Cosmétique naturelle ? Mais quel « naturel » ? - Rebelle-Santé
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Cosmétiques<br />
Cosmétique <strong><strong>naturel</strong>le</strong> ?<br />
<strong>Mais</strong> <strong>quel</strong> « <strong>naturel</strong> » ?<br />
Qu’est-ce qu’un cosmétique <strong>naturel</strong> ?<br />
Qu’entend-on par « ingrédient <strong>naturel</strong> » ?<br />
Quelle différence y a-t-il avec un ingrédient « d’origine <strong><strong>naturel</strong>le</strong> » ?<br />
Comment faut-il comprendre cette « origine » ?<br />
Bref, en cosmétique, de <strong>quel</strong> <strong>naturel</strong> parlons-nous ?<br />
P L’eau<br />
Elle est évidemment <strong><strong>naturel</strong>le</strong>. Ce qui<br />
ne suffit pas forcément à la définir<br />
puisqu’elle doit satisfaire à des<br />
critères de pureté pour être utilisée<br />
en cosmétique, et peut provenir<br />
d’origines différentes : elle peut ainsi<br />
être tout juste potable, thermale,<br />
obtenue par osmose, distillée…<br />
© joanna wnuk - Fotolia.com<br />
Cela peut paraître étonnant au<br />
moment où elle envahit les<br />
rayons de nos magasins et se<br />
revendique haut et fort sur les étiquettes,<br />
mais il n’existe toujours pas<br />
de définition officielle de la cosmétique<br />
<strong><strong>naturel</strong>le</strong>. Seul un texte élaboré<br />
en 2000 par un Comité d’experts<br />
européens en trace les grandes lignes,<br />
mais sans entrer réellement dans les<br />
détails, et les principes qu’il énonce<br />
n’ont pas force de loi.<br />
Ce sont les différents organismes qui<br />
gèrent les labels « <strong>naturel</strong>s et bio » ou<br />
les fabricants eux-mêmes à titre individuel<br />
qui se sont donc chargés d’élaborer<br />
des critères pouvant servir de<br />
référence. La mention n’est donc pas<br />
réellement réglementée, et peut ainsi<br />
recouvrir des réalités assez diverses.<br />
Les ingrédients<br />
<strong>naturel</strong>s<br />
Un ingrédient <strong>naturel</strong> est un produit<br />
végétal, minéral ou animal, provenant<br />
directement de la production<br />
agricole, de l’exploitation ou de la<br />
cueillette sauvage, et a priori non<br />
transformé.<br />
Une précision qui amène immédiatement<br />
une nuance : il n’existe quasiment<br />
pas, dans la nature, de substances<br />
que l’on puisse utiliser telles<br />
<strong>quel</strong>les dans les cosmétiques. Des<br />
procédés de transformation simples<br />
mais indispensables (comme le<br />
broyage ou le filtrage, par exemple)<br />
sont donc considérés comme n’affectant<br />
pas le caractère <strong>naturel</strong>.<br />
P Les minéraux<br />
Si l’on excepte ceux qui sont<br />
dérivés d’hydrocarbures fossiles, les<br />
ingrédients d’origine minérale sont<br />
considérés comme faisant partie<br />
des ressources <strong><strong>naturel</strong>le</strong>s. Ils sont<br />
utilisés principalement sous forme<br />
de poudres ou pour leurs propriétés<br />
colorantes.<br />
Attention, « <strong>naturel</strong> » ici ne traduit<br />
pas systématiquement un engagement<br />
écologique : les procédés d’extraction<br />
de ces matières premières,<br />
d’autre part non renouvelables, ne<br />
sont pas forcément toujours très respectueuses<br />
de l’environnement…<br />
P Les productions animales<br />
Œufs, lait, miel, cire d’abeille…<br />
ou encore bave d’escargot (ne<br />
sursautez pas, certains cosmétiques<br />
l’utilisent en tant qu’actif !) sont<br />
autant d’ingrédients <strong>naturel</strong>s que l’on<br />
