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Eclairer, s'éclairer - Bordeaux

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<strong>Eclairer</strong><br />

S’éclairer<br />

Musée des Arts décoratifs - 39 rue Bouffard - 33000 <strong>Bordeaux</strong><br />

Tel : 05 56 10 14 00 - musad@mairie-bordeaux.fr - bordeaux.fr


Aujourd’hui nous considérons volontiers un lustre ou un flambeau du XVIII ème siècle<br />

comme un élégant objet de décoration. Mais il faut songer qu’autrefois ils constituaient<br />

l’unique moyen de s’éclairer, en dehors de la lumière naturelle et de la lueur de la cheminée.<br />

Lorsque, le soir venu, les appartements étaient plongés dans la pénombre, il fallait<br />

rivaliser d’ingéniosité pour illuminer les grands salons tout en économisant les bougies<br />

qui étaient très coûteuses : la réflexion des grandes<br />

glaces trumeaux et la peinture blanche des plafonds<br />

permettaient par exemple d’optimiser l’usage des différents<br />

luminaires.<br />

En effet, dès la fin du XVII ème siècle, des progrès techniques<br />

accomplis dans la construction des cheminées<br />

(à savoir l’abaissement du manteau pour réduire<br />

le volume de l’âtre et obtenir un meilleur tirage ainsi<br />

qu’un meilleur chauffage) favorisèrent l’installation de<br />

ces immenses glaces qui apparurent dès 1672, date à<br />

laquelle Bernard Perrot déposa le brevet d’invention<br />

d’une technique de coulage de verre permettant des<br />

Abraham Bosse (1606-1676) : La visite à la nourrice, Bibliothèque<br />

Nationale, Paris<br />

réalisations de grandes tailles. Ces glaces étaient placées au-dessus du manteau des<br />

cheminées et servaient à la fois de décor et de réflecteur. En parallèle, les ouvertures des<br />

fenêtres s’agrandirent, laissant pénétrer plus amplement la lumière du jour.<br />

BOUGIE OU CHANDELLE <br />

La chandelle : issu du latin candela, le mot chandelle désigne un appareil<br />

d’éclairage formé d’une mèche tressée enveloppée de suif, c’est-à-dire de graisse animale.<br />

Les chandelles de suif faites en graisse de porc, donc mal odorantes et polluantes,<br />

dégageaient beaucoup de fumée et se consumaient rapidement : elles « coulaient et<br />

exhalaient toujours une odeur très mauvaise et une vapeur noire et épaisse » (Jacques<br />

Savary des Bruslons, Dictionnaire universel de commerce,<br />

d’histoire naturelle, d’art et de métier, 1713). Elles furent<br />

alors interdites.<br />

La mèche fuligineuse des chandelles devait être régulièrement<br />

raccourcie avec des mouchettes, sortes de ciseaux<br />

(« moucher une chandelle »), ou soufflée à l’aide d’un éteignoir,<br />

ustensile creux en forme de cône.<br />

Avec l’apparition de la bougie, plus raffinée mais plus chère,<br />

dans les intérieurs bourgeois, la chandelle, utilisée principalement<br />

dans les demeures modestes, va être associée à<br />

Eteignoir du XVIII ème siècle et mouchette du<br />

XIX ème siècle, chambre garance.<br />

un mode de vie précaire illustré par l’expression « faire des économies de bouts de chandelles<br />

».


