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Ludovic BERTHELOT Étude de phases lipidiques par RMN du 31P ...

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DEA <strong>de</strong> biophysique moléculaire<br />

Universités Paris VI, Paris VII, Paris XIII, Orléans<br />

École Centrale<br />

rapport <strong>de</strong> stage présenté <strong>par</strong><br />

<strong>Ludovic</strong> <strong>BERTHELOT</strong><br />

<strong>Étu<strong>de</strong></strong> <strong>de</strong> <strong>phases</strong> <strong>lipidiques</strong> <strong>par</strong> <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P.<br />

Recouplage <strong>de</strong> l'anisotropie <strong>du</strong><br />

déplacement chimique.<br />

Travail effectué sous la direction <strong>du</strong> Pr. Philippe DEVAUX<br />

UPR 9052<br />

Laboratoire <strong>de</strong> physico-chimie moléculaire <strong>de</strong>s membranes biologiques<br />

année scolaire 1998-1999


Remerciements<br />

A<br />

u vu <strong>du</strong> déroulement <strong>de</strong> ce stage, il est difficile d'éviter <strong>de</strong> faire <strong>de</strong>ux fois plus <strong>de</strong><br />

remerciements qu'à l'habitu<strong>de</strong>. Même si le laboratoire <strong>de</strong> rattachement était l'IBPC (Institut<br />

<strong>de</strong> Biologie Physico-Chimique, 13 rue P&M Curie, 75005), une gran<strong>de</strong> <strong>par</strong>tie <strong>de</strong>s recherches s'est en<br />

effet déroulée dans le laboratoire <strong>de</strong> <strong>RMN</strong> <strong>de</strong> l'ENS (École Normale Supérieure, 24 rue Lhomond,<br />

75005), qui abrite le spectromètre <strong>de</strong> l'IBPC.<br />

Mes premiers remerciements iront au Pr. Philippe Devaux, qui a dirigé ces recherches en me<br />

communiquant son enthousiasme tout en me ménageant une relative autonomie, ainsi qu'à Dror<br />

Warschawski, qui m'a encadré pendant ces cinq mois avec autant <strong>de</strong> disponibilité que d'efficacité.<br />

Je n'oublierai pas non plus d'associer à ces remerciements le Pr. Geoffrey Bo<strong>de</strong>nhausen, pour la<br />

qualité <strong>de</strong> ses conseils autant que l'intérêt <strong>de</strong> ses séminaires.<br />

Mon passé <strong>de</strong> chimiste n'aurait pas été aussi bien mis à profit sans la patience et la gentillesse <strong>de</strong><br />

Paulette Hervé. Quant à ma conversion à la biologie expérimentale, c'est à Sophie Cribier que je la<br />

dois, pour ses conseils en matière <strong>de</strong> pré<strong>par</strong>ation sanguine.<br />

Enfin, que Patricia Sépulcri, Mounir Traïkia, Mohamed Triba, Laurent Catoire, Fabien Ferrage,<br />

Jean Pierre Duneau, Michaël Deschamps, et quelques autres que j'oublie <strong>de</strong> citer, soient remerciés<br />

d'avoir fait régner au sein <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux labos une ambiance autant studieuse que chaleureuse, mais<br />

toujours source d'émulation, et qui fait que l'on peut dire <strong>de</strong> ce stage que c'est une expérience réussie.


Table <strong>de</strong>s matières<br />

Intro<strong>du</strong>ction 1<br />

Chapitre 1 : Éléments théoriques<br />

I. Les lipi<strong>de</strong>s<br />

A. Qu'est-ce qu'un lipi<strong>de</strong>? 2<br />

B. Les phospholipi<strong>de</strong>s 2<br />

C. Le polymorphisme lipidique 4<br />

D. La membrane biologique : exemple <strong>de</strong>s érythrocytes 5<br />

II. La <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P appliquée aux lipi<strong>de</strong>s<br />

A. Pertinence <strong>de</strong> l'étu<strong>de</strong> <strong>par</strong> <strong>RMN</strong> 6<br />

B. Rappels <strong>de</strong> <strong>RMN</strong> 6<br />

C. La <strong>RMN</strong> en ban<strong>de</strong> large <strong>du</strong> 31 P dans les phospholipi<strong>de</strong>s<br />

1. Les interactions dominantes 7<br />

2. CSA et profil <strong>de</strong> raies 8<br />

D. L'effet <strong>de</strong> la rotation<br />

1. Moyennage <strong>du</strong> CSA 11<br />

2. Impulsions <strong>de</strong> 180° synchronisées avec la rotation 12<br />

E. Le recouplage <strong>de</strong> l'anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique<br />

1. Utilité <strong>de</strong> la technique <strong>de</strong> recouplage dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s 14<br />

2. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> Tycko 14<br />

Chapitre 2 : Matériels et métho<strong>de</strong>s<br />

I. Pré<strong>par</strong>ation <strong>de</strong>s échantillons<br />

A. Les pré<strong>par</strong>ations <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s hydratés 17<br />

B. Les fantômes <strong>de</strong> globules rouges 17<br />

II. Utilisation <strong>de</strong> l’ap<strong>par</strong>eil <strong>de</strong> <strong>RMN</strong><br />

A. Description <strong>du</strong> matériel 18<br />

B. Mise en œuvre <strong>de</strong>s spectres <strong>de</strong> <strong>RMN</strong> 21<br />

Chapitre 3 : Résultats et discussion<br />

I. Mise au point sur un lipi<strong>de</strong>, la DMPC 20<br />

II. Les résultats sur le mélange ternaire 22<br />

III. Discussion <strong>de</strong>s résultats précé<strong>de</strong>nts 25<br />

IV. Une extension à un système biologique : les fantômes <strong>de</strong> globules rouges 25<br />

Conclusions et perspectives 27<br />

Références 28<br />

Annexe 1 29


Intro<strong>du</strong>ction<br />

P<br />

armi les différentes molécules ou macromolécules <strong>du</strong> vivant, protéines solubles et aci<strong>de</strong>s nucléiques<br />

sont très étudiés, et, à ce titre, <strong>de</strong> mieux en mieux décrits structurellement. Au contraire, les lipi<strong>de</strong>s<br />

–mais il en va <strong>de</strong> même <strong>de</strong>s sucres, <strong>par</strong> exemple– sont encore sources <strong>de</strong> nombreuses interrogations. Si leur<br />

rôle cellulaire ne fait aucun doute, si la <strong>de</strong>scription d’une membrane cellulaire en terme <strong>de</strong> bicouche lipidique<br />

est acceptée, on ne s’explique toujours pas leur si gran<strong>de</strong> diversité, pas plus que <strong>de</strong>s processus comme la<br />

fusion membranaire. Par ailleurs, les protéines membranaires, autres molécules essentielles à la membrane,<br />

ont <strong>de</strong>s interactions avec les lipi<strong>de</strong>s qui sont encore méconnues : il est simplificateur <strong>de</strong> dire que les lipi<strong>de</strong>s<br />

auraient un rôle purement structural, alors que les protéines n’auraient qu’un rôle fonctionnel au sein <strong>de</strong> la<br />

cellule.<br />

Une classe importante <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s est celle <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s, qui possè<strong>de</strong>nt tous un groupe phosphate. La<br />

résonance magnétique nucléaire (<strong>RMN</strong>) <strong>du</strong> phosphore-31 ( 31 P) est une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> choix dans la<br />

reconnaissance <strong>de</strong>s <strong>phases</strong> <strong>de</strong> phospholipi<strong>de</strong>s, et plus généralement dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s systèmes membranaires.<br />

Elle est complémentaire <strong>de</strong> diverses autres techniques, comme la diffraction <strong>de</strong>s rayons-X ou la résonance<br />

<strong>par</strong>amagnétique électronique (RPE). En solution organique, on peut ainsi différencier chaque phospholipi<strong>de</strong><br />

selon le déplacement chimique <strong>du</strong> 31 P, noyau <strong>de</strong> spin ½, d’abondance naturelle 100%, ainsi que <strong>de</strong> sensibilité<br />

assez élevée. De nombreuses revues sur la <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s membranes ont été réalisées. On<br />

pourra <strong>par</strong> exemple se référer à la présentation <strong>de</strong> Yeagle (Yeagle, 1993) dans l’Encyclopédie <strong>de</strong> la <strong>RMN</strong>.<br />

Comme on le détaillera <strong>par</strong> la suite, le spectre statique <strong>du</strong> phosphore-31 d’un phospholipi<strong>de</strong> a une allure<br />

caractéristique <strong>de</strong> sa phase. On <strong>par</strong>le <strong>de</strong> spectre large ban<strong>de</strong>, car le pic d’absorption associé s’étend sur<br />

plusieurs dizaines <strong>de</strong> ppm. L’asymétrie <strong>de</strong> ce spectre est alors le reflet <strong>de</strong> l’interaction dominante en <strong>RMN</strong> <strong>du</strong><br />

31 P, l’anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique. Mais dès que l’on a affaire à un mélange <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s, la<br />

reconnaissance <strong>du</strong> profil <strong>du</strong> spectre est compliquée <strong>par</strong> la superposition <strong>de</strong> chacun <strong>de</strong>s profils <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s.<br />

C’est pour sé<strong>par</strong>er ces profils selon les lipi<strong>de</strong>s présents dans le mélange –un spectre pour un lipi<strong>de</strong> et non<br />

plus une superposition <strong>de</strong> spectres pour le mélange <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s– que la notion <strong>de</strong> recouplage est utile. Comme<br />

on le verra, les spectres obtenus <strong>par</strong> recouplage <strong>de</strong> l’anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique ont <strong>de</strong>ux<br />

dimensions, une selon laquelle on sé<strong>par</strong>e les lipi<strong>de</strong>s présents selon leur tête polaire, une autre selon laquelle<br />

on peut lire le profil large ban<strong>de</strong> typique <strong>de</strong> la phase lipidique.<br />

Le but <strong>de</strong> ce stage a donc consisté en la mise au point d’une nouvelle technique d’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> système<br />

membranaire. Ce rapport qui en rend compte doit donc tout d’abord présenter les bases théoriques<br />

nécessaires à la compréhension <strong>de</strong> la technique développée. Après une brève présentation <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s et <strong>du</strong><br />

polymorphisme lipidique, on s’attar<strong>de</strong>ra sur la <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P, qu’il s’agisse <strong>de</strong> spectres large ban<strong>de</strong> ou haute<br />

résolution <strong>par</strong> la technique <strong>de</strong> rotation à l’angle magique, dans le but <strong>de</strong> préciser l’intérêt et le<br />

fonctionnement <strong>de</strong> la technique <strong>du</strong> recouplage. Avant <strong>de</strong> présenter les résultats obtenus et <strong>de</strong> les discuter, on<br />

décrira préalablement les protocoles expérimentaux propres aux échantillons <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s utilisés, ainsi que les<br />

ap<strong>par</strong>eils requis pour la spectroscopie <strong>de</strong> <strong>RMN</strong>.<br />

1


Chapitre 1<br />

Éléments théoriques<br />

D<br />

ans ce chapitre, nous détaillerons les bases théoriques <strong>de</strong>s expériences que nous avons réalisées.<br />

Après une présentation <strong>du</strong> mon<strong>de</strong> <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s, nous nous attar<strong>de</strong>rons surtout sur la<br />

spécificité <strong>de</strong> la <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P dans ces lipi<strong>de</strong>s, afin <strong>de</strong> <strong>par</strong>venir à expliquer la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> recouplage <strong>de</strong><br />

l’anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique.<br />

I. Les lipi<strong>de</strong>s<br />

A. Qu’est-ce qu’un lipi<strong>de</strong> ?<br />

Les lipi<strong>de</strong>s sont <strong>de</strong> petites molécules insolubles et amphiphiles. A ce titre, ils possè<strong>de</strong>nt une tête<br />

hydrophile et une queue hydrophobe, qui leur permettent <strong>de</strong> s’auto-assembler en structures en couches voire<br />

en bicouches. Cette structure en bicouche est la base <strong>de</strong>s membranes cellulaires. Ainsi, une caractéristique<br />

commune à tous les lipi<strong>de</strong>s est leur rôle fonctionnel au sein <strong>de</strong>s cellules, qui est d’abord un rôle <strong>de</strong><br />

com<strong>par</strong>timentation et d'échange entre l'intérieur et l'extérieur.<br />

Si les lipi<strong>de</strong>s sont aussi divers, c’est <strong>du</strong> fait <strong>de</strong> la gran<strong>de</strong> variété qui existe dans la tête polaire et la queue<br />

hydrophobe <strong>de</strong> la molécule. L’annexe 1 présente un tableau récapitulatif <strong>de</strong>s principaux types <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s<br />

membranaires. On y voit surtout <strong>de</strong>ux gran<strong>de</strong>s classes, une pour laquelle la queue hydrophobe est composée<br />

d’un squelette carboné cyclique, dans le cas <strong>de</strong>s stérols et plus <strong>par</strong>ticulièrement <strong>du</strong> cholestérol, une autre<br />

pour laquelle il s’agit au contraire <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux chaînes aliphatiques comportant <strong>de</strong> 12 à 20 carbones environ. Les<br />

<strong>de</strong>ux chaînes d’aci<strong>de</strong>s gras, i<strong>de</strong>ntiques ou non, sont, chez les glycéri<strong>de</strong>s, fixées sur une molécule <strong>de</strong> glycérol,<br />

elle même reliée à une tête polaire qui peut être un sucre (cas <strong>de</strong>s glycérolipi<strong>de</strong>s) ou un phosphate substitué<br />

(cas <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s). Les sphingolipi<strong>de</strong>s sont construits sur une unité <strong>de</strong> base sphingosine, substituée <strong>par</strong><br />

une chaîne aliphatique et possédant une tête polaire phosphate ou oligosacchari<strong>de</strong>.<br />

Les détails ne seront pas abordés ici. On pourra <strong>par</strong> exemple se référer au chapitre 1 <strong>du</strong> Phospholipids<br />

Handbook, <strong>par</strong> Gregor Cevc (1993), notamment pour la nomenclature.<br />

