Le fonds de la colonie pénitentiaire agricole et ... - pierresvives
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La protection <strong>de</strong> l’enfance. Écrits protégés, écrits ignorés<br />
<strong>Le</strong> <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> pénitentiaire<br />
<strong>agricole</strong> <strong>et</strong> industrielle d’Aniane (1885-1993) :<br />
bi<strong>la</strong>n d’une collecte aux archives<br />
départementales <strong>de</strong> l’Hérault<br />
<strong>et</strong> vision d’ensemble<br />
Ghis<strong>la</strong>ine Bouch<strong>et</strong><br />
Conservatrice en chef du patrimoine,<br />
Archives départementales <strong>de</strong> l’Hérault, direction <strong>de</strong>s archives mo<strong>de</strong>rnes <strong>et</strong> contemporaines<br />
Marie-Catherine Ruscica<br />
Attachée <strong>de</strong> conservation du patrimoine,<br />
Chef du service Justice, éducation, police<br />
Notre propos est <strong>de</strong> vous donner aujourd’hui un aperçu <strong>de</strong>s archives <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong><br />
pénitentiaire d’Aniane conservées aux archives départementales <strong>de</strong> l’Hérault.<br />
Nous allons le faire en quatre étapes : les circonstances <strong>de</strong> <strong>la</strong> collecte du <strong>fonds</strong>, qui<br />
eut lieu successivement en 1996 <strong>et</strong> en 2005 ; un bref rappel historique <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> ;<br />
les différents types <strong>de</strong> documents <strong>et</strong> dossiers conservés dans le <strong>fonds</strong> d’Aniane, en<br />
partant indifféremment du <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> préfecture <strong>et</strong> <strong>de</strong> celui <strong>de</strong> l’établissement ; enfin,<br />
l’évocation, d’une manière re<strong>la</strong>tivement succincte, car il n’est pas possible d’entrer dans<br />
le détail, <strong>de</strong>s sources que l’on peut également trouver aux archives départementales <strong>de</strong><br />
l’Hérault en complément <strong>de</strong> celles d’Aniane ; nous ajouterons que notre exposé se limite<br />
volontairement à <strong>la</strong> <strong>de</strong>scription <strong>de</strong>s sources conservées localement.<br />
L’ISES 1 d’Aniane est bien connu dans le département. L’établissement, autrefois appelé<br />
« <strong>colonie</strong> pénitentiaire <strong>agricole</strong> <strong>et</strong> industrielle d’Aniane », a longtemps supporté une<br />
triste réputation, qui remonte au temps où on l’appe<strong>la</strong>it aussi le « bagne d’enfants ». Une<br />
écrivaine <strong>de</strong> <strong>la</strong> région, Marie Rouan<strong>et</strong>, en fait <strong>la</strong> <strong>de</strong>scription, un peu romancée, avec<br />
plusieurs autres, dans son ouvrage <strong>Le</strong>s enfants du bagne. Il est vrai que <strong>la</strong> popu<strong>la</strong>tion<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> p<strong>et</strong>ite ville d’Aniane conserve un vif souvenir <strong>de</strong> ces années où l’établissement<br />
recevait ces jeunes p<strong>la</strong>cés sous l’autorité <strong>de</strong> l’Éducation surveillée.<br />
La collecte<br />
La collecte <strong>de</strong>s archives <strong>de</strong> l’ISES s’est faite en <strong>de</strong>ux temps. Une première opération a<br />
eu lieu en 1996, peu après <strong>la</strong> ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong> l’institut, lorsque nous avons été contactés<br />
par <strong>la</strong> DDPJJ 2 . <strong>Le</strong>s archives <strong>de</strong> l’établissement d’Aniane – appelé successivement <strong>colonie</strong><br />
pénitentiaire <strong>agricole</strong> <strong>et</strong> industrielle d’Aniane, puis, en 1957, internat professionnel<br />
d’éducation spécialisée (IPES) 3 <strong>et</strong>, en 1975, institut spécialisé d’éducation surveillée<br />
(ISES) – ne pouvaient être ramenées sans avoir été préa<strong>la</strong>blement triées sur p<strong>la</strong>ce. <strong>Le</strong>s<br />
archives se trouvaient à l’étage, dans l’ancien logement <strong>de</strong> fonction du directeur, réparties<br />
dans trois pièces différentes. Dans un premier temps, ont été récupérés les documents<br />
1. Institut spécialisé d’éducation surveillée.<br />
2. Direction départementale <strong>de</strong> <strong>la</strong> protection judiciaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> jeunesse.<br />
3. Également appelé institution publique d’éducation surveillée.<br />
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<strong>Le</strong>s sources <strong>de</strong> <strong>la</strong> protection <strong>de</strong> l’enfance, <strong>de</strong> <strong>la</strong> collecte à <strong>la</strong> conservation<br />
antérieurs à 1940, c<strong>la</strong>ssés en sous-série 2 Y, ainsi que les dossiers <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> 1953 à<br />
1993, date <strong>de</strong> <strong>la</strong> ferm<strong>et</strong>ure. Au cours <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong>, le reste <strong>de</strong>s archives fut en partie<br />
trié <strong>et</strong> reconnu.<br />
En mai 2004, <strong>la</strong> DDPJJ nous contactait à nouveau pour nous informer <strong>de</strong> <strong>la</strong> mise en<br />
vente <strong>de</strong>s bâtiments <strong>de</strong> l’institut, inoccupés <strong>de</strong>puis sa ferm<strong>et</strong>ure. Elle nous signa<strong>la</strong>it le<br />