La bougie : appelée « cire pour chandelles », elle apparaît vers 1300 et tire<br />

son nom de la ville de Bougie (Bejaia) en Algérie, d’où on l’importait. Elle désigne un appareil<br />

d’éclairage formé d’une mèche tressée enveloppée de cire. Les bougies de cire<br />

d’abeille, de couleur blanche, moulées, cylindriques, étaient très coûteuses et utilisées<br />

surtout par l’aristocratie pour les salles de réception. La dimension des bougies avait été<br />

fixée à l’époque de Louis XIV : 32,7 cm de hauteur et 2,7 cm de diamètre. Dans les cuisines<br />

et les autres pièces de service, on s’éclairait avec des bougies de cire de couleur<br />

naturelle (beige), utilisées également en période de deuil.<br />

Malgré leur prix, les bougies se devaient d’être changées tous les jours. Ainsi, dans la plupart<br />

des foyers, on vivait autant que possible à la lumière du jour pour économiser les précieuses<br />

bougies, utilisées avec parcimonie et principalement dans les grandes occasions.<br />

LUMIÈRE SUR…LES SUPPORTS DE LUMIÈRE !<br />

Le chandelier (vient du mot chandelle) : c’est un terme générique qui désigne<br />

un ustensile servant à porter une ou plusieurs chandelles, puis les bougies et les cierges.<br />

On distingue deux grandes familles de chandeliers :<br />

- le chandelier à broche (comme les chandeliers d’église) qui est muni en son<br />

sommet d’une pointe dans laquelle se fichait un cierge de cire d’abeille.<br />

- le chandelier à douille (comme le chandelier de ménage à usage domestique)<br />

est composé d’un binet (partie haute dans laquelle on encastre la chandelle), d’un fût<br />

(ou tige) et d’une base (cloche + assise). Le nœud reliant le fût à la base<br />

est appelé le collet.<br />

De ce terme générique découlent d’autres luminaires, selon que l’objet<br />

présente une ou plusieurs branches, que sa tige centrale dépasse les<br />

autre bras ou non, etc.<br />

Le flambeau (vient du mot flambe, synonyme de flamme) : à<br />

l’origine ce mot évoque un ensemble de plusieurs mèches un peu<br />

épaisses qui sont jointes et couvertes soit de cire blanche, soit, le plus<br />

souvent, de cire jaune. Puis, par extension, le terme de flambeau finit<br />

par désigner l’objet servant de support à ce faisceau de bougies : on le<br />

nomme dès lors flambeau à la financière ou mestier. Et le flambeau,<br />

considéré ainsi comme objet, est un chandelier à douille unique, c’està-dire<br />

qu’il n’est pas muni de broche et que l’on ne peut y placer qu’une<br />

seule bougie. Dès le XIV ème siècle, on distingue deux familles de flambeaux<br />

:<br />

Flambeau de toilette, XVIII ème<br />

siècle, salon des singeries<br />

- Les flambeaux de table, appelés aussi chandeliers à mettre flambeau aux XV ème<br />

et XVI ème siècles, qui, comme leur nom l’indique, sont disposés sur la table pour éclairer<br />

les repas.<br />

- Les flambeaux de poing, carrés et formés de plusieurs mèches, qui étaient portés<br />

à la main. Le flambeau de toilette faisait partie de cette dernière catégorie.


Le candélabre (il portait jadis des chandelles, d’où son<br />

nom ancien de chandélabre) : il s’agit d’un chandelier à douilles à plusieurs<br />

branches, généralement symétriques, partant de la tige centrale.<br />

Le mot candélabre, apparu au XIX ème siècle, s’applique<br />

finalement à des luminaires de formes très diverses.<br />

On les plaçait par paire aux deux extrémités de la tablette de la cheminée<br />

; ils encadraient ainsi la pendule qui se trouvait au centre. Ces<br />

trois pièces constituaient la garniture type des cheminées de l’époque.<br />

Lorsqu’il est bas sur pied et ne comporte que deux branches, le candélabre<br />

est appelé double flambeau ou bout de table ; lorsqu’il est de<br />

forme pyramidale, à feux multiples et orné de cristaux taillés, on le<br />

nomme girandole.<br />

La girandole (vient du latin girare qui signifie tourner) : il<br />

s’agit d’un candélabre armé d’un assez grand nombre de bras, combinés<br />

de telle façon que les lumières groupées forment une sorte de cône aussi arrondi<br />

que possible à sa base. Elle apparut dans la seconde moitié du XVII ème siècle, époque où<br />

l’on commença à diviser la lumière, et où l’on substitua aux torches de cire et aux flambeaux<br />

