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Royaume du Maroc<br />

Ministère de la Culture<br />

Benyounes Amirouche<br />

Flash-back<br />

Galerie Mohamed El Fassi - Rabat<br />

Décembre 2010


Pop art, en quête<br />

La peinture est liée à l’art et à la vie et j’essaie de travailler dans<br />

l’intervalle qui les sépare<br />

Robert Rauschenberg<br />

L’art c’est ce que nous faisons. La culture, c’est ce qu’on nous fait.<br />

Carl André<br />

L’exposition intitulée: «Flash Back» de Benyounes Amirouche est l’œuvre d’un artiste<br />

peintre qui ne cesse depuis 2003 de revisiter et de remixer les (ses) souvenirs liés aux<br />

moments vécus dans des Galeries, des Salles de cinéma, des Bibliothèques et des<br />

Discothèques. Elle est fragments d’une «Pellicule de Mémoire»,-«sharîtû ddâkirâ», selon<br />

ses propres termes. Grâce à un processus de défilement, cette dernière libère des bribes<br />

de séquences, ouvrant sur un infini, un vide au sens d’un je(u) de possibles plastiques.<br />

Lequel est d’autant plus nécessaire, salutaire, que l’actuelle évolution du «monde de l’art»<br />

au Maroc et, notamment, au niveau de son «marché» en voie d’émergence, n’est pas<br />

sans liens avec un réel état d’autosuffisance et de clôture entretenu moins par le «génie<br />

propre» des «artistes» que par les «attentes» et les «besoins» de leurs «commanditaires» :<br />

«En peinture, - écrit Driss Ksikes-, à l’exception des artistes reconnus qui se sont frayé une<br />

voie vers l’international, ce sont les banques marocaines (ou fondations de banques) qui<br />

achètent sur le marché national. Dans ce monde codé, semi-libéral et très convenu, on<br />

achète parce que «c’est du Bellamine ou du Rabie». Cette expression générique, laissant<br />

croire que la pièce existe comme prototype d’une manière de créer, finit par favoriser<br />

une forme d’art institutionnel. Evidemment, l’artiste n’est pas déterminé par la demande<br />

de son client, mais la propension d’artistes-peintres marocains à toujours travailler dans<br />

le même registre montre à quel point le circuit peut façonner le produit» 1 . S’employant<br />

à renforcer ce processus d’institutionnalisation, le dit monde de l’art se dote de galeries<br />

1- Ksikes (D), «La culture prisonnière de ses réseaux» in Qantara, n°59, Paris, Printemps 2006, p.46. w


et de revues spécialisées ainsi que de la mise en place d’un marché en passe d’être<br />

régulé, professionnalisé. Un tel processus est ce qui semble expliquer en même temps le<br />

fait que face à des motifs plastiques et thématiques se muant peu à peu en une espèce<br />

de griffe ou de fonds de commerce, des artistes, exigeants, cherchent, eux, à faire de<br />

la «souvenance» une forme de «résistance», propulsant leur univers dans des chantiers<br />

et des carrefours de type expérimental susceptible de les mettre à l’abri du confinement<br />

répétitif, amnésique: le poids des contraintes et, surtout, des clichés liés à la logique<br />

d’un «circuit» dont les modes de réception et d’usages de l’art restent, pour l’essentiel et,<br />

jusqu’à nouvel ordre, fonctionnel, ornemental et marchand.<br />

Le travail qu’opère Flash Back s’inscrit dans le sillage d’une peinture qui, partant d’un<br />

parti pris pop artistique, -option «ouverte entre l’art et la vie »-2, revisite une «mémoire<br />

d’origine», un «Age d’Or» proche et lointain en même temps. Sans doute, le terme<br />

«nostalgie» que le peintre avance, ici et là, en marge de l’exposition, est-il nostalgie d’une<br />