besoin d’une intervention rapi<strong>de</strong> sur l’ISES, où se trouvait une partie <strong>de</strong>s archives <strong>de</strong><br />
l’établissement non versées en 1996, mais également ses propres archives à récupérer,<br />
les locaux ayant, en eff<strong>et</strong>, abrité, <strong>de</strong> sa création en 1975 jusqu’en 1988, le service départemental<br />
<strong>de</strong> l’éducation surveillée. Depuis 1996, date <strong>de</strong> <strong>la</strong> première intervention <strong>de</strong>s<br />
archives départementales, il restait <strong>de</strong>s documents, en souffrance, il faut le dire. Mais<br />
ils étaient re<strong>la</strong>tivement à l’abri car les bâtiments, bien que désaffectés, avaient toujours<br />
été surveillés <strong>et</strong> fermés à clef.<br />
<strong>Le</strong> premier tour <strong>de</strong>s lieux nous permit <strong>de</strong> prendre <strong>la</strong> mesure du travail à réaliser. C’était<br />
à <strong>la</strong> fois du vrac <strong>et</strong> un début <strong>de</strong> c<strong>la</strong>ssement. Heureusement, les documents n’avaient<br />
subi ni vandalisme ni <strong>de</strong>struction intempestive. Il restait encore beaucoup d’archives<br />
en tas par terre. Ce<strong>la</strong> dit, au bout <strong>de</strong> quatre à cinq <strong>de</strong>mi-journées <strong>de</strong> tri sur p<strong>la</strong>ce, les<br />
versements étaient prêts. <strong>Le</strong>s éliminations n’avaient porté que sur <strong>de</strong>s pièces comptables,<br />
<strong>de</strong>s doublons <strong>et</strong> <strong>de</strong>s pièces jugées sans intérêt. Ce <strong>de</strong>rnier travail, ainsi que le conditionnement<br />
final, s’effectua avec le soutien <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> <strong>la</strong> DDPJJ, qui mit plusieurs<br />
personnes à notre disposition pendant 3 ou 4 jours.<br />
En février 2005, trois versements entrèrent finalement aux archives départementales :<br />
un <strong>de</strong> <strong>la</strong> DRPJJ 4 , concernant les dossiers <strong>de</strong>s associations habilitées, un <strong>de</strong> <strong>la</strong> DDPJJ,<br />
émanant <strong>de</strong>s services <strong>de</strong> liberté surveillée <strong>de</strong> Montpellier <strong>et</strong> <strong>de</strong> Béziers, <strong>et</strong> le <strong>de</strong>rnier,<br />
<strong>de</strong> l’ISES d’Aniane lui-même 5 . L’ensemble <strong>de</strong>s archives couvrait une pério<strong>de</strong> comprise<br />
entre 1925 <strong>et</strong> 1993.<br />
De <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> pénitentiaire à l’institut spécialisé<br />
d’éducation surveillée (ISES)<br />
Avant d’abor<strong>de</strong>r <strong>la</strong> question du <strong>fonds</strong>, rappelons ce qu’était <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> « <strong>agricole</strong> <strong>et</strong><br />
industrielle » d’Aniane.<br />
Aniane est une p<strong>et</strong>ite ville située à 30 km au nord-ouest <strong>de</strong> Montpellier, qui compte<br />
aujourd’hui 1 800 habitants, <strong>et</strong> se trouve au milieu <strong>de</strong>s vignes. Aniane est connue pour son<br />
monastère <strong>de</strong> bénédictins, édifié à <strong>la</strong> fin du viii e siècle par saint Benoît (dit « d’Aniane »). <strong>Le</strong><br />
monastère d’origine n’existe plus, <strong>et</strong> l’abbaye fut reconstruite au cours <strong>de</strong>s xvi e -xviii e siècles.<br />
Après <strong>la</strong> Révolution, l’abbaye <strong>de</strong>vint une fi<strong>la</strong>ture <strong>de</strong> coton, qui fit faillite en 1843. L’État,<br />
qui recherchait <strong>de</strong>s bâtiments pour les besoins <strong>de</strong> l’administration pénitentiaire, loua,<br />
dans un premier temps, puis se porta acquéreur d’Aniane en 1854. Aniane <strong>de</strong>vint une<br />
maison centrale en 1845. Celle-ci fonctionna jusqu’en 1885, date à <strong>la</strong>quelle l’administration<br />
pénitentiaire jugea bon <strong>de</strong> <strong>la</strong> reconvertir en <strong>colonie</strong> pénitentiaire pour mineurs. En eff<strong>et</strong>,<br />
il fal<strong>la</strong>it trouver <strong>de</strong>s p<strong>la</strong>ces pour les jeunes <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> privée <strong>agricole</strong> <strong>de</strong> Montlobre<br />
(sur <strong>la</strong> commune <strong>de</strong> Vailhauquès), qui venait <strong>de</strong> fermer. <strong>Le</strong>s bâtiments <strong>de</strong> l’ancienne<br />
maison centrale al<strong>la</strong>ient accueillir une nouvelle <strong>colonie</strong> pénitentiaire, publique, c<strong>et</strong>te fois.<br />
4. Direction régionale <strong>de</strong> <strong>la</strong> protection judiciaire <strong>de</strong> <strong>la</strong> jeunesse.<br />
5. Il s’agit <strong>de</strong>s versements 1801 W <strong>et</strong> 1802 W du 2 février 2005 <strong>et</strong> 1803 W du 9 février 2005.<br />
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La protection <strong>de</strong> l’enfance. Écrits protégés, écrits ignorés<br />
La <strong>colonie</strong> pénitentiaire d’Aniane 6 revêt donc un statut public dès 1886. Elle est inaugurée<br />
à un moment où l’administration pénitentiaire essayait <strong>de</strong> résoudre une difficulté<br />
