Dugré 10 , dont le<br />

premier chef portait spécifiquement sur l’article 3.02.<strong>08</strong> <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong><br />

<strong>ingénieurs</strong>. Dans cette affaire, l’ingénieur Dugré avait émis <strong>des</strong> plans relatifs à un projet<br />

de CLSC déjà construit, afin de corriger une situation préexistante. Dans cette affaire, le<br />

Conseil avait imposé une amende minimale de 600,00$ et une réprimande. En<br />

l’espèce, le procureur est d’avis qu’une amende minimale n’est pas appropriée et<br />

qu’une amende de 1 000,00$ aurait pour effet de mieux corriger le comportement fautif<br />

de l’intimée.<br />

6<br />

7<br />

8<br />

9<br />

10<br />

Tremblay c. Brosseau, CDOIQ (<strong>22</strong>-00-0021), 14 janvier 2002<br />

Khayat c. Chartrand, CDOIQ (<strong>22</strong>-03-0283), 3 mai 2005<br />

Tremblay c. Néron, CDOIQ (<strong>22</strong>-05-0323), 19 mai 2006<br />

Tremblay c. Moffatt, CDOIQ (<strong>22</strong>-06-0326), 4 septembre 2007<br />

Alaurent c. Dugré, CDOIQ (<strong>22</strong>-02-0262), 3 juin 2003


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 20<br />

[90] Se référant ensuite à l’affaire Richard 11 , le procureur <strong>du</strong> plaignant a rappelé que<br />

cet ingénieur avait fait preuve d’un certain laxisme dans sa con<strong>du</strong>ite professionnelle,<br />

dans le cadre de travaux d’installation sceptique. Le Conseil avait imposé, à l’égard <strong>des</strong><br />

chefs faisant référence à l’article 3.05.03 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>, une<br />

amende de 1 000,00$ à laquelle s’ajoutait une réprimande.<br />

[91] Référant ensuite à l’affaire Desaulniers 12 , le procureur <strong>du</strong> plaignant a souligné<br />

que le Conseil avait condamné l’ingénieur à une amende de 2 000,00$ à l’égard <strong>du</strong> chef<br />

n o 3 de la plainte concernant l’article 2.01 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[92] Dans l’affaire Joly 13 , le Conseil avait imposé à l’ingénieur, dans le cadre <strong>des</strong><br />

travaux relatifs au prolongement <strong>du</strong> métro vers Laval, une amende de 4 000,00$ fondée<br />

sur l’article 2.01 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>. Dans l’affaire Chartrand 14 , le<br />

Conseil avait imposé une amende de 5 000,00$, fondée sur ce même article.<br />

[93] Le procureur <strong>du</strong> plaignant a rappelé au Conseil que l’approche qui avait été prise<br />

dans le présent dossier était très globaliste, les amen<strong>des</strong> imposées à l’intimée totalisant<br />

6 000,00$. De plus, l’intimée s’engageait à rembourser l’ensemble <strong>des</strong> déboursés.<br />

[94] Il a rappelé que pour le plaignant, la protection <strong>du</strong> public n’est plus en jeu et les<br />

amen<strong>des</strong> imposées à l’intimée corrigent une situation et évitent ainsi qu’elle se<br />

repro<strong>du</strong>ise.<br />

[95] Pour lui, l’objectif <strong>du</strong> droit disciplinaire est donc atteint et il est convaincu que<br />

l’intimée ne se présentera plus jamais devant le Conseil de discipline.<br />

11<br />

12<br />

13<br />

14<br />

Alaurent c. Richard, CDOIQ (<strong>22</strong>-06-0336), 8 juillet 20<strong>08</strong><br />

Khayat c. Desaulniers, CDOIQ (<strong>22</strong>-04-0289), 18 janvier 2005<br />