ère où les techniques de reproduction, notamment à l’échelle du cinéma, ne portaient<br />

pas encore préjudice à «l’aura» de la «signature» ni à la singularité et l’universalité<br />

du contexte de «production». Equivalent d’un «Combine Paintings», l’exposition est un<br />

assemblage de matériaux dessinés, peints et d’objets «extraits du monde réel», de sorte<br />

que chaque toile croise, entremêle, à chaque fois, divers paradigmes à l’image d’un<br />

heureux et vigoureux bric-à-brac attestant la présence d’une souvenance-résistance,<br />

celle d’une «mémoire», d’un «Atelier» ou d’un «Temple» dé-purifiés, dé-hiérarchisés. Une<br />

actrice (Elisabeth Taylor), un acteur (Richard Burton), deux plasticiens (Fouad Bellamine<br />

et Abdelkrim Wazzani), deux metteurs en scène (Alfred Hitchcock et Nabil Lahlou), des<br />

groupes de Rock (Beatles, Bee Gees), des chanteurs (Louis Amstrong, Mike Jagger, Manolo<br />

Escobar, Michel Polnareff) rendent le retour de/ à l’équivalent d’une galaxie d’«Etoiles»<br />

retour d’un/ à un jeu de possibles à haute densité plastique. A l’instar des premières<br />

affiches de cinéma, chacune des toiles de «Flash Back» entremêle en permanence<br />

dessin, couleurs, photographie, typographie et composition géométrique. Une logique<br />

de passages, de glissements, de déplacements et d’emboîtements de «cadres» et de<br />

2- Voir Honnef (K), Pop art; Ed. Taschen, Paris, 2006, p.23.


Série Flashback,<br />

collage et acrylique sur toile, 2008, 71 x 60 cm


«plans» d’«archives» visuelles, musicales et gestuelles, réelles et imaginaires, en est l’effet<br />

autant que la cause. Pochettes de disques, catalogues et bien d’autres «ruines» sont ici<br />

traces moins d’une «réalité perdue» se reconstituant à l’identique, «copie conforme», que<br />

traces d’un bonheur et d’une joie d’être, à chaque fois, au plus près d’une enfance d’art<br />

et/ou d’un art de l’enfance. Surgissent ainsi des fragments d’une totalité qui, inachevée,<br />

et reste continuel jeu de «correspondances»; quand bien même délabré, voire menacé<br />

de «disparition» définitive, irréversible, le Temple en jeu s’avère capable d’abriter encore<br />

les «souvenirs» d’une série d’«Etoiles», toujours vivaces, irradiantes.<br />

Le Temple revisité recèle encore certes une plasticité première, celle de la mémoire<br />

d’avant toute opération de mise en «circuit», de clôture du «réel» et de «l’œuvre», de<br />

«l’art» et de la «vie». Se refusant à toute séparation, sédimentation, fixation ou «arrêt<br />

sur images» définitif, le tout se déploie de bout en bout hors toute frontière strictement<br />

locale ou nationale. La «fusion» des contraires est ce qui semble définir son devenir :<br />

une figure comme celle du cercle présente dans les Arcades, les Dômes, les Palmiers, les<br />

Microsillons et les Visages rend d’avantage perceptible, visible voire lisible, la tension du<br />

trait d’union qu’est «l’intervalle» à l’œuvre, celle du «même» et de l’«autre», de «l’ici» et<br />

de «l’ailleurs», du «singulier» et de «l’universel». La place réservée à la musique (Jazz,<br />

Rock et Disco) participe, elle, à travers une série de Portraits, de Noms d’Artistes et de<br />