B. Les phospholipi<strong>de</strong>s<br />

Il s’agit surtout d’intro<strong>du</strong>ire leur nomenclature, qui servira <strong>par</strong> la suite.<br />

Une famille importante <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s est celle <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s. Par ce terme, on désigne ici d’une manière<br />

abusive ce qu’il serait plus convenable d’appeler les diacylphosphoglycéri<strong>de</strong>s, qui ne sont qu’un <strong>de</strong>s<br />

membres <strong>de</strong> la famille <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s, mais l’un <strong>de</strong>s principaux. Ces lipi<strong>de</strong>s sont les principaux<br />

2


constituants naturels <strong>de</strong>s membranes cellulaires. Ils constituent plus <strong>de</strong> 80% <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s dans les membranes<br />

mitochondriale ou plasmique, et plus <strong>de</strong> 90% dans les membranes nucléaires a .<br />

Chimiquement, dans un phospholipi<strong>de</strong>, une molécule <strong>de</strong> glycérol est estérifiée en position 1 et 2 <strong>par</strong> <strong>de</strong>ux<br />

chaînes d’aci<strong>de</strong>s gras saturées ou non. La position 3 est substituée <strong>par</strong> un groupement phosphate, auquel est<br />

reliée une tête polaire noté X sur la figure 1.1. La configuration naturelle <strong>de</strong> l’atome <strong>de</strong> carbone 2 est (R), ce<br />

que désigne généralement le symbole sn (pour stereospecific numbering).<br />

HO<br />

1<br />

CH 2<br />

OH<br />

2<br />

3<br />

H<br />

CH 2<br />

OH<br />

(a)<br />

R<br />

O<br />

R'<br />

O<br />

O<br />

O<br />

O<br />

(b)<br />

O<br />

P O<br />

_<br />

O<br />

X<br />

figure 1.1 : (a) molécule <strong>de</strong> sn-glycérol (le carbone prochiral 2 est en configuration (R))<br />

(b) : structure <strong>de</strong> base d’un diacylglycérophospholipi<strong>de</strong>. X est la tête polaire et<br />

R et R’ sont les chaînes aliphatiques.<br />

La nomenclature <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s fait intervenir la tête polaire X. Le tableau 1.2 détaille les principales<br />

têtes polaires <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s.<br />

tête polaire X nom commun symbole<br />

-H aci<strong>de</strong> phosphatidique PA<br />

-CH 2 CH 2 N + (CH 3 ) 3<br />

choline<br />

+<br />

-CH 2 CH 2 NH 3<br />

éthanolamine<br />

-CH 2 CH(COO - +<br />

)NH 3<br />

sérine<br />

-CH 2 -CHOH-CH 2 OH<br />

glycérol<br />

phosphatidylcholine<br />

phosphatidyléthanolamine<br />

phosphatidylsérine<br />

phosphatidylglycérol<br />

PC<br />

PE<br />

PS<br />

PG<br />

OH<br />

OH<br />

OH<br />

OH<br />

OH<br />

phosphatidylinositol<br />

PI<br />

inositol<br />

tableau 1.2 : nomenclature <strong>de</strong>s principaux phospholipi<strong>de</strong>s en fonction <strong>de</strong> leur tête polaire.<br />

a Les lipi<strong>de</strong>s restant sont principalement <strong>de</strong>s cardiolipi<strong>de</strong>s dans la membrane mitochondriale, et <strong>de</strong>s sphingolipi<strong>de</strong>s dans<br />

la membrane plasmique.<br />

3


Enfin, les chaînes d’aci<strong>de</strong>s gras (notée R et R’ sur la figure 1.2) interviennent aussi dans les propriétés<br />

physiques <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s. Les principales chaînes sont répertoriées dans le tableau 1.3.<br />

nom commun nom systématique Symbole b<br />

lauroyl dodécanoyl 12:0<br />

myristoyl tétradécanoyl 14:0<br />

palmitoyl hexadécanoyl 16:0<br />

stéaroyl octadécanoyl 18:0<br />

oléoyl octadéc-9-(Z)-énoyl 18:1cÄ 9<br />

linoléoyl octadéca-9,12-(Z),(Z)-diénoyl 18:2ccÄ 9,12<br />

tableau 1.3 : nomenclature <strong>de</strong>s chaînes d’aci<strong>de</strong>s gras R et R’.<br />

Au vu <strong>de</strong>s tableaux 1.2 et 1.3, on peut désormais préciser la désignation <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s qui sera faite<br />

<strong>par</strong> la suite. On <strong>par</strong>lera principalement <strong>de</strong> la DMPC et <strong>de</strong> la DOPE, qui sont respectivement la 1,2-<br />

DiMyristoyl-sn-glycéro-3-PhosphatidylCholine (X=choline, R=R’=14:0) et la 1,2-DiOléoyl-sn-glycéro-3-<br />

PhosphatidylÉthanolamine (X=éthanolamine, R=R’=18:1cÄ 9 ).<br />

C. Le polymorphisme lipidique<br />

Les molécules amphiphiles que sont les lipi<strong>de</strong>s ont une gran<strong>de</strong> propension à s’organiser selon <strong>de</strong>s<br />

assemblages réguliers et ordonnés à <strong>de</strong>ux ou trois dimensions. Au <strong>de</strong>là d’une concentration très faible en<br />

solution aqueuse, les lipi<strong>de</strong>s vont s’associer pour mettre leurs têtes polaires en contact avec l’eau, et en isoler<br />

leurs chaînes hydrophobes. Une <strong>de</strong>s structures possibles est la bicouche, qui peut se refermer sur elle même<br />

pour former une vésicule. Mais d’autres formes existent, comme la micelle (pour <strong>de</strong>s détergents), la micelle<br />

inverse ou <strong>de</strong>s formes intermédiaires que sont les <strong>phases</strong> hexagonales ou cubiques. On passe d’une phase à<br />

l’autre <strong>par</strong> <strong>de</strong>s variations <strong>de</strong>s conditions <strong>du</strong> milieu : température, pourcentage d’hydratation, pH, force<br />

ionique, présence d’agents extérieurs comme <strong>de</strong>s protéines ou <strong>du</strong> cholestérol.<br />

La figure 1.4 illustre les <strong>de</strong>ux principales <strong>phases</strong> que l’on rencontrera <strong>par</strong> la suite : la phase hexagonale<br />

inverse, dite H II , et la phase lamellaire (bicouche).<br />

figure 1.4 : représentation schématique <strong>de</strong>s <strong>phases</strong> hexagonale inverse (à gauche) et lamellaire (à droite) (d’après<br />

Gregor Cevc, Phospholipids Handbook , chapitre 2)<br />

b Le premier chiffre est le nombre total <strong>de</strong> carbones <strong>de</strong> la chaîne, le <strong>de</strong>uxième est le nombre total d’insaturations Ä ; en<br />

exposant, les positions <strong>de</strong> ces insaturations dans la chaîne ; c et t pour <strong>de</strong>s configurations cis ou trans <strong>de</strong> la double<br />

liaison (cis est la configuration naturelle)<br />

4


La phase H II fait ap<strong>par</strong>aître un agencement hexagonal <strong>de</strong> “cylindres micellaires inverses”. Il existe aussi<br />

une phase hexagonale (non inverse, dite H I ), où les cylindres micellaires ne sont pas inverses (i.e. les lipi<strong>de</strong>s<br />

tournent alors leurs têtes hydrophiles vers l'extérieur <strong>du</strong> cylindre).<br />

La simple notion <strong>de</strong> bicouche est plus complexe que ne peut le faire ap<strong>par</strong>aître la figure 1.4. Au sein <strong>de</strong> la<br />

phase lamellaire, on fait encore la distinction entre phase cristal-liqui<strong>de</strong> (ou flui<strong>de</strong>, dite L á ), et phase gel (dite<br />

L â ) à plus basse température. La différence entre les <strong>de</strong>ux est surtout <strong>du</strong>e à la flexibilité <strong>de</strong>s chaînes<br />

hydrophobes, beaucoup plus gran<strong>de</strong> au sein <strong>de</strong> la phase flui<strong>de</strong>, comme l’illustre la figure 1.5, issue <strong>de</strong><br />

simulations <strong>par</strong> dynamique moléculaire (Heller et al., 1993). La diffusion latérale est également bien plus<br />

importante dans la phase flui<strong>de</strong>.<br />

figure 1.5 : simulation <strong>de</strong> la dynamique <strong>de</strong> 5 molécules <strong>de</strong> POPC dans <strong>de</strong>s membranes modèles<br />

(a) : en phase L â ; (b) : en phase L á ; (d’après Heller et al., 1993)<br />

D. La membrane biologique : exemple <strong>de</strong>s érythrocytes<br />

La membrane externe <strong>de</strong>s globules rouges (érythrocytes) est l'exemple le mieux décrit <strong>de</strong> membrane<br />

cellulaire. Composée en masse pour moitié <strong>de</strong> protéines membranaires, pour moitié <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s, cette<br />

membrane peut être facilement étudiée <strong>par</strong>ce qu'on peut l'isoler <strong>du</strong> reste <strong>de</strong> la cellule <strong>de</strong> globule rouge. Par<br />

un procédé <strong>de</strong> lyse osmotique, le globule éclate et une simple centrifugation permet d'éliminer l'hémoglobine<br />

qu'il renferme. On obtient alors <strong>de</strong>s stromas, ou fantômes percés (en anglais ghosts), constitués uniquement<br />

<strong>de</strong>s membranes <strong>lipidiques</strong> et <strong>de</strong> leurs protéines intrinsèques, ainsi que <strong>du</strong> cytosquelette. Les détails<br />

concernant la biophysique <strong>de</strong>s membranes <strong>de</strong> globule rouge peuvent <strong>par</strong> exemple être trouvés dans l'ouvrage<br />

<strong>de</strong> E. Shechter (1993). Pour mémoire on reportera simplement dans le tableau 1.6 la composition lipidique<br />

moyenne <strong>de</strong> ces membranes.<br />

cholestérol 25<br />

phospholipi<strong>de</strong>s totaux 56<br />

dont PC 23<br />

PE 20<br />

PS 11<br />

PI 2<br />

sphingomyéline SM 18<br />

autres 1<br />

tableau 1.6 : pourcentage <strong>de</strong> la quantité totale <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s dans l'érythrocyte humain.<br />

5


II. La <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P appliquée aux lipi<strong>de</strong>s<br />

A. Pertinence <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>par</strong> <strong>RMN</strong><br />

Pour étudier et comprendre la membrane biologique, les métho<strong>de</strong>s d’étu<strong>de</strong> sont multiples, et permettent<br />

chacune <strong>de</strong> son<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s propriétés différentes. Après <strong>de</strong> premières étu<strong>de</strong>s <strong>de</strong> <strong>phases</strong> <strong>lipidiques</strong> <strong>par</strong> diffraction<br />

<strong>de</strong> rayons X (Luzzatti, 1962), d’autres techniques ont été appliquées aux membranes ou aux modèles<br />

<strong>lipidiques</strong>, qui avaient toutes pour but d’étudier une gamme <strong>de</strong> mouvements propres : ainsi, <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong><br />

spectroscopie infra-rouge ou Raman peuvent son<strong>de</strong>r <strong>de</strong>s mouvements très rapi<strong>de</strong>s (10 7 à 10 11 Hz), alors que<br />

les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> RPE son<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s mouvements plus lents (10 3 à 10 9 Hz). Des informations structurales<br />

peuvent également être obtenues <strong>par</strong> cryo-microscopie électronique, ou <strong>par</strong> microscopie à force atomique.<br />

Le but n’est pas dans cette présentation <strong>de</strong> com<strong>par</strong>er toutes ces métho<strong>de</strong>s en les développant, mais <strong>de</strong><br />

situer la <strong>RMN</strong> <strong>par</strong>mi elles. En effet, elle a un rôle bien <strong>par</strong>ticulier, <strong>par</strong>ce qu’il s’agit d’une métho<strong>de</strong> qui peut<br />

couvrir une vaste gamme <strong>de</strong> mouvements. Sa nature même lui permet <strong>de</strong> s’intéresser à un grand nombre <strong>de</strong><br />

noyaux différents, <strong>de</strong> spin non nul : 1 H, 2 H, 13 C, 15 N ou 31 P principalement. Leurs propriétés spectroscopiques<br />

sont telles que les fréquences <strong>de</strong> mouvements accessibles vont <strong>de</strong> 10 -1 à 10 10 Hz.<br />

Nous avons choisi ici <strong>de</strong> mener une étu<strong>de</strong> <strong>par</strong> <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P. C’est, avec 1 H, le seul <strong>de</strong> ces isotopes<br />

abondant à l’état naturel. Son rapport gyromagnétique est 2,5 fois plus faible que celui <strong>du</strong> proton, ce qui fait<br />

<strong>de</strong> lui un noyau tout <strong>de</strong> même assez sensible c . Mais surtout, les spectres <strong>du</strong> 31 P sont dominés <strong>par</strong> une<br />

interaction, le déplacement chimique, qui, <strong>du</strong> fait <strong>de</strong>s propriétés électroniques propres au noyau <strong>de</strong><br />

phosphore, est fortement anisotrope (i.e. n’a pas la même valeur suivant trois directions privilégiées <strong>de</strong><br />

l’espace). Cette anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique a <strong>de</strong>s conséquences importantes sur le profil <strong>du</strong> spectre<br />

31 P, qui est caractéristique <strong>de</strong> la phase où se trouve le phospholipi<strong>de</strong>.<br />

Enfin, une membrane biologique est un objet mi-flui<strong>de</strong>, mi-soli<strong>de</strong>, en fait un soli<strong>de</strong> mou voire un cristalliqui<strong>de</strong>.<br />

On entre alors dans le domaine <strong>de</strong> la <strong>RMN</strong> soli<strong>de</strong>, avec son formalisme propre et surtout sa gran<strong>de</strong><br />

variété d’expériences possibles. La rotation à l’angle magique et les techniques <strong>de</strong> recouplage sont alors <strong>de</strong>s<br />

métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> choix dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong> ces membranes.<br />