peut prélever sans porter atteinte aux<br />
animaux qui les produisent.<br />
<strong>Mais</strong> la mention d’ingrédient <strong>naturel</strong><br />
peut concerner aussi bien le suif de<br />
bœuf – utilisé dans un savon ou un<br />
émulsifiant – que l’acide stéarique<br />
issu de la graisse de l’animal… qui<br />
nécessitent obligatoirement la mort<br />
de l’animal pour être prélevés.<br />
24
Laurence Wittner<br />
Les ingrédients<br />
d’origine <strong><strong>naturel</strong>le</strong><br />
Même un œuf a besoin d’être cassé<br />
pour qu’une partie puisse être intégrée<br />
dans une formule cosmétique. Et<br />
il faut bien prévoir un procédé<br />
d’extraction si c’est son albumine<br />
ou ses protéines seules qu’on veut<br />
utiliser.<br />
Il en est de même des ingrédients<br />
végétaux. Quasiment aucun ne peut<br />
être employé tel <strong>quel</strong>. Une fleur, une<br />
graine, une écorce de fruit… doivent<br />
être obligatoirement transformées<br />
pour que l’on puisse obtenir un<br />
extrait, une huile végétale ou une<br />
huile essentielle…<br />
C’est ainsi que pour les ingrédients<br />
végétaux, la seule revendication possible<br />
est celle d’une « origine <strong><strong>naturel</strong>le</strong><br />
». <strong>Mais</strong> il y a origine et origine,<br />
et certaines sont bien plus lointaines<br />
que d’autres… Les procédés de<br />
transformation des matières premières<br />
brutes, pour indispensables<br />
qu’ils soient, peuvent être, en effet,<br />
de natures assez différentes.<br />
P Les procédés de transformation<br />
« <strong>naturel</strong>s »<br />
Il est indispensable de presser un fruit<br />
pour obtenir son jus, de broyer des<br />
noyaux (par exemple d’abricot) pour<br />
servir de base à un exfoliant… mais<br />
ce sont là des transformations simples,<br />
de type mécaniques ou physiques, qui<br />
n’affectent pas le caractère <strong>naturel</strong> de<br />
l’ingrédient.<br />
Parmi les procédés considérés comme<br />
<strong>naturel</strong>s, on peut citer les pressage,<br />
concassage, broyage, distillation,<br />
filtration, centrifugation, décoction,<br />
infusion, macération, fermentation…<br />
P Les procédés de transformation<br />
complexes<br />
D’autres procédés sont bien plus élaborés,<br />
relevant de la chimie, de la technologie<br />
ou faisant appel à la synthèse.<br />
Il en est ainsi des estérification, hydrogénation,<br />
sulfatation, alkylation,<br />
éthoxylation… et de bien d’autres<br />
encore.<br />
Que penser de la mention « origine<br />
<strong><strong>naturel</strong>le</strong> » dans ce cas ? Certes,<br />
littéralement parlant, elle n’est pas<br />
fausse… mais elle est très certainement<br />
de nature à induire le consommateur<br />
en erreur sur les caractéristiques<br />
réelles de l’ingrédient.<br />
Prenons l’exemple du Sodium laureth<br />
sulfate. Ce tensioactif assez largement<br />
utilisé dans les gels douche et<br />
les shampooings peut effectivement<br />
avoir une « origine <strong><strong>naturel</strong>le</strong> » s’il est<br />
issu d’une base d’huile de coco. <strong>Mais</strong><br />
son processus de fabrication comprend<br />
aussi l’éthoxylation, réaction<br />
chimique polluante consistant en un<br />
greffage de molécules d’oxyde d’éthylène<br />
(gaz très réactif et toxique) sur la<br />
matière première de base, à très fortes<br />
températures et sous haute pression.<br />
Que reste-t-il de « <strong>naturel</strong> » après un<br />
tel traitement ?<br />
Flous et pièges <strong>naturel</strong>s<br />
