23.02.2015 Views

Bad lever Option finance - DS Avocats

Bad lever Option finance - DS Avocats

Bad lever Option finance - DS Avocats

SHOW MORE
SHOW LESS

You also want an ePaper? Increase the reach of your titles

YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.

Entreprise et expertise Juridique<br />

Juridique Entreprise et expertise<br />

Peut-on toujours utiliser les clauses<br />

de «bad leaver» ?<br />

Les clauses de «bad leaver» (littéralement<br />

«mauvais partant») ont pour objet de<br />

sanctionner le départ fautif d’un associé<br />

en organisant la cession de ses actions au<br />

profit des autres associés par l’exercice<br />

d’une promesse de vente moyennant<br />

un abattement conséquent sur la valeur<br />

des actions cédées par rapport à une<br />

valorisation dite de marché. Elles figurent<br />

généralement dans le pacte d’associé ou<br />

dans les statuts de la société.<br />

Ce type de clause est également utilisé pour<br />

sanctionner le salarié bénéficiant d’un<br />

système d’intéressement tel des stockoptions<br />

en lui interdisant d’exercer l’option<br />

dont il bénéficie pour devenir actionnaire en cas de<br />

cessation fautive de ses fonctions de salarié.<br />

L’efficacité de ces clauses semble aujourd’hui mise à<br />

mal par la jurisprudence récente de la Cour de cassation,<br />

et la doctrine dénonce, à raison, l’insécurité juridique<br />

qui en résulte.<br />

Faut-il donc s’attendre à ce que les clauses de «bad<br />

leaver» soient privées d’effet dans le cadre de contentieux<br />

judiciaires ultérieurs ?<br />

Pour répondre à cette question, Il convient de faire le<br />

point sur la jurisprudence en la matière (1) puis de<br />

s’interroger sur les éventuelles parades à mettre en<br />

œuvre pour retrouver une sécurité juridique nécessaire<br />

(2).<br />

1. Etat de la jurisprudence : un voile d’insécurité<br />

sur les clauses de «bad leaver»<br />

1.1. Le spectre de l’article 1843-4 du Code civil<br />

L’article 1843-4 du Code civil, qui est d’ordre public,<br />

dispose que «dans tous les cas où sont prévus la<br />

cession des droits sociaux d’un associé, ou le rachat de<br />

ceux-ci par la société, la valeur de ces droits est déterminée,<br />

en cas de contestation, par un expert désigné,<br />

soit par les parties, soit à défaut d’accord entre elles,<br />

par ordonnance du président du tribunal statuant en<br />

la forme des référés et sans recours possible».<br />

Initialement, le champ d’application de l’article 1843-4<br />

se limitait aux cessions ou rachats de droits sociaux<br />

prévus par la loi (refus d’agrément, retrait). Toutefois,<br />

Par Arnaud<br />

Burg, avocat<br />

associé,<br />

et Isabelle Pichard,<br />

<strong>DS</strong> avocats<br />

le périmètre a été récemment étendu aux cessions<br />

ou rachats prévus par les statuts (1.1.1). La question<br />

essentielle pour les praticiens et non résolue à ce jour<br />

est de savoir si cet article doit également s’appliquer<br />

aux cessions ou rachats prévus par un pacte extrastatutaire<br />

(1.1.2).<br />

1.1.1. Le sort des clauses statutaires : un débat<br />

aujourd’hui tranché<br />

Depuis ses deux arrêts des 4 décembre 2007 et 5 mai<br />

2009, la Cour de cassation a adopté une position tranchée<br />

et très claire : l’article 1843-4 s’applique même<br />

lorsque le retrait obligatoire résulte non pas de la loi<br />

mais des statuts. En d’autres termes, l’article 1843-4<br />

l’emporte sur les clauses d’«exclusion statutaire», de<br />

telle sorte que les modalités d’évaluation des droits<br />