C’est principalement ces <strong>de</strong>ux aspects, anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique et effet <strong>de</strong> la rotation, que<br />

l’on va tenter d’illustrer dans les <strong>par</strong>agraphes suivants.<br />

B. Rappels <strong>de</strong> <strong>RMN</strong><br />

On s’appuie sur les bases <strong>de</strong> <strong>RMN</strong> acquises en DEA. On suppose acquises quelques notions <strong>de</strong> mécanique<br />

quantique, notamment la notion d’Hamiltonien H, dont les fonctions propres sont les fonctions d’on<strong>de</strong> ψ <strong>du</strong><br />

système pour la valeur propre E (l’énergie), selon l’équation <strong>de</strong> Schrödinger Hψ=Εψ. Des précisions<br />

théoriques peuvent être trouvées dans <strong>de</strong> nombreux ouvrages. Citons notamment celui <strong>de</strong> K. Schmidt-Rohr et<br />

H. W. Spiess (1994), qui nous a guidé tout au long <strong>de</strong> ce stage.<br />

c 13 C, avec un ã 4 fois plus faible que 1 H, est encore moins sensible ; <strong>de</strong> plus, son abondance naturelle n’est que <strong>de</strong> 1%.<br />

15 N et 2 H ont <strong>de</strong>s ã respectivement 10 fois et 6,5 fois plus faibles que 1 H, et nécessitent tous <strong>de</strong>ux un enrichissement<br />

<strong>du</strong> lipi<strong>de</strong>.<br />

6


La <strong>RMN</strong> est une technique spectroscopique qui utilise les propriétés physiques <strong>de</strong> la matière placée dans<br />

un champ magnétique non nul. Une <strong>de</strong>scription correcte en est faite au niveau quantique, et montre que, pour<br />

<strong>de</strong>s noyaux atomiques possédant un moment magnétique (donc <strong>de</strong> spin non nul), le champ magnétique, que<br />

l’on notera <strong>par</strong> la suite B d 0 , lève la dégénérescence <strong>de</strong>s niveaux énergétiques. Cet effet Zeeman se tra<strong>du</strong>it <strong>par</strong><br />

un Hamiltonien : H Z<br />

= −γ B 0<br />

I z<br />

, où I z est l’opérateur <strong>de</strong> spin en projection sur l’axe z, <strong>par</strong> définition<br />

confon<strong>du</strong> avec l’axe <strong>du</strong> champ B o . e<br />

Toutes les autres interactions que peut subir le noyau considéré se tra<strong>du</strong>isent <strong>par</strong> un Hamiltonien qui est<br />

une perturbation au premier ordre <strong>de</strong> l’Hamiltonien Zeeman. Ce sont ces interactions qui sont intéressantes,<br />

car elles expliquent la forme <strong>de</strong>s raies d’absorption, leur déplacement, leur dédoublement ou leur<br />

élargissement. Elles se tra<strong>du</strong>isent localement <strong>par</strong> <strong>de</strong>s fluctuations <strong>du</strong> champ magnétique ressenti <strong>par</strong> le<br />

noyau.<br />

Faisons brièvement un inventaire <strong>de</strong>s Hamiltoniens que l’on doit considérer pour notre système. Les<br />

expériences étant menées sur le 31 P, on ne s’intéresse qu’aux spins ½.<br />

• déplacement chimique : sous l’influence <strong>du</strong> champ B 0 , le nuage électronique génère un champ local<br />

autour <strong>du</strong> noyau <strong>de</strong> 31 P. Dans un cas isotrope (<strong>RMN</strong> liqui<strong>de</strong>), ce champ local est proportionnel à B 0 , avec<br />

une constante <strong>de</strong> proportionnalité σ <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 10 -6 (c’est la constante d’écran). Ici il faut multiplier B 0<br />

non plus <strong>par</strong> un scalaire, mais <strong>par</strong> un tenseur <strong>de</strong> rang 2, i.e. <strong>par</strong> une matrice 3x3, notée $σ , le tenseur<br />

d’anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique. Alors on a H CS<br />

= γ I $σB0 f .<br />

• interaction dipolaire : lorsque <strong>de</strong>ux noyaux i et j sont couplés <strong>par</strong> une interaction dipolaire, leur<br />

Hamiltonien d’interaction se note : H D<br />

= I D $ I ; D $ est le tenseur d’interaction dipolaire.<br />

i<br />

j<br />

• interaction scalaire : <strong>de</strong> même lorsque <strong>de</strong>ux noyaux i et j sont couplés scalairement, on a un tenseur<br />

d’interaction scalaire J $ , et un Hamiltonien : H S<br />

= I J $ I .<br />

• interaction quadrupolaire : elle n’ap<strong>par</strong>aît que pour <strong>de</strong>s noyaux <strong>de</strong> spins plus grands que 1, donc on<br />

la mentionnera sans la développer <strong>par</strong> la suite.<br />

C. La <strong>RMN</strong> en ban<strong>de</strong> large <strong>du</strong> 31 P dans les phospholipi<strong>de</strong>s<br />

1. Les interactions dominantes<br />

Toutes les interactions précé<strong>de</strong>ntes ne sont plus à considérer lorsque l’on s’intéresse au 31 P dans les<br />

phospholipi<strong>de</strong>s.<br />

• couplages homonucléaires : il n’y a qu’un 31 P <strong>par</strong> phospholipi<strong>de</strong>, donc il n’y a pas <strong>de</strong> couplage scalaire<br />

homonucléaire 31 P- 31 P. Il pourrait y avoir un couplage dipolaire 31 P- 31 P, mais la diffusion latérale rapi<strong>de</strong> (10 5 -<br />

10 9 Hz) <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s au sein <strong>de</strong> la membrane empêche ce couplage d’être efficace (Warschawski, 1995).<br />

i<br />

j<br />

d On note les vecteurs en gras.<br />

e On remarquera que les Hamiltoniens seront dans la suite donnés à un facteur h près, i.e ils sont associés à une<br />

pulsation ω = E / h et non plus à une énergie.<br />

f CS pour Chemical Shift<br />

7


• couplages hétéronucléaires : les couplages hétéronucléaires significatifs ne se font qu’entre 31 P et 1 H,<br />

car les autres noyaux présents ( 13 C voire 15 N) ont une abondance négligeable dans <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s non marqués.<br />

Le couplage scalaire proton-phosphore est <strong>de</strong> l’ordre d’une dizaine <strong>de</strong> Hz. On verra que cette valeur est trop<br />

faible pour être appréciable sur un spectre.<br />

Le seul couplage à prendre en compte est donc le couplage dipolaire hétéronucléaire 31 P- 1 H. La constante<br />

<strong>de</strong> couplage associée reportée dans la littérature (Dufourc, 1986) varie <strong>de</strong> 1 à 5 kHz selon la liberté <strong>de</strong><br />

mouvement <strong>de</strong> la tête polaire contenant le groupe phosphate. Cette constante est bien sûr indépendante <strong>du</strong><br />

champ B 0 .<br />

• anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique (en anglais CSA pour Chemical Shift Anisotropy) : c’est<br />

l’interaction prédominante, qui explique les profils <strong>de</strong>s spectres statiques. On verra dans le <strong>par</strong>agraphe<br />

suivant que cette anisotropie a une valeur typique <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 200 ppm, soit, sur un spectromètre 400 MHz g ,<br />

un écart en fréquence d’en général une dizaine <strong>de</strong> kHz, et 30 kHz maximum. Ainsi le couplage dipolaire 31 P-<br />

1 H, même plus faible, n’est pas vraiment négligeable y compris à haut champ. On peut annuler ses effets <strong>par</strong><br />

un simple découplage <strong>du</strong> proton, consistant en une irradiation simultanée en large ban<strong>de</strong> (Cullis & <strong>de</strong> Kruyff,<br />

1976). Dans la pratique, on constate toutefois qu’il n’y a pas d’inci<strong>de</strong>nce flagrante sur la forme <strong>du</strong> spectre<br />

statique avec ou sans découplage, si ce n’est <strong>de</strong>s épaulements moins marqués, et <strong>par</strong> conséquent on négligera<br />

dans la suite le couplage dipolaire hétéronucléaire, pour se concentrer principalement sur le CSA et ses effets.<br />

2. CSA et profil <strong>de</strong> raie<br />

Le développement suivant peut être passé pour en arriver au résultat final. Des précisions pourront être<br />

trouvées dans l'ouvrage <strong>de</strong> Schmidt-Rohr et Spiess (1994), ainsi que dans la thèse <strong>de</strong> E. Dufourc (1986). Sur<br />

ce point, ces <strong>de</strong>ux ouvrages reprennent les résultats initialement exposés <strong>par</strong> Seelig (Seelig, 1978). Le but est<br />

ici d'expliquer la forme <strong>de</strong>s spectres statiques en 31 P pour les principales <strong>phases</strong> <strong>lipidiques</strong>.<br />

Dans un repère lié au groupement phosphate, et appelé le système d'axes principaux (abrégé PAS en anglais, pour<br />

Principal Axis System) la <strong>par</strong>tie symétrique <strong>du</strong> tenseur d'anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique peut être diagonalisée:<br />

$σ<br />

PAS<br />

⎛σ<br />

xx<br />

0 0 ⎞<br />

⎜<br />

⎟<br />

= ⎜ 0 σ<br />

yy<br />

0 ⎟<br />

⎜<br />

⎝ 0 0 σ<br />

⎟<br />

⎠<br />

Le fait que les 3 termes diagonaux soient différents tra<strong>du</strong>it l'anisotropie <strong>de</strong> cette interaction, qui dépend <strong>de</strong> l'orientation ;<br />

typiquement on donne: σ xx =-80ppm, σ yy =-25ppm et σ zz =+110ppm (Seelig, 1978).<br />

Posons B 0 =B 0 k ; k est le vecteur unitaire orienté selon l'axe <strong>du</strong> champ. Soit ω = − 0<br />

γ B 0<br />

la pulsation <strong>de</strong> Larmor.<br />

L'Hamiltonien <strong>de</strong> déplacement chimique s'écrit: H CS<br />

= ω CS<br />

I z<br />

t<br />

La pulsation <strong>de</strong> précession <strong>du</strong>e au déplacement chimique peut s'exprimer <strong>par</strong>: ω = −ω 0<br />

kσ$ k ; c'est donc une<br />

forme bilinéaire symétrique. De ce fait, on ne tient compte dans son calcul que <strong>de</strong> $σ PAS , la <strong>par</strong>tie symétrique <strong>de</strong> $σ , qui<br />

est diagonale dans le système d'axes principaux. La <strong>par</strong>tie antisymétrique <strong>du</strong> tenseur donne, quant à elle, une<br />

contribution nulle.<br />

zz<br />

CS<br />

g 400 MHz est la fréquence <strong>de</strong> résonance <strong>du</strong> proton. Cela correspond à un champ <strong>de</strong> 9,4 T environ, et à une fréquence <strong>de</strong><br />

résonance en phosphore <strong>de</strong> 162 MHz (γ Η /γ P 2,5).<br />

8


Si l'on se place dans le repère PAS, k peut être exprimé au moyen <strong>de</strong> ses coordonnées polaires (θ, φ), et on a:<br />

2 2 2<br />

[ (cosφsin θ) (sinφsin θ) (cos θ)<br />

]<br />

ω = ω σ + σ + σ<br />

CS 0 xx yy zz<br />

(ω CS dépend <strong>de</strong> θ et φ donc dépend bien <strong>de</strong> l'orientation <strong>de</strong> chaque molécule)<br />

1<br />

On fait alors intervenir la <strong>par</strong>tie isotrope <strong>du</strong> tenseur, définie <strong>par</strong> 1/3 <strong>de</strong> sa trace: σiso = σ<br />

xx<br />

+ σ<br />

yy<br />

+ σzz<br />

3 ( ) ,<br />

et on la soustrait aux valeurs principales pour définir: σ = σ − σ iso<br />

(α=x, y ou z)<br />

α<br />

Le résultat <strong>du</strong> calcul est une expression <strong>de</strong> la pulsation associée au CSA, en fonction <strong>de</strong>s angles θ et φ. Elle fait<br />

intervenir <strong>de</strong>ux <strong>par</strong>amètres:<br />

η σ σ y<br />

−<br />

x<br />

= est le <strong>par</strong>amètre d'asymétrie<br />

σz<br />

δ = −ω 0<br />

σ z<br />

est le <strong>par</strong>amètre d'anisotropie.<br />

De simples relations trigonométriques con<strong>du</strong>isent au résultat suivant (Schmidt-Rohr & Spiess, 1994):<br />

αα<br />

ω<br />

CS<br />

δ<br />

= ωiso<br />

+ [ θ − − η θ φ ]<br />

2 3 2 1 2<br />

cos sin cos( 2 ) (1)<br />

Mais on travaille avec <strong>de</strong>s objets dont la symétrie n'est pas quelconque: en effet, la rotation rapi<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />

phospholipi<strong>de</strong>s autour d'un axe normal à la bicouche entraîne une symétrie axiale <strong>du</strong> tenseur <strong>de</strong> CSA dans un repère B<br />

lié à la bicouche (i.e. η=0). Dans ce repère B, ce tenseur s'écrit :<br />

σ$<br />

B =<br />

⎛σ<br />

⎞<br />

⊥<br />

0 0<br />

⎜<br />

⎟<br />

⎜ 0 σ<br />

⊥<br />

0 ⎟<br />

⎜<br />

⎝ 0 0 σ<br />

⎟<br />

⎠<br />

La direction <strong>de</strong> référence est ici n, la normale à la bicouche qui est aussi l'axe moyenné <strong>du</strong> phospholipi<strong>de</strong>.<br />

Les <strong>de</strong>ux tenseurs diagonaux $σ PAS et $σ B peuvent être reliés au moyen d'un changement <strong>de</strong> bases faisant intervenir <strong>de</strong>s<br />

matrices <strong>de</strong> transformation d'angles d'Euler. Par conservation <strong>de</strong> la trace lors d'un changement <strong>de</strong> base, on a notamment:<br />