Les mentions « <strong>naturel</strong> » et « d’origine<br />
<strong><strong>naturel</strong>le</strong> » sont déjà à décoder correctement<br />
pour être bien comprises. Elles<br />
sont de plus « polluées » par une série<br />
d’amalgames et d’idées reçues qui<br />
perturbent souvent leur bonne appréciation.<br />
Quelques exemples :<br />
P C’est <strong>naturel</strong>, donc c’est bon<br />
La mention « <strong>naturel</strong> » s’inscrit dans<br />
une mouvance actuellement très<br />
porteuse sur le marché des cosmétiques<br />
(le <strong>naturel</strong> et le biologique) et sousentend<br />
une composition végétale, par<br />
opposition aux ingrédients d’origine<br />
synthétique souvent décriés pour leur<br />
potentiel polluant et leur risque de<br />
toxicité. C’est en tout cas souvent ainsi<br />
qu’elle est comprise, implicitement,<br />
par le consommateur... Et le fabricant<br />
qui appose le mot « <strong>naturel</strong> » sur<br />
l’étiquette de son produit nous<br />
envoie ainsi un message : « Voici<br />
un cosmétique sans danger pour<br />
l’environnement et pour votre santé ».<br />
Ce n’est pas toujours vrai,<br />
évidemment. Une amanite phalloïde<br />
est tout ce qu’il y a de plus <strong>naturel</strong>,<br />
mais la consommation de ce<br />
champignon vénéneux, cause<br />
d’empoisonnements mortels, n’en est<br />
pas moins unanimement déconseillée.<br />
Toutes proportions gardées, il en est de<br />
même en cosmétique : certains actifs<br />
<strong>naturel</strong>s peuvent être déconseillés<br />
dans certains cas, ou se révéler<br />
allergisants…<br />
P C’est <strong>naturel</strong>, donc c’est bio<br />
Ce n’est pas forcément vrai non<br />
plus. Si les labels bio garantissent<br />
des « origines <strong><strong>naturel</strong>le</strong>s » plus<br />
importantes que les cosmétiques<br />
classiques, les ingrédients végétaux<br />
des cosmétiques dits « <strong>naturel</strong>s »<br />
ne sont pas forcément issus de<br />
l’agriculture biologique. Une huile<br />
de jojoba sera toujours d’origine<br />
<strong><strong>naturel</strong>le</strong>, qu’elle soit bio ou non.<br />
P C’est « <strong>naturel</strong>-identique », donc<br />
c’est <strong>naturel</strong><br />
Attention, le « <strong>naturel</strong>-identique »<br />
n’est autre que du... réel-synthétique.<br />
Il faut aussi parfois appeler un chat<br />
un chat et la copie d’une molécule<br />
<strong><strong>naturel</strong>le</strong> recréée en laboratoire… un<br />
ingrédient de synthèse. Ça ressemble<br />
au <strong>naturel</strong>, peut-être, mais ça n’en est<br />
pas. Même si cela permet à certains<br />
de se revendiquer 100 % <strong>naturel</strong>s, en<br />
jouant sur l’ambiguïté du concept…<br />
Moralité ? Pour départager le vrai<br />
du faux et le <strong>naturel</strong> de la copie, le<br />
consommateur doit rester vigilant…<br />
<strong><strong>naturel</strong>le</strong>ment !<br />
Laurence Wittner<br />
Suite p. 26<br />
BS N° 132 - Février 2011 25
cosmétiques<br />
Z comme…<br />
La dernière lettre de l’alphabet ! Qui est aussi la première de <strong>quel</strong>ques ingrédients cosmétiques… Suite de<br />
notre dictionnaire explicatif pour en savoir chaque mois un peu plus sur ce que renferment réellement nos<br />
produits d’hygiène et de beauté.<br />
Retrouvez tous les ingrédients cosmétiques et leurs fiches d’identité sur www.observatoiredescosmetiques.com.<br />
Zea mays starch : Amidon de maïs<br />
Vous le connaissez bien dans votre cuisine où il prend le nom de<br />
fécule, allège vos gâteaux et lie vos sauces. L’amidon de maïs<br />