provenant <strong>de</strong> l’application <strong>de</strong> l’article 3 <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi du 5 août 1850. <strong>Le</strong> système d’éducation<br />
par les travaux <strong>agricole</strong>s ne convenait pas aux jeunes délinquants qui arrivaient pour <strong>la</strong><br />
plupart <strong>de</strong> centres urbains <strong>et</strong> industriels. Il était constaté qu’à leur libération, ces jeunes,<br />
formés à d’autres métiers que ceux que proposaient les villes, ne trouvaient pas <strong>de</strong> travail.<br />
<strong>Le</strong>s probabilités <strong>de</strong> r<strong>et</strong>omber dans <strong>la</strong> délinquance étaient alors accrues. L’administration,<br />
soucieuse <strong>de</strong> <strong>la</strong> réinsertion <strong>de</strong>s jeunes à leur sortie <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> <strong>agricole</strong>, avait déjà<br />
é<strong>la</strong>rgi <strong>la</strong> possibilité <strong>de</strong> faire travailler les mineurs dans les « principales industries qui se<br />
rattachent à l’agriculture », comme le précisait l’article 3 <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi <strong>de</strong> 1850 7 . Mais avec <strong>la</strong><br />
création d’Aniane, <strong>colonie</strong> industrielle, elle faisait un pas en avant <strong>de</strong> plus.<br />
Aniane <strong>de</strong>vait recevoir, rappelons-le, différentes catégories <strong>de</strong> pupilles :<br />
– <strong>de</strong>s mineurs <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 18 ans 8 <strong>de</strong> sexe masculin acquittés en vertu <strong>de</strong> l’article 66<br />
du Co<strong>de</strong> pénal, c’est-à-dire comme « ayant agi sans discernement », <strong>et</strong> non remis à leurs<br />
familles ;<br />
– <strong>de</strong>s mineurs condamnés à une peine d’emprisonnement comprise entre 6 mois <strong>et</strong> 2 ans 9 ;<br />
– <strong>de</strong>s pupilles <strong>de</strong> l’Assistance publique jugés difficiles <strong>et</strong> confiés à l’établissement par<br />
application <strong>de</strong>s articles 1 <strong>et</strong> 2 <strong>de</strong> <strong>la</strong> loi <strong>de</strong> 1904.<br />
En 1912, le système <strong>de</strong> <strong>la</strong> liberté surveillée était inauguré, qui constituait une avancée<br />
dans <strong>la</strong> réforme <strong>de</strong> <strong>la</strong> légis<strong>la</strong>tion pénale <strong>de</strong>s enfants. Il <strong>de</strong>venait impossible d’envoyer<br />
les enfants <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 13 ans en maison <strong>de</strong> correction.<br />
Dans ce contexte, le régime <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> pénitentiaire était dur, <strong>et</strong> Aniane connut <strong>de</strong>s<br />
tentatives d’évasions, <strong>de</strong>s révoltes, <strong>de</strong>s agressions contre les surveil<strong>la</strong>nts <strong>et</strong> plusieurs<br />
mutineries entre 1895 <strong>et</strong> 1940 10 , comme celle, par exemple, <strong>de</strong> Noël 1898-janvier 1899,<br />
qui fut lour<strong>de</strong>ment sanctionnée. <strong>Le</strong>s causes invoquées <strong>Le</strong> nombre insuffisant <strong>de</strong> gardiens<br />
par rapport au nombre <strong>de</strong> détenus (Aniane abritait à ce moment-là 350 colons), <strong>la</strong> trop<br />
gran<strong>de</strong> promiscuité, le manque d’hygiène, <strong>la</strong> mauvaise gestion du directeur… Mais au-<strong>de</strong>là<br />
<strong>de</strong> <strong>la</strong> polémique, c’est le système <strong>de</strong> l’enfermement lui-même qui était remis en cause,<br />
<strong>et</strong> le scandale <strong>de</strong>s « bagnes pour enfants » ne tar<strong>de</strong>ra pas à éc<strong>la</strong>ter. D’autres inci<strong>de</strong>nts<br />
graves éc<strong>la</strong>tèrent encore en 1936, en 1937, en 1939, en 1940. À <strong>la</strong> Libération, <strong>la</strong> protection<br />
judiciaire <strong>de</strong> l’enfance fut réorganisée par l’ordonnance du 2 février 1945 qui proc<strong>la</strong>ma<br />
<strong>la</strong> prééminence <strong>de</strong> l’éducatif sur le répressif. Ainsi furent mis en p<strong>la</strong>ce <strong>de</strong>s ateliers <strong>de</strong><br />
rééducation par le travail manuel <strong>et</strong> qui perm<strong>et</strong>taient l’apprentissage d’un métier.<br />
De 1945 date aussi l’Éducation surveillée 11 , <strong>et</strong> Aniane, qui était un établissement pénitentiaire,<br />
<strong>de</strong>vint une « institution d’éducation surveillée ». L’établissement prenait toujours<br />
en charge les condamnés <strong>et</strong> les délinquants difficiles. Mais on note une amélioration<br />
6. La <strong>colonie</strong> pénitentiaire n’est pas à confondre avec <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> correctionnelle dans <strong>la</strong>quelle on conduit les<br />
enfants condamnés à plus <strong>de</strong> <strong>de</strong>ux ans <strong>de</strong> prison.<br />
7. Loi du 5 août 1850, art. 3 : « les jeunes détenus acquittés en vertu <strong>de</strong> l’article 66 du Co<strong>de</strong> pénal comme<br />
ayant agi sans discernement, mais non remis à leurs parents, sont conduits dans une <strong>colonie</strong> pénitentiaire, ils<br />
y sont élevés en commun sous une discipline sévère, <strong>et</strong> appliqués aux travaux <strong>de</strong> l’agriculture, ainsi qu’aux<br />
principales industries qui s’y rattachent. Il est pourvu à leur instruction élémentaire ».<br />