σ = 1<br />

iso<br />

σ +<br />

3 ( 2<br />

⊥<br />

σ/ /)<br />

.<br />

En développant ce changement <strong>de</strong> bases, l'expression précé<strong>de</strong>nte <strong>de</strong> ω CS (équation (1)) peut être finalement transformée<br />

en un <strong>de</strong>rnier résultat (Seelig, 1978), ne faisant plus intervenir que l'angle β entre les directions n et k.<br />

2<br />

⎡ 2 3cos<br />

β − 1 ⎤<br />

ω<br />

CS<br />

( β) = −ω 0 ⎢1<br />

− σiso<br />

− ∆σ(<br />

) ⎥<br />

⎣ 3 2 ⎦<br />

∆σ est l'anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique, définie <strong>par</strong> ∆σ = σ //<br />

− σ ⊥<br />

.<br />

On note ω = −ω ( − σ ) la pulsation isotrope, qui correspondrait au cas <strong>de</strong> la <strong>RMN</strong> liqui<strong>de</strong>, et<br />

iso<br />

0 1<br />

iso<br />

/ /<br />

∆ω = 2 CSA<br />

ω ∆σ<br />

3 0 le facteur d'anisotropie (qui est égal à δ). Alors on a simplement:<br />

β −<br />

ω<br />

CS<br />

= ωiso + ∆ ω<br />

CSA( cos 2<br />

3 1<br />

)<br />

2<br />

(2)<br />

Le résultat précé<strong>de</strong>nt fait ap<strong>par</strong>aître une relation simple entre la pulsation <strong>de</strong> précession associée au CSA,<br />

et l'angle β entre l'axe moyen <strong>du</strong> lipi<strong>de</strong> (qui est aussi la normale à la bicouche) et l'axe <strong>du</strong> champ B 0 . On va<br />

voir que ce résultat permet facilement <strong>de</strong> dé<strong>du</strong>ire l'allure <strong>du</strong> spectre large ban<strong>de</strong> en 31 P d'un phospholipi<strong>de</strong>,<br />

selon la phase dans laquelle il se trouve. La figure 1.7 illustre les différents profils <strong>de</strong> raies théoriques<br />

associés aux principales <strong>phases</strong>.<br />

9


figure 1.7 : forme <strong>de</strong>s spectres 31 P statiques pour <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s dans différentes <strong>phases</strong>; une fréquence nulle<br />

correspond à un déplacement chimique isotrope<br />

(adapté d'après Dufourc, 1986)<br />

Plaçons nous tout d'abord dans le cas d'une phase lamellaire. L'expression analytique <strong>de</strong>s spectres (a) et<br />

(b) <strong>de</strong> la figure 1.7 se dé<strong>du</strong>it simplement <strong>de</strong> l'équation (2). Il faut pour cela comprendre que les normales n à<br />

la bicouche sont distribuées dans l'espace d'une manière isotrope. En effet, ces bicouches forment <strong>de</strong>s<br />

vésicules multilamellaires, <strong>de</strong> forme sphérique. On doit alors calculer la probabilité dP pour un<br />

phospholipi<strong>de</strong> donné d'avoir un axe moyen incliné d'un angle β à dβ près <strong>par</strong> rapport à l'axe <strong>du</strong> champ.<br />

1<br />

On trouve facilement (Seelig, 1978) que : dP = d = p d<br />

2 sin β β ( ω ) ω (c'est le calcul <strong>de</strong> l'angle soli<strong>de</strong><br />

pour un cône <strong>de</strong> <strong>de</strong>mi-angle au sommet β). p(ω), qui est la fonction <strong>de</strong> probabilité associée à la pulsation <strong>de</strong><br />

d(cos β)<br />

résonance ω, vaut donc : p( ω)<br />

= 1 . En tirant cosβ <strong>de</strong> l'équation (2), et en dérivant, on peut<br />

2 dω<br />

montrer que : p( ω)<br />

=<br />

1<br />

6 3∆ω<br />

CSA<br />

ω<br />

⊥<br />

− ω<br />

ω − ω<br />

⊥<br />

iso<br />

. Cette fonction <strong>de</strong> probabilité est proportionnelle à la<br />

hauteur <strong>du</strong> pic <strong>de</strong> pulsation ω. En convoluant cette fonction <strong>par</strong> une fonction lorentzienne (pour rendre<br />

compte <strong>de</strong> la largeur <strong>de</strong> raie), on obtient un profil tel que celui <strong>du</strong> spectre 1.7 (a). Ce spectre présente une<br />

singularité pour ω<br />

= ω ⊥<br />

. Il est fortement dissymétrique, et on dira <strong>de</strong> lui qu'il possè<strong>de</strong> “un pic à droite”.<br />

On peut <strong>par</strong> ailleurs remarquer sur la figure 1.7 que le spectre statique d'une phase lamellaire flui<strong>de</strong> L α ,<br />

s'il présente la même asymétrie que celui d'une phase gel L β , puisqu'il s'agit également d'une phase<br />

10


lamellaire, en diffère cependant sensiblement <strong>par</strong> la largeur : le spectre (b) est ainsi plus étroit que le spectre<br />

(a). Des arguments que nous ne reporterons pas ici montrent que dans la phase flui<strong>de</strong>, l'ajout d'un<br />

mouvement d'oscillations au mouvement <strong>de</strong> rotation entraîne une diminution <strong>de</strong>s valeurs propres <strong>du</strong> tenseur<br />

<strong>du</strong> CSA. Ainsi, l'anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique ∆σ est plus faible en phase flui<strong>de</strong>, et le spectre est plus<br />

fin.<br />

Considérons maintenant le cas d'une phase hexagonale. Les lipi<strong>de</strong>s y sont arrangés en monocouches<br />

assemblées en forme <strong>de</strong> cylindres. Ces lipi<strong>de</strong>s diffusent rapi<strong>de</strong>ment autour <strong>de</strong> l'axe <strong>du</strong> cylindre, si bien que le<br />

système cylindrique présente désormais une symétrie axiale. Les directions <strong>de</strong>s axes <strong>de</strong>s cylindres sont<br />

isotropes. Pour un lipi<strong>de</strong> dans un cylindre donné, on peut définir <strong>de</strong>ux valeurs propres <strong>du</strong> tenseur<br />

d'anisotropie: l'une, σ H / /<br />

, correspond au cas où le cylindre a un axe colinéaire à B 0 ; l'autre, σ H ⊥<br />

, au cas où<br />

l'axe est normal à B 0 . Des considérations <strong>de</strong> symétrie permettent <strong>de</strong> démontrer que, en com<strong>par</strong>ant à une phase<br />

B<br />

lamellaire flui<strong>de</strong> pour laquelle les valeurs propres sont notées σ / /<br />

et σ ⊥ B , on a: σ<br />

H<br />

/ /<br />

B<br />

≈ σ ⊥<br />

et<br />

H 1 B B<br />

σ⊥<br />

≈ 2 ( σ⊥<br />

+ σ<br />

/ /<br />

) . Le calcul complet est notamment présenté <strong>par</strong> Seelig (Seelig, 1978). Dans la phase<br />

hexagonale, l'anisotropie ap<strong>par</strong>ente <strong>du</strong> déplacement chimique <strong>de</strong>vient donc : ∆σ<br />

= σ − σ ⊥<br />

= −<br />

∆σ<br />

H H H 1 B<br />

//<br />

2 .<br />

En clair, le spectre statique 31 P d'un lipi<strong>de</strong> en phase hexagonale (1.7(c)) est inversé <strong>par</strong> rapport à celui d'une<br />

phase lamellaire, et présente un CSA environ <strong>de</strong>ux fois plus faible <strong>de</strong> celui d'un phase lamellaire flui<strong>de</strong><br />

(1.7(b)).<br />

D. L’effet <strong>de</strong> la rotation<br />

On n'a jusqu'à présent <strong>par</strong>lé que <strong>de</strong>s spectres dits “statiques”, c'est à dire enregistrés pour un échantillon<br />

immobile au cours <strong>du</strong> temps. Supposons maintenant que cet échantillon soit contenu dans un rotor tournant<br />

autour <strong>de</strong> lui même, et dont la direction fasse avec la verticale <strong>du</strong> champ un angle bien déterminé h . Alors<br />

expérimentalement on constate que, pour <strong>de</strong>s vitesses <strong>de</strong> rotation suffisantes, le spectre <strong>du</strong> 31 P n'a plus<br />

l'asymétrie si <strong>par</strong>ticulière <strong>du</strong> <strong>par</strong>agraphe précé<strong>de</strong>nt, mais est au contraire un spectre à haute résolution,<br />

composé simplement d'une raie fine, comme pour le spectre 1.7(d).<br />

Cette technique <strong>de</strong> <strong>RMN</strong> soli<strong>de</strong>, appelée la rotation à l'angle magique (en anglais MAS pour Magic Angle<br />

Spinning) permet <strong>de</strong> moyenner l'anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique à zéro. C'est une métho<strong>de</strong> artificielle<br />

qui pro<strong>du</strong>it le même résultat que celui obtenu pour <strong>de</strong>s micelles, et également <strong>de</strong> très petites vésicules, où le<br />

CSA est moyenné “mécaniquement” <strong>du</strong> fait <strong>de</strong> leur faible temps <strong>de</strong> corrélation <strong>de</strong> rotation (τ c<br />

surtout <strong>de</strong> la rapi<strong>de</strong> diffusion <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s à la surface.<br />

1. Moyennage <strong>du</strong> CSA<br />

≈ 1 ms ), et<br />

Une explication simple <strong>de</strong> ce moyennage peut se faire ainsi : sous l'effet <strong>de</strong> la rotation <strong>du</strong> rotor autour <strong>de</strong><br />

lui même, toutes les molécules acquièrent une symétrie cylindrique, ou plutôt peuvent être remplacées <strong>par</strong><br />

une pseudo-molécule <strong>de</strong> symétrie cylindrique. Tous ces cylindres sont coaxiaux et leur axe commun fait un<br />

angle, noté α, avec la verticale <strong>du</strong> champ; cette direction est également celle <strong>du</strong> rotor, et α est l'angle<br />

h un schéma expérimental sera présenté au chapitre 2.<br />

11


d'inclinaison <strong>du</strong> rotor <strong>par</strong> rapport à la verticale. Alors, la pulsation <strong>de</strong> résonance associée au 31 P <strong>de</strong> chaque<br />

α<br />

molécule est donnée, d'après l'expression (2) <strong>par</strong>: ω<br />

CS<br />

( α) ωiso ωCSA( cos 2<br />

3 − 1<br />

= + ∆<br />

) . Le facteur<br />

2<br />

d'anisotropie ∆ω CSA<br />

dépend <strong>de</strong> chaque molécule, car il “gar<strong>de</strong> la trace” <strong>de</strong> la projection sur la pseudo-<br />

2<br />

molécule. Néanmoins, pour un angle α = α m<br />

tel que 3cos α m<br />

− 1 = 0 , on se débarrasse <strong>de</strong> cette<br />

contribution, et ω<br />

CS<br />

= ω . On n'a plus alors qu'une raie fine, centrée sur le pic isotrope (comme si on était<br />

iso<br />

en <strong>RMN</strong> liqui<strong>de</strong>, cf figure 1.7(d)). On dit que l'on a moyenné à zéro l'anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique.<br />

1<br />

L'angle α m<br />

= arccos( ) ≈ 54°<br />

44'<br />

est appelé l'angle magique.<br />

3<br />

On ne rentrera pas dans la théorie <strong>du</strong> MAS, qui fait intervenir la mécanique quantique, et notamment la<br />

théorie <strong>de</strong> l'Hamiltonien moyen, développée <strong>par</strong> Haeberlen (Haeberlen, 1968) puis Maricq et Waugh<br />

(Maricq & Waugh, 1979).<br />

On peut cependant comprendre aisément que pour chaque molécule, la pulsation <strong>de</strong> résonance <strong>du</strong> CSA<br />

soit désormais dépendante <strong>du</strong> temps, et même périodique (<strong>de</strong> pério<strong>de</strong> la <strong>du</strong>rée <strong>de</strong> révolution <strong>du</strong> rotor). Le<br />

calcul <strong>de</strong> cette pulsation, reporté dans la suite, dérive <strong>de</strong> celui présenté au §C.2.<br />

t<br />

On a pu montrer (§C.2.) que la pulsation <strong>de</strong> résonance associée au CSA se calculait <strong>par</strong> :ω<br />

CS<br />

= −ω 0<br />

kσ$ k . Dans<br />

un repère fixe <strong>par</strong> rapport au rotor (qui tourne à la pulsation ω r ), le vecteur k a pour coordonnées :<br />

⎡sinα<br />

⎤ ⎡ ⎤<br />

m<br />

cos ω<br />

rt<br />

cos ωrt<br />

⎢<br />

⎥ 2 ⎢ ⎥<br />

k = ⎢sinαm<br />

sin ω<br />

rt<br />

⎥ = ⎢sin<br />

ωrt<br />

⎥ , tandis que le tenseur <strong>de</strong> l'anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique est<br />

3<br />

⎣<br />

⎢ cosα<br />

⎦<br />

⎥ ⎢ 1 ⎥<br />

m ⎣ 2 ⎦<br />

( ij )<br />

$σ = σ<br />

1≤i,j<br />

≤3 (il n'a pas <strong>de</strong> raison d'être diagonal dans le repère <strong>du</strong> rotor).<br />

En développant le pro<strong>du</strong>it matriciel dans ce repère fixe <strong>par</strong> rapport au rotor, on fait ap<strong>par</strong>aître<br />

σ = ( iso<br />

σ + σ + σ ) /<br />

11 22 33<br />

3 , et l'expression finale <strong>de</strong> ω CS en fonction <strong>du</strong> temps peut se mettre sous la forme :<br />

ω ( t) = ω + C cos ω t + C cos 2ω t + S sin ω t + S sin 2 ω t (3)<br />

CS iso 1 r 2 r 1 r 2<br />

r<br />

Les valeurs <strong>de</strong>s coefficients C et S qui dépen<strong>de</strong>nt <strong>de</strong>s σ ij sont reportées dans la littérature (Schmidt-Rohr & Spiess,<br />