Latulippe c. Joly, CDOIQ (<strong>22</strong>-05-0309), 16 décembre 2005<br />

Précitée note 7


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 21<br />

[96] Considérant les plaidoyers de culpabilité de l'intimée, le Conseil a déclaré,<br />

séance tenante, que l’intimée a commis les infractions qui lui sont reprochées sous les<br />

chefs n o 1 et n o 2 <strong>du</strong> paragraphe 1 de la plainte, mais vu la règle prohibant les<br />

condamnations multiples, le Conseil a ordonner une suspension conditionnelle <strong>des</strong><br />

procé<strong>du</strong>res quant au chef n o 1, en regard de l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie<br />

<strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[97] Considérant les plaidoyers de culpabilité de l'intimée, le Conseil a déclaré que<br />

l’intimée a commis les infractions qui lui sont reprochées sous les chefs n o 3 et n o 4 <strong>du</strong><br />

paragraphe 2 de la plainte, mais vu la règle prohibant les condamnations multiples, le<br />

Conseil a ordonner une suspension conditionnelle <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res quant au chef n o 3,<br />

en regard de l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[98] Considérant les plaidoyers de culpabilité de l'intimée, le Conseil a déclaré que<br />

l’intimée a commis les infractions qui lui sont reprochées sous les chefs n o 5 et n o 6 <strong>du</strong><br />

paragraphe 3 de la plainte, mais vu la règle prohibant les condamnations multiples, le<br />

Conseil a ordonner une suspension conditionnelle <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res quant au chef n o 5,<br />

en regard de l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[99] Considérant les plaidoyers de culpabilité de l'intimée, le Conseil a déclaré<br />

l’intimée coupable <strong>des</strong> chefs n os 7 et 8 <strong>du</strong> paragraphe 4 de la plainte disciplinaire.<br />

[100] En résumé, le Conseil a déclaré l’intimée coupable quant aux chefs n os 2, 4, 6, 7<br />

et 8 de la plainte disciplinaire ré-amendée en date <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>.<br />

[101] Les parties ont alors soumis, séance tenante, leurs représentations sur sanction.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : <strong>22</strong><br />

Représentations de la procureure de l’intimée sur sanction<br />

[102] La procureure de l’intimée a rappelé que sa cliente poursuivait une carrière de<br />

haute gestion chez Dessau, depuis quelques années.<br />

[103] Elle a expliqué que les négociations, qu’elle avait eues avec la première<br />

procureure <strong>du</strong> plaignant, avaient été sérieuses et qu’elles s’étaient déroulées selon les<br />

règles établies par la jurisprudence.<br />

[104] La procureure de l’intimée a expliqué que le Conseil devrait considérer les<br />

amen<strong>des</strong> imposées à sa cliente dans leur globalité.<br />

[105] Elle a d’abord référé à la décision Joly 15 , dans laquelle le Conseil avait imposé<br />

une amende de 4 000,00$, fondée sur l’article 2.01 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong><br />

<strong>ingénieurs</strong>. La procureure a souligné que, dans cette affaire, les faits qui avaient<br />

impliqué l’ingénieur Joly étaient extrêmement graves, puisque ce dernier avait omis<br />

d’émettre les avis nécessaires afin de prévenir les projections de pierres suite à un<br />

dynamitage.<br />

[106] Elle a ensuite référé le Conseil à la décision Lefebvre 16 , dans laquelle le Conseil<br />

avait imposé à l’ingénieur une amende de 3000,00$ et une réprimande, pour une<br />

infraction fondée sur l’article 2.01 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>, dans le cadre<br />

d’un projet d’installation d’aque<strong>du</strong>c et d’égouts.<br />

15<br />

16<br />

Précitée note 13<br />

Tremblay c. Lefebvre, CDOIQ (<strong>22</strong>-03-0282), 15 août 2006


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 23<br />

[107] La procureure de l’intimée a ensuite référé le Conseil à la décision Altable 17 .<br />

Dans cette affaire, le Conseil avait condamné l’ingénieur Altable sur cinq (5) chefs de la<br />

plainte et lui avait imposé une amende de 5 000,00$ en regard <strong>des</strong> chefs portant sur<br />

l’article 2.01 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>, relativement à la pose de pieux.<br />