8. La minorité pénale est fixée à 16 ans par le Co<strong>de</strong> pénal, puis à 18 ans en 1906. <strong>Le</strong>s mineurs, avant <strong>la</strong> loi<br />
<strong>de</strong> 1850, étaient p<strong>la</strong>cés dans <strong>de</strong>s « maisons <strong>de</strong> correction », c’est-à-dire <strong>de</strong>s maisons centrales pour adultes dans<br />
lesquels un quartier était réservé aux enfants. La loi du 22 juill<strong>et</strong> 1912 fait un pas <strong>de</strong> plus en avant en réformant<br />
<strong>la</strong> légis<strong>la</strong>tion pénale <strong>de</strong>s enfants : les enfants <strong>de</strong> moins <strong>de</strong> 13 ans ne peuvent plus être envoyés en maison <strong>de</strong><br />
correction : le tribunal a le choix <strong>de</strong> rendre l’enfant à sa famille <strong>et</strong> dans ce cas, d’user <strong>de</strong> <strong>la</strong> liberté surveillée, <strong>de</strong><br />
le p<strong>la</strong>cer chez un particulier, dans une <strong>de</strong>s institutions charitables reconnues d’utilité publique, <strong>de</strong> le rem<strong>et</strong>tre<br />
à l’Assistance publique ou encore <strong>de</strong> le p<strong>la</strong>cer dans un internat approprié.<br />
9. Art. 4 : « les <strong>colonie</strong>s pénitentiaires reçoivent également <strong>de</strong> jeunes détenus condamnés à un emprisonnement<br />
<strong>de</strong> plus <strong>de</strong> six mois <strong>et</strong> qui n’excè<strong>de</strong> pas 2 ans ».<br />
10. 1 Y 347-348, 353.<br />
11. Ordonnance du 1 er septembre 1945 qui crée <strong>la</strong> direction <strong>de</strong> l’Éducation surveillée.<br />
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<strong>Le</strong>s sources <strong>de</strong> <strong>la</strong> protection <strong>de</strong> l’enfance, <strong>de</strong> <strong>la</strong> collecte à <strong>la</strong> conservation<br />
générale <strong>de</strong>s conditions <strong>de</strong> vie ; en 1957, l’établissement changea <strong>de</strong> nom <strong>et</strong> <strong>de</strong>vint un<br />
« internat professionnel d’éducation spécialisée » ; c’est à ce moment-là aussi que les<br />
quartiers cellu<strong>la</strong>ires furent démolis.<br />
Un an plus tard est instituée l’Assistance éducative : à <strong>la</strong> notion d’internat collectif,<br />
fermé, se substituent les notions <strong>de</strong> travail en milieu ouvert <strong>et</strong> d’individualisation du<br />
mineur délinquant. En 1974 apparut le service d’éducation surveillée dans le département<br />
<strong>de</strong> l’Hérault <strong>et</strong> le directeur <strong>de</strong> l’IPES d’Aniane <strong>de</strong>vint directeur départemental <strong>de</strong><br />
l’éducation surveillée, doubles fonctions qu’il cumulera jusqu’en 1979 12 .<br />
On peut considérer qu’en 1975 l’institution a revêtu sa forme définitive 13 en tant qu’établissement<br />
à <strong>la</strong> fois d’éducation <strong>et</strong> <strong>de</strong> prévention. L’établissement assurait <strong>de</strong>s prises en<br />
charge diversifiées : internes, externes, <strong>de</strong>mi-pensionnaires, internes-externés, pensionnaires-externes,<br />
<strong>et</strong> jeunes travailleurs.<br />
Aniane s’ouvrit sur l’extérieur <strong>et</strong> se mo<strong>de</strong>rnisa : en 1967, on créa une piscine, un<br />
gymnase, en 1976 on refit les c<strong>la</strong>sses, le restaurant, les cuisines, en 1980, on instal<strong>la</strong><br />
un court <strong>de</strong> tennis, <strong>et</strong> surtout on transforma les anciennes « chambr<strong>et</strong>tes », au nombre<br />
<strong>de</strong> 120, en 60 chambres avec salle <strong>de</strong> jeux <strong>et</strong> salle <strong>de</strong> télévision. L’institut dispensait<br />
un enseignement théorique dans les c<strong>la</strong>sses <strong>et</strong> un enseignement professionnel dans<br />
les ateliers (mécanique, soudure, menuiserie, peinture, plomberie, électricité) auxquels<br />
s’ajoutaient diverses activités <strong>de</strong> plein air, pédagogiques <strong>et</strong> sportives. En 1993, à <strong>la</strong> suite<br />
<strong>de</strong>s redéploiements prévus par le ministère <strong>de</strong> <strong>la</strong> Justice, le nombre <strong>de</strong> mineurs hébergés<br />
restant trop mo<strong>de</strong>ste (23 jeunes), il est décidé <strong>de</strong> fermer l’ISES d’Aniane.<br />
<strong>Le</strong> <strong>fonds</strong><br />
<strong>Le</strong>s archives dont nous disposons actuellement sur l’établissement d’Aniane proviennent<br />
<strong>de</strong> <strong>de</strong>ux origines distinctes :<br />
– du <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> préfecture, c<strong>la</strong>ssé en sous-série 1 Y pour <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> précédant 1940 ;<br />
– du <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> l’établissement lui-même, c<strong>la</strong>ssé en sous-série 2 Y avant 1940 <strong>et</strong> en W<br />
pour les versements contemporains 14 .<br />
Ces <strong>fonds</strong> se complètent naturellement. L’ensemble représente une cinquantaine <strong>de</strong><br />
mètres, avec une <strong>la</strong>rge prédominance du <strong>fonds</strong> contemporain.<br />
Parmi ces documents, on citera en premier lieu les registres d’écrou pour <strong>la</strong> pério<strong>de</strong><br />