1994, p103). L'important est ici <strong>de</strong> faire ap<strong>par</strong>aître la dépendance temporelle <strong>de</strong> la pulsation <strong>de</strong> résonance, qui est<br />

périodique. Pour une vitesse <strong>de</strong> rotation gran<strong>de</strong> <strong>de</strong>vant la fréquence <strong>de</strong>s interactions considérées, on peut moyenner<br />

cette expression. Alors ω<br />

CS<br />

( t) = ω .<br />

iso<br />

2. Impulsions <strong>de</strong> 180° synchronisées avec la rotation<br />

Supposons que notre échantillon tourne dans un rotor incliné à l'angle magique à une fréquence suffisante<br />

pour moyenner les interactions inhomogènes comme le CSA. Alors la pulsation <strong>de</strong> précession associée à ce<br />

CSA, calculée au <strong>par</strong>agraphe précé<strong>de</strong>nt, peut être schématiquement représentée <strong>par</strong> le schéma 1.8(a). On<br />

comprend bien qu'en valeur moyenne ω<br />

CS<br />

( t) = ω .<br />

iso<br />

12


figure 1.8 : représentation schématique <strong>de</strong> la variation temporelle <strong>de</strong> ω CS −ω iso (a) en rotation à l'angle magique, à la<br />

pulsation <strong>de</strong> rotation ω r =2π/t r ; (b) i<strong>de</strong>m mais en appliquant 4 impulsions 180° synchronisées avec la rotation; la ligne<br />

pointillée symbolise une valeur moyenne non nulle (adapté <strong>de</strong> Griffin, 1998).<br />

Une technique utilisée pour réintro<strong>du</strong>ire les interactions précé<strong>de</strong>mment moyennées à zéro consiste à<br />

appliquer à l'échantillon, <strong>du</strong>rant sa rotation, une série d'impulsions radiofréquence 180° i . Cette technique,<br />

initialement développée <strong>par</strong> Alla (Alla et al., 1978), a ensuite été réutilisée dans le but <strong>de</strong> construire <strong>de</strong>s<br />

spectres 2D <strong>de</strong> recouplage. La figure 1.9 permet <strong>de</strong> comprendre pourquoi on peut dire d’une impulsion 180°<br />

qu’elle inverse le sens <strong>de</strong> précession <strong>de</strong> l'aimantation.<br />

figure 1.9 : effet d’une impulsion 180° sur une aimantation qui précesse sous son déplacement chimique<br />

(on ne considère pas la relaxation)<br />

Par conséquent une impulsion 180° réintro<strong>du</strong>it le CSA qui avait été au<strong>par</strong>avant moyenné <strong>par</strong> le MAS. Le<br />

CSA est ainsi recouplé. Pour plusieurs impulsions 180° <strong>par</strong> pério<strong>de</strong>, la valeur moyenne <strong>de</strong> cette interaction<br />

est non nulle, comme le montre la figure 1.8 (b).<br />

i<br />

on rappelle qu'en <strong>RMN</strong> impulsionnelle, une impulsion 180° fait tourner l'aimantation d'un angle 180° dans le<br />

référentiel tournant (i.e. elle la change en son opposée si elle est orthogonale à sa direction). Elle a une <strong>du</strong>rée<br />

τ = π / γ B 1<br />

, pour un champ radiofréquence d'intensité Β 1 .<br />

13


E. Le recouplage <strong>de</strong> l’anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique<br />

1. Utilité <strong>de</strong> la technique <strong>de</strong> recouplage dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s<br />

Les <strong>par</strong>agraphes précé<strong>de</strong>nts ont tenté <strong>de</strong> mettre en évi<strong>de</strong>nce l’intérêt <strong>de</strong> la <strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P dans l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s<br />

phospholipi<strong>de</strong>s, notamment dans les attributions <strong>de</strong> <strong>phases</strong>, ou dans les mesures <strong>de</strong> <strong>par</strong>amètres d’ordre. Mais,<br />

comme cela ap<strong>par</strong>aîtra dans la <strong>par</strong>tie expérimentale, les quantifications <strong>de</strong> <strong>phases</strong> sont délicates dans le cas<br />

<strong>de</strong> mélanges. Par ailleurs, la rotation à l’angle magique, en pro<strong>du</strong>isant <strong>de</strong>s raies fines et <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> résolution,<br />

est capable <strong>de</strong> “sé<strong>par</strong>er” les lipi<strong>de</strong>s selon la valeur <strong>de</strong> leur déplacement chimique isotrope. Il est donc naturel<br />

<strong>de</strong> tenter <strong>de</strong> leur appliquer les techniques dites <strong>de</strong> recouplage.<br />

2. La métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> Tycko<br />

Parmi toutes les métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> recouplage (<strong>du</strong> CSA ou <strong>de</strong> l’interaction dipolaire) qui existent, la métho<strong>de</strong><br />

développée <strong>par</strong> Robert Tycko (Tycko et al., 1989) joue un rôle <strong>par</strong>ticulier, <strong>par</strong>ce qu’en théorie, la dimension<br />

indirecte <strong>du</strong> spectre (celle qui correspond à l’incrémentation <strong>de</strong> t 1 ) repro<strong>du</strong>it l’allure <strong>du</strong> spectre que l’on<br />

obtiendrait pour un échantillon statique. Certaines métho<strong>de</strong>s donnent un profil non intuitif sur cette<br />

dimension, qu’il faut ensuite simuler in silico pour en dé<strong>du</strong>ire les <strong>par</strong>amètres intéressants comme les<br />

éléments <strong>du</strong> tenseur d’anisotropie j . Nous nous proposons d’expliquer comment la séquence d’impulsions<br />

180° appliquées <strong>du</strong>rant un tour <strong>de</strong> rotor permet <strong>de</strong> recoupler le CSA et d’obtenir un profil <strong>de</strong> raie i<strong>de</strong>ntique à<br />

un spectre statique, à un facteur d’échelle près. Pour cela, les résultats exposés au cours <strong>de</strong>s <strong>par</strong>agraphes<br />

précé<strong>de</strong>nts vont être utiles. Une <strong>de</strong>scription <strong>de</strong> cette technique se trouve dans l’article original <strong>de</strong> Tycko,<br />

mais aussi dans l’ouvrage <strong>de</strong> Schmidt-Rohr et Spiess (Schmidt-Rohr & Spiess, 1994, pp 195-198).<br />

Développée à l’origine sur un noyau <strong>de</strong> 13 C dans un sucre, cette métho<strong>de</strong> n’avait au<strong>par</strong>avant jamais été<br />

appliquée au 31 P même dans les phospholipi<strong>de</strong>s, bien que le CSA soit pour eux d’une gran<strong>de</strong> importance.<br />

Tout au long <strong>de</strong> l’expérience, l’échantillon tourne à une fréquence élevée, <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> 5kHz, et il est<br />

incliné à l’angle magique <strong>par</strong> rapport à la verticale . Sous l’effet <strong>de</strong> ce MAS, et d’après l’équation (3), la<br />

pulsation <strong>de</strong> précession ω CS a pour expression (à la constante ω iso près, que l’on ne mentionnera plus <strong>par</strong> la<br />

suite) : ω ( t) = C cos ω t + C cos 2ω t + S sin ω t + S sin 2 ω t . La valeur moyenne <strong>de</strong> ω CS sur une<br />

CS 1 r 2 r 1 r 2<br />

r<br />

pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> rotation est nulle, i.e. ω CS<br />

( t) = 0. L’idée <strong>de</strong> base <strong>de</strong> la séquence décrite est d’appliquer un<br />

nombre pair d’impulsions <strong>de</strong> 180° synchronisées avec la rotation, comme le détaille le <strong>par</strong>agraphe D.2, afin<br />

<strong>de</strong> rendre cette valeur moyenne non nulle et proportionnelle au cas statique. Or si l’échantillon ne tournait<br />

stat<br />

pas, on aurait ω r =0, et donc ω CS<br />

= C + C<br />

1 2 .<br />

Intro<strong>du</strong>isons une fonction p(t), <strong>de</strong> mo<strong>du</strong>le 1 et qui change <strong>de</strong> signe à chaque impulsion 180°. La<br />

figure 1.10 détaille l’allure <strong>de</strong> cette fonction pour 4 impulsions 180°, dont la <strong>du</strong>rée τ est supposée négligeable<br />

<strong>de</strong>vant t r .<br />

j<br />

C’est le cas <strong>de</strong>s séquences <strong>de</strong> Bax (Bax, 1983, 2 impulsions 180° <strong>par</strong> rotation) ou <strong>de</strong> Yarim-Agaev (Yarim-Agaev,<br />

1982, 6 impulsions 180° <strong>par</strong> rotation)<br />

14


figure 1.10 : la fonction p(t) associée à une séquence d’impulsions <strong>de</strong> recouplage ;<br />

les impulsions sont <strong>de</strong> 180°, et ont une <strong>du</strong>rée τ supposée négligeable <strong>de</strong>vant t r .<br />

stat<br />

.La proportionnalité imposée entre ω CS<br />

( t) et ω CS<br />

se tra<strong>du</strong>it mathématiquement <strong>par</strong> la formule :<br />

1 tr<br />

stat<br />

p t t dt<br />

t<br />

∫ ( ) ω<br />

0<br />

CS<br />

( ) = χ ω<br />

CS<br />

(4)<br />

r<br />

En effet, la figure 1.9 montre comment une impulsion 180° fait changer <strong>de</strong> signe la fonction ω CS ; c’est ce<br />

que tra<strong>du</strong>it la fonction p(t). χ est le facteur d’échelle anisotrope.<br />

L’équation (4) est en <strong>par</strong>ticulier satisfaite lorsque p(t) est une fonction paire, et que l’on a l’égalité<br />

1<br />

1<br />

tr<br />

t<br />

2<br />

0<br />

r ∫0<br />

∫<br />

2 r<br />

p( t)cos( ω t) dt = p( t)cos( 2ω<br />

t)<br />

dt . La fonction sinus étant impaire, la première condition annule<br />

r<br />

les termes en facteur <strong>de</strong>s coefficients S ; une conséquence est que les impulsions sont symétriques <strong>par</strong><br />

rapport à une <strong>de</strong>mi-révolution <strong>du</strong> rotor (cf. figure 1.10). Par ailleurs, la <strong>de</strong>uxième condition sur les termes en<br />

facteur <strong>de</strong>s coefficients C impose que ces intégrales valent 1 2<br />

χt r<br />

.<br />

Or chacune <strong>de</strong> ces intégrales se calcule aisément sur l’intervalle [τ i , τ i+1 ], où la fonction p(t) et constante<br />

et vaut ±1. Ainsi pour k valant 1 ou 2, et pour 2N impulsions 180° <strong>par</strong> pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> rotation :<br />

1<br />

N<br />

2 tr<br />

τ 1<br />

1<br />

2 t<br />

2<br />

∫0 ∫0<br />

∫ ∑<br />

r n=<br />

1<br />

r<br />

n<br />

p( t)cos( k ωrt) dt = cos( k ω<br />

rt) dt + ... + cos( k ωrt) dt = ( −1) sin( k ω<br />

r<br />

τn)<br />

τ N<br />

kω<br />

N<br />

n<br />

1<br />

et finalement la condition sur les intégrales se ramène à : ∑ ( −1) [sin( ω<br />

r<br />

τn) − sin( 2ω r<br />

τ<br />

n)]<br />

= 0 (5)<br />

2<br />

Le résultat <strong>de</strong> ce calcul est une expression qui lie les inconnues τ i à ω r . Nous venons d’établir une<br />

condition sur les délais entre les impulsions <strong>de</strong> 180° telle que, si elle est vérifiée, la valeur moyenne <strong>de</strong> la<br />

pulsation <strong>de</strong> précession <strong>du</strong>e au déplacement chimique soit proportionnelle à la pulsation statique. La<br />

constante <strong>de</strong> proportionnalité est χ<br />

180° <strong>par</strong> tour <strong>de</strong> rotor pour satisfaire cette équation. Il y a en <strong>par</strong>ticulier <strong>de</strong>s solutions simples pour 4 et 6<br />

15<br />

n=<br />

1<br />

1 t r<br />

= ∫ p ( t ) cos( ω t dt<br />

t 0<br />

r ) . En fait, on a oublié <strong>de</strong> faire intervenir le<br />

r<br />

déplacement isotrope ω iso , et le même calcul que précé<strong>de</strong>mment démontrerait que le facteur d’échelle<br />

isotrope est ξ =<br />

1<br />

t<br />

r<br />

∫<br />

t r<br />

p ( t ) dt .<br />

0<br />

stat<br />

Alors ω ( t) = ξ ω + χ ω<br />

(6)<br />

CS iso CS<br />

Il ne reste plus alors qu’à calculer les valeurs numériques qui vérifient l’équation (5). Dans son article,<br />

R. Tycko dresse un tableau <strong>de</strong>s résultats. Il y est notamment expliqué qu’il faut au minimum 4 impulsions


impulsions, dont l’une d’elle est très simple puisqu’elle n’utilise que 4 impulsions et donne un ξ=0. C’est<br />

cette solution qui est généralement la plus employée, dans l’article original (Tycko et al., 1989) et y compris<br />

<strong>par</strong> la suite (Gross et al., 1997). Ainsi pour ω<br />

r<br />

τ1 = 70. 9°<br />

et ω<br />

r<br />

τ2 = 160. 9°<br />

, on a les valeurs <strong>de</strong> ξ=0 et<br />

surtout χ=0,393 (soit <strong>de</strong>s <strong>du</strong>rées typiques <strong>de</strong> τ 1 =39µs et τ 2 =89µs pour une fréquence <strong>de</strong> rotation <strong>de</strong> 5000Hz).<br />

On est désormais en mesure <strong>de</strong> comprendre la séquence d’impulsions (le pulse program) nécessaire à<br />

mettre en œuvre pour réaliser nos expériences <strong>de</strong> recouplage <strong>du</strong> CSA. Il s’agit bien sûr d’une séquence 2D,<br />

avec un temps d’évolution t 1 selon la dimension indirecte, et un temps d’acquisition t 2 selon la dimension<br />

directe. Cette séquence est illustrée sur la figure 1.11, et correspond à χ=0,393.<br />

figure 1.11 : séquence d’impulsions <strong>du</strong> recouplage <strong>du</strong> CSA <strong>par</strong> la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> Tycko (Tycko et al., 1989), correspondant<br />