Titres d’Albums, à ce même et continuel je(u) d’assonances et de dissonances entre Mots<br />

et Images redoublant et multipliant l’état de cinétisme premier, initial, non séparé qu’est<br />

l’atelier de mémoire comme lieu d’arpentage et foyer de répétitions, de variations et<br />

d’improvisation sans fins3.<br />

Le recours à une formule telle que Pellicule de Mémoire en dit long sans doute sur la<br />

place du cinéma dans Flash back. Dès «l’origine», la «Nouvelle Lumière» renonça à<br />

toute «pureté» générique et thématique. Dés ses débuts, le Septième Art célébra sans<br />

exception tous les Arts. Et le Pop Art s’est, lui, immédiatement servi du nouveau langage,<br />

au même titre que de la photo et de la télévision, et ce, en tant que contenus (Stars, Pub,<br />

Faits Divers) et formes en même temps (Portrait, Gros Plans, Montage). La référence à<br />

la célébrissime actrice hollywoodienne Elizabeth Taylor nous semble rendre hommage à


Série Flashback,<br />

collage et acrylique sur toile, 2008, 71 X 60 cm


celui qui en a fait, refait et défait l’aura : le peintre ciné-photo-phile qu’est Andy Warhol.<br />

Sans doute y-a-t-il là un désir de filiation et de généalogie par rapport au travail,<br />

toujours vivace, historique, accompli par la célèbre Factory newyorkaise. L’évocation<br />

de l’une des figures les plus emblématiques du Cinéma d’Auteur, Alfred Hitchcock,<br />

constitue, sans nul doute, un hommage non moins discret et urgent à une signature<br />

représentative d’un contexte exceptionnel où Beauté (le cinéma comme Septième Art) et<br />

Fonction (le film comme objet industriel) se devaient de se concerter et de cohabiter sans<br />

de grands heurts. Le portrait photographique de l’auteur de Vertigo ne pointe-il pas ainsi<br />

l’angoisse et l’appréhension de celui qui s’apprête, désenchanté et heureux, à quitter<br />

définitivement le «Circuit» et ses contraintes satisfaites, imbues d’elles-mêmes? Mettre<br />

côte à côte des artistes Locaux et des Stars mondiales, cela souligne sans doute l’effort<br />

de maintenir vivaces les traces et les souvenirs d’une Galaxie largement «menacée», ici<br />

comme ailleurs, par le rouleau compresseur, nivelant et uniformisant, qu’est aujourd’hui<br />

«l’Audimat», - l’«inceste consommé entre le Spot (publicitaire) et la Télévision» (Serge<br />

Daney)-, les deux plus que jamais soucieux de «proximité», du «Grand Public», obligeant<br />

le Septième Art à se plier à la loi et les règles du quantifiable et du rentable que sont leurs<br />

commandes abêtissantes respectives, quotidiennes.<br />

Ce qui nous semble le plus retenir dans F.B est en somme l’expérience de souvenancerésistance<br />

menée dans l’«intervalle» qui, souvent, «séparant» en termes empressés et,<br />

sans doute, de plus en plus «experts», privilégie la «Vie de l’Art» plutôt que l’«Art de la<br />

Vie». La patiente revisite dudit «Age d’Or» est ainsi arpentage d’un entre-deux, un état<br />

3- Au sujet de la musique et, notamment, de la chanson, pratique toute aussi «institutionnelle», force est<br />

de relever qu’un Rappeur comme Khassir/Bigg opère dans son album : «Byad’Wuk7al» datant de 2010 le<br />

même type d’élargissement auquel on assiste ci-dessus, et qu’il nomme: «coloriage», et ce, à l’échelle de ce<br />

qu’on pourrait qualifier, d’un côté, le thématique: Enfance et jeunesse au Derb, «16 Mai», «mort de la mère»,<br />

«famine en Afrique», de l’autre, le générique : Mémoire du Rapp, Hip Hop et «Chanson locale», - revisitée,<br />

entre autres, via Nass El Guiwane, loin de la prudence de leurs «M3ani», jeu d’allusions poétiques face à la<br />

«nudité» souvent «crue» du «réel»-, outre «Sons» et «Bruits», entre autres «matériaux» où chaque «morceau»<br />

de l’album, conscient du «réel», de «lui-même» et «d’autrui», fait que le tout se déploie au plus près<br />

d’une densité, une «polychromie» - le contraire d’un «circuit», d’une «chanson» se mordant la queue.