1889-1941. Ils s’intitulent « registres d’entrée <strong>et</strong> <strong>de</strong> libération » à partir <strong>de</strong> 1901. C’est<br />
une source homogène, non <strong>la</strong>cunaire <strong>et</strong> <strong>de</strong> premier ordre pour connaître une partie<br />
<strong>de</strong> l’histoire <strong>et</strong> du <strong>de</strong>venir du pupille : c’est <strong>la</strong> fiche signalétique <strong>de</strong> son séjour. Sur le<br />
registre d’écrou, on inscrit l’enfant à son arrivée, avec ce qui concerne son passé judiciaire<br />
<strong>et</strong> ce qui motive sa présence : <strong>la</strong> date du jugement, le délit (on y trouve le vol,<br />
le vagabondage, les coups <strong>et</strong> blessures, l’incendie volontaire, l’abus <strong>de</strong> confiance…) ;<br />
le signalement physique (couleur d’yeux, <strong>de</strong> cheveux, forme du nez, du visage), les<br />
mentions <strong>de</strong> cicatrices, <strong>de</strong> tatouages ou <strong>de</strong> muti<strong>la</strong>tion figurent également, précises, car<br />
importantes pour i<strong>de</strong>ntifier l’enfant en cas d’évasion. Viennent ensuite les renseignements<br />
donnés par l’établissement sur le déroulement du séjour du pupille à Aniane :<br />
le travail <strong>de</strong> l’enfant ; sa conduite morale <strong>et</strong> religieuse ; <strong>la</strong> profession à <strong>la</strong>quelle il a été<br />
formé pendant son apprentissage : bonn<strong>et</strong>ier, charron, menuisier, tailleur, ferb<strong>la</strong>ntier… ;<br />
12. Molina (Thérèse), Étu<strong>de</strong> d’une organisation : l’institution spéciale d’éducation surveillée d’Aniane, <strong>la</strong><br />
situation <strong>de</strong> conflit typique <strong>et</strong> rituelle, maîtrise <strong>de</strong> sociologie, université <strong>de</strong> Montpellier, faculté <strong>de</strong>s l<strong>et</strong>tres <strong>et</strong><br />
sciences humaines, UER <strong>de</strong> sociologie <strong>et</strong> d’<strong>et</strong>hnologie, 1982, 177 p. ; annexes.<br />
13. Suite au décr<strong>et</strong> du 1 er février 1975 re<strong>la</strong>tif à <strong>la</strong> protection <strong>de</strong>s jeunes majeurs.<br />
14. Il s’agit <strong>de</strong>s versements 1683 W du 29 mai 1996, 1803 W du 9 février 2005.<br />
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La protection <strong>de</strong> l’enfance. Écrits protégés, écrits ignorés<br />
<strong>la</strong> qualité <strong>de</strong> ses re<strong>la</strong>tions avec sa famille (voit-il sa famille lui écrit-il )… La fiche<br />
signalétique se termine, au bas <strong>de</strong> <strong>la</strong> page, sur <strong>la</strong> même <strong>et</strong> unique mention : « [l’enfant]<br />
est-il sorti <strong>de</strong> l’établissement suffisamment corrigé <strong>et</strong> peut-on espérer qu’il se conduira<br />
honnêtement au <strong>de</strong>hors ». En réponse, il est le plus souvent écrit : « on l’espère ». <strong>Le</strong>s<br />
évènements importants concernant l’enfant, comme les tentatives d’évasion, le transfert<br />
vers un autre établissement, l’hospitalisation ou le décès y sont également consignés,<br />
ainsi que <strong>la</strong> date <strong>de</strong> sa libération.<br />
<strong>Le</strong>s registres d’entrée <strong>et</strong> <strong>de</strong> libération postérieurs à 1941 <strong>et</strong> qui s’achèvent en 1992 sont<br />
encore à <strong>la</strong> DDPJJ 15 . Ils sont, pour les années plus récentes, <strong>de</strong> moins en moins détaillés :<br />
les informations se réduisent à l’état civil du jeune <strong>et</strong> à son signalement.<br />
Nous n’avons récupéré aucun dossier individuel antérieur à 1953 en provenance <strong>de</strong><br />
l’établissement. En revanche, <strong>de</strong> <strong>la</strong> préfecture nous sont parvenues <strong>de</strong>s correspondances<br />
re<strong>la</strong>tives à l’internement, aux transferts, aux évasions, aux libérations <strong>de</strong>s jeunes détenus,<br />
c<strong>la</strong>ssées par ordre alphabétique 16 . Pour <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> plus récente, on a les dossiers<br />
individuels <strong>de</strong>s élèves entrés entre 1953 <strong>et</strong> 1992 17 . Ces dossiers contiennent tout le suivi<br />
administratif, médical <strong>et</strong> sco<strong>la</strong>ire : pièces venant du tribunal pour enfants, fiches <strong>de</strong><br />
signalement anthropométriques – qui se rapprochent <strong>de</strong> celles que l’on trouve dans le<br />
registre d’écrou –, rapports d’observation <strong>de</strong> l’éducateur sur le comportement, bull<strong>et</strong>ins<br />
<strong>et</strong> livr<strong>et</strong> sco<strong>la</strong>ires, correspondances reçues <strong>de</strong> <strong>la</strong> famille, permissions <strong>de</strong> sorties. On a<br />
également, dans le versement <strong>de</strong> 2005, <strong>de</strong>s dossiers à caractère uniquement sco<strong>la</strong>ire (1968-<br />
1982), <strong>et</strong> notamment <strong>de</strong>s inscriptions au centre <strong>de</strong> téléenseignement <strong>et</strong> aux examens 18 .<br />
Signalons aussi, en ce qui concerne l’admission, <strong>la</strong> collection <strong>de</strong>s registres <strong>de</strong>s entr<strong>et</strong>iens<br />
avec le directeur, qui vont <strong>de</strong> 1943 à 1992 19 : remplis à l’arrivée par le directeur, sembl<strong>et</strong>-il,<br />