[1<strong>08</strong>] Enfin, la procureure de l’intimée a référé à l’affaire Desaulniers 18 . Encore une<br />

fois, dans cette décision, le Conseil avait condamné l’ingénieur Desaulniers à une<br />

amende de 2 000,00$ à l’égard <strong>du</strong> chef portant sur l’article 2.01 de la plainte, sans<br />

imposer de réprimande.<br />

[109] Enfin, la procureure de l’intimée a rappelé que, dans le jugement de la Cour <strong>du</strong><br />

<strong>Québec</strong> de l’honorable Richard Landry, le juge s’en prenait davantage à monsieur<br />

Dubord qu’à l’intimée. Elle a d’abord souligné que ni l’intimée, ni Génivar n’avaient fait<br />

l’objet d’un appel en garantie dans ce dossier.<br />

[110] D’autre part, elle a souligné que la mise en demeure, de Me Annie Fortin à<br />

Dubord (pièce SYN-19), ne pouvait constituer une preuve à l’effet que les travaux<br />

n’avaient pas été exécutés conformément aux plans préparés par Génivar.<br />

[111] La procureure a rappelé que le Conseil devait considérer, dans le cadre de la<br />

détermination de la sanction en vertu <strong>du</strong> chef fondé sur l’article 2.01 <strong>du</strong> Code de<br />

déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>, que sa cliente croyait avoir affaire à un muret de<br />

paysagement et non à un mur de grande hauteur. Elle a rappelé que sa cliente avait<br />

témoigné à l’effet que ce mur ne semblait pas présenter de dangers pour la population.<br />

17<br />

18<br />

Alaurent c. Altable CDOIQ (<strong>22</strong>-05-0313) 19 mai 2006<br />

Précitée note 12


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 24<br />

Le droit<br />

[112] Le Conseil croit utile de repro<strong>du</strong>ire les articles sur lesquels l’intimée a reconnu sa<br />

culpabilité.<br />

[113] CODE DE DÉONTOLOGIE DES INGÉNIEURS (R.R.Q., c. I-9, r.3)<br />

2.01 Dans tous les aspects de son travail, l’ingénieur doit respecter ses<br />

obligations envers l’homme et tenir compte <strong>des</strong> conséquences de<br />

l’exécution de ses travaux sur l’environnement et sur la vie, la santé et la<br />

propriété de toute personne.<br />

2.04 L’ingénieur ne doit exprimer son avis sur <strong>des</strong> questions ayant trait à<br />

l’ingénierie, que si cet avis est basé sur <strong>des</strong> connaissances suffisantes et<br />

sur d’honnêtes convictions.<br />

3.02.04 L’ingénieur doit s’abstenir d’exprimer <strong>des</strong> avis ou de donner <strong>des</strong> conseils<br />

contradictoires ou incomplets et de présenter ou utiliser <strong>des</strong> plans, devis<br />

et autres documents qu’il sait ambigus ou qui ne sont pas suffisamment<br />

explicites.<br />

3.02.<strong>08</strong> L’ingénieur ne doit pas recourir, ni se prêter à <strong>des</strong> procédés malhonnêtes<br />

ou douteux, ni tolérer de tels procédés dans l’exercice de ses activités<br />

professionnelles.<br />

[114] Le Conseil de discipline de l’<strong>Ordre</strong> <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong> <strong>du</strong> <strong>Québec</strong> tire sa raison d’être<br />

de l’article 23 <strong>du</strong> Code <strong>des</strong> professions. L’Honorable Juge Gonthier a bien fait état de<br />

cette situation en ces termes :<br />

« Depuis déjà plusieurs années, le législateur québécois assujettit l’exercice de<br />

certaines professions à <strong>des</strong> restrictions et à différents mécanismes de contrôle.<br />

Adopté pour la première fois en 1973, le Code <strong>des</strong> professions, L.R.Q., ch. C-36<br />

(C.P.), régit maintenant les 44 ordres professionnels constitués en vertu de la loi.<br />

