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Michel Pinault<br />
Socal<strong>le</strong>d<br />
L’ESPRIT DE FAMILLE<br />
Quand on est dans la merde jusqu’au cou, il ne reste plus<br />
qu’à chanter”, disait Beckett. Il y a visib<strong>le</strong>ment un peu de<br />
malheur, de tristesse dans <strong>le</strong>s bas-fonds de la quatrième<br />
ga<strong>le</strong>tte du musicien. L’homme volubi<strong>le</strong>, véritab<strong>le</strong> animal social, ne<br />
s’en cache pas non plus : “Quand j’écris des paro<strong>le</strong>s, je me raconte<br />
beaucoup. C’est ma matière première. Et là, je suis parti de cette<br />
personne qui m’a tourné <strong>le</strong> dos, qui m’a fait <strong>le</strong> “si<strong>le</strong>nt treatment”,<br />
comme on dit en anglais. La peine m’inspire beaucoup. Et je <strong>le</strong> dis<br />
dans <strong>le</strong> titre Richi : “Turn this sadness into inspiration”.” Mais derrière<br />
des textes personnels qui traduisent<br />
visib<strong>le</strong>ment une peine d’amour, S<strong>le</strong>epover<br />
diffuse une ambiance festive contagieuse,<br />
qui appel<strong>le</strong> aux déhanchements nocturnes.<br />
Socal<strong>le</strong>d, qui n’a jamais été aussi<br />
efficace musica<strong>le</strong>ment, confirme ici son<br />
envie d’écrire de bel<strong>le</strong>s chansons pop,<br />
cel<strong>le</strong>s qui se chantent et se dansent sans aucune arrière-pensée.<br />
Tel<strong>le</strong>ment qu’on en oublierait <strong>le</strong> savant mélange doux et amer à la<br />
base de sa mixture musica<strong>le</strong>.<br />
Si au départ, il désirait s’en tenir à ses fidè<strong>le</strong>s collaborateurs qui<br />
l’accompagnent en spectac<strong>le</strong> - une bande de cinq joyeux compagnons,<br />
dont Katie Moore qui apporte une signature voca<strong>le</strong> au projet<br />
-, sa propension à rassemb<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s gens d’ici et d’ail<strong>le</strong>urs a<br />
encore une fois pris <strong>le</strong> dessus : “C’est une col<strong>le</strong>ction de gens que<br />
je que j’adore entendre et dont je ne pourrais me passer.” En tout,<br />
34 personnes ont contribué à cette gigantesque fête de la musique,<br />
de la rappeuse Roxanne Shanté à Chilly Gonza<strong>le</strong>s (qu’il accompagne<br />
souvent en spectac<strong>le</strong>). Cette manie de réunir des<br />
musiciens entraîne Socal<strong>le</strong>d, détenteur d’un passeport sous <strong>le</strong><br />
nom de Josh Dolgin, dans de multip<strong>le</strong>s voyages. Il se rend à Pittsburgh<br />
pour capter la basse de Dwayne Dolphin, il enregistre <strong>le</strong>s<br />
arrangements de cuivre de Fred Wes<strong>le</strong>y à New York, il attrape DJ As-<br />
“Je suis tout <strong>le</strong><br />
contraire d’un<br />
minimaliste.”<br />
41<br />
uN K CoMMe KebeC<br />
SUR SON QUATRIÈME<br />
DISQUE SLEEPOVER,<br />
SOCALLED A RÉUNI<br />
LES GENS QU’IL<br />
PRÉFÈRE (MUSICIENS,<br />
CHANTEUSES ET<br />
MARIONNETTES) POUR<br />
UNE AVENTURE<br />
MUSICALE LIBRE ET<br />
AMUSANTE. UNE<br />
GRANDE FÊTE SOUS LE<br />
SIGNE DU MÉLANGE<br />
DES CULTURES ET DES<br />
GENRES MUSICAUX.<br />
sault lors d’un passage à Montréal. En France, il rencontre Enrico<br />
Macias pour la pièce d’ouverture, UNLVD (un humaniste dont il ne<br />
partage évidemment pas <strong>le</strong>s liens amicaux avec Nicolas Sarkozy,<br />
mais pour qui il réalise son dernier disque, Voyage d’une mélodie).<br />
C’est pour toutes ces bonnes raisons que Gonza<strong>le</strong>s a étiqueté <strong>le</strong><br />
Montréalais, qui mê<strong>le</strong> autant <strong>le</strong>s genres que <strong>le</strong>s cultures, de “maximaliste”.<br />
“En effet, je suis tout <strong>le</strong> contraire d’un minimaliste… J’ai<br />
essayé de garder une recette simp<strong>le</strong>, mais j’ai encore une fois failli<br />
à la tâche. Sur mon disque précédent, j’avais une quarantaine d’invités.<br />
J’en ai dix de moins. Pour <strong>le</strong> prochain,<br />
je n’en veux qu’une quinzaine !”<br />
Malgré un résultat final pop, dansant, soul<br />
et fondamenta<strong>le</strong>ment hip-hop, une démarche<br />
organique propre au collage sonore<br />
transparaît. Ici, tout débute par la recherche<br />
de rythmes et d’échantillons sonores : “Je fouil<strong>le</strong> dans mes<br />
disques. Je prends des notes dans mes ca<strong>le</strong>pins. C’est la partie de<br />
la création que je préfère. Ensuite, je pars à la recherche d’éléments<br />
que j’enregistre et assemb<strong>le</strong> en studio, à Ottawa, avec un<br />
ami de longue date et son père… Je ne suis ni un rappeur, ni un<br />
chanteur : je joue du piano, j’écris des arrangements, je compose,<br />
je cherche des sons, des textures. Bien que je sois aussi musicien,<br />
c’est avant tout une démarche de producteur.” Dans tous <strong>le</strong>s cas,<br />
il semb<strong>le</strong> impossib<strong>le</strong> de <strong>le</strong> confiner à une seu<strong>le</strong> activité puisque<br />
l’homme entretient de multip<strong>le</strong>s passions artistiques en parallè<strong>le</strong>,<br />
dont la création de marionnettes, de sympathiques peluches qui<br />
s’affichent sans comp<strong>le</strong>xe à ses côtés sur la pochette de S<strong>le</strong>epover.<br />
C’est bien connu, <strong>le</strong> plaisir s’amplifie lorsque l’on est plusieurs à<br />
<strong>le</strong> partager !<br />
Sarah Lévesque<br />
“S<strong>le</strong>epover” - Dare to Care / Se<strong>le</strong>ct<br />
www.socal<strong>le</strong>dmusic.com