par les éducateurs par <strong>la</strong> suite, ils apportent une gran<strong>de</strong> richesse d’informations sur<br />
le mineur : son passé judiciaire <strong>et</strong> son vécu familial (re<strong>la</strong>té avec beaucoup <strong>de</strong> détails),<br />
son <strong>de</strong>gré d’instruction, le jugement porté sur son caractère, sa constitution physique<br />
<strong>et</strong> son état <strong>de</strong> santé, le métier qu’il souhaite apprendre, son désir ou non <strong>de</strong> suivre un<br />
culte religieux. Moins formels que les registres d’écrou <strong>et</strong> faisant suite à un échange<br />
direct, les registres <strong>de</strong> premiers entr<strong>et</strong>iens sont le refl<strong>et</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> première impression que<br />
donne le mineur.<br />
Pour faire suite aux rapports existant entre le directeur d’Aniane <strong>et</strong> les élèves, après<br />
leur sortie c<strong>et</strong>te fois, signalons aussi <strong>la</strong> correspondance échangée avec les anciens élèves,<br />
qui va <strong>de</strong> 1957 à 1964 <strong>et</strong> est c<strong>la</strong>ssée par ordre alphabétique <strong>de</strong>s correspondants 20 . Elle<br />
nous livre, au fil <strong>de</strong>s l<strong>et</strong>tres, pour certains <strong>de</strong> leurs auteurs, un attachement profond à<br />
l’établissement, au personnel <strong>et</strong> à ce qu’Aniane a permis dans l’œuvre <strong>de</strong> réinsertion.<br />
Complétons aussi avec les registres d’entrées <strong>et</strong> sorties <strong>de</strong>s élèves (1940-1979), <strong>de</strong> contrôles<br />
nominatifs annuels (1975-1983), <strong>de</strong>s états d’incarcération <strong>de</strong> 1959 à 1988.<br />
En ce qui concerne <strong>la</strong> vie <strong>de</strong> l’établissement, on a quelques règlements intérieurs, peu<br />
nombreux (1945, 1967), une collection complète <strong>de</strong> notes <strong>et</strong> circu<strong>la</strong>ires du ministère <strong>de</strong><br />
<strong>la</strong> Justice <strong>de</strong> 1949 à 1993, que nous avons conservée, car en bon état <strong>et</strong> reliée, <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
notes <strong>de</strong> service (1961-1993).<br />
15. Une mise à jour <strong>de</strong> c<strong>et</strong>te information donnée lors <strong>de</strong> <strong>la</strong> communication du 10 janvier 2007 s’impose : le<br />
versement <strong>de</strong> ces registres a été effectué le 17 janvier 2007 (1881 W 1-22).<br />
16. 1 Y 314-323.<br />
17. 1683 W 1-344, versement DDPJJ du 29 mai 1996.<br />
18. 1803 W 156-157, 205.<br />
19. 1803 W 146-154.<br />
20. 1803 W 208-209.<br />
50<br />
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<strong>Le</strong>s sources <strong>de</strong> <strong>la</strong> protection <strong>de</strong> l’enfance, <strong>de</strong> <strong>la</strong> collecte à <strong>la</strong> conservation<br />
Plus intéressant, signalons <strong>de</strong>s rapports d’inspection, malheureusement peu nombreux<br />
(un pour 1892 <strong>et</strong> un pour 1936) : ils donnent <strong>de</strong>s données statistiques sur les effectifs,<br />
les motifs <strong>de</strong> l’entrée, le niveau d’instruction <strong>de</strong>s pupilles à leur arrivée, <strong>et</strong> décrivent le<br />
déroulement d’une intégration du pupille à son arrivée ; celui <strong>de</strong> 1936 21 , notamment,<br />
délivre <strong>de</strong>s recommandations à l’instituteur, qui doit être « doux <strong>et</strong> paternel, il doit oublier<br />
<strong>et</strong> faire oublier le passé <strong>de</strong> ses élèves ».<br />
Pour <strong>la</strong> partie financière, on a les budg<strong>et</strong>s <strong>de</strong> l’établissement <strong>de</strong> 1958 à 1983, <strong>la</strong> comptabilité<br />
<strong>de</strong> 1941 à 1991, les comptes <strong>de</strong>s pupilles <strong>et</strong> <strong>de</strong>s élèves <strong>de</strong> 1929 à 1962, avec <strong>de</strong>s<br />
livr<strong>et</strong>s <strong>de</strong> pécule 22 .<br />
<strong>Le</strong> personnel est aussi bien représenté ; on a, dans le <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> préfecture, <strong>de</strong>s dossiers<br />
dits « individuels » <strong>de</strong> 1885 à 1940 ; c’est en fait <strong>la</strong> correspondance traditionnelle entre le<br />
ministère <strong>de</strong> <strong>la</strong> Justice, le préf<strong>et</strong> <strong>de</strong> l’Hérault <strong>et</strong> le directeur <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> qui signale les<br />
affectations <strong>de</strong> surveil<strong>la</strong>nts, ou d’instituteurs, <strong>de</strong>s <strong>de</strong>man<strong>de</strong>s <strong>de</strong> mutations, <strong>de</strong>s rapports<br />
sur <strong>la</strong> manière <strong>de</strong> servir <strong>de</strong>s personnels.<br />
Pour <strong>la</strong> partie « bâtiments », on est mieux renseigné pour <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> antérieure à 1940<br />
que dans les dossiers récents : acquisitions <strong>de</strong> terrains faites par l’État à partir <strong>de</strong> 1888,<br />
avec un intéressant p<strong>la</strong>n <strong>de</strong>s bâtiments <strong>et</strong> <strong>de</strong>s ateliers en 1903 23 . Aménagements à l’infirmerie<br />