Série Flashback,<br />

collage et acrylique sur toile, 2008, 71 x 61 cm


de vacillement faisant face à l’assurance, l’arrogance et le triomphe de tout prototype<br />

dit artistiquement (financièrement) séparé, autosuffisant et définitif. La «rétrospection» est<br />

«prospection» continue dans et hors ledit «circuit». N’étant plus enregistrée ni projetée<br />

en «Noir» ou «Blanc», la mémoire, désormais chorégraphie de Formes, de Figures et<br />

de Couleurs multiples, mouvantes, se laisse «façonner» moins par ce dernier que par les<br />

«Lettres», les «Rythmes», les «Compositions», les «Arrangements», les «Sons», les «Images»<br />

et, sans doute, les «Bruits». B.A fait partie intégrante de la «communauté» des peintres<br />

touche-à-tout œuvrant inlassablement pour que tout matériau, quel qu’il soit, revisité et<br />

remixé reste en devenir, ni «Original(e)» ni «Copie Conforme»4.<br />

Abdelkrim CHIGUER<br />

Université de Meknès<br />

4- Dans le même type de sillage pop artistique, Mounir Fatmi, qui agit entre Histoire de l’art et Histoire<br />

de l’humanité, se montre ouvertement critique vis-à-vis du «circuit» établi, et ce, grâce à une hybridité<br />

générique et thématique opérant à partir de photographies, vidéographies, versets, slogans, proverbes<br />

et bien d’autres matériaux verbaux et iconiques, fixes et mobiles. Son chantier est, entre autres, jeu de<br />

«Calligraphie aux fils électriques», «calligraphie» sur support métallique, «à la scie», «Gratte ciels» composés<br />

de livres en plusieurs langues avec deux gros volumes réservés aux Deux Tours, - subtile réminiscence<br />

du «11 Septembre»-, ou «chantier», sol blanc, immaculé, où s’entassent des «Casques» d’ouvriers laissant<br />

voir sur chacun d’entre eux un nom propre: «Jacques Derrida », «Georges Bataille» ou «Edward Saïd ». Les<br />

«installations» de M.F vont à l’encontre de ce qui condamne à un «minimalisme» de plus en plus «désincarné»,<br />

érigé en «prototype» où le «Réel» est réduit à des «Scènes Typiques» et l’«Art» à une «abstraction»<br />

et une «figuration» faites de «motifs» répétitifs, interchangeables, allant de la «fantasia» au «lettrisme» ou<br />

«calligraphisme», le tout équivalent d’un «académisme» de type néo-naïf et néo-orientaliste. Grâce à ses<br />

palettes, ses fichiers, ses logiciels et ses divers supports, fruit d’un incessant travail de «bricolage et de<br />

recyclage» (Genette), l’audace d’un tel atelier eut-elle été possible sans la part d’«autonomie» dont jouit<br />

le «tangérois», le «passionné des marchés aux puces», le nomade, qui, dès ses débuts, s’est senti à l’étroit<br />

dans le «circuit»?


Série Flashback,<br />

collage et huile sur toile, 2003, 100 x 90 cm


Série Flashback,<br />

collage et huile sur toile, 2004, 140 x 120 cm


Série Flashback,<br />

collage et huile sur toile, 2007, 140 x 120 cm


L’atelier de la mémoire de B.A<br />

B.A.: non pas un nom mais deux lettres, une inscription; un anonyme qui fait signe par<br />

ces deux engrammes. Le corps qui leur correspond n’est que l’exécutant impersonnel mais<br />

individué d’une mémoire qui se présente simultanément comme musée et comme atelier.<br />

C’est là que réside le sens (les sens) des derniers Combines de Benyounes Amirouche;<br />

des sens qui s’inscrivent dans les interstices mobiles de sa mémoire-atelier-musée: traces<br />

impersonnelles et personnelles, traces hétérogènes et multiples animant le jeu (au sens de<br />