à flamme unique un grand nombre de bougies de petit calibre, multipliant ainsi les<br />

foyers lumineux.<br />

Bougeoir, XVII Ième siècle salon de compagnie.<br />

Girandole, XVIII ème siècle,<br />

vestibule<br />

La demi-girandole : c’est un candélabre d’applique qui<br />

prend, sur sa face extérieure, l’apparence d’une girandole. Elle<br />

peut être posée sur un long pied comme pour les torchères présentées<br />

dans le vestibule du musée.<br />

Le bougeoir (vient du mot bougie) : petit luminaire bas muni<br />

généralement d’une poignée ou d’une prise latérale ; on l’appelle<br />

aussi bougeoir à la main. Sa forme actuelle remonte au<br />

début du XVIII ème siècle. Utilisé par le plus simple des particuliers,<br />

il était placé sur les tables de nuit ou de toilette. On le<br />

connaissait aussi sous le nom de martinet, à cause de sa ressemblance<br />

avec cet oiseau à longue queue. Au XVII ème siècle,<br />

le mot bougeoir désignait « un chandelier à mettre une bougie<br />

». D’aspect imposant et de plus grandes dimensions, il<br />

jouait un rôle important dans le cérémonial du coucher du roi : tenir le bougeoir était un<br />

signe d’honneur. Deux petits bougeoirs sont présentés sur la table à cabaret du salon de<br />

compagnie du musée .


Le bras de lumière : à l’origine, il s’agit d’un flambeau tenu par un avantbras<br />

sculpté en bois qui semble sortir du mur sur lequel il est fixé ; puis, par analogie, ce<br />

bras vient à qualifier uniquement la tige de métal centrale qui constitue l’ossature du luminaire,<br />

forme qui se généralise sous Louis XIV.<br />

Le XVIII ème siècle fut l’époque par excellence des bras de lumières, dits aussi bras d’applique,<br />

en bronze. Pendant la première moitié du XVIII ème siècle, les bras faisaient corps<br />

avec la cheminée. Leur rôle était de faire le lien entre le foyer de celle-ci et sa partie supérieure,<br />

là où était placée la glace. Il tenait lieu de candélabre<br />

avant que ce dernier n’apparaisse posé sur la tablette du manteau<br />

de la cheminée à partir de la seconde moitié du XVIII ème siècle.<br />

Placés sur les côtés des trumeaux de glace, le plus près possible<br />

du cadre des miroirs pour s’y refléter, les bras de lumière à<br />

plusieurs branches étaient fixés à une hauteur permettant d’allumer<br />

facilement les bougies.<br />

Lorsqu’ils étaient plus éloignés du cadre de la glace, ils pouvaient<br />

être munis de pendeloques de verre ou de cristal qui jouaient le<br />

même rôle réflecteur de lumière. Les pendeloques des lustres<br />

ont la même fonction.<br />

Bras de lumière, XVIII ème siècle, salon<br />

de compagnie<br />

Le lustre : le terme<br />

apparaît au XVIII ème siècle, mais les appareils<br />

d’éclairage suspendus existaient déjà depuis le XI-<br />

V ème siècle. Il fut d’abord réalisé en bois, mais ce<br />

type ce matériau était difficile à entretenir car la<br />

cire et le suif coulaient dessus. Il fut alors remplacé<br />

par du métal (bronze, cuivre, fer forgé) à partir du<br />

XV ème siècle. Au XVIII ème siècle apparaissent les<br />

lustres en verre taillé et en cristal (cristal de roche<br />

puis cristal fondu), garnis de pièces pendantes<br />

(plaquettes ou pendeloques) en forme d’étoiles, de<br />

boules, de poires, de vases, de pyramides, ou de<br />

poignards. Toutes ces pièces d’enfilage étaient destinées à décorer et à multiplier l’éclat<br />