à χ=0,393 et ξ=0 ; les <strong>phases</strong> sont les suivantes :<br />

Φ 1 =Φ 2 =Φ 4 =(+x,-x,-x,+x,+y,-y,-y,+y) ; Φ 3 =(+y,-y,-y,+y,-x,+x,+x,-x,-y,+y,+y,-y,+x,-x,-x,+x)<br />

En <strong>par</strong>ticulier, une <strong>de</strong>s différences avec la séquence originale est que notre séquence ne nécessite pas <strong>de</strong><br />

transfert <strong>de</strong> polarisation <strong>par</strong> polarisation croisée pour amener l’aimantation transversale sur le 31 P. C’est une<br />

conséquence <strong>de</strong> l’abondance naturelle <strong>du</strong> 31 P, ainsi que <strong>de</strong> son assez grand rapport gyromagnétique, qui<br />

permettent <strong>de</strong> débuter directement la séquence <strong>par</strong> une impulsion <strong>de</strong> 90° sur le phosphore (à l’inverse <strong>de</strong><br />

Tycko en 13 C). Par ailleurs, le cyclage <strong>de</strong> <strong>phases</strong>, détaillé dans la légen<strong>de</strong> <strong>de</strong> la figure 1.11, ne sera pas<br />

expliqué ici. Nous mentionnerons simplement que son effet principal sur la dimension indirecte (recouplée,<br />

donc large ban<strong>de</strong>) est <strong>de</strong> rejeter aux <strong>de</strong>ux extrémités <strong>du</strong> spectres les artefacts expérimentaux, ainsi que <strong>de</strong><br />

diminuer la sensibilité aux imperfections <strong>de</strong>s impulsions qui ne seraient pas exactement <strong>de</strong> 180°, et nous<br />

renverrons pour cela à l’article originel.<br />

Enfin, on notera que l’on ne découple pas en 1 H pendant la pério<strong>de</strong> d’évolution t 1 . Cela a inévitablement<br />

pour conséquence <strong>de</strong> recoupler également le couplage dipolaire proton-phosphore, donc la coupe obtenue<br />

selon la dimension indirecte ne sera pas purement <strong>du</strong>e au CSA recouplé. Mais il a été vu que le couplage<br />

hétéronucléaire dipolaire était faible ; <strong>de</strong> plus, il y aurait <strong>de</strong>s interférences entre les impulsions 31 P et 1 H, ce<br />

qui rendrait le recouplage inefficace. Par contre le canal proton est systématiquement découplé <strong>du</strong> canal<br />

phosphore <strong>du</strong>rant t 2 , <strong>par</strong> l’application d’une on<strong>de</strong> continue.<br />

Tout ceci doit nous permettre en théorie d’obtenir <strong>de</strong>s spectres 2D où l’on sé<strong>par</strong>e sur une dimension les<br />

lipi<strong>de</strong>s selon leur spectre haute résolution, et où l’on lit leur spectre recouplé <strong>du</strong> CSA, i.e. leur spectre<br />

statique multiplié <strong>par</strong> un facteur d’échelle, sur l’autre dimension. Ces spectres seront présentés et commentés<br />

au chapitre 3, après avoir au<strong>par</strong>avant présenter les métho<strong>de</strong>s expérimentales et le matériel employé.<br />

16


Chapitre 2<br />

Matériels et métho<strong>de</strong>s<br />

C<br />

e chapitre a <strong>de</strong>ux buts : (i) détailler les protocoles expérimentaux utilisés, principalement dans la<br />

pré<strong>par</strong>ation <strong>de</strong>s mélanges <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s et dans l'obtention <strong>de</strong> fantômes blancs <strong>de</strong> globules rouges et<br />

(ii) <strong>de</strong> décrire les ap<strong>par</strong>eils et les procé<strong>du</strong>res <strong>de</strong> traitement <strong>du</strong> signal requis pour la réalisation <strong>de</strong> spectres<br />

<strong>RMN</strong> <strong>du</strong> 31 P, qu'il s'agisse <strong>de</strong> spectres statiques, <strong>de</strong> spectres haute résolution ou <strong>de</strong> spectres 2D recouplés.<br />

I. Pré<strong>par</strong>ation <strong>de</strong>s échantillons<br />

A. Les pré<strong>par</strong>ations <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s hydratés<br />

Tous les lipi<strong>de</strong>s utilisés sont commerciaux, et <strong>de</strong> marque Sigma. Les solvants utilisés (chloroforme,<br />

méthanol et éthanol) sont <strong>de</strong> marque Sigma, d'une pureté pour analyse. L'eau lour<strong>de</strong> (D 2 O), fournie <strong>par</strong> le<br />

CEA à Saclay, a une pureté <strong>de</strong> 99,8%.<br />

Les expériences ont été menées sur plusieurs échantillons <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s. Les premières mises au point<br />

expérimentales se sont faites sur <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s uniques. Nous avons ainsi commencé <strong>par</strong> réaliser <strong>de</strong>s<br />

échantillons <strong>de</strong> DMPC puis <strong>de</strong> DOPE. Pour ce faire, 100mg <strong>de</strong> phospholipi<strong>de</strong>s sont mélangés à 100µL <strong>de</strong><br />

D 2 O. Le mélange est homogénéisé <strong>par</strong> vortex, et la dissolution <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s est assurée <strong>par</strong> alternance <strong>de</strong> 3<br />

cycles <strong>de</strong> congélation à –10°C – décongélation à +60°C. On forme ainsi <strong>de</strong>s vésicules multilamellaires<br />

hydratées à 50%. Après centrifugation (10min à 10.000g), le culot ( 120µL d'une “pâte blanche”) est transféré<br />

dans un rotor MAS.<br />

Afin <strong>de</strong> modéliser un mélange biologique simple <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s, nous avons également réalisé un mélange<br />

ternaire, contenant proportionnellement environ 30% <strong>de</strong> DOPC, 40% <strong>de</strong> DOPE et 30% <strong>de</strong> cholestérol en<br />

moles. L'homogénéité <strong>du</strong> mélange est assurée en dissolvant en tout 150mg <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong>s dans 20mL <strong>de</strong> solvants<br />

organiques (mélange chloroforme-méthanol 10:1). Après 3 cycles d'évaporation rotative sous vi<strong>de</strong> puis<br />

redissolution dans 10mL <strong>de</strong> solvant, 100mg <strong>de</strong> poudre (contenant les 3 lipi<strong>de</strong>s) sont prélevés et dissous dans<br />

100µL d’un tampon 150mM KCl, 10mM Tris, 0,2mM EDTA, pH=7,2. La pré<strong>par</strong>ation <strong>de</strong>s vésicules est alors<br />

i<strong>de</strong>ntique à celle précé<strong>de</strong>mment exposée.<br />

B. Les fantômes <strong>de</strong> globules rouges<br />

Les échantillons <strong>de</strong> stromas sont pré<strong>par</strong>és à <strong>par</strong>tir d'un culot <strong>de</strong> globules rouges humains distribués <strong>par</strong> les<br />

Établissements <strong>de</strong> Transfusion Sanguine <strong>de</strong> l'Assistance Publique/Hôpitaux <strong>de</strong> Paris. Il s’agissait d'un pro<strong>du</strong>it<br />

âgé <strong>de</strong> trois jours au moment <strong>de</strong> la pré<strong>par</strong>ation, et non utilisable en transfusion pour cause <strong>de</strong> volume<br />

insuffisant. La pré<strong>par</strong>ation <strong>de</strong> fantômes requiert <strong>de</strong>ux tampons : un tampon <strong>de</strong> lavage A (145mM NaCl, 5mM<br />

KCl, 5mM HEPES, 0,5mM MgSO 4 , pH=7,4) et un tampon d'hémolyse B (5mM HEPES, 1mM EDTA,<br />

pH=8). Un maximum d'étapes sont effectuées à 4°C, donc en chambre froi<strong>de</strong> ou dans la glace. 40mL <strong>de</strong><br />

globules rouges sont prélevés et lavés <strong>de</strong>ux fois avec le tampon A. La centrifugation <strong>du</strong>re 15min à 25.000g.<br />

17


On procè<strong>de</strong> ensuite à la lyse osmotique en versant la fraction lavée dans 40 volumes <strong>du</strong> tampon B. On laisse<br />

le mélange en agitation <strong>du</strong>rant <strong>de</strong>ux heures, avant <strong>de</strong> centrifuger le tout à 26.000g pendant 20min à 4°C. On<br />

lave le culot <strong>de</strong> la sorte quatre autres fois, dans un volume <strong>de</strong> tampon B à chaque fois. Après la première<br />

centrifugation, il faut enlever le “red button” rouge foncé (sous le culot), qui contient <strong>de</strong>s protéases. On<br />

récupère finalement un liqui<strong>de</strong> blanc visqueux, constitué <strong>de</strong>s membranes percées sé<strong>par</strong>ées <strong>de</strong> l'hémoglobine :<br />

c'est le stroma. Pour concentrer l'échantillon en vue d'améliorer la qualité <strong>de</strong>s spectres, il convient <strong>de</strong> lui faire<br />

subir une ultra-centrifugation à 100.000g pendant 10min à 4°C. On peut alors remplir le rotor avec un<br />

volume <strong>de</strong> 120µL environ.<br />

II. Utilisation <strong>de</strong> l’ap<strong>par</strong>eil <strong>de</strong> <strong>RMN</strong><br />

A. Description <strong>du</strong> matériel<br />

Le spectromètre utilisé est un spectromètre <strong>de</strong> marque Bruker, modèle DMX 400 WB. Il s'agit d'un<br />

spectromètre à large trou, dont la fréquence <strong>de</strong> résonance en proton est 400,13 MHz (et en 31 P : 161,9 MHz).<br />

Son champ statique a une valeur <strong>de</strong> 9,4T. La son<strong>de</strong> qui l'équipe est une son<strong>de</strong>-MAS 4mm à 2 canaux, un<br />

canal proton et un canal accordable “large ban<strong>de</strong>”, <strong>de</strong> marque Bruker. Le rotor en zirconium a un diamètre<br />

<strong>de</strong> 4mm, une hauteur <strong>de</strong> 1cm et est fermé <strong>par</strong> un bouchon à ailettes en Kel-F. Son volume est <strong>de</strong> 120µL. Sa<br />

rotation à l'angle magique est assurée au moyen d'une unité pneumatique qui délivre <strong>de</strong>ux flux d'air, comme<br />

l'illustre la figure 2.1.<br />

figure 2.1 : schéma <strong>de</strong> principe d'une son<strong>de</strong> MAS; sur une son<strong>de</strong> Bruker, le “drive” arrive en haut car c'est le bouchon<br />

qui possè<strong>de</strong> <strong>de</strong>s pales.<br />

La vitesse <strong>de</strong> rotation est contrôlée <strong>par</strong> stroboscopie, et est constante à moins <strong>de</strong> 1% près sur une <strong>du</strong>rée <strong>de</strong><br />

plus <strong>de</strong> 10 heures. La température <strong>de</strong> l'échantillon est maintenue constante au moyen d'une résistance<br />

chauffante qui règle la température <strong>du</strong> gaz <strong>de</strong> lévitation (“bearing”).<br />

L'ensemble <strong>du</strong> spectromètre est piloté <strong>par</strong> une station Indy Silicon Graphics, reliée à une console Bruker<br />

Avance 400.<br />

18


B. Mise en œuvre <strong>de</strong>s spectres <strong>de</strong> <strong>RMN</strong><br />

Le matériel décrit précé<strong>de</strong>mment permet <strong>de</strong> réaliser les différents types <strong>de</strong> spectres <strong>du</strong> 31 P mis en œuvre<br />

expérimentalement : spectres haute résolution en MAS, spectres statiques et surtout spectres 2D recouplés.<br />

Avec les caractéristiques propres au matériel, les <strong>du</strong>rées <strong>de</strong>s impulsions 90° sont typiquement <strong>de</strong> 4,5 à<br />

5,5µs pour 31 P, et <strong>de</strong> 9 à 10µs pour 1 H. Pour les spectres découplés sur le canal proton pendant l’acquisition,<br />

cela assure un découplage <strong>de</strong> 25kHz environ.<br />

La réalisation <strong>de</strong> spectres statiques (sans faire tourner le rotor) se fait <strong>par</strong>adoxalement au moyen <strong>de</strong> la<br />

son<strong>de</strong> MAS (qui possè<strong>de</strong> un meilleur facteur <strong>de</strong> qualité qu'une son<strong>de</strong> liqui<strong>de</strong>), mais, comme il n'est pas<br />

possible <strong>de</strong> réguler la température si l'on n'envoie pas d'air, il faut pour cela démonter la son<strong>de</strong> pour y<br />

bloquer le rotor au moyen d'un papier <strong>de</strong> Parafilm. On peut alors souffler <strong>de</strong> l'air chaud sans faire tourner le<br />

rotor. De plus, il faut adapter pour ces spectres statiques une séquence d’impulsions avec écho en 31 P. La<br />

décroissance <strong>du</strong> FID étant très rapi<strong>de</strong>, on “récupère” les premiers points en refocalisant l’aimantation au<br />

moyen d’une impulsion <strong>de</strong> 180°. Il faut pour cela étalonner au préalable la <strong>du</strong>rée <strong>de</strong> cette impulsion. Le canal<br />

proton est découplé pendant l’acquisition.<br />

Les spectres 2D recouplés sont mis en œuvre avec <strong>de</strong>s <strong>par</strong>amètres qui peuvent différer légèrement d’une<br />

expérience à l’autre. Généralement les <strong>du</strong>rées <strong>de</strong>s expériences sont <strong>de</strong> 3 heures 30 avec 64 scans. Pour les<br />

fantômes <strong>de</strong> globules rouges, il faut passer à 16 heures avec 256 scans.<br />