Il crée un organisme, l’Office <strong>des</strong> professions <strong>du</strong> <strong>Québec</strong>, qui a pour fonction de<br />

veiller à ce que chacun d’eux accomplisse le mandat qui leur est expressément<br />

confié par le Code et qui constitue leur principale raison d’être, assurer la<br />

protection <strong>du</strong> public (art. 12 et 23 C.P.). Dans la poursuite de cet objectif<br />

fondamental, le législateur a accordé aux membres de certaines professions le<br />

droit exclusif de poser certains actes. En effet, en vertu de l’art. 26 C.P., le droit<br />

exclusif d’exercer une profession n’est conféré que dans les cas où la nature <strong>des</strong>


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 25<br />

actes posés par ces personnes et la latitude dont elles disposent en raison de la<br />

nature de leur milieu de travail habituel sont telles qu’en vue de la protection <strong>du</strong><br />

public, ces actes ne peuvent être posés par <strong>des</strong> personnes ne possédant pas la<br />

formation et la qualification requises pour être membres de cet ordre». 19<br />

[115] Dans l’affaire Malouin 20 , le Tribunal <strong>des</strong> professions a établi certains paramètres<br />

qui doivent être respectés lors de recommandations communes :<br />

«10. La Cour d’appel s’est prononcée très récemment sur l’attitude à adopter<br />

lorsque <strong>des</strong> procureurs, après de sérieuses et intenses négociations, présentent<br />

de façon conjointe au tribunal leurs recommandations quant aux sanctions à<br />

imposer.<br />

11. Après avoir écrit:<br />

39. I think it is important to emphasize that the joint submission in this<br />

case was the object of lengthy and detailed negotiations over a<br />

considerable period of time by experienced and conscientious counsel<br />

of both si<strong>des</strong>, (…) and clearly contingent on a plea of guilty by the<br />

appelant.<br />

La Cour d’appel, sous la plume de l’honorable juge Fish, fait un tour d’horizon de<br />

la jurisprudence canadienne sur le sujet et conclut :<br />

«44. Appellate courts, increasingly in recent years, have stated time<br />

and again that trial judges should not reject jointly proposed sentences<br />

unless they are «unreasonable», «contrary to the public interest»,<br />

«unfit», or «would bring the administration of justice into disrepute».<br />

(…)<br />

52. In my view, a reasonable joint submission cannot be said to «bring<br />

the administration of justice into disrepute». An unreasonable joint<br />

submission, on the other hand, is surely «contrary to the public interest».<br />

53. Moreover, I agree with the Martin Report cited earlier, that the<br />

reasonableness of a sentence must necessarily be evaluated in the light<br />

of the evidence, submissions and reports placed on the record before<br />

the sentencing judge (…).» 21<br />

12. En l’instance, le Tribunal n’a aucune raison de croire que la<br />

recommandation commune <strong>des</strong> parties soit déraisonnable, qu’elle porte atteinte<br />

à l’intérêt public ou qu’elle jette un discrédit sur l’administration de la justice.»<br />

19<br />

20<br />

21<br />

Barreau c. Fortin et Chrétien, 2001, 2 R.C.S. 500, paragraphe 11<br />

Malouin c. Laliberté, Tribunal <strong>des</strong> professions, 760-07-000001-010, 2002 QCTP 015<br />

Douglas c. La Reine, C.A.M. 500-10-002149-019, 18 janvier 2002


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 26<br />

[116] Le Conseil partage l’opinion émise par le juge Chamberland de la Cour d’appel,<br />

qui s’exprimait ainsi en regard <strong>des</strong> critères devant guider le Conseil lors de l’imposition<br />

d’une sanction :<br />

« La sanction imposée par le Comité de discipline doit coller aux faits <strong>du</strong> dossier.<br />

Chaque cas est un cas d’espèce.<br />

La sanction disciplinaire doit permettre d’atteindre les objectifs suivants : au<br />

premier chef la protection <strong>du</strong> public, puis la dissuasion <strong>du</strong> professionnel de<br />

récidiver, l’exemplarité à l’égard <strong>des</strong> autres membres de la profession qui<br />

pourraient être tentés de poser <strong>des</strong> gestes semblables et enfin, le droit par le<br />

professionnel visé d’exercer sa profession (Latulippe c. Léveillé, <strong>Ordre</strong><br />

professionnel <strong>des</strong> médecins) [1998] D.D.O.P., 311 ; Dr J.C. Paquette c. Comité<br />

de discipline de la Corporation professionnelle <strong>des</strong> médecins <strong>du</strong> <strong>Québec</strong> et al,<br />