des bougies.<br />

Lanterne, XVIII ème siècle, vestibule<br />

Vue du salon de compagnie<br />

La lanterne : ustensile d’éclairage très ancien, la lanterne<br />

protège la source lumineuse des courants d’air, ce qui permet de la<br />

transporter à l’extérieur ou de la placer dans une pièce de passage<br />

(vestibule, couloir, escaliers, etc.).<br />

Pour constituer les parois de la lanterne qui devaient être obligatoirement<br />

transparentes pour pouvoir éclairer suffisamment, on utilisait<br />

soit du parchemin, soit de la corne sciée en lamelle de fine<br />

épaisseur. Mais celles-ci pouvaient prendre feu facilement avec la<br />

flamme de la bougie.<br />

A la fin XVII ème siècle apparaissent les lanternes en verre, d’abord de<br />

forme carrée ou octogonale (à pans coupés). Mais il faut attendre le


XVIII ème siècle et ses progrès techniques pour que des lanternes à verre bombé fassent<br />

leur apparition.<br />

La lampe à huile : cet objet est décrit ainsi par Savary des Bruslons dans<br />

son dictionnaire de 1713 (op. cit.) : « Vaisseau propre à contenir de<br />

l’huile ou autres matières grasses et onctueuses qui, par le moyen<br />

d’une mèche de coton qui en est humectée, servent à éclairer pendant<br />

la nuit. ».<br />

La lampe à huile est un moyen d’éclairage qui remonte à la plus<br />

haute antiquité mais qui n’a jamais été très pratique ni très agréable.<br />

Jusqu’au XVII ème siècle, elle s’apparentait à un récipient plus<br />

ou moins vaste, rempli d’huile, duquel émergeait une mèche faite de<br />

chanvre, de lin ou de coton. On se préoccupait peu d’améliorer le<br />

fonctionnement de ces appareils, en revanche on prenait grand soin<br />

de leur forme et de leur décoration.<br />

C’est sous Louis XIV que des améliorations furent apportées à la<br />

fabrication de ces lampes : il s’agissait entre autre de lutter contre<br />

la mauvaise odeur et la fumée, d’éviter d’avoir trop souvent à vérifier<br />

le niveau de l’huile, et de ne plus devoir tirer la mèche à mesure<br />

qu’elle se consumait pour la couper de peur qu’en charbonnant elle<br />

ne produisit encore plus de fumée et d’odeur. Elle était alors utilisée<br />

Lampe Carcel, XIX ème siècle,<br />

combles s, salle rouge.<br />

par les foyers modestes, les plus fortunés préférant la bougie. Cependant, au XVIII ème siècle,<br />

ces lampes revinrent à la mode car les bougies de cire coûtaient très chères. En<br />

dépit du nouveau soin apporté à leur fabrication, ces lampes, appelées lampes économiques,<br />

optiques, ou encore à pompe continuèrent d’éclairer imparfaitement, de fumer<br />

et de s’éteindre trop souvent. Alors, en 1766, M. Léger eut l’idée d’épurer les huiles et<br />

d’utiliser une mèche tressée. Dans son Tableau de Paris, paru à partir de 1781, Louis-<br />

Sébastien Mercier écrit la chose suivante :<br />

« J’ai cœur que vous ménagiez votre vue. Je vous annonce des mèches qui n’exhalent<br />

ni fumée ni odeur. Votre lampe studieuse pourra brûler sans incommoder vos yeux ni<br />

votre poitrine. Ces mèches sont composées de coton et tressées sur le métier ; elles<br />

sont enduites d’une substance grasse, d’une odeur légèrement aromatique. En brûlant,<br />

elles ne donnent aucun noir de fumée, quelle que soit l’huile qu’on employe ; elles jettent<br />

une flamme claire et toujours égale. ».<br />

En 1784, Monsieur Quinquet substitua aux mèches ordinaires des mèches cylindriques<br />