en 1899, aux dortoirs, instal<strong>la</strong>tion <strong>de</strong> douches… On est malgré tout un peu déçu<br />
<strong>de</strong> ne pas trouver davantage d’informations sur le fonctionnement <strong>de</strong>s ateliers : l’État<br />
avait passé contrat avec les entrepreneurs qui sous-traitaient leurs fabrications. On a<br />
quand même <strong>la</strong> correspondance avec les maîtres d’apprentissage, qui nous donne <strong>la</strong> date<br />
<strong>de</strong> création <strong>de</strong>s différents ateliers : 1888, atelier <strong>de</strong> bonn<strong>et</strong>erie, fabrique d’espadrilles,<br />
cordonnerie, atelier <strong>de</strong> sabots <strong>et</strong> <strong>de</strong> galoches ; ces ateliers du début, jugés peu formateurs,<br />
sont remp<strong>la</strong>cés en 1893 par d’autres, plus aptes à donner un métier : ferb<strong>la</strong>nterie,<br />
chaudronnerie, tôlerie, zinguerie <strong>et</strong> plomberie, construction mécanique, menuiserieébénisterie,<br />
maçonnerie 24 . Pour les années plus récentes, quelques dossiers évoquent <strong>la</strong><br />
reconversion <strong>de</strong> certains ateliers, comme l’instal<strong>la</strong>tion d’un four <strong>de</strong> bou<strong>la</strong>ngerie-pâtisserie<br />
ou, en 1962-1963, <strong>la</strong> transformation <strong>de</strong> l’atelier <strong>de</strong> chaudronnerie en atelier <strong>de</strong> réparation<br />
<strong>de</strong> carrosserie automobile 25 .<br />
Aniane est, rappelons-le, une <strong>colonie</strong> industrielle ; elle a toutefois conservé un service<br />
<strong>agricole</strong>. Quelques pupilles travail<strong>la</strong>ient sur <strong>la</strong> gran<strong>de</strong> propriété <strong>agricole</strong> <strong>et</strong> viticole où<br />
ils se formaient au métier <strong>de</strong> jardinier, d’horticulteur, participaient aux vendanges.<br />
<strong>Le</strong>s questions <strong>de</strong> discipline, d’évasions, d’agressions, <strong>de</strong> mutineries sont abondamment<br />
documentées dans le <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> préfecture (rapports du directeur, rapports du préf<strong>et</strong><br />
au ministre <strong>de</strong> l’Intérieur, signalements d’évasions, rapports <strong>de</strong> gendarmerie, articles<br />
<strong>de</strong> presse) 26 .<br />
Avec l’évolution d’Aniane, en matière <strong>de</strong> suivi social <strong>et</strong> pédagogique, on trouve <strong>de</strong>s fiches<br />
d’observation <strong>de</strong> l’éducateur, auxquelles s’ajoutent les rapports où <strong>la</strong> part pédagogique<br />
s’accroît : organisations d’examens (CAP, BEP, BEPC <strong>et</strong> bacca<strong>la</strong>uréat), dossiers d’élèves<br />
inscrits dans <strong>de</strong>s stages d’insertion professionnelle <strong>et</strong> <strong>de</strong> qualification (1983-1986).<br />
21. Rapport d’ensemble sur les différents services <strong>de</strong> l’établissement au cours <strong>de</strong> l’année 1936, ADH, 1 Y 328.<br />
22. 1803 W 87-99.<br />
23. 1 Y 311-313.<br />
24. 1 Y 329.<br />
25. 1803 W 145.<br />
26. 1 Y 347.<br />
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La protection <strong>de</strong> l’enfance. Écrits protégés, écrits ignorés<br />
Autour d’Aniane<br />
Pour conclure c<strong>et</strong>te présentation, évoquons brièvement l’existence d’autres <strong>fonds</strong><br />
locaux utiles à une recherche dans le domaine <strong>de</strong> l’éducation surveillée, tout d’abord<br />
concernant <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> antérieure à 1940 :<br />
– le <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> préfecture concernant <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> <strong>de</strong>s Matelles, <strong>colonie</strong> <strong>agricole</strong> disparue<br />
en 1861, dont nous avons les états nominatifs <strong>de</strong> 1852 à 1861 ;<br />
– le <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> <strong>agricole</strong> privée <strong>de</strong> Montlobre à Vailhauquès, dont nous avons<br />
les registres d’écrou <strong>de</strong> 1872 à 1884, date <strong>de</strong> <strong>la</strong> ferm<strong>et</strong>ure <strong>de</strong> c<strong>et</strong> établissement ;<br />
– le <strong>fonds</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> préfecture concernant <strong>la</strong> Solitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> Nazar<strong>et</strong>h, établissement tenu par<br />
les sœurs <strong>de</strong> Marie-Joseph, qui accueil<strong>la</strong>it les jeunes filles à leur sortie <strong>de</strong> <strong>la</strong> prison, dont<br />
nous conservons les dossiers pour <strong>la</strong> pério<strong>de</strong> 1832-1939. <strong>Le</strong>s locaux <strong>de</strong> c<strong>et</strong> établissement<br />
abritent toujours une association habilitée par <strong>la</strong> DPJJ <strong>et</strong> nous savons qu’ils conservent<br />
toujours tout ou partie <strong>de</strong>s archives <strong>de</strong> <strong>la</strong> Solitu<strong>de</strong> <strong>de</strong> Nazar<strong>et</strong>h.<br />
Enfin, étant donné que les maisons centrales détenaient <strong>de</strong> jeunes condamnés mineurs<br />
en principe dans <strong>de</strong>s quartiers spéciaux, n’oublions pas <strong>de</strong> signaler les registres d’écrou<br />
<strong>de</strong>s maisons centrales <strong>de</strong> Montpellier <strong>et</strong> <strong>de</strong> Béziers.<br />