a aussi ses fonctions cosmétiques, et elles sont nombreuses.<br />
• SON rôle. Cette poudre blanche peut intervenir en<br />
tant qu’agent abrasif dans les gommages ou absorbant dans<br />
les déodorants ou les produits de soins pour peaux grasses.<br />
Antiagglomérant, il permet aussi d’ajuster la viscosité de la<br />
texture des crèmes et des gels. Sa forme poudrée le fait aussi<br />
fréquemment servir de base aux produits de maquillage, fards à<br />
paupières, blushes et bien sûr, poudres.<br />
• SON ORIGINE. La levure est un champignon (c’est principalement le Saccharomyces cerevisiae qui est utilisé<br />
en cosmétique) à classer, donc, dans les micro-organismes d’origine végétale.<br />
• À SAVOIR. L’amidon de maïs peut être responsable d’allergies alimentaires, même si elles sont assez rares. <strong>Mais</strong><br />
il ne semble pas que cette caractéristique se retrouve en cas<br />
d’application cutanée, et cet ingrédient est aussi connu pour<br />
sa douceur sur la peau.<br />
Zinc oxide : Oxyde de zinc<br />
Il est <strong>naturel</strong>, mais pas à l’abri de <strong>quel</strong>ques polémiques…<br />
même s’il est agréé par tous les labels bio.<br />
• SON rôle. L’oxyde de zinc connaît trois applications De l’oxyde de zinc dans une crème de change pour bébé, où il<br />
principales en cosmétique. Il représente un actif majeur joue le rôle d’assainissant...<br />
des crèmes de change pour bébé du fait de ses propriétés<br />
antiseptiques et réparatrices de l’épiderme. C’est aussi, avec le dioxyde de<br />
titane, un écran anti-UV très largement employé dans les crèmes solaires<br />
bio. Ce pigment blanc, utilisé sous forme de poudre, peut enfin intégrer<br />
nombre de produits de maquillage.<br />
• SON ORIGINE. Il est issu du règne minéral.<br />
• À SAVOIR. Si l’oxyde de zinc semble sans risque pour la santé<br />
humaine (il n’est dangereux que s’il est ingéré en grande quantité), il est<br />
avéré en revanche qu’il n’est pas dénué de toxicité pour les organismes<br />
aquatiques (forcément touchés à un moment ou à un autre si l’on se<br />
baigne enduit de crème solaire…). <strong>Mais</strong> le principal risque associé à<br />
son utilisation résiderait dans sa réduction à la taille de nanoparticules,<br />
technique utilisée pour éviter le « film blanc » classique des solaires<br />
bio, assez inesthétique et très peu apprécié des consommateurs. Des<br />
études préliminaires montrent que ces particules de taille inférieure à un<br />
milliardième de mètre pourraient être, elles, fortement toxiques. D’une<br />
Dans cette crème de change pour bébé, l’amidon de maïs<br />
est utilisé pour ses propriétés absorbantes et sa très bonne<br />
tolérance.<br />
… et en association avec le dioxyde de titane,<br />
dans une crème solaire garantie « sans nanoparticules<br />
».<br />
part, leur photoactivité (réaction à la lumière) produit des radicaux libres pouvant endommager l’ADN de la peau.<br />
D’autre part, on les suspecte de pouvoir pénétrer assez facilement à l’intérieur de l’organisme (notamment par le biais<br />
des petites lésions de la peau : eczéma, micro-coupures…) : leurs incidences sur la santé, dans ce cas, sont alors en<br />
grande partie inconnues mais elles inquiètent, car on sait que la taille très réduite des nanoparticules les rend d’autant<br />
plus réactives à leur environnement. <strong>Mais</strong> on a toujours le choix (et de plus en plus fréquemment dans les solaires<br />
bio) du « sans nanoparticules »…<br />
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