creuses de façon à activer la combustion. Ces lampes furent utilisées pour la première<br />

fois à la Comédie française en cette fin de XVIII ème siècle et furent appelées lampes à double<br />

courant d’air puis lampes à la Quinquet. Elles donnaient une lumière vive et ne fumaient<br />

pas.<br />

Puis, en 1800, Carcel inventa une lampe à laquelle il donna son nom : elle était munie<br />

d’un mécanisme d’horlogerie que l’on remontait avec une clef et qui, grâce à un piston,<br />

faisait monter l’huile contenue dans un réservoir placé au pied de la lampe.<br />

Puis vint l’électricité, l’interrupteur remplaçant la mouchette et le briquet.


LA FÉE ÉLECTRICITÉ<br />

Dès 1813, le chimiste anglais Humphry Davy<br />

réussit à faire naître, au cours d’une expérience,<br />

un arc électrique éblouissant en utilisant la décharge<br />

d’une pile constituée de deux fils conducteurs<br />

terminés par deux crayons de charbons de<br />

bois. Le phénomène se produisit dans un flacon<br />

de cristal dans lequel il avait fait le vide. Ces travaux<br />

étaient stimulés par la nécessité de créer des<br />

lampes de sûreté pour protéger les mineurs du grisou. Il fallut cependant attendre 1844<br />

pour que Léon Foucault adapte la découverte de Davy en remplaçant le vide du cristal<br />

par un gaz conducteur. Dès 1870, on était ainsi capable d’éclairer de grands espaces<br />

d’une lumière bleutée !<br />

C’est un jeune ingénieur russe du nom de Jablochkoff qui donna une impulsion à cette<br />

industrie en remplaçant les régulateurs mécaniques par un procédé qui fut appelé “la<br />

bougie électrique” pour assurer une autonomie plus longue de l’éclairage (limitée alors<br />

à 1h30). La troisième étape décisive de cette évolution fut le remplacement des mèches<br />

de charbon par un seul brin positionné dans un tube qui venait frotter sur un disque de<br />

cuivre. Le frottement créait l’étincelle à l’origine de l’arc électrique. On put dès lors diminuer<br />

l’intensité de la lumière et envisager un éclairage plus ciblé et mieux maîtrisé. En<br />

1881, M. de Changy remplaça ce dispositif par un fil métallique : ce furent les débuts de<br />

l’incandescence.<br />

En 1879, le physicien américain Thomas Edison utilisa<br />

ce principe d’incandescence mais en l’enfermant dans<br />

un globe de verre ovoïde rempli de gaz : la première<br />

ampoule électrique avec un culot à vis était née ! Elle<br />

pouvait briller pendant près de mille heures avant d’être<br />

remplacée, et ce pour un prix de fabrication très modique.<br />

Elle était alimentée en courant électrique par une<br />

dynamo. A l’époque, le filament était une fibre de coton<br />

carbonisée. Par la suite, les lampes à incandescence<br />

utilisèrent un filament de carbone. Aujourd’hui, ce dernier<br />

est en tungstène.<br />

Tale de la salle à manger de l’hôtel frugès, XX ème siècle,<br />

combles, salle Art déco.


La miniaturisation des circuits et des ampoules permit aux ingénieurs<br />

du début du XX ème siècle d’insérer des sources de lumière<br />

dans des objets dont le but premier n’était pas l’éclairage. Ainsi,<br />

la table réalisée par Alexandre Callède pour l’hôtel Frugès à <strong>Bordeaux</strong><br />