«ludique» et de «espace») de l’œuvre (comme objet plastique) et de la vie (objets intégrés<br />

dans l’œuvre).<br />

C’est dans l’interstice d’un travail d’abstraction et de figuration à la fois (Figuration libre?<br />

Nouvelle figuration? Pop Art?) Que le peintre-plasticien s’installe. La vie comme objets de<br />

l’ordinaire, comme puissances/potentiels et comme acte (on voit le travail et les traces de<br />

l’exécution, on voit la main), structurent et déploient l’idée-affect de ces travaux.<br />

Par sa réflexivité (devenant mémoire d’elle-même, des textes et des contextes qui la<br />

composent), l’œuvre s’enclenche sur le vivant. Le musée n’est pas que mémoire (statique),<br />

il est aussi et surtout atelier vif.<br />

Cette dialectique du musée-atelier est une refonte du Temps: passé, présent et leurs<br />

devenirs entrent dans un processus de fusion où c’est la plasticité en tant qu’acte qui prend<br />

le devant et interpelle le corps du spectateur. Le maintenant, l’antériorité et la postériorité<br />

y sont des notions sans pertinence. Elle est (cette dialectique) aussi refonte de l’espace: les<br />

espaces de l’ici et de l’ailleurs (d’autres Cultures, d’autres «géo-esthétiques») se recoupent<br />

et, désormais, seul l’espace de l’œuvre est espace de composition, recomposition. En<br />

fait, le travail de la mémoire est-ce un passé? Est-ce un présent? Revisite-t-il une mémoire<br />

propre à soi ou une mémoire impersonnelle et multiple? Le présent existe-il, en définitive,<br />

puisqu’il suffit de le nommer pour qu’il soit déjà un passé? Ne vivons-nous pas dans un<br />

éternel Flash back?!<br />

C’est cette ambivalence que les travaux de B. Amirouche interrogent. Les combinatoires<br />

mnésiques et plastiques s’associent pour aboutir à des re-compositions faites de<br />

récupération et de recyclages aux dimensions ludiques, (auto-) biographiques et où l’effet


Série Flashback,<br />

collage et huile sur toile, 2008, 100 x 90 cm


est tantôt léger tantôt tragique.<br />

Ainsi, créer pour B. Amirouche, c’est assembler, combiner, intégrer les unes dans les autres,<br />

des images, des objets et des corps avec leurs mémoires (individuelle et collective) visuelle,<br />

auditive et tactile (charnelle?). Créer c’est récupérer: récupération hybridante de ce qui me<br />

touche et touche mes semblables; ma mémoire ne m’appartient pas; elle s’insère dans une<br />

«fabulation» où les déterminants de la matière plastique ordonnent l’œuvre dans des suites<br />

et des séries hors de mon vouloir. Je ne suis que l’exécutant d’un projet qui me précède et<br />

me succède (m’excède); un projet qui a vraisemblablement commencé avant moi. L’idée<br />

m’advient naturellement par prégnance. Elle m’a conçu avant que je ne la conçoive!<br />

Les travaux de B.A. sont, dans cette perspective, une réflexion sur le Temps et l’œuvre d’art.<br />

Qu’est-ce que le Temps? Qu’est-ce que l’oeuvre d’art?<br />

L’image (mnésique, visuelle) est, en fait, hors-Temps. Elle est là; avec son composé de<br />

sensations et d’idées. Elle crée elle-même ses agencements, ses vitesses et ses devenirs.<br />