En ce qui concerne les archives contemporaines, nous avons reçu, en 2005, suite à<br />
un audit, les dossiers <strong>de</strong> mineurs <strong>de</strong> l’Association pour <strong>la</strong> protection <strong>de</strong> l’enfance <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
l’adolescence, association habilitée par le ministère <strong>de</strong> <strong>la</strong> Justice, créée en 1938. Il s’agit<br />
<strong>de</strong>s dossiers individuels établis <strong>de</strong> 1968 à 1997 dans le cadre d’une mesure d’AEMO 27<br />
ordonnée par le juge <strong>de</strong>s enfants du tribunal <strong>de</strong> gran<strong>de</strong> instance <strong>de</strong> Montpellier, <strong>et</strong> <strong>de</strong>s<br />
dossiers ouverts dans le cadre <strong>de</strong> l’action autour du contentieux familial. Nous menons<br />
<strong>la</strong> prospection du côté d’une autre association, équivalent <strong>de</strong> l’APEA pour l’arrondissement<br />
<strong>de</strong> Béziers, qui date <strong>de</strong> 1942 : le Comité <strong>de</strong> sauvegar<strong>de</strong> <strong>de</strong> l’enfance du Biterrois,<br />
qui conserve 50 ans <strong>de</strong> dossiers d’enquêtes sociales <strong>et</strong> <strong>de</strong> mesures AEMO.<br />
Par ailleurs, en 2001, le centre d’action éducative <strong>de</strong> Montpellier nous a versé les dossiers<br />
<strong>de</strong>s jeunes ayant fait l’obj<strong>et</strong> <strong>de</strong> mesures judiciaires d’action éducative ou d’observation<br />
en milieu ouvert <strong>de</strong> 1962 à 1981.<br />
En 2005 est ramené d’Aniane un versement <strong>de</strong> <strong>la</strong> DRPJJ contenant les dossiers <strong>de</strong>s<br />
associations habilitées <strong>de</strong> <strong>la</strong> région Languedoc-Roussillon. Pour l’Hérault, on y trouve<br />
notamment le centre <strong>de</strong> rééducation Nazar<strong>et</strong>h <strong>et</strong>, parmi les rapports, les statistiques, <strong>de</strong>s<br />
dossiers sur l’ISES d’Aniane <strong>et</strong>, notamment, un proj<strong>et</strong> <strong>de</strong> restructuration <strong>de</strong> ses services<br />
juste avant <strong>la</strong> ferm<strong>et</strong>ure.<br />
Enfin, <strong>la</strong> DDPJJ a versé les dossiers du service <strong>de</strong> liberté surveillée <strong>de</strong> Montpellier <strong>et</strong><br />
<strong>de</strong> l’antenne <strong>de</strong> Béziers <strong>de</strong> 1948 à 1987 : dossiers individuels <strong>de</strong> jeunes ayant fait l’obj<strong>et</strong><br />
d’une mesure <strong>de</strong> protection ou <strong>de</strong> surveil<strong>la</strong>nce.<br />
Conclusion<br />
Il serait utile <strong>de</strong> compléter c<strong>et</strong>te présentation par les <strong>fonds</strong> <strong>de</strong>s Archives nationales.<br />
Néanmoins, que ce soit pour les établissements d’Aniane ou <strong>de</strong> Vailhauquès, les <strong>fonds</strong><br />
<strong>de</strong>s archives départementales <strong>de</strong> l’Hérault sont assez riches <strong>et</strong> mériteraient une étu<strong>de</strong><br />
historique approfondie. À notre connaissance, ils ont été très peu exploités.<br />
52<br />
27. Action éducative en milieu ouvert.<br />
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<strong>Le</strong>s sources <strong>de</strong> <strong>la</strong> protection <strong>de</strong> l’enfance, <strong>de</strong> <strong>la</strong> collecte à <strong>la</strong> conservation<br />
Bibliographie<br />
Berthélemy (Pierre), « Souvenirs <strong>de</strong> <strong>la</strong> Colonie pénitentiaire d’Aniane (Hérault), 1936-<br />
1937 », Cahiers d’arts <strong>et</strong> traditions rurales, 14 (2002), p. 171-187.<br />
Bourquin (Jacques), « De <strong>la</strong> correction à l’éducation : Aniane, une institution pour<br />
mineurs », Cahiers d’arts <strong>et</strong> traditions rurales, 14 (2002), p. 143-168.<br />
Manuel (Henri), « Reportage photographique sur <strong>la</strong> <strong>colonie</strong> pénitentiaire d’Aniane<br />
(Hérault) : soixante-quatre photographies originales », Cahiers d’arts <strong>et</strong> traditions rurales,<br />
14 (2002), p. 261-300.<br />
Molina (Thérèse), Étu<strong>de</strong> d’une organisation : l’institution spéciale d’éducation surveillée<br />
d’Aniane, <strong>la</strong> situation <strong>de</strong> conflit typique <strong>et</strong> rituelle, maîtrise dactylographiée <strong>de</strong> sociologie,<br />
faculté <strong>de</strong>s l<strong>et</strong>tres <strong>et</strong> sciences humaines, université <strong>de</strong> Montpellier III, septembre 1982.<br />
Richard (Jean-C<strong>la</strong>u<strong>de</strong>), David (Pierre), Vialeng (Georges), « La <strong>colonie</strong> industrielle <strong>et</strong><br />
<strong>agricole</strong> d’Aniane (Hérault) : les révoltes <strong>et</strong> mutineries d’avril 1914 <strong>et</strong> août 1937 d’après<br />
<strong>la</strong> presse montpelliéraine », Cahiers d’arts <strong>et</strong> traditions rurales, 8/9 (1995-1996).<br />
Rouan<strong>et</strong> (Marie), <strong>Le</strong>s enfants du bagne, Paris, éditions Payot, 1992.<br />
Trémentin (Jacques), « Aniane : du bagne d’enfants à <strong>la</strong> base <strong>de</strong> plein air », Gavroche,<br />
revue d’histoire popu<strong>la</strong>ire, janvier-février 1999, p. 21-22.<br />
53<br />
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