est munie d’un système électrique : il s’agit d’une table<br />

ronde en noyer avec en son centre un disque de verre dépoli<br />

éclairé du dessous par des ampoules électriques.<br />

Les designers de l’après-guerre exploitèrent les innovations<br />

techniques, comme l’invention, par Edward G. Zubler et Frederick<br />

Mosby en 1959, de la lampe halogène. Elle produit elle aussi de<br />

la lumière en portant à incandescence un filament, mais le phénomène<br />

se déroule dans un mélange de gaz noble et de gaz halogéné<br />

(iode, bromure de méthyle ou dibromure de méthylène) à<br />

haute ou basse pression, qui limite le noircissement de l’ampoule<br />

dû à l’évaporation du filament de tungstène : les particules de<br />

tungstène, au contact du mélange gazeux, se redéposent sur le<br />

filament. Ce cycle chimique permet une température de filament<br />

plus élevée donnant une lumière plus éclatante. En 1976, Tobia<br />

Scarpa lance une lampe halogène qu’il baptise Papillona : c’est<br />

une lampe sur pied à lumière directe diffusée par deux réflecteurs<br />

Lampe Papillona de tobia Scarpa,<br />

1976, salle design.<br />

en verre prismatique métallisé. La base et la tige sont en aluminium verni. L’exemplaire<br />

du musée est muni d’un régulateur qui permet d’augmenter ou de diminuer la quantité de<br />

lumière voulue<br />

Lampe Tizio de Richard Capper, 1972, Ed. Artémide,<br />

salle design.<br />

L’ingénieur et designer allemand Richard Sapper a également<br />

travaillé sur les lampes halogènes à faible voltage,<br />

comme sa lampe de bureau Tizio, qui est l’une de<br />

ses premières créations. Elle est constituée de deux<br />

bras s’articulant grâce à un système de contrepoids. Les<br />

fils, invisibles, sont dissimulés dans ce bras pourtant<br />

très mince qui cache aussi le transformateur et le réflecteur.<br />

Elle rappelle, par son principe, la lampe Jielde,<br />

née en 1950, une des stars de l’histoire du luminaire du<br />

XX ème siècle. Elle était constituée d’un bras articulé sans<br />

fil, d’un cercle de préhension inédit autour du réflecteur,<br />

et d’un socle à étau. Son créateur, Jean-Louis Domecq,<br />

ingénieur en mécanique, lui donna son nom (initiales J-L D, Jieldé). Celui-ci, lassé de ne<br />

pas trouver la lampe adéquate pour équiper les machines de son usine, dessina et réalisa<br />

lui-même, en 1950, la lampe de travail fiable et pratique dont il avait besoin. L’originalité<br />

de sa création fut très vite remarquée, les commandes affluèrent. Pour faire face<br />

au succès, il créa en 1953 la société Jieldé qui développa ensuite plusieurs types de luminaires,<br />

de la lampe de table au lampadaire à triple longueur de bras.


L’utilisation de nouvelles technologies n’exclue pas le recourt à des références plus<br />