sociaux de l’associé prévues par ces clauses sont écartées<br />

et laissent place à celles qui seront proposées par<br />

l’expert.<br />

Il faut toutefois noter que le périmètre d’application<br />

de l’article 1843-4 est limité par la formule «en cas<br />

de contestation». L’intervention de l’expert de l’article<br />

1843-4 doit donc avoir lieu uniquement si les<br />

parties ne parviennent pas à s’accorder sur le prix.<br />

Cette condition, difficile à apprécier, a conduit la<br />

jurisprudence 1 à distinguer les cessions «forcées»<br />

des cessions spontanément voulues par les parties,<br />

ces dernières excluant toute contestation. Ainsi,<br />

l’article 1843-4 est applicable lorsque la cession se<br />

trouve imposée par des règles législatives, statutaires<br />

ou extra-statutaires, et non dans l’hypothèse d’une<br />

promesse de vente librement consentie selon un prix<br />

déterminable sur des éléments objectifs.<br />

Précisons toutefois que selon la position de la Cour<br />

de cassation 2 , la simple stipulation dans les statuts des<br />

modalités d’évaluation des droits sociaux ne suffit pas<br />

à considérer toute contestation exclue.<br />

1.1.2. Le sort des clauses extra-statutaires en question<br />

Le texte de l’article 1843-4 est, a priori, assez général<br />

pour englober les cessions prévues par des actes extrastatutaires,<br />

et la Cour de cassation, dans son arrêt du<br />

4 décembre 2007, ne délimite pas le champ d’application<br />

de sa solution, laissant imaginer qu’elle a voulu<br />

poser un principe général.<br />

La question avait suscité de nombreux débats doctrinaux,<br />

la plupart des auteurs estimant que ce texte ne<br />

pouvait s’appliquer aux cessions d’actions prévues<br />

dans les pactes extra-statutaires sauf à constituer une<br />

atteinte grave à la liberté contractuelle des parties.<br />

Cette analyse a été mise à mal dans l’arrêt rendu par<br />

la Cour de cassation<br />

le 24 novembre 2009 3 .<br />

L’efficacité de ces clauses<br />

semble aujourd’hui mise à mal<br />

par la jurisprudence récente<br />

de la Cour de cassation, et la<br />

doctrine dénonce, à raison,<br />

l’insécurité juridique qui en<br />

résulte.<br />

En l’espèce, le pourvoi<br />

invoquait l’application<br />

de l’article 1843-4<br />

à un cas de cession<br />

prévue par un pacte<br />

extra-statutaire. La<br />

Cour de cassation a<br />

rejeté ce pourvoi sur<br />

l’unique fondement<br />

que la contestation<br />

des cédants relative au<br />

prix de cession était<br />

intervenue trop tard<br />

si bien que la cession<br />

était déjà conclue. Certains auteurs soutiennent que,<br />

a contrario, si la contestation était intervenue plus tôt,<br />

l’article 1843-4 aurait été applicable. La Cour aurait<br />

donc implicitement reconnu la vocation de cet article<br />

à s’appliquer aux cessions prévues dans des pactes<br />

extra-statutaires.<br />

Comme certains auteurs beaucoup plus mesurés 4 ,<br />

nous pensons que cet arrêt de rejet n’a pas de portée de<br />

principe et n’apporte aucun élément en faveur de l’extension<br />

de l’article 1843-4 aux pactes extra-statutaires.<br />

Au contraire, la Cour de cassation, en rappelant de<br />

manière insistante dans son attendu, que le prix n’avait<br />

fait l’objet d’aucune contestation préalablement à<br />

la cession laisserait à penser qu’une clause fixant les<br />

modalités financières de la cession de manière claire et<br />

non équivoque dans un pacte extra-statutaire ne pourrait,<br />

conceptuellement, faire l’objet d’une contestation<br />

