Images du désir - Activités culturelles de l'Université de Genève

A Short Guide To Pinku
Le cinéma pinku, ou «cinéma rose japonais », offre depuis cinquante ans aux réalisateurs un espace
de liberté formelle propice à l’expérimentation. D’abord caractérisé par sa composante subversive
proche de l’expérimental, le pinku s’ouvre peu à peu à un plus large public et acquiert finalement
ses lettres de noblesse avec des cinéastes plus intellectuels comme Hisayasu Sato et Takahisa Zeze.
par Marcos Mariño
du cinéma érotique dans les
années 1960 n’épargne pas le Japon, qui
L’éclosion
lance sa propre version du genre: le pinku
eiga, littéralement «cinéma rose». Le film pinku,
conçu à la base comme un produit commercial de
qualité moyenne, filmé avec très peu d’argent et en
un temps record, rapporte donc des profits intéressants
à une industrie cinématographique qui doit
commencer à faire face à la concurrence de la télévision.
La seule règle cinématographique du pinku,
c’est que doivent y être régulièrement insérées des
scènes érotiques, qui pour s’accorder avec la stricte
censure nipone, ne peuvent pas être trop explicites.
L’interdiction formelle de montrer pilosité ou organes
génitaux obligera les réalisateurs pinku à plusieurs
acrobaties de mise en scène, ce qui ne les empêchera
pas pour autant de souvent voir leurs films interdits
ou coupés par les autorités. Ainsi, les projections du
premier film pinku, Flesh Market (1962), de Satoru
Kobayashi, seront interrompues par la police, qui
s’emparera des copies et obligera le studio à sortir
une version censurée 1 .
Premier temps: Wakamatsu
Une caractéristique importante de l’industrie pinku
est qu’elle permet à des jeunes réalisateurs de faire
une carrière cinématographique de façon bien plus
rapide que ce que rend possible l’industrie officielle,
et leur donne une liberté formelle et thématique très
grande. En principe, tant qu’ils incluent le nombre
requis de scènes érotiques, les réalisateurs pinku ont
même la possibilité de se lancer dans l’expérimentation.
Mais bien entendu, tous les réalisateurs ne vont
pas exploiter cette liberté formelle et thématique. Et
ce sera finalement, à travers le travail extraordinaire
de Koji Wakamatsu que le pinku se transformera en
un genre hybride, à mi-chemin entre l’industrie érotique
(ce que l’on appelle quelquefois l’eroduction) et
le cinéma underground et expérimental.
Comme le dit Wakamatsu dans un interview
récent, «le cinéma pinku était juste un outil pour
exprimer mon opinion politique et ma vision de
l’existence» 2 . En effet, le cinéma de Wakamatsu va
suivre comme un sismographe les convulsions politiques
du Japon des années 1960-1970, en prenant le
point de vue de la gauche radicale et même du groupe
terroriste Armée Rouge Unifiée. Plusieurs personnes
dans l’entourage de Wakamatsu sont politiquement
proches de ces mouvements: Masao Adachi, un de
ses collaborateurs, également réalisateur pinku important,
décide de s’allier à la lutte armée au Proche
Orient dans les années 1970. À côté de cette problématique
politique, qui est par ailleurs sujet de films
comme L’extase des anges (1972), Wakamatsu déploie
sa vision obscure du désir et des relations entre
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