La matière mnésique se moque des temporalités et des catégories. La multiplicité est<br />

son être ; comme l’œuvre d’ailleurs. Celle-ci est images, textes et contextes. Elle est<br />

fondamentalement recyclage de citations (objets-citations, icones-citations, motifscitations<br />

et mots-citations).<br />

Mais, simultanément, ce qui est cité, idéalisé, magnifié, rencontre ce qui ne peut être<br />

citation et qui me fonde comme regard dans le temps: des visages et des corps qui ne sont<br />

surtout pas des icones (tels Miles Davis, Louis Armstrong, et autres chanteurs ou acteurs<br />

de «l’autre Temps») mais des «figures» (peintes à la main) que je suis seul à connaître. ;<br />

Celles-ci modulent l’impersonnel en insérant, dans le concert des Voix, des Sons et des<br />

Attitudes, la part secrète de soi.<br />

Il y a donc dans ces travaux une sorte de «phénoménologie désinvolte» (R. Barthes) du<br />

corps et du Temps.<br />

Comme dans le souvenir-rêve (mémoire fantasmée) s’enchaînent (dans des formes<br />

géométriques – carrés, rectangles, cercles- aux limites poreuses et aux couleurs variables)<br />

des images iconisées et des images de corps/visages en fonction desquels tous les


Série Flashback,<br />

collage et acrylique sur toile, 2008, 100 x 90 cm


agencements sont faits.<br />

Combinatoire plastique/mnésique, combinatoire sensitive/matérielle dévoilent les suites<br />

figurales d’une idée aux agrégats composites: l’idée du Temps comme espace /mémoire/<br />

sensation.<br />

En effet, l’œuvre re-compose l’espace-temps vécu (remémoré, imaginé, fantasmé) et<br />

l’espace plastique (avec ses constituants matériels et immatériels) non pas pour retrouver<br />

une homogénéité, une identité (celle de l’enfance du regard) mais pour vivre comme idée<br />

l’hétérogénéité et l’hybridité.<br />

La mémoire (travaux relevant du Mail Art, un aller vers soi? un aller vers Autrui?) coïncide<br />

avec ce qui lui advient mais pas avec celui qui devient. Et «désorienter l’image» (phrase de<br />

l’artiste pour présenter son œuvre), c’est justement cela: aller vers la non-coïncidence avec<br />

soi pour devenir autres. C’est pour cela que le travail du plasticien mime le travail de la<br />

mémoire: effacer, colorer, griffer, cacher, ajouter; autant de procédés qui, paradoxalement<br />

«repoussent le passé» puisqu’il propose au regard l’œuvre comme objet ou plutôt objet<br />

d’objets; car en saturant la plasticité (en traitant tous ces objets) c’est la surface plastique<br />

qui reprend ses droits.<br />

Cette prégnance de la Culture, ce travail de la recomposition et du recyclage hybridant<br />

inscrit le travail de B. Amirouche dans une postmodernité qui fait fi des identités pures et<br />

qui lance les actes (plastiques, mnésiques) dans l’interstitiel et le multiple; l’œuvre plastique<br />

devenant à elle seule musée global, transindividuel et transtemporel. Comme l’affirme<br />

l’artiste lui-même, «le temps, c’est des âges, des époques et des ambiances.» C’est le<br />

mot ambiance qui me retient ici. L’ambiance est une «aire» (un air?) où s’amalgament des<br />

mémoires, des objets et des corps avec ce qui leur est consubstantiel: un composé d’idées<br />

et d’affects (sons, couleurs, sensations de tout ordre) dans une multiplicité de soi et du<br />

Temps.<br />

Abderrahim KAMAL<br />

Université de Fès


Série Flashback,<br />

collage et huile sur toile, 2004, 100 x 90 cm


Série Flashback,<br />

collage et huile sur toile, 2004, 140 x 120 cm


Benyounès Amirouche est né en 1960 à Oujda. Plasticien, critique d’art et professeur d’arts<br />

plastiques (1989), il a enseigné l’histoire de l’art moderne à la Faculté des Lettres et des Sciences<br />