[1995] R.D.J. 301 (C.A.) ; et R. c. Burns, [1944] 1 R.C.S. 656).<br />

Le Comité de discipline impose la sanction après avoir pris en compte tous les<br />

facteurs, objectifs et subjectifs, propres au dossier. Parmi les facteurs objectifs,<br />

il faut voir si le public est affecté par les gestes posés par le professionnel, si<br />

l’infraction retenue contre le professionnel a un lien avec l’exercice de la<br />

profession, si le geste posé constitue un acte isolé ou un geste répétitif, …<br />

Parmi les facteurs subjectifs, il faut tenir compte de l’expérience, <strong>du</strong> passé<br />

disciplinaire et de l’âge <strong>du</strong> professionnel, de même que sa volonté de corriger<br />

son comportement. La délicate tâche <strong>du</strong> Comité de discipline consiste donc à<br />

décider d’une sanction qui tienne compte à la fois <strong>des</strong> principes applicables en<br />

matière de droit disciplinaire et de toutes les circonstances, aggravantes et<br />

atténuantes, de l’affaire.» <strong>22</strong><br />

[117] Le Conseil souligne qu’il n’est pas lié par les recommandations <strong>des</strong> parties, s’il<br />

en vient à la conclusion que celles-ci sont déraisonnables et contraires à l’intérêt public.<br />

D’ailleurs, le Tribunal <strong>des</strong> professions s’exprimait ainsi dans l’affaire Normand :<br />

« Quant à l’argument de l’appelant concernant le fait que le comité a erronément et<br />

sans justification légale omis de retenir les recommandations <strong>des</strong> parties, rappelons<br />

comme l’allègue l’intimé que le comité n’est aucunement lié par de telles<br />

recommandations. Si le comité y donnait suite en dépit de la gravité <strong>des</strong> infractions,<br />

lesquelles justifieraient par ailleurs <strong>des</strong> sanctions plus sévères que celles<br />

suggérées, le Tribunal devrait alors conclure que dans de telles circonstances, le<br />

comité n’a pas exercé judiciairement son pouvoir discrétionnaire.» 23<br />

<strong>22</strong><br />

23<br />

Pigeon c. Daigneault, C.A.,15 avril 2003<br />

Normand c. <strong>Ordre</strong> professionnel <strong>des</strong> médecins, 1996 D.D.O.P. 234


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 27<br />

DÉCISION<br />

[118] L’intimée a plaidé coupable à <strong>des</strong> actes dérogatoires qui sont graves et qui<br />

touchent l’essence même de la profession. Les gestes qui lui sont reprochés sont, en<br />

effet, sérieux.<br />

[119] Le Conseil a pris en considération que l’intimée a avoué sa culpabilité à la<br />

première occasion.<br />

[120] Le Conseil souligne toutefois que c’est bien tardivement que celle-ci semble<br />

avoir compris la gravité <strong>des</strong> gestes qui lui étaient reprochés.<br />

[121] De l’avis <strong>du</strong> Conseil, l’attitude manifestée par l’intimée lors de l’audition fait en<br />

sorte que les membres doutent également de son repentir.<br />

[1<strong>22</strong>] Cependant, le Conseil doit prendre en considération les représentations et les<br />

suggestions communes sur la sanction lorsque celles-ci sont justes et raisonnables.<br />

[123] Le Conseil rappelle que son rôle n’est pas de punir la professionnelle, mais de<br />

s’assurer que les sanctions ont un effet dissuasif, dans un objectif de protection <strong>du</strong><br />

public.<br />

[124] L’ensemble <strong>des</strong> amen<strong>des</strong> imposées à l’intimée totalisent la somme de<br />