19


Chapitre 3<br />

Résultats et discussion<br />

C<br />

e chapitre a pour but d'exposer et <strong>de</strong> commenter une <strong>par</strong>tie <strong>de</strong>s résultats obtenus <strong>du</strong>rant les cinq<br />

mois <strong>de</strong> manipulations expérimentales, celle qui va à l'appui <strong>de</strong> la <strong>par</strong>tie théorique développée au<br />

chapitre 1. Pour une bonne compréhension <strong>du</strong> déroulement <strong>du</strong> stage, nous nous efforcerons <strong>de</strong> présenter ces<br />

résultats dans un ordre chronologique, qui reflète le mieux la démarche suivie.<br />

I. Mise au point sur un lipi<strong>de</strong>, la DMPC<br />

Afin <strong>de</strong> mettre en application les techniques développées précé<strong>de</strong>mment, et notamment <strong>de</strong> tester<br />

l’efficacité <strong>de</strong> la métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> recouplage, il nous est tout d’abord ap<strong>par</strong>u nécessaire <strong>de</strong> nous intéresser à un<br />

cas simple et bien décrit dans la littérature. La DMPC est connue pour présenter une transition <strong>de</strong> phase à<br />

23°C, entre une phase lamellaire gel (L β ) à basse température et une phase lamellaire flui<strong>de</strong> (L α ) à haute<br />

température. On doit donc s’attendre à <strong>de</strong>ux observations sur les spectres statiques <strong>du</strong> 31 P <strong>de</strong> la DMPC : ils<br />

doivent avoir une asymétrie caractéristique (un “pic à droite”), et se rétrécir sensiblement lorsque l’on passe<br />

au <strong>de</strong>ssus <strong>de</strong> la température <strong>de</strong> transition (cf. chapitre 1, figure 1.7). Normalement, les mêmes observations<br />

doivent être faites sur une coupe longitudinale (selon la dimension indirecte) d’un spectre 2D recouplé <strong>de</strong><br />

DMPC.<br />

figure 3.1 : spectres statiques <strong>du</strong> 31 P <strong>de</strong> la DMPC (a) à 10°C, en phase gel ; (b) à 30°C , en phase flui<strong>de</strong>.<br />

Les spectres sont réalisés avec un écho, et découplés <strong>du</strong> 1 H pendant l’acquisition.<br />

La figure 3.1 repro<strong>du</strong>it les spectres statiques (sans rotation <strong>de</strong> l’échantillon) obtenus pour la DMPC à<br />

10°C (a) et à 30°C (b). La différence d’anisotropie entre les <strong>de</strong>ux <strong>phases</strong> est aisément quantifiable. Les CSA<br />

<strong>de</strong>s <strong>phases</strong> gel et flui<strong>de</strong> (les écartements <strong>de</strong>s raies ∆σ) ont <strong>de</strong>s valeurs expérimentales <strong>de</strong> 75 ppm et 55 ppm<br />

respectivement, soit environ 12kHz et 9kHz. Le rétrécissement <strong>du</strong> spectre observé en chauffant est d’environ<br />

25%, et l’asymétrie est nettement marquée dans les <strong>de</strong>ux cas. Nous pouvions donc nous <strong>de</strong>man<strong>de</strong>r si la<br />

20


otation à l’angle magique <strong>de</strong> l’échantillon, assortie <strong>de</strong> la séquence développée au chapitre 1, permettraient<br />

d’obtenir <strong>de</strong>s résultats com<strong>par</strong>ables. Bien sûr, l’utilisation d’une telle métho<strong>de</strong> n’a ici qu’un intérêt formel,<br />

puisque la DMPC est le seul lipi<strong>de</strong> présent et qu’il n’y a pas <strong>de</strong> nécessité à faire ap<strong>par</strong>aître une dimension<br />

supplémentaire au spectre. Mais <strong>par</strong> ailleurs, la réalisation <strong>de</strong> ces spectres a été l’occasion d’optimiser leurs<br />

nombreux <strong>par</strong>amètres.<br />

La figure 3.2 représente le spectre <strong>de</strong> recouplage obtenu avec la séquence <strong>de</strong> Tycko adaptée, pour un<br />

facteur d’échelle anisotrope <strong>de</strong> 0,393 (et un facteur d’échelle isotrope nul), à une vitesse <strong>de</strong> rotation <strong>de</strong><br />

figure 3.2 : spectre 2D <strong>de</strong> recouplage réalisé sur la DMPC à<br />

10°C ; la vitesse <strong>de</strong> rotation est <strong>de</strong> 5kHz, et la séquence<br />

correspond à χ=0,393<br />

5000Hz. Le spectre est repro<strong>du</strong>it sans être recadré.<br />

Les courbes <strong>de</strong> niveaux sont d’intensité croissante<br />

vers le centre <strong>du</strong> spectre. L’axe <strong>de</strong>s abscisses<br />

(dimension directe, haute résolution à 5000Hz) est<br />

gra<strong>du</strong>é en ppm, alors que l’axe <strong>de</strong>s ordonnées<br />

(dimension indirecte recouplée) est gra<strong>du</strong>é en Hz.<br />

On voit ainsi que la fenêtre spectrale dans la<br />

dimension indirecte est égale à la fréquence <strong>de</strong><br />

rotation en Hz a . La DMPC (ou plus simplement la<br />

PC) a un déplacement chimique isotrope calibré<br />

<strong>par</strong> référence à 0 ppm.<br />

Ce spectre met notamment en évi<strong>de</strong>nce<br />

l’efficacité <strong>de</strong> notre séquence dans la dimension<br />

directe, toute l’intensité étant concentrée dans une<br />

ban<strong>de</strong> relativement fine. Par ailleurs, le cyclage <strong>de</strong><br />

phase a effectivement pour conséquence <strong>de</strong> rejeter<br />

les artefacts à l’extérieur <strong>de</strong> la dimension<br />

recouplée (ce sont les <strong>de</strong>ux “pics” à<br />

ω<br />

/ 2π<br />

= ± 2500Hz ).<br />

De tels spectres ont été réalisés à différentes<br />

températures (10°C et 30°C principalement). En<br />

coupant le spectre 3.2 longitudinalement (i.e en<br />

suivant l’axe <strong>de</strong> la ban<strong>de</strong> fine et en passant <strong>par</strong> son maximum), on peut extraire les profils <strong>de</strong> raies recouplés<br />

<strong>de</strong> la DMPC. La figure 3.3 (en page suivante) dresse la com<strong>par</strong>aison entre ces profils à 10°C (a), et à 30°C<br />

(b), pour un facteur d’échelle anisotrope <strong>de</strong> 0,2 , et en tournant à 5kHz. L’axe est désormais gra<strong>du</strong>é en ppm.<br />

A nouveau <strong>de</strong>ux points sont à discuter : l’asymétrie et la largeur <strong>de</strong>s profils <strong>de</strong> raies. Il est clair que les<br />

coupes dans la dimension recouplée ne présentent pas la forme canonique <strong>de</strong>s spectres statiques. On<br />

entrevoit ainsi déjà une faiblesse <strong>de</strong> la séquence choisie. Les raisons en sont multiples, au premier rang<br />

<strong>de</strong>squelles se trouve la limitation intrinsèque <strong>de</strong> la résolution dans cette dimension.<br />

a La séquence échantillonne un point toutes les 200µs (=2π/ω r ), et ce dwell time est l’inverse <strong>de</strong> la fenêtre spectrale.<br />

21


Néanmoins on reconnaît dans les <strong>de</strong>ux spectres proposés une asymétrie lamellaire, même si le pic à droite<br />

est fortement “aplati”. Par ailleurs, comme pour les spectres statiques, le passage <strong>de</strong> 10°C à 30°C<br />

s’accompagne d’un rétrécissement <strong>de</strong> 20% également, qui marque la transition gel-flui<strong>de</strong>. Enfin,<br />

l’anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique peut être mesurée dans chacune <strong>de</strong>s <strong>phases</strong>; on mesure<br />

respectivement 14 ppm et 11 ppm pour les <strong>phases</strong> gel et flui<strong>de</strong>, qu’il faut diviser <strong>par</strong> le facteur d’échelle 0,2.<br />

On arrive à <strong>de</strong>s résultats (respectivement 70 et 55 ppm) très proches <strong>de</strong> ceux mesurés en statique, et<br />

cohérents avec la littérature.<br />

figure 3.3: coupes longitudinales d’un spectre <strong>de</strong> recouplage <strong>de</strong> la DMPC<br />

(a) à 10°C, (b) à 30°C; ω r /2π=5kHz, χ=0,2<br />

Mentionnons pour finir que la réalisation <strong>de</strong> ces premiers spectres <strong>de</strong> recouplage sur la DMPC, ainsi que<br />

d’autres sur la DOPE, mais qui ne seront pas reportés ici, nous a permis d’optimiser <strong>de</strong>s <strong>par</strong>amètres <strong>de</strong><br />

traitement <strong>de</strong>s données, mais également <strong>de</strong>s valeurs importantes comme la vitesse <strong>de</strong> rotation <strong>du</strong> MAS. Trop<br />

rapi<strong>de</strong>, on perd en résolution en ayant une trop gran<strong>de</strong> fenêtre spectrale, et la <strong>du</strong>rée τ <strong>de</strong>s impulsions 180°<br />

<strong>de</strong>vient non négligeable <strong>de</strong>vant τ r (Ishii & Terao, 1998). Trop lente, on ne peut plus loger le spectre dans la<br />

fenêtre. Il est alors ap<strong>par</strong>u optimal <strong>de</strong> tourner à une vitesse <strong>de</strong> 5kHz, qui est également la fréquence <strong>de</strong><br />

rotation employée <strong>par</strong> Tycko. Mais toute adaptation est envisageable, puique ω r et χ peuvent être mo<strong>du</strong>lés en<br />

fonction <strong>du</strong> CSA donc <strong>de</strong> la molécule<br />

II. Les résultats sur le mélange ternaire<br />

Les expériences précé<strong>de</strong>ntes nous ont permis <strong>de</strong> faire déjà quelques remarques intéressantes concernant<br />

notre séquence <strong>de</strong> recouplage. Mais elles n’ont jusqu’à présent pas démontré leur capacité à sé<strong>par</strong>er les<br />

phospholipi<strong>de</strong>s selon leur tête polaire. Par ailleurs, il n’a pas encore été observé <strong>de</strong> phase hexagonale, tant en<br />

statique que sur un spectre recouplé.<br />

Notre <strong>de</strong>uxième échantillon a donc été un mélange ternaire DOPC/DOPE/cholestérol, en pourcentage<br />

d’environ 30/40/30 en moles. C’est l’un <strong>de</strong>s seuls décrits dans la littérature comme possédant une<br />

coexistence lamellaire-hexagonal à une température accessible au sein d’un spectromètre (Moran & Janes,<br />

1998, Tilcock et al., 1982). Comme pour la PC seule, la première étu<strong>de</strong> se fait en statique, afin d’observer la<br />

transition <strong>de</strong> phase. Les résultats sont reportés sur la figure 3.4 <strong>par</strong> une évolution en température <strong>du</strong> profil <strong>de</strong><br />

raies.<br />

Ces spectres sont en tous points com<strong>par</strong>ables avec ceux <strong>de</strong> Janes (Moran & Janes, 1998), bien que notre<br />

mélange ait une composition légèrement différente. Bien sûr pour un mélange, on pourrait établir un<br />

22


diagramme binaire, ce qui explique que chaque phospholipi<strong>de</strong> passe progressivement d’une phase lamellaire<br />

flui<strong>de</strong> (a) à une symétrie hexagonale (d). On remarque qu’à une température <strong>de</strong> coexistence <strong>de</strong>s <strong>phases</strong>, le<br />

spectre ne peut pas aisément être décomposé en la somme <strong>de</strong> ses composantes. La PC ayant un plus grand<br />

∆σ que la PE (Cevc, 1993) b , et leurs déplacements chimiques isotropes étant respectivement 0 et 0,6 ppm,<br />

on peut attribuer les raies comme le montre la figure 3.4.<br />

figure 3.4: évolution <strong>de</strong>s spectres statiques <strong>du</strong> mélange ternaire avec la température;<br />

le spectre (a) a été augmenté d’un facteur 2.<br />

Avant <strong>de</strong> com<strong>par</strong>er ces résultats avec les coupes longitudinales effectuées sur un spectre <strong>de</strong> recouplage <strong>du</strong><br />

mélange ternaire, présentons l’un <strong>de</strong> ces spectres. La figure 3.5 en page suivante repro<strong>du</strong>it un grossissement<br />

<strong>du</strong> spectre obtenu pour un facteur d’échelle <strong>de</strong> 0,393 , à 37°C. On y distingue nettement les <strong>de</strong>ux ban<strong>de</strong>s<br />

sé<strong>par</strong>ées associées à la PC (0 ppm) et à la PE (0,6 ppm). Sur <strong>de</strong> tels spectres on peut extraire les coupes<br />

longitudinales pour chacun <strong>de</strong>s phospholipi<strong>de</strong>s, à différentes températures. Les évolutions en fonction <strong>de</strong> la<br />

température sont retracées sur la figure 3.7. La dimension directe <strong>du</strong> spectre 3.5 est nettement résolue. La PC<br />

et la PE ont <strong>de</strong>s déplacements chimiques suffisament différents (0,6 ppm d’écart seulement) pour donner<br />

naissance à <strong>de</strong>ux ban<strong>de</strong>s <strong>par</strong>allèles mais distinctes. Cela est confirmé <strong>par</strong> la coupe transversale <strong>de</strong> ces ban<strong>de</strong>s,<br />

repro<strong>du</strong>ite en figure 3.6, et qui est superposable à un simple spectre MAS à 5000Hz. De plus, comme le<br />

montrent les coupes 3.7, ces ban<strong>de</strong>s ont bien l’asymétrie atten<strong>du</strong>e en fonction <strong>de</strong> la phase lipidique. La PE<br />

est plus proche <strong>de</strong>s formes canoniques. Mais dans les <strong>de</strong>ux cas, la symétrie hexagonale n’a pas un CSA<br />

moitié plus faible que celui d’une phase lamellaire. Le rétrécissement est visible, mais pas quantitatif.<br />

b c’est ce que met en évi<strong>de</strong>nce l’astérisque sur le spectre 3.4(a).<br />