préalablement à sa levée d’option et échapperait de ce<br />

fait à l’article 1843-4, et sous réserve toutefois qu’elle<br />

ne soit pas affectée d’un vice de droit commun.<br />

Il n’en demeure pas moins qu’il serait souhaitable<br />

que la Cour de cassation puisse se prononcer rapidement<br />

et de manière positive sur l’applicabilité de l’article<br />

1843-4 aux pactes extra-statutaires de manière à<br />

dissiper les doutes créés par cet arrêt.<br />

1.2. L’article L. 1331-2 du Code du travail et les clauses<br />

de «bad leaver»<br />

Dans un arrêt du 21 octobre 2009, la Cour de cassation<br />

a cassé par un moyen relevé d’office l’arrêt qui avait<br />

débouté un salarié de sa demande en paiement au titre<br />

des stock-options en affirmant que la clause prévoyant<br />

la privation de la faculté d’exercer les stock-options par<br />

le salarié en cas de licenciement fautif constitue une<br />

sanction pécuniaire, prohibée par l’article L. 1331-2 du<br />

Code du travail 5 .<br />

La portée de cette décision mérite notre attention. En<br />

effet, comme le relève avec pertinence le commentaire<br />

d’un auteur 6 , cet arrêt dépasse le cadre des seuls plans<br />

de stock-options et pourrait s’appliquer à des dispositions<br />

similaires figurant dans un plan d’attribution<br />

d’actions gratuites ou aux conditions d’exercice des<br />

bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise<br />

assorties d’une caducité en cas de faute du salarié, voire<br />

même à l’exercice d’une promesse de vente consentie<br />

par un salarié à un prix décoté en cas de licenciement<br />

pour faute grave, constitutif d’un «bad leaver».<br />

Néanmoins, au regard du contexte de cet arrêt, rendu<br />

sans débat et sur un moyen relevé d’office par la Cour<br />

de cassation, il faut se garder de lui donner une interprétation<br />

extensive.<br />

La chambre sociale de la Cour de cassation a simplement<br />

voulu sanctionner la rédaction d’une clause d’un<br />

plan de stock-option ayant créé un lien de causalité<br />

entre la rupture du contrat de travail et la perte d’un<br />

avantage financier pour le salarié, non prévue par un<br />

texte.<br />

2. Les bonnes pratiques à envisager<br />

2.1. Bannir toute référence à l’article 1843-4<br />

dans la rédaction des clauses de «bad leaver»<br />

Pour se prémunir contre l’insécurité juridique liée à<br />

l’article 1843-4, il convient d’éviter toute référence<br />

à cette disposition dans les modalités de fixation du<br />

prix de cession des promesses de vente figurant dans<br />

les pactes extra-statutaires et de recourir, si les parties<br />

ont souhaité faire appel à un expert pour déterminer<br />

le prix ou trancher les difficultés nées de l’application<br />

d’une formule de prix, à celui prévu par l’article 1592.<br />

L’article 1592 7 encadre le recours à une expertise<br />

souhaitée par les parties pour la détermination<br />

d’un prix de vente. Il permet donc tout comme l’article<br />

1843-4 d’anticiper les situations de désaccord sur<br />

le prix entre les parties. Toutefois, l’avantage fondamental<br />

de l’article 1592 est de permettre aux parties<br />

d’imposer à l’expert les méthodes d’évaluation qu’elles<br />

ont définies contractuellement. Ainsi les parties<br />

peuvent contraindre l’expert prévu par l’article 1592,<br />

tandis que la jurisprudence récente a clairement<br />

affirmé l’indépendance de l’expert de l’article 1843-4.<br />

24 <strong>Option</strong> Finance n° 1186 - Lundi 3 septembre 2012 <strong>Option</strong> Finance n° 1186 - Lundi 3 septembre 2012 25