6 000,00$.<br />

[125] Le Conseil, après avoir analysé les faits <strong>du</strong> présent dossier et pris en<br />

considération les remarques pertinentes <strong>du</strong> procureur <strong>du</strong> plaignant et de la procureure<br />

de l’intimée, est d’opinion que les recommandations qui lui sont soumises sont justes et<br />

équitables dans les circonstances.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 28<br />

[126] Elles ont le mérite d’avoir un effet dissuasif auprès de l’intimée, tout en<br />

rencontrant les objectifs d’exemplarité pour la profession et pour la protection <strong>du</strong> public.<br />

[127] Le Conseil a aussi analysé la jurisprudence concernant les sanctions ren<strong>du</strong>es<br />

antérieurement dans <strong>des</strong> dossiers ayant <strong>des</strong> éléments analogues. Or, ces suggestions<br />

communes sont justes et appropriées dans les circonstances, tout en étant conformes<br />

aux autorités citées par les procureurs <strong>des</strong> parties.<br />

PAR CES MOTIFS, LE CONSEIL DE DISCIPLINE DE L’ORDRE DES INGÉNIEURS :<br />

[128] DÉCLARE que l’intimée a commis les infractions qui lui sont reprochées sous le<br />

chef n o 1 contenu au paragraphe 1 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>, mais vu la<br />

règle prohibant les condamnations multiples, ORDONNE une suspension conditionnelle<br />

<strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res en regard de l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie <strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[129] DÉCLARE l’intimée coupable <strong>du</strong> chef d’accusation n o 2 contenu au paragraphe<br />

1 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>.<br />

[130] DÉCLARE que l’intimée a commis l’infraction qui lui est reprochée sous le chef<br />

d’accusation n o 3 contenu au paragraphe 2 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>,<br />

mais vu la règle prohibant les condamnations multiples, ORDONNE une suspension<br />

conditionnelle <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res en regard de l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie<br />

<strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[131] DÉCLARE l’intimée coupable <strong>du</strong> chef d’accusation n o 4 contenu au paragraphe<br />

2 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 29<br />

[132] DÉCLARE que l’intimée a commis l’infraction qui lui est reprochée sous le chef<br />

d’accusation n o 5 contenu au paragraphe 3 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>,<br />

mais vu la règle prohibant les condamnations multiples, ORDONNE une suspension<br />

conditionnelle <strong>des</strong> procé<strong>du</strong>res en regard de l’article 3.02.04 <strong>du</strong> Code de déontologie<br />

<strong>des</strong> <strong>ingénieurs</strong>.<br />

[133] DÉCLARE l’intimée coupable <strong>du</strong> chef d’accusation n o 6 contenu au paragraphe<br />

3 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>.<br />

[134] DÉCLARE l’intimée coupable <strong>du</strong> chef d’accusation n o 7 contenu au paragraphe<br />

4 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>.<br />

[135] DÉCLARE l’intimée coupable <strong>du</strong> chef d’accusation n o 8 contenu au paragraphe<br />

4 de la plainte ré-amendée <strong>du</strong> 28 mai 20<strong>08</strong>.<br />

[136] IMPOSE à l’intimée une amende de 1 000,00$ sur le chef n o 2.<br />

[137] IMPOSE à l’intimée une amende de 1 000,00$ sur le chef n o 4.<br />

[138] IMPOSE à l’intimée une amende de 1 000,00$ sur le chef n o 6.<br />

[139] IMPOSE à l’intimée une amende de 1 000,00$ sur le chef n o 7.<br />

[140] IMPOSE à l’intimée une amende de 2 000,00$ sur le chef n o 8.<br />

[141] CONDAMNE l’intimée au paiement <strong>des</strong> déboursés.


<strong>22</strong>-<strong>08</strong>-<strong>0360</strong> PAGE : 30<br />

__________________________________<br />

Me Jean-Guy Légaré, Président<br />

Me Suzanne Lamarre, ing., Membre<br />

Mme Françoise Poliquin, ing., Membre<br />

Me Charles Dupuis<br />

Procureur de la partie plaignante<br />

Me Anne-Marie Williams<br />

Procureure de la partie intimée<br />

Date d’audience : 3 février 2009

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