23


figure 3.5: gros plan d’un spectre <strong>de</strong> recouplage <strong>du</strong><br />

mélange ternaire DOPE/DOPC/cholestérol à 37°C;<br />

ω r /2π=5kHz, χ=0,393<br />

figure 3.6: superpositon d’un spectre MAS à 5000Hz<br />

(a) et <strong>de</strong> la coupe transversale <strong>du</strong> spectre 3.5 selon la<br />

dimension directe (b), pour le mélange ternaire à 37°C<br />

figure 3.7: coupes longitudinales <strong>de</strong> spectres <strong>de</strong> recouplage <strong>du</strong> mélange ternaire; seule la température varie;<br />

ω r /2π=5kHz ; χ=0,393<br />

24


III. Discussion <strong>de</strong>s résultats précé<strong>de</strong>nts<br />

Ces quelques résultats nous suffiraient presque pour commenter les avantages et les limites <strong>de</strong> notre<br />

technique <strong>de</strong> recouplage. Alors qu’un spectre statique comme le 3.4(c) ne permet pas <strong>de</strong> dé<strong>du</strong>ire la<br />

proportion <strong>de</strong> lipi<strong>de</strong> dans chaque phase pour un point au milieu <strong>du</strong> fuseau (sur le diagramme <strong>de</strong> <strong>phases</strong>), une<br />

technique comme celle <strong>du</strong> recouplage sé<strong>par</strong>e effectivement nos <strong>de</strong>ux lipi<strong>de</strong>s en leur associant un profil <strong>de</strong><br />

raies cohérent. Il n’en reste pas moins que ce profil n’est pas (encore!) d’une précision suffisante pour<br />

permettre d’attribuer <strong>de</strong>s proportions à chaque lipi<strong>de</strong> dans chaque phase. En théorie, le spectre 3.4(b) <strong>de</strong>vrait<br />

<strong>par</strong> exemple être la somme <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux spectres 3.7(b). Les explications à ces limitations sont multiples.<br />

– D’abord, on a vu au chapitre 1 que l’on recouplait également l’interaction dipolaire hétéronucléaire. On<br />

ne doit donc pas s’attendre à obtenir <strong>de</strong>s spectres aussi asymétriques que <strong>de</strong>s spectres statiques. Un<br />

découplage continu <strong>du</strong>rant la séquence s’est avéré infructueux, probablement en raison d’interférences avec<br />

le recouplage. Il faudrait sans doute tenter <strong>de</strong> découpler <strong>par</strong> <strong>de</strong>s impulsions <strong>de</strong> 180° centrées au milieu <strong>de</strong> la<br />

séquence.<br />

– De plus, les <strong>par</strong>amètres <strong>de</strong> l’expérience sont encore perfectibles. L’impulsion <strong>de</strong> 180°, notamment, n’est<br />

pas idéale, au sens où elle n’est pas <strong>par</strong>faitement carrée, pas <strong>par</strong>faitement instantanée (τ ≈ 11 µ s non<br />

négligeable <strong>de</strong>vant τ = 200 µ s ) ou pas <strong>par</strong>faitement repro<strong>du</strong>ctible. De même, les délais ne sont peut-être<br />

r<br />

pas assez précis ou repro<strong>du</strong>ctibles et la fréquence <strong>de</strong> rotation peut légèrement varier au cours <strong>de</strong><br />

l’expérience. Bref, on le voit, les causes techniques sont multiples pour justifier que l’expérience peut<br />

encore être améliorée.<br />

IV. Une extension à un système biologique : les fantômes <strong>de</strong> globules<br />

rouges<br />

Il s’est néanmoins avéré intéressant <strong>de</strong> tester cette expérience sur un échantillon biologique, en<br />

l’occurrence <strong>de</strong>s membranes d’érythrocytes isolées au sein <strong>de</strong> stromas. Si l’on ne doit vraisemblablement pas<br />

s’attendre à i<strong>de</strong>ntifier <strong>de</strong>s <strong>phases</strong> <strong>lipidiques</strong> au moyen <strong>de</strong>s coupes <strong>de</strong> leurs spectres <strong>de</strong> recouplage, la diversité<br />

lipidique <strong>de</strong> la membrane naturelle et sa faible concentration dans notre échantillon posaient la question <strong>de</strong> la<br />

résolution dans la dimension directe, et notamment <strong>du</strong> rapport signal/bruit. Il est à ce titre intéressant <strong>de</strong> noter<br />

que, pour être interprétable, un spectre 2D <strong>de</strong> recouplage sur les stromas doit <strong>du</strong>rer 16 heures au lieu <strong>de</strong><br />

3 heures 30 pour le mélange ternaire. Un gros plan <strong>de</strong> ce spectre, obtenu à une température <strong>de</strong> 30°C, et pour<br />

un facteur d’échelle anisotrope <strong>de</strong> 0,393, est repro<strong>du</strong>it sur la figure 3.8. Comme on l’a souligné au chapitre 1,<br />

tableau 1.6, la membrane <strong>de</strong>s érythrocytes recèle <strong>de</strong> nombreux lipi<strong>de</strong>s possédant un atome <strong>de</strong> phosphore.<br />

Outre les phospholipi<strong>de</strong>s “classiques”, on compte notamment la sphingomyéline (SM), dont le déplacement<br />

chimique isotrope vaut 0,6 ppm (comme la PE) (Warschawski, 1995). Une première vue sur le spectre 3.8<br />

nous indique déjà que la séquence <strong>de</strong> recouplage nous assure une résolution dans la direction directe<br />

suffisante pour distinguer plusieurs ban<strong>de</strong>s recouplées. La figure 3.9, qui représente la coupe transversale <strong>du</strong><br />

spectre 2D pour une fréquence <strong>de</strong> 0Hz, corrobore ce fait. Pour cela, on le superpose avec un simple spectre<br />

MAS-haute résolution à 5000Hz, ramené au même bruit. Le petit pic dû à la PS, à 0,15 ppm, déjà<br />

difficilement discernable sur un spectre haute résolution, est invisible en recouplage, tant sur une coupe que<br />

25


sur la 2D. Le reste <strong>de</strong>s spectres diffère peu.<br />

L’attribution <strong>de</strong>s ban<strong>de</strong>s se fait donc telle<br />

qu’elle est précisée sur le spectre 3.8: la PC à<br />

0 ppm, la PE et la SM à 0.6 ppm.<br />

Les coupes longitudinales associées sont<br />

détaillées sur la figure 3.10. L’asymétrie y<br />

est difficile à interpréter, surtout pour la PC,<br />

qui semble osciller. Il s’agit <strong>de</strong> résultats<br />

préliminaires récents, et <strong>de</strong>s étu<strong>de</strong>s plus<br />

systématiques doivent être engagées. Il faut<br />

néanmoins souligner le fait que notre<br />

séquence <strong>de</strong> recouplage est capable <strong>de</strong><br />

sé<strong>par</strong>er les lipi<strong>de</strong>s même en concentrations<br />

biologiques.<br />

figure 3.8 : gros plan <strong>du</strong> spectre <strong>de</strong> recouplage obtenu avec <strong>de</strong>s<br />

fantômes <strong>de</strong> globules rouges, à 30°C;<br />

ω r /2π=5kHz, χ=0,393<br />

figure 3.9 : superposition d’un spectre MAS à 5000Hz<br />

(a) et <strong>de</strong> la coupe transversale (b) <strong>du</strong> spectre 3.7 selon<br />

la dimension directe, pour <strong>de</strong>s fantômes <strong>de</strong> globules<br />

rouges à 30°C; les spectres sont ramenés au même bruit<br />

figure 3.10 : coupes longitudinales <strong>du</strong> spectre <strong>de</strong><br />

recouplage 3.7, selon la dimension indirecte, (a) à<br />

0,6 ppm, (b) à 0 ppm, pour <strong>de</strong>s fantômes <strong>de</strong> globules<br />

rouges à 30°C<br />

26


Conclusions et perspectives<br />

S<br />

i ce mémoire peut <strong>par</strong>aître volumineux, c’est qu’il avait tout d’abord pour ambition <strong>de</strong> faire<br />

comprendre une technique qui fait appel à <strong>de</strong> nombreux aspects <strong>de</strong> la <strong>RMN</strong>. Il fallait également<br />

situer le problème dans son environnement biologique, celui <strong>de</strong> l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s membranes et plus<br />

<strong>par</strong>ticulièrement <strong>de</strong>s <strong>phases</strong> <strong>lipidiques</strong>.<br />

La technique développée, le recouplage <strong>de</strong> l’anisotropie <strong>du</strong> déplacement chimique, déjà employée pour<br />

<strong>de</strong>s affinements <strong>de</strong> structures protéiques <strong>par</strong> exemple, peut ou pourra se révéler d’une gran<strong>de</strong> utilité dans<br />

l’étu<strong>de</strong> <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s. En principe elle permet <strong>de</strong> compléter les informations fournies <strong>par</strong> la simple <strong>RMN</strong><br />

statique en étant capable <strong>de</strong> sé<strong>par</strong>er les phospholipi<strong>de</strong>s selon leur tête polaire dans une <strong>de</strong>s dimensions d’un<br />

spectre 2D, y compris sur <strong>de</strong>s échantillons biologiques. Il a été vu que la <strong>de</strong>uxième dimension, censée<br />

refléter la phase lipidique <strong>par</strong> un spectre proportionnel au spectre statique, montrait <strong>de</strong>s problèmes <strong>de</strong><br />

résolution, <strong>par</strong>ticulièrement pour <strong>de</strong>s échantillons complexes. On peut cependant raisonnablement croire que<br />

<strong>de</strong>s améliorations techniques <strong>de</strong> l’ordre <strong>de</strong> celles que nous avons menées <strong>du</strong>rant ce stage seront à même <strong>de</strong><br />

régler certains <strong>de</strong> ces problèmes : on peut ajouter à la séquence un découplage pendant t 1 , on peut tenter <strong>de</strong> la<br />

mettre en œuvre sur une son<strong>de</strong> plus performante, ou avec <strong>de</strong>s amplificateurs plus puissants.<br />

Ce travail s’inscrit <strong>par</strong> ailleurs dans une problématique plus vaste que celle <strong>du</strong> polymorphisme. Le<br />

recouplage pourrait s’avérer un outil intéressant pour mettre en évi<strong>de</strong>nce l’existence <strong>de</strong> zones rigi<strong>de</strong>s au sein<br />

<strong>de</strong>s membranes biologiques. La conception <strong>de</strong> la membrane en terme <strong>de</strong> “mosaïque flui<strong>de</strong>” <strong>du</strong>e à Singer et<br />

Nicholson (Singer & Nicholson, 1972) a ainsi récemment évoluée. On aurait désormais plutôt tendance à<br />

l’interpréter en termes <strong>de</strong> “ra<strong>de</strong>aux” (“rafts”) rigi<strong>de</strong>s, associant <strong>de</strong>s sphingolipi<strong>de</strong>s et <strong>du</strong> cholestérol, et qui<br />

“flotteraient” au sein <strong>de</strong> la bicouche flui<strong>de</strong> (Simons & Ikonen, 1997). Ces domaines rigi<strong>de</strong>s (Glaser, 1993) se<br />

formeraient préférentiellement à proximité <strong>de</strong> protéines spécifiques (Denisov et al., 1998). S’ils impliquent<br />

majoritairement un certain lipi<strong>de</strong>, on peut espérer mettre en évi<strong>de</strong>nce sa rigidité sur <strong>de</strong>s spectres tels que ceux<br />

que nous avons réalisés. Il faut au préalable perfectionner cette métho<strong>de</strong>, voire envisager <strong>de</strong> la com<strong>par</strong>er à<br />

une autre métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> recouplage. Il est enfin intéressant <strong>de</strong> noter que les techniques <strong>de</strong> recouplage ne sont<br />

pas limitées au CSA, pas plus qu’au 31 P. Lorsque c’est l’interaction dipolaire qui est recouplée, et <strong>par</strong>ce que<br />

cette interaction dépend <strong>de</strong> la distance internucléaire, le recouplage permet <strong>de</strong> mesurer <strong>de</strong>s distances entre<br />

rési<strong>du</strong>s dans <strong>de</strong>s protéines. Ainsi, les métho<strong>de</strong>s R 2 (Rotational Resonance) et REDOR (Rotational Echo<br />

Double Resonance) sont <strong>de</strong>s métho<strong>de</strong>s <strong>de</strong> choix dans le raffinement <strong>de</strong>s structures protéiques (Warschawski<br />

et al., 1998). Une métho<strong>de</strong> <strong>de</strong> recouplage a <strong>par</strong> ailleurs déjà été appliquée à <strong>de</strong>s lipi<strong>de</strong>s, mais il s’agissait <strong>de</strong><br />

recoupler l’interaction dipolaire entre 1 H et 13 C (Gross et al., 1997).<br />

27


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28


Annexe 1<br />

Les principaux lipi<strong>de</strong>s membranaires<br />

♦ Phosphoglycéri<strong>de</strong>s<br />

• diacylphosphoglycéri<strong>de</strong>s<br />

• plasmalogènes<br />

♦ Diacylglycéroglycéri<strong>de</strong>s<br />

♦ Sphingolipi<strong>de</strong>s<br />

• cérami<strong>de</strong>s<br />

O<br />

H 2<br />

O C<br />

O CH<br />

O<br />

O C O P O<br />

H 2<br />

_<br />

O<br />

H 2<br />

O C<br />

O CH<br />

O<br />

O C O P O<br />

H 2<br />

_<br />

O<br />

O<br />

H 2<br />

O C<br />

O CH<br />

X<br />

X<br />

O C O sucre<br />

H 2<br />

OH<br />

OH<br />

• sphingophospholipi<strong>de</strong>s*<br />

(*sphingomyéline SM : X=choline)<br />

• sphingoglycolipi<strong>de</strong>s<br />

♦ Stérols<br />

• cholestérol<br />

NH<br />

O<br />

OH<br />

O<br />

O P O X<br />

NH O _<br />

O<br />

OH<br />

O sucre<br />

NH<br />

O<br />

HO<br />

Les têtes polaires X sont détaillées au chapitre 1, figure 1.2<br />

29

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