Entreprise et expertise Juridique<br />

2.2. Recourir à la SAS<br />

Généralement appréciée des praticiens pour sa grande<br />

souplesse, la SAS présente encore un avantage conséquent<br />

: elle n’est pas affectée par les décisions récentes<br />

de la Cour de cassation. En effet, selon l’article<br />

L. 227-18 alinéa 1 du Code de commerce consacré aux<br />

SAS, «si les statuts ne précisent pas les modalités du<br />

prix de cession des actions lorsque la société met en<br />

œuvre une clause introduite en application des articles<br />

L. 227-14, L. 227-16 et L. 227-17, ce prix est fixé par<br />

accord entre les parties, ou, à défaut, déterminé dans<br />

les conditions prévues à l’article 1843-4 du Code civil».<br />

L’article 1843-4 ne s’appliquera donc qu’à titre subsidiaire.<br />

Ces dispositions qui dérogent au droit commun<br />

restituent toute leur force aux clauses de détermination<br />

de prix de cession d’actions.<br />

2.3. Rédiger avec prudence les clauses de «bad<br />

leaver» en présence d’associés salariés<br />

L’intrusion de l’article L. 1331-2 du Code du travail<br />

dans le champ du droit des sociétés impose de revoir<br />

la rédaction des clauses de «bad leaver».<br />

Les clauses de présence n’étant pas remises en cause<br />

par l’arrêt du 21 octobre 2009 8 , elles devraient se généraliser.<br />

Dans les nouvelles rédactions, il conviendra<br />

d’exclure toute clause stipulant la perte du droit<br />

d’exercer une option en cas de licenciement fautif et<br />

de formuler uniquement une clause de présence du<br />

salarié dans la société à titre de condition d’exercice<br />

des options bénéficiant au salarié.<br />

En conclusion, on perçoit aisément tous les enjeux<br />

pratiques attachés à cette question : ces clauses sont<br />

faites pour dissuader les associés managers ou cadres<br />

dirigeants d’avoir un comportement contraire aux engagements<br />

pris lors de la mise en place des accords fondateurs<br />

et de manière plus générale contraire à l’éthique<br />

des affaires. Or si la sanction est incertaine, c’est tout<br />

l’effet dissuasif qui est remis en cause avec en prime une<br />

insécurité juridique forte pour tous les pactes préexistants<br />

à ces mouvements jurisprudentiels. n<br />

1. CA Versailles 10 septembre 2009, n° 05-01.862.<br />

2. Cass. com., 7 décembre 2007.<br />

3. Cass. com., 24 novembre 2009, n° 08-21.369.<br />

4.Recueil Dalloz 2009 p 2924 note Alain Lienhard.<br />

5. Article L. 1331-2 du Code du travail : «Les amendes ou autres<br />

sanctions pécuniaires sont interdites.<br />

Toute disposition ou stipulation contraire est réputée non écrite».<br />

6. Droit des sociétés fév. 2010, commentaire Dorothée Gallois Cochet.<br />

7. Article 1592 du Code civil : «Il peut cependant être laissé à<br />

l’arbitrage d’un tiers ; si le tiers ne veut ou ne peut faire l’estimation,<br />

il n’y a point de vente.»<br />

8. Cass. soc., 20 octobre 2004, n° 02-41.860 ; Cass. soc., 2 février<br />

2006.<br />

L’ACTUALITÉ JURIDIQUE EN BREF<br />

Comment empêcher les actionnaires d’une catégorie d’actions de souscrire aux actions d’une<br />

autre catégorie dans le cadre d’une augmentation de capital ?<br />

Par Arnaud<br />

Langlais, avocat,<br />

<strong>DS</strong> <strong>Avocats</strong><br />

Les raisons qui peuvent<br />

pousser à la création de catégorie<br />

d’actions sont diverses<br />

et variées, droit d’information<br />

complémentaire, majorité<br />

renforcée, droits pécuniaire ou<br />

politique particulier, etc., mais<br />

toutes sont motivées par la<br />

volonté claire d’attacher des droits préférentiels à une catégorie d’action<br />

afin de répondre à des besoins précis.<br />

Aussi est-il très courant que, pour le maintien des équilibres sociaux,<br />

les associés ne souhaitent pas que le titulaire d’actions d’une catégorie<br />

puisse détenir des actions d’une autre catégorie.<br />

Comment donc empêcher les actionnaires d’une catégorie d’actions de<br />

souscrire aux actions d’une autre catégorie dans le cadre d’une augmentation<br />

de capital ? Ce point, simple en apparence, a cependant été soumis<br />

récemment à l’ANSA (Comité juridique du 7 mars 2012).<br />

En effet, lors d’une augmentation de capital, l’article L. 225-132 du Code<br />

de commerce prévoit que les actionnaires ont, proportionnellement au<br />

montant de leurs actions, un droit de préférence à la souscription des<br />

actions de numéraire émises pour réaliser une augmentation de capital.<br />

Ainsi, chacun des actionnaires pourrait souscrire des actions de l’une ou<br />

l’autre des catégories. Dans un tel cas, les équilibres sociaux pourraient<br />

être rompus ce qui pourrait aboutir à une remise en cause du pacte social.<br />

Plusieurs solutions ont été confirmées par l’ANSA récemment.<br />

La première serait de procéder à des augmentations de capital distinctes<br />

pour chaque catégorie d’actions avec suppression du droit préférentiel<br />

de souscription (« DPS ») au profit de personnes dénommées ou d’une<br />

catégorie de personnes.<br />

L’inconvénient de cette solution est que les bénéficiaires de la suppression<br />

du DPS seraient exclus du vote de cette résolution. Ainsi, les autres<br />

actionnaires voteraient seuls l’augmentation de capital réservée à ceux<br />

d’une autre catégorie.<br />

Par ailleurs, on comprend que les suppressions de DPS sont interdépendantes<br />

les unes des autres et que l’une ne saurait être votée sans que les<br />

autres le soient. Il est donc nécessaire de prévoir qu’une augmentation<br />

de capital ne sera effective que sous réserve de l’adoption des autres,<br />

l’ensemble formant un tout.<br />

Une autre solution serait de procéder à une augmentation de capital avec<br />

maintien du DPS et la mise en place de modalités d’échange et/ou de<br />

cession de ces droits entre actionnaires afin de maintenir l’équilibre entre<br />

catégorie d’actions.<br />

Quelle que soit la solution retenue, celle-ci devra donner lieu à des discussions<br />

et négociations préalables à la prise de décision, et sera d’autant<br />

plus simplifiée que le nombre de catégorie d’actions est réduit.<br />

26 <strong>Option</strong> Finance n° 1186 - Lundi 3 septembre 2012

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!