Humaines de Meknès (Université Moulay Ismail) de 2004 à 2009.<br />

Ex-président de l’association ¨ANFAS¨ d’arts plastiques à Meknès (1992-93, 1995-96), il est membre<br />

actif dans plusieurs associations culturelles: membre de l’Union des Ecrivains Marocains; membre<br />

fondateur de l’Association des Critiques d’Art au Maroc, membre de l’Association Marocaine d’Art<br />

Photographique.<br />

En tant que critique d’art et chercheur, il est membre honoraire de l’Association des Jeunes Chercheurs<br />

en Langue et Littérature à la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de Meknès et a<br />

participé à de nombreuses manifestations scientifiques (colloques, journées d’étude, congrès).<br />

Pendant plusieurs années, il a tenu une chronique chargé sur l’art, notamment dans Assahifa et<br />

Al Akhbar Al Maghribia.<br />

Auteur et traducteur de nombreux articles, essais et études relatives aux arts plastiques et à l’image<br />

en général, il a publié des dizaines d’articles dans différents quotidiens marocains et londoniens.<br />

Il a également publié des études dans des revues académiques et culturelles du monde arabe :<br />

Alam Alfikr, Thakafat, Nizwa, Arrafid, Al Bayane, Nawaffid, Oman, Al Founoun, Fikr wa Nakd,<br />

Athakafa Al Maghribia, Alamat, Afak, Zon-art,Matrice des Arts…<br />

Depuis 1983, il a de nombreuses expositions individuelles et collectives au Maroc et à l’étranger.<br />

Il a obtenu en 1996 le Prix du jury au 6ème Salon International d’Art Contemporain sur la Musique,<br />

Saint- Barthelémy d’Anjou, en France.


Principales expositions individuelles<br />

2010 : Flashback, Galerie Mohamed El Fassi, Rabat<br />

2009 : Flashback, Institut Français de Meknès<br />

1993 : Hommage à la mémoire graphique de Saladi, CCF de Meknès<br />

1991 : Espaces Interrompus, CCF de Meknès<br />

1987 : Exposition, Délégation du Ministère de la Culture, Oujda<br />

1985 : Exposition, Palais de la Municipalité, Oujda<br />

1983 : Exposition, Délégation du Ministère du Tourisme, Oujda<br />

Principales expositions collectives<br />

2009 : - Dialogues Artistiques, Ministère de la Culture, Galeries Bab El Kebir et Mohamed El Fassi, Rabat<br />

- De Rabat à Ghaza, Ass. Ribat Al Fath et les Artistes Marocains, Espace Jedda, Rabat<br />

- Ghaza Solid’Art, les Artistes Marocains Solidaires avec Ghaza, Vente aux enchères, Sous<br />

le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI et pour le compte du Ministère de<br />

la Culture, Memo Arts, Casablanca<br />

- Le 2 ème Festival National de la Création Féminine, Taza<br />

2007 : Rencontre Artistique Internationale sur la Lettre, Sfakes, Tunisie<br />

2005 : -1 er Salon National de l’Art Contemporain Marocain, Cathédral Sacré-Cœur, Casablanca<br />

- Expo à l’occasion du 16e Congrès de l’Union des Ecrivain Marocains, théâtre Mohammed V, Rabat<br />

2003 : 1 ère Exposition Régionale des Enseignants Créateurs en Arts Plastiques,<br />

Académie Régionale de l’Education et de la Formation, Palais Municipal, Meknès<br />

2002 : Le 1 er Festival d’Arts Plastiques, Ass Bassamat Chawia, Settat<br />

2000 : La 4 ème Rencontre d’Arts Plastiques, Ass Espace des Grottes, Taza<br />

1998 : La 3 ème Rencontre d’Arts Plastiques, Ass Espace des Grottes, Taza<br />

1997 : - Le 7 ème Salon International d’Art Contemporain sur la Musique, Théâtre de l’Hôtel de<br />

ville, Saint- Bathélemy d’Anjou, France<br />

- La 1 ère Rencontre d’Arts Plastique de fès, Ass Zalagh, Musée Al Batha, Fès<br />

