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Il semble alors pertinent postuler la coexistence de la justice réparatrice et de la justice
ordinaire. La justice serait ainsi une discipline en crise qui peut être approchée avec un
regard ordinaire ou avec un regard réparateur que certains appellent « alternatif », mais qu’il
serait plus précis de nommer marginal.
Ces regards, ordinaire ou réparateur, seront, malgré leurs différences évidentes,
« fonctionnellement complémentaires » et « paradoxalement opposés ».
Les justices ordinaire et réparatrice seront « fonctionnellement complémentaires » car elles
peuvent coexister tout en utilisant chacune d’entre-elles des éléments constituants de l’autre.
Ainsi, certains auteurs comme Walgrave revendiquent la possibilité d’utiliser la coercition et
même la punition, principes indissociables de la justice rétributive, dans le cadre de la justice
réparatrice. "Restoration is the key objective. In many cases, agrément cannot be reached or
may be insufficient (…) Coertion may then be considered, but so far as possible it must still
primarily serve restoration". (2002a, p 194).
Cependant, il est certain que la coercition occupe une position très différente s’agissant de la
justice réparatrice ou de la justice rétributive. Si pour certains défenseurs de la première, la
punition peut être un moyen utilisé pour parvenir aux fins de la restauration des dommages
causés par un délit, pour la deuxième, par contre, la punition est devenue dans la pratique
une fin en soi.
En ce qui concerne la justice rétributive, elle a utilisé à maintes reprises des éléments de la
justice réparatrice lors de la mise en place de certains projets. Tel fut le cas par exemple du
« Reparative Probation Program », créé par l’État de Vermont (USA) en 1995. Grâce à ce
programme et comme condition de probation pour éviter la prison ferme, des offenseurs nonviolents,
déjà condamnés, rencontraient un comité de citoyens bénévoles avec lequel ils
discutaient de l'impact de leur délit et établissaient un contrat de réparation et un plan pour
éviter la récidive. (COHEN, 2001, pp 212-213).
Les justices rétribuve et réparatrice sont « paradoxalement opposées » car elles véhiculent
des valeurs différentes tout en restant profondément imbriquées. La justice en général est
très sensible à l’idéologie qui lui sert de support. Par exemple, le traitement réservé, dans
certains cas, par ces deux types de justice aux personnes de l’entourage de l’offenseur sera
révélateur de certaines valeurs qu’elles défendent.
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