classiques. Ainsi, la lampe Lucellino de Ingo Maurer<br />

semble tout droit sortie d’un conte de fées : réalisée en<br />

verre, laiton et matière plastique, le designer lui a adjoint,<br />

en guise d’abat-jour, deux ailes réalisée à la main<br />

en plumes d’oie pour qu’une fois allumée, elle ressemble<br />

à une sorte de luciole fantastique que l’on aurait<br />

envie de voir s’envoler ou d’attraper comme un papillon.<br />

Or, lorsque l’on croit l’avoir attrapée, elle nous échappe<br />

puisque qu’il suffit d’effleurer sa structure tactile pour allumer<br />

ou éteindre l’ampoule.<br />

Lampe Lucellino, Ingo Maurer, salle design<br />

Le designer bordelais Sylvain Dubuisson, adepte des<br />

technologies de pointe tient lui aussi à donner une profondeur<br />

à ses œuvres qui sont bien plus que de simples objets domestiques,<br />

à l’image de sa lampe Tétractys (1985). Pythagore, célèbre<br />

mathématicien de la Grèce antique, considérait que le mot<br />

Tetractys évoquait la somme des quatre premiers chiffres :<br />

1+2+3+4 = 10 (Tetra). C’est pourquoi cette lampe est composée<br />

de quatre cylindres aux proportions savamment calculées : le<br />

cylindre supérieur, le plus petit, vaut un et représente la mesure<br />

de base, le second cylindre fait deux fois la dimension du premier,<br />

le troisième trois fois, le quatrième quatre fois. Et au final<br />

on retrouve l’équation de la théorie pythagoricienne. Le corps de<br />

la lampe est surmonté d’un cône inversé en verre sablé qui réfléchit<br />

la lumière de l’ampoule placée à l’intérieur du cylindre<br />

supérieur. Sylvain Dubuisson dit chercher à reproduire, grâce à<br />

Lampe Tétractys, Sylvain Dubuisson,<br />

1985, salle design.<br />

ce procédé de lumière indirecte, la douceur de la lumière d’une<br />

bougie. Cependant, il ne suffit pas à l’utilisateur de presser l’interrupteur<br />

pour faire la lumière sur le sens de l’objet. Non, il doit participer plus activement<br />

à sa rencontre avec l’objet : que signifie la présence d’une réplique du testament de Heiligenstadt<br />

de Beethoven caché dans l’un des cylindres aménagé en coffret Que doit<br />

chercher l’utilisateur en trouvant aux côtés de celui-ci une citation d’Héraclite qui affirme<br />

qu’il « n’en vaudrait pas mieux pour les hommes qu’arrivât ce qu’ils désirent » Tetraktys<br />

est une pièce unique qui remplit donc trois fonctions : éclairer, délivrer un message<br />

et inviter à la réflexion.


La forme, les matériaux et la couleur prennent également<br />

beaucoup d’importance. Martine Bedin, architecte<br />

et designer bordelaise, a beaucoup été<br />

amenée à travailler sur les luminaires, en particulier<br />

dans le cadre du groupe Memphis (elle a travaillé<br />

avec Ettore Sottsass) qui édite ses créations. Ainsi,<br />

en 1981 paraît la lampe Super en métal laqué et<br />

caoutchouc. C’est une lampe chariot en forme de<br />

voiture surmontée de six douilles laquées de couleurs<br />

différentes. Forte de ce succès, elle persiste<br />

dans ses recherches sur le luminaire : en 1985 elle est lauréate du concours de lampes<br />

de bureau lancé par l’APCI et le Ministère de la Culture, et elle est nommée « lampe d’argent<br />

» du Salon du Luminaire. Dans les années 1980, les designers tentent de dépasser<br />

la fonction unique de l’objet en délivrant des messages et en réalisant des objets ludiques<br />

aux formes et aux couleurs novatrices.<br />

Aujourd’hui, l’enjeu du luminaire réside dans la fabrication de lampes écologiques,<br />

tant du point de vue des matériaux eux-mêmes (la lampe Aerial Light E23 réalisée en<br />

1983 par Ron Arad et Peter Keen est constituée d’une antenne de voiture télescopique<br />

récupérée et télécommandée à distance), que de l’utilisation d’ampoules basse consommation<br />

qui sont amenées à remplacer l’éclairage à incandescence en 2010. L’ampoule<br />

fluorescente compacte “basse consommation” se présente sous la forme d’un tube miniaturisé<br />

replié ou torsadé, parfois recouvert d’un bulbe de verre pour lui donner la forme<br />

d’une lampe traditionnelle. Elle consomme quatre à cinq fois moins d’électricité que la<br />

lampe à incandescence, et dure huit fois plus longtemps. Mais elle est aussi dix fois plus<br />

chère et est assez volumineuse. Les designers contemporains réfléchissent donc à la manière<br />

de s’adapter à ce nouveau genre d’ampoules tout en conservant dans leur travail<br />

une grande liberté de formes et de dimensions.<br />

ATELIER PROPOSÉ :<br />

Réalisation d’une lanterne<br />

Matériel à apporter par enfant :<br />

1 feuille de calque, format A4<br />

1 chemise cartonnée (sans élastique)<br />

Feutres

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