- La 2 ème Rencontre d’Arts Plastiques, Ass Espace des Grottes, Taza<br />

1996 : - Le 27 ème Salon des Arts, Salle des Fêtes de Cholet, France<br />

- Le 6 ème Salon International d’Art Contemporain sur la Musique, Théâtre de l’Hôtel de<br />

ville, Saint- Bathélemy d’Anjou, France<br />

- La 1 ère Rencontre d’Arts Plastiques, Ass Espace des Grottes, Taza<br />

1995 : - Manifestation artistique, Journée Internationale des Monuments et des Cites, Chellah, Rabat<br />

- La 3 ème Exposition Collective de l’Association Anfas, Palais de la Municipalité, Meknès<br />

- Représentations du corps de la femme, groupe TANIT, CCF de Meknès


1994 : - Galerie Flandria, Tanger<br />

- Complexe Culturel Sidi Belyout, Casablanca<br />

- Quatre peintres – Quatre atmosphères, Atelier des arts plastiques de la Faculté des<br />

Lettres de Meknès, Palais Municipal, Meknès<br />

1993 : - Hôtel Idou-Anfa, Casablanca<br />

- La 2 ème exposition collective de l’Association Anfas, Conservatoire Municipal de la Musique, Meknès<br />

1992 : - Galerie Bab Loudaya, Ministère de la Culture, Rabat<br />

- Hôtel Idou Anfa, Vision Magazine, Casablanca<br />

- Galerie Bab Doukala, Ministère de la Culture et Vision Magazine, Marrakech<br />

- La Peinture Abstraite, Université Moulay Ismail, Meknès<br />

- Festival Maroc Arts 92, Palais des Congrès, Marrakech<br />

- La 1ère exposition collective de l’Association Anfas, Conservatoire Municipal de<br />

la Musique, Meknès<br />

1991 : - Le Salon de l’Hiver des Arts Plastiques, Palais des Congrès, Marrakech<br />

- Manifestation Fadae Ennass, Casablanca<br />

- Galerie Acil, Meknès<br />

- Le 3ème Festival Maghrébin d’Arts Plastiques, Palais de La Municipalité, Oujda<br />

1990 : - Le 1er Salon des Jeunes Plasticiens, Hôtel Samir et la salle Omnisport, Mohammedia<br />

- Le 1er Festival National des Arts Plastiques, Palais Moulay Hafid, Tanger<br />

- 4 ème Jeux Mondiaux de la Paix, Conservatoire Municipale de Musique, Meknès<br />

- Le 2 ème Festival Maghrébin d’Arts Plastiques, Palais de la municipalité, Oujda<br />

- La 4ème Semaine Culturelle, Palais de la Municipalité, Meknès<br />

1989 : - Le Salon d’Automne, CCF de Rabat<br />

- Quatre peintres indépendants à la Bibliothèque Générale de Tanger<br />

- La 3ème Semaine Culturelle, Palais de la Municipalité, Meknès<br />

Scénographies<br />

2003 : Scénographe de la pièce Al Awada, d’après le texte de l’écrivain Italien Luigi Pirandello:<br />

Six personnages en quête d’auteur. Mise en scène Bousselham Eddaif<br />

- Théâtre de l’Institut Français de Meknès<br />

- Le printemps du théâtre Arabe, Théâtre Mohamed V, Rabat<br />

- 5ème Festival National du Théâtre, Théâtre Mohamed El Mnouni, Meknès


Série Flashback,<br />

collage et huile sur toile, 2007 100 x 90 cm


Série Flashback,<br />

collage et acrylique sur toile, 2008, 71 x 60 cm


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Grammaire <br />

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Esothérique<br />

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Catéchistique


Robert RAUSCHENBERG<br />

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20100804<br />

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Robert RAUSCHENBERG<br />

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Robert RAUSCHENBERG<br />

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2010

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